WHERE THE RAIN FALLS
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WHERE THE RAIN FALLS
Rapport sur la Politique Globale WHERE THE RAIN FALLS (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Un projet d’étude conduit dans 8 pays pour mieux comprendre les précipitations, la sécurité alimentaire et les mouvements de populations. KOKO WARNER, TAMER AFIFI, KEVIN HENRY, TONYA RAWE, CHRISTOPHER SMITH, ALEX DE SHERBININ Soutenu par : CARE FRANCE L’Université des Nations Unies Institut de l'Université des Nations Unies pour l’environnement et la sécurité humaine (UNU-EHS) Centre pour un réseau international d’information sur les sciences de la Terre à l’Institut de la Terre de l’Université Columbia. Décembre 2012 Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _3 Crédit photo : © 2012 Lars Johansson _4 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Where the rain falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration KOKO WARNER, TAMER AFIFI, KEVIN HENRY, TONYA RAWE, CHRISTOPHER SMITH, ALEX DE SHERBININ Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _5 Remerciements Le présent rapport et les différentes activités du projet ont pour (tous deux du Centre pour le changement mondial, Dhaka, but de mieux faire comprendre l’incidence du changement Bangladesh), M. Selim Reza Hassan (CARE Bangladesh) climatique sur la sécurité alimentaire et la mobilité humaine et le Dr. Benjamin Etzold (Université de Bonn), chargés du et de renforcer les mesures pour y répondre. Il a été publié travail de terrain au Bangladesh, ainsi qu’Andrea Milan, dans le cadre du projet « Where The Rain Falls : Changement pour ses apports sur le terrain, le Dr. Edward Salifu Mahama climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance (Université pour les études sur le développement, Ghana) et migration » (« Rainfalls »), lequel a été rendu possible et le Dr. Christina Rademacher-Schulz (UNU-EHS) qui ont grâce à une généreuse contribution du groupe AXA et de effectué le travail de terrain au Ghana, le Dr. Sergio Ruano la Fondation John D. et Catherine T. MacArthur sous la (consultant indépendant) et M. Andrea Milan pour le travail responsabilité de Alice Steenland, John Slocum et Milena de terrain au Guatemala, ainsi que le Dr. Emma T. Liwenga Novy-Marx. (Institut pour l’évaluation des ressources, Université de Dar es-Salaam, Tanzanie). Le Dr. Koko Warner (UNU-EHS) a Nous voudrions saluer ici les chercheurs dont les études de collaboré en tant que directeur scientifique des recherches « cas développé dans le cadre du projet ont inspiré ce rapport Rainfalls ». Le Dr. Tamer Afifi (UNU-EHS) et M. Kevin Henry de synthèse. Nous remercions les auteurs suivants pour (CARE France) ont coordonné respectivement les recherches leurs contributions : M. Panomsak Promburom (Centre de et le projet. recherche sur les systèmes de ressources agricoles) et le Dr. Patrick Sakdapolrak (Université de Bonn) qui ont mené Nous voudrions remercier les membres du Groupe technique les recherches de terrain en Thaïlande, M. Raúl Ho (M.Sc consultatif de Rainfalls pour leurs précieux apports : le – consultant indépendant) et M. Andrea Milan (UNU-EHS) Professeur Susan Martin (Institut pour l’étude des migrations pour leurs recherches de terrain au Pérou, le Dr. Janakaraj internationales de l’Université de Georgetown, États-Unis), Murali (TERI Inde) et le Dr. Tamer Afifi (UNU-EHS) pour le Professeur émérite Roger Zetter (Université d’Oxford), leurs recherches en Inde, M. Nguyen Cong Thao (Institut le Dr. Mathieu Choux (Groupe AXA), le Dr. Tara Shine d’anthropologie, Académie vietnamienne des sciences (Fondation Mary Robinson), Mme Agnes Otzelberger sociales – doctorant à statut ABD de l’Université de Hawaï (Réseau CARE International sur la pauvreté, l’environnement à Manoa, États-Unis), le Dr. Nguyen Viet Khoa (Centre et le changement climatique), le Dr. Youba Sokona (Centre national d’extension agricole) et le Dr. Kees van der Geest africain pour la politique climatique) et le Dr. Fatima Denton (Université d’Amsterdam) pour leur travail au Viet Nam, (CRDI). le Dr. Ahsan Uddin Ahmed et le Dr. Sharmind Neelormi _6 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Nous tenons aussi à remercier les experts suivants, qui ont nationale de l’Altiplano – Puno – Pérou), le Dr. Luis Suárez participé à la relecture du présent document : le Dr. Saleemul Salas (Université Alas Peruanas de Huancayo, Pérou), le Dr. Huq (IIED et ICCCAD), M. Chipo Plaxedes Mubaya (UDSM Juan Torres Guevara (Université nationale pour l’agriculture – IRA, Tanzanie), M. Ced Hesse (IIED), le Dr. Marloes Mul – La Molina – Soluciones Prácticas – ITDG, Pérou), le Dr. (UNESCO-IHE), le Dr. Siza Tumbo (Sokoine University of Susan Cutter (Université de Caroline du Sud, États-Unis), le Agriculture, Tanzanie), le Dr. rer. pol. Wolfgang-Peter Zingel Dr. Pablo Lucas (CFPM), M. Vikram Kolmannskog (Conseil (Südasien-Institut Abteilung Internationale Wirtschafts- und norvégien pour les réfugiés), M. David Waskow (Oxfam) et Entwicklungspolitik), le Dr. Ainun Nishat (Université BRAC, un relecteur anonyme travaillant pour le Fonds de recherche Bangladesh), le Dr. Rezaur Rahman (Institut pour la gestion AXA. de l’eau et des inondations et Bangladesh University of Engineering and Technology), le Dr. A.S.R.A.S. Sastri (Indira Nous aimerions aussi remercier les experts suivants, qui ont Gandhi Agricultural University, Inde), le Dr. Anwara Begum participé directement à la relecture des huit études nationales (Bangladesh Institute of Development Studies), le Dr. Osman et dont les contributions ont permis d’améliorer la qualité Kanton (UDS, Ghana), le Dr. Abdul-Korah (College of Saint globale du présent rapport : le Dr. Chilanga Asmani (UNFPA), Rose, États-Unis), Dr. Benjamin Schraven (DIE, Allemagne), le Dr. Stephen Nindi, le Prof. Allan M. Findlay (Faculté pour Dr. Irit Eguavoen (ZEF Bonn, Allemagne), Dr. Patrick Laux l’environnement, Université de Dundee, Écosse), M. Tasneem (Institut de technologie de Karlsruhe, Allemagne), Mme. Siddiqi (The Asia Foundation), le Prof. Murari Lal (CESDAC), Olivia Dun (Université de Sydney, Australie), Mme Jane Chun le Dr. Bandi Venkateswarlu (CRIDA), le Dr. Anil Kumar (PNUD), M. Nguyen Chi Quoc (OIM), M. Peter Mackay Singh (ICAR), M. Shirish Sinha DEZA SINSH (Ambassade de (consultant en changement climatique), NGÔ THI PHUONG Suisse en Inde), le Prof. Stephen Kendie (Université de Cape Lan (Université nationale du Viet Nam – Hô-Chi-Minh- Coast, Ghana), le Dr. Issac Agyemang (FIDS, Ghana), le Dr. Ville), le Dr. NGUYEN HIEU Trung (Université de Can Tho Felix Asante (ISSER, Ghana), Mr. Koos Neefjes (PNUD), le et Institut DRAGON – Mékong), le Dr. Karl Husa (Université Dr. James Taylor (Université d’Adélaïde, Australie), le Dr. de Vienne), M. Vitoon Panyakul (Greennet), le Dr. Jonathan Huynh Truong Huy (Faculté des sciences économiques et Rigg (Université de Durham, Faculté de géographie), le Dr. Edwin Castellanos (Institut pour l’environnement et la biodiversité, Université del Valle, Guatemala), le Prof. Claudia Donis (Université de sciences sociales d’Amérique latine, Guatemala), le Prof. Alipio Canahua (Université Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _7 d’administration des entreprises, Université de Can Tho, Brach et Mme Andrea Wendeler, sans oublier Mme Verena Viet Nam), le Prof. Hugo Graeme (Université d’Adélaïde), le Russo et M. Serge Birtel. Dr. Sureeporn Punpuing (Institut d’études sur la population et les sciences sociales, Université de Mahidol, Thaïlande), - nos collègues du Centre pour le réseau international Mme Hilda Rivera (Rain Forest Alliance), M. Carlos d’information sur les sciences de la terre (CIESIN)/Université Mansilla (Ministère de l’environnement et des ressources Columbia, le personnel de SIG Cody Aichele, Tricia Chai- naturelles, Guatemala), le Dr. Juventino Galvez (Institut pour Onn, Dara Mendeloff, et Sneha Rao, le cartographe Al l’agriculture, les ressources naturelles et l’environnement, Pinto, Andrés Gonzalez pour le client de cartes web, Susana Université Rafael Landívar, Guatemala), le Dr. Katrin Millock Adamo pour son aide lors de la conception de l’enquête et (CNRS, École supérieure des sciences économiques, Paris) et de la stratégie d’échantillonnage et Michael Bell et John Del le Prof. Anthony Oliver-Smith (Université de Floride, États- Corral pour leur analyse des données climatiques (Institut de Unis). recherche international sur le climat et la société/Université Columbia). Les auteurs du présent rapport tiennent aussi à exprimer leur reconnaissance à : - CARE France qui s’est chargé de la gestion du projet et en particulier Mlle Aurélie Ceinos, chargée de programme, et Mlle Kimberly Bennett, coordinatrice des communications externes, pour leurs nombreuses contributions à ce projet. Ce dernier n’aurait pas vu le jour sans le soutien actif des bureaux de pays de CARE au Bangladesh, en Inde, en Thaïlande, au Viet Nam, au Ghana, en Tanzanie, au Guatemala et au Pérou, ainsi que de l’équipe PECCN (Réseau Pauvreté, Environnement et Changement climatique) de CARE International et de CARE USA. - UNU-EHS, en particulier le Dr. Jakob Rhyner, vice-recteur de l’Université des Nations Unies en Europe (UNU – ViE) et directeur de l’UNU-EHS, ainsi que l’équipe de l’information et des communications : le Dr. Alice Fišer, Mme Katharina _8 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Crédit photo : © 2007 Bill Dowell/CARE Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _9 Table des Matières Remerciements 6 Synthèse 14 1- Nature et objectif du présent rapport 25 1.1 Que sait-on de l’influence des changements environnementaux 25 sur la mobilité humaine ? 1.2 Rapports entre la variabilité pluviométrique, la sécurité alimentaire/ 26 des moyens de subsistance et la mobilité humaine 1.3 De l’utilité de comprendre les décisions en matière de mobilité dans 27 le contexte des changements climatiques 1.4 Nouvelle approche de réflexion et contribution du présent rapport 28 1.5 Portée et limites du présent rapport 29 2- Méthodes multidisciplinaires du projet Where The Rain Falls 30 2.1 Entretiens auprès d’experts 32 2.2 Recherches participatives 33 2.3 Enquête auprès des ménages 34 2.4 Scénarios futurs des précipitations et de la migration tirés de la 35 modélisation axée sur les agents 2.5 Champs de recherche, méthodes et triangulation 35 3- Caractéristiques nationales et des sites de recherche 38 3.1 Critères pour la sélection des pays et des sites 38 3.2 Contexte national 38 3.3 Caractéristiques des sites de recherche 41 _ 10 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 4- 4. Résultats des études de cas : la migration dans le contexte de la variabilité 44 pluviométrique et de la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance 4.1 Thaïlande : grâce à des sources de revenus diversifiées et un accès aux biens 46 et aux services la migration est désormais un choix dans la province de Lamphun 4.2 Pérou : les options en matière de subsistance et les stratégies de migration dans 53 la province de Huancayo varient en fonction de l’altitude et de la proximité avec les centres urbains 4.3. Viet Nam, delta du Mékong : les populations pauvres de la commune de Hung 58 Than, sans terres et peu qualifiées, n’ont guère d’options, en dépit de la croissance économique 4.4 Inde : les ménages pauvres de Janjgir-Champa continuent d’utiliser la migration 65 saisonnière pour assurer leur sécurité alimentaire, en dépit de l’irrigation, de l’industrialisation et des Mesures de protection sociales et économiques 4.5 Bangladesh : la migration est une stratégie d’adaptation clé pour les ménages 70 pauvres de Kurigram, mais les coûts sociaux en sont élevéss 4.6 Ghana : la forte dépendance envers l’agriculture pluviale dans le district de 76 Nadowli explique la persistance de la migration saisonnière comme stratégie d’adaptation 83 4.7 Guatemala : le manque de diversification des moyens de subsistance et de possibilités migratoires laisse peu d’options aux habitants de Cabricán 89 4.8 Tanzanie : la migration est une stratégie d’adaptation tant pour les petits exploitants agricoles que pour les éleveurs qui luttent pour la sécurité alimentaire dans le même district.t 93 5- Analyse des décisions des ménages en matière de migration à l’heure actuelle : caractéristiques des ménages et sensibilité à la variabilité pluviométrique et à la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance 93 5.1 Caractéristiques des ménages dans les districts ciblés 98 5.2 La migration : adaptation ou échec de l’adaptation ? Quatre profils de migration Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 11 liée à la pluviométrie 98 La migration comme facteur d’amélioration de la résilience (migration efficace) 99 La migration comme stratégie de survie, mais non de prospérité 99 La migration comme stratégie d’adaptation aggravante et utilisée en dernier recours 100 Impossibilité de migration, difficultés et survie dans les lieux d’origine 102 6-Migration dans le contexte des variabilités pluviométriques et de l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance futures 102 6.1 Modélisation axée sur les agents (MAA) 104 6.2 Le modèle de migration axé sur les agents de « Rainfalls »l 106 6.3 Scénarios d’anticipation et analyse : modélisation dans le cas du district de Same, Tanzanie 107 Résultats pour la Tanzanie : migration de 2014 à 2040 selon les scénarios de précipitation suivants : augmentation de la sécheresse/de l’humidité, très forte augmentation de la sécheresse/de l’humidité 112 7- Conclusions 115 8- Réflexions pour les décideurs et les praticiens : permettre des choix informés à l’échelle mondial, national et local 116 8.1 Décideurs mondiaux 120 8.2 Gouvernements et partenaires d’exécution 124 9- Annexe technique 124 9.1 Modélisation axée sur les agents 130 9.2 Cartographie et références 134 10- Notes 141 A propos _ 12 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Crédit photo : ©2012 Aurélie Ceinos/CARE Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 13 Synthèse L’étude «Where The Rain Falls» (« Rainfalls ») explore les Il est probable que le changement climatique aggrave la rapports entre variabilité pluviométrique, sécurité alimentaire situation dans certaines régions du monde qui connaissent et des moyens de subsistance et mobilité humaine sur des déjà sites de recherche très divers dans huit pays d’Asie, d’Afrique L’augmentation de la variabilité pluviométrique et de ses et d’Amérique latine. Même si le changement climatique a effets (saisons moins prévisibles, précipitations plus erratiques, des répercussions sur presque tous les aspects de la sécurité phénomènes météorologiques inhabituels pour la saison ou alimentaire – de la production et de la disponibilité des vivres disparition des saisons de transition) ont des répercussions à la stabilité de l’approvisionnement, l’accès aux denrées non négligeables sur la sécurité alimentaire, les moyens de et à leur consommation – nos recherches se sont limitées subsistance de millions de personnes et la décision de migrer aux liens entre l’instabilité des régimes pluviométriques des ménages vulnérables. Si les décideurs et acteurs du et de la production alimentaire d’une part et la stabilité de développement veulent garantir une transition vers un avenir l’approvisionnement en nourriture d’autre part . L’initiative plus résilient aux impacts du changement climatique et des « Rainfalls » est essentiellement axée sur l’étude des politiques d’adaptation appropriées, ils doivent mieux saisir circonstances dans lesquelles les habitants des huit sites les corrélations existant entre le changement climatique, choisis comme cas d’étude en Amérique latine, en Afrique et les profils des ménages en terme de sécurité alimentaire en Asie envisagent la migration comme stratégie de gestion et des moyens de subsistance et les décisions relatives à la des risques face à la variabilité pluviométrique et l’insécurité migration. des niveaux élevés d’insécurité alimentaire. alimentaire/des moyens de subsistance. _ 14 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Le présent rapport apporte six nouvelles contributions aux recherches sur le changement climatique et la mobilité humaine : ◆ méthodes de recherche de nouvelle génération, combinant méthodes quantitatives et qualitatives, avec notamment une enquête auprès des ménages, divers outils de recherche participative (Participatory Research Approach ou PRA) et des entretiens auprès d’experts ; ◆ données empiriques fournies par huit études de cas détaillées menées dans trois régions, en s’appuyant sur des travaux empiriques antérieurs sur les changements environnementaux et la mobilité humaine (EACH-FOR, 2009) ; ◆ cartes inédites des impacts du changement climatique, avec répartition des populations et schémas de migration, représentant certains des principaux processus associés à la variabilité pluviométrique et certains des grands systèmes humains-écologiques où de tels changements entraînent une migration ; ◆ cadre analytique pour harmoniser les constatations faites sur huit sites de recherche très divers afin de répondre à la question : « Dans quelles circonstances les ménages utilisent-ils la migration comme stratégie de gestion des risques ? » ; ◆ travail de modélisation axé sur les agents pour répondre à la question « Dans quelles circonstances la variabilité pluviométrique influence-t-elle fortement les futures migrations ? », mis en pratique pour la première fois sur le site de recherche tanzanien ; ◆ réflexions politiques pour les pouvoirs publics, les institutions multilatérales ou de recherche et les organisations non gouvernementales qui travaillent directement avec certaines des populations les plus vulnérables du monde Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 15 Principales constatations : relations actuelles entre la ◆ Au niveau infranational, la diversité des sites de recherche variabilité pluviométrique, la sécurité alimentaire et des du projet se traduit par une série de caractéristiques moyens de subsistance et la migration géographiques, météorologiques et agro-écologiques. Les De par leur diversité, les huit cas d’étude ont fourni l’occasion d’explorer de façon nuancée la question « Dans quelles circonstances les ménages utilisent-ils la migration comme stratégie de gestion des risques ? » Pour répondre à cette question, la recherche a utilisé un cadre d’analyse permettant d’identifier les grands facteurs qui contribuent à la prise de décision des ménages selon plusieurs niveaux : ◆ Au premier niveau, le cadre établit des distinctions entre les huit pays en s’appuyant sur des indicateurs sociaux, économiques et démographiques qui s’imposent au niveau macro. L’analyse de ces contextes nationaux, qui présentent des caractéristiques différentes (lesquelles ont une incidence sur les stratégies de subsistance des ménages, et notamment sur les décisions relatives à la migration) a permis de déduire une typologie. Le classement de ces pays coïncide partiellement avec une typologie régionale des contextes nationaux. Ainsi, trois des quatre cas d’étude asiatiques entrent dans la catégorie des pays dynamiques qui connaissent une pauvreté et une insécurité alimentaire moyennes à élevées, la Thaïlande faisant exception étant donné les succès engrangés ces dernières années en termes de réduction de la pauvreté.. _ 16 plus importantes, outre des précipitations annuelles allant de 560 mm à 1 700 mm, ont trait à : la proximité de villes ou autres grands centres offrant des opportunités d’emploi alternatif appréciables (p. ex. des zones industrielles) ; l’altitude ; la saisonnalité des régimes de précipitations ; le degré de dépendance envers les cultures pluviales par opposition aux cultures irriguées. ◆ Enfin, les principales caractéristiques qui, au niveau individuel ou familial, semblent devoir entrer en ligne de compte dans les prises de décision en matière de migration ont été répertoriées en s’appuyant sur des données primaires recueillies lors d’enquêtes auprès des ménages : taille et composition du ménage ; propriété foncière ; patrimoine ; degré de diversité des moyens de subsistance ; niveaux d’éducation. Ces caractéristiques mettent en lumière les facteurs qui influent sur les décisions actuelles ou futures relatives à la migration et permettent de mieux comprendre quels sont les ménages qui seront sans doute incapables de s’adapter aux changements pluviométriques soit in situ soit par la migration ou au contraire, quels sont les facteurs qui contribuent à la résilience ou à la vulnérabilité de certains types de ménage face à ces perturbations. Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Observations de terrain des frontières nationales ; à prédominance masculine, mais Les recherches de terrain dans les huit pays étudiés ont révélé avec participation accrue des femmes dans un certain nombre que : de pays ; essentiellement le fait de membres individuels au ◆ Pour la grande majorité d es populations rurales des huit lieux de recherche le changement climatique se traduit à travers les variations pluviométriques. Ces perceptions influent sur leurs décisions quant à la gestion des risques. Les modifications les plus communément citées concernent les dates, la qualité, la quantité ou la prévisibilité globale des précipitations, y compris : l’arrivée tardive de la saison des pluies, d’une durée réduite ; une réduction du nombre annuel de journées de pluie ; une fréquence accrue des pluies diluviennes ; une fréquence accrue et une prolongation des périodes sèches pendant la saison des pluies. Dans nombre de sein du ménage (l’Inde, où des familles entières (nucléaire) déménagent, fait exception) ; due à des besoins liés à la subsistance (revenus du ménage) dans la plupart des pays, quoiqu’un nombre croissant de migrants cherchent à présent à améliorer leurs compétences (p. ex. grâce à l’éducation) dans des pays comme la Thaïlande, le Viet Nam et le Pérou ; une combinaison de mouvement du type rural-rural et ruralurbain, les destinations les plus fréquentes étant les zones agricoles plus productives (Ghana, Bangladesh, Tanzanie), les centres urbains à proximité (Pérou, Inde), les zones minières (Ghana) ou industrielles (Thaïlande, Viet Nam). cas, il y a corrélation entre la perception de ces changements ◆ Les ménages ont recours à la migration pour gérer des et une analyse des données météorologiques locales au cours risques climatiques comme la variabilité pluviométrique. La des dernières décennies. migration – saisonnière, temporaire ou permanente – joue ◆ Les ménages vivant essentiellement de l’agriculture sur les sites de recherche rapportent dans leur grande majorité que la variabilité pluviométrique a un effet négatif sur la production et contribue à l’insécurité alimentaire et des moyens de subsistance. Les niveaux d’insécurité alimentaire sur les huit sites varient fortement à cause de facteurs comme : la quantité totale et les fluctuations saisonnières des précipitations ; le degré d’intensification de l’agriculture ; le degré de diversification des moyens de subsistance ; l’accès des ménages pauvres à des mesures de protection sociale et autres services d’appui. un rôle important dans les efforts menés par beaucoup de familles pour affronter la variabilité pluviométrique et l’insécurité alimentaire et des moyens de subsistance. D’après les informations recueillies sur un certain nombre de sites de recherche, elle a augmenté au cours des décennies passées. La pluviosité pèse plus directement sur les décisions relatives à la migration là où la dépendance envers l’agriculture pluviale est forte, où il n’y a souvent qu’une seule récolte par an, et où il existe peu de possibilités de diversification des revenus. En l’absence d’appui au développement de moyens de subsistance résilient face au changement climatique, la pression exercée sur les moyens de subsistance tributaires de ◆ L’observation de la migration, phènomène commun aux huit la pluie influencera sans doute davantage la mobilité à long sites de recherche, permet de dégager les tendances suivantes, terme des ménages vulnérables dans les décennies à venir. la migration est : presque entièrement confinée à l’intérieur Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 17 ◆ La vulnérabilité des ménages face à la variabilité pluviométrique a un impact sur les résultats en matière de sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et les choix et schémas de migration. Les ménages possédant des biens diversifiés et un accès à des options variées en termes d’adaptation, de diversification des revenus ou de gestion des risques (par le biais de réseaux sociaux, de programmes d’appui communautaires ou gouvernementaux et de l’éducation) peuvent recourir à la migration de manière à améliorer leur résilience. Ceux qui ont le moins accès à ce type d’options (peu ou pas d’opportunités en matière de diversification des revenus, pas de terres, peu d’instruction) ont recours à la migration (en général interne) comme stratégie de survie pendant les périodes de disette. Cette décision, qui vient s’ajouter à d’autres mesures d’ajustement, dommageables à long terme,, maintient ces populations en marge d’une existence décente, ou les y accule. _ 18 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Crédit photo : © 2007 Bill Dowell/CARE Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 19 Quatre profils distincts : la migration comme stratégie de zones rurales de la région pendant les périodes de disette à gestion des risques la recherche de nourriture ou d’un emploi qui lui permette de se la procurer. Le dernier groupe semble être composé de « L’analyse préliminaire des données de l’enquête sur les populations piégées » qui luttent pour survivre sur leur lieu ménages a permis de dégager quatre profils distincts de d’origine et n’ont pas facilement recours à la migration pour familles pour qui la migration est une réponse possible à la s’adapter aux impacts négatifs des facteurs de stress liés aux variabilité pluviométrique et à l’insécurité alimentaire et des variations pluviométriques. moyens de subsistance. Le premier groupe (que l’on trouve le plus couramment dans Relation future possible entre la variabilité pluviométrique, les pays qui sont en mesure de procurer des sources de revenus la sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et la alternatives et une certaine sécurité alimentaire à la majorité migration de leur population) se sert de la migration pour améliorer sa résilience, par exemple en investissant dans l’éducation, la Pour mieux comprendre la forte influence que pourrait exercer santé, les emplois résistant aux changements climatiques et à l’avenir l’augmentation de la variabilité pluviométrique sur la la diversification des risques. Pour ces ménages, la migration mobilité humaine, il est important d’inventorier les différents s’insère dans un ensemble de stratégies d’adaptation et ils impacts que des scénarios probables pourraient avoir sur les se déplacent de façon saisonnière ou temporaire, en général flux migratoires. La modélisation axée sur les agents est une pour trouver des emplois non agricoles dans les villes ou à technique informatique de simulation sociale qui permet à l’étranger. l’utilisateur de modéliser le comportement d’organes de Le deuxième groupe – que l’on trouve souvent dans les décision individuels ainsi que leurs interactions mutuelles pays présentant un moindre niveau de sécurité alimentaire et avec l’environnement. L’utilisation d’un processus de et possédant moins de possibilités de diversification des simulation et d’analyses orientées vers l’avenir permet de revenus – se sert de la migration non pas pour prospérer, comprendre les circonstances dans lesquelles la variabilité mais pour survivre. Il se déplace de façon saisonnière dans pluviométrique risque d’influencer fortement la migration son propre pays pour trouver du travail (souvent) agricole vers différents environnements. Les sites qui ont servi de cas dans d’autres zones rurales. Pour le troisième groupe, dont d’étude « Rainfalls » sont utilisés comme exemples d’endroits les conditions de sécurité alimentaire sont encore plus fragiles où les modifications pluviométriques risquent de contribuer à et pour lequel les possibilités d’adaptation sont plus rares un accroissement de l’insécurité alimentaire et de la mobilité ou leur recherche, peu persévérante, la migration est une humaine. affaire de sécurité humaine dans le cadre de ce que l’on peut considérer comme une stratégie d’ajustement dommageable Le modèle de migration axé sur les agents du projet « à long terme. Ce groupe se déplace souvent vers d’autres Rainfalls » (MMAAR) présente deux niveaux d’analyse des _ 20 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 agents, relatifs à la vulnérabilité et au processus décisionnel produisent une légère augmentation de la migration satisfaite intervenant lors de la migration : le ménage et l’individu. Les alors que les deux scénarios de sécheresse montrent un léger caractéristiques de l’un comme de l’autre proviennent des recul. données de l’enquête menée auprès des ménages sur chacun des sites étudiés. Le MMAAR est conçu pour représenter le Comme l’indiquent les études de cas et les résultats de la degré de vulnérabilité des ménages lorsque leurs moyens modélisation, les changements intervenus tant dans la de subsistance et leur sécurité alimentaire subissent des moyenne que dans la variabilité des précipitations locales modifications due à la variabilité pluviométrique, ainsi que influent sur des facteurs tels que le marché du travail régional l’incidence de ces changements sur la migration des membres et les systèmes de production alimentaire. La variabilité de la famille. Les recherches ont mis en lumière différents pluviométrique a aussi une incidence sur la vulnérabilité des impacts que des scénarios probables pourraient avoir sur les ménages, en fonction de caractéristiques comme les revenus, flux migratoires et ont montré qu’à l’avenir, les variations le patrimoine et la taille de la famille. Les résultats des études pluviométriques risquaient d’influencer fortement la mobilité de cas et de la modélisation illustrent les circonstances dans humaine. Le modèle a été tout d’abord appliqué au site de lesquelles interviennent les décisions relatives à la migration. recherche tanzanien avec les résultats suivants : Ils montrent que les ménages tant « satisfaits » que « ◆ La migration des ménages vulnérables est extrêmement vulnérables » ont recours à la migration, mais que celle-ci s’opère de façon très différente. Les premiers voient leur sensible aux changements de pluviométrie. Pendant la résilience renforcée tandis que la vulnérabilité des seconds majeure partie de la période de simulation, le plus grand face aux facteurs de stress, climatiques ou non, n’a de cesse nombre normalisé de migrants modélisés destinés à quitter de s’aggraver. un foyer vulnérable se trouve dans le scénario 4 (sécheresse extrême). Par contraste, le scénario 3 (humidité extrême) présente quant à lui le nombre le plus bas de migrants quittant un foyer vulnérable. Le nombre de migrants modélisés destinés à quitter un foyer vulnérable dans les scénarios 1 (sécheresse) et 2 (humidité) marque une augmentation nette par rapport aux chiffres de référence dans les deux cas, mais pas aussi importante que dans le scénario 4. ◆ Par contraste, la migration « répondant à des aspirations » dans les ménages satisfaits présente moins de susceptibilité aux diverses hypothèses de variabilité concernant les futurs régimes pluviométriques. Les deux scénarios sur l’humidité Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 21 Réflexions pour les décideurs et praticiens L’hésitation des États à prendre des mesures ambitieuses d’atténuation, de financement et d’adaptation face aux Dans le monde entier, les communautés vulnérables subissent changements climatiques, ne fera qu’en exacerber les déjà les impacts associés aux phénomènes météorologiques impacts et les coûts, tant humains que financiers. Au plan extrêmes et aux changements climatiques à évolution mondial, les parties à la Convention-Cadre des Nations Unies lente . Pourtant, selon des estimations récentes, le rythme sur les changements climatiques doivent : actuel des émissions, associé aux promesses de réduction, pourrait conduire à une augmentation des températures s’échelonnant de 3,5 à 6°C . Fondamentalement, la crise climatique exige une réponse beaucoup plus forte de la communauté internationale, des gouvernements nationaux et des collectivités locales, tant dans les pays développés qu’en développement, dans des domaines tels que la ◆ accepter une approche équitable pour réduire les émissions de gaz à effets de serre conformément aux recommandations de la communauté scientifique afin que l’augmentation de la température mondiale moyenne ne dépasse pas 2°C, voire 1,5°C sécurité alimentaire, l’environnement et plus largement le ◆ intensifier leur engagement et convenir de sources développement durable. innovantes pour assurer un financement de l’adaptation suffisant, durable, prévisible, nouveau et supplémentaire qui Les conclusions de l’étude permettent d‘élaborer une série encourage la transparence, les approches participatives et la de recommandations politiques et pratiques qui, prises responsabilisation ; collectivement, pourront aider les populations démunies ◆ faciliter la coordination régionale et mondiale par à faire des choix informés en matière de migration, l’intermédiaire du Comité d’adaptation, afin de permettre d’adaptation et de sécurité alimentaire, choix qui leur l’appui permettront de préserver leur dignité et leur sécurité et d’Adaptation ; d’améliorer leur résistance aux changements climatiques. Les États et les communautés les plus sévèrement touchés ne peuvent assumer seuls l’aide aux populations vulnérables et leur protection. Le principe d’une responsabilité commune mais différenciée (tant pour minimiser la pression sur les populations vulnérables que pour accroître les possibilités aux développements des Plans Nationaux ◆ évaluer les pertes et dommages et y remédier par le biais de la Convention-Cadre des Nations Unies et du mécanisme et programme de travail relatifs aux pertes et dommages de façon à répondre aux besoins des populations les plus vulnérables. d’adaptation) doit donc sous-tendre les négociations portant sur les politiques à adopter et leur mise en place à tous les niveaux. _ 22 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Le changement climatique, la sécurité alimentaire, la ◆ accompagner et favoriser la sécurité alimentaire ainsi que pauvreté, la gestion des ressources naturelles et la mobilité des moyens de subsistance résilients. humaine sont inextricablement liés et on ne peut y remédier séparément. Ceux qui décident des mesures à prendre en matière de sécurité alimentaire et nutritionnelle au plan ◆ renforcer et étendre la réduction des risques de catastrophe et ses liens avec le développement à long terme. ◆ incorporer les questions relatives à l’égalité des sexes. mondial doivent : ◆ appeler davantage à la lutte contre la crise climatique et ◆ impliquer les populations vulnérables et leur accorder la incorporer des considérations relatives au changement climatique et à l’égalité des sexes dans les initiatives Pour les populations déjà démunies et vulnérables, le mondiales de sécurité alimentaire et nutritive. changement climatique est un nouveau défi majeur et ◆ décider d’objectifs qui appuient le droit de tous à un évolutif . Et toute solution à long terme ne pourra se faire développement durable après 2015, à la suite des Objectifs sans elles.. Il est donc nécessaire de garantir leur autonomie du Millénaire pour le développement.. et leur donner accès à de meilleurs outils de décision et de gestion: informations, ressources et moyens de subsistance Les impacts sont locaux, ce qui rend indispensable une action qui tiennent compte du changement actuel des schémas aux niveaux national et local. Les gouvernements des pays pluviométriques. Mais on ne peut laisser les populations et tant développés qu’en développement, les organisations communautés locales relever seules ces défis : l’avènement non gouvernementales, les institutions multilatérales et les de solutions durables nécessitera les efforts concertés et agences des Nations Unies doivent s’efforcer d’encourager déterminés de la communauté internationale pour accroître la la résilience face aux facteurs de stress climatiques. collaboration intersectorielle, entre ministères et transfrontalière. Ils doivent aussi : ◆ accompagner, promouvoir et mettre en œuvre des plans globaux participatifs, tant nationaux que locaux, afin d’anticiper et prévoir les éventuelles questions de sécurité alimentaire et des moyens de subsistance ou de mobilité humaine liées aux facteurs de stress climatiques. ◆ s’attaquer aux défis et opportunités transfrontaliers liés à l’adaptation et à la mobilité humaine. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 23 Crédit photo : © 2012 Lars Johansson _ 24 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 1- Nature et objectif du présent rapport 1.1 Que sait-on de l’influence des changements environnementaux sur la mobilité humaine ? Dès le milieu des années 1980 au moins, les scientifiques autres, dont le mode de vie dépend des ressources naturelles ont changements et des conditions climatiques) n’aient, par l’avenir, que peu environnementaux et la mobilité humaine . C’est alors que ou pas la possibilité de se déplacer loin de leur lieu de vie les premiers débats sur les projections et prévisions quant d’origine . Dans les décennies à venir, ces populations à la au nombre de futurs « migrants environnementaux » ont « mobilité » potentiellement « limitée » risquent de voir le vu le jour . Plus récemment, des travaux tant conceptuels potentiel de leurs territoires d’origine se détériorer en même qu’empiriques ont étudié les relations plus larges existant temps que se réduiront leurs possibilités de migrer vers des entre les facteurs environnementaux et la migration dans zones plus favorables tout en préservant leur sécurité et leur diverses situations . Ces travaux ont permis de dégager dignité. À moyen et long terme, les implications qu’aura des schémas généraux qui ont servi de point de départ le changement climatique sur de nombreuses questions pour des études plus nuancées sur les interactions entre relatives aux mouvements de population sont telles que des facteurs climatiques et socioéconomiques . Depuis, des chercheurs se sont mis en quête de mieux comprendre dans études ont montré que les facteurs environnementaux quelles circonstances les facteurs climatiques influent sur les jouent effectivement un rôle dans la mobilité humaine et décisions humaines : partir ou ne pas partir, où aller, quand, souligné le fait qu’il se peut que certaines des populations et quand revenir ? établi des corrélations entre les les plus exposées aux facteurs de stress environnementaux (en particulier les agriculteurs, éleveurs, pasteurs, pêcheurs et Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 25 1.2 Rapports entre la variabilité pluviométrique, la sécurité En se basant sur les interactions actuelles entre variabilité alimentaire/des moyens de subsistance et la mobilité humaine pluviométrique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et décisions migratoires des ménages, l’étude « L’étude « Rainfalls » tire ses informations de recherches Rainfalls » fait appel à une modélisation axée sur les agents empiriques et participatives menées dans huit pays d’Asie, pour comprendre l’incidence que les modifications futures d’Afrique et d’Amérique latine. Les données primaires des régimes pluviométriques auront sur la migration. Pris originales ont servi à tracer de nouvelles cartes montrant les dans leur ensemble, les études de cas et les résultats de la flux migratoires au sein de régions particulières dans les pays modélisation : (1) démontrent la complexité et la diversité choisis pour l’étude. Des recherches de terrain approfondies de ces relations et la nécessité d’adapter les politiques et ont eu lieu sur des sites au Guatemala, au Pérou, au Ghana, interventions pour tenir compte de facteurs clés aux niveaux en Tanzanie, en Inde, au Bangladesh, en Thaïlande et au nationaux, infranationaux, communautaires, familiaux et Viet Nam. Les huit études de cas « Rainfalls » apportent individuels. (2) étudient en détail l’idée selon laquelle la des éléments probants qui dévoilent une série d’interactions variabilité pluviométrique a une incidence sur les décisions complexes et illustrent les effets réciproques de la variabilité migratoires des ménages dans la mesure où elle a une pluviométrique, de l’insécurité alimentaire et des moyens de influence négative sur leur consommation alimentaire et leurs subsistance, et des choix migratoires (saisonniers, temporaires, revenus, surtout sur les sites où les moyens de subsistance permanents ou aucun) pour des ménages présentant des dépendent largement des cultures pluviales. caractéristiques différentes (richesse, propriété foncière, accès à des options en termes de diversification des revenus, Par conséquent, la question des interactions entre le sexe, âge, éducation etc.). L’étude détaille également dans changement climatique mondial (et local) et la migration quelles mesures ces caractéristiques influent positivement humaine n’est pas de savoir si les facteurs environnementaux ou négativement sur les capacités des ménages à décider de sont les seules causes de la mobilité mais comment de multiples migrer ou non de manière judicieuse. facteurs convergent pour peser sur les choix migratoires. Une compréhension plus nuancée de la façon dont les facteurs climatiques influencent sur ces choix permettra de formuler des politiques d’investissements et d’adaptation pour que, quelles que soient les stratégies adoptées par les ménages (notamment la migration), celles-ci contribuent à améliorer leur résilience aux changements climatiques . _ 26 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 1.3 De l’utilité de comprendre les décisions en matière de (2) permet de mieux comprendre quels types de ménages mobilité dans le contexte des changements climatiques peuvent se retrouver dans l’incapacité de s’adapter aux changements pluviométriques dans certaines régions, que L’étude «Where The Rain Falls» (« Rainfalls ») s’inspire des ce soit in situ ou par le biais de la migration, et quels sont recherches menées jusqu’à présent sur les changements les facteurs qui contribuent à accroître la résilience ou la environnementaux et la migration . Elle isole la variabilité vulnérabilité de certains types de ménages face aux variations pluviométrique et l’insécurité alimentaire en les identifiant pluviométriques. comme des facteurs clés de la migration. Ce faisant, elle Les résultats de l’étude « Rainfalls » présentés ci-dessous permet l’analyse des caractéristiques des ménages et, en permettent de dégager quatre profils de ménages allant relation avec ces deux facteurs, répond à la question de de ceux qui sont en mesure de recourir à la migration pour recherche : « Dans quelles circonstances les ménages ont- améliorer leur résilience à ceux qui, disposant d’une marge ils recours à la migration comme stratégie de gestion des d’adaptation réduite, luttent pour survivre sur leur lieu de risques ? ». L’étude « Rainfalls » apporte des indications sur vie sans pouvoir envisager la migration comme stratégie de la façon dont la mobilité humaine pourrait se développer gestion des risques. dans le contexte du changement climatique, où les régimes pluviométriques devraient évoluer considérablement au cours des prochaines décennies, notamment en termes de dates (saisonnalité), de qualité (phénomènes extrêmes, intensité des précipitations) et de répartition (géographique). Jusqu’à présent, les publications portant sur la migration environnementale se sont peu intéressées aux circonstances entourant les décisions et processus migratoires, tels que la durée du séjour des migrants sur le lieu de destination, les caractéristiques des migrants et des non-migrants, les actions et démarches entreprises par les migrants à leur arrivée, le type d’emploi recherché et les facteurs qui encouragent ou découragent leurs choix en matière de migration. L’étude « Rainfalls » : (1) met en lumière les caractéristiques des ménages migrants et non migrants et les facteurs qui influent sur leur décision à l’heure actuelle (résultats des études de cas) et le feront à l’avenir (résultats de la modélisation) ; Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 27 1.4 Nouvelle approche de réflexion et contribution du présent rapport Une nouvelle approche de réflexion doublée d’une attitude pragmatique sera nécessaire pour répondre aux menaces en termes de sécurité humaine que les changements environnementaux, dont le changement climatique, font peser sur les schémas actuels de mobilité humaine (notamment la migration et le déplacement) et sur la répartition des populations à l’avenir. La mobilité humaine est une réaction non négligeable (et de plus en plus fréquente dans certaines régions) aux bouleversements des régimes climatiques se produisant à travers le monde. Or, les publications relatives au changement climatique ou à la mobilité humaine ne traitent guère des circonstances où la mobilité s’avère une option d’adaptation, ni de ses impacts ni des autres options possibles. Les décideurs ont besoin de meilleures informations, de données empiriques et d’une analyse des problèmes et des solutions potentielles relatives aux mouvements de population dans le contexte du changement climatique. L’étude « Rainfalls » répond à ce besoin et permet de combler les lacunes grâce à: ◆ Des méthodes de recherche nouvelle génération : L’approche méthodologique développée pour le projet « Rainfalls », qui a été publiée pour servir de ressources aux futures recherches, associe plusieurs méthodes (enquête auprès des ménages, divers outils pour la recherche participative, et entretiens auprès d’experts). De plus, les données météorologiques locales recueillies ont pu être comparées aux perceptions locales des changements des régimes pluviométriques. ◆ Nouvelles données empiriques : Des équipes de chercheurs nationaux et internationaux se sont déployées sur huit sites au Guatemala, au Pérou, au Ghana, en Tanzanie, en Inde, au _ 28 Bangladesh, en Thaïlande et au Viet Nam. Elles ont récolté un grand nombre de données quantitatives et qualitatives portant sur les régimes historiques de précipitations, les conditions de sécurité alimentaire des ménages et les schémas de mobilité humaine (n = 1 295 enquêtes auprès des ménages et plus de 2 000 participants aux groupes de discussion et aux entretiens auprès des experts). ◆ Cartes : De nouvelles cartes ont été dessinées pour chacun des sites étudiés afin d’obtenir une représentation visuelle des principales données relatives aux régimes des précipitations, à l’agriculture et à la sécurité alimentaire, ainsi qu’aux schémas migratoires actuels dans les villages étudiés. ◆ Cadre analytique : Afin d’harmoniser les informations recueillies sur les huit sites de recherche, très différents, et de répondre à la question « Dans quelles circonstances les ménages utilisent-ils la migration comme stratégie de gestion des risques ? », un cadre analytique a été proposé pour mettre en évidence huit considérations clés aux niveaux national, des sites et des ménages. ◆ Modélisation axée sur les agents : Grâce aux données recueillies sur le terrain, le projet a commencé à développer le modèle de migration axé sur les agents « Rainfalls » (MMAAR), qui dresse un tableau prévisionnel des décisions migratoires des ménages dans le cadre de différents scénarios relatifs à la variabilité pluviométrique. Le rapport présente les résultats préliminaires obtenus sur le site de recherche tanzanien. ◆ Réflexions politiques : Les auteurs s’inspirent des conclusions des recherches de terrain pour proposer des réflexions sur les politiques à adopter aux niveaux mondial et national, à l’intention des États, des agences multilatérales, des instituts de recherche et des organisations non gouvernementales qui travaillent directement avec de nombreuses populations parmi les plus vulnérables au monde Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 1.5 Portée et limites du présent rapport Les auteurs du rapport n’ont pas tenté de : ◆ Fournir des estimations mondiales sur le nombre d’individus qui pourraient se déplacer ou y être contraints à l’avenir en réaction à la variabilité pluviométrique . ◆ Indiquer les destinations géographiques précises des futurs migrants. ◆ Établir des relations de cause à effet entre la variabilité pluviométrique ou autres phénomènes liés au changement climatique et la mobilité humaine. Ils se sont attachés plutôt à démontrer les relations actuelles entre la variabilité pluviométrique, la sécurité alimentaire et des moyens de subsistance, et les circonstances dans lesquelles la migration devient une stratégie de gestion des risques pour ces facteurs de stress dans différentes régions du monde. Ils espèrent que le rapport s’avérera utile à ceux qui essaient de déterminer les zones de tension actuelles en termes de migration et de sécurité alimentaire dues à la variabilité pluviométrique, et celles susceptibles d’y être confronté à l’avenir. La modélisation axée sur les agents du projet « Rainfalls » permet de présenter des scénarios d’anticipation plausibles qui serviront de point de départ aux décideurs. Ainsi, ceux-ci pourront focaliser les débats sur le rôle de la mobilité humaine dans l’adaptation. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 29 2- Méthodes multidisciplinaires du projet « Where The Rain Falls » Des recherches de terrain ont été menées dans huit pays se complétaient ou se contredisaient. Les méthodologies (Bangladesh, Ghana, Guatemala, Inde, Pérou, Tanzanie, utilisées pour le projet Where The Rain Falls apportent une Thaïlande et Viet Nam) afin de réaliser le premier objectif du nouvelle dimension aux recherches effectuées à ce jour sur projet Where The Rain Falls, à savoir « conceptualiser la relation la thématique de la migration environnementale provoquée entre le changement des régimes météorologiques (saisons par les changements climatiques . Pour autant que les et précipitations en particulier), la sécurité alimentaire, les auteurs le sachent, c’est la première fois que l’on combine inégalités sociales (notamment en termes d’égalité des sexes) ces méthodes dans le cadre d’une recherche de terrain multi- et les différentes formes de mobilité humaine . » La question pays sur ce sujet. associée à cet objectif est : « Dans quelles circonstances les ménages ont-ils recours à la migration comme stratégie de Même si les séances de recherche participative et l’enquête gestion des risques en réponse à une augmentation de la auprès des ménages concernent les mêmes communautés, il variabilité pluviométrique et de l’insécurité alimentaire ? » était important de recueillir des données tant quantitatives que qualitatives et ainsi réaliser une analyse approfondie qui Pour les recherches de terrain, trois méthodologies non seulement permette de répondre à la première question complémentaires ont été utilisées : recherches participatives de recherche mais serve aussi à développer et appliquer le (PRA), enquête auprès des ménages (HH) dans les modèle axé sur les agents (MAA). Les trois méthodes ont communautés étudiées et entretiens avec divers experts été testées avant de commencer le travail sur le terrain dans leurs pays respectifs. Les chercheurs ont également pour garantir leur validité et vérifier leur utilité en termes procédé à des analyses documentaires pour chacun des cas. de contenu et de longueur ainsi que leur applicabilité dans Le choix de ces trois méthodes s’explique par le fait qu’ils divers contextes culturels. On trouvera une présentation de souhaitaient recueillir des observations sur le thème étudié et chacune de ces méthodes ci-dessous . sur sa dynamique auprès de sources variées. Ils souhaitaient ensuite confronter ces observations et vérifier si celles-ci _ 30 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Crédit photo : © 2008 Phil Borges/CARE Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 31 2.1 Entretiens auprès d’experts Les experts interrogés sont essentiellement des représentants gouvernementaux, des dirigeants locaux, des acteurs de la société civile et des scientifiques/universitaires possédant des connaissances ou des informations précises en rapport avec le projet (migration, variabilité pluviométrique, insécurité alimentaire et des moyens de subsistance, plans de développement nationaux ou locaux, adaptation aux changements climatiques, vulnérabilité etc.). Dans la mesure où le temps et le budget impartis le permettaient, les entretiens ont été menés aux niveaux national, régional/ de district et local pour recueillir autant d’informations utiles que possible. Le manuel pour les entretiens semistructurés comprenait des questions relatives à chacun des trois principaux thèmes (changement climatique et variabilité pluviométrique, insécurité alimentaire et des moyens de subsistance, migration). Non seulement ces questions couvraient les observations, interprétations et analyses des experts, mais elles étaient orientées vers l’action, un espace étant réservé pour les recommandations des personnes interrogées. Crédit photo : © 2007 Brendan Bannon/CARE _ 32 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 2.2 Recherches participatives (PRA) Les séances de recherche participative proposaient une large gamme d’outils adaptés au contexte, au type d’information L’objectif des séances de recherche participative était souhaitée et aux groupes invités. En voici une liste non d’impliquer les communautés locales et certains groupes exhaustive : transect (qui fournit une représentation particuliers dans l’évaluation de la situation, présente et transversale des différentes zones agro-écologiques et antérieure, dans leur village, d’entendre de leur propre les compare à certains paramètres intéressants pour nos bouche quel avenir ils se souhaitaient et de recueillir des recherches), classement par richesse (explore les perceptions messages sur lesquels baser l’élaboration des politiques des différences de niveaux de vie et des inégalités au sein locales, nationales ou mondiales. Ce qu’il faut savoir des des communautés), groupe de discussion (réunit divers séances de recherche participative, c’est qu’elles comprennent groupes appartenant à la communauté pour des discussions des questions ouvertes qui permettent tant à l’enquêteur ouvertes), cartes de mobilité (explore les schémas de mobilité qu’aux experts interrogés d’explorer certains sujets en des individus, des groupes et des communautés), calendriers profondeur, sans limiter les réponses au format rigide d’un saisonniers (perceptions qu’ont les habitants des variations questionnaire d’enquête. Des éléments visuels comme des saisonnières sur les sites de recherche), classement des risques tableaux à feuilles mobiles, des cartes ou des craies ont servi d’atteinte aux moyens de subsistance (perceptions qu’ont d’outils pour animer les discussions en groupe. Ces séances les habitants des risques qu’ils encourent et leur classement ont permis de comprendre les dynamiques de groupe et les par ordre d’importance), diagrammes de Venn (illustrent corrélations entre les différentes questions. Cette technique l’importance et la facilité d’accès à des institutions cruciales a été utilisée sur les sites des huit pays. La composition des ou aux individus qui influencent les communautés locales) groupes variait selon les sessions, certains étant homogènes et diagrammes d’impact (révèlent les impacts de certaines (rien que des hommes, des femmes, des personnes âgées, activités, interventions ou événements sur les communautés des individus marginalisés, des jeunes, des cultivateurs ou des et les corrélations entre tous ces facteurs). personnes travaillant hors du secteur agricole etc.) et d’autres mélangés, afin d’obtenir l’éventail le plus large possible de commentaires et de dégager et inclure le vécu de groupes sociaux précis. Cette approche s’est révélée particulièrement importante afin de recueillir le point de vue des femmes, des personnes âgées ou des groupes susceptibles d’être socialement marginalisés etc. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 33 2.3 Enquête auprès des ménages Les foyers ciblés dans chacune des huit études de cas étaient au minimum 150, chaque site de recherche comprenant L’objectif de l’enquête auprès des ménages était d’obtenir un total de 3 ou 4 villages. Les chercheurs ont utilisé une des indicateurs quantifiables et de dégager des tendances technique d’échantillonnage aléatoire simple ou stratifié selon reflétant les différents facteurs qui affectent les ménages en les informations démographiques disponibles dans chaque termes de variabilité pluviométrique, de sécurité alimentaire/ cas . Le répondant ciblé était le chef de famille (homme des moyens de subsistance et de migration. Il s’agissait ou femme). Lorsque celui-ci/celle-ci n’était pas disponible, aussi de rendre possible une analyse statistique pour l’entretien s’est déroulé avec le second représentant du compléter les résultats qualitatifs. Jusqu’à présent, les études ménage, à condition que celui-ci/celle-ci possède la maturité multi-pays menées sur la relation entre les changements nécessaire, et soit capable de traiter des sujets étudiés et de environnementaux et les migrations faisaient appel soit à participer au processus décisionnel familial. des enquêtes soit à des groupes de discussion, mais pas aux deux. Les chercheurs ont dû accepter des compromis pour garder une certaine cohérence dans l’administration et L’enquête auprès des ménages comprenait différentes les résultats du questionnaire, puisque les huit cas d’étude sections, chacune représentant un aspect important de représentaient des contextes culturels très différents. Des l’étude : informations démographiques générales sur les tests préalables leur ont permis de déterminer quelles ménages, activités économiques des ménages, problèmes portions de l’instrument ajuster en fonction du contexte local de subsistance, sécurité alimentaire et consommation, : de petites modifications ont été apportées, le cas échéant, migration, stratégies d’adaptation, régimes des précipitations, dans la formulation de certaines questions et dans les unités patrimoine et ressources familiaux. Les sections n’étaient de mesure afin qu’elles correspondent à celles en usage sur pas thématiquement séparées afin de pouvoir détecter les chaque site. L’on a également tenu compte de certaines variables communes et explorer les corrélations mutuelles ainsi caractéristiques démographiques (appartenance ethnique, que leurs dynamiques au sein des ménages. Contrairement caste, pratiques conjugales etc.) lors de l’adaptation du à la recherche participative, la plupart des questions de questionnaire à chacun des cas d’étude. l’enquête étaient fermées et quantifiables. Chaque section comprenait malgré tout quelques questions ouvertes pour étayer l’analyse des données et servir à la modélisation. Celles-ci ont permis de révéler davantage de détails tout en replaçant les réponses des ménages dans leur contexte. _ 34 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 2.4 Scénarios futurs des précipitations et de la migration tirés de la modélisation axée sur les agents Le premier objectif de l’étude « Rainfalls » était de comprendre les relations actuelles entre variabilité pluviométrique, sécurité alimentaire/des moyens de subsistance et décisions des ménages en matière de migration. Pour ce faire, l’on a eu recours au travail de terrain et aux méthodes décrites ci-dessus. Le deuxième objectif impliquait d’explorer des scénarios potentiels pour répondre à la question : « Quels sont les scénarios où la variabilité pluviométrique et la sécurité alimentaire seront susceptibles d’influencer fortement la mobilité humaine dans certaines régions du monde au cours des 20 ou 30 années à venir ? » Pour cet objectif de recherche orienté vers l’avenir, l’on a eu recours à une modélisation axée sur les agents. Les résultats obtenus en Tanzanie figurent dans le présent rapport. On trouvera également dans l’annexe technique une description plus détaillée de la modélisation. 2.5 Champs de recherche, méthodes et triangulation Dans le cadre conceptuel des huit études de cas (Tableau 1), l’interaction entre les aspects les plus importants pour chaque ménage, à savoir la variabilité pluviométrique, la sécurité alimentaire et la migration (considérée comme un élément particulier des stratégies d’adaptation) constitue le principal centre d’intérêt. C’est là-dessus que se fonde l’approche globale « moyens de subsistance (sécurité) » utilisée ici, laquelle apparaît en gris à l’arrière-plan. L’on a fait abstraction des extensions conceptuelles. Le cadre peut aussi être déterminé par d’autres facteurs, tels que les développements économiques ou politiques, les conflits, etc. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 35 L’illustration 1 offre un aperçu des trois principaux champs de recherche du projet « Rainfalls », des sources d’informations utilisées ainsi que du processus de triangulation effectué grâce aux méthodes décrites ci-dessus. Dans ce cadre, on voit que la sécurité des moyens de subsistance des ménages étudiés est influencée par la variabilité pluviométrique (variable indépendante ayant un effet sur le cheptel et les récoltes). Ces facteurs, ajoutés à celui de la propriété foncière, aident à déterminer la situation du ménage en termes de sécurité alimentaire, laquelle est également structurée par des processus externes. Dans le cadre, la notion de « degré de vulnérabilité » (qui prend en compte le degré de diversification économique, le nombre de membres de la famille en âge de travailler, la situation financière etc.) sert à indiquer l’éventail de stratégies d’adaptation possibles pour les ménages. Les conclusions de l’étude se fondent majoritairement sur des données qualitatives et quantitatives récoltées sur le terrain. L’utilisation de données secondaires est signalée par des encadrés de couleur en marge de ceux des domaines de recherche. Enfin, comme le montre le cadre, les conditions initiales évoluent de façon dynamique étant donné les corrélations et interactions des actions du ménage (boucles de rétroaction). _ 36 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Illustration 1 : Champs de recherche, méthodes et sources de données - Source : Rademacher-Schulz et Rossow, 2012 Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 37 3- Caractéristiques nationales et des sites de recherche Étant donné la diversité des huit cas d’étude, la présente section propose un cadre d’interprétation des résultats du projet qui pourra servir à de futures recherches. Les critères de sélection des pays et des sites sont détaillés ci-dessous. On trouvera ensuite un premier niveau de catégorisation, qui fait la distinction entre les huit pays en fonction d’indicateurs sociaux, économiques et démographiques au niveau macro. Au niveau infranational, les différences entre les divers sites de recherche du projet sont décrites en termes de caractéristiques géographiques, météorologiques et agro-écologiques. 3.1 Critères pour la sélection des pays et des sites Les sites de recherche/cas d’étude des huit pays ont été sélectionnés en fonction d’une série de critères généraux : Couvrir plusieurs régions: l’Asie du Sud et du Sud-Est, l’Afrique subsaharienne et l’Amérique latine permet de garantir un certain équilibre. Ces sites sont représentatifs des principaux écosystèmes et moyens de subsistance, avec des niveaux moyens de pauvreté et d’insécurité alimentaire et des moyens de subsistance sensibles à la variabilité pluviométrique. Ils ont été choisis pour produire une représentation diversifiée de la géographie et du lieu dans un contexte national (proximité avec des centres économiques majeurs ou mineurs). Pour des raisons pratiques, ils ont été sélectionnés sur la base de données fiables sur les précipitations, de leur facilité d’accès géographique, de la présence de CARE sur place et des relations que l’organisation a pu établir au plan local, ce dernier élément permettant de bénéficier de la confiance des communautés locales et ainsi procéder aux recherches en un court laps de temps puis au suivi programmatique ultérieur. 3.2 Contexte national Les huit pays où les recherches ont été effectuées présentent, au niveau macro, un large éventail de conditions dans lesquelles les ménages prennent des décisions, dont celle de la migration, pour assurer leur subsistance. En termes de performance économique globale, de niveaux de développement et de sécurité alimentaire, le Pérou et la Thaïlande arrivent en tête du classement (voir Tableau 1) . À l’opposé, le Bangladesh et la Tanzanie se situent au bas de l’échelle pour ces trois indicateurs. Les pays du groupe _ 38 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Crédit photo : © 2007 Bill Dowell/CARE Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 39 intermédiaire (Inde, Viet Nam, Ghana et Guatemala) ne sont pas homogènes en termes de développement économique et social ou de sécurité alimentaire. On peut noter par exemple des niveaux plus élevés de malnutrition en Inde et au Guatemala. D’autres indicateurs offrent des enseignements sur le contexte national, en perpétuel évolution, dans lequel les ménages ont accès à diverses options en matière de subsistance, ainsi que sur la façon dont ces options influent sur les décisions migratoires dans les familles rurales . Dans les pays où les possibilités de diversifier les sources de revenus en dehors de l’agriculture sont limitées et où le taux de croissance de la population reste élevé, les ménages ruraux peuvent être obligés de choisir la migration comme stratégie de gestion des risques face à l’insécurité alimentaire, en tout cas davantage que ceux qui vivent dans des pays offrant une gamme plus large en matière de diversification des revenus, agricoles ou non. L’analyse montre que le Pérou et la Thaïlande sont des pays caractérisés par une économie dynamique où la pauvreté et l’insécurité alimentaire sont relativement faibles. Le Viet Nam, l’Inde et le Bangladesh appartiennent tous les trois à la catégorie des pays en pleine transition économique et démographique, avec cependant des niveaux de pauvreté et d’insécurité alimentaire qui restent modérés à élevés. La dernière catégorie comprend le Ghana, la Tanzanie et le Guatemala, où les niveaux de pauvreté et d’insécurité alimentaire sont élevés. Leur croissance économique faible, combinée à la croissance de la population et à une forte dépendance envers l’agriculture paraît, à des degrés divers, limiter les possibilités de diversifier les moyens de subsistance des ménages ruraux. Transition économique et démographique à un stade plus avancé Transition Pauvreté et insécurité alimentaire Pauvreté relativement faibles modérées à élevées Pérou Vietnam Thaïlande Inde insécurité alimentaire Bangladesh économique et Ghana démographique à un stade moins Guatemala avancé Tanzanie _ 40 et Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 3.3 Caractéristiques des sites de recherche On constate aussi une grande diversité parmi les sites sélectionnés dans les huit pays où ont été effectuées les recherches pour le projet. L’un des critères importants pour la sélection des sites se rapportait à la variable indépendante de l’étude, à savoir les précipitations. Suivant les sites, leur moyenne annuelle varient entre 560 mm et 1 700 mm (voir Tableau 2). La saisonnalité des régimes pluviométriques et la dépendance envers les cultures pluviales étaient aussi des considérations importantes, même si, comme dans le cas de l’Inde, les communautés avaient largement accès à Tableau 1 : Contexte des huit pays étudiés : pauvreté, sécurité l’irrigation par canaux. D’autres caractéristiques relatives alimentaire, transition économique et démographique au à des variables importantes ont été prises en compte : niveau macro sensibilité des sources locales de revenus aux modifications Le classement de ces pays coïncide, quoique partiellement, avec la typologie régionale des contextes nationaux. Trois des quatre cas d’étude asiatiques s’inscrivent dans la catégorie des pays dynamiques possédant un niveau de pauvreté et d’insécurité alimentaire modérées à élevées, la Thaïlande faisant exception étant donné les succès que remporte sa politique de réduction de la pauvreté depuis quelques dizaines d’années. Le Ghana et la Tanzanie sont tous deux les des régimes pluviométriques, niveaux élevés de pauvreté et d’insécurité alimentaire, migrations documentées au cours de l’histoire, et rapport supposé entre modifications des régimes des précipitations, insécurité alimentaire et mobilité humaine. L’altitude (hautes et basses terres) et la proximité de villes ou autres centres présentant des opportunités d’emploi alternatif non négligeables (p. ex. zones industrielles) ont également joué un rôle dans la sélection. exemples d’une croissance économique réussie en Afrique, mais la pauvreté, l’insécurité alimentaire et la croissance de la population y restent relativement élevées. Les deux études de cas latino-américaines se trouvent aux deux extrémités de l’échelle, le Pérou ayant connu d’énormes avancées ces dernières décennies, tant en termes de croissance économique que de réduction de la pauvreté, alors que le Guatemala fait face à une stagnation économique et continue de présenter des niveaux élevés de malnutrition et d’inégalité. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 41 Site de recherche Précipitations moyennes annuelles approximatives (mm) Geographie Bangladesh, région du nord (district de Kurigram) 1,700 Plaine fluviale Viet Nam, delta du Mékong (province de Dong Thap) 1,500 Plaine du delta Inde centrale (district de Janjgir, Chhattisgarh) 1,229 Plaine irriguée Guatemala, hauts plateaux orientaux (Municipalité de Cabricán) 1,150 Hauts plateaux Ghana du nord (district de Nadowli, Haut Ghana occidental) 1,036 Savane boisée Thaïlande, région du nord (province de Lamphun) 1,017 Région montagneuse et fluviale Pérou, Andes centrales (province de Huancayo) 800 Région montagneuse Tanzanie du nord (district de Same, région du Kilimandjaro) 560 Hauts plateaux et plaine fluviale Table 2: Average annual rainfall in the research sites Au Guatemala, au Pérou et en Thaïlande, les recherches ont été menées sur des hauts plateaux. Si le site du Guatemala est fort éloigné des grands centres urbains, celui du Pérou se distingue par sa proximité avec une ville secondaire importante et en pleine expansion. Les sites à faible altitude se trouvent au Ghana, en Inde, au Bangladesh et au Viet Nam. Quant aux villages étudiés en Tanzanie, ils comprennent tant des plaines que des hautes terres. L’accès à l’irrigation est presque inexistant sur les sites du Guatemala et du Ghana, et de 84 pour cent en Inde, ce qui n’empêche que sur ces trois sites, la plupart des agriculteurs doivent se contenter d’une seule récolte par an. La double récolte annuelle, voire plus, est chose courante au Bangladesh, au Viet Nam et en Thaïlande, qui disposent de ressources hydriques plus abondantes pour l’agriculture, en raison des précipitations plus importantes et de la proximité des rivières. En Tanzanie, bien que le site soit semi-aride, le régime des précipitations est bimodal. Il est donc possible de procéder à deux récoltes par an lorsque les pluies ne font pas défaut. _ 42 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Crédit photo : © 2011 Kees van der Geest Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 43 4. Résultats des études de cas : la migration dans le contexte de la variabilité pluviométrique et de la sécurité alimentaire / des moyens de subsistance On trouvera dans la présente section un résumé des conclusions des rapports des études de cas résultant des recherches de terrain menées dans les huit pays couverts par le projet. Ces études ne sont pas regroupées géographiquement mais en fonction des catégories définies dans le cadre analytique décrit ci-dessus. Chacune des synthèses comprend une carte dont le contenu et l’objectif sont décrits dans les pages qui suivent. Les schémas de migration que l’on abordera ci-dessous en relation avec la variabilité pluviométrique et la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance sont définis de la façon suivante : la migration saisonnière est définie dans la présente étude comme un déplacement de moins de six mois, alors que la migration temporaire se réfère à des déplacements de six mois à deux ans. La migration permanente qualifie les déplacements de plus de deux ans. Légende des cartes du présent rapport Chacune des huit études de cas comprend une carte qui situe le site de recherche en question et fournit des données contextuelles sur l’importance des précipitations et leur variabilité, la pauvreté et l’agriculture. Les cartes décrivent aussi les flux migratoires rapportés par les répondants pendant la recherche de terrain. On trouvera des informations complètes sur tous les éléments reproduits sur les cartes dans l’annexe technique. _ 44 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 45 4.1 Thaïlande : grâce à des sources de revenus diversifiées et un accès aux biens et aux services, la migration est désormais un choix Moyenne des précipitations dans la Province de Lamphun21 En Thaïlande, les recherches ont été menées dans quatre villages de la province de Lamphun (deux de l’ethnie thaï et deux de l’ethnie Karen) : Don-Moon, Sandonhom, MaebonTai et Huai-Ping. Ceux-ci se trouvent dans le sous-district de Ban Puang, dans un environnement rural et montagneux typique du nord de la Thaïlande. Les villages sont perchés sur les pentes de collines boisées, le long de ruisseaux qui situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site de recherche, consultez l’Illustration 3 Terres agricoles (%) Irriguées (%) se jettent dans la rivière Li. (Pour les données relatives à la ans d’un processus plus large de transformation économique et de réponse à des niveaux assez élevés par le passé d’insécurité alimentaire et de pauvreté. Pour les populations rurales, c’est une stratégie courante d’adaptation à la Pluviales (%) ci-dessous.) En Thaïlande, la migration fait partie depuis 50 Variabilité Pluviométrique/ Fréquence des sécheresses saisonnalité de la production agricole, la rareté des terres et la crise économique . Une politique d’investissement destinée à favoriser une agriculture plus productive, diversifier les sources de revenus et promouvoir l’éducation et la sécurité sociale a permis d’améliorer la résistance des ménages de la province de Lamphun à des facteurs de stress comme la variabilité pluviométrique et l’insécurité alimentaire. très élevée élevée modérément élevée modérée faible très faible Illustration 3: Site de recherche en Thaïla _ 46 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 ande Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 47 Crédit photo : © 2011 Phalakorn Paomai _ 48 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 La moyenne annuelle des précipitations dans la province de millions d’individus défavorisés du pays vivent à la campagne. Lamphun est de 1 017,03 mm. Les données météorologiques Le taux national de pauvreté est passé de 57 pour cent en locales montrent que la pluviosité annuelle a légèrement 1962/63 à 8 pour cent en 2009. Dans le nord, il était de augmenté au cours des 30 dernières années. Six des sept 10,5 pour cent en 2010, ce qui est supérieur à la moyenne pics dépassant la moyenne annuelle de 1 200 mm ont eu nationale et bien plus élevé qu’à Bangkok (0,6 pour cent). lieu au cours des deux dernières décennies. Fin 2011, la Même si l’insécurité alimentaire a fortement décru, elle Thaïlande a été frappée par l’une des pires inondations demeure un problème dans certaines des poches rurales des depuis des décennies. De fortes pluies (28 pour cent de plus régions du nord et du nord-est . Dans la zone étudiée, les que la normale entre janvier et octobre) ont provoqué de deux villages thaïs possèdent deux fois plus de revenus et des graves inondations accompagnées d’importants dégâts à niveaux d’instruction nettement supérieurs à ceux des deux Bangkok et dans le centre du pays. Ces crues ont recouvert villages karen. Dans les quatre villages, seuls 2,4 pour cent des 1,6 millions d’hectares, occasionné la perte d’un quart de la ménages ne possèdent pas de terres. Au cours des dernières production de riz, provoqué 730 décès et contraint 9 859 décennies, le pourcentage de la population pratiquant usines employant un total de 666 000 personnes à fermer une agriculture de subsistance dans le nord du pays ayant leurs portes. Selon la Banque mondiale, les dommages et fortement diminué, les revenus des cultures commerciales, pertes économiques ont atteint 45,7 milliards de dollars du tissage, des transferts d’argent, des petites entreprises et US. Les pluies exceptionnelles de 2011 ont dominé les petits commerces et des programmes gouvernementaux de conversations sur les contraintes climatiques parmi les sécurité sociale (p. ex. indemnités en faveur des personnes villageois de la zone de recherche. Les participants à l’étude âgées) sont devenus des éléments importants d’une gamme ont constaté une évolution des schémas climatiques au cours plus diversifiée de moyens de subsistance pour les habitants de la dernière décennie, dont des précipitations accrues et des zones rurales de la province de Lamphun. des températures plus élevées pendant la saison froide. Les villageois disaient être régulièrement exposés au stress lié à la La migration est une pratique courante dans les quatre pluviosité, notamment les phénomènes de périodes sèches, villages (67 pour cent précisent qu’un membre ou plus ont de pluies abondantes et de crues soudaines. Quatre-vingt- connu cette expérience). Même si près de 62 pour cent sept pour cent des ménages interrogés ont déclaré que des des personnes ayant fait l’expérience de la migration sont pluies diluviennes se produisaient plus fréquemment depuis de sexe masculin, les femmes représentent aujourd’hui une 10-20 ans. bonne moitié des migrants internes (non internationaux). Les La pauvreté et l’insécurité alimentaire sont d’abord des phénomènes ruraux en Thaïlande : 88 pour cent des 5,4 Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 49 trois-quarts des migrants internes actuels sont non mariés, et migration nécessaire pour des raisons de survie. Des activités 85,5 pour cent d’entre eux sont des migrants temporaires qui rémunératrices diversifiées, agricoles et non agricoles (moins ont quitté leur village pour une durée de plus de six mois sans sensibles à la variabilité pluviométrique), l’accès à des y revenir. La migration internationale s’était autrefois avéré ressources financières par le biais de fonds communautaires une stratégie de subsistance importante dans trois des quatre et l’aide de l’administration locale contribuent à réduire la villages étudiés. Aujourd’hui, seulement 10,7 pour cent vulnérabilité au stress et à l’insécurité alimentaire liées à la des migrants quittent le pays, la plupart pour Taïwan ou la pluviométrie. En dépit de l’impact négatif du changement Corée du Sud. D’après les résultats des séances de recherche climatique, la majorité des ménages disait pouvoir y faire face participative, les destinations actuelles privilégiées par les et s’adapter sur place. Pour eux, la migration est un moyen migrants sont toutes internes, qu’il s’agisse de Bangkok (qui de profiter d’opportunités supplémentaires et d’améliorer accueille 40 pour cent des migrants), de zones industrielles encore leur subsistance. En Thaïlande, les ménages interrogés (Lamphun, 25 pour cent) ou de centres urbains (Chiang se disaient concernés par les agressions climatiques, mais la Mai, 20 pour cent). Alors que moins d’un quart de ceux qui plupart ont accès à des ressources qui leur permettent de ont fait l’expérience de la migration citaient des raisons non surmonter la variabilité pluviométrique. Pour eux, la migration économiques, la migration interne est aujourd’hui motivée représente une option supplémentaire de gestion des risques par un désir d’éducation dans 38,6 pour cent des cas, environnementaux ou autres, qui contribue à la résilience indiquant que la nature même de l’émigration est en train de familiale (transferts de fonds pour financer l’éducation, afin changer dans ces villages. de permettre la diversification des moyens de subsistance du ménage et réduire sa sensibilité à la variabilité pluviométrique Parmi les ménages interrogés, 51 pour cent considéraient que et l’insécurité alimentaire). les facteurs de stress environnemental liés aux précipitations avaient un impact non négligeable sur leurs moyens de subsistance. En outre, trois quarts des ménages indiquaient une baisse de leurs revenus, suite à des récoltes moins abondantes et à une baisse des revenus agricoles induites par le stress environnemental. En dépit de contraintes climatiques prononcées et manifestes, la diversification des risques a permis aux ménages d’éviter la faim ou les stratégies d’ajustement dommageables à long terme. Une grande majorité d’entre eux, dans les quatre villages, sont à l’abri de l’insécurité alimentaire et pour le moment, la gravité et la fréquence des agressions climatiques ne dépassent pas un seuil qui, de leur point de vue, rendrait la _ 50 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Crédit photo : © 2011 Phalakorn Paomai Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 51 Moyenne des précipitations Pluviales (%) Irriguées (%) Terres agricoles (%) Variabilité Pluviométrique/ Fréquence des sécheresses très élevée élevée modérément élevée modérée faible très faible Illustration 4 : Zone de recherche au Pérou _ 52 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 4.2 Pérou : les options en matière de subsistance et les stratégies de migration dans la province d’Huancayo varient en fonction de l’altitude et de la proximité avec les centres24 Les recherches ont été menées dans trois villages du sous bassin du Rio Shullcas (et de ses environs) qui fait partie du bassin fluvial du Mantaro : Acopalca, Paccha et Chamisería. Ils se situent dans le département de Junín, dans les Andes centrales péruviennes. Les villages, qui font partie de la province de Huancayo, sont perchés à des hauteurs allant de 2 500-3 500 mètres au-dessus du niveau de la mer (zone écologique Quechua) à 4 000-4 800 mètres (zone écologique Puna). (Pour les données relatives à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site de recherche, consultez l’Illustration 4 ci-dessous.) Dans cette zone de recherche, les schémas de mobilité varient considérablement en fonction de l’altitude et de la proximité de la ville de Huancayo. La moyenne des précipitations annuelles dans le sous bassin du Shullcas est actuellement de 800 mm. Les constatations faites pendant les recherches confirment la perception de régimes pluviométriques de plus en plus imprévisibles qui, ajoutés au gel et à des vagues de chaleur intense, ont un impact négatif sur la production agricole. Les principaux changements rapportés dans la zone de recherche comprennent des précipitations plus intenses mais moins fréquentes, davantage de pluies torrentielles à des moments inattendus et des périodes sèches plus longues pendant la saison des pluies. Inondations et sécheresses touchent respectivement 37 pour cent et 42 pour cent des ménages interrogés. La zone de recherche subit aussi les effets du recul du glacier Huayatapallana. Les autres impacts anticipés du changement climatique au Pérou comprennent un nombre accru de journées de gel et une réduction de 10 à 19 pour cent des précipitations . Le département de Junín faisait état d’un niveau de pauvreté de 32,5 pour cent en 2010, dont 13,8 pour cent d’extrême pauvreté. La malnutrition chronique dans les zones montagneuses les plus pauvres du Pérou concerne jusqu’à 50 pour Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 53 cent des habitants. Dans la zone étudiée, plus d’un tiers de la population tire sa subsistance de l’agriculture, et les cultivateurs se plaignent de rendements moindres qu’ils attribuent à un sol « fatigué ». Parmi les ménages qui ont fait l’objet de l’enquête, 43,3 pour cent ne possédaient aucune terre, 39,3 pour cent étaient de petits cultivateurs et 8,8 pour cent étaient de gros exploitants. Dans les endroits les plus isolés, en haute altitude, l’économie dépend largement de l’élevage. À des altitudes plus basses, les ménages dépendent majoritairement de l’agriculture à petite échelle et de divers types d’emplois réguliers ou occasionnels dans la ville voisine de Huancayo. Les régimes fonciers ont un impact non négligeable sur les stratégies de subsistance des ménages, et le morcellement des terres dans les zones agricoles des plaines ne fait que s’aggraver. Les hauts plateaux ne connaissent pas ce problème, car on y a gardé des régimes fonciers communaux, une façon de mutualiser les risques pour gérer les événements climatiques extrêmes. En dépit du rôle important qu’elles jouent, tant sur le plan familial que productif, les femmes et les filles restent largement exclues des processus décisionnels au niveau du ménage et de la communauté (sans parler des niveaux décisionnels supérieurs) et leur accès à l’éducation demeure plus limité que celui des hommes et des garçons. Elles souffrent aussi davantage des impacts des changements environnementaux, car elles sont chargées, entre autres responsabilités, de l’approvisionnement en eau et en bois pour le feu, en plus de leurs activités dans l’élevage et l’agriculture. La migration est une stratégie de diversification des moyens de subsistance et des sources de revenus, de gestion des risques et d’adaptation aux changements climatiques. Les émigrés _ 54 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Crédit photo : © 2007 Nathan Bolster/CARE Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 55 des villages étudiés sont principalement des hommes, jeunes la production alimentaire s’avère conséquent pour 53 pour ou adultes, et pratiquent la migration temporaire plutôt que cent des ménages ayant répondu. Deux tiers des ménages saisonnière. Comme ils sont, dans leur grande majorité, de interrogés voient leurs récoltes endommagées et leur sexe masculin, les femmes se retrouvent avec un supplément rendement diminuer et pour 42 pour cent d’entre eux, les de travail et un lourd fardeau émotionnel lorsque les hommes effets négatifs sur les revenus du ménage sont substantiels. émigrent de façon prolongée. Les ménages qui vivent sous le Même si les variations pluviométriques ont un impact direct seuil de pauvreté, y compris ceux ne possédant aucune terre sur la sécurité alimentaire des ménages, le problème est ou un maximum de 0,5 hectare, ont deux fois plus de chances moins aigu que par le passé dans la zone étudiée, car les d’émigrer à la recherche de revenus non agricoles que ceux habitants ne sont plus aussi tributaires des revenus agricoles qui se trouvent au-dessus de ce seuil. En ce qui concerne les et qu’ils trouvent davantage d’emplois non agricoles dans les facteurs qui influent sur les décisions touchant à la migration, centres urbains. La population de la ville voisine de Huancayo les pressions induites par les précipitations et l’insécurité a augmenté de 50 pour cent depuis les années 1980. Il est alimentaire sont plus souvent citées que les moteurs de la à noter cependant que les revenus non agricoles s’ajoutent migration dite d’aspiration (comme les réseaux sociaux et aux revenus agricoles et qu’ils ne les remplacent pas. Les l’attrait des « lumières de la ville »). À plus basse altitude, il modifications de la pluviométrie influent sur la capacité des est courant qu’un ou plusieurs membres du ménage fassent ménages à se nourrir et à assurer leur subsistance. En dépit des le trajet quotidien vers la ville de Huancayo pour travailler progrès importants affichés par le pays quant à la réduction dans le bâtiment, le secteur marchand ou d’autres secteurs de la pauvreté et l’insécurité alimentaire, la migration reste économiques. Ces ménages pratiquent aussi la migration une importante stratégie de diversification des revenus, saisonnière aux confins du bassin amazonien pour la surtout pour les ménages pauvres et sans terres. Pour éviter cueillette du café. Par contraste, ceux qui vivent à plus haute l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance, la moitié altitude s’engagent dans une migration à plus long terme, des ménages interrogés cherche à améliorer ses revenus en notamment en se rendant aux États-Unis comme bergers pratiquant d’autres activités (facilitées par la migration). pour des contrats de trois ans. Là, la migration constitue une stratégie typique de gestion des risques, car à cette altitude, les sources de revenus sont moins nombreuses (en dehors de l’élevage de troupeaux). Les ménages interrogés se plaignaient d’une pluviométrie de plus en plus imprévisible, qui ajoutée au gel et aux vagues de chaleur, influe négativement sur la production agricole. L’impact des modifications des précipitations sur _ 56 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Crédit photo : © 2008 Phil Borges/CARE Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 57 4.3 Viet Nam, delta du Mékong : les populations pauvres de la commune de Hung Than, sans terres et peu qualifiées, Moyenne des précipitations n’ont guère d’options, en dépit de la croissance économique26 Au Viet Nam, les recherches ont été menées dans la commune de Hung Thanh (district de Thap Muoi, province de Dong Thap), qui se trouve à environ 135 km de la côte, dans la région rizicole du delta du Mékong. (Pour les données relatives à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux l’Illustration 5 ci-dessous.) La zone connaît des crues annuelles, qui atteignent leur pic en octobre. À l’époque où Terres agricoles (%) Irriguées (%) destinations de migration du site de recherche, consultez novembre 2011, les crues avaient atteint leur niveau le plus élevé depuis dix ans dans la commune de Hung Thanh, complètement inondée mise à part une petite bande de terre le long de la principale route surélevée. Les ménages pauvres, qui n’ont que peu ou pas de terres, sont les plus vulnérables Pluviales (%) a eu lieu le travail de terrain pour cette étude, d’octobre à Variabilité Pluviométrique/ Fréquence des sécheresses face aux modifications des conditions climatiques locales. Ce sont eux qui bénéficient le moins de l’agriculture intensive qui se met en place dans la zone étudiée. La mécanisation croissante de l’agriculture, qui profite aux gros exploitants, fait baisser la demande de main d’œuvre pour les travailleurs agricoles sans terres. Ces derniers ont de plus en plus recours à la stratégie de l’émigration pour faire face aux nombreuses menaces qui pèsent sur leur subsistance, dont la modification des régimes de précipitation et de crues, la concentration croissante de la propriété foncière et la réduction du nombre d’emplois suite à la mécanisation. très élevée élevée modérément élevée modérée faible très faible Illustration 5 : Zone de recherche au Viet _ 58 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Nam Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 59 Les recherches ont révélé de nombreuses modifications du régime des précipitations depuis 20-30 ans : le volume total des précipitations annuelles a augmenté, la saison des pluies est plus longue, la pluviosité est moins prévisible et le nombre de phénomènes météorologiques extrêmes, comme les tempêtes et les pluies torrentielles, est en hausse. En dépit du volume plus important des précipitations annuelles, le niveau des crues a baissé au cours des 20-30 dernières années, comme le montrent les données fournies par la station de météorologie et d’hydrologie de Cao Lanh pour la période 1979-2008. Ce paradoxe s’explique par le fait que les niveaux de crue dépendent en grande partie de la pluviométrie et de la rétention d’eau intervenant en dehors de la zone considérée, à savoir en amont du bassin du Mékong. Dans la zone étudiée, les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire restent nettement tributaires de l’agriculture en dépit d’une certaine diversification au cours des dernières décennies, les transferts d’argent, l’aquaculture et les emplois salariés gagnant en importance comme sources de revenus. La grande majorité des répondants à l’enquête auprès des ménages qui possèdent leur propre rizière (62 % du total) a indiqué que les rendements ont baissé du fait des changements intervenus dans les régimes pluviométriques et de crue. Mais cet impact