La liberté d`expression au Canada

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La liberté d`expression au Canada
La liberté d’expression au Canada
Note d’information, PEN International
PEN International, Koops Mill, 162-164 Abbey Street, London, SE1 2AN, ROYAUME-UNI
Tél : +44 2[SIC] 74 05 03 38 www.pen-international.org
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Octobre 2015
Synthèse
De manière générale, le Canada est considéré comme faisant partie des pays où les libertés individuelles sont le
mieux protégées au monde. Ce pays, qui fait état d’une longue histoire de défense et de promotion des droits
de l’Homme1, dispose d’une impressionnante boîte à outils – constitutionnels, législatifs, institutionnels –
consacrés à la protection des droits de la personne. En 1982, la Charte canadienne des droits et libertés a inscrit
dans la constitution nationale les libertés politiques et civiles, dont le droit à s’exprimer librement, la liberté de
la presse, la liberté de réunion pacifique et la liberté d’association. L’ordre judiciaire canadien est, en principe,
réputé être indépendant, professionnel, équilibré et ouvert aux questions touchant à la liberté d’expression. La
Constitution canadienne permet au juge d’abroger tout texte de loi qui irait en contredire les dispositions, y
inclus les droits et les libertés garantis par la Charte. Les droits et les libertés sont également protégés par la
législation relative aux droits de la personne appliquée aux échelles fédérale, provinciale et territoriale,
législation qui a vu la création de la Commission canadienne des droits de la personne et la mise en place de
tribunaux des droits de la personne, qui ont, l’une comme les autres, vocation à enquêter sur les plaintes pour
discrimination. Les différents échelons de gouvernement ont en outre créé des postes de médiateurs,
fonctionnaires chargés d’enquêter sur les plaintes concernant les services gouvernementaux et de promouvoir
l’accès à ces services. À l’échelle internationale, le Canada est partie à un certain nombre de conventions
internationales des droits de l’Homme, qu’il transpose sur son territoire sous forme de textes de lois et
règlements, politiques publiques et programmes, applicables et mis en œuvre à tous les échelons de son
administration publique.
Bien que le Canada dispose d’un cadre légal et institutionnel robuste en matière de protection des droits de
l’Homme, il semblerait qu’à certains égards, la liberté d’expression soit bel et bien mise à mal.
La présente note d’information se propose de faire un rapide état des lieux de la liberté d’expression au Canada,
articulé comme suit :
1. Voix critiques du gouvernement
2. La liberté de réunion pacifique et la réponse apportée par le gouvernement aux manifestations
pacifiques
3. L’accès à l’information
4. La loi antiterroriste, les mesures de sécurité et de surveillance
5. La diffamation, la protection des sources confidentielles, la propriété des médias, le blasphème et les
propos haineux
6. Les droits linguistiques
La présente note d’information entend attirer l’attention des lecteurs sur la lente érosion, ces dernières années,
du droit à s’exprimer librement au Canada – processus qui, bien que graduel, est en passe de déstabiliser les
fondements mêmes de la société canadienne et de rendre les citoyens canadiens toujours plus circonspects
quant à l’exercice de leur droit à s’exprimer librement. Cependant, cette évolution, certes alarmante, n’a rien
d’irréversible, si tant est que soient prises les mesures correctrices appropriées – en termes de politiques
publiques, de lois et de priorités de financements.
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La présente note d’information, préparée par PEN International à l’intention des délégués et autres parties
intéressées en vue du 81e Congrès annuel de PEN International, qui se déroulera à Québec, au Canada, du 13 au
16 octobre prochains, se propose de faire un rapide état des lieux de la liberté d’expression au Canada. Nous
invitons les lecteurs qui souhaiteraient en savoir davantage sur des questions liées aux droits de la personne
autres que la seule question de la liberté d’expression au Canada, à se reporter aux Observations finales du
Comité des droits de l’Homme des Nations Unies sur le sixième rapport périodique du Canada (Juillet 2015). La
présente note d’information a été produite grâce à l’appui des recherches effectuées par le centre PEN canadien
et le centre PEN du Québec.
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SOMMAIRE
Synthèse
2
Introduction
5
1. Voix critiques du gouvernement
6
1.1 Le contrôle des organismes de bienfaisance
6
1.2 Le bâillonnement du secteur public
7
2. La liberté de réunion pacifique et la réponse apportée par le gouvernement aux
manifestations pacifiques
8
3. L’accès à l’information
8
4. La loi antiterroriste, les mesures de sécurité et de surveillance
10
4.1 La loi antiterroriste
10
4.2 La surveillance
11
5. La diffamation, la protection des sources confidentielles, la propriété des médias, le
blasphème et les propos haineux
12
5.1 La diffamation
12
5.2 La protection des sources confidentielles
13
5.3 La propriété des médias
13
5.4 Le blasphème
14
5.5 Les lois anti-haine
14
6. Les droits linguistiques
15
6.1 Les droits des minorités linguistiques
15
6.2
15
Les droits linguistiques des populations indigènes
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7. Conclusion
16
Introduction
De manière générale, le Canada est considéré comme faisant partie des pays où les libertés individuelles sont le
mieux protégées au monde. Ce pays, qui fait état d’une longue histoire de défense et de promotion des droits
de l’Homme,2 dispose d’une impressionnante boîte à outils – constitutionnels, législatifs, institutionnels –
consacrés à la protection des droits de la personne. En 1982, la Charte canadienne des droits et libertés a inscrit
dans la constitution nationale les libertés politiques et civiles, dont le droit à s’exprimer librement, la liberté de
la presse, la liberté de réunion pacifique et la liberté d’association. L’ordre judiciaire canadien est, en principe,
réputé être indépendant, professionnel, équilibré et ouvert aux questions touchant à la liberté d’expression. La
Constitution canadienne permet au juge d’abroger tout texte de loi qui irait en contredire les dispositions, y
inclus les droits et les libertés garanties par la Charte. Les droits et les libertés sont également protégés par la
législation relative aux droits de la personne appliquée aux échelles fédérale, provinciale et territoriale,
législation qui a vu la création de la Commission canadienne des droits de la personne et la mise en place de
tribunaux des droits de la personne, qui ont, l’une comme les autres, vocation à enquêter sur les plaintes pour
discrimination. Les différents échelons de gouvernement ont en outre créé des postes de médiateurs,
fonctionnaires chargés d’enquêter sur les plaintes concernant les services gouvernementaux et de promouvoir
l’accès à ces services. À l’échelle internationale, le Canada est partie à un certain nombre de conventions
internationales des droits de l’Homme, qu’il transpose sur son territoire sous forme de textes de lois et
règlements, politiques publiques et programmes, applicables et mis en œuvre à tous les échelons de son
administration publique.
Bien que le Canada dispose d’un cadre légal et institutionnel robuste en matière de protection des droits de
l’Homme, il semblerait qu’à certains égards, la liberté d’expression soit bel et bien mise à mal.
La présente note d’information se propose de faire un rapide état des lieux de la liberté d’expression au Canada,
articulé comme suit :
7.
Voix critiques du gouvernement
8.
La liberté de réunion pacifique et la réponse apportée par le gouvernement aux manifestations
pacifiques
9.
L’accès à l’information
10.
La loi antiterroriste, les mesures de sécurité et de surveillance
11.
La diffamation, la protection des sources confidentielles, la propriété des médias, le blasphème et les
propos haineux
12.
