Foi amour espérance - La Strada et compagnies
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Foi amour espérance - La Strada et compagnies
Foi amour espérance ödön von Horváth Cie La Rumeur du 13 novembre au 13 décembre 2015 vendredi, samedi 20.30 dimanche 18.00 Mise en scène Patrice Bigel Avec Francis Bolela François Chanut Karl-Ludwig Francisco Bettina Kühlke Adèle Le Roux Jean-Michel Marnet Noémie Nael Juliette Parmantier William Santucci. Scénographie, lumière Jean-Charles Clair Texte français Henri Christophe Édition l’Arche ödön von Horváth Foi amour espérance note en marge «Comme dans toutes mes pièces, je me suis efforcé de ne point oublier que cette lutte désespérée de l’individu se fonde sur des impulsions bestiales et que l’on ne saurait considérer les manières héroïques et lâches de cette lutte autrement que sous l’aspect formel de cette bestialité, qui n’est, elle, ni bonne, ni mauvaise. Comme dans toutes mes pièces, cette fois encore je n’ai rien embelli, rien enlaidi. Quiconque entreprend, avec toute l’attention requise, de peindre l’homme, sera sans doute amené à constater (à condition d’avoir fait sa connaissance de façon directe) que l’expression de ses sentiments est empruntée, c’est à dire: faussée, minimisée, masochistement avide de compassion, sans doute en raison d’une indolence feinte mais valorisante…quiconque cherche donc honnêtement à peindre l’homme, peindra toujours seulement des images réfléchies, et je m’empresse de préciser à cet endroit jamais je n’ai peint, jamais je ne peindrai des images réfléchies facétieuses, car j’abomine toute parodie. Comme dans toutes mes pièces, cette fois encore, j’ai tenté d’affronter sans égards la bêtise et le mensonge ; cette brutalité représente peut-être l’aspect le plus noble de la tâche d’un homme de lettres qui se plaît à croire parfois qu’il écrit pour que les gens se reconnaissent eux-mêmes. Reconnais-toi toi-même ! Afin d’accéder à cette sérénité qui te rend plus facile ta lutte dans la vie, dans la mort, cette chère sincérité te plaçant non pas certes audessus de toi (ce serait illusoire), mais à côté et en dessous de toi, de sorte que tu puisses te contempler non pas de haut, mais tout de même de devant, de derrière, de côté et d’en bas !… ...On me reproche d’être trop cru, trop dégoûtant, trop mystérieux, trop cynique et autres qualités de ce genre, et on ne s’aperçoit pas que ma seule intention est de décrire le monde tel que, malheureusement il est.» Foi amour espérance Foi, Amour, Espérance - Le titre est extrait de la Première Épître de Saint-Paul aux Corinthiens. «Trois fois j’ai été battu. Une fois j’ai été lapidé. Trois fois, j’ai fait naufrage. J’ai passé un jour et une nuit dans l’abîme. Et mes voyages fréquents, les dangers des fleuves, les dangers des brigands, les dangers qui me venaient de mon peuple, les dangers qui venaient des gentils, les dangers dans les villes, les dangers du désert, les dangers sur mer, les dangers parmi les faux frères…» Extrait de l’Épître de Saint Paul aux Corinthiens. Horváth a composé cette «petite danse de mort» en s’inspirant du récit d’un cas authentique que lui conte le chroniqueur judiciaire Lukas Kristl, à Munich. Élisabeth, à la recherche de 150 marks pour acheter sa carte de voyageur représentant placier, veut vendre son corps à l’institut d’anatomie. Un préparateur au bon cœur lui prête la somme, la prenant pour une fille de fonctionnaire en difficulté. Découvrant par la suite le malentendu, il l’a fait condamner en l’accusant d’abus de confiance : son père, n’est qu’inspecteur…d’assurances, et les 150 marks lui ont servi à régler une amende infligée pour avoir exercé sans carte de VRP. L’agent de police Alphonse Klostermeyer, découvrant qu’Élisabeth - qui lui rappelle sa fiancée décédée et à qui il verse 20 marks par semaine en attendant de l’épouser - avait fait de la prison, l’abandonne immédiatement, par souci de sa carrière. Élisabeth ne voit d’autre issue que de se noyer, non par dépit amoureux, comme elle le crie à la face d’Alphonse une fois repêchée, mais parce qu’elle «n’a rien à bouffer» ! Les agents se rendent à la parade. Il y a un orage qui menace là-bas Voilà pourquoi la ligue de combat pour la culture allemande