Jugement du 20 avril 1970 - Copropriété

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Jugement du 20 avril 1970 - Copropriété
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Fiche Jurisprudence
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Droit des baux
Gardien de la chose : vice de la chose n° 127
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Tribunal civil de Bruxelles (4ème ch.), Jugement du 20 avril 1970
Siège : MM. Barrel, Canivet, Tumelaire. Avocats : Baugniet, Defosset
La responsabilité du dommage pèse sur celui qui a la garde de la chose, qu'il en soit propriétaire ou non.
Le contrat de location confère au locataire qui acquiert la jouissance de la chose un pouvoir de
commandement complet qui le rend gardien de la chose qui est l'objet du contrat; le preneur a, en
principe, la garde de la chose louée au sens de l'article 1384 alinéa 1er du Code civil et l'ignorance du
vice de la chose qui a causé un dommage est impuissante à exclure la responsabilité établie à charge du
gardien par la disposition prémentionnée.
S'il est vrai que le critère permettant de déterminer quand le locataire acquiert la garde de la chose louée
doit être recherché «dans l'étendue du pouvoir de commandement relativement à la chose qui est acquis
par le locataire), encore y a-t-il lieu de considérer que le pouvoir de ce dernier s'exerce sur les choses à
l'égard desquelles /lne obligation d'entretien lui est imposée (JT 1971, p. 27).
Jugement du 20 avril 1970
(…)
Attendu que Defosez, demandeur originaire, qui
exerçait le commerce de librairie dans un immeuble sis
à Ixelles, 3, rue du Prince Albert, déclare avoir
constaté, dans le courant du mois d'août 1964, que des
livres entreposés par lui dans une pièce située au
premier étage en façade de cet immeuble, et qui avaient
été placés dans des cartonnages contre un mur mitoyen,
avaient été gravement endommagés par des infiltrations
d'eau s'étendant sur une surface importante de ce mur;
Attendu que le mur dont il s'agit s'épare l'immeuble
occupé par Defossez de celui portant le n° 1 de la
même rue, propriété de Dumont Nicole, qui l'avait donné en location à Haelterman Auguste, lequel l'avait, à
son tour, sous-loué à Van Damme Théodore et à son
épouse Van Reusel Louise;
Attendu que l'action, mue par exploit de l'huissier de
justice suppléant Cailliau d'Ixelles des 17 et 19 mai
1965, à la requête de Defossez, tendait à entendre
condamner Dumont, Haelterman, Van Damme et Van
Reusel, soit solidairement, soit conjointement, soit
chacun pour leur part et portion, soit les uns à défaut
des autres, à payer au demandeur, sous réserve de
majoration en cours d'instance, la somme de 87.150
francs à titre de dommages-intérêts pour les
détériorations subies par les livres précités et pour la
remise en état du mur séparatif et du bord du plafond
de la pièce où ils étaient rangés, à l'endroit où ledit
plafond rejoint le mur mitoyen;
Attendu que, par décision du 24 juin 1965, le premier
juge a préalablement désigné en qualité d'expert
l'architecte Gérard avec mission de donner son avis sur
les causes des infiltrations, de fournir tous
renseignements de nature à permettre ultérieurement la
détermination des responsabilités éventuelles, de décrire les conséquences desdits infiltrations et d'évaluer le
préjudice subi;
Attendu qu'il ressort du rapport de cet expert que les
dégâts constatés trouvent leur origine dans des fuites
survenues dans les tuyauteries de la maison sise au n° l
de la rue du Prince Albert, l'installation de plomberie de
cet immeuble, accolée au mur mitoyen, étant
défectueuse;
Que, notamment, des conduites d'eaux usées étaient
branchées sur la chute des water-closets;
Que l'expert relève que «l'ensemble du régime
sanitaire» était «entièrement caché derrière cachetuyau, volée d'escalier, faux placard, amoncellement de
vidanges etc ... »;
Qu'il appert des constatations auxquelles il a été
procédé que la rupture de la tuyauterie précitée est due
à un placement effectué à l'encontre des règles les plus
élémentaires en matière de plomberie et que cette
installation vicieuse était masquée par le cloisonnement
qui la dissimulait aux regards;
Attendu que, considérant que la responsabilité du
dommage subi par le demandeur était exclusivement
imputable à la défenderesse Dumont en sa qualité de
propriétaire de l'immeuble litigieux, le premier juge a
déclaré l'action principale fondée à son égard, et non
fondée à l'égard des autres défendeurs;
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Gardien de la chose : vice de la chose n° 127
qu'il l'a, en conséquence, condamnée à payer à
Defossez une somme de 9'2.425 francs, montant des
dégâts aux volumes endommagés et du coût des
réparations à l'immeuble; que la décision entreprise a,
par ailleurs, débouté Dumont de l'appel en garantie
qu'elle avait formé contre Haelterman Auguste;
