SOCIOLOGIE DU RISQUE (1bis) Une société du risque ?

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SOCIOLOGIE DU RISQUE (1bis) Une société du risque ?
SOCIOLOGIE DU RISQUE (1bis)
Une société du risque ?
!
Christian THUDEROZ
Centre des Humanités
professeur des universités, sociologue, à l'INSA de
Lyon
Le raisonnement d’ULRICH BECK en 10
points…
(tiré de Risikogesellschaft, 1986 - La Société du risque)
• 1. Nous sommes passés d’une situation de risques
pris personnellement (l’alpiniste ouvrant une voie
sur une face Nord) à une situation de menaces
collectives (par ex. : stockage des déchets
nucléaires)
• 2. Contradiction insupportable : assigné à un
destin (un être menacé, vivant dans un
environnement menacé), à une époque où l’on
souhaite vivre sa vie comme un Sujet, c’est-à-dire :
maîtrisant son… destin !
Raisonnement de Beck (suite)
• 3. Un paradoxe : ces risques sont
désormais liés à notre civilisation…
• … et sont peu visibles (à la différence des
risques antérieurs : famine, disette, guerre
de conquêtes, etc.), donc plus
angoissants…
• … et ont besoin de la science pour devenir
« visibles », ou interprétables en tant que «
risques »…
Raisonnement de Beck (suite)
• 4. Or, cette science est, simultanément, la
source et la solution à nos problèmes !
• … et cette science doute d’elle-même (les
experts sont en désaccord, ou se contredisent
les uns les autres…) alors qu’on demande aux
scientifiques plus de certitudes, ou de lever des
incertitudes !
• 5. D’où l’émergence de prétentions divergentes
(à quoi sert la science ? Est-ce Dr Folamour ou
l’Abbé Pierre ?) et un risque de « guerre
civilisationnelle » (pour définir le bon chemin
vers la modernité moderne…)
Raisonnement de Beck (suite)
• 6. En outre, les relations causales entre
phénomènes sont de moins en moins
évidentes (un steak dans l’assiette et vous avez
la maladie de Creutzfeld-Jacob ; étudier à
Jussieu et cancer du poumon dû à l’amiante,
etc.)…
• … et à chaque solution d’un problème : un
problème nouveau, souvent plus grave !
• … d’où un horizon normatif de sécurité : perdu !
Et une confiance dans la science : brisée !
Raisonnement de Beck (suite)
• 7. Les situations d’exposition au risque ne sont
plus cantonnées aux lieux de leur apparition
(l’usine polluante), mais diffuses, étendues à la
vie elle-même. On peut ainsi être exposé
brutalement à un risque en allant cueillir du thym
dans les collines ardéchoises (cf. le nuage de
Tchernobyl…)
• 8. Les risques, comme les richesses, sont l’objet
d’une répartition inégale. L’exposition aux
risques, comme hier le risque de pauvreté, est
différent selon les classes sociales. Vous avez
plus de chances d’être exposé à un risque
industriel si vous êtes salarié chez Métaleurop
que si vous êtes sociologue à l’INSA…
Raisonnement de Beck (suite)
• 9. N’oublions pas, cependant, l’effet
égalisateur du risque (il est devenu…
plus démocratique !) : à l’intérieur du
périmètre d’exposition, plus de classes
sociales ! Même les riches et les puissants
seront en insécurité… Et sur la route
toulousaine qui borde AZF, après
l’explosion, il ne subsiste plus qu’une entité
unique : les bourreaux et les victimes…
Raisonnement de Beck (suite)
• 10. Que faire ?
• Approfondir, étendre la démocratie…
• … en favorisant la « subpolitique », soit l’action
militante et protestataire, les initiatives de
contrôle citoyen, les forums « alter », les contreexpertises, les revendications de participer aux
débats et aux décisions, etc…
• … donc en garantissant, par des règles
institutionnelles et légales, les moyens et les
procédures de cette subpolitique…