interdit la pièce en1933 : «La programmation d’un théâtre allemand doit être conforme dans son essence et dans sa manière à un public allemand ; c’est-à-dire que les œuvres proposées doivent dans leur tenue spirituelle, dans leurs personnages et dans la destinée de ceux-ci correspondre au sentiment allemand, aux conceptions allemandes, à la volonté et à la vision allemandes, au sérieux allemand et à l’humour allemand. Comme l’œuvre du poète ne peut être distincte de sa personnalité et de son appartenance qui est liée à son sang, seuls les auteurs de langue allemande qui ne renient pas leur appartenance allemande peuvent être autorisés en première ligne sur une scène allemande. Le théâtre allemand n’a plus le droit d’être comme par le passé le terrain d’un esprit étranger à cette appartenance ou vide de caractère quant à l’aspect national.» Le censure de Foi amour espérance pose clairement la question de l’artiste et de sa liberté de création. Horváth ne cessera jamais, dans son théâtre de nous peindre son époque telle qu’il la voit. Le monde, qu’il décrit est miné par la crise économique, le chômage, l’exclusion sociale et la montée du nationalisme qui provoque une véritable guerre civile. Partant de l’observation de la réalité de ses contemporains, il la transfigure, la rêve dans un geste poétique. Les hommes ont été oubliés par ceux qui dirigent l’état, et ce chaos ne peut qu’engendrer des monstres dénués d’humanité. Les laisséspour-compte ne manifestent aucune conscience politique et essaient d’agir sur leur destin, en s’adonnant à leurs pulsions individualistes et se comportent comme des animaux. Les pièces d’ Horváth sont écrites comme des synopsis de films. Les didascalies sont foisonnantes et nous renseignent très précisément sur les lieux, les lumières du jour ou de la nuit, les bruits. Dans une apparente quotidienneté, les dialogues sont très épurés. Sa dramaturgie nous oblige à penser différemment notre manière de faire le théâtre. Les éditions de l’Arche et la traduction d’Henri Christophe nous livrent une pièce en cinq tableaux et en annexe, des variantes qui appartenaient à une version antérieure fragmentaire dont seules quelques scènes sont conservées. Dans ces variations apparaissent de nouveaux personnages, s’ajoutent d’autres lieux. On retrouve des motifs, des fragments, comme une série de rushs qui auraient été coupés au montage. Comment résister au désir d’insérer une partie de ces scènes perdues ? Horváth disparaîtra trop tôt pour connaître ce qui se passera en Allemagne, quand la réalité dépassera la fiction, après sa mort en 1938. Tout ce qui m’entoure, ce que je vois, ce que j’entends, tout ce que je vis, oriente toujours mes choix, et mes désirs de mettre en scène des textes. Foi amour espérance est hélas encore d’actualité. Patrice Bigel. Octobre 2015. D’urgence ! «Je n’ai pas de pays natal et bien entendu je n’en souffre aucunement. Je me réjouis au contraire de ce manque d’enracinement, car il me libère d’une sentimentalité inutile…» «Le concept de patrie, falsifié par le nationalisme, m’est étranger. Ma patrie, c’est le peuple.» En 1933, il ajoutera «Notre pays, c’est l’esprit.» Ainsi s’exprimait Ödön von Horváth né en 1901, hongrois de langue et de culture allemande, mort à Paris en 1938. Vivre en Allemagne, percevoir dès 1927 les périls qui menacent et se situer aux antipodes du nationalisme, écrire, cependant, bien loin des sentiers battus par l’idéologie dominante, nombre d’auteurs de langue allemande durent affronter ce paradoxe…L’heure est venue d’écouter Horváth, le «magyar», romancier et auteur dramatique qui sciemment choisit, dans les années vingt et trente, de situer ses personnages dans la réalité la plus immédiate. De 1927 à 1932, plusieurs pièces, Le Funiculaire, Sladek soldat de l’Armée noire, Nuit italienne, Casimir et Caroline, un roman, l’Éternel Petit-Bourgeois, lui apportent la notoriété et attirent sur lui l’attention et les foudres des milieux nationalistes. Horváth est interdit sur les scènes allemandes dès 1933, à la suite du succès remporté par Légendes de la forêt viennoise, qui lui vaut le prix Kleist, la plus haute récompense littéraire de l’époque. À propos des articles de presse qui parurent