Les droits linguistiques
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1. Voix critiques du gouvernement
En principe, le citoyen canadien peut critiquer son gouvernement en toute liberté, à l’échelon local comme à
l’échelon fédéral. Toutefois, depuis 2006, le gouvernement fédéral a pris certaines mesures qui mettent à mal
cette liberté, et il devient difficile, pour la société civile autant que pour les employés du secteur public, de
critiquer et/ou de mettre en cause publiquement l’action du gouvernement, en termes de loi comme de
politique publique. Ce qui ne laisse pas d’avoir des retombées graves sur le discours public au Canada.
1.1 Le contrôle des organismes de bienfaisance
Depuis 2012, le gouvernement fédéral canadien a chargé l’Agence du revenu du Canada (ARC) d’une mission de
contrôle, assortie d’un budget de 13 millions CAD, visant à vérifier que les organismes de bienfaisance
n’affectent pas plus de 10 % de leurs moyens à des « activités politiques ».3 Dans son sens le plus large, la
définition actuelle d’« activités politiques » va jusqu’à inclure les critiques de la politique gouvernementale ou
d’un candidat politique.4 Dans le cadre de cette mission, l’ARC a contrôlé 60 organismes de bienfaisance à des
fins de repérage d’activités politiques. Les organismes de bienfaisance enregistrés aux fins de la protection de
l’environnement (dont plusieurs n’avaient pas caché leur désapprobation de la montée en charge du raffinage et
du transport, par pipelines, des sables bitumeux) ont formé la cible de la première vague de contrôles, bientôt
suivis par les organisations à but non lucratif concernées par les questions de justice sociale et les droits de
l’Homme dans le monde, dont le centre PEN canadien.
L’ARC s’est refusée à fournir des informations d’une quelconque utilité sur les critères dont elle s’était servie
pour sélectionner ces 60 organismes de bienfaisance sur les quelque 100 000 organismes de bienfaisance actifs
au Canada. Allié à une définition vague d’« activités politiques », qui donne lieu à moult interprétations
aisément erronées, ce comportement de l’ARC a eu pour effet de nourrir l’incertitude quant aux vrais raisons de
ces contrôles – serait-il qu’ils aient pour objectif de faire taire la critique ? – et de faire courir une inquiétude
(chill) dans les rangs du secteur bénévole et associatif.5
Bon nombre d’organismes de bienfaisance ont opté pour la voie de la prudence, décidant de s’impliquer
désormais avec parcimonie dans des activités qu’il serait facile de taxer de « politiques » et, partant, d’éviter de
courir le risque de faire l’objet d’un contrôle et de se voir retirer un statut qui leur permet de délivrer des reçus
fiscaux à leurs donateurs. Aucun des 60 organismes contrôlés depuis 2012 à des fins d’activités politiques ne
s’est vu retirer son statut d’organisme de bienfaisance, mais la perspective d’un contrôle chronophage et
coûteux en moyens – sans oublier le retrait éventuel du statut – a, à elle seule, un effet dissuasif.6
L’ARC a néanmoins pris des mesures visant à favoriser la transparence : ainsi, la Mise à jour sur le Programme
des organismes de bienfaisance, parue pour la première fois en 2013, propose des statistiques annuelles sur les
contrôles à visée politique, des informations sur la manière dont les organismes de bienfaisance peuvent se
retrouver impliqués dans des activités politiques, et rapporte les conclusions des contrôles. L’ARC a également
mis en ligne une série de webinaires et un outil d’évaluation des activités politiques pour aider les organismes
de bienfaisance à déterminer s’ils se livrent à des activités considérées comme « politiques ». Cette initiative est
à saluer : toutefois, tant que l’ARC n’aura pas indiqué clairement quels sont les critères sur lesquels elle décide
de contrôler tel ou tel organisme de bienfaisance, ni affiné sa définition d’« activités politiques », le secteur
associatif et bénévole se gardera bien, dans son ensemble, de critiquer les politiques gouvernementales.
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En juillet 2015, le Conseil [anciennement « commission »] des droits de l’Homme des Nations Unies, qui est
chargé de veiller au respect du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, a publié ses observations
finales sur le sixième rapport canadien, indiquant qu’il s’inquiétait de la paralysie de l’action sociale d’une frange
importante de la société civile. Il a recommandé que l’état canadien prenne des mesures pour garantir que les
limites imposées aux actions de plaidoyer n’aillent pas inutilement restreindre l’action des organisations de la
société civile à statut d’organisme de bienfaisance qui s’attachent à défendre les droits de l’Homme.
1.2 Le bâillonnement du secteur public
Au Canada, les codes de conduite et les politiques de communication dont relèvent les fonctionnaires fédéraux
deviennent chaque jour plus restrictifs. Les détracteurs de cette tendance arguent d’une stratégie délibérée
visant à empêcher la publication d’informations qui iraient à l’encontre de la politique gouvernementale.7 La
politique de communication adoptée par le gouvernement fédéral en 2006 prescrit la manière et les
circonstances dans lesquelles un fonctionnaire peut communiquer avec les médias, et les différentes
autorisations requises préalablement à une telle communication.
Cette politique n’a pas manqué de produire tous ses effets : ainsi, en 2010, un chercheur du Ministère des
ressources naturelles canadiennes – Ressources Naturelles Canada – a été obligé de demander le feu vert du
cabinet de son ministre de tutelle avant de répondre aux questions d’un journaliste concernant ses travaux de
recherche sur des inondations survenues dans le Nord du Canada il y a plus de 13 000 ans. Sa demande lui a été
accordée … mais avec un tel retard que le journaliste avait depuis longtemps dépassé la date limite pour rendre
son article.8 Dans un certain nombre de cas, la lenteur observée par l’administration dès lors qu’il s’agit de
répondre à des demandes d’approbation a forcé les journalistes à se tourner vers des chercheurs et scientifiques
non canadiens pour être sûrs de pouvoir rendre à temps leurs papiers sur les développements scientifiques et
environnementaux au Canada.9 Des documents fuités par le Ministère de l’environnement canadien –
Environnement Canada – ont montré que la couverture médiatique des questions liées aux changements
climatiques avait diminué de 80 % depuis la mise en œuvre de cette politique.10
Une enquête menée en 2013 par l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada auprès de
scientifiques canadiens travaillant pour le gouvernement fédéral a révélé que 90 % d’entre eux ne pouvaient
s’exprimer librement dans les médias, et que 86 % pensaient qu’ils feraient l’objet de représailles de la part de
leur employeur s’ils disaient ce qu’ils pensaient réellement d’une politique dont ils jugeaient qu’elle allait à
l’encontre des intérêts des Canadiens.11 Le gouvernement fédéral n’a eu de cesse de nier qu’il interférait avec
les droits des scientifiques travaillant dans la fonction publique.12 Dans le même temps, le Code de conduite des
bibliothèques et archives Canada (BAC), adopté en 2013, précise que seuls les « porte-parole autorisés » sont
habilités à répondre à des demandes d’information sur la position des BAC en matière de politique publique.
Que les employés doivent demander l’autorisation de leur hiérarchie avant de se lancer dans de quelconques
activités « à haut risque », à savoir enseigner dans des collèges d’enseignement supérieur ou des universités, ou
encore assister et intervenir à des conférences.13 Ces politiques publiques sapent la transparence, font barrage à
l’accès à l’information scientifique, et rendent la tâche difficile à tout citoyen canadien qui souhaiterait
déterminer par lui-même l’impact de telle ou telle décision politique.
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2. La liberté de réunion pacifique et la
réponse apportée par le gouvernement aux
manifestations pacifiques
Bien que l’alinéa b) de l’article 2 de la Charte canadienne des droits et libertés garantisse la liberté de réunion
pacifique, plusieurs incidents tendent à indiquer que la protection conférée dans les textes au droit de
manifester publiquement se fissure.