Que le preneur, a, en principe, la garde de la chose
louée au sens de l'article 1384, alinéa 1"', du Code civil
et que l'ignorance du vice de la chose qui a causé un
dommage est impuissante à exclure la responsabilité
établie à charge du gardien par la disposition
prémentionnée (Cass., 27 juin 1958, J.T., p. 481);
Attendu qu'il échet préalablement de rappeler qu'en
matière de choses inanimées la responsabilité demeure
à base dl' faut et que celle-ci consiste dans le fait de
garder une chose vicieuse;
Attendu, donc, que si c'est pertinemment que la
décision entreprise relève, en ses motifs, qu'il ne suffit
pas, pour dégager le preneur de la responsabilité qui lui
incombe, qu'il ait ignoré le vice, c'est par contre à tort
que celle-ci énonce que le locataire ou les souslocataires n'avaient pas sous leur garde la partie de
l'immeuble affectée du vice relevé par l'expert;
Que l'existence d'un vice doit donc être prouvée par la
victime, ainsi que celle de la relation causale entre le
vice et le dommage, mais que, dès l'instant où cette
preuve est faite, la responsabilité est présumée et
qu'elle est «juris et de jure»; qu'il s'ensuit qu'aucune
preuve contraire d'absence de faute n'est admise parce
que la loi impute précisément à faute le fait de garder
une chose vicieuse (cf. De Page, t. II, n° 1006);
Attendu que s'il est vrai que le critère permettant de
déterminer quand le locataire acquiert la garde de la
chose louée doit être recherché dans l'étendue du
pouvoir de commandement relativement à la chose qui
est acquise par le locataire, encore y a-t-il lieu de
considérer que le pouvoir de ce dernier s'exerce sur les
choses à l'égard desquelles une obligation d'entretien
lui est imposée, ce qui est le cas en l'espèce;
Attendu qu'il résulte des constatations de l'expert que
l'installation sanitaire de l'immeuble dont la dame
Dumont est propriétaire était affectée d'un vice, que ce
vice était caché et qu'il existe un lien de causalité
nécessaire entre ce vice et le dommage dont Defossez
réclame réparation;
Attendu que c'est vainement qu'au stade actuel de la
procédure il est fait état des dispositions de l'article
1721 du Code civil; que ces dispositions concernent la
garantie des vices de la chose louée dont le bailleur doit
répondre envers le preneur;
Au fond :
Attendu que la responsabilité d'un tel dommage pèse
sur celui qui a la garde de la chose, qu'il en soit
propriétaire ou non (De Page, ibid., n° 1005);
Attendu que c'est à bon droit que le premier juge a
considéré qu'il convenait de s'en tenir à la base
juridique que Defossez avait donnée à son action dans
l'exploit introductif d'instance, à savoir l'article 1384
alinéa 1"' du Code civil, et que, pour l'application de
cette disposition, il y avait lieu de déterminer qui, en
l'espèce, était le gardien de la chose vicieuse;
Attendu qu'il est de doctrine et de jurisprudence
constante que le contrat de location confère au locataire
qui acquiert la jouissance de la chose un pouvoir de
commandement complet qui le rend gardien de la chose
qui est l'objet du contrat (Dalcq, Traité de la
responsabilité civile, n° 210,1);
Que cette responsabilité contractuelle doit être
distinguée de celle, fondée sur l'article 1384 alinéa 1"
du même code, qui rend le gardien responsable envers
les tiers en cas de dommages causés par un vice de la
chose, seul litige dont la cour doit présentement
connaître; que celle-ci n'étant saisie d'aucune action
fondée sur l'article 1721 du Code civil, il ne lui
appartient pas d'examiner la recevabilité et le
fondement d'un tel recours;
Attendu que l'article 8 du bail avenu entre Dumont et
Haelterman met à charge du locataire toutes les
réparations « généralement quelconques, quelles que
soient leur dénomination ou nature ou les causes de
leur nécessité. Il supportera notamment, les grosses
réparations, y compris toutes celles qui sont mises à
charge de la propriétaire par la loi, notamment le
remplacement et l'entretien de la toiture, des gros murs
... , etc »;
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Gardien de la chose : vice de la chose n° 127
Attendu que ces clauses, particulièrement sévères pour
le preneur, impliquent manifestement un transfert
complet de la garde de l'immeuble dans le chef de ce
dernier;
Attendu qu'il est non moins certain qu'en raison du
contrat de sous-location intervenu le 18 juin 1963 entre
Haelterman d'une part et les époux Van DammeVan
Reusel d'autre part, cette garde a été transférée auxdits
sous-locataires: que l'article 15 de la convention susdite
ne laisse planer aucune équivoque à ce sujet;
Attendu qu'il suit de ces considérations que les intimés
Van Damme-Van Reusel doivent, sur pied de l'article
1384 alinéa 1er du Code civil, être tenus, à l'égard de
Defossez Marcel, pour seuls responsables du dommage
subi par ce dernier;
(…)