Les grandes villes et leur périphérie

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Les grandes villes et leur périphérie
Les grandes villes et leur périphérie:
coopération et gestion coordonnée
Communes et régions d'Europe, n° 51
Les grandes villes et leur périphérie:
coopération et gestion coordonnée
Rapport préparé par le Comité directeur
des autorités locales et régionales (CDLR)
e
pour la 10 Conférence des ministres
européens responsables des collectivités locales,
La Haye, 15-16 septembre 1993
Communes et régions d'Europe, n° 51
Les éditions du Conseil de l'Europe, 1993
Edition anglaise:
Major cities and their peripheries: co-operation and co-ordinated management
ISBN
Strasbourg, Conseil de l'Europe, Service de l'édition et de la documentation
ISBN
© Conseil de l'Europe, 1993
Imprimé dans les ateliers du Conseil de l'Europe
-3TABLE DES MATIERES
Page
1.
Introduction ............................................................................................................................................... 5
2.
Champ de l'étude....................................................................................................................................... 6
3.
Structures administratives communes englobant la ville et sa périphérie......................................... 7
A.
Différents types de structures ........................................................................................................ 7
i.
ii.
iii.
iv.
Fusion de communes........................................................................................................ 7
Recours aux collectivités territoriales ordinaires de
l'échelon supérieur............................................................................................................ 7
Création d'autorités spéciales à l'échelle de l'agglomération........................................... 8
La coopération communale traditionnelle ..................................................................... 11
B.
Nomination des organes de décision........................................................................................... 13
C.
Méthodes de financement des structures administratives communes ........................................ 15
4.
Modes de coordination moins formels .................................................................................................. 16
5.
Tendances dans les différents Etats européens.................................................................................... 18
6.
Choix des structures administratives les plus aptes à assurer
un développement équilibré entre la ville et sa périphérie................................................................. 21
7.
La péréquation financière entre la grande ville et la périphérie ....................................................... 24
8.
Mesures gouvernementales visant à promouvoir un meilleur équilibre
entre la ville et la périphérie................................................................................................................... 26
9.
Participation des citoyens à l'aménagement de la ville et de la périphérie ...................................... 29
10.
Remarques finales ................................................................................................................................... 32
Annexe I:
Tableau indicatif d'autorités englobant de
grandes zones urbaines.............................................................................................................. 33
Annexe II:
Résolution sur les grandes villes et leur périphérie:
coopération et gestion coordonnée, adoptée par la 10e Conférence
des ministres européens responsables des collectivités locales............................................. 37
-4-
-5-
1.
Introduction
Le problème des relations entre les grandes villes et leurs banlieues/leur périphérie n'est nullement
nouveau. Le décalage qu'on observe, d'une manière générale, entre d'une part les limites administratives des
villes et d'autre part, l'étendue réelle de l'agglomération date au moins du grand mouvement d'urbanisation qu'a
connu l'Europe sous l'influence de la révolution industrielle. Il est souvent nécessaire d'adapter les structures
administratives existantes à la réalité physique.
Mais s'il est vrai que cette nécessité est un phénomène déjà ancien, elle a malgré tout pris une
dimension nouvelle depuis la deuxième guerre mondiale. Les facteurs qui expliquent cette évolution sont
nombreux et complexes; nous en retiendrons deux.
Tout d'abord, la mobilité accrue a développé considérablement l'interaction et l'interdépendance entre
la ville-centre et la périphérie. Dans de nombreux pays les principales villes ont vu leur chiffre de population
diminuer sensiblement, par suite du départ d'un grand nombre de leurs habitants vers des périphéries moins
denses et moins polluées. Il en est résulté de nouvelles entités spatiales "naturelles" reposant sur des schémas
de migration journalière, sur la consommation de services publics, sur des équipements de loisirs et sur la quête
de terrains constructibles.
Elle a également accentué les déséquilibres financiers entre la ville et la périphérie. Dans certains pays,
par exemple dans le nord-ouest de l'Europe, on observe que, au fur et à mesure que les gens deviennent plus
aisés, ils se sont installés dans les périphéries, abandonnant de nombreux quartiers centraux aux groupes
socialement défavorisés, aux minorités ethniques, etc. De nombreux services commerciaux ont emboîté le pas à
leurs clients quittant le centre-ville; en même temps un certain nombre d'entreprises sont attirées par les coûts
plus faibles et les communications plus faciles. Dans ces conditions, la grande ville se trouve aux prises avec la
plupart des problèmes sociaux coûteux, tout en étant privée d'une grande partie des recettes dont elle a besoin
pour les résoudre. Toutefois, dans d'autres pays, on observe une relation plus traditionnelle caractérisée par la
domination du centre et la dépendance de la périphérie. Ici, le centre ville n'a pas encore perdu son attrait sur le
plan résidentiel, alors qu'au contraire les communes satellites sont souvent surpeuplées et mal loties en termes
d'infrastructures, d'équipements publics, d'environnement social et de qualité de la vie. Dans un cas comme
dans l'autre, la structure existante est le résultat des problèmes de croissance et non de méthodes rationnelles
d'organisation des systèmes urbains.
Naturellement, les processus de rénovation et d'autres facteurs peuvent entraîner des variations par
rapport à ces deux schémas. En particulier, dans plusieurs pays "l'embourgeoisement" de certains quartiers
centraux a donné lieu à une tendance contraire à celle mentionnée plus haut, en créant une situation dans
laquelle seules les catégories aisées peuvent se permettre d'habiter le centre-ville.
D'autre part - et c'est là le deuxième facteur - l'après-guerre a vu le développement, notamment au
niveau local, d'un type de gestion plus interventionniste, dans lequel on planifie le développement de la
collectivité et l'on fournit un large éventail de services dans une société pluraliste. Même si, au cours des
dernières années, on est devenu beaucoup plus sceptique quant aux possibilités offertes par l'aménagement à
grande échelle et même si l'on met en question de plus en plus volontiers l'ampleur légitime du rôle des
pouvoirs publics, la nature même de la société moderne fait qu'on ne peut inverser le cours d'une telle
évolution. Pourtant, dans cette situation, les divisions administratives entre la ville-centre et la périphérie sont
beaucoup plus gênantes, du point de vue d'une gestion efficace, que ce ne serait le cas si les collectivités locales
demeuraient en grande partie confinées à un rôle régulateur. Il est rationnel qu'existe, sous une forme ou sous
une autre, une coopération entre la ville et la périphérie, aux fins de la bonne exécution de fonctions telles que
le développement et l'élaboration des plans d'occupation du sol, les implantations industrielles, la fourniture
d'énergie et d'eau, ou encore l'élimination des déchets. En même temps il faut qu'il y ait des structures pour une
action concertée tendant à prévenir ou à corriger les effets extérieurs négatifs de la politique suivie par telle ou
telle commune, qu'il s'agisse des encombrements de la circulation automobile, de la pression sur l'immobilier et
sur les équipements de loisirs, de la pollution de l'environnement, etc. - et tendant également à corriger les
graves déséquilibres (qui se renforcent d'eux-mêmes) entre zones prospères et zones appauvries.
-6En outre, la volonté actuelle d'encourager le développement durable appelle un effort important de
coopération et de coordination entre tous les acteurs, publics et privés, entrant en jeu dans une zone urbaine.
Certes, dans certains pays, le processus traditionnel d'annexion et d'extension du territoire par la villecentre s'est poursuivi jusqu'à ces dernières années, de sorte que, théoriquement l'ensemble de la zone urbaine
sera inclus dans une seule unité administrative locale. Mais même là il y aura toujours, subsidiairement, des
problèmes de coordination, notamment dans le contexte qui vient d'être esquissé. Même les villes périphériques
situées dans la couronne des migrations alternantes feront partie d'un système plus diffus, fonctionnellement
interdépendant. Mais dans d'autres cas, la fragmentation des communes à l'intérieur de la zone urbaine est si
grande que si l'on ne prenait pas de mesures pour y remédier, la capacité de l'administration locale de satisfaire
les besoins et les attentes des citoyens serait gravement compromise. De surcroît, dans le cas particulier des
pays de l'après-communisme, on observe une tendance au démembrement des vastes entités urbaines existantes
: ainsi, la ville de Varsovie est maintenant divisée en plusieurs communes. Enfin, dans les pays fortement
urbanisés, on observe le phénomène de la juxtaposition de deux ou plusieurs villes qui ont fini par former un
système urbain comportant plusieurs centres et plusieurs flux multidirectionnels de personnes, de services, etc.
Aux fins de la définition d'une politique, il est rationnel de considérer ces centres urbains comme une seule et
même conurbation.
2.
Champ de l'étude
Le présent rapport a été conçu comme une étude technique destinée à servir de base aux délibérations
politiques autour du premier thème de la 10e Conférence des ministres européens responsables des collectivités
locales qui s'est tenue les 15 et 16 septembre 1993 à La Haye. Il ne passe pas en revue tous les problèmes de
gestion et de développement des grandes zones urbaines, mais examine la question particulière des structures
administratives dont il faut disposer pour assurer la coordination nécessaire entre les grandes villes et leur
périphérie. Il traitera de manière plus ou moins détaillée des trois types de situations mentionnées au
paragraphe précédent.
-
suppression de la division des agglomérations entre plusieurs autorités municipales;
-
coopération entre les centres urbains et leur arrière-pays partiellement rural, semi-rural ou semi
suburbain;
-
coordination du développement et de la gestion de plusieurs centres urbains qui, dans la
pratique, forment une seule conurbation.
D'une manière générale, ce rapport concerne les villes d'au moins 150.000 habitants (mais lorsqu'on a
affaire à une conurbation de plusieurs centres urbains, il n'est pas nécessaire que l'un ou l'autre d'entre eux
atteigne à lui seul ce chiffre): dans les villes de moins de 150.000 habitants, certains des problèmes
caractéristiques des grandes zones urbaines peuvent exister également mais ils ne se posent pas toujours avec la
même acuité.
Aux fins de la présente étude, la notion de périphérie peut être comprise comme suit:
l'espace et les collectivités locales autonomes situés autour des frontières administratives d'une
grande ville et dont la structure sociale et économique, le potentiel de développement urbain,
l'aménagement spatial, l'habitat, les systèmes de transport, l'environnement et la qualité de la vie
sont étroitement liés à ceux de la ville-centre.
3.
Structures administratives communes englobant la ville et sa périphérie
A.
Différents types de structures
-7i. Fusion de communes
Dans plusieurs pays, il n'existe pas de dispositions générales concernant les structures de coopération
entre la ville et la périphérie. Cela vaut, par exemple, pour la Hongrie, depuis la réforme des collectivités
locales de 1990.
Le plus souvent, cela s'explique par le fait que la réorganisation territoriale de l'administration locale
avait notamment pour objectif de redéfinir les limites des agglomérations urbaines de telle manière que les
communautés qui, naguère, occupaient le territoire de plusieurs collectivités locales constituent désormais une
seule et même commune.
Tel est le cas, par exemple, au Danemark, exception faite pour les collectivités locales dans le comté de
Copenhague (y compris les deux municipalités centrales de Copenhague et Frederiksberg). En Belgique
également, le vaste regroupement de communes effectué à la fin des années 70 et au début des années 80 - qui a
eu pour effet, par exemple, d'opérer la fusion de la Ville d'Anvers avec les sept communes adjacentes pour
aboutir à une seule et unique Ville d'Anvers - a fait disparaître, pour l'essentiel, la nécessité d'associer les
collectivités locales pour l'exécution de certaines fonctions. De même, en Espagne, la grande ville et sa
banlieue font généralement partie de la même commune, de sorte qu'on ne juge pas nécessaire de créer des
formes juridiques de coordination.
Signalons aussi que des fusions de ce genre ont constitué la solution habituelle dans les pays
communistes d'Europe centrale et orientale, où elles ont été imposées par des voies administratives et non
démocratiques. Toutefois, dans plusieurs villes, telles que Prague, les effets de cette fusion ont été mitigés par
la création d'un échelon subordonné d'administation au sein de la grande commune englobant l'ensemble de
l'agglomération.
Au lieu de fusionner entièrement toutes les communes d'une conurbation, on préfère parfois une
réforme moins radicale aboutissant non pas à une commune unique, mais à des communes moins nombreuses
qu'auparavant. Tel a été le cas à Liège.
Les fusions générales constituent la solution la plus radicale aux problèmes de coordination dans un
contexte urbain. Toutefois, elles ne suffisent pas à éliminer toute inadéquation entre, d'une part, les limites
administratives et, d'autre part, les multiples interconnexions qui existent, dans la pratique, entre une grande
ville et sa périphérie (migrations journalières, utilisation des services publics etc.). Certains problèmes devront
toujours être abordés par d'autres moyens. De surcroît, l'extension traditionnelle des grandes villes par
l'incorporation dans leur aire administrative de territoires limitrophes a pratiquement cessé, étant donné que les
communes périphériques résistent avec de plus en plus de succès à un tel sort. L'attention se trouve ainsi attirée
sur d'autres solutions possibles.
ii. Recours aux collectivités territoriales ordinaires de l'échelon supérieur
Dans certains pays il existe, pour les agglomérations les plus importantes, des dispositions spéciales en
vertu desquelles certaines fonctions sont attribuées à une autorité ordinaire de l'échelon supérieur. C'est ainsi
que dans la région de Stockholm la loi sur les collectivités locales prévoit une réglementation spéciale en ce qui
concerne la compétence du conseil de comté, lequel a la responsabilité de l'aménagement du territoire, du
réseau des transports et des soins de santé. En revanche, dans les régions de Göteborg et de Malmö, il n'existe
pas d'arrangement institutionnel de ce genre; la coopération régionale s'exerce par l'intermédiaire de divers
organismes, tels que les compagnies de transport. A Göteborg comme à Malmö, certaines collectivités locales
se sont regroupées en associations privées, à des fins d'aménagement du territoire.
Le cas de Genève est comparable, dans la mesure où l'Etat cantonal exerce des compétences (transports
publics et police, par exemple) qui sont, dans d'autres cantons suisses, attribuées aux communes. Une situation
analogue existe à Vienne, ville qui a un double statut puisqu'elle est en même temps un Land; il en est de même
-8à Berlin, Hambourg et Brême.
Toutefois, lorsque de telles entités (ville-Etat ou ville-région) ne sont pas de création récente, elles
présentent parfois un inconvénient, à savoir que la conurbation qui existe aujourd'hui s'étend au-delà de leurs
limites, de sorte qu'elles ne remplissent plus la fonction primaire qui nous intéresse ici. Cela vaut notamment
pour Hambourg, Brême et Berlin, où les contraintes du système fédéral font qu'il est pratiquement impossible
de modifier les limites du Land. L'on peut dire que c'est également le cas à Oslo, qui a fait l'objet d'une solution
analogue par laquelle la ville est dotée du statut et des compétences à la fois d'une municipalité et d'un comté:
entourée du comté relativement urbanisé d'Akershus avec ses quelques 420.000 habitants, Oslo est obligée de
coopérer aussi bien avec des communes de ce comté qu'avec le conseil de comté lui-même, de la même manière
que d'autres communes et comtés coopèrent entre eux.
iii. Création d'autorités spéciales à l'échelle de l'agglomération
Il arrive plus fréquemment qu'on crée une autorité spéciale de l'échelon supérieur pour les zones
urbaines qui ne correspondent pas aux structures territoriales existant dans le reste du pays. En général, ces
instances sont créées par une loi spéciale qui leur donne mandat d'exercer un certain nombre de fonctions bien
définies au profit de la conurbation dans son ensemble. Voici quelques exemples de ce genre d'autorité
spécifique à vocation multiple.
En 1971, le législateur belge a mis en place une structure administrative permettant la création d'entités
appelées "agglomérations" dans les zones métropolitaines. Jusqu'ici, une seule agglomération a été créée, celle
de Bruxelles. Un certain nombre de fonctions municipales lui ont été transférées:
-
collecte et traitement des déchets
transports en commun
lutte contre l'incendie
assistance médicale urgente
adduction d'eau
nettoyage de la voie publique, des marchés, des parcs, etc.
déneigement
création de la voirie urbaine par la reprise de voiries municipales, sa gestion et l'éclairage
public
services informatiques pour les communes bruxelloises.