Au cours du sommet du G20 de 2010, à Toronto (province de l’Ontario), les forces de police ont usé de force
déraisonnable pour contenir la foule des manifestants (« kettling » en anglais) et l’empêcher de manifester à sa
guise dans les rues du quartier des affaires, ont utilisé des balles en caoutchouc, et procédé à l’arrestation de
dizaines de manifestants hors tout mécanisme de supervision de la part des organismes gouvernementaux
concernés. Cinq ans plus tard, en dépit des nombreux récits, tous crédibles, faisant état de violences policières,
un seul officier de police a été mis en cause.14 La même année, les forces de police de Montréal ont utilisé des
gaz lacrymogènes, usé de force excessive et procédé à l’arrestation de dizaines de manifestants pour mettre un
terme à une manifestation d’étudiants.15 Plusieurs groupes de manifestants autochtones et des groupes de
défense de l’environnement ont également rapporté avoir été la cible de démonstrations de force excessive par
la police.16 En juillet 2015, le Comité des droits de l’Homme des Nations Unies a fait état de son inquiétude
quant à l’usage de force excessive par les forces de l’ordre dans le cadre de manifestations organisées aux
échelles fédérale et provinciale, et tout particulièrement lors des manifestations contre le pillage des terres
autochtones, des manifestations au sommet du G20 en 2010, et des manifestations étudiantes dans la province
du Québec en 2012. Il s’est également inquiété de ce que les plaintes déposées contre la police n’avaient pas
toujours fait l’objet d’une enquête, et que les condamnations étaient, au pire, indulgentes. Il a recommandé que
le Canada renforce ses efforts pour garantir que les allégations de mauvais traitements et de force excessive
formulées contre la police fassent sans attendre l’objet d’enquêtes impartiales, supervisées par des organes de
supervision indépendants et robustes disposant de moyens adéquats, et que les auteurs de ces agissements
allégués soient poursuivis et sanctionnés de manière appropriée.17
Le gouvernement fédéral a par ailleurs pris des mesures visant à conserver des fichiers sur les personnes qui
participent à des manifestations : en 2014, le Centre des opérations du gouvernement (COG) – organe chargé de
coordonner la réponse fédérale en cas d’urgence portant atteinte à la sécurité nationale – a demandé à ce que
l’ensemble des ministères de l’échelon fédéral dresse la liste complète de « toutes les manifestations dont [ils]
sav*aient+ qu’elles [allaient] avoir lieu dans [leur] zone géographique ou qui pourraient relever de [leurs]
compétences. »18 Selon les experts du renseignement, cette surveillance généralisée des Canadiens constitue
une infraction à la Charte des droits et libertés. Le contrôle sans pitié des manifestations pacifiques laisse à
penser que le gouvernement estime qu’elles mettent en danger la sécurité publique.
3. L’accès à l’information
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Bien que qualifiée de révolutionnaire en matière de transparence lorsqu’elle a été adoptée, en 1982, la Loi
canadienne sur l’accès à l’information (LAI) n’a été que rarement – et modestement – modifiée depuis, et ce en
dépit de la numérisation croissante des données, de l’avènement de l’Internet et des appels à révision de deux
commissaires canadiens de l’accès à l’information et de la protection de la vie privée. Résultat : le Canada est
aujourd’hui en retard sur un certain nombre de normes internationales relatives à l’accès à l’information.19
L’outil d’évaluation des systèmes nationaux d’accès à l’information, Right to Information Rating, place le Canada
à la 59e place au classement des 102 pays qui disposent de lois de ce type, classement qui repose sur le droit
d’accès, le champ d’application, les procédures de demande, les exceptions et les refus, les recours, les
sanctions et les protections.20
Le cadre canadien d’accès à l’information s’avère insuffisant à plusieurs égards. Premièrement, la Cour suprême
du Canada admet, certes, un droit constitutionnel à l’information, mais uniquement lorsque l’accès « s’avère
être une condition préalable nécessaire à une expression intelligible, qu’il n’empiète pas sur des privilèges
protégés, et qu’il est compatible avec la fonction de l’institution concernée. »21 Ce qui ne répond pas à des
normes internationales qui reconnaissent un droit à part entière à l’information, sujet à un nombre d’exceptions
très limité.
Deuxièmement, les exceptions prévues par la Loi sur l’accès à l’information sont trop larges, et limitent le champ
des informations que les pouvoirs publics sont tenus de divulguer. Cette divulgation obligatoire est en outre
soumise à diverses restrictions prévues dans d’autres textes.22 Contrairement aux meilleures pratiques
internationales, seules certaines exceptions peuvent être ignorées dès lors que les informations à divulguer sont
jugées servir l’intérêt général. La Commissaire à l’information, Suzanne LEGAULT, relevait que pour les années
2013 et 2014, seuls 21 % des demandes d’information avaient donné lieu à la communication des informations
demandées, contre 40 % en 1999 et 2000.23
Troisièmement, la loi LAI est trop laxiste quant à la prolongation du délai de traitement des demandes
d’information – 30 jours – qui n’est soumise à aucune limite dans le temps. La 8e édition annuelle de l’Enquête
nationale sur l’accès à l’information menée par l’initiative Journaux Canadiens, indique qu’en moyenne, en 2013,
les instances gouvernementales de l’échelon fédéral mettaient 52 jours à traiter les demandes d’information, et
pour 59 % d’entre elles, plus de 30 jours.
Et la liste ne fait que s’allonger : le champ d’application de la loi LAI est excessivement limité, les cabinets
ministériels, le système législatif et le système judiciaire y échappant.24 Ce texte donne toute discrétion aux
pouvoirs publics de facturer des frais excessifs aux personnes qui demandent à avoir accès à des documents,
ceci pour couvrir – supposément – les frais administratifs. Ces questions de [non-]réactivité et de [non-]
responsabilité sont exacerbées par le fait que le bureau de la Commissaire à l’information du Canada ne dispose
pas de pouvoirs d’injonction – là encore contrairement aux meilleures pratiques internationales – et doit se
contenter de faire des recommandations. Il n’a pas non plus compétence à entreprendre des actions de
promotion et de familiarisation au droit à l’information, laissant les Canadiens particulièrement démunis quant à
cette liberté fondamentale.25
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4. La loi antiterroriste, les mesures de
sécurité et de surveillance
Divers programmes de surveillance tentaculaires et une loi antiterroriste à la formulation vague ont également
contribué à l’érosion du droit à s’exprimer librement au Canada.
4.1 La loi antiterroriste
Le projet de loi C-51, adopté en mai 2015 et entré en vigueur le mois suivant sous l’appellation « Loi
antiterroriste 2015 », a introduit dans la législation canadienne des changements radicaux comme on n’en avait
plus vus depuis 2001. Et dont certains réduisent sans concession le droit à s’exprimer librement.
En premier lieu, cette nouvelle loi pénalise le fait de « préconiser » ou de « fomenter » la perpétration d’actes
terroristes, ce qui a pour effet de pénaliser des propos qui pourraient très bien n’avoir aucun lien avec des actes
de violence : aussi, quiconque peut être reconnu coupable, indépendamment de la commission, ou non, de tels
actes, et indépendamment de ce que le locuteur entend effectivement qu’un acte terroriste soit commis. Les
détracteurs de ce texte en soulignent le flou artistique en matière de formulation – voir notamment l’expression
« infractions de terrorisme en général » – qui laisse aux forces de l’ordre et du maintien de la sécurité nationale
une trop grande marge de manœuvre, et arrive à paralyser la liberté d’expression.