alors, il déclare : «Une partie de la critique salua cette attribution ave enthousiasme, une autre, bien entendu, explosa de colère et de haine. Je tiens à faire remarquer que, dans une certaine presse, et même à propos de confrontations littéraires, le ton employé ne peut se comparer qu’à celui d’un troupeau de pourceaux». Horvath s’installe à Vienne. Pour lui, ce n’est pas un exil, puisqu’il vit encore dans sa langue et sa culture. Il y écrit de nouvelles pièces et ses deux romans les plus célèbres, Jeunesse sans Dieu et Un fils de notre temps. Il dénonce sans relâche la dégradation imposée par les nazis aux couches populaires de la société allemande. En 1938, au lendemain de l’Anschluss, Ödön von Horváth prend effectivement le chemin de l’exil. Prague, Zurich, où il a l’intention de s’installer, Amsterdam, où il renégocie son contrat d’édition. Le 26 mai, il arrive à Paris où il rencontre Robert Siodmak pour envisager l’adaptation cinématographique de Jeunesse sans Dieu. Le destin réserve à Horváth l’un des accidents absurdes dont il a le secret : le 1er juin 1938, une tornade s’abat sur Paris. «Devant le théâtre Marigny, un arbre de belle taille était brisé presque au ras du sol et s’effondrait sur les allées. Une branche maîtresse écrasa un passant, qui fut tué sur le coup…Auteur dramatique et romancier très connu en Allemagne, M de Horváth …» L’histoire laissera Horváth sombrer dans l’oubli. Mais la génération de l’aprèsguerre revendiquera une filiation directe La mort d’un poète avec celui qui, au plus fort de la tourmente, réinventa le théâtre populaire allemand. Sperr, Kroetz, Fassbinder, Turrini, Handke lui rendront hommage. Ce dernier l’opposera d’ailleurs à Brecht : «Les pièces de Brecht proposent une simplicité et un ordre qui n’existent pas. Pour ma part, je préfère Ödön von Horváth et son désordre, et sa sentimentalité dépourvue de maniérisme. Les égarements de ses personnages me font peur : il pointe avec bien plus d’acuité la méchanceté, la détresse, le désarroi d’une certaine société. Et j’aime ses phrases folles, signes des sauts et des contradictions de la conscience. Il n’y a guère que chez Tchekhov ou Shakespeare que l’on en trouve de semblables.» Cet effroi dont parle Handke, quel lecteur, quel spectateur actuels ne l’éprouveraient-ils pas ? Horváth démasque le nationalisme, le racisme au quotidien, la lâcheté, l’infamie d’une société désemparée par une crise sans précédent. À découvrir d’urgence, aujourd’hui, pour tirer à temps les leçons de l’histoire.» Heinz Schwarzinger « La mort des poètes souvent s’accomplit d’une façon qui recoupe avec une étrange précision le style de l’œuvre : il leur faut finalement vivre ou souffrir en mourant ce que, d’abord, ils avaient seulement rêvé. Impitoyable, s’accomplit en eux un destin qu’eux-mêmes, ces dieux joueurs, n’avaient jusqu’alors imparti qu’à leurs personnages. Cela ne se ressent-il pas? Cet arbre qui s’abat sur le poète en promenade ce pourrait être une idée d’ Horváth… » Klaus Mann Repères 1901 1908 Ödön Josef von Horváth naît à Fiome (aujourd’hui Rijeka, en Croatie) d’un père attaché au Consulat impérial et royal d’Autriche-Hongrie et d’une mère issue d’une famille de médecin militaire austrohongroise Premier enseignement en hongrois à Budapest 1912-1913 Première et seconde guerres des Balkans 1913 1914 1914 1919 1919 1920 1921 1923 Horváth part à Munich où il poursuit ses études. Début de la Première guerre mondiale. Le père d’Horváth est appelé sur le front 1915-1918 Horváth s’inscrit dans un lycée allemand. Son père rentre de la guerre. 1918 1920 1923 1924 1926 1929 Dissolution de l’Autriche-Hongrie. La famille Horváth s’exile à Vienne. Horváth suit des cours de psychologie, de littérature allemande, d’études théâtrales, de sociologie, de métaphysique. Adolf Hitler devient membre du DAP (Deutsche Arbeiterpartei) 1929 1931 Rencontre avec le compositeur Siegfried Kallenberg qui lui commande Le livre des danses. Horváth songe alors à une carrière d’écrivain. Naissance du Parti National Socialiste des travailleurs allemands (NSDAP) Inflation et augmentation rapide du chômage. Hitler, président du NSDAP 1932 1932 1933 1933 Séjour à Paris. Premières pièces. Dosa. Meurtre dans la rue des Maures. Échec d’une tentative de putsch de Hitler. Le NSDAP est interdit. Hitler est condamné à cinq ans de prison. Il rédige Mein Kampf. Horváth écrit Le Funiculaire, Le Belvédère. Contrat avec l’éditeur Ulstein. Le Funiculaire. Sladek soldat de l’armée noire. Krach boursier à New-York. Prix Kleist. Nuit italienne. Légendes de la forêt viennoise. Rencontre avec le journaliste Lukas Kristl qui lui inspire Foi Amour Espérance et Casimir et Caroline. Le NSDAP remporte les élections législatives. 