amplificateur intégré Sugden A21SE

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Test : amplificateur intégré Sugden A21SE
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Le petit génie de la classe A
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Par Antoine Gresland
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Prix : 2990 euros
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Durée du test : trois semaines
L’amplificateur intégré Sugden A21 n’est pas franchement une nouveauté dans le monde de
la haute-fidélité. Cette version SE est même le dernier avatar d’un amplificateur intégré né
voici plus de 30 ans, pour cristalliser les avantages d’un fonctionnement en classe A hérité
des montages à tubes.
La plupart des amplificateurs de grandes marques revendiquent, aujourd’hui encore, un
fonctionnement en classe A jusqu’à une dizaine de watts avant de passer en classe B,
beaucoup plus efficace pour délivrer une forte puissance sans transformer l’appareil en
chauffage électrique d’appoint. D’ailleurs, ce que la plupart des constructeurs appellent
aujourd’hui la classe A/B, n’est autre qu’un montage fonctionnant avec une forte
polarisation des courants de repos des transistors sur quelques watts plutôt qu’un véritable
montage en classe A.
Rien de tel avec le Sugden A21SE dont l’alimentation, dopée par rapport à celle de son
ancêtre, lui permet tout juste de développer 30 watts en pure classe A, dissipant au
passage force calories par ses deux rangées d’ailettes, qui dépassent 50 degrés en usage
courant. En reprenant le schéma mis au point dans les années soixante par James E.
Sugden pour l’A21 « tout court », premier amplificateur à transistors en classe A du
marché, l’A21SE fait donc un peu partie du patrimoine de la haute-fidélité. Mais étant
donné sa faible puissance, certains s’interrogeront peut-être sur l’intérêt d’un tel appareil,
puisqu’il est désormais possible de trouver beaucoup plus puissant dans cette gamme de
prix.
1/ La classe A : lorsque la qualité prime sur la quantité
La réponse, comme nous le verrons plus loin, est évidente à l’écoute, mais rappelons
brièvement les avantages de la classe A sur un montage traditionnel. La puissance d’un
amplificateur n’est pas tout, loin de là ! En réalité, il s’agit même d’un paramètre
secondaire dans bien des cas, surtout lorsque l’on porte son choix sur des enceintes ayant
un rendement supérieur à 90 dB/1 W/1 m. Et même dans le cas contraire, de nombreuses
années d’écoute partagées avec des amplificateurs de faible puissance m’ont convaincu que
la qualité des timbres et la capacité à reproduire les petits détails d’une interprétation à des
niveaux usuels, comptent bien davantage à l’oreille que l'énergie brute.
Dans ces conditions, la classe A garde un avantage considérable sur la classe B en
supprimant purement et simplement la distorsion inhérente à cette dernière. Rappelons en
effet que la classe B utilise généralement des transistors complémentaires en « push-pull »
(littéralement pousser-tirer) pour amplifier les alternances positives et négatives du signal ;
chacun d’eux adoptant une position de repos (c’est à dire qu’il n’est plus conducteur)
lorsque l’autre travaille. Ce montage, s’il présente l’avantage d’un bon rendement
énergétique (de l’ordre de 70 %), induit une discontinuité de signal (ou distorsion de
croisement), à l’intersection des alternances positives et négatives issues de chaque
transistor. Ce phénomène est particulièrement vérifiable à bas niveau, là où, justement,
l’oreille est la plus sensible.
Au contraire, dans un amplificateur en classe A comme le Sugden, les deux transistors, non
complémentaires, fonctionnent en permanence sur l’intégralité du signal d’entrée (ils sont
toujours conducteurs). La composante continue qui en résulte, au croisement des deux
alternances, étant éliminée en sortie soit par un transformateur (comme c’est le cas sur un
amplificateur à tubes) soit par un condensateur de forte valeur, comme sur l'A21SE. Mais si
les montages en classe A délivrent une qualité de timbres reconnue et des capacités en
courant bien supérieures à celles de nombreux montages en classe B, même deux fois plus
puissants, elle nécessite une alimentation considérable, car son rendement est très faible
(souvent moins de 25 %). En effet, en classe A, les transistors dissipent une puissance
constante, quelle que soit l’amplitude du signal d’entrée (y compris donc, lorsque cette
dernière est nulle), toute l’énergie qui n’est pas mise au service de la modulation étant
dissipée sous forme de chaleur. Et le Sugden A21SE n’échappe pas à la règle : une demiheure après sa mise sous tension, il est déjà difficile de garder la main sur ses ailettes plus
de quelques secondes… attention aux petites mains baladeuses !
2/ Une réalisation traditionnelle qui fait plaisir à… entendre !
Sugden insiste sur le fait que l’A21SE est monté à la main par une seule et même personne
en Angleterre. Force est de reconnaître que cela ne l’empêche pas, bien au contraire, de
bénéficier d’une valeur perçue très avantageuse, que pourraient bien lui envier certains
appareils fabriqués plus au Sud-Est !