En deuxième lieu, cette loi antiterroriste permet au Service canadien du renseignement de sécurité de prendre
toutes mesures qu’il juge utile pour réduire les menaces « pour la sécurité du Canada », et entre autres les
menaces pour la stabilité économique et financière du pays ou les infrastructures critiques. Ce pouvoir de
réduction des menaces pourrait voir les autorités interférer dans des manifestations pacifiques, y compris dans
les manifestations des groupes de défense de l’environnement qui protestent contre les pipelines et dans celles
des groupes indépendantistes québécois, pour n’en citer que quelques-uns. Certains critiques soulignent la
disproportion entre, d’une part, l’absence totale d’obligations de reddition de compte, et, d’autre part, des
pouvoirs et sanctions étendus dont les populations et militants autochtones ont déjà eu à pâtir lors
d’affrontements avec les forces de l’ordre à l’occasion de manifestations contre l’exploitation outrancière des
ressources naturelles du pays.26
En troisième et dernier lieu, ce texte crée de nouveaux pouvoirs de police, dits de saisie et d’élimination de
« propagande terroriste », cette dernière étant définie comme « tout écrit, signe, représentation visible ou
enregistrement sonore qui préconise ou fomente la perpétration d’actes de terrorisme en général. » Étant
donné la généralité de l’expression « infractions de terrorisme en général », cette définition couvre de facto
toutes sortes de matériels et contenus, en ligne comme hors ligne. Dès qu’un juge estime qu’un matériel ou
contenu constitue une propagande terroriste, les forces de l’ordre peuvent actionner ces nouveaux pouvoirs et
exiger d’administrateurs informatiques, directement, qu’ils éliminent ce matériel ou contenu en ligne.27 Enfin,
les dispositions de ce texte qui confèrent aux agents des services frontaliers un pouvoir de saisie de
« propagande terroriste », ont d’ores et déjà donné lieu à de vives inquiétudes.28
Ce projet de loi a été très fortement controversé, et a fait l’objet de plusieurs pétitions et rallies avant d’être
néanmoins adopté, en mai 2015. À peine la loi était-elle entrée en vigueur, en juin 2015, que l’Association
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canadienne des libertés civiles et les Journalistes canadiens pour la liberté d’expression décidaient d’en
contester la constitutionnalité devant les tribunaux, faisant valoir que certaines dispositions constituaient une
violation de la Charte canadienne des droits et libertés, notamment l’article créant une nouvelle infraction
criminelle d’encouragement à perpétrer un attentat terroriste.
4.2 La surveillance
En 2013, Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté
d’opinion et d’expression écrivait que « [l+’ingérence indue dans la vie privée *pouvait+ limiter à la fois
directement et indirectement le libre développement et l'échange d’idées. »29 La surveillance au Canada est
devenue monnaie courante, de récentes révélations indiquant que les Canadiens et ressortissants d’autres pays
étaient la cible d’un certain nombre de programmes de surveillance qui relèvent à peine d’un quelconque
mécanisme de supervision ou de transparence. Le Centre de la sécurité des télécommunications (CST) canadien
rend compte au bureau du commissaire du CST uniquement, et n’est sinon contrôlé ni par l’ordre juridictionnel,
ni par une quelconque commission parlementaire, et encore moins par le pouvoir judiciaire.
Cette absence de supervision a permis au CST d’extraire des communications passées dans le pays un nombre
incalculable de métadonnées aux fins de les partager avec d’autres états, et de surveiller les téléchargements de
millions d’internautes dans le monde entier. Depuis le mois de septembre 2001, le CST surveille les
communications des Canadiens dans le but d’identifier des menaces potentielles pour la sécurité.30 Le
programme gouvernemental de surveillance des métadonnées, censé à l’origine se cantonner aux
communications étrangères, permet en fait au CST de recueillir et d’analyser les métadonnées de toutes les
conversations et activités en ligne de la population canadienne. Même s’il n’est pas autorisé à intercepter ces
communications, le CST génère des données qui contiennent des informations personnelles suffisantes pour
permettre aux services de police canadiens d’en user à loisir, surtout si l’on considère que le CST n’a de comptes
à rendre à aucune instance de justice. Il est toutefois autorisé à intercepter toute communication qui présente
un lien avec l’étranger.31 Ce programme a été reconduit par arrêté ministériel en 2011, et ce en dépit des vives
inquiétudes exprimées en 2008 par le commissaire du CST de l’époque, qui déclarait : « Les caractéristiques des
technologies de la communication contemporaines signifient que l’interception de communications par le CST
risquera dans le même temps de le voir suivre des communications d’ordre privé entre citoyens canadiens. »
Cette absence de supervision a également permis aux forces de l’ordre de transmettre des demandes
d‘informations directement aux fournisseurs de services Internet (ISP) sans mandat.32 En 2014, la commissaire à
la protection de la vie privée, Chantal BERNIER, a révélé que les ISP avaient communiqué une quantité
considérable de données au gouvernement fédéral, ISP qu’elle priait instamment d’être plus transparents sur
cette transmission de données.33 Au mois de juin de la même année, la Cour suprême du Canada a interdit aux
ISP de transmettre sans mandat aux forces de l’ordre les données à caractère personnel de leurs clients.34 La
Cour a rappelé l’importance du droit à la vie privée, et l’obligation pour la police d’obtenir un mandat, excepté
dans des circonstances exceptionnelles.35
En 2014, les documents fuités par le lanceur d’alerte américain, Edward SNOWDEN, ont révélé que le CST
utilisait les informations recueillies auprès des services en ligne gratuits des aéroports canadiens pour tracer les
appareils sans fil des passagers pendant plusieurs jours après qu’ils avaient eu quitté le terminal.36 Ces
documents ont également confirmé l’existence de l’accord de partage d’informations passé entre le CST et
l’Agence du renseignement des États-Unis (National Security Agency – NSA), permettant aux deux agences de
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contourner les dispositions du droit qui interdisent à un pays d’espionner ses propres ressortissants, chacune
espionnant pour le compte de l’autre sur le territoire non accessible.37
Plus récemment, en janvier 2015, ces mêmes documents ont révélé que le CST contrôlait le téléchargement et la
mise en ligne de contenu par des millions d’internautes dans le monde entier. Connue sous le nom de
« LÉVITATION », cette opération permettait d’analyser jusqu’à 15 millions de fichiers téléchargés par jour.38 Le
CST peut trouver une adresse IP particulière à l’aide d’outils fournis par le service de renseignement et de
sécurité britannique (Government Communications Headquarters –GCHQ), suivre à la trace l’activité en ligne des
utilisateurs du site, voire même relier l’adresse IP à un profil Facebook ou Google particulier. Sur les 15 millions
de fichiers recueillis chaque jour, environ 350 sont considérés « intéressants ».39
En janvier 2014, le président des États-Unis, Barack OBAMA, a annoncé, dans une allocution publique largement
diffusée dans les médias, qu’à la suite des révélations d’Edward SNOWDEN, la NSA allait être réformée en
profondeur. Le gouvernement canadien quant à lui n’a fait montre d’aucune velléité de rendre le CST plus
transparent et plus responsable. Bien pire, il continue d’insister que le CST ne cible pas les citoyens canadiens, ce
que d’ailleurs lui interdit la loi. En fait, le projet de loi C-51 confère au CST des pouvoirs considérablement
élargis, et lui permet d’accéder aux informations recueillies par d’autres agences et organismes
gouvernementaux, y inclus l’Agence du revenu du Canada et le Ministère de la Santé, Santé Canada.