6,2 millions de chômeurs. Le Deutsches Theater de Berlin est contraint d’annuler la création de Foi Amour Espérance Hitler est élu chancelier du Reich. Création de la gestapo. Premiers autodafés de livres dont ceux de Horváth. 1934 -1935 Horváth adhère à la Fédération des écrivains allemands. Allers et retours. Coups de tête. (créations à Vienne). 1936 1937 1938 Foi Amour Espérance (création à Vienne) Horváth est exclu de la Fédération des écrivains allemands. Figaro divorce (création à Prague) Jeunesse sans Dieu est censuré en Allemagne. Horváth s’exile. Il se rend en Tchécoslovaquie, en Hongrie, en Italie, en Suisse puis à Paris. Le 1er juin, à Paris, sur les Champs-Élysées, une tempête casse la branche d’un platane qui s’abat sur lui et le tue. Patrice Bigel Metteur en scène et directeur artistique de la compagnie La Rumeur. Ses spectacles sont des créations de théâtre - danse et des mises en scène de textes d’auteurs classiques et contemporains. Don Juan revient de guerre de Ödön von Horváth (Usine Hollander). L’Éternel Amoureux (Paris). Atteintes à sa vie de Martin Crimp (Usine Hollander). La Nuit du Plaisir Différent (Avignon). Circuits Clandestins (Paris, Caracas, Montevideo, Lima, Santiago du Chili, Chicago). Sunny Side-up (Vienne). Les Libertins (Ivry-sur-Seine). Flagrant-Délit de Mensonge (Hambourg). Tragédie Céleste d’après Le Concile d’Amour d’Oscar Panizza (Rennes). Push up de Roland Schimmelpfennig (Usine Hollander). Marivaux (Usine Hollander). Tableau d’une Exécution d’Howard Barker (Usine Hollander). Nature morte dans un fossé de Fausto Paravidino (Florence). À la veille de cette rencontre aucun problème n’a été réglé (Florence). Et le lendemain non plus (Usine Hollander). Dramen d’après De l’Aube à Minuit de Georg Kaiser (Rennes). Sans la gaîté d’après l’oeuvre d’Henry Monnier (Usine Hollander). Le Cocu Magnifique de Fernand Crommelynck (Choisy-le-Roi). Au bord de la route (Usine Hollander). L’histoire du Soldat de Stravinsky et Ramuz (Centre dramatique de La Courneuve). Dom Juan de Molière (Choisy-le-Roi). Tableaux Anthropométriques (Paris). Bien des nuits nous ont séparés (Florence, Choisy-le-Roi). Kiki d’après La Chasse aux rats de Peter Turrini (Usine Hollander/Choisy-le-Roi). Biographie : un jeu de Max Frisch (Usine Hollander). Deadline (Usine Hollander). Senza Tempo (Usine Hollander). FDdM Flagrant Délit de Mensonge (Usine Hollander) En Allemagne, il met en scène un cycle Molière, l’Avare, Tartuffe, l’École des Femmes (Giessen). Il travaille également pour l’opéra et met en scène Le Cid de Jules Massenet (Rouen), Mort à Venise de Benjamin Britten (Lübeck), Carmen de Georges Bizet (Lübeck). Compagnie La Rumeur Usine Hollander La compagnie La Rumeur est subventionnée par la Direction Régionale des Affaires Culturelles d’Île-deFrance Ministère de la Culture et de la Communication, la Région Île-de-France, le Conseil Général du Val-de-Marne et la ville de Choisy-le-Roi. La compagnie La Rumeur est implantée à l’Usine Hollander, une ancienne tannerie située le long de la Seine à Choisy-le-Roi. Cette friche industrielle, après des travaux d’aménagement et de mise en conformité est devenue une fabrique de théâtre, un lieu d’expérimentation, de production et de réalisation des spectacles de la compagnie, un lieu de résidence et de transmission. Foi amour espérance ödön von Horváth Cie La Rumeur Presse Catherine Guizard La Strada &Cies 01 48 40 97 88 06 60 43 21 13 [email protected] COMPAGNIE LA RUMEUR USINE HOLLANDER 1, rue du Docteur Roux F-94600 Choisy-le-Roi compagnielarumeur.com Accès RER C - Station Choisy-le-Roi Production, diffusion Agnès Chaigneau 01 46 82 19 63 06 21 47 65 44 [email protected] Licences N°1- 1066136 - Licence N°2- 1066137