Façade métallique anodisée titane ou aluminium de forte épaisseur, potentiomètres rotatifs
qui inspirent confiance pour le volume et la sélection des sources, connectiques plaquées or
et gros borniers HP, le Sugden est un bel appareil que l’on prend plaisir à manipuler. Même
constat à l’intérieur : le constructeur fait confiance à des composants discrets plutôt qu’à
des composants de surface. La première chose qui saute aux yeux, c’est bien sûr le gros
transformateur torique découplé du châssis pour ne pas risquer de communiquer ses
vibrations aux circuits. Celui-ci alimente séparément par des enroulements secondaires les
deux cartes d’amplification accolées aux radiateurs de part et d'autre du coffret. La section
préamplificatrice prend place juste derrière la façade. Elle est reliée par un câble fortement
blindé à une batterie de relais située juste à côté des cinq entrées asymétriques et de la
paire de sorties prévue pour le monitoring (fixe) et pour un bloc de puissance externe
(variable).
Il faut dire que les étages de préamplification ont bénéficié du même soin que les étages de
puissance pour garantir la transparence de l'A21SE. Leur haute impédance d’entrée
minimise l’influence des câbles de liaison, alors que les étages lignes fonctionnent avec un
fort gain en tension pour attaquer, au contraire, les étages de puissance avec une faible
impédance en sortie. Par rapport à son ainé, le SE bénéficie d’un potentiomètre de volume
ALPS motorisé qui lui offre la télécommande : un vrai plus !
Les étages de puissance utilisent
deux transistors de puissance
Sanken
2SC3284
dans
une
configuration Single Ended, qui
permet de délivrer, en classe A,
30 watts sous 8 ohms et
40 watts sous 4 ohms. Une
puissance raisonnable que l’on
doit mettre en balance avec une
bande passante s’étendant de
6 Hz à 280 kHz et un taux de
distorsion inférieur à 0,006 % à
1 kHz ! Voilà des chiffres
inhabituels sur un appareil de
cette catégorie. Il faut dire que
par rapport au précédent A21a,
l’électronique du SE bénéficie des
recherches effectuées pour le
compte de la série haut de
gamme Masterclass du constructeur britannique. Il offre ainsi plus de puissance et une
meilleure résistance à la charge. Les améliorations portent aussi sur la bande passante, la
linéarité de la phase et, bien sûr, la distorsion totale à travers un circuit d’entrée plus court,
malgré l’ajout de la télécommande.
Reste à savoir si le Sugden fait encore le poids à l’écoute, face à des concurrents plus
jeunes et gonflés de watts jusqu’au ras des potentiomètres...
3/ Écoute : un compagnon musical exceptionnel
Il ne faut pas longtemps pour comprendre que le Sugden A21SE est une machine à plaisir
extraordinaire. Tout juste une dizaine de minutes, le temps pour lui de stabiliser ses étages
de puissance « à bonne température ». Une fois à point, il y a fort à parier que vous
oublierez, comme moi, toute forme de considération technique pour plonger les oreilles les
premières dans la musique.
Pour autant, pendant les trois semaines que je viens de passer avec lui, j’ai eu l’occasion
de juger à quel point cet appareil présente des qualités objectives de premier plan. On a
tendance à comparer les amplificateurs à transistors en classe A tel que le Sugden, aux
appareils à tubes qui font fantasmer les mélomanes épris de chaleur, et même, disons-le
tout net, de coloration... Pourtant, si l’A21SE présente en effet cette aération magique dans
le haut du spectre, cette sensation d’épaisseur et de fluidité dans le médium qui fait toute
la différence, peu de ses contemporains à tubes, du moins dans cette gamme de prix,
seront capables d’y ajouter le contrôle du grave et l’honnêteté dont il sait faire preuve.
Branché aux petites enceintes Kelinac 111 mg que j’ai trouvé si
droites et si transparentes, le Sugden affiche ainsi une neutralité
à laquelle je ne m’attendais pas ! Ce mariage presque miraculeux
m’a tellement saisi que je suis resté de nombreuses heures à
l’écouter, sans penser une seconde à revenir à mon gros
système de référence. Bien évidemment, on attend d’un
amplificateur en classe A une excellente fidélité des timbres, et
dans ce domaine l’A21 SE est un petit prodige. Les voix, que ce
soit celle profonde et parfois rugueuse d’Eric Bibb ou celle,
délicate et aérienne de Youn Sun Nah, sont rendues avec une
sensualité et une transparence dont peu d’amplificateurs, quel
que soit leur prix, sont capables. Car, pour peu que les enceintes soient d’un rendement
convenable, ce qui est le cas des Kelinac, les 30 watts du Sugden font aussi merveille pour
explorer le bas du spectre.