On observe une situation analogue en Finlande; en vertu de dispositions légales, le conseil de la région
métropolitaine d'Helsinki (Helsinki Metropolitan Area Council - HMAC) entreprend des recherches, des
projets d'aménagement et des travaux préparatoires pour les quatre communes constituantes (la capitale, Espoo,
Vantaa et Kauniainen), et il a la charge de la gestion des déchets, des mesures contre la pollution de l'air et des
transports en commun de la région.
Une institution analogue existe en Espagne: le conseil métropolitain de la Horta (zone métropolitaine)
de Valence. Cette autorité regroupe toutes les communes de la région aux fins de la réalisation en commun des
tâches de l'aménagement et de la coordination de certains projets et services. Elle relève juridiquement de la
Communauté autonome, bien que la législation nationale prescrive plusieurs règles en ce qui concerne ces aires
métropolitaines, notamment leur relation avec l'administration de l'Etat, les conseils provinciaux et les
communes concernées.
En France les communautés urbaines (ainsi que les communautés de villes) relèvent de la même
catégorie. Ces communautés, créées elles aussi en vertu d'une législation spéciale, s'occupent des problèmes de
coordination des services et des infrastructures qui surgissent entre les grandes villes et les communes
périphériques; ces problèmes sont souvent plus aigus en France en raison de l'absence d'une réforme territoriale
générale des collectivités locales: ainsi, une simple agglomération urbaine englobe généralement un grand
nombre de petites communes. Toutefois, bien que quatre communautés urbaines - Bordeaux, Lille, Lyon et
-9Strasbourg - n'aient pas été expressément instituées par la loi pertinente (celle de 1966) les autres
établissements ont été créés volontairement sur la base de dispositions générales habilitantes. En vertu de la loi,
onze ensembles de fonctions doivent obligatoirement être transférés à la communauté urbaine, sans préjudice
des compétences qui peuvent lui être librement déléguées par ses communes constituantes. Ces onze ensembles
sont les suivants: élaboration des schémas d'urbanisme; création de zones de développement et de zones
industrielles; transports en commun; logements; sapeurs pompiers; fourniture d'eau; égouts, collecte et
élimination des ordures ménagères; abattoirs; marchés; voirie et parcs de stationnement. Quant aux
communautés de villes, elles ont trois blocs de compétences obligatoires. Le district correspond à un mode de
coopération analogue mais moins intégré, qui est généralement mis en oeuvre dans les petites villes ou les villes
moyennes. Ces institutions se rapprochent davantage des syndicats de communes ordinaires à vocation
multiple, à cela près qu'elles ont certaines compétences obligatoires en matière de logement et de lutte contre
l'incendie et qu'elles peuvent lever des impôts, tout comme les communautés urbaines.
Pour les villes nouvelles françaises, correspondant à de nouvelles zones d'urbanisation, on a adopté une
structure originale: création d'un établissement public d'aménagement destiné à réaliser les acquisitions
foncières ainsi que la viabilisation et l'aménagement des terrains et constitution d'un "syndicat d'agglomération
nouvelle" regroupant les communes concernées. Les neuf syndicats d'agglomération nouvelle exercent des
compétences obligatoires en matière d'urbanisme, de transports et de développement économique et disposent
comme ressource principale de la taxe sur les entreprises (taxe professionnelle) en lieu et place des communes
membres du syndicat. Une partie de la taxe professionnelle d'agglomération nouvelle est toutefois rétrocédée
aux communes par le biais d'une dotation de coopération.
En Allemagne, les villes de Hanovre et Brunswick, Francfort, Sarrebruck et les villes de la Ruhr ont
établi, sur la base de lois adoptées à cet effet dans leurs Länder respectifs, des collectivités communes avec les
villes et les comtés ou villes-comtés de leurs périphéries. Selon leurs structures, ces collectivités s'appellent
Großraumverband (communauté métropolitaine), Umlandverband (communauté ville-périphérie),
Stadtverband (communauté urbaine) ou Kommunalverband (syndicat de collectivités locales).
Les communautés métropolitaines de Hanovre et Brunswick s'occupent, notamment, de questions
concernant les transports locaux, la politique régionale et l'aménagement régional. Leurs membres sont les
villes de Hanovre et Brunswick respectivement et les comtés environnants (Landkreise) ainsi que les villes
comtés et leur périphérie.
L'Umlandverband Frankfurt (communauté groupant Francfort et les collectivités locales de sa
périphérie) a pour tâche de conseiller ses membres afin de les aider à s'acquitter de leurs tâches dans de
nombreux secteurs y compris l'aménagement de la circulation, les transports public locaux, la coordination des
intérêts dans le domaine de la production d'énergie, l'approvisionnement en eau potable et en eau pour
l'industrie ainsi que la gestion des déchets et des eaux usées, et de coordonner et promouvoir un développement
systématique du territoire couvert par l'Umlandverband. Ses membres sont les villes-comtés de Francfort/Main
et Offenbach et toute une série de villes et de comtés de la zone d'influence de Francfort.
En Rhénanie-Westphalie, c'est surtout dans la Ruhr que la périphérie est fortement influencée par les
grandes villes voisines. Ici, le Kommunalverband Ruhrgebiet (syndicat des collectivités locales de la Ruhr)
assume des tâches liées à la coopération entre collectivités locales pour plusieurs grandes villes et leur
périphérie. Conformément à la loi sur le syndicat des collectivités locales de la Ruhr, le syndicat est
essentiellement chargé de sauvegarder les parcs, les plans d'eau et les forêts présentant une importance non
limitée au niveau local pour le rétablissement et la conservation d'un écosystème équilibré. Sa tâche comporte
également la création et la gestion d'équipements de loisirs d'une importance dépassant le niveau local. Le
syndicat a également pour mission d'établir le relevé et la carte du territoire couvert par l'entité commune. Les
collectivités locales membres peuvent en outre charger le Kommunalverband de tâches non limitées au niveau
local comme la gestion des déchets ou l'aménagement des sites.
Enfin, le Stadtverband Saarbrücken (communauté urbaine de Sarrebruck) englobe la capitale de la
Sarre, Sarrebruck, et les villes et collectivités locales environnantes. Pour ses membres, le Stadtverband assume
- 10 les fonctions qui relèveraient autrement des comtés (Landkreise). En outre, et plus largement, il a pour tâche de
coordonner et d'encourager le développement systématique de son territoire. Cette solution peut être
considérée, en quelque sorte, comme le reflet du système décrit au point 2.i, dans lequel la collectivité
territoriale normale de niveau supérieur est chargée de certaines fonctions à l'échelle de l'agglomération.
En Grèce, l'Organisme spécial d'Athènes créé par une loi de 1985, est un établissement public doté de
la pleine indépendance financière et administrative. Il englobe le Nomos (département) d'Athènes ainsi que les
noyaux urbains d'Athènes et du Pirée. Il incombe essentiellement à cet organisme:
-
de surveiller l'application et d'assurer la mise en oeuvre du schéma directeur relatif à la conurbation
athénienne;
-
d'établir des plans d'urbanisme généraux dans l'agglomération et de les faire approuver;
-
de surveiller la qualité de l'environnement et d'appliquer les mesures de protection appropriées;
-
d'harmoniser les programmes établis par les services compétents dans le cadre du schéma directeur.
L'Organisme de Salonique est comparable, sur la plupart des points à celui d'Athènes.
Au Portugal il existe deux régions métropolitaines, dont chacune possède ses institutions légales: la
région de Lisbonne et la région de Porto. La première englobe 18 communes et compte plus de 2,5 millions
d'habitants; la seconde comprend neuf communes, pour une population de 1,1 million d'habitants. Dans un cas
comme dans l'autre, la disparité de la population (et de la superficie) entre la ville-centre et les communes
périphériques est moins importante que dans la plupart des agglomérations européennes comparables. Ce relatif
équilibre entre la ville et la périphérie explique en partie la difficulté d'établir des liens institutionnels et de
créer des structures de gestion pour l'ensemble de la conurbation. Le statut définitif des deux régions
métropolitaines a été arrêté en 1991. Ce sont des entités territoriales de droit public correspondant à un syndicat
de communes établi par voie législative après consultation des autorités municipales concernées. Les deux
régions exercent les tâches suivantes:
- investissements
- services divers, y compris les transports et les communications
- infrastructures en matière d'hygiène
- fournitures publiques
- environnement et ressources naturelles
- aménagement du territoire
- avis concernant les investissements de l'Etat ou ceux financés par la Communauté européenne
- création de leurs propres services techniques
- autres tâches qui leur sont déléguées par les communes ou par l'Etat.
Les régions métropolitaines que l'on est en train de mettre en place en Italie representent un autre
exemple d'organisme spécifique à vocation multiple, chargé d'assurer la gestion coordonnée de conurbations
entières. Il s'agit d'un nouveau type d'administration locale qui s'appelle ville métropolitaine et qui remplace la
province dans le territoire dans lequel elle est instituée. La ville métropolitaine comprend la ville centre et
plusieurs communes qui sont unies par la géographie et entretiennent des relations étroites en matière
d'activités économiques, de services sociaux essentiels et de relations culturelles. Chaque commune faisant
partie de la ville métropolitaine jouit de l'autonomie qui lui est attibuée par la loi de réforme de 1990.
Toutefois, relèvent de la compétence de la ville métropolitaine les services qui ont un caractère supracommunal
ou qui doivent être executés à ce niveau pour des raisons d'efficacité ou d'économie d'échelle. En particulier, la
ville métropolitaine, en plus des compétences de la province prévues par la loi de l'Etat, est aussi compétente
dans les domaines suivants, conformément à la règlementation régionale: aménagement de l'espace de la région
métropolitaine, voirie, transport et circulation, sauvegarde et exploitation des oeuvres d'art, protection de
l'environnement, protection du sol, conservation hydrogéologique, exploitation des sources hydrologiques,
- 11 enlèvement des déchets, stockage et fourniture d'eau potable, fourniture d'énergie, services de développement
économique et de distribution à grande échelle, grands services dans le domaine de la santé publique, du
système scolaire et de la formation professionnelle.
A côté des autorités urbaines à vocation multiple, on peut mentionner également une institution moins
courante: l'autorité spécialisée à vocation unique, dont la loi prévoit la mise en place pour certaines
conurbations. La zone urbaine de Barcelone en offre deux exemples; en effet la législation de la Generalitat de
Catalogne prévoit une autorité métropolitaine chargée des transports et une autorité métropolitaine chargée des
services de l'eau et du traitement des déchets.
Entre autres exemples importants du même phénomène, on peut citer ce qu'on appelle en Angleterre
les joint authorities, créées par la loi de 1985 sur les collectivités locales pour les régions métropolitaines de
Greater Manchester, Merseyside, South Yorkshire, Tyne and Wear, West Midlands et West Yorkshire. Dans
chaque région il existe trois joint authorities distinctes couvrant tous les districts: l'autorité de police, l'autorité
de la lutte contre l'incendie et de la défense civile ainsi que l'autorité des transports en commun. En outre, le
ministre compétent est habilité à mettre en place des joint authorities pour la réglementation et l'élimination
des déchets dans certaines régions métropolitaines; des autorités communes de ce genre ont été établies pour le
Greater Manchester et le Merseyside. De même, une autorité de lutte contre l'incendie et de la protection civile
ainsi qu'une autorité de la réglementation des déchets ont été créées pour l'ensemble du territoire du Grand
Londres (Greater London), avec la participation de délégués de chaque London borough ainsi que de quatre
autorités chargées de l'élimination des déchets pour telle ou telle zone du Grand Londres.
Il est intéressant d'observer que, tant en ce qui concerne les régions métropolitaines anglaises que dans
le cas de Barcelone, la création des autorités communes spécialisées (investies d'une mission unique ou d'un
ensemble très restreint de missions étroitement apparentées) a suivi la suppression des organismes à vocation
générale qui existaient au même niveau (conseils de comté métropolitains et Greater London Council, conseil
métropolitain de Barcelone).
Des dispositions analogues existent dans d'autres pays. Ainsi, au Danemark, la loi dispose que les
transports en commun dans la plupart des comtés sont assurés par des compagnies de transport exploitées
conjointement par le conseil municipal et le conseil de comté: on a l'obligation de mettre en place une
commission spéciale, qui représente les conseils et agit en leur nom, et qui a la responsabilité des décisions en
matière de dépenses. Dans l'agglomération de Copenhague ces fonctions sont confiées à la Société de transport
de la région métropolitaine, créée par voie législative. Aux Pays-Bas également, des lois sectorielles (par
exemple éducation, santé publique, services de l'emploi et police) divisent le pays en régions, aux fins de ces
objectifs spécifiques. Dans certains cas, les communes de ces régions sectorielles sont tenues de coopérer dans
les domaines pertinents; dans d'autres cas, la loi institue un organisme à vocation unique. Toutefois, de tels
systèmes ont une application générale et ne sont pas conçus expressément pour les régions urbaines.
iv. La coopération communale traditionnelle
Chaque fois que la loi n'a pas prévu de structures spécifiques pour résoudre les problèmes de
coordination entre la ville et sa périphérie, on continue d'avoir recours à la formule générale de l'association ou
du syndicat de collectivités locales - formule accessible aussi bien aux communes urbaines qu'aux communes
rurales (telle est la solution normale, par exemple, en Autriche, en Belgique, au Danemark, en Finlande, en
Allemagne, aux Pays-Bas, en Norvège et en Pologne). Dans ce système, les municipalités associées délèguent,
en général de leur plein gré (et, en théorie du moins, à titre provisoire), certaines de leurs attributions à une
autorité commune, qui exerce alors ces attributions en son nom propre. L'organe de décision de l'autorité
commune est, en principe, une assemblée composée de délégués des municipalités membres. Dans la plupart
des pays, le régime juridique applicable à ces associations est relativement souple, qu'il s'agisse de la nature et
du nombre des fonctions pouvant être confiées à une autorité commune, ou du nombre de municipalités
admises à participer. En tout état de cause, la forme ou l'étendue géographique de ces syndicats de communes
peuvent être assujetties à certaines conditions.
- 12 Ainsi, aux Pays-Bas, la loi de 1985 révisée sur la réglementation commune, qui procédait du souci de
simplifier un paysage intercommunal fort complexe, fait obligation aux provinces de diviser leur territoire en
zones de coopération, et stipule que les communes en règle générale coopèrent avec d'autres communes situées
dans la même zone. Des exceptions à cette règle sont possibles dans certaines circonstances, liées à la nature et
à l'ampleur des tâches en question. Au Danemark, les accords en vertu desquels les autorités locales peuvent
instituer des commissions spéciales habilitées à agir en leur nom sont soumis à l'approbation préalable de
l'autorité de contrôle; on entend ainsi s'assurer que l'accord donnera aux conseils locaux la possibilité de
surveiller l'activité, afin qu'ils puissent être considérés comme politiquement responsables par leurs électeurs.
En Finlande également, les fédérations de communes, bien qu'elles soient souvent librement consenties,
peuvent être imposées par la loi; elles se limitent généralement à un seul domaine de compétence.
En Belgique, les communes peuvent créer des sociétés intercommunales pour la distribution
d'électricité, de gaz ou d'eau, la diffusion de programmes télévisés, l'expansion économique, l'habitat et la
politique foncière, la collecte et le traitement des déchets, les crématoriums, les soins aux handicapés, les
équipements sportifs, culturels ou médico-sociaux et la gestion administrative par l'informatique. En outre, les
collectivités locales peuvent conclure des accords aux termes desquels l'organisation de l'enseignement
artistique au profit des habitants de plusieurs communes est confiée à un seul établissement; ou encore, des
accords provisoires pour la construction d'une route sur le territoire de deux ou plusieurs communes. La loi
prévoit aussi la mise en place de commissions intercommunales à des fins de coordination en matière de police;
et elle définit, dans ce domaine, des procédures de coopération entre communes limitrophes, avec l'accord du
gouverneur de la province. Enfin, s'agissant des sapeurs-pompiers et, en ce qui concerne la Région flamande,
du traitement des déchets, il est prévu une coopération obligatoire dans le cadre de laquelle le gouverneur de la
province décide unilatéralement de la composition des groupements auxquels les communes sont tenues
d'appartenir.