5. La diffamation, la protection des sources
confidentielles, la propriété des médias, le
blasphème et les propos haineux
5.1 La diffamation
En 2012, le Comité des droits de l’Homme des Nations Unies a jugé que la pénalisation de la diffamation violait
l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.40 Au Canada, même si les accusations de
diffamation sont rares et que les plaintes pour diffamation sont presque toutes portées devant les juridictions
civiles, la diffamation est toujours une infraction pénale, passible d’une peine d’emprisonnement pouvant aller
jusqu’à cinq ans.
Comme dans nombre de pays, les lois en matière de diffamation civile permettent aux riches et aux puissants
d’engager des poursuites « stratégiques » contre la mobilisation publique (dites « Strategic Lawsuits Against
Public Participation » – SLAPP), sorte de plaintes frivoles déposées pour faire taire la critique. Un texte « antiSLAPP » en cours d’élaboration est actuellement en deuxième lecture devant le parlement de la province de
l’Ontario, le Québec étant la seule province à avoir d’ores et déjà adopté une loi dans ce sens. Dans les autres
provinces canadiennes, la crainte d’un « procès stratégique » a un effet dissuasif certain sur la liberté
d’expression, les coûts de procédure pouvant être exorbitants. Ce qui paralyse littéralement toute critique
légitime du monde des entreprises et du business sur la quasi-totalité du territoire canadien.
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Jusqu’en 2009, les moyens de défense dans les affaires de diffamation étaient au nombre de quatre : vérité ou
justification, privilège absolu, privilège qualifié, commentaire loyal.41 Puis, dans un arrêt historique, la Cour
suprême du Canada (CSC) a créé un cinquième moyen de défense : celui de « journalisme responsable ».42 Ce
moyen de défense – invoquant la communication responsable d’informations dans l’intérêt public (ou général) –
permet aux journalistes de parler haut et fort de questions d’intérêt public, aussi longtemps qu’ils procèdent à
des vérifications raisonnables quant à des éléments potentiellement diffamatoires. Contrairement aux autres
moyens de défense à la diffamation, la communication responsable concernant les questions d’intérêt public
reconnaît l’importance du journalisme dans l’intérêt général et permet à un journaliste de rendre compte
d’allégations – même si elles s’avèrent, à terme, ne pas être fondées – dès lors qu’elles visent une actualité
urgente, grave et importante pour le débat public, que le journaliste a fait appel à des sources fiables, et qu’il a
déployé des efforts suffisants pour faire un rapport équilibré qui tienne compte des différents points de vue.43
5.2 La protection des sources confidentielles
Actuellement, la norme de confidentialité accordée aux journalistes par le droit canadien n’est pas suffisamment
élevée pour leur garantir le respect de la confidentialité de leurs sources. S’agissant des questions d’intérêt
public notamment, les sources confidentielles jouent un rôle clé en cela qu’elles permettent aux journalistes de
disposer d’informations auxquelles ils n’auraient sinon pas accès.44 Le droit en la matière repose plus sur
l’interprétation qu’en font les juges que sur ses dispositions et, partant, les affaires sont tranchées au cas par
cas. En 2010, la Cour suprême du Canada a statué que les journalistes ne jouissaient pas d’un droit
constitutionnel à la protection de leurs sources, pas plus qu’ils ne bénéficiaient d’une protection qui leur
reviendrait de plein droit au regard de leur profession. La Cour suprême a préféré se tourner vers un critère en
quatre volets pour déterminer le privilège des sources : 1) les communications doivent avoir été transmises
confidentiellement avec l’assurance que l’identité de la source ne serait pas divulguée ; 2) le caractère
confidentiel doit être essentiel aux rapports dans le cadre desquels la communication est transmise ; 3) les
rapports doivent être des rapports qui, dans l’intérêt public, devraient être « entretenus assidûment » ; et 4) si
toutes ces exigences sont remplies, le tribunal doit déterminer si, dans l’affaire qui lui est soumise, l’intérêt
public que l’on sert en respectant la confidentialité de la source l’emporte sur l’intérêt public à la découverte de
la vérité45. Par conséquent les journalistes ne peuvent se voir donner l’assurance absolue que l’identité de leurs
sources sera tenue confidentielle.46
5.3 La propriété des médias
Au Canada, cinq grandes sociétés se partagent la propriété des médias : Bell Canada, Shaw, Rogers, Quebecor
Media et Telus. Cette maigre diversité a pour effet de réduire grandement l’accès du public à la multitude de
points de vue et de perspectives sur des questions qui intéressent le débat public. En juin 2006, une étude
commandée par le Sénat sur les médias d’information canadiens a fait ressortir qu’une telle concentration de
propriété, axée sur la réduction des coûts et la centralisation, nuisait à la diversité des nouvelles et analyses
offertes aux Canadiens.47
Les mesures de réduction des coûts prises à la suite des diverses opérations de fusion-acquisition dans ce
secteur ont vu la fermeture de nombreux bureaux de presse, tant aux échelles provinciale, nationale
qu’internationale.48 Résultat : la couverture médiatique des évènements reste générale et n’a pas de lien avec le
contexte local, ce qui n’incite pas le public à s’impliquer dans des questions importantes. Les agences de presse
ont quant à elles fermé leurs bureaux étrangers. Le rapport présenté au comité sénatorial rend compte d’un
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argument selon lequel le fait de maintenir des journalistes canadiens sur le terrain *à l’étranger+ « garantit que
le gouvernement et ses agences n'agissent pas à l'étranger dans un unanimisme que les contribuables ne
toléreraient jamais chez eux », et évite l’absence de prise de responsabilité qui affecte la qualité du débat public
aujourd’hui.49
La concentration des médias canadiens s’accompagne d’un autre corollaire : la centralisation des groupes de
médias canadiens dans les grandes métropoles. Selon les arguments présentés au comité sénatorial, cette
centralisation nuit à la diversité des sources d’information et ignore les besoins en information, divers et variés,
de nombreux citoyens canadiens.50
5.4 Le blasphème
Au Canada, le libelle blasphématoire demeure un délit, passible d’une peine d’emprisonnement pouvant aller
jusqu’à deux ans.51 Le code criminel canadien dispose, au 3e alinéa de son article 296, que « Nul ne peut être
déclaré coupable d’une infraction visée au présent article pour avoir exprimé de bonne foi et dans un langage
convenable, ou cherché à établir par des arguments employés de bonne foi et communiqués dans un langage
convenable, une opinion sur un sujet religieux ». Personne n’a été poursuivi au titre de cet article depuis 193652,
et cette disposition, de facto, est tombée en désuétude. Les critiques s’accordent à dire toutefois qu’il serait bon
de la supprimer du code criminel afin de mettre un terme à l’hypocrisie dont fait preuve le Canada lorsqu’il s’en
va critiquer des pays qui invoquent leurs dispositions sur le blasphème ou l’apostasie pour faire taire la
dissidence.