L'A21SE n’offre peut-être pas le tranchant physique d’un
amplificateur de 200 watts sur les déferlements de
basses d’un morceau de R'n'B, mais le grave synthétique
de la troisième plage d’In Rainbow, le dernier album de
Radiohead , apparaît agréablement défini et la sensation
de présence sur la voix de Tom York surprend, tellement
elle semble se matérialiser dans l’espace devant
l’auditeur, parfaitement focalisée en trois dimensions.
Cette épaisseur presque charnelle ne se fait pourtant
pas au détriment de l’ouverture sonore, bien au
contraire. Le haut du spectre du Sugden, tout en
lumière et en délicatesse, jamais agressif, séduit par sa
justesse aussi bien sur une voix que sur les toms d’une
batterie ou sur la trompette de Miles Davis. Et comme
on entend beaucoup de choses, l’image stéréo y gagne aussi, grâce à une excellente
intégration des réverbérations. Toutes ces qualités sont à mettre au crédit de la partie
amplificatrice, mais aussi, et c’est important de le souligner, à celui de la partie
préamplificatrice qui laisse visiblement passer beaucoup d’informations. La source apparaît,
une fois encore, comme un élément déterminant pour obtenir le meilleur de cet intégré.
Si le Sugden est donc parfaitement à son aise avec des
enceintes de bibliothèque, on pourrait légitimement penser que
sa faible puissance constitue un handicap, dès lors qu’il s’agit de
reproduire un message complexe sur des grandes colonnes au
rendement plus faible. Dans les faits, cette limitation n’est
pourtant pas si évidente au quotidien. Évidemment, si vous
souhaitez sonoriser une soirée, le Sugden A21SE n’est pas
l’ampli adéquat. Cependant, dans des conditions d’utilisation
normales cet intégré démontre des qualités dynamiques
étonnantes, à travers une capacité à moduler remarquable. Bien
sûr, les 30 watts de l'A21SE ne sont pas faits pour amplifier un
concert de hard rock sur une paire de B&W 800D. Mais relié
aux Linn Akurate 242, dont le rendement avoué est de 87 dB,
et pour peu que l’on reste à des niveaux raisonnables, le
Sugden m’a littéralement épaté ! La classe A démontre ici sa
supériorité à travers une qualité de silence et de modulation sur
les petits détails qui sort de l’ordinaire. C’est vrai, dans le bas
du spectre, on vient rapidement à bout de sa puissance dès que
l’on tente une restitution à niveau réaliste. Mais dans 90 % des
cas, ce que nos oreilles retiendront, c’est sa capacité à faire
passer la musique de l’état électrique à l’état émotionnel !
Un ensemble de qualités qui en font un compagnon musical hors
du commun, que ce soit sur du jazz, du classique, du blues et
même du rock, pour peu que les enceintes qu’on lui associe
présentent un rendement proche de 90 dB. En toute connaissance de cause, je ne peux que
recommander une écoute attentive de ce petit génie à toutes celles et ceux qui cherchent
un intégré dans cette gamme de prix, tant il a su me toucher au cœur.
Conclusion :
Alors démodé l'A21SE ? Certainement pas ! Le Sugden fait partie de ces appareils
intemporels qui donnent spontanément envie d’écouter de la musique, tant il excelle à
reproduire la qualité des timbres, le rythme et l’intention des interprètes. Transparent et
superbement nuancé, c’est un charmeur qui pose avec délicatesse un voile de douceur et de
lumière sur tout ce qui passe à travers lui. Malgré ses 30 watts, ses qualités dynamiques
retiennent l’attention, tant il sait moduler à bas ou moyen niveau, en préservant une
cohérence et une homogénéité peu communes sur toute la bande passante. Un vrai petit
phénomène qui mérite amplement que l’on s’attache à lui, sans aucun a priori, car son
rapport musicalité/prix est absolument exceptionnel…
Et en plus, il fait chauffage pour l’hiver !
Système d'écoute:
Source : Lecteur CD Linn Sondek CD 12, lecteur réseau Linn Majik DS,
Logitech Trasnporter ; préamplificateur : Linn Kisto ; amplificateur : Linn
AV5105 ; câbles de modulation : Cardas Golden Cross asymétrique, Linn
Interconnect asymétrique ; câbles HP : Linn K20, QED Original ; enceintes :
Kelinac 111 mg, Linn Akurate 242
Fiche technique :
Poids : 14 kg
Dimensions : 115 x 430 x 360 mm
Sensibilité d’entrée : 110 mV
Puissance de sortie : 30 W sous 8 Ω et 40 W sous 4 Ω
Réponse en fréquence : 12 Hz – 141 kHz +/- 3 dB
Bande passante : 6 Hz – 280 kHz
Rapport signal/bruit : < 0,006 % à 1 kHz, 1 V
Finition : Titane ou graphite