Dans certains pays, tels que l'Allemagne et l'Autriche, on établit une distinction parmi les structures
administratives de coopération entre collectivités locales, selon qu'elles relèvent du droit privé ou du droit
public. Alors que, dans ce dernier cas, les structures s'apparentent étroitement aux autorités communes spécialisées ou polyvalentes - qu'on connaît bien ailleurs, les types de coopération de droit privé fonctionnent
essentiellement dans le cadre des activités économiques des collectivités locales. En Autriche, il y a certains
syndicats de communes dont la création est juridiquement obligatoire et qui sont établis sur la base de
dispositions légales; c'est le cas par exemple des associations qui s'occupent de questions concernant la
citoyenneté autrichienne ou bien de l'ouverture et de l'entretien d'écoles primaires et d'écoles secondaires; c'est
également le cas, dans certains Länder, des groupements pour l'organisation et la gestion de l'assistance sociale
et des groupements pour les écoles maternelles, les hôpitaux, la collecte des déchets et l'élimination des eaux
usées. En revanche, la mise en place de réseaux de tourisme, par exemple, peut donner lieu à la formation de
groupements sur la base d'accords de droit privé librement consentis; ces groupements peuvent revêtir telle ou
telle forme selon ce qu'on souhaite (association, société à responsabilité limitée, simple contrat).
En Allemagne, on a créé des entités communes essentiellement dans les domaines de l'éducation, de la
protection contre l'incendie, des affaires culturelles, de l'agriculture et de la sylviculture, de la voirie, de
l'évacuation des déchets, de l'approvisionnement en eau, de l'évacuation des eaux usées, de la protection sociale
et de l'action sociale en faveur des jeunes. La base juridique sur laquelle elles reposent réside dans les lois des
Länder sur les tâches communes et/ou la coopération au niveau des collectivités locales. En règle générale, les
associations sont volontaires. Néanmoins, on oblige parfois des collectivités locales à créer des organes
communs, appelés Pflichtverbände, pour s'acquitter de tâches déléguées par l'Etat et de fonctions obligatoires
chaque fois que l'intérêt public l'exige.
Une gamme d'instruments comparable existe dans d'autres pays. Ainsi, en Suisse la Ville de Lausanne,
qui forme une agglomération avec 42 autres communes, pratique avec certaines d'entre elles trois formes de
coopération: l'entente intercommunale, pour l'exploitation en commun de certaines installations (par exemple
une station d'épuration des eaux usées), sans qu'il y ait création d'un nouvel organe doté de la personnalité
juridique; la société anonyme, au sein de laquelle chaque commune concernée est un actionnaire (par exemple,
pour les transports en commun ou pour la construction et la gestion d'une patinoire); enfin, plus rarement,
- 13 l'association de communes, impliquant la création d'une entité juridique sur la base de statuts approuvés par les
conseils locaux, et ratifiés ensuite par le pouvoir exécutif cantonal. La Ville de Zurich est partie prenante dans
des associations intercommunales s'occupant, entre autres, de l'aménagement du territoire, des transports en
commun et de la fourniture d'eau potable, de gaz et d'électricité. Une diversité similaire de forme de
coopération intercommunale existe à Berne. Outre des accords bilatéraux dans le domaine de
l'approvisionnement en gaz et en eau, des égouts, de l'évacuation des déchets, des transports publics et des
écoles, on peut citer une association de droit privé pour la coopération et la coordination générales et pour
l'aménagement régional de la région de Berne, une association communale de droit public pour les hôpitaux et
un comité de l'eau pour la région de Berne sous forme de société privée.
La Norvège fait partie des pays où il n'existe que peu de restrictions juridiques à la faculté des
communes et des comtés de déléguer volontairement à un comité conjoint la compétence de résoudre des
problèmes locaux. Toutefois, l'on estime actuellement que la situation en matière de planification dans les
villes norvégiennes et leurs communes environnantes témoigne d'un manque d'une politique nationale à long
terme. Par conséquent, le gouvernement entend émettre des directives nationales pour la coordination de
l'aménagement du territoire et de la planification des transports dans les agglomérations urbaines composées de
plusieurs communes.
En Irlande, les collectivités locales peuvent conclure des arrangements pour établir en commun des
plans concernant la qualité de l'eau et de l'air, des schémas de développement, etc. Elles peuvent aussi instituer
des comités mixtes dont les membres sont nommés par chaque autorité, pour étudier toute question d'intérêt
commun. En vertu de la législation promulguée en 1991, ces comités mixtes peuvent être institués en tant que
personnes morales distinctes, et ils peuvent exercer, par délégation, certaines fonctions des collectivités locales.
La compétence d'un comité mixte peut, du point de vue de ses fonctions, s'exercer sur tout ou partie du
territoire occupé par les collectivités constituantes.
Il est à noter également qu'en Irlande une collectivité peut assurer un service au profit d'une autre
collectivité sur tout ou partie du territoire administratif de cette dernière et moyennant sa participation aux frais.
A Dublin, cette formule est utilisée pour des services tels que les sapeurs pompiers, la taxe sur les véhicules à
moteur, la délivrance des permis de conduire, l'eau, etc. L'autorité pourvoyeuse du service a la responsabilité de
l'exploitation. En Allemagne, les collectivités locales peuvent conclure des accords de droit public en vertu
desquels une des parties peut assumer soit sous sa propre responsabilité, soit pour leur compte certaines tâches
des autres collectivités locales concernées. Il existe des arrangements similaires dans d'autres pays (Pologne
par exemple).
Il est clair, toutefois, que bien que toutes ces formes de coopération puissent être appliquées dans les
conurbations, elles ne sont pas nécessairement plus utiles dans ce contexte que dans d'autres. Il sera nécessaire
de se poser à nouveau la question de leur adéquation aux problèmes des grandes villes.
B.
Nomination des organes de décision
Lorsque des pouvoirs en matière de gestion d'une agglomération urbaine sont confiés à des autorités de
l'échelon supérieur correspondant à celles qu'on trouve généralement à ce niveau, la question de savoir
comment leurs organes de décision sont désignés ne se pose pas (ils sont constitués bien entendu, en principe,
sur la base du suffrage universel). L'important, ici, c'est qu'il y ait un partage des compétences clair et
approprié, ainsi qu'une bonne coopération entre les deux niveaux. A l'autre bout de l'échelle, les associations ou
syndicats ordinaires de communes ont des organes de décision constitués sur la base de la représentation des
communes participantes, plus ou moins au prorata de leur taille; les membres de ces organes sont élus par les
conseils municipaux concernés. La nature des organes de décision et de gestion est un facteur qui a davantage
d'importance dans le cas des autorités spéciales de l'échelon supérieur pour les zones urbaines. En particulier, il
est intéressant d'examiner dans quelle mesure ces organes sont l'émanation des communes participantes ou dans
quelle mesure, au contraire, ils sont indépendants d'elles.
- 14 La solution généralement adoptée est celle qui correspond à la conception traditionnelle de la
coopération intercommunale. C'est dire que dans la majorité des cas l'organe de décision d'une collectivité à
l'échelle d'une agglomération n'est pas élu directement par la population mais est constitué, selon des modalités
variables, par des délégués des communes participantes.
Bien entendu, il est presque inévitable que ce système soit utilisé pour les organes spécialisés à
vocation unique, tels que ceux de Barcelone ou des régions métropolitaines anglaises; en effet, le suffrage
universel est réservé en principe - du moins en Europe - pour la constitution des organes investis d'une
responsabilité politique générale. Ainsi, les conseils des deux autorités métropolitaines de Barcelone sont
composés de délégués des communes membres, élus par celles-ci parmi leurs propres conseillers; le nombre de
ces délégués, prescrit par la loi, est plus ou moins proportionnel à la population des communes concernées. Les
membres des joint authorities dans les comtés métropolitains anglais sont désignés de la même manière par les
conseils de district métropolitains qui sont parties au groupement. Un système analogue s'applique aux autorités
communes du Grand Londres, à cela près que chacun des 32 London boroughs (ainsi que la City of London)
désigne un délégué.
Mais ce qui est plus intéressant, c'est l'utilisation d'une méthode analogue pour constituer les organes
de décision des autorités à vocation multiple au niveau des grandes villes et de leur périphérie.
Dans les communautés métropolitaines de Hanovre et de Brunswick, par exemple, les membres de
l'assemblée sont élus par les conseils élus par la population des communes membres selon un système qui
reflète l'importance des parties et des groupes représentés. Le même système est en vigueur dans le syndicat des
collectivités locales de la Ruhr, le nombre de membres désignés par chacune pour la représenter à l'assemblée
du syndicat variant en fonction de la taille de la commune. Le syndicat des collectivités locales de la Ruhr
présente toutefois une particularité: son assemblée coopte dix conseillers membres des chambres d'industrie et
de commerce, des chambres d'artisans, des chambres d'agriculture, des syndicats de travailleurs et des
associations d'employeurs ayant des activités sur son territoire.
A Athènes et à Salonique, les établissements publics cités sont gérés par un comité exécutif dont la
majorité des membres sont élus au suffrage indirect (encore que certains membres soient nommés par le
gouvernement).
Les assemblées des régions métropolitaines de Lisbonne et de Porto sont, elles aussi, élues au suffrage
indirect. Toutefois, le collège électoral se compose de la totalité des membres élus au suffrage direct de tous les
conseils municipaux de la région métropolitaine; l'élection se fait au scrutin de liste et à la représentation
proportionnelle; le vote intervient simultanément dans chaque commune. Il y a là, manifestement, un système
plus intégré que la simple désignation de délégués par chaque commune. Mais le fait que la Junta, c'est-à-dire
l'organe exécutif, soit composé des maires des communes participantes rétablit pleinement l'équilibre en faveur
de ces communes.
En France également, il a été décidé de ne pas recourir au suffrage universel direct pour l'élection du
conseil d'une communauté urbaine. Mais une autonomie un peu plus grande vis-à-vis des communes membres a
été obtenue, d'une part par des mécanismes qui ne garantissent pas nécessairement que toutes les communes
seront représentées au conseil de la communauté, et d'autre part par des règles complexes établies par le
législateur; ces règles s'appliquent en l'absence de consensus et tiennent compte de la taille des communes
respectives.
Il existe peu d'exemples d'assemblées de communauté urbaine directement élues par la population. On
en trouve deux exemples en Allemagne, où les assemblées des communautés urbaines de Sarrebruck et de
Francfort sont élues directement. Néanmoins, dans ces deux cas, un organe supplémentaire a été créé - à
Sarrebruck le conseil d'aménagement et à Francfort la chambre des collectivités locales - organes au sein
desquels les villes et collectivités locales appartenant à la communauté sont représentées chacune par un
membre. Ces organes traitent des questions relatives au plan d'aménagement foncier.
- 15 Le conseil de l'agglomération bruxelloise constitue un autre exemple de structure spéciale élue au
suffrage universel. De surcroît, le conseil élit en son sein, d'une manière classique, le président et les autres
membres de l'exécutif. Ainsi, les autorités de l'Agglomération bruxelloise sont institutionnellement
indépendantes des communes sur le territoire desquelles elle exerce ses compétences.
C.
Méthodes de financement des structures administratives communes
On peut établir une distinction équivalente en ce qui concerne les accords en matière de financement
des activités des divers types de structures administratives au niveau de la grande ville et de sa périphérie. Les
organismes correspondant aux types classiques de groupement intercommunal comptent principalement sur les
contributions des communes membres; mais très souvent, ils demandent aussi des redevances aux usagers des
services qu'ils fournissent1. Le recours à ces deux sources de financement, ou à l'une d'entre elles, n'est pas
uniquement le fait de syndicats intercommunaux ordinaires tels qu'on en trouve dans les zones urbaines
d'Autriche, de Belgique, de Finlande, d'Allemagne, des Pays-Bas et d'Espagne - à l'exclusion des zones
métropolitaines (actuellement Barcelone et Valence). Il est également le fait des syndicats urbains spéciaux de
Hanovre, de Brunswick, de Francfort et de la Ruhr. Dans la région métropolitaine d'Helsinki, les frais du
conseil de la région métropolitaine sont répartis entre les quatre communes (Helsinki paie la moitié du total, et
les trois autres communes supportent ensemble l'autre moitié, au prorata de leur population); les coûts afférents
aux services de traitement des déchets sont financés par les redevances des usagers; et chaque commune
contribue, à hauteur d'un montant convenu, à la couverture de la fraction des coûts des transports régionaux qui
excède les recettes provenant de la vente des billets. Comme on peut s'y attendre, les joint authorities dans les
régions métropolitaines anglaises, Grand Londres inclus, tirent également leurs revenus des conseils de district
(ou de borough) participants, au prorata de leur population, bien que ces contributions soient partiellement
prises en compte dans le calcul des subventions accordées aux districts par l'Etat.
Une deuxième catégorie de systèmes de financement regroupe les autorités des régions métropolitaines
qui sont financées en grande partie par des dotations de l'Etat. Ainsi les organismes des régions métropolitaines
d'Athènes et de Salonique tirent leurs ressources des dotations étatiques annuelles ordinaires, des subventions
étatiques annuelles spéciales au titre des investissements publics, des recettes provenant de l'exploitation
d'actifs, et enfin d'amendes infligées pour cause de pollution de l'environnement. Les autorités des régions
métropolitaines portugaises, comme tout groupement intercommunal ordinaire, reçoivent des transferts de leurs
communes membres ainsi que des redevances en rémunération des services fournis, mais elles bénéficient
également de transferts du budget de l'Etat et d'autres subventions.
Enfin, il existe des autorités, à l'échelle d'une agglomération, qui sont habilitées à lever des impôts.
C'est le cas des autorités métropolitaines à vocation unique de Barcelone et du Conseil métropolitain de la
Horta (zone métropolitaine) de Valence, qui, outre les catégories de financement mentionnées ci-dessus, ont le
droit de percevoir un supplément sur la taxe frappant tous les immeubles sis sur leur territoire. Les nouvelles
villes italiennes ont le droit, elles aussi, de lever impôts et taxes et de toucher des subventions. En France
également, les districts, les communautés urbaines et les communautés de villes peuvent imposer une fiscalité
supplémentaire, assise sur les quatres bases d'imposition qui sont celles des communes. En outre, en vertu de la
Loi d'orientation de 1992 relative à l'administration territoriale, les communautés de villes et, sous certaines
conditions, les communautés urbaines et les districts existants peuvent se substituer aux communes membres
pour lever la taxe professionnelle au seul niveau de l'agglomération. La situation est analogue dans
l'Agglomération bruxelloise, dont le statut nettement autonome se trouve ainsi confirmé: mis à part les
redevances des usagers, les recettes de l'Agglomération sont constituées non seulement par la subvention
générale émanant de la région de Bruxelles et par diverses subventions courantes et en capital, mais aussi par
1
En Belgique, les intercommunales étant soumises - moyennant certaines exceptions - au droit des
sociétés, les communes adhérentes jouent le rôle d'actionnaires. Elles peuvent percevoir
annuellement leur part du bénéfice de la gestion de l'intercommunale ou être appelées à
contribuer à l'apurement d'un déficit éventuel.
- 16 ses propres rentrées fiscales.
Bien entendu, lorsque des fonctions à l'échelle d'une conurbation sont exercées par les autorités
ordinaires de l'échelon supérieur, celles-ci sont dotées, en matière de fiscalité, de pouvoirs qui correspondent à
ceux dont jouissent toutes les autorités à ce niveau.
4.
Modes de coordination moins formels
En dehors des structures mentionnées plus haut, il existe une grande diversité de structures plus
informelles de coordination ou de consultation entre la grande ville et sa périphérie, lorsque l'une et l'autre ne
forment pas une seule et même unité politique. Ces structures sont consacrées le plus souvent aux questions de
planification. Nous en indiquons ci-dessous quelques exemples.