5.5 Les lois anti-haine
Le Canada a, en droit international, une obligation de légiférer contre les propos haineux qui « constitue[nt] une
incitation à la discrimination, à l'hostilité ou à la violence [et sont] interdit[s] par la loi. »53 Les lois anti-haine
adoptées par le Canada intègrent des provisions du code criminel et de la législation relative aux droits de la
personne à l’échelle provinciale. Les appels à la haine font rarement l’objet de poursuites en raison de ce que la
charge de la preuve est très lourde, et que les moyens de défense admissibles sont relativement importants.54
Cependant, les dispositions liées à la fois aux droits de l’Homme et aux appels à la haine admettent un nombre
de moyens de défense moindre, ce qui rend la tâche plus difficile aux accusés qui espèrent s’en tirer à bon
compte. Selon un certain nombre de commentateurs, ceci fait des dispositions concernant les appels à la haine
de la Loi relative aux droits de la personne un instrument de censure peu efficace.55
En 2009, le Tribunal canadien des droits de la personne a jugé que l’article 13 de la Loi canadienne sur les droits
de la personne – qui estimait que le fait de recourir à des télécommunications « pour aborder ou faire aborder
des questions susceptibles d’exposer à la haine ou au mépris des personnes » était un acte discriminatoire –,
violait la Charte des droits et libertés. Une modification apportée à ce texte en 1998 a permis à la Commission
des droits de l’Homme canadienne d’imposer des peines d’amende atteignant 10 000 CAD, et d’accorder des
dommages et intérêts atteignant 20 000 CAD. Le Tribunal a estimé que l’article était inconstitutionnel au motif
que les sanctions pécuniaires rendaient nulle et non avenue l’intention de cette loi.56
En juin 2014, bien que la Cour d’appel fédérale ait jugé, quelques mois auparavant, qu’il ne portait pas atteinte à
la liberté d’expression, le gouvernement fédéral a abrogé l’article 13.57 Ce qui lui a attiré les foudres des avocats
spécialisés dans les questions des droits de l’Homme et de l’Association du barreau canadien, pour qui cette
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abrogation ne manquera pas de voir la prolifération de propos haineux sur l’Internet.58 Bien qu’une telle
abrogation annonce une évolution dans le sens de la fin du recours quasi-systématique aux dispositions antiappels à la haine à des fins de censure, la latitude d’interprétation dont jouit le juge et la législation provinciale
relative aux droits de la personne permettent toujours d’imposer des peines anti-haine pour étouffer les voix
controversées.
6. Les droits linguistiques
6.1 Les droits des minorités linguistiques
À l’échelle fédérale, la protection des droits des minorités de langues officielles est inscrite dans la Constitution,
dans la Charte canadienne des droits et libertés, et les différentes dispositions adoptées par les provinces au
titre de la Loi concernant le statut et l’usage des langues officielles du Canada. Ces droits concernent les citoyens
canadiens « dont la première langue apprise et encore comprise est celle de la minorité francophone ou
anglophone de la province où ils résident ».59 L’article 16 de la Charte stipule que le français et l’anglais sont les
deux langues officielles du Canada, et qu’elles ont un statut et des droits et privilèges égaux. Les droits à
l’éducation dans la langue maternelle conférés par l’article 23 jouent également un rôle clé dans la protection
des droits des minorités de langues officielles.
Ces dispositions de la Charte, elle-même incorporée dans la Loi constitutionnelle de 1982, assurent à tous les
citoyens canadiens, sur l’ensemble du territoire du Canada, une protection élémentaire, indépendamment de ce
que prévoient les différents textes provinciaux ; toutefois, la restriction de ces droits est tolérée par les
dispositions de l’article 1 de la Charte, et « *…+ par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables
*…+ ». Les provinces sont loisibles d’adopter des textes visant à promouvoir l’une ou l’autre de ces deux langues,
comme l’a fait le Québec en adoptant une Charte de la langue française60, dont les détracteurs, tout en
reconnaissant la volonté de protéger un patrimoine culturel unique, font valoir qu’elle nuit aux droits des
langues minoritaires.
6.2
Les droits linguistiques des populations indigènes
Les langues indigènes sont en déclin au Canada, et nombre d’entre elles sont considérées être menacées.61
Selon l’enquête nationale auprès des ménages de 2011, seuls 17 % des personnes interrogées se considérant
comme autochtones étaient capables de conduire une conversation dans leur langue d’origine, soit 4 % de
moins qu’en 2006.62
Le Canada n’a adopté aucune disposition – dans sa Constitution, sa Charte ou autre instrument fédéral –
concernant les droits linguistiques des populations indigènes, et les langues indigènes ne sont pas reconnues
comme étant des « langues fondatrices ». Les mesures destinées à préserver les langues indigènes sont très
localisées, et c’est aux communautés parlant ces langues qu’il incombe de concevoir et mettre en œuvre ces
mesures, le plus souvent sans financements adéquats.
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Bien qu’il n’existe aucun texte conférant aux organisations indigènes le droit d’éduquer les enfants dans leur
langue, le gouvernement fédéral a toutefois accordé une certaine autonomie à cet égard aux écoles situées dans
les réserves. Ce qui, cependant, est loin de créer un droit linguistique opposable pour les communautés
indigènes, et ne permet pas non plus aux enfants indigènes qui ne vivent pas dans une réserve d’avoir accès à un
enseignement dans leur langue, et, partant, ne constitue pas une obligation pour le gouvernement fédéral de
financer un enseignement en langues indigènes. 63
En 1998, le gouvernement fédéral a mis en place une Initiative des langues autochtones, programme destiné à
enrayer le déclin des langues indigènes au Canada. Cette initiative finance les projets communautaires qui
soutiennent la « préservation et la revitalisation des langues autochtones », mais uniquement à l’échelle d’une
communauté.64 Depuis 2012, le gouvernement canadien a réduit cette enveloppe de 60 millions CAD, ce qui
rend la tâche ardue pour les organisations et les communautés autochtones qui tentent de préserver leur
culture et leur patrimoine.65 En outre, depuis 2010, le ministère Affaires autochtones et développement du Nord
Canada n’a pas tenu sa promesse d’octroyer 1 milliard CAD aux besoins en couverture sociale de ces
communautés.66 Il va sans dire que ces coupes sombres dans les budgets alloués impactent fortement sur
l’éducation, les services de sécurité sociale et l’infrastructure des communautés autochtones.
7. Conclusion
Le droit à liberté d’expression au Canada est protégé par nombre de dispositions constitutionnelles, législatives
et institutionnelles, et cimenté par des années de jurisprudence et de débat public. Un certain nombre
d’avancées cruciales ont été faites en matière de libre expression, y inclus l’abrogation de la disposition relative
aux propos haineux de la Loi canadienne sur les droits de la personne et l’admissibilité d’un nouveau moyen de
défense dans les affaires de diffamation, dit « de journalisme responsable ». De manière générale toutefois, le
Canada assiste depuis plusieurs années à l’érosion du droit à s’exprimer librement – processus qui, bien que
graduel, est en passe de déstabiliser les fondements mêmes de la société canadienne et de rendre les citoyens
canadiens toujours plus circonspects quant à l’exercice de leur droit à s’exprimer librement.
Cependant, cette évolution, certes alarmante, n’a rien d’irréversible : les politiques publiques, les lois et les
priorités de financements exposées dans la présente note d’information peuvent être corrigées. Le pays dispose
d’un système judiciaire robuste et indépendant, et le souvenir d’un Canada plus jeune, plus libre, plus fougueux,
est encore suffisamment vif dans les mémoires pour servir de modèle et conduire le changement. Il fut un
temps où les pays qui peinent à mettre en place des institutions véritablement démocratiques louchaient avec
envie vers le Canada : est-il trop tard pour que le pays se reprenne et serve, à nouveau, et de nouveau,
d’exemple au monde ?