négatif est quelque peu atténué par les modifications d’origine humaine apportées aux cultures, notamment l’utilisation de plus en plus fréquente de semences et d’engrais améliorés, la construction de digues et la mécanisation, qui ont contribué à une amélioration du rendement de la riziculture et à l’intensification des cultures. Les ménages ne possédant que peu ou pas de terres, qui _ 60 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Crédit photo : © 2005 Phil Borges/CARE Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 61 représentent respectivement 26 et 30,7 pour cent des 150 familles interrogées, sont les moins à même de bénéficier de ces avancées, quand ils n’en subissent pas le contrecoup, comme c’est le cas pour la mécanisation. La moitié des ménages sans terres (50 %) et un quart de ceux qui en possèdent peu (25,6 %) ont souffert de pénurie alimentaire pendant les sept jours qui ont précédé l’enquête. Pour y remédier, ils ont dû emprunter des vivres ou de l’argent pour acheter à manger (83,3 %), consommer des aliments moins chers (63,8 %), limiter les portions (50 %) ou réduire la part des adultes en faveur des enfants (36,1 %). Pour 41,3 pour cent des ménages sans terres, les apports alimentaires ont été insuffisants au cours de l’année écoulée et 52,2 pour cent d’entre eux disent avoir fait face à une situation similaire au cours des 5 à 10 dernières années, ce qui représente plus du double de la moyenne de l’ensemble des ménages ayant fait l’objet de l’enquête. La situation d’insécurité alimentaire atteint son apogée lors de la saison des crues (de septembre à novembre), affectant principalement les ménages sans terre employés comme ouvriers agricoles, pour lesquels le travail fait défaut en raison de la montée des eaux. En dépit de l’absence de chiffres officiels sur ce sujet au niveau de la commune de Hung Thanh, l’ensemble des informations recueillies par l’enquête auprès des ménages, les séances de recherche participative et les entretiens auprès d’experts suggèrent une forte augmentation de la migration au cours des dix dernières années. Elle devient de plus en plus fréquente à cause de la pression croissante exercée sur les moyens de subsistance locaux, la demande accrue de main d’œuvre industrielle en dehors de la commune et la levée d’un certain nombre de restrictions politiques sur Crédit photo : © 2011 Kees van der Geest _ 62 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 la mobilité. De plus en plus de femmes et d’hommes de la La majorité des personnes qui ont répondu au questionnaire commune de Hung Than trouvent du travail dans les zones notait les effets néfastes des pluies torrentielles, des industrielles, en particulier à Hô-Chi-Minh-Ville. L’enquête modifications saisonnières des précipitations et de la fréquence auprès des ménages révèle que dans 90 des 150 familles accrue des jours de pluie sur les récoltes et les sources de interrogées (60 %), au moins un des membres actuels a fait revenus non agricoles. À la question de savoir si les variations l’expérience de la migration. Sur les 168 migrants cités dans des régimes pluviométriques avaient un impact négatif l’enquête, 106 sont de sexe masculin (63,1 %). Les migrants sur l’économie du ménage, 89,5 pour cent des personnes du site de recherche avaient en moyenne 22 ans au moment interrogées ont répondu « oui », et 35,9 pour cent d’entre de leur première migration. La migration saisonnière a lieu elles ont répondu « oui, beaucoup ». En règle générale, les surtout pendant la saison des crues, lorsque le travail diminue ménages ont plus souvent tendance à recourir à la migration au sein de la communauté. Près de la moitié des migrants comme stratégie de gestion des risques s’ils éprouvent des choisissent des destinations en dehors du delta du Mékong, difficultés à assurer leur subsistance localement parce que : mais restent dans la partie sud du Viet Nam (essentiellement ils n’ont pas assez de terres ; la demande de main d’œuvre Hô-Chi-Minh-Ville, Binh Duoung et Dong Nai). Les habitants agricole n’est pas assez forte ; ils n’ont ni les compétences de Hung Thanh qui se déplacent au sein de la province sont ni le capital de départ pour se procurer des revenus non surtout des migrants saisonniers qui louent leurs services en agricoles suffisants sur place. tant que travailleurs agricoles ou ouvriers dans des usines Même si la migration leur permet de gérer les risques à court locales pour des périodes de moins de six mois. En plus de terme, l’impact sur leur résilience à long terme peut être l’impact indirect de la variabilité pluviométrique sur la mobilité très négatif. Pour les ménages sans terres et peu qualifiés, humaine, les recherches de terrain ont mis en lumière un la migration permet de parer au manque de revenus si lien direct entre les crues et la migration. Pendant la saison elle réussit, mais elle peut aussi interrompre le processus des pluies, le travail diminue au sein de la communauté et éducatif et d’acquisition de compétences nécessaires pour beaucoup de jeunes en profitent pour pratiquer la migration renforcer leurs capacités à surmonter les chocs et prospérer saisonnière. Ce phénomène illustre le fait que pour ces économiquement. communautés, il existe un facteur récurrent non négligeable qui influe, et continuera d’influer, sur les décisions relatives à la migration. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 63 Moyenne des précipitations Pluviales (%) Irriguées (%) Terres agricoles (%) Variabilité Pluviométrique/ Fréquence des sécheresses très élevée élevée modérément élevée modérée faible très faible Illustration 6 : Zone de recherche en Inde _ 64 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 4.4 Inde : les ménages pauvres de Janjgir-Champa continuent d’utiliser la migration saisonnière pour assurer leur sécurité alimentaire, en dépit de l’irrigation, de l’industrialisation et des mesures de protection sociales et économiques27 Les recherches menées en Inde couvraient quatre villages du district de JanjgirChampa, dans l’État du Chhattisgarh : Jullan Pakaria, Akalteri, Banahil et Silli. Les agriculteurs dépendent presque entièrement d’une unique récolte annuelle de riz qu’ils cultivent pendant la saison de la mousson. (Pour les données relatives à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site de recherche, consultez l’Illustration 6 ci-dessous.) L’insécurité alimentaire reste forte, bien que la majorité des paysans de ces villages (84 %) aient accès à des canaux d’irrigation. Le système d’irrigation permet une récolte par an. Il n’y a pas assez d’eau pour une deuxième (rabi), et les agriculteurs locaux semblent avoir presque totalement abandonné la production de légumes secs et d’autres cultures, ce qui explique le haut niveau de chômage pendant la saison sèche. La migration devient alors une stratégie d’ajustement, notamment pour les petits exploitants ou les ménages sans terres. Le projet s’est focalisé sur les problèmes liés à la pluviosité (sécheresse, moussons tardives ou erratiques, décalage des saisons) auxquels sont confrontés les ménages des quatre villages étudiés. Les recherches ont mis en lumière des changements ayant un impact négatif sur la sécurité alimentaire. Même si la moyenne annuelle des précipitations ne décroît pas de façon perceptible, les experts signalent une baisse non négligeable du nombre annuel de jours de pluie (qui est passé de 65 à 56) et un décalage d’une semaine pour le début de la mousson (du 10 au 17 juin), ce que confirment les données météorologiques locales. Le niveau de la nappe phréatique aurait également baissé. D’après plus d’un tiers des ménages interrogés, la fréquence des sécheresses et des périodes sèches est en augmentation depuis 1020 ans. Près de 60 pour cent d’entre eux disent souffrir du fait que les saisons des pluies ont raccourci. Les habitants des villages étudiés dépendent largement de l’agriculture pour leur Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 65 subsistance. Les experts et les participants aux groupes comme ayant un impact essentiel sur la sécurité alimentaire de discussion s’accordent à dire qu’à Chhattisgarh, et en : les Panchayat villageois (organes d’autogestion élus), les particulier dans la zone étudiée, les principaux problèmes centres Anganwadi (crèches/programmes de nutrition pré- agricoles sont les suivants : moussons/saisons décalées, scolaire), les magasins de distribution de rations (système monoculture du riz/récolte annuelle unique, maladies public de distribution à prix équitable) et le bureau de poste. chroniques des cultures, agriculture intensive à haut niveau S’il existe d’importants programmes nationaux de sécurité d’intrants et non durable, manque de main d’œuvre au sociale, notamment de rations alimentaires pour les familles moment des récoltes et prix défavorables aux producteurs. vivant sous le seuil de pauvreté et un système garantissant Même si les quatre villages ont accès à l’irrigation par canaux, 100 jours d’emploi (MGNREGA), ceux-ci ne sont pas toujours celle-ci reste insuffisante pour beaucoup d’agriculteurs, administrés de manière équitable et transparente, selon les vu le peu d’eau disponible et le manque de gestion des participants aux groupes de discussion, si bien que certaines systèmes. Les habitants dépendant essentiellement de la familles pauvres ne peuvent en tirer profit. monoculture du riz pendant la mousson, il n’est pas étonnant que lorsqu’ils ont dû classer les menaces pesant sur leurs L’émigration est essentiellement saisonnière sur le site de moyens de subsistance au cours des séances de recherche recherche (environ 66 %). L’émigration effectuée de janvier participative, ils aient cité en premier lieu des risques liés à mai, après la principale récolte qui a lieu en novembre et à la pluviométrie, tels que les précipitations (en retard ou décembre, est le schéma le plus courant. La majorité (88 %) erratiques), le décalage des saisons, les crues soudaines et la est constituée de migrants économiques à la recherche de pénurie d’eau potable. La croissance rapide de la population meilleurs moyens de subsistance et de nouvelles sources de a des implications tout aussi importantes sur la sécurité revenus. Ceux qui émigrent pour parfaire leur éducation ne alimentaire des sites étudiés, étant donné le morcellement comptent que pour 2 pour cent du total. Les émigrés des des terres voulu par le système traditionnel d’héritage. C’est villages étudiés cherchent du travail dans les briqueteries (34 sans doute pourquoi on observe que le nombre de ménages %), ou des emplois occasionnels dans le secteur informel (28 qui s’engagent pour des travaux agricoles à la journée est %) et le bâtiment (16 %). Les principales destinations sont nettement plus élevé qu’il y a dix ans, selon les résultats de Raipur (capitale du Chhattisgarh), Korba (mines de charbon l’enquête. D’après les participants aux groupes de discussion, dans la partie nord du Chhattisgarh) et les grandes villes à les habitants cherchent à surmonter l’insécurité alimentaire l’est de l’Inde (Calcutta), à l’ouest (Pune et Ahmedabad) et en demandant de l’aide à leur famille ou à des institutions, en au nord (Allahabad, Chandigarh, Amritsar, Shimla, Jammu, réduisant leur consommation et leurs dépenses alimentaires, Ladakh et Delhi). Ce type de migration saisonnière se fait ou en essayant d’améliorer leurs revenus sans pour autant d’autant plus facilement qu’il existe un réseau informel quitter leur village. En ce qui concerne les mesures de d’intermédiaires et de courtiers. Même si les habitants des protection sociales ou économiques et les institutions, villages étudiés se déplacent le plus souvent en famille (seuls les communautés ont mentionné les organismes suivants 19 pour cent sont célibataires), la majorité des migrants _ 66 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Crédit photo : © 2011 Julie Maldonado Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 67 est de sexe masculin (62 pour cent). La migration familiale a ceci de positif qu’elle permet de préserver l’intégrité des ménages, mais elle perturbe l’éducation des enfants en âge d’être scolarisés et réduit leurs contacts avec l’enseignement scolaire ce qui, à long terme, affecte les revenus et la mobilité sociale des ménages concernés. La migration est l’une des plus importantes stratégies auxquelles les habitants des villages étudiés font appel face aux variations pluviométriques, aux changements climatiques et à l’insécurité alimentaire. Même ceux qui restent et obtiennent un emprunt risquent de devoir migrer pour rembourser leurs dettes. C’est pourquoi la migration est souvent le dernier recours des ménages sans ressources et sans terres, surtout quand ils n’ont pas accès à ou ne peuvent bénéficier d’autres options pour assurer leur subsistance sur place. Pourtant, même si elle leur permet de surmonter des obstacles, la migration n’accroît pas leur résilience pas plus qu’elle ne leur permet de saisir de meilleures opportunités. Dans certains cas, elle a des conséquences négatives sur les relations entre générations, car elle nuit à l’apprentissage des compétences et la poursuite des études qui permettraient aux ménages d’améliorer leur qualité de vie et leur santé et d’acquérir les qualifications nécessaires pour se procurer des revenus stables. Des centrales électriques récemment construites dans la région devraient, en principe, absorber la main d’œuvre agricole qui se cherche d’autres possibilités d’emploi, mais en réalité, d’après les groupes de discussion, elles sont en compétition avec les communautés pour les mêmes ressources (terres, eau, air pur) et à ce jour, elles n’ont guère fourni d’emplois aux habitants des villages étudiés. Au lieu de cela, elles importent une main d’œuvre qualifiée, forçant les villageois à aller chercher leur subsistance ailleurs. _ 68 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Crédit photo : © 2011 Julie Maldonado Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 69 4.5 Bangladesh : la migration est une stratégie d’ajustement clé pour les ménages pauvres de Kurigram, mais les coûts sociaux en sont élevés28 Moyenne des précipitations Des recherches ont été menées dans quatre villages du district de Kurigram, au nordouest du Bangladesh : Khanpara, Khamar Holokhana, Arazi Khodomtola, Doalipara. Le niveau de pauvreté y est très élevé, 75 pour cent des habitants dépendant directement de l’agriculture pour leur subsistance. La région est baignée par les fleuves Brahmapoutre et Dharala, et les revenus agricoles des villageois fluctuent en fonction des sécheresses, des inondations et de l’érosion des berges. (Pour les données relatives à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres recherche, consultez l’Illustration 7 ci-dessous.) Terres agricoles (%) Irriguées (%) agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site de la taille de leur propriété foncière, sont plus « sensibles » aux sécheresses, autrement dit à la variabilité pluviométrique, car ils dépendent, pour leur subsistance, de l’agriculture pluviale agrémentée d’un accès limité à l’irrigation. Quant aux « plus pauvres », qui ne possèdent que peu ou pas de terres, leur vulnérabilité est forte notamment du fait qu’ils disposent de qualifications et d’un patrimoine plus limités Pluviales (%) Les ménages « pauvres » ou de la « classe moyenne », dont le statut social dépend de Variabilité Pluviométrique/ Fréquence des sécheresses pour surmonter les chocs. La migration rurale à la recherche d’emplois agricoles sert de stratégie de protection contre l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance liée entre autres aux facteurs de stress climatiques. La quantité totale de pluies de mousson n’a diminué que de façon minime au Kurigram, cependant la variabilité pluviométrique augmente. Les données sur les précipitations fournies par les stations météorologiques locales révèlent que de 1979 très élevée élevée modérément élevée modérée faible très faible à 2012, la hauteur totale des pluies de mousson (1er juin – 30 septembre) a varié de moins de 1 000 mm à plus de 2 500 mm certaines années. Les pluies de la mousson ont été insuffisantes en 2011 : elles n’ont fourni que 57, 75 et 87 pour cent de la moyenne à long terme pour les mois de juin, juillet et août respectivement. À cela se sont ajoutées 24 journées consécutives sans pluie. La majorité des habitants de la Illustration 7 : Zone de recherche zone étudiée a noté des changements majeurs en matière de régime pluviométrique au Bangladesh _ 70 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 71 Crédit photo : © 2009 Josh Estey/CARE _ 72 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 au cours des 10-30 dernières années. Cette opinion est sans doute colorée par des vécus plus récents, comme les trois semaines sans pluie intervenues au milieu de la mousson 2011 : 96 pour cent des personnes interrogées ont mentionné l’augmentation des périodes sèches et des sécheresses et 84 pour cent, celle de la fréquence des phénomènes climatiques extrêmes. Plus de 90 pour cent des participants à l’étude se souvenaient qu’une année était auparavant constituée de six saisons distinctes, alors qu’il n’y en a plus que quatre à présent. Les groupes de discussion ont dit aussi constater une diminution drastique de la période de pluviosité appelée localement Kaitan Satao (au mois d’octobre). Enfin, le district est très exposé aux inondations, aux sécheresses et aux pluies torrentielles, d’après respectivement 65, 46 et 38 pour cent des répondants. Ces inondations sont généralement dues à de fortes précipitations locales, mais même une mousson normale peut provoquer de graves inondations à Kurigram si elle s’accompagne de pluies diluviennes en amont, dans le nord de l’Inde et l’Himalaya. Dans le district de Kurigram, les sources locales de revenus agricoles sont saisonnières et sensibles aux changements de régime pluviométrique. Les périodes sans pluie intervenues pendant la cruciale saison aman (repiquage du riz), que les participants aux séances de recherche ont décrites comme sans précédent, nuisent gravement à la sécurité alimentaire/ des moyens de subsistance des ménages. Le taux de pauvreté a baissé lors des dernières décennies, mais l’insécurité alimentaire chronique reste un problème majeur à Kurigram, surtout pendant la période de pénurie alimentaire (Monga), qui culmine en septembre et octobre. Même si la production agricole a augmenté dans le district grâce, en grande partie, Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 73 à l’introduction de variétés produisant un meilleur rendement et à une plus grande intensité culturale, les ménages pauvres en bénéficient très peu, étant donné le prix élevé des intrants et la rareté des terres disponibles. La croissance de la population est également un facteur d’insécurité alimentaire pour les ménages locaux. Ainsi, la taille de Khanpara, qui comptait environ 200 habitants il y a 30 ans, a presque triplé : le village dénombre aujourd’hui 590 habitants. Les terres auparavant cultivées par 25 familles doivent à présent faire vivre 118 ménages. À Kurigram, la migration est un phénomène très fréquent depuis les années 1970. Les ménages ruraux pauvres et sans terres y ont recours pour éviter l’insécurité alimentaire saisonnière. Près de la moitié d’entre eux (43 pour cent des familles interrogées) comptent sur les revenus de l’émigration. Dans les villages étudiés, les émigrants ont en moyenne 37 ans (ils sont plus âgés que ceux qui migrent « pour répondre à leurs aspirations ») et n’ont bénéficié que de 3,5 ans de scolarisation. Chaque migrant fait 22 déplacements en moyenne. La migration saisonnière est le schéma le plus courant (environ 80 pour cent des cas), et chaque déplacement dure 5,3 mois en moyenne. Sur le site étudié, 98 pour cent des déplacements migratoires se font à l’intérieur du Bangladesh. Dans leur grande majorité, les migrants des villages de Kurigram se déplacent pour trouver de l’emploi comme ouvriers agricoles dans d’autres zones rurales, car cela ne leur demande pas d’autres qualifications que celles qu’ils possèdent déjà. Les régions agricoles de Munshiganj et Feni sont les deux destinations les plus courantes pour les migrants saisonniers d’après les participants aux groupes de discussion à Khanpara. Selon leurs dires, il y existe en Crédit photo : © 2009 Josh Estey/CARE _ 74 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 effet une forte demande de main d’œuvre agricole, ce qui locale (et donc sur les moyens de subsistance des habitants) en fait une destination (rurale) de choix en particulier au de ces deux variations climatiques sont graves. Si les moment des récoltes, à cause de l’intensité culturale accrue ménages les plus riches peuvent craindre les effets de la et de l’émigration locale qui y sévit. Beaucoup de villageois variabilité pluviométrique en raison des plus grandes surfaces travaillent aussi temporairement dans les villes de Dhaka agricoles dont ils disposent, ils y sont en réalité moins et Rangpur où les salaires sont plus élevés dans le secteur sensibles car ils possèdent davantage de biens et disposent du prêt-à-porter ou dans l’économie informelle. Même si de multiples sources de revenus. Les ménages pauvres, la vaste majorité des migrants des villages étudiés sont de sans terres et peu qualifiés, qui dépendent essentiellement sexe masculin (97 %) et chefs de famille (89 %), ce sont des cultures pluviales tant pour leur subsistance que pour les femmes qui assument presque entièrement le coût social leur sécurité alimentaire, sont plus sensibles à la variabilité de la migration. Demeurant sur place, elles doivent souvent pluviométrique. Ce sont eux qui émigrent le plus souvent, à assumer la culture de la terre familiale et s’engagent parfois cause de l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance comme journalières occasionnelles pour nourrir leur famille en période d’absence ou d’imprévisibilité des pluies. Les et rembourser leurs dettes. En outre, les adolescentes et ménages sans terre extrêmement pauvres sont sensibles à la les jeunes femmes sont victimes de harcèlement sexuel en variabilité pluviométrique, mais ne disposent généralement l’absence des hommes de la famille, devenant ainsi les cibles pas des ressources nécessaires pour émigrer vers des zones de l’opprobre sociale ou contraintes à un mariage précoce où la demande de main d’œuvre agricole est plus élevée. avec des implications sociales et démographiques négatives C’est pourquoi cette population « piégée » souffre d’une à long terme. insécurité alimentaire aiguë tout au long de l’année. Le cas des ménages qui ont le degré d’éducation et les aptitudes À Kurigram, la migration est une stratégie d’adaptation nécessaires pour saisir des opportunités d’emploi, et dont majeure pour surmonter des conditions économiques un membre au moins a émigré, est différent. L’argent défavorables environnementales qu’envoient les migrants travaillant de façon permanente inattendues, notamment les implications locales de la ou des conditions dans les zones urbaines contribue à la sécurité alimentaire de variabilité pluviométrique. 