En Autriche, plusieurs communes ont la faculté de mener ensemble certaines activités en formant des
associations administratives (non dotées de la personnalité juridique). Un exemple courant est celui des centres
de calcul dans lesquels diverses tâches administratives sont informatisées (perception des redevances, feuilles
de paie des fonctionnaires locaux, etc.).
En Allemagne, il existe divers types de procédures de coordination. Parfois, la consultation et la
coordination sont expressément prévues par le législateur. En vertu de la loi fédérale d'aménagement du
territoire, par exemple, les zones périphériques des agglomérations doivent nécessairement bénéficier des
mesures d'amélioration structurelle. En vertu de la réglementation des constructions, il faut que les plans de
développement des collectivités locales voisines soient harmonisés moyennant une conciliation des intérêts. En
outre, une collectivité locale peut établir avec une collectivité adjacente un plan commun d'occupation de sols.
On peut observer, néanmoins, qu'en raison de la structure fédérale du Gouvernement en Allemagne, la
coordination de l'aménagement de l'espace entre les villes-Etats de Hambourg et de Brême avec leur périphérie
qui fait partie du territoire des Länder de Schleswig-Holstein et de Basse-Saxe s'effectue dans le cadre d'un
bureau d'aménagement commun avec le Land concerné. C'est ainsi qu'il existe depuis 1955 un bureau
d'aménagement commun pour Hambourg et le Schleswig-Holstein. L'instance suprême en est l'assemblée
plénière où sont représentés les chefs des gouvernements, les autorités spécialisées, le groupe de travail des
Kreise de la périphérie et les groupements d'intérêts, mais pas les municipalités. Il en va de même de la
coopération entre Hambourg et la Basse-Saxe depuis 1957, avec son instance suprême: le conseil
d'aménagement. Outre les chefs des gouvernements et des ministères, les Regierungsbezirke (cantons
administratifs du Land) et les Kreise concernés y sont représentés, alors que les municipalités ne le sont pas en
tant que telles.
Les communes de la périphérie de Hambourg ne peuvent dès lors pas exposer directement leur point de
vue ni présenter leurs observations aux conseils d'aménagement. Elles peuvent cependant prendre part, au
niveau régional, à "L'élaboration de l'aménagement pour la région métropolitaine de Hambourg", décidée en
novembre 1991 et défendre leurs intérêts au sein de ce qu'on appelle le groupe directeur.
En Rhénanie du Nord-Westphalie et en Bavière, la législation sur la coopération au niveau local
prévoit également la possibilité de créer des groupes de travail. Ces groupes de travail réunissent un certain
nombre de collectivités locales, d'autres conseils, institutions et fondations de droit public ainsi que des
personnes physiques et des personne morales selon le droit privé. Chaque groupe de travail examine des
questions présentant un intérêt commun pour ses membres, coordonne les différents plans et met en route des
solutions communes afin de faire en sorte que les tâches soient accomplies de la façon la plus efficace et la plus
utile possible. Un groupe de travail ne peut prendre aucune décision contraignante, les compétences des
organes exécutifs de chacun des membres restant entières.
En dehors de ces formes de coopération pour la gestion locale, qui sont institutionnalisées et fondées
sur une base juridique spécifique, il existe par exemple en Rhénanie-Westphalie de nombreuses formes de
coopération et de concertation dans le domaine de la politique économique régionale qui ne reposent sur
- 17 aucune loi spécifique. Les conférences régionales sont au centre de cette coopération moins formelle. Elles
servent de forum pour faire valoir des intérêts; toutefois, elles ne sont pas réservées au collectivités locales et à
l'administration publique mais, conformément à l'idée de "partenariat-public-privé", elles visent à associer les
organisations non gouvernementales à la définition d'objectifs politiques. Elles permettent aux acteurs
participant à la vie publique des régions du Land - c'est-à-dire aux représentants de l'industrie, de la politique et
de l'administration locales et des milieux scientifiques ainsi qu'aux porte-parole de la population, par exemple de disposer d'un forum pour déterminer et examiner les objectifs de développement infrastructurels,
économiques et autres, revêtant une importante supra-régionale.
La coopération pour la gestion locale dans le cadre des conférences régionales s'étend au-delà des
activités liées soit aux grandes villes et à leurs périphéries soit aux conurbations. Elle couvre des espaces plus
vastes dont les limites sont définies selon les questions à traiter. Mais c'est précisément la raison pour laquelle
les conférences régionales offrent une possibilité de différenciation plus marquée des grandes structures
administratives; ainsi, le district de la Ruhr n'agit pas comme une entité unique dans les conférences régionales
mais est représenté dans plusieurs conférences régionales.
Au Royaume-Uni, les autorités locales de l'aménagement ont établi, dans chaque région, des
conférences permanentes informelles ou des forums régionaux chargés d'examiner les questions
d'aménagement. Dans le sud-est, par exemple, toutes les autorités chargées de l'aménagement à Londres et dans
les comtés avoisinants ont formé la London and South-East Regional Planning Conference; cet organe a pour
mission de suivre les questions d'aménagement et de transports qui concernent la région, de favoriser
l'élaboration de politiques communes et d'actions coordonnées; enfin, de faire des observations au
gouvernement et à d'autres institutions au sujet de questions de première importance qui présentent un intérêt
général pour la région. En même temps, ceux des conseils de district métropolitains qui ne sont pas membres
d'une autorité commune légale s'occupant de l'élimination des déchets se sont constitués volontairement en
groupements pour l'exécution de leurs fonctions de réglementation en matière de déchets.
En France, les chartes intercommunales de développement et d'aménagement font partie des formes de
coopération relativement informelles. Elles préludent souvent à l'instauration de modes de coopération plus
officiels.
En Norvège, divers types de coopération moins formelle existent entre Oslo et ses environs. Un
comité de coopération entre Oslo et le comté d'Akershus en matière d'aménagement du territoire fonctionne
depuis 1976. Il traite des problèmes de planification des transports dans la région, ainsi que de la coopération
en matière d'environnement et d'autres questions d'intérêt national ou régional, telles que le nouvel aéroport
principal, l'hôpital national et la coopération culturelle.
Le ministre finlandais de l'intérieur encourage les communes et régions centrales de la Finlande (sans
limite de taille) à concevoir en commun des programmes de développement. La région de la capitale,
notamment, élabore actuellement un programme de cette sorte. Le ministère de l'Intérieur coordonne ces
programmes. Ce système sera officialisé dans la nouvelle loi sur la politique de développement régional, qui
entrera en vigueur en 1994. Les communes qui le souhaitaient ont également commencé à coopérer au
développement industriel.
En Irlande, il existe dans l'agglomération dublinoise diverses formes de coopération informelle au
service d'objectifs différents. Dans certains cas, y sont associés non seulement les collectivités locales mais
aussi des services du gouvernement central et des représentants des intérêts publics et privés concernés. Il
existe également une concertation et une coopération permanentes entre les agents des différentes autorités.
S'agissant de l'aménagement du territoire, lorsqu'une autorité compétente propose l'inclusion, dans un plan
d'aménagement, d'un objectif dont il appartiendrait à une autre autorité locale d'assurer la réalisation, une
consultation entre les deux autorités peut intervenir préalablement à l'inscription de l'objectif en question. En
outre, lorsqu'il apparaît souhaitable d'assurer l'aménagement d'une ville et de sa périphérie d'une manière
coordonnée et complémentaire, la loi autorise l'établissement d'un plan reflétant la politique d'aménagement
prévue pour l'ensemble du territoire considéré. Toutefois, en raison des différentes pressions et exigences
- 18 formulées, les trois autorités de Dublin n'ont pas procédé à l'établissement d'un tel plan commun. L'élaboration
de leurs plans séparés s'effectue néanmoins à l'aide de vastes études stratégiques, non prévues par la loi, pour la
région de Dublin et au-delà. De surcroît, on a l'obligation de communiquer, pour commentaire, des exemplaires
de la version provisoire du plan aux autorités locales avoisinantes et à diverses autorités nationales, comme le
Bord Failte (Commission nationale du tourisme), An Taisce (Fonds national pour l'Irlande), divers services
ministériels et An Bord Pleanala (Commission nationale de recours en matière d'aménagement).
En Suisse, la Ville de Genève est membre du Comité de l'Association des communes genevoises, qui
regroupe les 45 autorités municipales du Canton. Cet organisme permet d'avoir régulièrement des contacts sur
des questions d'intérêt commun. Il est fait état d'initiatives différentes à Lausanne, où l'on a créé, sur la base
d'une réglementation intercommunale, une association privée pour la promotion du tourisme, tandis qu'une
autre réglementation du même genre fixe les tarifs des taxis.
D'une manière générale, indépendamment des exemples cités plus haut, les contacts entre la grande
ville et ses communes périphériques prennent la forme d'une consultation spécifique ou d'une consultation
régulière sur des questions d'intérêt commun (par exemple, dans le cadre de conférences de maires, de chefs
d'administration, d'aménagistes etc.), d'une coordination pour la mise en oeuvre de la politique
gouvernementale, ou encore d'accords non contraignants tendant à coordonner les intérêts ou à résoudre les
conflits, etc.
Toutefois, on reconnaît que des problèmes surgissent, à propos d'une telle coordination, dans les zones
urbaines lorsqu'il s'agit de prendre une décision impopulaire, concernant par exemple l'implantation d'un
équipement important dont la présence serait nuisible à l'environnement immédiat. Les querelles et les blocages
au sujet de telles questions peuvent rarement être résolus par des consultations informelles. Il est d'ailleurs
intéressant de noter qu'aux Pays-Bas une loi récemment promulguée permet aux gouvernements d'éviter les
situations de blocage lorsque les communes concernées s'opposent à la réalisation de grands travaux (voir
partie 8 ci-après).
Quoi qu'il en soit, certains pays attribuent un rôle important au gouvernement central (ou aux
personnes qui dans les régions, en sont l'émanation, par exemple les préfets) pour la coordination entre la ville
et la périphérie, tout en prescrivant une collaboration avec les conseils locaux. Tel est le cas en Grèce. Au
Portugal également, à l'exception des régions insulaires, les plans d'aménagement du territoire pour les niveaux
supérieurs au niveau communal sont en grande partie établis et exécutés par le ministère compétent - avec,
toutefois, la participation des communes. De telles solutions sont-elles compatibles avec l'autonomie locale?
Les avis sur ce point peuvent être partagés.
5.
Tendances dans les différents Etats européens
L'exposé qui précède, décrivant les diverses structures créées dans le souci d'assurer la coopération et
la gestion coordonnée entre les grandes villes et leur périphérie -description portant notamment sur leurs
compétences, leurs organes de décision et leurs ressources financières - nous donne une idée de la diversité des
solutions adoptées et de l'autonomie variable qui caractérise les organismes concernés. Mais cet exposé ne
donne qu'une image relativement statique d'un processus, qui, dans de nombreux pays, révèle surtout des
aspects dynamiques.
Il convient de rappeler, tout d'abord, que la recherche de structures nouvelles, de structures spécifiques,
pour les zones urbaines a, dans de nombreux pays, été dictée par la croissance rapide des grandes villes et par
les problèmes qui s'ensuivent au niveau de l'organisation et de la coordination administratives (et de la
solidarité financière) dans la conurbation, notamment à une époque où les services publics connaissaient une
expansion considérable et où l'on mettait l'accent sur le rôle de la planification. Tel est le contexte qui a présidé
à la création d'organismes spéciaux tels que l'Autorité publique de Rijnmond, dans la région de Rotterdam, en
1965, le Greater London Council, également en 1965, les comtés métropolitains anglais (1972), le Conseil
(anciennement Commission) de la zone métropolitaine d'Helsinki, l'Agglomération bruxelloise (1971), le
- 19 Conseil métropolitain de Barcelone (1974), le Conseil du Grand Copenhague (1974), l'Autorité pour
l'agglomération d'Eindhoven (1976) - sans oublier, en 1966, la création, en France, des communautés urbaines.
Il est intéressant de noter que, dans les régions métropolitaines qui, à l'époque, n'avaient pas fait l'objet
d'arrangements institutionnels de ce genre, on a, plus récemment, avec l'apparition de problèmes identiques,
adopté des solutions analogues. Nous avons déjà cité les exemples d'Athènes et de Salonique en 1985, des
grandes villes italiennes (1990), de Lisbonne et de Porto (1991). Par ailleurs, suite à la division du grand
Varsovie en sept communes, il est prévu de créer une entité spéciale pour l'exercice commun de certaines
fonctions dans la zone urbaine. Ainsi on continue de ressentir la nécessité de solutions structurelles intégrées,
face aux problèmes de la gestion coordonnée entre les grandes villes et leur périphérie.
En revanche, dans les zones où la création de ces autorités métropolitaines remonte aux années 1960 et
1970, l'évolution récente a été bien différente. Très souvent ces organismes n'ont pas donné satisfaction; et en
fait, plusieurs d'entre eux ont été supprimés. Le Greater London Council, les comtés métropolitains anglais et,
aux Pays-Bas, les Autorités de Rijnmond et d'Eindhoven, ont été dissous vers 1985. Ces décisions ont été
motivées par des considérations concernant les finances publiques et le niveau trop élevé des dépenses des
autorités concernées; elles procédaient aussi d'un scepticisme quant à la valeur et à l'intérêt pratique du rôle de
ces autorités en matière d'établissement de plans à long terme. Enfin, elles traduisaient le souci de réduire le
nombre des niveaux d'administration, source d'une complexité excessive.
La disparition de ces autorités spéciales créées à l'échelle d'une conurbation et élues au suffrage direct
a amené certains à soutenir que ce type d'organisme était particulièrement susceptible d'engendrer la
controverse. Mais elle fut suivie par la suppression d'un certain nombre d'autorités qui, elles, avaient été élues
au suffrage indirect - notamment le Conseil métropolitain de Barcelone et le Conseil du Grand Copenhague.
Menaces pesant sur l'autonomie communale et problèmes de responsabilité au sein d'organismes élus au
suffrage indirect: tels furent, pour l'essentiel, les motifs invoqués à l'appui de ces initiatives.
En France également, le succès des communautés urbaines peut être considéré comme limité. En
dehors des quatres communautés urbaines dont la création avait un caractère obligatoire, il ne s'est constitué
que cinq communautés urbaines sur une base volontaire. Ajoutons qu'après une crise survenue à Bordeaux, des
dispositions ont été adoptées qui permettent de dissoudre même une communauté faisant partie des créations
obligatoires. En 1982, une législation complémentaire a renforcé la position des communes membres en
améliorant la représentation des petites communes au sein du conseil de la communauté urbaine et en
supprimant le droit, pour cette dernière, d'assumer unilatéralement de nouvelles compétences facultatives.
Notons également qu'en Finlande les fédérations de communes, qui sont des institutions relativement
intégrées, même si elles se limitent généralement à un seul domaine, sont en train de céder la place à des
groupements plus légers et plus souples reposant sur une base volontaire.
Une situation spéciale s'est instaurée récemment dans l'agglomération bruxelloise, suite à la création de
la région bruxelloise qui a pris en main certaines compétences incombant auparavant au gouvernement central.
Comme la nouvelle région couvre le même territoire et s'occupe en grande partie des même question que
l'agglomération, celle-ci a dû abandonner un grand nombre de ses pouvoirs et se contenter d'un personnel
beaucoup plus restreint; d'autres fonctions de l'agglomération seront probablement imparties bientôt à la région
ou retourneront aux communes.
Pour la ville et le comté de Dublin (population: 1 million d'habitants), divers modèles ont été suggérés.
Au début des années 70 le gouvernement a proposé pour l'ensemble de la région une collectivité unique
résultant de la fusion des trois collectivités préexistantes. La population du comté qui entoure la ville a
augmenté très sensiblement dans les années 70 et dépasse aujourd'hui celle de la ville. En 1985, on a proposé
un système à deux niveaux comprenant d'une part, la municipalité et trois autorités de comté distinctes et,
d'autre part, un conseil métropolitain ayant un rôle de coordination générale et dont les membres seraient
nommés par les trois comtés et la ville. Une vaste réorganisation comportant le remplacement du comté par
trois nouveaux comtés a commencé; la ville demeurera. La loi initiale laisse le soin aux autorités locales, dans
- 20 un premier temps, d'élaborer des propositions pour la coordination des services dans le cadre de la préparation
du passage au nouveau système. Une autre loi prévue pour 1993, établira formellement les nouvelles autorités
de comtés. C'est en application de cette loi que seront prises les décisions relatives aux mesures de coordination
nécessaires.