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1
Freedom House. (2015). Freedom in the World: Canada. Publié (en anglais) sur https://freedomhouse.org/report/freedomworld/2015/canada#.VeYgZdNVhBd
2
Freedom House. (2015). Freedom in the World: Canada. Publié (en anglais) sur https://freedomhouse.org/report/freedomworld/2015/canada#.VeYgZdNVhBd
3
Agence du revenu du Canada, « Les organismes de bienfaisance et les activités politiques » (Budget 2012). http://www.cra-arc.gc.ca/chrtsgvng/chrts/cmmnctn/pltcl-ctvts/pltclctvts-dts-fra.html
4
Ibid.
5
Elizabeth RENZETTIi. “Silence of the Charities”, Article paru dans The Globe and Mail (Toronto), lundi 20 avril 2015.
http://www.theglobeandmail.com/globe-debate/silence-of-the-charities/article24025714/
6
Sukanya PILLAI, Brenda McPHAIL. “Canadian Civil LIberties Association: Report to the UN Human Rights Committee” [Rapport parallèle de
l’Association canadienne des libertés civiles au Comité des droits de l’Homme des Nations Unies] (en anglais), Juin 2015. https://ccla.org/cclanewsite/wpcontent/uploads/2015/07/CCLA-UN-Report.pdf , 22.
7
Voices-Voix. « Démantèlement de la démocratie : étouffer le débat et la dissidence au Canada », 2015, http://voicesvoix.ca/fr/document/demantelement-de-la-democratie-etouffer-le-debat-et-la-dissidence-au-canada, p.20
8
Althea MANASAN. “FAQ: The Issues Around Muzzling Government Scientists”, CBC News, 20 mai 2015, http://www.cbc.ca/news/technology/faq-theissues-around-muzzling-government-scientists-1.3079537.
9
Tom SPEARS. “Canadian Bureaucracy and a Joint Study with NASA” (en anglais), Ottawa Citizen, 15 avril 2012.
http://www.ottawacitizen.com/technology/Canadian+bureaucracy+joint+study+with+NASA/6493201/story.html.
10
Voices-Voix. « Démantèlement de la démocratie : étouffer le débat et la dissidence au Canada », 2015, http://voicesvoix.ca/fr/document/demantelement-de-la-democratie-etouffer-le-debat-et-la-dissidence-au-canada, p.33
11
Institut professionnel de la fonction publique du Canada. (en anglais) “The Big Chill, Silencing Public Interest Science, A Survey” (2013)
http://www.pipsc.ca/portal/page/portal/website/issues/science/bigchill.
12
Althea MANASAN. “FAQ: The Issues Around Muzzling Government Scientists” (en anglais), CBC News, 20 mai 2015,
http://www.cbc.ca/news/technology/faq-the-issues-around-muzzling-government-scientists-1.3079537.
13
Bibliothèques et archives Canada – Code de Conduite : valeurs et éthique, 21 mai 2015, http://www.bac-lac.gc.ca/fra/a-notre-sujet/Pages/codeconduite-valeures-ethiques.aspx
14
Alysha HASHAM. “No Jail for Toronto Police Officer Convicted of G20 Assault”, article paru dans The Star (Toronto) (en anglais), 29 janvier 2015,
http://www.thestar.com/news/crime/2015/01/29/no-jail-for-toronto-police-officer-convicted-of-g20-assault.html.
15
Association canadienne des libertés civiles. “Take Back the Streets” (en anglais uniquement), octobre 2013, https://ccla.org/cclanewsite/wpcontent/uploads/2015/02/Take-Back-the-Streets-Full-Report-English.pdf, 16.
16
Sukanya PILLAI, Brenda McPHAIL. “Canadian Civil LIberties Association: Report to the UN Human Rights Committee”, [Rapport parallèle de l
Association canadienne des libertés civiles au Comité des droits de l’Homme des Nations Unies] (en anglais), juin 2015. https://ccla.org/cclanewsite/wpcontent/uploads/2015/07/CCLA-UN-Report.pdf.
17
Comité des droits de l’Homme des Nations Unies. « Observations finales concernant le sixième rapport périodique du Canada », juillet 2015.
http://daccess-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G15/179/99/PDF/G1517999.pdf?OpenElement
18
Association canadienne des libertés civiles. “Take Back the Streets” (en anglais uniquement), octobre 2013, https://ccla.org/cclanewsite/wpcontent/uploads/2015/02/Take-Back-the-Streets-Full-Report-English.pdf, 22.
19
Centre for Law and Democracy, Canadian Journalists for Free Expression, Lawyers’ Rights Watch Canada, BC Freedom of Information and Privacy
Association, PEN Canada. Rapport parallèle au 16e examen périodique universel de la situation de la liberté d’expression au Canada (en anglais) (2012), page
5
20
Notation mondiale des systèmes d’accès { l’information - Right to Information Rating (en anglais). http://www.rtirating.org/view_country?country_name=Canada.
PEN International, Koops Mill, 162-164 Abbey Street, London, SE1 2AN, ROYAUME-UNI
Tél : +44 (0)20 74 05 03 38 www.pen-international.org
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21
Centre for Law and Democracy, Canadian Journalists for Free Expression, Lawyers’ Rights Watch Canada, BC Freedom of Information and Privacy
Association, PEN Canada. Rapport parallèle au 16e examen périodique universel de la situation de la liberté d’expression au Canada (en anglais) (2012), page
5
22
Ministère de la Justice. « Renforcer la Loi sur l’accès { l’information », 7 janvier 2015. http://www.justice.gc.ca/fra/pr-rp/sjc-csj/aiprp-atip/lai-atia/p5.html
23
Voices-Voix. « Démantèlement de la démocratie : étouffer le débat et la dissidence au Canada », 2015, http://voicesvoix.ca/fr/document/demantelement-de-la-democratie-etouffer-le-debat-et-la-dissidence-au-canada, p.34
24
Toby MENDEL. “The Human Right Canadians are Way Behind On”, (en anglais), 14 octobre 2012, http://www.huffingtonpost.ca/toby-mendel/accessto-information-canada_b_1964197.html.
25
Ibid.
26
Kent ROACH, Craig FORCESE. “Bill C-51 Moves us One Step Closer to the End of Privacy”, article paru dans The Star (Toronto) (en anglais), 17 février
2015. http://www.thestar.com/opinion/commentary/2015/02/17/bill-c-51-moves-us-one-step-closer-to-the-end-of-privacy.html.
27
Voices-Voix. « Projet de loi C-51 : Loi antiterroriste 2015 » (en anglais uniquement), 5 mars 2015. http://voices-voix.ca/en/facts/profile/bill-c-51-antiterrorism-act-2015
28
Steven CHASE. “Anti-Terror Bill Would Widen Powers for Canadian Border Guards”, The Globe and Mail (Toronto) (en anglais), 23 février 2015.
http://www.theglobeandmail.com/news/politics/anti-terror-bill-would-widen-powers-for-canadian-border-guards/article23170072/
29
Frank La RUE. « Rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection du droit { la liberté d’opinion et d’expression » (en
anglais, espagnol, arabe, chinois et russe), 17 avril 2013
http://www.ohchr.org/Documents/HRBodies/HRCouncil/RegularSession/Session23/A.HRC.23.40_EN.pdf, page 7.
30
Conseil international du Canada – Open Canada. « Canadian Surveillance 101 » (en anglais), 19 août 2013 http://opencanada.org/features/the-thinktank/comments/canadian-surveillance-101/
31
CBC News. “CSE: What do we know about Canada's eavesdropping agency?” (en anglais), CBC News, 14 juin 2013. http://www.cbc.ca/news/canada/csewhat-do-we-know-about-canada-s-eavesdropping-agency-1.1400396.
32
Christopher PARSONS. “Responding to the Crisis in Canadian Telecommunications” (en anglais), 1er mai 2014.
https://citizenlab.org/2014/05/responding-crisis-canadian-telecommunications.
