La Sacem a fiché des p2pistes sans autorisation

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La Sacem a fiché des p2pistes sans autorisation
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La Sacem a fiché des p2pistes sans autorisation préalable de la CNIL . Source Le
Monde.
24-12-2006
2 000. C'est le nombre de titres qu'a téléchargés Laurent Fernandez, du temps où il était p2piste acharné. Entre 2001
et 2003 le bonhomme est plutôt boulimique en matière de téléchargement ; puis il freine et peu à peu se désintéresse…
Mais, en 2004, le nombre de fichiers musicaux qu'il a accumulés sur son disque dur suscite l'intérêt d'un agent
assermenté, diligenté par la Sacem pour repérer les contrefacteurs.
A cette époque, l'objectif des représentants des ayants droit et de leurs partenaires de l'industrie du disque est de faire
des exemples, d'obtenir des jugements dissuasifs. Il faut éloigner les internautes des téléchargements illégaux non
rémunérateurs et les accompagner vers les plates-formes légales qui poussent alors un peu partout sur le Web.
L'adresse IP de Laurent Fernandez est relevée, comme la liste des titres copiés. Le dossier est transmis à la police, qui
ouvre une enquête. C'est le début d'un long feuilleton judiciaire, qui dure deux ans. Il a pris fin le 14 décembre dernier
avec la décision du tribunal correctionnel de Nanterre de relaxer Laurent Fernandez. L'ancien téléchargeur peut
remercier ses avocats qui ont cherché dans la procédure de quoi défendre leur client. "L'agent assermenté de la
Sacem (Société des auteurs et compositeurs), auteur de la collecte et de la conservation des données personnelles de
connexion et de l'adresse IP de l'internaute, n'avait pas obtenu au préalable l'autorisation de la CNIL", explique maître
Jean-Philippe Hugot.
"LA PLUPART DES POURSUITES JUDICIAIRES VONT TOMBER"
En 2005, la SCPP (Société civile des producteurs phonographiques) et la Sacem ont longuement négocié auprès de la
Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) pour obtenir l'autorisation d'automatiser la chasse à
l'internaute contrefacteur. Mais le 25 octobre 2005, la CNIL annonce son refus. La commission rappelle également une
décision du Conseil constitutionnel selon laquelle "les données collectées à l'occasion des traitements portant sur des
infractions aux droits d'auteur ne peuvent acquérir un caractère nominatif que sous le contrôle de l'autorité judiciaire".
Toujours selon la CNIL, les dispositifs de détection proposés ne sont "pas proportionnés à la finalité poursuivie",
notamment car ils "peuvent aboutir à une collecte massive de données à caractère personnel" et permettent "la
surveillance exhaustive et continue des réseaux d'échanges de fichiers de pair à pair".
La SCPP précise alors que "la décision de la CNIL ne la prive pas, et encore moins les pouvoirs publics, de moyen
d'actions pour lutter contre la piraterie musicale".
Selon Jean-Baptiste Soufron, juriste de l'Association des audionautes, association de défense des internautes, la
Sacem et la SCPP "comptaient sur cet accord avec la CNIL pour régulariser a posteriori des dossiers constitués sur la
base de fichiers illicites. Cette régularisation n'a pas eu lieu. Arrivent aujourd'hui devant les tribunaux des procédures
qui ont été activées sur la base de ces dossiers". "La plupart des poursuites judiciaires vont tomber les unes après les
autres", assure Aziz Ridouan, président de l'association.
Pour la SCPP, la décision du tribunal correctionnel de Bobigny est "une erreur". "Il n'y a pas eu de traitement
automatisé des données, mais un traitement manuel réalisé par un agent assermenté comme la loi l'autorise", assure
Marc Guez, directeur. "Il existe une importante jurisprudence qui nous donne raison", poursuit-il. "C'est parce que la
question de la légalité de la procédure n'a jamais été abordée sous cet angle" , répond Jean-Baptiste Soufron.
"COMBIEN DE FAMILLES ONT ÉTÉ SURVEILLÉES DANS LEUR USAGE ?"
Interrogé par le Monde.fr, maître Eric Ravinetti, avocat de la SCPP, demeure confiant : "Le parquet a fait appel", assure-til. "Dans cette affaire, il n'y a pas de traitement informatique qui nécessite l'autorisation préalable de la CNIL." Avant de
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mettre en garde contre une "interprétation malhonnête de la loi".
Pourtant, selon la CNIL elle-même, la nécessité d'une autorisation de ses services ne fait aucun doute. "L'adresse IP
est une donnée qui permet d'identifier indirectement un individu. C'est donc bien une donnée à caractère personnel. En
ce qui concerne la collecte de données, la loi souligne que tout traitement relatif à une infraction demande une
autorisation préalable de la CNIL. Est-ce que le procédé utilisé pour construire le dossier Fernandez est constitué de
données à caractère personnel qui doivent faire l'objet d'une autorisation préalable de la CNIL ? La réponse est oui",
souligne Mathias Moulin, juriste à la Commission. C'est sur cette base que les juges de Bobigny ont conclu à la nullité de
la procédure.
"Aujourd'hui les internautes qui ont été traqués par ces organismes peuvent se retourner contre eux. Il faut se rappeler
que ces personnes n'avaient aucun antécédent judiciaire et, soudainement, ont subi une perquisition et une garde à vue
et ont dû affronter les juges et une longue procédure judiciaire", rappelle Aziz Ridouan.
Pour Jean-Pierre Quignaux de l'Union nationale des associations familiales, cette affaire souligne la fragilité de la
sphère privée sur le réseau et la nécessité de la protéger de divers appétits. "Environ 200 personnes ont été
poursuivies en justice. Mais combien ont fait l'objet d'une traque pour aboutir aux quelques boucs émissaires ?
Comment se fait la sélection ? Qui décide que celle-là sera poursuivie et pas cette autre ? Combien de familles ont été
surveillées, traquées dans leurs usages ? Nous comptons nous rapprocher de la CNIL prochainement pour voir ce qu'il
convient de faire."
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