Par ailleurs, dans certains pays la tendance actuelle à favoriser, sous différentes formes, le recours au
secteur privé et, notamment, à lui confier le plus grand nombre possible de services est peu propice au maintien
d'autorités publiques urbaines spécialisées gérant ces mêmes services. Si le secteur public en général va en
s'amenuisant, il apparaît moins nécessaire de créer un organe de coordination supplémentaire.
Néanmoins, bien que la création d'autorités métropolitaines spéciales semble, dans de nombreux cas,
s'être soldée par un échec, l'existence d'au moins un minimum d'arrangements institutionnels pour coordonner
la gestion de vaste zones urbaines continue de représenter un besoin objectif, ainsi qu'en témoignent non
seulement la récente création de telles autorités dans d'autres pays, mais aussi l'exemple des Pays-Bas: dans ce
pays, où l'on a supprimé les autorités qui existaient au niveau de l'agglomération (Rijnmond, Eindhoven), on a
également mis fin aux activités de l'Autorité régionale de La Haye qui s'était constituée sur une base volontaire;
quant aux propositions concernant la création d'une ville-province d'Amsterdam, elles ont été victimes d'une
résistance locale et nationale. Il a été reconnu que la création de syndicats intercommunaux classiques n'a pas
donné satisfaction dans les principales zones urbanisées. Celles-ci sont de plus en plus le théâtre d'un conflit
d'intérêts entre, d'une part, des villes-centres qui vont en s'appauvrissant et qui doivent supporter le choc de
toutes sortes de développements sociaux, et, d'autre part, les quartiers périphériques aisés. Ce conflit d'intérêts a
empêché toute coopération efficace sur une base volontaire. Voilà, essentiellement, la raison pour laquelle le
gouvernement néerlandais est en train de saisir le Parlement d'un projet de loi provisoire, tendant à aider les
zones urbaines à établir une structure administrative régionale forte, faite sur mesure. Le projet définit une
position de départ, en ce sens qu'il prévoit une coopération obligatoire dans un certain nombre de domaines
(logement, aménagement du territoire, politique industrielle, marché du travail, transports) dans au moins sept
zones urbaines (Amsterdam, Rotterdam, La Haye, Utrecht, Eindhoven-Helmond, Arnhem-Nimègue, EnschedeHengelo). Dans toutes ces zones, il est prévu d'instituer un organisme public régional, composé essentiellement
de conseillers locaux, qui s'occupera des domaines susmentionnés. Quant aux communes (ville-centre incluse),
elles perdront leur compétence en ce qui concerne les questions d'un intérêt supracommunal, qui seront
transférées à l'organisme régional. Lors d'une seconde phase, envisagée par le projet de loi, l'organisme public
régional sera élu plus ou moins directement par les habitants de la région. La loi restera en vigueur pendant une
période maximale de douze ans, pour chaque région entrant dans son champ d'application. Au cours de ce laps
de temps, il faudra créer la base juridique pour une autorité régionale démocratiquement élue dans chacune des
régions, en prévoyant également un organe régional adapté aux problèmes spécifiques de la région.
- 21 -
6.
Choix des structures administratives les plus aptes à assurer un développement
équilibré entre la ville et sa périphérie
Comme nous l'avons dit plus haut à la section 2, la coordination de la gestion des grandes villes et de
leur périphérie est un problème qui est susceptible d'un large éventail de solutions. On discerne, en gros, les
catégories suivantes:
-
fusion des communes périphériques avec la ville-centre, pour constituer une seule collectivité locale;
-
attribution de responsabilités spéciales aux collectivités territoriales ordinaires de l'échelon supérieur;
-
création d'une autorité métropolitaine spéciale, indépendante des communes de son secteur;
-
associations spéciales - à vocation multiple ou à vocation unique - des communes situées dans les
agglomérations;
-
recours à la formule usuelle des groupements de communes;
-
organes administratifs spéciaux dépendant du gouvernement central;
-
délégation de certains pouvoirs, par les communes périphériques à la ville-centre;
-
structures consultatives informelles.
Comme on l'a vu, ces solutions comportent chacune leurs avantages et leurs inconvénients, dont il peut
être utile de résumer quelques-uns ici. Les deux dernières catégories indiquées ci-dessus ne seront pas prises
en compte, dans la mesure où, tout en ayant souvent un rôle utile à jouer, elles ne peuvent guère être
considérées comme une véritable alternative à une solution plus substantielle.
Pour ce qui concerne les organismes administratifs spéciaux dépendant du gouvernement central, leur
création peut avoir ou ne pas avoir un effet bénéfique sur le plan de l'efficacité technique, selon le niveau
général de compétence technique de l'administration locale, qui varie considérablement d'un pays à l'autre.
Toutefois, l'efficacité ne peut pas être le seul critère: les bons résultats de l'administration dépendent également
de la façon dont elle tient compte du point de vue des citoyens. Quand les services locaux sont gérés par des
organismes spécifiques sans mandat électif, les usagers/électeurs ont peu d'influence sur la gestion des affaires
locales. Rien ne peut vraiment remplacer la responsabilité directe des représentants élus, avec la possibilité
pour les citoyens d'exprimer au travers du scrutin leur satisfaction ou leur insatisfaction au sujet de la façon
dont les affaires locales sont administrées. En outre, quand une bonne part de la responsabilité de la gestion du
service public est confiée à des organismes spécifiques, les problèmes de coordination sont considérables.
La fusion généralisée élimine les problèmes de coordination entre les communes concernées. Elle
supprime donc un important obstacle potentiel à l'efficacité technique et économique dans la gestion de
l'agglomération. Si les structures de l'administration locale compartimentent une conurbation, une coordination
rationnelle de l'aménagement du territoire devient plus difficile et les problèmes d'encombrement ou de déclin
des centres-villes et de la transformation des faubourgs en zones d'exclusion peuvent se compliquer. Si, en
revanche, une collectivité locale unique est compétente pour toute la zone urbaine, il est plus facile de mettre
un terme aux jalousies locales ou de quartier et de répartir les coûts de la politique sociale (coût du logement
subventionné ou du logement pour personnes âgées, par exemple) plus également entre tous les contribuables
de l'agglomération. De surcroît, les problèmes hautement complexes qu'ont à résoudre les agents des
administrations locales (santé publique, pollution, transports, etc.) exigent des ressources financières et
techniques importantes: si les différentes communes fusionnent, il est possible de réaliser des économies
d'échelle considérables et d'éviter les doubles emplois dans les activités et les équipements. Plus le coût du
financement des investissements à long terme est largement réparti, moins ces investissements coûtent cher à la
collectivité. Enfin, lorsque des structures administratives ne se sont pas adaptées à la croissance naturelle d'une
- 22 ville, elles ne correspondent pas aux réalités telles que perçues par la population moderne; à cet égard, la
création d'une collectivité unitaire favorise la compréhension et la responsabilité.
A côté de ces avantages de la fusion, on peut également noter quelques inconvénients. La disparition
d'un certain nombre de conseils élus est susceptible d'accroître la distance entre les citoyens et leurs
représentants. D'ailleurs, dans la plupart des pays, les fusions rencontrent généralement une vive résistance et
sont devenues politiquement plus difficiles à réaliser que par le passé. Il est normal que les habitants des petites
communes périphériques craignent qu'après la fusion ceux qui représentent la ville-centre pèsent de tout leur
poids pour imposer leurs vues aux autres. Le gigantisme peut en lui-même conduire à sacrifier les intérêts de
certains quartiers lors des prises de décisions. Cela peut même entraîner un problème de cohésion au sein de la
commune élargie: ainsi, il semble que les habitants de plusieurs quartiers d'Anvers se sentent privés de la
possibilité de participer à des décisions importantes et réclament la création de conseils de district qui
correspondraient plus ou moins aux territoires des anciennes communes. Ce qu'on a observé à la suite des
réformes de l'administration locale dans certains pays donne à penser que plus grand ne signifie pas
nécessairement plus efficace. Généralement, plus grand signifie plus anonyme. Enfin, il est très improbable
que, même après une fusion, les frontières d'une ville s'étendent à l'ensemble de la zone de drainage des
migrants journaliers ou des usagers des services publics, de sorte qu'il subsistera toujours un problème de
coordination avec les environs.
L'attribution de fonctions spéciales à une collectivité ordinaire de l'échelon supérieur comporte de
nombreux avantages, du moins lorsque l'agglomération actuelle ne déborde pas les limites de l'autorité de
l'échelon supérieur ou de la ville-Etat. En fait, cette solution peut comporter un grand nombre des avantages
que l'on attribue aux fusions générales, sans être radicale au point d'éliminer les communes existantes, qui
continuent à fonctionner, bien que l'étendue de leurs compétences soit réduite. La structure politique et
administrative de la région de Stockholm est jugée efficace, en particulier parce que le conseil de comté est un
organe autonome, élu démocratiquement, qui a des compétences en matière de fiscalité, et dont la
responsabilité s'étend à la région tout entière, notamment dans le domaine des transports et des soins de santé.
Quant à la structure existant dans le Canton de Genève, avec le rôle prépondérant dévolu au gouvernement
cantonal, on fait valoir qu'elle favorise la rationalisation des services sur un territoire exigu.
Aux Pays-Bas, la formule qu'il est prévu d'adopter lors de la phase définitive de la réforme en cours est
celle d'une autorité spéciale pour chaque région urbaine; cette autorité sera indépendante de l'échelon
municipal, en ce sens que les membres n'en seront pas nommés par les communes et ne seront pas responsables
devant celles-ci; en outre cette autorité ne sera pas tributaire des contributions financières des municipalités.
D'une telle autonomie, qui correspond à la situation existant dans l'Agglomération de Bruxelles, on peut
attendre qu'elle permette aux nouvelles autorités de travailler efficacement, sans être entravées par les
processus souvent pesants que représentent la collaboration de nombreuses communes et le dosage de leurs
intérêts respectifs. De plus, une telle autonomie présente l'avantage de délimiter clairement la responsabilité
vis-à-vis de la population locale, alors que dans les syndicats de communes il est parfois difficile, pour les
électeurs de telle municipalité, d'attribuer au conseil municipal la responsabilité politique de décisions prises au
sein des organes du syndicat.
Quoi qu'il en soit, il est frappant de constater que la majorité des pays expriment une nette préférence
pour des solutions de type associatif. Peut-être cette préférence est-elle souvent motivée par des considérations
liées à l'autonomie locale. En Finlande, par exemple, il est clair que le gouvernement est favorable à
l'indépendance des communes et qu'il les encourage à résoudre leurs problèmes dans le cadre d'une
concertation avec leurs voisines. En Belgique, les groupements de communes sont considérés comme les
structures les plus aptes à assurer le développement équilibré des zones urbaines; c'est de la même conviction
que procède, en France, la volonté du législateur d'attribuer aux organes publics de coopération
intercommunale des compétences pour l'élaboration de plans de structure ou de programmes immobiliers
locaux. En Allemagne également, on considère en général que pour la planification et l'exécution de tâches
spécifiques, l'association intercommunale représente la meilleure formule pour "piloter" une évolution qui
concerne plusieurs collectivités locales. Au Portugal, on fait valoir, entre autres, la dimension importante des
communes pour justifier la préférence donnée à des formes de coopération intercommunale; on reconnaît,
- 23 toutefois, que cette coopération "classique" peut être un bon point de départ pour rechercher des configurations
plus solides et durables; enfin, dans les zones urbaines d'une étendue considérable - les zones d'importance
nationale - la nécessité de définir des politiques et des programmes d'un commun accord entre le gouvernement
central et les collectivités locales concernées peut justifier des formes d'association particulières.
Il est clair que de tels mécanismes de coopération intercommunale, outre qu'ils représentent la formule
la plus respectueuse de l'autonomie locale, impliquent une coordination des politiques et des intérêts au sens
propre du terme. Par conséquent, même s'il est parfois difficile de parvenir à un compromis, on peut penser, à
priori, que les décisions prises seront bien acceptées, alors que des politiques menées de manière indépendante
par une autorité métropolitaine autonome risqueraient, au contraire, de provoquer le ressentiment et de susciter
un réflexe d'opposition. En revanche, en fonction de l'organe de décision, on peut être confronté à une
domination excessive de la part de la ville-centre, ou, inversement, au risque de voir plusieurs petites
communes bloquer le progrès indispensable. Dans la pratique, la capacité de tels groupements de communes de
résoudre les problèmes du type "NIMBY" ("not in my back yard") - c'est à dire la situation dans laquelle
aucune des communes concernées ne souhaite être choisie pour l'installation d'un équipement générateur de
nuisances - n'est pas nécessairement supérieure à ce qu'elle serait dans le cas de structures de coopération
informelles. De surcroît, l'expérience autrichienne montre que cette coopération est sujette à d'autres limites,
qui ne joueraient pas dans le cas d'autorités métropolitaines indépendantes: si un service est assuré en commun
(par exemple, enlèvement des ordures, évacuation des eaux usées, adduction d'eau potable) et que les coûts
puissent être calculés et ventilés avec précision, alors les mécanismes de coopération fonctionnent bien; mais si
le service n'est pas quantifiable, ou qu'il doive être réparti entre plusieurs protagonistes, la coopération peut
faire totalement défaut.
Dans ce contexte, la réponse néerlandaise contient une remarque qui mérite d'être soulignée. Etant
donné que les zones urbaines sont extrêmement diverses, tant par leur structure que par le caractère et la nature
de leurs problèmes, il serait illogique de leur appliquer à toutes un modèle identique. La préférence devrait être
donnée à des solutions institutionnelles faites sur mesure. C'est également cette approche pragmatique que l'on
privilégie au Royaume-Uni où, toutefois, le gouvernement estime qu'il faut s'orienter vers un niveau unique
d'administration locale, là où ce n'est pas déjà le cas, mais sans décider au préalable si dans une zone donnée la
nouvelle entité sera plus petite ou plus vaste que les collectivités existantes.
Ces considérations sont, toutefois, particulièrement pertinentes en ce qui concerne les formes
associatives de coordination intercommunale. En effet, ces structures peuvent se développer naturellement dans
chaque zone urbaine et s'adapter à l'évolution des besoins. Une association ou une fédération souple de toutes
les collectivités locales d'une conurbation peut donc assurer la concertation et la coordination nécessaires,
notamment dans les domaines de l'aménagement du territoire, de la circulation et des transports et du
développement économique. Elle peut être complétée par diverses structures spécifiques dotées de systèmes
juridiques différents adaptés aux exigences de la coopération sectorielle, dans des domaines comme
l'approvisionnement en eau, le traitement des eaux usées, les hôpitaux, les transports publics, les établissements
d'enseignement et les équipements culturels. Si ces solutions présentent l'inconvénient d'être quelque peu
"désordonnées", cet inconvénient est contrebalancé par le fait qu'elles se sont développées en réponse à des
besoins perçus localement et grâce à leur capacité d'adaptation.
Les exigences différentes, et parfois contradictoires, d'efficacité, de participation, d'équité et
d'autonomie donnent à penser que les solutions simples risquent d'être inadéquates. Il convient d'observer que,
là où des fusions ont eu lieu, les responsables politiques ont établi des structures reliant le quartier et le district
afin d'éviter certains inconvénients concomitants. De même, dans les conurbations où les collectivités locales
ont conservé leur autonomie, on a créé des structures qui leur permettent, au moins en partie, de profiter des
avantages d'une intégration plus grande. En l'occurence, il paraît sage de ne pas perdre de vue le principe de
subsidiarité: il faudrait exiger que les entités les plus proches du citoyen n'abandonnent aux structures créées à
l'échelle de la conurbation que les fonctions qui peuvent manifestement être exercées plus efficacement dans ce
cadre plus large.
- 24 -
7.