33
CBC News Canada, “Telecoms refuse to release information on private data given to feds” (en anglais), 29 avril 2014.
http://www.cbc.ca/news/politics/telecoms-refuse-to-release-information-on-private-data-given-to-feds-1.2626286.
34
CBC News. “Internet Users’ Privacy Upheld by Canada’s Top Court”, CBC News (en anglais), 13 juin 2014. http://www.cbc.ca/news/technology/internetusers-privacy-upheld-by-canada-s-top-court-1.2673823.
35
Michael GEIST. “Supreme Court Delivers Huge Victory for Internet Privacy & Blows Away Government Plans for Reform” (en anglais), 13 juin 2014,
http://www.michaelgeist.ca/2014/06/scc-spencer-decision/.
36
Greg WESTON, Glen GREENWALD, Ryan GALLAGHER. “ CSEC Used Airport Wi-fi to Track Canadian Travellers: Edward Snowden Documents” (en
anglais), CBS News, 30 janvier 2014. http://www.cbc.ca/news/politics/csec-used-airport-wi-fi-to-track-canadian-travellers-edward-snowden-documents1.2517881.
37
Ibid.
38
Ryan GALLAGHER, Glen GREENWALD. “Canada Casts Global Surveillance Dragnet over File Downloads” (en anglais), 28 janvier 2015.
https://firstlook.org/theintercept/2015/01/28/canada-cse-levitation-mass-surveillance/.
39
Ibid.
40
Frank La RUE. « Rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection du droit { la liberté d’opinion et d’expression » (en
anglais, espagnol, arabe, chinois et russe), 17 avril 2013.
http://www.ohchr.org/Documents/HRBodies/HRCouncil/RegularSession/Session23/A.HRC.23.40_EN.pdf, 15.
41
Association du barreau canadien, Division de Colombie britannique. “ Defamation: Libel and Slander” (en anglais), janvier 2014.
http://www.cbabc.org/For-the-Public/Dial-A-Law/Scripts/Your-Rights/240.
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Arrêt de la Cour suprême du Canada dans l’affaire GRANT c. TORSTAR CORP. [2009] 3 RCS 640, para 98. https://scc-csc.lexum.com/scc-csc/scccsc/fr/item/7837/index.do
43
Association du barreau canadien, Division de Colombie britannique. “ Defamation: Libel and Slander” (en anglais), janvier 2014.
http://www.cbabc.org/For-the-Public/Dial-A-Law/Scripts/Your-Rights/240.
44
Kathy ENGLISH. “Why Journalists Need Confidential Sources”, Article paru dans The Star (Toronto) (en anglais), 18 juillet 2014.
http://www.thestar.com/opinion/public_editor/2014/07/18/why_journalists_need_confidential_sources_public_editor.html
45
Adam BADARI. “R. v. National Post (2010): Do Journalists Have a Right to Protect Sources?” (en anglais), 18 mai 2010.
http://ualawccsprod.srv.ualberta.ca/ccs/index.php/constitutional-issues/the-charter/fundamental-freedoms-section-2/678-r-v-national-post-2010-dojournalists-have-a-right-to-protect-sources
46
National Post, Matthew FRASER et Andrew McINTOSH c. Sa Majesté la Reine [2010] 1 SCR 477 (version bilingue anglais-français)
http://www.canlii.org/en/ca/scc/doc/2010/2010scc16/2010scc16.pdf.
47
Comité sénatorial permanent des transports et des communications. « Rapport final sur les médias d’information canadiens », juin 2006.
http://www.parl.gc.ca/Content/SEN/Committee/391/TRAN/rep/repfinjun06vol1-f.htm
48
Ibid.
49
Ibid.
50
Ibid.
51
Code criminel canadien, 23 juillet 2015, article 296, http://laws-lois.justice.gc.ca/fra/lois/c-46/page-161.html
52
Joyce ARTHUR. “Time to Repeal Canada’s Blasphemy Law” (en anglais) sur Rabble, 6 mars 2015. http://rabble.ca/columnists/2015/03/time-to-repealcanadas-blasphemy-law.
53
Pacte international relative aux droits civiques et politiques, article 20(2), 23 mars 1976. http://www.ohchr.org/fr/professionalinterest/pages/ccpr.aspx
54
Index on Censorship. “Hate Speech Laws in Canada: Two Steps Forward, One Step Back” (en anglais), 18 juillet 2013.
https://www.indexoncensorship.org/2013/07/guest-post-hate-speech-laws-in-canada-one-step-back-two-steps-forward/.
55
Ibid.
56
Joseph BREAN. “Hate Speech Law Unconstitutional: Rights Tribunal”, (en anglais) 2 septembre 2009
http://www.nationalpost.com/news/Hate+speech+unconstitutional+rights+tribunal/1954734/story.html.
57
Joseph BREAN. “Court Finds Internet Hate Speech Law Section 13 to be Constitutionally Valid, Doesn’t Violate Freedom of Expression” (en anglais), 2
février 2014. http://news.nationalpost.com/news/canada/court-finds-internet-hate-speech-law-section-13-to-be-constitutionally-valid-doesnt-violatefreedom-of-expression.
58
Ibid.
59
Charte canadienne des droits et libertés. « Article 23 – Droit { l’instruction dans la langue de minorité », 1982.
http://www.pch.gc.ca/fra/1356640308088/1356640399461
60
Université d’Ottawa. « La nature du bilinguisme canadien: les droits individuels et les droits collectifs », https://salic.uottawa.ca/?q=bi_canadien
61
« Indigènes » est un terme global qui couvre les communautés des Premières Nations, les autochtones, et les Inuits. Le débat est loin d’être terminé
entre ceux qui préconisent l’emploi du terme « indigène » et ceux dont la faveur va au terme « autochtone ». De manière générale, ces communautés
préfèrent le terme « indigène » .
62
Stéphane LANGLOIS. « Les peoples autochtones et la langue », Statistique Canada, 14 janvier 2014. http://www12.statcan.gc.ca/nhs-enm/2011/assa/99-011-x/99-011-x2011003_1-fra.cfm
63
David LEITCH. “Canada’s Native Languages: The Right of First Nations to Educate their Children in their Own Languages”, Constitutional Forum
Constitutionnel. Vol. 15, no. 3, 2006. http://www.cba.org/CBA/niagara2010/PDF/4.4%20Leitch%20Paper.pdf (en anglais)
64
Patrimoine canadien. « Initiatives des langues autochtones – Programme des autochtones », 23 janvier 2015.
http://www.pch.gc.ca/fra/1267285112203/1388770448005
PEN International, Koops Mill, 162-164 Abbey Street, London, SE1 2AN, ROYAUME-UNI
Tél : +44 (0)20 74 05 03 38 www.pen-international.org
Octobre 2015
La liberté d’expression au Canada | 20
65
Jorge BARRERA. “Aboriginal Organizations hit with $60 Million in Cuts” (en anglais), 13 janvier 2015. http://aptn.ca/news/2015/01/13/aboriginalorganizations-hit-60-million-worth-cuts-inuit-faced-steepest-reduction-afn-analysis/
66
Dean BEEBY. “Aboriginal Affairs spending shortfall amounts to $1B, internal document says” (en anglais), CBC News, 5 juin 2015.
http://www.cbc.ca/news/politics/aboriginal-affairs-spending-shortfall-amounts-to-1b-internal-document-says-1.3100937
PEN International, Koops Mill, 162-164 Abbey Street, London, SE1 2AN, ROYAUME-UNI
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