La péréquation financière entre la grande ville et la périphérie
Dans la plupart des Etats membres, il n'existe pas de forme de péréquation fiscale directe entre les
grandes villes et les communes périphériques. Un tel ajustement fiscal, lorsqu'il est pratiqué, relève, en
principe, du système général de péréquation financière appliqué à toutes les collectivités locales; ce système
donne lieu, normalement, à l'octroi de subventions étatiques, en fonction du différentiel de recettes fiscales
(potentielles) par tête au niveau local et aussi sur la base des écarts dans les besoins de dépenses. Bien entendu,
ce système général devrait également tenir compte des différences qui existent, au niveau des recettes et des
coûts, entre la ville centre et sa périphérie. De surcroît dans un certain nombre de pays la fraction par tête de la
dotation générale attribuée aux grandes villes est beaucoup plus élevée que la fraction correspondante dans tout
autre type de commune. Cela se vérifie, par exemple, en Belgique et aux Pays-Bas, alors qu'en Autriche les
chiffres de population employés pour calculer la répartition des recettes sont multipliés par un coefficient qui
augmente avec la taille de la commune.
En Allemagne également, le système de répartition prévoit une base de calcul plus élevée pour les
grandes villes que pour les petites collectivités locales. Les quotas sont conçus, notamment, pour compenser
partiellement une base d'imposition inférieure à la moyenne. La péréquation de la charge financière qui pèse
sur les villes par une approche consistant à fournir des services qui bénéficient aussi à la périphérie peut aussi
être réalisée par l'octroi de crédits importants au titre de tâches extraordinaires ("fonctions de ville-centre") ou
par des subventions spécifiques, par exemple pour l'entretien d'un théâtre ou d'un orchestre, la construction
d'écoles, d'hôpitaux, etc. Le fait de prélever des redevances pour des équipements utilisés en commun produit
aussi un effet de péréquation. En outre, il existe un système de compensation plus direct, sous la forme d'une
participation des communes périphériques aux frais de fonctionnement des écoles (participation
proportionnelle au nombre d'élèves). Mais un problème sur lequel on insiste est celui de l'impossibilité de
quantifier toutes les relations entre la ville et la périphérie, de sorte qu'il est difficile d'exprimer en termes
d'argent les principales charges et les principaux avantages mutuels.
Au Portugal, malgré l'absence de péréquation fiscale directe entre la ville-centre d'une conurbation et
les communes périphériques, une certaine solidarité financière peut être pratiquée entre les communes qui sont
membres d'une association ou d'une autorité métropolitaine. En particulier, les règles qui régissent les
contributions respectives de ces municipalités à des activités communes peuvent prendre en considération des
différences au niveau de la capacité financière.
Toutefois, il existe dans quatre pays seulement des dispositions légales pour garantir telle ou telle
forme de solidarité financière entre la grande ville et sa périphérie; il s'agit de la France, du Danemark, de la
Suède et de certains cantons suisses.
En ce qui concerne la France, on peut mentionner tout d'abord les formes traditionnelles de solidarité
financière qui, bien qu'elles ne soient pas expressément conçues pour les principales zones urbaines, peuvent
présenter un intérêt particulier dans ce contexte. Les mécanismes de péréquation des recettes produites par la
taxe professionnelle existent:
-
au niveau du département pour écrêter la richesse qu'une commune tire de la présence, sur son
territoire, d'un établissement qui a une dimension exceptionnelle par rapport au chiffre de population
de la commune: le montant de cet écrêtement est versé à un fonds qui est redistribué entre les
communes du département les plus défavorisées;
-
au niveau national, avec l'institution d'une cotisation additionnelle de péréquation, qui frappe les
entreprises implantées dans les communes dont le taux d'imposition global est inférieur à la moyenne
nationale: le montant de ce prélèvement est versé sur un fonds, dont les ressources sont partiellement
redistribuées sur la base de la capacité fiscale différentielle.
En même temps, une loi de 1980 prévoit la possibilité d'un accord volontaire, aux termes duquel une
commune sur le territoire de laquelle des entreprises sont implantées partage le produit de la taxe
- 25 professionnelle soit avec le groupement de communes auquel elle appartient soit avec diverses communes
limitrophes.
Toutefois, un élément inédit de solidarité intercommunale dans une zone urbaine a vu le jour avec la
communauté de villes, structure créée par une loi de 1992; l'objectif est d'associer les communes concernées au
développement concerté d'une agglomération. Ici, la taxe professionnelle est prélevée à un taux uniforme dans
toute l'agglomération, et le produit en échoit à la communauté de villes. Celle-ci, après avoir déduit la somme
nécessaire pour l'exécution des tâches qui lui ont été transférées par les communes, redistribue le produit de la
taxe professionnelle aux communes membres, sur la base des recettes qu'elles encaissaient respectivement
avant la formation de la communauté; le solde est alors partagé de manière à favoriser une péréquation des
ressources.
Enfin, on peut noter qu'à l'intérieur de la dotation globale de fonctionnement il existe, pour les villescentres, une dotation spéciale, qui traduit la volonté de tenir compte, comme nous l'avons déjà observé pour
plusieurs pays, des charges afférentes à l'utilisation de leurs équipements par les habitants des communes
voisines.
Au Danemark, on observe la particularité suivante, à savoir que le système général de péréquation
visant à réduire les différences souvent sensibles qui existent d'une commune à l'autre en ce qui concerne la
relation fiscalité/service est complété par un système de péréquation plus spécifique, en vigueur dans la zone du
Grand Copenhague. Ce dernier système part du fait que la région métropolitaine constitue une vaste
communauté urbaine d'un seul tenant, où beaucoup de gens vivent dans une commune et travaillent dans une
autre. Pour la péréquation des besoins de dépenses - sur la base de critères "objectifs" reflétant les
circonstances qui engendrent la nécessité de dépenser - il existe un seul et même système pour toutes les
communes du pays (y compris les communes de la région métropolitaine) - avec, en outre, des mesures de
péréquation pour les communes du Grand Copenhague. Même dans ces conditions, la péréquation n'est pas
totale. Les taux de péréquation sont de 35 % à l'échelle du pays et de 25 % supplémentaires dans la région
métropolitaine, de sorte que 60 % de la différence entre les communes de cette zone est soumis à péréquation.
Un système double du même genre a été institué pour la péréquation de la base d'imposition. Le taux global de
péréquation des recettes dans la région métropolitaine atteint ainsi 90 %; certains font valoir qu'un tel niveau
prive la commune de toute incitation véritable à promouvoir le développement urbain ou à intensifier la
maîtrise de la fiscalité, puisque l'accroissement obtenu dans les recettes fiscales ne bénéficiera que dans une
faible mesure à la commune concernée. Il est intéressant d'observer qu'à la différence du système en vigueur à
l'échelle nationale, les mesures de péréquation dans la région métropolitaine ne sont pas financées par l'Etat,
mais impliquent des transferts horizontaux entre les communes elles-mêmes.
Ce système danois sera pris en compte dans la conception des dispositions spéciales pour la
péréquation dans l'agglomération de Prague. Dans le cadre de l'administration municipale à deux échelons, les
autorités de la ville sont habilitées à adopter un règlement contraignant en matière de péréquation financière.
Cependant, un tel règlement n'ayant pas encore été promulgé, la péréquation s'est effectuée jusqu'ici chaque
année sur une base spécifique.
En Suède, dans la région de Stockholm, le système en vigueur a une portée plus réduite: le conseil de
comté est légalement habilité à effectuer la péréquation des recettes fiscales des communes. Une certaine
proportion de l'impôt régional sur le revenu est distribuée aux collectivités locales dont le revenu est
relativement faible et qui sont confrontées à de graves problèmes sociaux. Ce système est jugé satisfaisant, bien
qu'il soit difficile, compte tenu du fait que les critères de répartition ont changé à plusieurs reprises, d'évaluer
les effets qui en résulteront pour la commune concernée d'une année sur l'autre.
Enfin, la Suisse offre, elle aussi, des exemples de péréquation financière horizontale dans les zones
urbaines. C'est ainsi qu'il existe, dans l'agglomération lausannoise, un fonds intercommunal de la culture, dont
l'alimentation est facultative et qui contribue au financement des institutions culturelles de la Ville de Lausanne
qui ont un caractère régional. Il existe à Berne une forme analogue de péréquation volontaire entre la villecentre et la périphérie, selon laquelle les municipalités périphériques peuvent contribuer financièrement aux
- 26 infrastructures fournies essentiellement par la ville-centre dans les domaines de la culture et des transports. Par
ailleurs, il n'existe de péréquation financière qu'à l'échelle générale du canton. En revanche, à Genève, il existe
un système de péréquation fiscale horizontale entre la commune de travail et la commune de résidence des
personnes physiques. Selon sa capacité financière, la commune de résidence a à sa disposition entre 20 % et
80 % de l'impôt cantonal de base, sur lequel elle applique son propre taux d'imposition (centimes additionnels).
Le restant de l'impôt cantonal est réparti - comme base de calcul - entre toutes les communes concernées en
fonction du montant des éléments imposables revenant à chacune d'elles. Chaque collectivité locale applique
ensuite son propre taux d'imposition sur sa part de l'impôt cantonal. Ce système assez complexe fournit aux
communes de travail - notamment la Ville de Genève - des recettes qui, ailleurs, n'échoient qu'aux communes
de résidence. Ce système compense, pour la ville-centre, les fonctions qu'elle assume au profit de l'ensemble de
l'agglomération urbaine, par exemple dans le domaine culturel (musées, opéra, théâtres).
Il apparaît, toutefois, que la plupart des pays prévoient dans leur système de péréquation financière un
dédommagement des grandes villes pour les fonctions de ville-centre qu'elles assument dans l'intérêt de la
périphérie et, dans certains cas, pour leurs capacités fiscales inférieures à la moyenne. Rares sont ceux,
néanmoins, qui possèdent un système d'ajustement financier spécifique entre les villes-centres et leur
périphérie. Ce sont en général des pays dans lesquels les collectivités locales ont un niveau d'autonomie fiscale
relativement élevé, qui se traduit par des différences également élevées de recettes fiscales potentielles. De
surcroît, il est clair que la nécessité de cette péréquation est beaucoup plus grande lorsqu'une conurbation est
fragmentée en un plus grand nombre de communes.
8.
Mesures gouvernementales visant à promouvoir un meilleur équilibre entre la
ville et la périphérie
Il s'agit ici de mesures qui, en vue d'organiser un meilleur équilibre social, économique, culturel etc.
entre ville-centre et périphérie, notamment dans les cas où celles-ci ne constituent pas une même entité
politique:
a)
freinent, limitent ou au contraire encouragent la localisation du siège des services publics et/ou
des activités privées dans certains secteurs de la ville-centre ou de la périphérie;
b)
favorisent ou pénalisent l'habitation privée et/ou la création d'espaces publics urbains dans
certains secteurs de la ville ou de la périphérie
c)
permettent une répartition équitable des activités et services générateurs de nuisances et évitent
la concentration des activités intéressantes dans le centre ville.
Les mesures générales de politique régionale, telles que les incitations à implanter les entreprises dans
les régions du pays peu développées ou en perte de vitesse sur le plan économique, ou telles que la
décentralisation d'administrations, ne concernent pas directement notre propos, étant donné que les principales
zones urbaines, ou même des territoires plus vastes sont généralement traités, à cette fin, comme autant
d'entités.
Dans plusieurs pays il n'existe pas de mesures du genre de celles qui viennent d'être indiquées; le
principe dominant est celui de l'autonomie communale. Ainsi, en Finlande, les communes se livrent à une
concurrence pour attirer les activités intéressantes, alors que l'implantation des activités génératrices de
nuisances fait l'objet, en principe, d'une concertation intercommunale. En Grèce, les plans d'urbanisme établis
pour Athènes et Salonique visent à promouvoir un meilleur équilibre social, économique et culturel entre la
ville-centre et sa périphérie: toutefois, les infrastructures techniques sont inadaptées à un tel projet; et il n'existe
pas de normes concernant les objectifs susvisés.
En Belgique et en Italie également le principe de l'autonomie communale prévaut. Toutefois, les plans
régionaux et les plans de secteur, qui peuvent prévoir l'affectation générale des diverses zones à l'habitation, à
- 27 l'industrie, à l'agriculture ou à tout autre usage, tentent de tenir compte des besoins économiques et sociaux des
différents secteurs géographiques.
Très souvent, le processus de l'aménagement du territoire représente le seul facteur influençant la
répartition des activités et des fonctions entre la ville et la périphérie. Cela peut impliquer l'élaboration de
règles ou de directives à un niveau supérieur, afin de coordonner les politiques en matière de localisation des
différentes formes d'activité. Mais il peut arriver -comme c'est le cas en Autriche - qu'aucune sanction de soit
prévue si telle commune ne respecte pas les directives; certes, en l'absence de bâton, on peut toujours agiter la
carotte des subventions. Aux Pays-Bas, en revanche, une fois que les plans d'aménagement régionaux ou
municipaux ont été élaborés, les ministres ont, à bien des égards, la faculté d'apporter des modifications
fondamentales à ces plans, s'ils ne sont pas conformes à l'intérêt national ou général tel qu'il est perçu au niveau
du gouvernement central. Tous les aspects mentionnés plus haut sous (a), (b) et (c) peuvent jouer un rôle dans
cette intervention. De même, en Finlande, le ministère de l'Environnement, en coopération avec d'autres
ministères, peut négocier et renvoyer pour nouvel examen les plans qui ne sont pas conformes aux plans
d'intérêt national ou autres plans connexes.
Même ces pouvoirs peuvent être jugés inappropriés par certains gouvernements. Ainsi, aux Pays-Bas,
on est particulièrement préoccupé par les projets urgents d'importance nationale que les communes ne veulent
pas réaliser sur leur territoire (usines de traitement des déchets, centrales électriques, centres d'accueil pour les
sans-abri). Les communes peuvent retarder indéfiniment les mesures d'aménagement du territoire nécessaires et
la loi sur l'aménagement du territoire se révèle inopérante quand une province ou le ministre de l'aménagement
du territoire veut intervenir dans la politique de ces communes. On a donc élaboré une nouvelle loi, appelée
"loi NIMBY", pour donner aux provinces et au ministre de l'aménagement du territoire le pouvoir de demander
à une commune d'accorder une dérogation au plan de développement local ou de délivrer un permis. La
commune a quatre semaines pour décider de satisfaire à la demande. Si sa réponse est négative, la province ou
le ministre de l'Aménagement du territoire peut accorder la dérogation ou délivrer le permis. La loi dite
"NIMBY" prévoit également la possibilité de simplifier l'obtention de tous les autres permis nécessaires pour le
projet (permis concernant l'environnement, permis de coupe, etc). Elle vise donc à empêcher de retarder la
réalisation d'un projet une fois éliminées les impossibilités relatives à l'aménagement du territoire.
Au Royaume-Uni, les plans de structure, qui couvrent généralement la superficie de comtés entiers,
indiquent en termes généraux l'ampleur des réalisations à effectuer en matière de logements, de bureaux et
d'autres types d'aménagement dans l'ensemble de la zone et dans chaque district. La portée prospective de ces
plans de structure est d'au moins 15 ans. Les plans locaux traduisent les dispositions des plans de structure en
affectations de terrains et en politiques détaillées pour conduire les réalisations. Dans les zones métropolitaines
les plans unitaires de développement tiennent lieu, grosso modo, à la fois de plans de structure et de plans
locaux. La tendance des politiques actuelles est de limiter le développement périphérique notamment lorsqu'il y
a des "Ceintures vertes".
En France, une loi récente pose comme principe que l'Etat et les autres collectivités publiques
devraient prendre des mesures tendant à diversifier, dans chaque agglomération, les types de logements,
d'infrastructures et de services nécessaires au maintien et au développement du commerce et des autres
activités économiques de proximité, à la vie collective dans les domaines scolaire, social, sanitaire, sportif,
culturel et récréatif, au transport et à la sécurité des biens et des personnes. La construction de logements
sociaux est déclarée d'intérêt national. Sur cette base, les documents d'urbanisme doivent déterminer les
conditions permettant de prévoir suffisamment d'espace constructible pour les activités économiques et d'intérêt
général ainsi que pour la satisfaction des besoins présents et futurs en matière d'habitat. Les schémas directeurs
et, à un niveau plus détaillé, les plans d'occupation des sols, assurent, dans leur hiérarchie, le nécessaire
équilibre entre la ville et la périphérie. L'établissement public de coopération intercommunale - lorsqu'il existe
un organe de ce genre - peut établir un programme local définissant une politique pour la satisfaction des
besoins en matière de logement et garantissant, entre les communes comme à l'intérieur de chacune d'elles, une
répartition équilibrée et une diversification de l'offre de logements.
En Suisse, le Canton de Genève lui-même répartit son territoire en zones d'activités notamment pour
- 28 l'agriculture et la viticulture, l'industrie, les immeubles locatifs et les villas. Ce régime garantit des espaces verts
au sens large et regroupe les activités primaires, secondaires et tertiaires; mais il accroît les flux de circulation.
Au Danemark, certains aspects du système d'aménagement concernent expressément la relation villepériphérie. Le plan d'aménagement en cours pour la zone du Grand Copenhague (50 communes) contient, dans
ses grandes lignes, une structure générale et une stratégie d'implantation pour les bureaux. En matière
d'implantation, le schéma d'aménagement fait apparaître deux tendances: d'une part, le transfert dans l'un des
"Fingers" urbains, des fonctions dont l'existence n'est pas tributaire d'une présence physique dans le centre; et
d'autre part, le transfert, vers la ville-centre, des fonctions qui sont orientées vers la zone centrale de
Copenhague. Dans le cadre de cette stratégie globale, un certain nombre de périmètres, dans la ville-centre
comme dans la périphérie, sont réservés pour l'implantation du siège d'administrations publiques et
d'entreprises privées présentant un intérêt régional, national ou international. L'objet principal de cette politique
est de faciliter l'accès aux lieux de travail par les transports en commun, ce qui contribue à sauvegarder
l'environnement. Mais il s'agit aussi de promouvoir un meilleur équilibre entre locaux professionnels et
logements, dans chacun des "Fingers" et dans la ville-centre, en ce qui concerne les aspects mentionnés.
Le plan régional dans les autres parties du Danemark ne contient que des directives pour l'implantation
des grands établissements publics. Ces directives visent souvent à contribuer à un meilleur équilibre entre la
ville et la périphérie sur le plan social, économique et culturel. Tant les plans communaux que les plans
régionaux servent à répartir équitablement les activités génératrices de nuisances et à attirer les activités
intéressantes dans des zones extérieures au centre-ville.
Dans la zone du Grand Copenhague, le plan régional comporte un système de quotas pour la répartition
de la construction de logements dans chacune des 50 communes. Au niveau national, il existe un système de
quotas pour les logements subventionnés. D'autre part, les espaces publics urbains sont souvent utilisés comme
un moyen pour la municipalité d'améliorer certaines zones, situées notamment dans les quartiers des grandes
villes promis à la rénovation urbaine.
En Allemagne, l'emplacement des bureaux et des établissements des autorités fédérales, provinciales et
locales est déterminé exclusivement par les responsables concernés. Les considérations supralocales ne
peuvent, en principe, être prises en compte qu'au niveau régional, dans le cadre des plans infrarégionaux ou des
plans de développement du Land. Les collectivités locales exercent une influence sur le choix des sites
accueillant les entreprises, qu'elles soient privées ou publiques, par le biais de leur plans de développement, par
un zonage orienté vers les activités économiques, par l'amélioration de leurs infrastructures et par des
instruments de promotion économique.
Les décisions relatives à l'utilisation de l'espace sont soumises à la compétence des collectivités locales
en matière d'aménagement; elles sont préparées, conduites et mises en oeuvre au moyen de plans informels
(plans d'urbanisme, schémas directeurs) et de plans formels (plans de développement). Par le biais d'incitations
à la rénovation et à la mise en valeur urbaines, par des programmes de logements, par la promotion d'activités
économiques et d'investissements des autorités locales, on parvient, du moins en partie, à orienter projets et
initiatives dans la direction souhaitée par le gouvernement du Land.
Toutefois, en Allemagne, la réglementation en matière d'habitat, l'utilisation de l'espace résidentiel et la
promotion immobilière ne sont que très faiblement liées aux données géographiques. Les règles applicables à la
ville et celles applicables à la périphérie sont fondamentalement les mêmes. La législation qui régit les rapports
entre propriétaires et locataires ne fait que brièvement mention des "zones dans lesquelles une menace
particulière pèse sur l'offre d'appartements locatifs, en nombre suffisant, à des conditions raisonnables". Sur le
territoire de ces collectivités locales ou sur une partie de ce territoire, la résiliation d'un bail d'habitation
consécutive au désir du nouveau propriétaire d'occuper un appartement qui a cessé d'avoir une fonction locative
- cette résiliation ne peut intervenir qu'au bout de cinq ans (trois ans normalement). Les zones concernées sont
identifiées par une ordonnance promulguée par le gouvernement du Land. Des dispositions analogues sont
applicables à l'interdiction frappant le mauvais usage de l'espace résidentiel, interdiction qui peut être imposée
également dans les collectivités locales où une menace particulière pèse sur l'offre de logements. Ces deux
- 29 dispositions montrent que le secteur du logement ne relève pas de la problématique des relations ville périphérie, ou périphérie - ville. Le seul facteur pertinent est la situation du marché du logement. Dans la
majorité des cas, la ville et sa périphérie immédiate forment un seul et même marché du logement, à l'intérieur
duquel, par conséquent, les mêmes règles doivent s'appliquer.
Etant donné que le problème actuel de la pénurie d'espaces résidentiels se manifeste très nettement
dans les agglomérations, les Länder peuvent lancer des programmes spécifiques pour ces zones. Mais ces
programmes ne sont pas conçus uniquement pour les grandes villes; ils ont une portée plus large.
Indépendamment des programmes immobiliers nationaux, certaines grandes villes ont également leur propre
programme de logement. Toutefois, ces programmes ne visent pas à établir un équilibre avec la demande
existant à la périphérie, ils visent à satisfaire la forte demande qui existe dans leur propre ressort.
Enfin, les programmes de rénovation urbaine mis en œuvre dans certains pays sont manifestement
importants pour l'équilibre entre - en l'occurrence - d'une part, un centre ville décrié, et d'autre part des
banlieues et des environs prospères. Ainsi, au Royaume-Uni, le gouvernement a à cœur de faire renaître
économiquement le centre-ville à l'aide de programmes tendant à promouvoir l'investissement privé, à
améliorer les infrastructures, à encourager les nouvelles entreprises et à améliorer la qualité de l'éducation et de
la formation. Il s'agit de créer un environnement sûr et attrayant, tant physiquement - grâce à l'amélioration du
logement et l'élimination de la décrépitude - que par d'autres moyens - réduction de la criminalité, amélioration
des soins de santé et des équipements dans le domaine des arts, des loisirs et du sport.
De même, en Irlande, il existe, dans le cadre d'un programme de rénovation urbaine, diverses
incitations fiscales visant à réanimer tel ou tel quartier de Dublin qui, si l'on ne prend pas de mesures
particulières, continuera vraisemblablement de ne bénéficier d'aucune mise en valeur. L'objectif premier du
programme est d'enrayer le déclin et de promouvoir le réaménagement des zones qui n'ont pas pu rivaliser, pour
accueillir des investissements privés, avec des sites plus attractifs et plus rentables. Une autorité légale a été
créée spécialement afin d'assurer le réaménagement d'une zone du centre-ville présentant un profil de ce genre.
On est en train d'implanter également dans cette zone, un centre international de services financiers, en mettant
à profit diverses incitations fiscales.
9.
Participation des citoyens à l'aménagement de la ville et de la périphérie
Tous les pays disposent, semble-t-il, d'un système plus ou moins développé de consultation du public et
de participation des citoyens au processus de l'aménagement du territoire. Au minimum, les projets de plans
sont accessibles au public avant d'être adoptés; et tout citoyen a le droit de faire des commentaires et dans
certains cas (comme en Irlande) d'obtenir une audition publique. Parfois (par exemple, au Portugal), la
consultation prend la forme d'une enquête publique.
En Pologne, les principes du plan de structure et les propositions concernant sa mise en œuvre sont
présentés au public; les habitants sont conviés à des auditions; ils ont la faculté, eux-mêmes ou leurs
associations, de déposer des motions, tant au stade de la définition des objectifs de l'aménagement qu'à celui de
la détermination des fonctions des divers territoires; de surcroît, les autorités sont tenues de répondre par écrit
aux auteurs de ces motions en indiquant, le cas échéant, les raisons pour lesquelles celles-ci ne sont pas
acceptées.
De même à Prague, une série d'auditions publiques se sont tenues sur les propositions de révision du
plan directeur et divers groupes d'intérêts ont été invités à soumettre leurs suggestions et observations.
Avant d'établir un schéma directeur, une autorité locale sollicite parfois, l'avis d'associations qui ont
compétence en matière de construction, d'aménagement ou d'urbanisme (France, Norvège), ou bien elle invite
les citoyens à soumettre des idées et des propositions (Danemark).
Dans la plupart des pays, il est obligatoire de donner aux citoyens la possibilité de participer à
l'aménagement; dans certains, l'ampleur de cette possibilité est laissée à l'appréciation des décideurs locaux.
- 30 Parfois, les procédures de consultation et de participation affectent, par delà le processus général
d'aménagement, tel projet de développement particulier (c'est le cas, par exemple, en France).
En Allemagne, le grand public doit être entendu lorsqu'on est en présence de mesures qui requièrent
une étude d'impact sur l'environnement dans le cadre de la procédure d'harmonisation de la politique
d'aménagement du territoire.
En Suisse, en Italie et en Allemagne, il existe souvent des moyens institutionnels de participation sous
forme de référendums, d'initiatives et de pétitions au niveau local. En Suisse notamment, la transformation des
plans généraux en plans d'occupation des sols et de zonage contraignants est soumise à référendum. En Grèce,
la participation peut être assurée par l'intermédiaire des conseils d'arrondissement élus au suffrage direct dans
les villes de plus de 150.000 habitants, ou par l'intermédiaire des conseils de quartier; en fait, ces organes
peuvent prendre des décisions ou faire des propositions sur la plupart des questions qui touchent à la gestion et
à l'aménagement au plan local.
On trouve également, dans toute l'Europe, un large éventail de possibilités de participation moins
formelles.
En Espagne, les conseils municipaux encouragent le développement d'associations pour la défense des
intérêts généraux ou sectoriels des habitants, en les autorisant à se servir des équipements publics et en mettant
à leur disposition une aide financière pour la mise en oeuvre de leurs activités, et ils les encouragent à participer
à la gestion de la commune. Les commissions municipales et les conseils sectoriels facilitent cette participation.
Par ailleurs, il est fréquent, dans les Etats européens, que les citoyens aient le droit de faire appel des
décisions des autorités municipales relatives aux plans d'occupation des sols. Ces recours prennent différentes
formes selon les traditions administratives du pays concerné. Au Royaume-Uni - pays dans lequel les plans ne
sont pas juridiquement contraignants - il existe un droit de recours tant contre le schéma directeur que contre le
plan concret de développement. Ce recours peut être motivé non seulement - comme ailleurs - par des
questions de légalité mais par des considérations de fond. Les personnes qui ne sont pas d'accord avec un
schéma directeur ont le droit de soumettre leur point de vue à un inspecteur indépendant lors d'une enquête
publique. En Irlande, toute personne peut saisir la commission de recours de l'aménagement du territoire sur
une question de planification pour attaquer une décision d'une collectivité locale concernant un projet de
développement donné; lors de leurs décisions, les collectivités locales doivent tenir compte du plan
d'aménagement du territoire, mais le plan n'est pas juridiquement contraignant. Pour ce qui est des questions de
droit, le recours aux tribunaux est possible. Au Danemark, on peut saisir en appel - uniquement sur des points
de droit - soit le ministre de l'Environnement (Agence nationale de l'aménagement du territoire), soit la
Commission principale chargée de la conservation. En Belgique, on peut faire appel d'une décision - encore
que le délai prescrit soit très court - dans le cadre de la procédure de contrôle administrative applicable à tous
les actes des autorités locales. En Espagne, en Allemagne et en Grèce, les décisions définitives approuvant les
plans de structure et les projets d'urbanisme peuvent être contestées devant les tribunaux.
En revanche, en Autriche, il n'est pas possible de faire appel, étant donné que les plans d'occupation
des sols donnent lieu à la publication d'ordonnances, c'est-à-dire de règles contraignantes. Toutefois, il est
possible de contester les plans indirectement. Si une instance locale refuse une autorisation d'aménagement
pour la construction d'un bâtiment, la partie qui s'estime lésée peut attaquer la décision et arguer que le plan
d'occupation des sols n'est pas en conformité avec la loi. Si la Cour suprême administrative accepte cet
argument, elle annule le plan et l'instance locale doit en établir un nouveau.
En Italie également, la loi de l'Etat prévoit une institution s'apparentant à un médiateur (ombudsman).
Les statutes des provinces, des villes métropolitaines et des communes peuvent, en effet, instituer le difensore
civico, qui a la charge d'examiner les abus commis contre les citoyens par l'Administration auprès de laquelle il
est institué.
Les développements qui précèdent montrent que la participation des citoyens aux questions concernant
- 31 l'aménagement est un processus très répandu, qui revêt des formes très diverses. Toutefois, on relève la
présence, dans la quasi-totalité des pays, d'un élément commun, à savoir que ces formes de participation
s'appliquent uniformément dans tous les types de collectivités locales. En d'autres termes, en dehors des
conseils de quartier, il n'existe pas de formes spécifiques de participation des citoyens pour les grandes villes et
leurs communes périphériques. Ainsi, il ressort de la réponse danoise, par exemple, que les autorités
responsables de l'aménagement du territoire dans la zone du Grand Copenhague sont les deux communes
centres - les villes de Copenhague et de Frederiksberg - et les trois comtés périphériques de Copenhague,
Frederiksborg et Roskilde: les citoyens ne peuvent participer au processus d'aménagement que dans la zone
d'aménagement dans laquelle ils résident.
Ailleurs, il est possible d'obtenir une certaine participation, à l'échelle de la conurbation, par le biais de
l'établissement des plans d'aménagement qui intéressent l'ensemble de la zone métropolitaine. Au Portugal, ce
processus inclut la consultation de la population au moyen de réunions publiques organisées dans chacune des
communes concernées par le plan. Cette procédure bénéficie du soutien technique et institutionnel d'une
commission consultative spécifique, qui est tenue de promouvoir ces auditions de la population, avant de
rendre son avis définitif. Dans la zone métropolitaine de Lisbonne, en sus des divers ministères, les autorités
communales et les secteurs économique, social et culturel participent à cette commission.
La Résolution n° 2 adoptée par la Conférence des Ministres européens responsables des collectivités
locales à sa 9e session (Bergen, mai 1991) souligne la nécessité de compléter la démocratie représentative au
niveau local par le développement des différents moyens de participation directe des citoyens à la gestion des
affaires de la collectivité. L'expérience montre qu'il existe souvent une différence considérable dans le degré de
participation entre les grandes villes et les petites communes. Dans les premières, le danger est plus grand que
les citoyens renoncent à essayer de participer, soit parce qu'ils ignorent quels moyens sont à leur disposition,
soit parce qu'ils estiment qu'ils n'auront de toute façon aucune influence. Ce facteur plaide en faveur du
maintien de petites entités dans une conurbation. D'un autre côté, une participation, même importante, des
citoyens aux décisions dans des entités trop petites pour exercer une influence effective sur le cadre de vie est
également de toute évidence peu satisfaisante. Des compromis sont donc nécessaires. C'est dans cet esprit
qu'ont été conçues les nouvelles structures prévues, par exemple, pour Rotterdam, qui comportent, d'une part,
une vaste collectivité pour la conurbation et, d'autre part, une division de la ville en communautés plus petites
au sein desquelles les citoyens peuvent mieux comprendre les choix qui leur sont ouverts et les ressources
financières et autres qui entrent en jeu. Il importe également, pour faciliter la participation, qu'une structure soit
de nature à permettre au citoyen de distinguer clairement où se situe la responsabilité des prises de décision.
- 32 -
10.
Remarques finales
Les Etats membres du Conseil de l'Europe reconnaissent tous la nécessité de disposer de structures et
d'arrangements institutionnels appropriés pour assurer une coordination suffisante dans la gestion des grandes
villes et de leur périphérie.
Or, il est impossible de proposer un modèle unique pour toutes les agglomérations européennes. Les
solutions adoptées dans des situations apparemment comparables sont souvent différentes. Il est néanmoins
difficile de comparer les résultats, car les comparaisons entre les coûts ne sont guère possibles; de même il est
difficile de comparer le niveau de satisfaction des habitants d'agglomérations où des choix de gestion différents
ont été adoptés.
Aucun changement institutionnel modifiant le cadre de l'administration de la ville, surtout quand des
fusions de communes sont proposées, ne devrait intervenir sans consultation préalable de la population.
Certes, dans plusieurs pays, certaines des options qui se présentent en théorie ont fort peu de chances
d'être acceptées sur le plan politique. Dès lors, on est naturellement amené à tirer le meilleur parti des options
qui sont disponibles dans la pratique. Dans certains cas, nous l'avons vu, les attitudes portent l'empreinte de
certains types de solutions expérimentées dans le passé.
Ainsi la création de structures politiques et administratives appropriées pour les grandes villes et leur
périphérie est un domaine problématique dans lequel les incontestables impératifs de la gestion se heurtent à
des conflits d'intérêts et à des sensibilités politiques. Il n'est guère surprenant que les communes périphériques
se méfient de la ville-centre et rechignent souvent à établir avec elle des liens institutionnels impliquant des
transferts de compétences et de ressources fiscales. En même temps, lorsque des zones métropolitaines sont
très importantes par rapport à l'ensemble de la population nationale, les structures à créer représentent un point
très sensible également au niveau national; les gouvernements peuvent hésiter à institutionnaliser des entités
aussi énormes (des craintes ont parfois été exprimées de voir se créer un "Etat dans l'Etat". Il est inévitable que
des considérations politiques partisanes soient souvent présentes. Ainsi, tant que subsistera le besoin d'une
gestion coordonnée, le cadre institutionnel à l'intérieur duquel celle-ci s'exerce a toutes les chances de demeurer
diversifié et, dans certains cas, sujet à modification.
Les grandes villes jouent et continueront à jouer un grand rôle dans la vie politique et économique de
l'Europe à l'approche du XXIe siècle.
La position des grandes villes au niveau européen, leur développement, leur aptitude à faire face à la
concurrence internationale et la qualité de vie de leurs habitants dépendront en grande partie des décisions
prises aujourd'hui pour unir et renforcer les différentes composantes de nos grandes villes et de leur périphérie,
et pour rendre leurs services publics efficaces et adapter leurs structures de gestion à l'Europe de demain.
- 33 -
ANNEXE I
Tableau indicatif d'autorités englobant de grandes zones urbaines
Le tableau suivant indique des exemples des solutions institutionnelles qui ont été adoptées dans divers pays européens en vue
d'assurer une gestion coordonée des agglomerations urbaines. Il se base sur les informations fournies par les différentes délégations
nationales et ne prétend pas à l'exhaustivité.
COLLECTIVITES TERRITORIALES ORDINAIRES DE L'ECHELON SUPERIEUR
INSTITUTION
TYPE D'ORGANISME;
ORIGINE
ORGANE PRINCIPAL
DE DECISION
PRINCIPALES
FONCTIONS
FINANCEMENT
Ville-Etat de
Vienne
Double statut de
Land et de commune
institué par la
loi
Assemblée
parlementaire élue
directement
Fonctions de Land
et fonctions
communales
Recettes fiscales
propres, droits
et redevances,
subventions
fédérales
Villes-Etats de
Berlin, Brême et
Hambourg
Double statut de
Land et de commune
institué par la
loi
Assemblée
parlementaire élue
directement
Fonctions de Land
et fonctions
communales
Recettes fiscales
propres, droits
et redevances,
subventions
fédérales
Canton de Genève
Etat cantonal entré en
1814 dans la
Confédération Suisse
Assemblée
parlementaire élue
directement
Conseil général
(ensemble des électeurs)
Fonctions normales
des états cantonaux, avec
en plus notamment
transports publics et
circulation, police des
constructions, fonctions
assumées ailleurs
par les communes
Recettes fiscales
propres, taxes et
émoluments, subventions
et parts fédérales
Conseil du comté
de Stockholm
Comté dont les
pouvoirs ont été
étendus par la loi
en 1971
Conseil élu
directement
Aménagement du
territoire,
transports, soins
de santé
Recettes fiscales
propres,
subventions du
gouvernement,
droits et
redevances
Ville et comté d'Oslo
Double statut de comté et Conseil élu directement
commune
Fonctions de comté et
fonctions communales
Recettes fiscales propres,
débits et redevances,
subventions du
gouvernement
- 34 -
AUTORITES SPECIALES A L'ECHELLE DE L'AGGLOMERATION
INSTITUTION
TYPE D'ORGANISME;
ORIGINE
ORGANE PRINCIPAL
DE DECISION
PRINCIPALES
FONCTIONS
FINANCEMENT
Agglomération de
Bruxelles
Autorité spéciale
instituée par la
loi en 1971
Conseil élu
directement
Collecte et évacuation des
ordures,
transports
publics, services
de lutte contre
l'incendie,
approvisionnement
en eau, entretien
des routes, voirie
Recettes fiscales
propres,
subventions
régionales,
redevances des
usagers
Conseil de la
zone métropolitaine d'Helsinki
(HMAC)
Autorité spéciale
instituée en 1970 dont
les pouvoirs ont été
étendus par la loi en
1973
Conseil élu par
les communes
membres
Recherche, aménagement, gestion
des déchets,
assainissement de
l'air, transports
publics régionaux
Redevances des
usagers, contributions des
communes membres
Conseil métropolitain de Valence
Organisme spécial
institué par une
loi de la communauté autonome en 1986
Assemblée composée des Aménagement du
maires des communes
territoire, coordination de
certains projets et services,
approvisionnement en eau,
collecte des déchets,
abattoirs, lutte contre
l'incendie
Recettes fiscales propres,
subventions de l'Etat,
droits et redevances,
contributions des
communes composantes
Communautés
urbaines de
Bordeaux, Lille,
Lyon, Strasbourg,
Brest, Cherbourg,
Le Creusot Montceau-lesMines,
Dunkerque,
Le Mans
Organismes
spéciaux institués
sur la base de la
loi de 1966 (les
quatre premières
à titre obligatoire, les autres à
titre volontaire)
Conseil élu par
les communes
membres
Aménagement,
zones industrielles,
transports publics,
logement,
services de lutte contre
l'incendie,
approvisionnement
en eau, égouts,
collecte et évacuation
des déchets, abattoirs,
marchés, voirie,
parcs de stationnement
Recettes fiscales
propres
Neuf syndicats
français
d'agglomération
nouvelle
Organismes
spéciaux créés sur
la base d'une loi
de 1983
Conseil élu par
les communes
membres
Aménagement
urbain, transports, développement économique
Recettes fiscales
propres
Communautés
métropolitaines
de Hanovre et
Brunswick
Organismes
spéciaux créés par
une loi du Land
Assemblée élue
par les conseils
des collectivités
membres
Transports locaux,
politique régionale, aménagement
du territoire
Contributions des
communes membres;
redevances des
usagers
- 35 -
INSTITUTION
TYPE D'ORGANISME;
ORIGINE
ORGANE PRINCIPAL
DE DECISION
PRINCIPALES
FONCTIONS
FINANCEMENT
Communauté périphérique de
Francfort
Organisme spécial
créé par une loi
du Land de 1975
Assemblée élue
directement et
chambre représentant les collectivités membres
Plan d'occupation des
sols, aménagement de
la circulation,
approvisionnement
en eau, gestion
des déchets et des
égouts, zones de
récréation
Contributions des
communes membres;
redevances des
usagers
Syndicat des
collectivités
locales de la
Ruhr
Organisme spécial
créé par une loi
du Land
Assemblée élue par
les conseils des
collectivités
membres; cooptation de membres
conseillers
Parcs, cours
d'eau, forêts
Contributions des
communes membres;
redevances des
usagers
Syndicat urbain
de Sarrebruck
Organisme spécial
créé par une loi
du Land
Assemblée élue
directement et
chambre représentant les collectivités membres
Fonctions
habituellement
assumées par les
Landkreise;
coordination du
développement
Autorités
d'Athènes et de
Salonique
Organismes
spéciaux créés par
une loi de 1985
Comité exécutif
élu au suffrage
indirect (désigné
en partie par le
gouvernement)
Aménagement,
environnement
Subventions de
l'Etat, recettes
tirées de
l'exploitation
des biens et des
amendes pour
pollution
Zones métropolitaines de
Lisbonne et de
Porto
Organismes
spéciaux créés par
une loi de 1991
Assemblée élue
par la totalité des élus
des communes
membres;
exécutif composé
des maires de ces
communes
Investissements,
transports et
services de communication, hygiène,
environnement,
aménagement du
territoire, approvisionnements
publics
Contributions des
communes membres,
subventions du
gouvernement,
redevances pour
services
- 36 -
INSTITUTION
Zones métropolitaines de Turin,
Milan, Venise,
Gênes, Bologne,
Florence, Rome,
Bari, Naples
TYPE D'ORGANISME;
ORIGINE
Organismes
spéciaux institués
par une loi de
1990
"Joint authorities" des
Différents organismes à
comtés métropolitains de vocation unique créés par
Greater Manchester,
une loi de 1985
Merseyside, South
Yorkshire, Tyne and
Wear, West Midlands and
West Yorkshire
ORGANE PRINCIPAL
DE DECISION
PRINCIPALES
FONCTIONS
FINANCEMENT
Conseil élu directement
Aménagement du
Recettes propres,
territoire,
subventions de
voirie, transports,
l'Etat
oeuvres d'art,
environnement,
protection du sol,
eau, collecte des
déchets, distribution
d'énergie,
développement
économique, santé
publique, établissements
scolaires,
formation professionnelle
Nomination par les
conseils des districts
composants parmi leurs
membres et en fonction de
la population
Police, lutte contre
l'incendie, défence civile,
transport, réglementation
des déchets
Contributions des districts
membres en fonction de
leur population
(partiellement compensées
par des subventions de
l'Etat)
- 37 -
ANNEXE II
Résolution sur les grandes villes et leur périphérie:
coopération et gestion coordonnée
adoptée par la 10e Conférence des ministres européens
responsables des collectivités locales
Les Ministres européens responsables des collectivités locales réunis à La Haye les 15 et 16 septembre
1993, à l'occasion de leur 10e Conférence,
Ayant examiné le rapport présenté par le Ministre de l'Intérieur et le Secrétaire d'Etat du Ministère de
l'Intérieur des Pays-Bas;
Eu égard:
-
à la proportion importante et croissante de la population européenne vivant dans des régions urbaines
où la mobilité des personnes et des emplois a considérablement renforcé l'interaction et
l'interdépendance entre les villes-centres et leur périphérie;
-
à la différence qui existe généralement dans ces régions urbaines entre les limites administratives de la
ville-centre et l'étendue réelle de l'agglomération;
-
aux mouvements sélectifs des personnes et des emplois et au développement déséquilibré au sein des
régions urbaines, qui confrontent certaines collectivités locales de ces régions à la plupart des
problèmes infrastructurels, économiques, culturels et sociaux coûteux tandis qu'elles sont privées d'une
bonne part des revenus nécessaires pour y faire face;
-
à l'importance cruciale, pour résoudre ces problèmes, de posséder des structures administratives
appropriées;
-
au besoin de trouver un équilibre entre l'efficacité et la fonctionnalité de la gestion d'une part, et la
préservation de la nature politique et démocratique de celle-ci de l'autre, et vu la prise de conscience
croissante de la population, la question de sa participation dans les nouvelles structures administratives
devrait être un thème important dans le proche avenir;
Constatant:
-
qu'il faut prendre en compte, dans la conception des structures administratives, les spécificités de la
région urbaine concernée, et qu'il n'est donc pas souhaitable de rechercher une approche uniforme en la
matière;
-
qu'en évaluant l'efficacité des structures de l'administration publique il ne faut pas perdre de vue que
leur action a pour but de renforcer la légitimité des autorités et leur aptitude à résoudre les problèmes,
et non simplement de satisfaire à des critères fonctionnels ou financiers purement internes;
-
que pour assurer efficacement entre autres fonctions, la planification et le contrôle de l'occupation des
sols ou les transports et pour redresser les graves déséquilibres qui ont tendance à s'accentuer entre
secteurs prospères et secteurs appauvris des régions urbaines, les autorités de la ville et de sa périphérie
- 38 doivent coopérer étroitement et concerter leur gestion;
-
que dans des situations caractérisées par la complexité et les conflits d'intérêts, la coopération sur une
base volontaire entre collectivités locales peut parfois ne pas atteindre une ampleur suffisante, et qu'il
est souhaitable de doter les institutions de l'échelon supérieur - qui ont des responsabilités à une
dimension plus large pour assurer la cohésion sociale, le développement durable et une gestion
véritablement coordonnée - d'instruments pour promouvoir la coopération et de compétences pour
contraindre, si nécessaire, les collectivités locales à collaborer ou à déléguer certaines compétences
(occupation des sols ou transports par exemple) à des autorités responsables d'une zone géographique
plus étendue;
-
que le principe de subsidiarité, inscrit à l'article 4, paragraphe 3 de la Charte européenne de l'autonomie
locale, revêt une importance particulière dans ce domaine, car il implique que l'on ne peut inviter, ou
obliger, les pouvoirs locaux à renoncer, au profit de structures, éventuellement à créer, et couvrant des
zones géographiques plus étendues, qu'à des fonctions dont l'exercice serait manifestement plus
efficace dans ce cadre plus large;
Soulignent que:
-
l'aménagement du territoire et sa réglementation demeurent des moyens privilégiés pour influencer la
répartition des activités et des fonctions entre les villes et leur périphérie, et qu'il convient d'élaborer et
de mettre en oeuvre des plans d'urbanisme uniques en ayant recours à toutes formes de coopération ou
sous la responsabilité d'une administration compétente pour une zone géographique plus étendue;
-
les pouvoirs publics, par leurs décisions d'investir dans les infrastructures et les équipements et de
financer des services, peuvent également encourager et promouvoir l'investissement privé dans des
sites choisis et instaurer ainsi un meilleur équilibre dans la répartition géographique des richesses;
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les mécanismes spécifiques de péréquation financière entre la ville-centre et sa périphérie, lorsqu'ils
existent, doivent être conçus de manière à ne pas dissuader les collectivités locales concernées
d'encourager un développement urbain durable et de renforcer les contrôles en matière de fiscalité et de
dépenses publiques;
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la recherche de meilleures structures administratives pour les régions urbaines fournit une excellente
occasion de réévaluer la répartition des pouvoirs et les rapports entre les divers niveaux de
gouvernement et de mettre au point de nouveaux modes de coopération et de collaboration entre les
pouvoirs publics d'une part, et les entreprises privées et le secteur bénévole d'autre part, principalement
en matière d'infrastructures et de services sociaux et culturels;
Recommandent au Comité des Ministres de charger le CDLR d'examiner:
a)
divers instruments et mécanismes visant à promouvoir et à renforcer la coopération et la solidarité au
sein des régions urbaines;
b)
les mesures prises dans divers pays pour tenter de préserver l'équilibre socio-économique des régions
urbaines, en accordant une attention particulière à la coopération entre les divers niveaux de
gouvernement et les exemples de partenariat réalisé entre les secteurs public, bénévole et privé.
Recommandent au Comité des Ministres d'intensifier l'action du Conseil de l'Europe en matière de
coopération transfrontalière, également en zone urbaine, et non seulement dans le sens de l'élimination des
obstacles qui la rendent toujours difficile, mais aussi dans le sens d'une participation active à la création et au
fonctionnement d'accords de coopération transfrontalière.

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