89 pour cent des répondants ont ces familles. En revanche, les ménages qui ne possèdent que noté que le régime climatique et la variabilité pluviométrique peu de terres et de compétences et pratiquent la migration actuels ont un impact sur le budget familial. Pour 39 pour saisonnière agricole parviennent rarement à briser le cycle de cent des ménages interrogés, l’allongement des périodes l’insécurité alimentaire, de l’endettement et de la migration sèches constitue une raison « très importante » d’émigrer temporaire pour trouver du travail. Pour eux, la migration est alors que pour 36 pour cent d’entre eux, les sécheresses plus une stratégie d’ajustement destructive, qui à la longue nuit fréquentes peuvent être un déclencheur « très important » à leur bien-être. de la migration. Les retombées sur la production agricole Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 75 Moyenne des précipitations Pluviales (%) Irriguées (%) Terres agricoles (%) Illustration 8 : Zone de recherche au Ghana _ 76 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 4.6 Ghana : la forte dépendance envers l’agriculture pluviale dans le district de Nadowli explique la persistance de la migration saisonnière comme stratégie d’ajustement29 Les recherches ont été menées dans quatre villages du district de Nadowli : Mantari, Nanville, Takpo, et Zupiri. Ceux-ci se trouvent dans le Haut Ghana occidental, région la plus pauvre du pays. (Pour les données relatives à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site de recherche, consultez l’Illustration 8 cidessous.) Les paysans de ces villages n’ayant pas accès aux systèmes d’irrigation, la production agricole se limite de fait à une récolte par an et est entièrement tributaire de la pluviométrie. Cette forte dépendance à l’égard des précipitations et le manque de moyens de subsistance alternatifs in situ accroissent la vulnérabilité aux changements climatiques des ménages pauvres de ces villages et perpétuent le recours à la migration (saisonnière, temporaire ou permanente ) comme stratégie de subsistance et comme mécanisme pour surmonter l’insécurité alimentaire. Le climat de cette région est marqué par une saison des pluies (de mai à septembre/ octobre) et une saison sèche (le reste de l’année). Au cours des 20-30 dernières années, les changements suivants ont été observés dans le régime pluviométrique des villages étudiés : augmentation des pluies torrentielles entraînant des inondations, saison des pluies décalée (d’avril à mai) ainsi que des périodes sèches associées à des températures élevées. Les résultats de l’enquête auprès des ménages montrent que 92 pour cent des participants ont perçu des changements dans la pluviométrie au cours de cette période : 87,3 pour cent des personnes interrogées estiment que les sécheresses ont été plus nombreuses au cours des 10-30 dernières années et 64,8 pour cent parlent de phénomènes climatiques plus extrêmes. Cette perception qu’ont les villageois d’un climat de plus en plus imprévisible est largement corroborée par les données météorologiques locales et les avis d’experts, qui confirment une hausse des températures moyennes et une plus grande fréquence de phénomènes comprenant tant des périodes sèches plus longues que des pluies plus fortes pendant la période des semis. L’analyse du retard de la saison des pluies n’a quant à lui pas Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 77 Crédit photi : © 2011 Christina Rademacher-Schulz/ UNU-EHS _ 78 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 été établi de façon irréfutable : l’analyse des données météorologiques de la station de Wa ne confirment pas cette tendance mais l’analyse plus large des données des différentes stations météorologiques du nord du Ghana montre que celle-ci a débuté avec un décalage de plus de quinze jours entre 1961 et 2001 . La sécurité alimentaire/des moyens de subsistance de 85 pour cent des habitants de ce district est tributaire de l’élevage ou d’une agriculture de subsistance. Le degré de diversification économique est minime. Les principaux aliments de base sont le mil, le maïs, le sorgho et l’igname. La culture commerciale de l’arachide prend de l’ampleur, car elle permet aux paysans de se procurer des vivres sur les marchés locaux pour nourrir leur famille. Le manque d’appui aux petits exploitants, qui n’ont, par exemple, qu’un accès limité aux intrants agricoles bon marché (engrais, pesticides) compromet la sécurité alimentaire des ménages vivant dans la zone étudiée, tout comme les pertes élevées dues aux ravages des nuisibles après les récoltes. Pendant la saison sèche, la population s’adonne au commerce, à la transformation des aliments et à la migration saisonnière. Pour la majorité des ménages interrogés sur le site de recherche (98 %), les changements dans le régime des précipitations ont un effet néfaste sur les récoltes, ce qui aggrave leur situation économique. Les périodes sèches ou les fortes pluies survenant à des moments cruciaux de la saison agricole peuvent affecter les récoltes et en réduire, voire en détruire entièrement, le rendement, causant ainsi des pénuries alimentaires. Ces effets néfastes sur les cultures provoquent la hausse des prix des aliments. Pour trente-sept pour cent des ménages interrogés, la flambée des prix réduit l’accès à la nourriture pour leur famille. Pendant la période de soudure précédant la récolte suivante (mai à août), 75 pour cent des répondants ne disposaient pas de nourriture en quantité suffisante pour couvrir les besoins du ménage et 69 pour cent ne disposaient pas de l’argent nécessaire à l’achat de vivres. D’après 37 pour cent des répondants, la production animale, pourtant la « soupape de sécurité » qui, en temps de crise, leur permet de vendre une partie de leur cheptel afin de se procurer les revenus nécessaires à l’achat de vivres au marché, a également chuté. Pour surmonter l’insécurité alimentaire, due en grande partie à la variabilité pluviométrique, les répondants ont mentionné les stratégies d’ajustement suivantes, par ordre d’importance (plusieurs réponses autorisées) : vente de biens (29 %), réduction de la consommation de nourriture Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 79 (21 %), diversification des revenus du ménage (14 %), principalement par la migration, et modification des cultures soit en les diversifiant, soit en semant des variétés à maturation précoce ou en répandant plus d’engrais (11 %). Conformément aux normes sociales et culturelles de la zone étudiée, la migration est plus courante chez les hommes que chez les femmes. Il n’empêche que les émigrées se font plus nombreuses depuis les années 1980 et qu’à l’heure actuelle, les femmes comptent pour 31 pour cent des migrants. L’âge moyen des migrants lors de leur premier déplacement est de 23 ans. Ils ont recours à cette stratégie avant tout pour des raisons économiques (83 %). Neuf pour cent seulement le font pour étudier . Les résultats de l’enquête auprès des ménages montrent que 39 pour cent sont des migrants saisonniers, 36 pour cent des migrants permanents, et les derniers 25 pour cent des migrants temporaires. Les résultats des recherches participatives confirment que la migration saisonnière domine. Les débats sur la mobilité et les calendriers saisonniers au sein des groupes de discussion ont révélé que les migrants se déplacent en général pendant la saison sèche et reviennent pour participer aux travaux agricoles dans leurs champs lorsque la saison culturale reprend. En cas de pénurie alimentaire aiguë, des membres de la famille sont parfois obligés d’émigrer à des moments inhabituels, comme pendant la saison des pluies. Les principales activités économiques des migrants sont les travaux agricoles (52 %) et miniers (14 %). Les destinations les plus courantes sont les régions de Brong Ahafo (38 %) et Ashanti (39 %). La région de Brong Ahafo (ceinture médiane du pays), aux terres plus fertiles que dans le nord du Ghana, produit en effet deux récoltes par an. Les zones aurifères du pays attirent de jeunes migrants saisonniers qui espèrent faire fortune en peu de temps. La migration vers ces régions est facilitée à présent à la fois par les réseaux qui se sont développés entre migrants du site de recherche et par des systèmes de transport régulier vers ces destinations. Les membres de la famille migrent essentiellement pour des raisons de sécurité alimentaire/des moyens de subsistance, laquelle est directement Crédit photo : © 2009 Sarah Bones/CARE _ 80 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 liée à des facteurs climatiques et environnementaux, étant donné la dépendance des villageois envers les cultures pluviales. L’enquête auprès des ménages a montré que les principales raisons de la migration sont les suivantes : déclin de la production agricole vivrière pour leur propre consommation ; changements relatifs à la saison des pluies ; chômage ; périodes de sécheresse plus longues, suivies de récoltes imprévisibles ; fréquence accrue des sécheresses. Les dix facteurs les plus importants sont exclusivement de nature agricole (ou relatifs à l’élevage) et ont un lien avec la sécurité alimentaire et la variabilité climatique/ pluviométrique. C’est pourquoi, pour les ménages pauvres du site de recherche, la migration vers d’autres régions du pays est une stratégie courante pour diversifier les revenus et recevoir les transferts d’argent qui permettront l’achat de vivres. La migration permet à ces ménages de remédier à l’absence de revenus, mais elle ne sert pas à améliorer leur bien-être à long terme. Ce type d’ajustement peut avoir des conséquences négatives, par exemple lorsque les chefs de famille (qui ont émigré à la recherche de nourriture ou de revenus pour acheter des vivres) ne sont pas présents pour venir en aide aux autres membres du foyer. En revanche, les ménages plus aisés disposent de sources de revenus plus diversifiées, les membres en âge de travailler y pratiquent davantage la migration saisonnière et sont donc beaucoup moins vulnérables face aux impacts négatifs des changements pluviométriques. Pour eux, la migration saisonnière est plutôt un outil concourant à leur progression sur l’échelle sociale. Les femmes chefs de famille sont plus vulnérables que les hommes : leurs ménages sont davantage menacés par l’insécurité alimentaire, les personnes en âge de travailler y sont moins nombreuses, elles possèdent moins de terres et pratiquent un peu moins la migration que leurs homologues masculins. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 81 Terres agricoles (%) Pluviales (%) Irriguées (%) Moyenne des précipitations Variabilité Pluviométrique/ Fréquence des sécheresses très élevée élevée modérément élevée modérée faible très faible Illustration 9 : Zone de recherche au Guatemala _ 82 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 4.7 Guatemala : le manque de diversification des moyens de subsistance et de possibilités migratoires laisse peu d’options aux habitants de Cabricán33 Les recherches ont été menées dans quatre villages de la municipalité de Cabricán, sur les hauts-plateaux orientaux du Guatemala : El Cerro, Buena Vista, El Durazno, et Quiquibaj. Située à 2 625 mètres au-dessus du niveau de la mer, Cabricán est l’une des municipalités les plus pauvres du pays. (Pour les données relatives à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site de recherche, consultez l’Illustration 9 ci-dessous.) La population appartient à la communauté autochtone Mam et dépend fortement des précipitations pour son unique récolte annuelle. Cabricán est située dans une région froide, avec une saison des pluies et une saison sèche bien démarquées. Le régime pluviométrique normal est bimodal, avec des pics en juin et en septembre. La hauteur annuelle totale des précipitations, qui tombent majoritairement de mai à octobre, a fluctué de quelques 600 mm à plus de 1 400 mm, au cours des 35 dernières années. Les données météorologiques locales des quatre dernières décennies montrent une tendance vers des précipitations totales plus importantes, les périodes de hausse alternant avec des périodes de diminution. El Niño est un déterminant important du calendrier et de la pluviosité au Guatemala. Or, il a augmenté tant en fréquence qu’en intensité au cours des 60 dernières années : trois apparitions (toutes modérées) de 1951 à 1970, cinq (dont deux fortes, et une très forte) de 1971 à 1990 et six (dont une très forte) de 1991 à 2010 . El Niño a un impact négatif sur la pluviométrie, surtout sur la côte Pacifique du Guatemala et en particulier pendant les mois d’août et de septembre . Les personnes qui ont répondu à l’enquête auprès des ménages ont mentionné plusieurs modifications non négligeables du climat local ces dernières décennies : la saison des pluies s’est raccourcie, les pluies sont moins fréquentes mais plus intenses et les périodes sèches sont plus longues. Les participants aux groupes de discussion ont confirmé ces constatations, les personnes âgées déclarant qu’il y a 30 ans, la saison des pluies commençait en mars et se terminait en octobre/novembre. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 83 Au fil du temps, les pluies ne sont plus arrivées qu’en mai/ juin et s’arrêtent normalement en octobre. Soixante-sept pour cent des ménages interrogés ont mentionné une augmentation des pluies diluviennes et soixante-cinq pour cent, une augmentation des phénomènes climatiques extrêmes pendant les 10-20 dernières années. Au cours des 13 dernières années, le Guatemala a été sérieusement touché par une pluviométrie extrême associée à des ouragans et des tempêtes tropicales : Mitch en 1998, Stan en 2005, Agatha en 2010 et la dépression tropicale 12-E en 2011. Ces quatre phénomènes ont produit des précipitations anormalement élevées et les tempêtes ont provoqué des dégâts importants dans les municipalités des hauts-plateaux de l’ouest comme Cabricán. Les recherches menées pour le projet ont confirmé le manque de diversification des systèmes de subsistance locaux : 66 pour cent des ménages citent l’agriculture comme principale activité économique. Les familles paysannes des villages étudiés pratiquent un système d’agriculture de subsistance, le milpa (maïs, associé à différents types de fèves), avec une seule récolte par an. À Cabricán, les propriétés foncières mesurent moins d’une manzana (7 000 mètres carrés) dans 90 pour cent des cas, et plus de 90 pour cent de la population gagnent moins de deux dollars US par jour. La qualité du logement, plus élevée pour les ménages recevant des transferts d’argent, est ce qui les distingue principalement les uns des autres. L’insécurité alimentaire, qui culmine pendant les mois précédant la récolte de novembre, est très répandue : 78 pour cent des personnes interrogées disent avoir souffert de pénurie alimentaire au moins une fois au cours des dix dernières années. Le manque d’accès à des aliments nutritifs _ 84 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Photo credit : © 2008 Brian Atkinson/CARE Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 85 (peu de produits dans les marchés locaux) et de mauvaises habitudes alimentaires (tendance prononcée à consommer trop de maïs) rendent la situation encore plus précaire. Le tissage est en train de devenir la deuxième source de revenus par ordre d’importance, 22 pour cent des ménages le citant comme leur activité principale et 30 pour cent comme leur deuxième activité la plus importante. Ceci dit, les tisserands ne sont payés que pour le volume de travail fourni au propriétaire des métiers à tisser, qui contrôle tant les intrants (fournitures) que la vente des produits finis. Cela ne permet guère d’envisager cette activité comme une stratégie viable de diversification des revenus à long terme. La mobilité humaine est une stratégie courante de gestion des risques sur le site de recherche. Au Guatemala, les historiens la font remonter aux années 1870, lorsque le café est devenu un important produit d’exportation et que la population autochtone des hauts plateaux a commencé à fournir l’essentiel de la main d’œuvre des plantations. Aujourd’hui, les données de l’enquête auprès des ménages montrent que, dans 97 pour cent des cas, l’émigration à Cabricán est entreprise dans le but de réduire la variabilité de la consommation et des revenus familiaux liés aux cultures pluviales. Seuls 25 pour cent des ménages disent avoir fait l’expérience de la migration, ce qui est peut-être une sousestimation due à la crainte d’avouer qu’un membre du ménage vit à l’étranger. Les migrants sont à 77 pour cent de sexe masculin, 80 pour cent d’entre eux sont mariés ou en union consensuelle. Outre le caractère patriarcal de la société guatémaltèque, la langue présente un obstacle supplémentaire pour les femmes de Cabricán, dont beaucoup ne parlent que le dialecte mam. Photo credit : © 2011 Andrea Milan/UNU-EHS _ 86 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Vu l’isolement économique relatif de Cabricán à l’échelle Lorsqu’on a demandé aux personnes interrogées si les nationale, les possibilités de migration (tant saisonnière à changements de pluviométrie avaient un impact sur la l’intérieur du Guatemala qu’à plus long terme aux États- production de vivres, 68 pour cent ont répondu « oui, Unis) se font rares : 70 pour cent des ménages disent aspirer beaucoup » et 29 pour cent « oui, mais seulement un peu à une migration non saisonnière à destination des États-Unis ». Dans les quatre villages, les participants aux groupes de (New York, le New Jersey, la Virginie ou Los Angeles), où les recherche ont exprimé de graves inquiétudes quant à l’avenir villageois ont établi des réseaux au fil des années. Or, cette de leur famille et de leur communauté. Les préoccupations démarche est devenue beaucoup plus difficile depuis dix ans des ménages concernent la viabilité à long terme de leurs pour les raisons suivantes : renforcement des contrôles à la systèmes agricoles et de l’accès aux aliments. Selon eux, frontière américaine ; baisse de la demande de main d’œuvre rares sont les possibilités de diversification des ressources immigrée aux États-Unis ; coût élevé (de 45 000 à 60 000 (comme le tissage, où les revenus baissent aussi, vu l’excès quetzales, soit environ 6 000 dollars US) ; conditions de de main d’œuvre). Les facteurs de stress climatiques, voyage plus dangereuses à travers le Mexique. l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance et les La migration interne vers des centres urbains comme obstacles à la migration ne laissent aux paysans locaux Quetzaltenango ou Ciudad de Guatemala a moins la faveur que peu d’alternatives viables pour diversifier leurs revenus des ménages. Par le passé, la migration saisonnière interne et affranchir leur famille de la pauvreté, que ce soit par était chose courante, tant vers la côte sud que vers l’intérieur l’adaptation sur place ou par la migration. des terres, mais le marché du travail s’y est fortement contracté suite au passage à des cultures requérant une main d’œuvre moins nombreuse (canne à sucre au lieu de coton). De plus, les producteurs des cultures d’exportation engagent désormais la main d’œuvre agricole locale à plein temps. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 87 Moyenne des précipitations Pluviales (%) Irriguées (%) Terres agricoles (%) Variabilité Pluviométrique/ Fréquence des sécheresses très élevée élevée modérément élevée modérée faible très faible Illustration 10 : Site de recherche en Tanzanie _ 88 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 4.8 Tanzanie : la migration est une stratégie d’ajustement tant pour les petits exploitants agricoles que pour les éleveurs qui luttent pour leur sécurité alimentaire dans le même district36 En Tanzanie, les recherches pour le projet ont été menées dans trois villages du district de Same: Bangalala, Ruvu Mferijini et Vudee. Ils sont situés dans la région du Kilimandjaro, zone semi-aride du bassin de la rivière Pangani, dans le nord-est du pays. (Pour les données relatives à la situation, au paysage, aux précipitations moyennes, aux terres agricoles, à la fréquence des sécheresses et aux destinations de migration du site de recherche, consultez l’Illustration 10 ci-dessous.) Étant donné la forte dépendance envers l’agriculture et le peu d’opportunités d’emplois non agricoles dans le district, des précipitations insuffisantes ou malvenues se traduisent souvent par la perte des récoltes, l’insécurité alimentaire et la migration des ménages pauvres qui n’ont que peu ou pas accès à de bonnes terres et à l’irrigation. Au cours des 60 dernières années, la moyenne annuelle totale des précipitations, caractérisées par un régime bimodal avec de « longues » pluies (masika) de mars à mai et de « courtes » pluies (vuli) de septembre à décembre, a été de 560 mm/ an en moyenne. Les recherches effectuées pour le projet mettent en évidence la perception généralisée que le régime des précipitations a énormément changé dans le district de Same au cours des 20 dernières années. Les changements perçus sont les suivants : (1) fréquence accrue de périodes sèches prolongées pendant la saison des pluies ; (2) arrivée plus tardive et arrêt plus précoce des pluies ; (3) fréquence accrue des violentes tempêtes. En plus des changements relatifs aux dates et à la répartition des deux saisons des pluies annuelles, les habitants citent des températures plus élevées et des vents plus violents comme facteurs d’aggravation des pénuries d’eau locales dues au climat. L’analyse des données sur la pluviosité locale au cours des 30 dernières années confirme la perception locale d’une modification négative de la pluviosité, avec notamment : une diminution des pluies pendant la saison longue (masika) et des précipitations annuelles totales ; une réduction du nombre de jours de pluie par an (qui sont passés de 90 à 71) ; un arrêt précoce de la saison des pluies, et donc des saisons végétatives plus courtes. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 89 Les données fournissent aussi des exemples spectaculaires de revenus en dehors des travaux des champs. Quant à du caractère imprévisible des précipitations, comprenant l’agriculture locale, elle dépend largement de la pluviométrie, plusieurs cas présentant des niveaux annuels très bas, soit directement, soit par le biais de systèmes d’irrigation suivis d’années marquées par une pluviosité abondante. locaux (dont des retenues d’eau traditionnelles appelées Ces données confirment les perceptions locales au sujet de ndiva). Les propriétés foncières sur la zone ont une taille la nature changeante et extrêmement imprévisible de la moyenne 1,54 hectares (ce qui est considéré comme une pluviométrie sur le site de recherche, où le calendrier et la surface très modeste) et nourrissent chacune une famille de répartition/l’intensité des précipitations peuvent entraîner la six personnes. Dans les trois villages où les recherches ont été perte des récoltes, même les années où le total annuel est « effectuées, les participants aux groupes de discussion disent normal ». utiliser les stratégies d’ajustement à court terme ci-dessous pour compenser les pénuries alimentaires : (1) changements L’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance est un dans la consommation alimentaire du ménage (diminution du problème très répandu dans le district de Same. Elle est nombre de repas quotidiens, voire jeûne pendant la journée, particulièrement présente pendant les mois de septembre élimination des aliments les plus chers comme le poisson, à janvier. À Bangalala, le village où était basée l’équipe repas plus légers ; (2) changements d’activité économique de recherche, les groupes de discussion ont révélé que (travail occasionnel au sein de la communauté, abattage seulement 5 pour cent des ménages sont considérés comme des arbres, ramassage du bois, fabrication de charbon de « aisés » et capables de servir trois repas par jour à tous les bois, réduction des zones cultivées) ; (3) vente de biens (en membres de la famille. Le groupe intermédiaire quant à général du cheptel, presque jamais de terres) (4) chercher lui (65 pour cent des ménages) ne peut pas se permettre de l’aide chez d’autres (assistance publique, aide des ONG, plus de deux repas quotidiens, et les 30 pour cent les plus emprunts auprès d’amis ou de la famille). pauvres arrivent à peine à un repas nutritif par jour. Même si les trois villages reflètent la grande diversité des conditions Vu l’absence dramatique d’emplois alternatifs non agricoles, agro-climatiques dans les zones montagneuses et les plaines la migration est une stratégie très importante de gestion des du bassin de la rivière Pangani, leurs habitants ont ceci de risques pour les ménages de ces villages, où le nombre de commun qu’ils dépendent largement de l’agriculture et de migrants économiques dépassent celui des individus ayant l’élevage pour leur subsistance. D’après les données fournies émigré pour parfaire leur éducation (à raison de deux contre par l’enquête auprès des ménages et les séances de recherche un). Bien que la majorité des émigrés soit jeune et de sexe participative, les trois principales activités économiques masculin, les femmes représentent un tiers du total à présent. (agriculture, élevage et travail occasionnel) sont toutes Même si une légère majorité des premiers déplacements fortement tributaires des ressources naturelles de la région, (53,4 pour cent) est saisonnière (moins de six mois) avec et il n’y a pour ainsi dire aucune diversification des sources retour assuré, les schémas diffèrent d’un village à l’autre. _ 90 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Il n’y a qu’à Ruvu Mferijini, qui comprend une importante ont répondu à l’enquête auprès des ménages disent que la population masaï, que les migrants saisonniers sont nettement variabilité pluviométrique a un effet négatif « important » majoritaires (66,3 %). Dans les villages étudiés, la migration sur la production alimentaire. Les résultats de cette enquête est essentiellement interne. Très peu d’habitants traversent mettent en lumière la forte relation entre des régimes les frontières (pour se rendre au Kenya) et ce sont en majorité climatiques changeants et imprévisibles et la décision des pasteurs masaï. La plupart semblent se rendre dans d’émigrer. Les trois principaux facteurs affectant les décisions d’autres zones rurales où les conditions météorologiques des ménages en matière de migration sont les suivants : (1) sont plus favorables et où ils peuvent pratiquer des activités fréquence accrue des sécheresses ; (2) périodes de sécheresse qui leur sont familières, comme l’agriculture ou l’élevage, plus longues ; (3) pénurie d’eau. Les participants aux groupes ou travailler comme journaliers. Les séances de recherche de discussion se disaient préoccupés par la dégradation de participative ont révélé que beaucoup se rendent dans la l’environnement local, qu’ils attribuent aux sécheresses région du Kilimandjaro et les zones voisines du nord-est de récentes, au manque de respect des lois contre l’abattage la Tanzanie. Les résultats de l’enquête auprès des ménages des arbres et autres pratiques destructrices dans les bassins montrent cependant que la destination la plus courante est hydrographiques cruciaux et à la croissance de la population. la capitale Dar es-Salaam (32 pour cent des migrants), où Les groupes de discussions avec les jeunes, lesquels jouissent, ils cherchent du travail sur les marchés/dans le commerce dans l’ensemble, d’une plus grande liberté de mouvement, de détail, dans le bâtiment ou d’autres services. L’émigration montrent que ces derniers n’envisagent guère l’agriculture dans le district de Same suit donc deux schémas distincts: pour leur avenir et sont plus enclins à chercher fortune dans rural-rural et rural-urbain. les zones urbaines, en dépit des difficultés qu’y rencontrent les migrants n’ayant que peu d’éducation et de ressources Vu les conditions qui règnent dans le district de Same, les financières. modifications de la pluviométrie se traduisent par des impacts directs sur la sécurité alimentaire. La sécheresse apparaît comme la plus grande menace qui pèse sur la subsistance des ménages. Plus de 80 pour cent de ceux qui Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 91 Crédit photo : © 2007 Brendan Bannon/CARE _ 92 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 5- Analyse des décisions des ménages en matière de migration à l’heure actuelle : caractéristiques des ménages et sensibilité à la variabilité pluviométrique et à la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance Dans la présente section, nous donnons un aperçu des les ménages interrogés est de 67,3 pour cent. Le pourcentage principales caractéristiques au niveau des individus et des médian de ménages ayant connu des périodes de pénurie ménages. Nous nous appuyons pour cela sur les données alimentaire au cours de l’année écoulée est quant à lui de primaires réunies lors des enquêtes auprès des ménages. À 52,7% Les ménages de Tanzanie, du Bangladesh et du Pérou partir de là, nous analysons les conclusions des huit études ont été les plus réactifs face à l’insécurité alimentaire au de cas afin de montrer les relations actuelles entre les moyens cours de l’année écoulée, mais comme le montre l’analyse de subsistance tributaires de la pluviométrie et la sécurité ci-dessous, l’aptitude à gérer cette insécurité par le biais alimentaire, ainsi que les circonstances dans lesquelles les d’options comme la migration varie de manière considérable ménages ont aujourd’hui recours à la migration pour gérer parmi ces trois pays. les risques d’impact sur la consommation et les revenus familiaux. Nous avons ainsi obtenu quatre profils distincts. Le tableau 3 constitue une synthèse de l’enquête auprès des ménages menée dans chacun des huit pays. La dernière 5.1 Caractéristiques des ménages dans les districts ciblés colonne fait entres autre apparaitre le nombre total de Chaque propres ». L’étude a permis d’interroger, pour chaque site, de 136 caractéristiques, mais les valeurs médianes fournissent un à 206 ménages représentant au moins 10 pour cent de la aperçu des caractéristiques des populations vivant dans les population locale (du district) dans six des huit cas. En tout, zones d’investigation. Le ménage médian a 5,6 personnes à les chercheurs de « Rainfalls » ont interrogé 1 310 ménages charge. Le chef de famille et ceux qui sont à sa charge ont auxquels viennent s’ajouter plus de 2 000 participants respectivement 4,7 et 5,9 années de scolarisation. La taille individuels dans les groupes de discussion ou les entretiens moyenne des ménages qui ont participé à l’enquête est la auprès d’experts. Sur la totalité des ménages interrogés, la plus importante au Ghana, au Guatemala et en Inde. En se valeur médiane de ceux dirigés par des femmes est de 13,3 basant sur la norme internationale qui est de 1,25 à 2 dollars pour cent. site de recherche possède ses ménages interrogés sur les sites de recherche « Rainfalls US par jour suivant les pays, le taux de pauvreté médian pour Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 93 _ 94 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Cabricán Guatemala Same Tanzania Nadowli Ghana Kurigram Bangladesh Dong Thap Vietnam Chhattisgarh India Huancayo Peru Lamphun Thailand Tableau 3 : Ménages interrogés sur les sites de recherche des huit cas d’étude Juin 2013 L’accès à des terres de qualité suffisante pour satisfaire à la consommation alimentaire des ménages et leur procurer les *Définition du rapport de dépendance : rapport entre les membres du ménage ne faisant généralement pas partie de la population active (personnes à charge : 0-14 ans et > 64 ans) et ceux qui en font généralement partie (membres productifs : 15-64 ans). On s’en sert pour mesurer la charge pesant sur les membres productifs du ménage. revenus dont ils ont besoin constitue une problématique ** Ayant peur de terres : la définition varie par pays : Thaïlande < = 10 Rai ou 1,6 ha ; Pérou 0,1 - 5 ha ; Inde < = 1 acre ; Viet Nam 0,1 - 1 ha ; Ghana 0,1 - 1 ha ; Bangladesh 0,1 - 0,7 ha ; Tanzanie 0,01 à 1,75 acres ; Guatemala < 0,44 ha. site en lien avec leurs décisions en matière de mobilité (voir plus *** Exploitation moyenne : la définition varie par pays : Thaïlande 10,01 à 20 Rai ; Inde 1,01 - 2 acres ; Ghana < 5 ha ; Tanzanie 1,76 à 4 acres ; Guatemala > 0.44 et < 1 ha **** Exploitation plus grande que la moyenne : la définition varie par pays : Inde > = 2 acres ; Ghana > 5,01 ha ; Tanzanie > = 4,01 acres ; Guatemala > 1 ha importante dans les zones de recherche. L’absence ou l’insuffisance de terres se constatent dans les valeurs médianes de 15,5 et 37,7 pour cent respectivement des ménages interrogés, lesquels présentent des caractéristiques distinctes sur chaque bas). La propriété foncière moyenne pour les ménages, tous sites confondus, est de 1,5 ha de terres productives (à l’exclusion des pâturages pour le bétail). L’absence ou l’insuffisance de terres parmi les ménages échantillonnés étaient importantes sur un certain nombre de sites de recherche : Bangladesh (84 % des ménages échantillonnés), Pérou (82,6 %), Guatemala (67,9 %), Inde (60,5 %), et Viet Nam (57 %). Le manque de terres était plus modéré en Thaïlande (47 %), en Tanzanie (31,5 %), et au Ghana (9,8 %), où, par contre, la qualité du sol est un facteur important. Dans ce dernier pays, d’ailleurs, la rareté des terres n’est pas un facteur déterminant, dans la mesure où les droits fonciers sont détenus par la communauté et les agriculteurs ont facilement accès aux terres d’autres membres de la communauté. Le rapport de dépendance moyen des ménages est le plus élevé sur le site de recherche tanzanien (1,29), suivi par le Guatemala (1,10). Cela veut dire qu’en Tanzanie, il y a, en moyenne, 1,29 membre inactif (à charge) pour tout membre actif d’un ménage. À l’opposé, les deux extrêmes sont le Viet Nam (0,49) et la Thaïlande (0,46). Ainsi, sur le site de recherche thaïlandais, il y a, en moyenne, 0,46 membre inactif (à charge) pour tout membre actif d’un ménage. Le tableau 4 synthétise l’expérience migratoire des ménages échantillonnés dans chacune des études de cas37. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 95 _ 96 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Cabricán Guatemala Same Tanzania Nadowli Ghana Kurigram Bangladesh Dong Thap Vietnam Chhattisgarh India Huancayo Peru Lamphun Thailand Table 4 : Migration experience in the households sampled Juin 2013 *La migration saisonnière est définie comme une migration annuelle récurrente pour des périodes de moins de six mois par an. ** La migration temporaire est définie comme un départ du foyer d’origine pour six mois par an au moins pour une destination au sein du pays ou à l’étranger à des fins de travail, d’étude ou de réunification familiale, à une distance telle que la personne concernée est obligée de s’y installer et d’y passer ses nuits. *** « Migration actuelle » signifie qu’une personne est absente en ce moment pour des raisons de migration. **** La migration de retour est définie comme le retour d’un membre du ménage qui a émigré à une époque antérieure et n’a pas migré à nouveau depuis plus d’un an. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 97 5.2 La migration : adaptation ou échec de l’adaptation ? les profils voisins. Ils ne sont donc pas exclusifs et servent Quatre profils de migration liée à la pluviométrie simplement de points de départ pour des recherches plus approfondies où l’on affinera les variables explicatives clés. Les huit études de cas « Rainfalls » permettent de mieux comprendre comment les ménages ont recours à la La migration comme facteur d’amélioration de la résilience migration pour gérer les risques ou survivre face à des (migration efficace) régimes pluviométriques changeants qui minent la sécurité Pour ces ménages, la migration se présente, dans tous les alimentaire/des moyens de subsistance. L’étude « Rainfalls cas d’étude, comme une stratégie utilisée, parmi beaucoup » a mis en lumière le fait que les ménages « satisfaits », qui d’autres, pour gérer les risques ou assurer leur subsistance. Ils disposent d’actifs variés et de diverses options en matière répondent au profil suivant : bas revenu ou pauvreté, mais d’adaptation, de diversification des revenus ou de gestion avec un accès suffisant à divers moyens de subsistance et avec des risques (à travers des réseaux sociaux, des programmes des atouts (sociaux, politiques, financiers) qui les rendent communautaires ou gouvernementaux ou par l’éducation) moins sensibles aux facteurs de stress climatiques. Dans ces ont recours à la migration pour renforcer leur résilience. foyers, les enfants bénéficient en général d’une scolarité de Pour les ménages « vulnérables », dont l’accès à de telles 3 à 5 ans plus longue que celle de leurs parents, les migrants options est minime (peu ou pas d’opportunités de diversifier ont 20 ans environ, sont célibataires, aspirent à de meilleures leurs sources de revenus, pas de terres, peu d’instruction), la opportunités de vie et sont en mesure d’envoyer de l’argent à migration est une stratégie de survie dans un contexte global leur famille. Pour eux, la migration est avant tout une option de stratégies d’ajustement dommageables à long terme accessible qui leur permet d’améliorer la sécurité alimentaire qui les laissent voire les piègent en marge d’une existence et la résilience de toute la famille, y compris ceux qui sont décente. restés au pays. Deuxièmement, c’est un choix actif, positif, leur permettant de saisir une opportunité qui profitera à L’étude « Rainfalls » synthétisée dans le présent rapport tous. Les transferts d’argent des migrants permettent ainsi destiné aux décideurs dresse quatre profils différents pour à ces ménages d’investir dans l’éducation, dans la santé et les ménages qui ont recours à la migration comme réponse dans des biens qui améliorent leur aisance et diminuent leur à la variabilité pluviométrique et aux facteurs de stress liés exposition aux facteurs de stress climatiques. à la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance. Ces profils, décrits ci-dessous, sont présents sur les huit sites de Pour les deux groupes suivants, l’effet des migrations sur les recherche parmi les ménages luttant contre les facteurs de ménages confrontés à ces facteurs dépend du degré de « stress climatiques, mais dans certains pays, on constate la réussite » des membres émigrés, qui doivent se procurer de présence de blocs, constitués de ménages caractérisés par des la nourriture ou obtenir les ressources nécessaires pour en schémas dominants. Ces profils englobent un large éventail obtenir. de cas, dont certains ont d’ailleurs des points communs avec _ 98 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 La migration comme stratégie de survie, mais non de plus durables, sont disponibles ou accessibles sur place. Elle prospérité est souvent saisonnière ou temporaire, permettant de se Pour ce groupe, la migration permet d’éviter les pires procurer immédiatement de la nourriture ou des ressources conséquences de la variabilité pluviométrique et de donnant accès aux vivres. C’est donc une mesure à court l’insécurité alimentaire, mais étant donné que la diversification terme, qui offre une solution temporaire à la variabilité des revenus est quasi inexistante et que les possibilités pluviométrique et à ses effets (mauvaises récoltes, baisse des d’adaptation sur place sont rares, les seules options dont ils revenus ménagers), mais elle n’a pas un effet radical et ne disposent permettent à peine aux individus « de s’en sortir permet pas aux ménages d’échapper au cycle de la pauvreté. ». Ces familles ne possèdent en général que peu de terres, et même si elles ont accès à des stratégies de diversification La migration comme stratégie d’ajustement utilisée en des revenus, les options qui s’offrent à elles sont insuffisantes dernier recours pour assurer la sécurité alimentaire du ménage. Les migrants Le profil suivant comprend les ménages pour qui la migration sont en général des chefs de famille, d’environ 45 ans. Les est une stratégie d’adaptation dommageable à long terme enfants ont le même niveau d’éducation (à quatre mois près (c’est-à-dire qu’elle aggrave leur vulnérabilité ou les en moyenne) et les mêmes compétences que leurs parents. empêche d’échapper à la pauvreté). Ils s’apparentent à ceux Les familles n’ont guère accès à des organismes sociaux et du groupe précédent : pauvres, peu ou pas de terres, peu elles ont moins accès que le groupe précédent à d’autres ou pas d’options en matière de diversification des revenus formes de diversification des revenus ou à des mesures en dehors de l’agriculture et de l’élevage. Les enfants ont permettant de surmonter les facteurs de stress climatiques le même niveau d’éducation que leurs parents (bas). Les qui menacent leur sécurité alimentaire et leurs moyens de migrants issus de ces ménages rivalisent entre eux afin de subsistance. trouver des emplois non qualifiés dans le secteur agricole (et parfois dans des zones urbaines). Leur profil, d’après l’étude Bien qu’elle reste un tant soit peu accessible, car ils ont les « Rainfalls », est le suivant : chef de famille, la quarantaine, moyens d’y recourir, la migration est un choix plus risqué marié avec personnes à charge. Eux aussi ne font « que pour ces ménages que pour leurs homologues « satisfaits ». s’en sortir » et ils n’ont pas accès à ou sont incapables de Les membres de ce groupe peuvent facilement passer de « saisir des opportunités d’adaptation ou de diversification satisfaits » à « vulnérables » si la stratégie échoue ou si les des revenus in situ. Les mesures les plus courantes pour facteurs de stress liés à la pluviométrie s’accentuent jusqu’à surmonter les facteurs de stress liés à la pluviosité influant devenir insurmontables. La migration perpétue alors le cycle sur les moyens de subsistance et la disponibilité des aliments de l’endettement (elle représente un investissement) et de sont les suivantes : réduire la consommation alimentaire et la faim chronique (si la migration s’avère être un échec). Elle la qualité des aliments, vendre des biens, ou demander de ne constitue sans doute pas le meilleur des choix si d’autres, l’aide à d’autres villageois. D’après les groupes de discussion, Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 99 comme ces ménages ne jouissent déjà que d’une mobilité Impossibilité de migration, difficultés et survie dans les limitée, des villages entiers risquent de se trouver confrontés lieux d’origine à des problèmes semblables et ne seront plus en mesure de Le dernier profil comprend les ménages décrit comme des s’entraider si le besoin s’en fait sentir (covariance des risques). « populations piégées » : ils ne disposent d’aucun atout susceptible d’appuyer le processus de migration, voire même Pour ces ménages, la migration peut être saisonnière (moins de les aider à surmonter l’insécurité alimentaire, ni aucun de six mois), temporaire (plus de six mois) ou permanente, choix en matière de migration. Ils ne possèdent souvent avec pour destination les zones les plus proches offrant les que peu ou pas de terres et vivent dans des régions où le meilleures opportunités en matière de subsistance. Lorsque, dénuement est extrême. Les caractéristiques de ces ménages pendant les périodes de pénurie alimentaire, ces migrants (ou des individus qui les composent) sont les suivantes : quittent leur village à la recherche de nourriture ou de ménages dirigés par une femme, qui assume de multiples ressources pour s’en procurer, ceux qu’ils laissent derrière charges car elle doit s’occuper des terres agricoles, mais eux voient leur vulnérabilité s’accroître face à une série de aussi des jeunes enfants et des personnes âgées ; ménages facteurs de stress aussi bien environnementaux que sociaux. où, souvent, le principal soutien de la famille a déjà quitté La migration est un pis-aller pour éviter les pires conséquences le foyer à la recherche d’autres moyens de subsistance ; de l’insécurité alimentaire, mais elle oblige également les ménages où il y a peu de travailleurs valides par rapport aux ménages à prendre des mesures qui les appauvrissent encore personnes à charge comme les enfants, les personnes âgées plus , comme le recours au crédit pour payer les dépenses ou handicapées. qu’elle entraîne. En outre, le déclenchement répété de chocs et de facteurs de stress environnementaux (de même que Ces familles sont confrontées à des déficits aigus en matière l’émigration répétée) érode les moyens de subsistance de de production et de consommation alimentaires en cas ces populations, leur sécurité alimentaire et leur patrimoine de variations pluviométriques, et déclarent disposer de au point de rendre la migration impossible. On retrouve ressources alimentaires insuffisantes à plusieurs reprises ce schéma pour un petit nombre de foyers sur tous les dans l’année. Elles n’ont que peu ou pas d’options en sites étudiés, mais il est plus présent dans les pays qui ont matière de diversification et n’en ont que très peu en à surmonter des obstacles plus importants en matière de matière de migration. Pour les ménages ou les populations pauvreté, d’insécurité alimentaire et de diversification des piégés, le déclenchement répété de chocs et de facteurs de moyens de subsistance dans les secteurs vulnérables au stress environnementaux ne fait qu’éroder davantage leur climat. patrimoine et accroître leur insécurité alimentaire/des moyens de subsistance. Au Guatemala, des communautés reculées, dépourvues des conditions permettant d’assurer leur sécurité alimentaire, se trouvent dans une situation où les possibilités _ 100 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 sont limitées : grande vulnérabilité face aux précipitations, peu de possibilités de diversifier localement les risques ou les moyens de subsistance, solutions migratoires trop onéreuses (vers une grande ville ou un autre pays), trop risquées, où à destination de lieux porteurs des mêmes difficultés. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 101 6- Migration dans le contexte des variabilités pluviométriques et de l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance futures Pour saisir à quel point la pluviométrie pourrait influencer la individus et unités potentiellement hétérogènes (agents) mobilité humaine à l’avenir, il est important de répertorier capables de prendre des décisions de manière autonome, l’ensemble des répercussions que des scénarios probables souvent avec des objectifs précis, et qui peuvent être aptes pourraient avoir sur les flux migratoires. En enquêtant sur à apprendre, à s’adapter et à modifier leur comportement les effets de la variabilité pluviométrique sur des facteurs tels en fonction des changements qu’ils perçoivent au sein de que la sécurité alimentaire et des moyens de subsistance au leur environnement. Le comportement des agents et leurs niveau des ménages et des communautés, on comprendra interactions sont souvent dictés par des règles définies par mieux comment celle-ci influence les décisions individuelles l’utilisateur et paramétrées à partir de connaissances ou des migrants. En se fondant sur les données obtenues sur de données existantes. Si l’on définit le modèle à partir de les sites de recherche, où les changements pluviométriques données disponibles et qu’on évalue sa capacité à reproduire peuvent contribuer à accroître l’insécurité alimentaire/des un phénomène réel, il peut servir soit comme outil prédictif moyens de subsistance, notre processus de simulation et soit comme un moyen d’obtenir des indications inaccessibles d’analyse tourné vers l’avenir permet de mieux comprendre autrement. dans quelles circonstances la variabilité pluviométrique peut influencer fortement la migration. Les sections suivantes décrivent le cadre conceptuel du modèle « Rainfalls » ainsi que les résultats obtenus lors d’une 6.1 Modélisation axée sur les agents (MAA) première modélisation effectuée dans le district de Same, en Tanzanie. La description du cadre conceptuel et des résultats La modélisation axée sur les agents est une technique du modèle tanzanien présente les conclusions préliminaires informatique de simulation sociale qui permet à l’utilisateur de la modélisation axée sur les agents entreprise par le projet de modéliser le comportement d’entités décisionnelles « Rainfalls ». On trouvera des informations supplémentaires individuelles (individus et/ou ménages, par exemple) et sur le développement et le paramétrage du modèle dans la façon dont ils agissent l’un envers l’autre et en relation l’annexe technique. Les résultats d’investigations plus avec l’environnement. Ce type de modélisation permet de approfondies de ce type de modélisation et de la façon combiner différents niveaux d’analyse afin de comprendre le dont il a été appliqué aux autres cas d’étude seront publiés comportement général du phénomène qui nous intéresse. Le ultérieurement. modèle axé sur les agents (MAA) est constitué de nombreux _ 102 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Crédit photo : © 2012 Lars Johansson Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 103 6.2 Le modèle de migration axé sur les agents de « Rainfalls » L’évaluation de la vulnérabilité du ménage, au centre du cadre conceptuel, est influencée par les effets de tout Le modèle de migration axé sur les agents « Rainfalls changement externe intervenant dans la variabilité et la » (MMBAR) a été conçu pour représenter le degré de moyenne pluviométriques locales sur une large gamme de vulnérabilité des ménages aux changements provoqués facteurs structurels/institutionnels touchant à la sécurité par la variabilité pluviométrique en termes de sécurité alimentaire/des moyens de subsistance, y compris l’état alimentaire/des moyens de subsistance, ainsi que l’impact général du marché régional du travail et de la production de ces changements sur la migration des membres de alimentaire. Elle dépend également de certains attributs et la famille. Le fonctionnement informatique du MMAAR caractéristiques propres au ménage, notamment les revenus, repose sur un cadre conceptuel (Illustration 11) conçu pour le patrimoine et la taille de la famille. Que le ménage se représenter les relations complexes entre les facteurs qui, à perçoive comme vulnérable (avec un besoin imminent de de multiples niveaux, contribuent à l’insécurité alimentaire/ modifier sa situation) ou satisfait (ses stratégies d’adaptation des moyens de subsistance des ménages et à la migration. s’avérant suffisantes), il entreprend un processus décisionnel Dans le cadre-même, des encadrés indiquent les éléments au regard de la migration. Toute décision concernant la inclus dans le modèle à l’un ou l’autre des niveaux d’analyse migration dépend de facteurs individuels comme l’âge, le sexe (externe, structurel/institutionnel, ménage et individu), et les et l’état civil aussi bien que de facteurs propres au ménage flèches indiquent la direction principale de l’influence d’un comme le nombre de membres économiquement actifs et les élément sur un autre. Les termes en caractères gras mettent biens fonciers, avec pour résultat une forme de migration qui en évidence les composantes principales de l’évaluation de sera soit vulnérable soit satisfaite. La première indique une la vulnérabilité et les processus décisionnels en matière de migration davantage poussée par le besoin et la deuxième migration qui ont été modélisés. Les termes qui ne sont pas davantage inspirée par la recherche d’opportunités. Comme en gras désignent les facteurs secondaires dont on considère dans le monde réel, le comportement d’un agent influence qu’ils contribuent à ces processus. les actions ultérieures des autres par le biais d’interactions et d’effets de retour tels que l’impact de la migration sur le . réseau social, les revenus du ménage et le marché du travail local. _ 104 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Illustration 11 : Cadre conceptuel du modèle de migration axé sur les agents « Rainfalls » Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 105 6.3 Scénarios d’anticipation et analyse : modélisation du cas Tanzanie sont censés représenter le degré approximatif de du district de Same, Tanzanie changement climatique prévu pour le pays. En reproduisant le taux de changement à l’horizon 2100 estimé par Bien qu’il ait été créé pour les huit sites d’étude « Rainfalls », Paavola (2003) , le scénario 1 représente une tendance à la le cadre conceptuel ci-dessus a d’abord été développé et testé sécheresse, les précipitations moyennes annuelles diminuant sur le site de recherche tanzanien. Dans ce MAA de simulation, de 5 pour cent maximum d’ici 2040 et la variabilité autour les ménages et les individus sont tous représentés comme de cette moyenne augmentant de 5 pour cent maximum des agents en situation d’interaction mutuelle (ménage- la même année. Inversement, le scénario 2 présente une ménage ou individu-individu) ou avec leur environnement. tendance à l’humidité, la moyenne des pluies annuelles et la Les caractéristiques des agents, qu’il s’agisse de ménages ou variabilité autour de cette moyenne augmentant toutes deux d’individus, découlent directement des données de l’enquête de 5 pour cent maximum d’ici 2040. En reproduisant le taux auprès des ménages recueillies dans les trois villages étudiés. de changement à l’horizon 2100 prévu par Agrawal et al. Les règles concernant les actions et interactions qui régissent (2003) , le scénario 3 présente une tendance à une humidité le comportement des agents soumis à différents degrés de extrême, la moyenne des pluies annuelles et la variabilité variabilité pluviométrique ont aussi été établies après analyse autour de cette moyenne augmentant toutes deux de 22,5 d’une large gamme de données d’enquête sur les moyens pour cent maximum d’ici 2040. Inversement, le quatrième et de subsistance, la sécurité alimentaire et la migration. En se dernier scénario représente une tendance à une sécheresse basant sur ces données, les évaluations de la vulnérabilité et extrême, les précipitations moyennes annuelles diminuant de les décisions migratoires simulées sont censées refléter celles 22,5 pour cent maximum d’ici 2040 et la variabilité autour qui ont été observées sur le terrain. de cette moyenne augmentant de 22,5 pour cent maximum la même année. Les scénarios des précipitations futures utilisées comme stimulus du changement et modélisées lors du travail de simulation en Tanzanie sont fournis par la méthode de simulation de Monte Carlo. Celle-ci reproduit le caractère PDM (« Probability-Distributed Model » e.g. basé sur la distribution des probabilités) stochastique de la variation des précipitations futures autour d’une tendance à plus long terme. Les flux de migrants modélisés pour différents scénarios d’anticipation de la pluviométrie permettent également de comprendre l’influence des précipitations sur la migration. Les scénarios de précipitations testés en _ 106 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Résultats pour la Tanzanie : migration de 2014 à 2040 selon les scénarios de précipitation suivants : augmentation de la sécheresse/de l’humidité, très forte augmentation de la sécheresse/de l’humidité En se servant du cadre conceptuel décrit ci-dessus, le MMAAR Tanzanie indique le nombre de migrants issus de ménages satisfaits ou vulnérables des villages faisant l’objet de l’étude. Chacun des ménages évalue sa vulnérabilité face aux impacts des changements de pluviométrie mois par mois. Les changements saisonniers comme les saisons des pluies vuli et masika influent sur les revenus, la production alimentaire et par conséquent la vulnérabilité des ménages tout au long de l’année. Qu’il soit satisfait ou vulnérable, chaque ménage peut citer la migration d’un ou plusieurs de ses membres comme stratégie de subsistance viable. L’illustration 12 montre le taux de différence normalisé de la migration modélisée pour les ménages vulnérables. Les flux de migrants, normalisés par rapport au nombre d’agents émigrants selon un scénario de précipitations « moyennes » (sans changement de variabilité ni de moyenne), constituent la moyenne des ensembles constitués de cinq membres. Ils apparaissent comme des moyennes mobiles, étalées sur cinq ans pour mieux faire ressortir les tendances. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 107 Taux de différence normalisé de la migration vulnérable Moyenne du scénario 1 (sécheresse) = 0,26 Moyenne du scénario 2 (humidité) = 0,27 Moyenne du scénario 3 (humidité extrême) = -0,16 Moyenne du scénario 4 (sécheresse extrême) = 0,50 Illustration 12 : différence normalisée sur une moyenne mobile de cinq ans dans le taux de migration vulnérable selon le modèle MMAAR. Les barres d’erreur indiquent la marge d’erreur modélisée avec des ensembles de cinq membres. Pendant presque toute la période de simulation, le taux plus faibles que le scénario « normal » par rapport auquel normalisé de migration modélisée chez les ménages s’effectue la normalisation des résultats de la simulation. Les vulnérables est généralement le plus élevé dans le scénario scénarios 1 (sécheresse) et 2 (humidité) présentent des taux 4 (sécheresse extrême). D’après ce scénario, le taux annuel similaires de changement positif dans la migration vulnérable moyen normalisé de la migration vulnérable est de 0,5 normalisée au cours de la période de simulation, avec une (soit une augmentation de 50 % par rapport aux agents moyenne de 0,26 et 0,27 respectivement. modélisés sous des conditions « normales »). Par contraste, le scénario 3 (humidité extrême) produit généralement les Ces résultats correspondent à ce que l’on pourrait taux de migration vulnérable les plus bas. Avec un taux logiquement attendre de ce type de contexte semi-aride annuel moyen de -0,16, il est également le seul scénario à (précipitations annuelles moyennes à long terme de 560 produire systématiquement des taux de migration vulnérable mm/an à peine) caractéristique du site de recherche _ 108 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 tanzanien. Dans un tel environnement, un scénario de Bien que les barres d’erreur sur l’illustration 12 indiquent des sécheresse extrême devrait entraîner une vulnérabilité accrue variations dans les résultats de la simulation pour les migrants des ménages et par conséquent une augmentation nette vulnérables, la nature des rapports entre les différents des formes de migration vulnérables. Pour la même raison, scénarios ne s’en trouve pas modifiée même aux extrêmes on pourrait également s’attendre à un niveau modérément de chaque marge. En dépit de sa valeur considérable pour élevé de migration vulnérable sous un scénario de sécheresse. cette étude, le nombre de migrants vulnérables modélisés Inversement, la prospérité relative que pourrait produire un dans chacun des scénarios testés dépend à la fois du fait scénario d’extrême humidité pourrait s’expliquer par une que les ménages sont considérés comme vulnérables et de la vulnérabilité moindre de la plupart des ménages pendant les tendance de leurs membres à émigrer. C’est pourquoi il est périodes où l’eau est plus abondante. Le niveau modérément important de prendre aussi en compte le nombre de migrants élevé de migration vulnérable sous un scénario d’humidité satisfaits modélisés dans les quatre scénarios en question contredit cette attente. Une explication possible tiendrait (Illustration 13). à l’interaction entre le désir de migration du ménage et sa capacité réelle à migrer. La faible humidité constatée dans le scénario 2 peut produire une augmentation du nombre de ménages qui seront en mesure d’investir dans la migration sans pour autant améliorer leur situation au point de ne plus être considérés comme vulnérables. Ou alors, l’augmentation annuelle moyenne de 5 pour cent des précipitations à l’horizon 2040 dans le scénario à humidité modérée est peut-être, dans le contexte semi-aride et marginalisé du site de recherche tanzanien, tout simplement insuffisante pour atténuer la vulnérabilité des ménages pauvres et leur permettre de multiplier les options pour assurer leur subsistance in situ et ainsi parer à l’avancée de la migration vulnérable. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 109 Taux de différence normalisé de la migration satisfaite Moyenne du scénario 1 (sécheresse) = -0,05 Moyenne du scénario 2 (humidité) = 0,05 Moyenne du scénario 3 (humidité extrême) = 0,03 Moyenne du scénario 4 (sécheresse extrême) = -0,02 Illustration 13 : différence normalisée sur une moyenne mobile de cinq ans dans le taux de migration satisfaite selon le modèle MMAAR. Les barres d’erreur indiquent la marge d’erreur modélisée avec des ensembles de cinq membres. Les résultats de la modélisation pour la migration satisfaite avec un taux annuel moyen normalisé égal mais inverse de (Illustration 13) montrent une sensibilité bien moindre aux -0,05. Entre ces deux limites relatives, les scénarios 3 et 4 modifications de la pluviométrie que pour la migration (humidité extrême et sécheresse extrême) révèlent des vulnérable. Pendant la quasi-totalité de la période de tendances globales encore plus fines, bien qu’elles présentent simulation, le scénario 2 (humidité) produit le taux le plus les mêmes signes que leurs équivalents modérés. Or, si le élevé de migration modélisée chez les ménages satisfaits. scénario « humidité extrême » révèle un taux positif plus Ceci dit, le taux annuel moyen normalisé de migration modéré que celui de l’humidité (moyenne annuelle de 0,03), satisfaite est de 0,05, soit seulement 5 pour cent de plus celui de l’extrême sécheresse révèle un taux négatif plus que pour le scénario « normal ». De même, pour la majeure modéré que celui de la sécheresse (moyenne annuelle de partie de la période de simulation, le scénario 1 (sécheresse) -0,02). Les barres d’erreur qui apparaissent sur les résultats produit le taux le plus bas de migration satisfaite normalisée de la simulation de la migration satisfaite n’indiquent qu’une _ 110 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 très légère déviation de la moyenne pour la marge d’erreur vulnérable en cas d’extrême humidité. Les changements dans complète simulée avec des ensembles de cinq membres. les régimes pluviométriques peuvent avoir un impact sur la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance à l’avenir, et Il est à noter qu’alors que les deux scénarios « humides » pourraient accroître la vulnérabilité de nombreux ménages produisent systématiquement un changement positif pour dans le monde. Les différents scénarios climatiques ayant un la migration satisfaite, les deux scénarios de sécheresse effet manifeste sur les formes vulnérables de migration, la produisent quant à eux un résultat négatif une fois normalisés modélisation axée sur les agents présentée ici illustre le rôle par rapport à la migration satisfaite modélisée selon un que pourrait, à l’avenir, jouer la migration dans la gestion des scénario « normal ». Ces résultats s’expliquent par le fait facteurs de stress climatiques. qu’en toute probabilité, les ménages seront plus aptes à investir dans des types de migration satisfaite ou tournée vers la recherche d’opportunités pendant la période de relative abondance qu’apporte une pluviosité accrue. Inversement, leurs capacités seront réduites dans les périodes d’austérité imposées par une baisse des précipitations. Ceci dit, étant donné la faible ampleur des changements intervenus dans les formes satisfaites de migration et reproduits dans l’illustration 13, il paraît irréaliste d’entreprendre une comparaison approfondie des relations précises entre les différents scénarios. Pour résumer, les résultats de la modélisation axée sur les agents pour le district de Same en Tanzanie indiquent une faible sensibilité à la variabilité pluviométrique des formes satisfaites de migration. D’après la simulation, les légères augmentations de la migration satisfaite semblent résulter d’une pluviosité accrue, alors que les légères baisses sont attribuées à des précipitations moins importantes. En revanche, les formes vulnérables de migration sont bien plus sensibles aux différents scénarios de variations des pluies : selon la modélisation, la migration la plus vulnérable se produit suivant un scénario de sécheresse extrême, et la moins Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 111 7- Conclusions Il est essentiel de comprendre la façon dont les ménages des variables climatiques et des autres variables (dont la gèrent aujourd’hui les effets des modifications des régimes sécurité alimentaire/des moyens de subsistance) et leur poids pluviométriques sur leur sécurité alimentaire et leurs moyens sur les choix migratoires, il sera plus facile de structurer les de subsistance, afin de garantir des plans d’adaptation, investissements d’adaptation, afin de s’assurer que quelles des politiques de développement et plus globalement une que soient les stratégies auxquelles les ménages ont recours transition vers un monde plus résilient qui tiennent compte (y compris la migration) celles-ci contribuent à améliorer leur des changements climatiques. Partout dans le monde, les résilience face aux changements climatiques. communautés vulnérables subissent déjà les effets des phénomènes météorologiques extrêmes et du changement Les résultats de la modélisation des précipitations en Tanzanie climatique à évolution lente, et constatent des changements montrent clairement que la variabilité pluviométrique dans les précipitations et dans les périodes végétatives ainsi et la vulnérabilité des ménages face à ces changements qu’une augmentation des événements climatiques extrêmes influencent les décisions relatives à la migration. Les ménages . Le changement climatique menace la productivité agricole, qui disposent d’options plus variées ou plus avantageuses aggrave l’insécurité alimentaire et met en péril les moyens en matière d’adaptation semblent moins sensibles aux de subsistance et la survie des populations pauvres, et en changements pluviométriques et moins prompts à migrer, particulier des petits exploitants agricoles, des éleveurs poussés par le besoin, dans des conditions défavorables. et des paysans sans terre dans les pays les moins avancés. Dans les prochaines décennies, la façon dont les ménages Cela en poussera certains à aller chercher des moyens de concernés géreront les changements en matière de sécurité subsistance ailleurs et en piègera d’autres dans la pauvreté. Le alimentaire/des moyens de subsistance conditionnera les changement climatique affecte de plus en plus l’habitabilité schémas de répartition de la population dans les régions du même de certaines zones, forçant les habitants à partir. monde hautement vulnérables aux changements climatiques. Celles-ci comprennent les zones montagneuses, les deltas L’étude « Rainfalls » montre que la question qui se pose, à forte densité de population, et les zones arides ou semi- en ce qui concerne les interactions entre les changements arides où les cultures pluviales et l’élevage subissent déjà des climatiques planétaires (et locaux) et la migration humaine, pressions. La plupart des ménages tenteront de gérer ces n’est pas de savoir si les facteurs environnementaux sont les risques en essayant de diversifier leurs sources de revenus seuls responsables de la mobilité, mais comment ces facteurs dans leur lieu d’origine et en faisant appel à la migration se conjuguent pour déterminer les choix migratoires. Si l’on saisonnière ou temporaire. arrive à appréhender de façon plus nuancée l’interaction _ 112 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Des mesures d’adaptation efficaces garantissant particulièrement la promotion d’une agriculture durable et d’une diversification des moyens de subsistance ruraux permettront d’éviter des mouvements de populations massifs et non planifiés. Cependant, les pays et communautés plus pauvres ne sont pas en mesure d’entreprendre une adaptation à grande échelle. Aussi les sociétés touchées par les variations des régimes pluviométriques (pluies insuffisantes ou trop abondantes à certaines époques de l’année, sécheresse ou humidité accrue à long terme) risquent de voir se détériorer leur bien-être, leurs moyens de subsistance et leur sécurité alimentaire, en une spirale descendante au bout de laquelle les réseaux sociaux subiront un stress excessif et où, pour ceux qui seront obligés de partir comme pour ceux qui resteront sur place, les tensions et la violence se feront plus fortes. La mobilité humaine liée aux changements pluviométriques et à l’insécurité alimentaire/des moyens de subsistance est une question que l’on ne peut traiter efficacement que si on l’envisage comme un processus mondial et non comme une série de crises locales. L’aide et la protection des populations vulnérables est une lourde responsabilité que ne peuvent porter seuls les États et communautés concernés. Tous les pays doivent contribuer à minimiser la pression exercée sur les populations vulnérables et leur fournir des options en matière d’adaptation, notamment des déplacements de population dans la dignité et en toute sécurité si cela devient inévitable. Photo credit : © 2011 Christina Rademacher-Schulz/UNU-EHS Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 113 Photo credit : © 2012 Lars Johansson _ 114 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 8- Réflexions pour les décideurs et les praticiens : permettre des choix informés à l’échelle mondial, national et local. L’étude « Rainfalls » s’est donnée pour objet les relations durement obtenues en termes de bien-être des populations entre variabilité pluviométrique, sécurité alimentaire/des et obligera les États à répondre aux besoins accrus d’un moyens de subsistance et mobilité humaine. Elle étudie aussi nombre croissant de citoyens marginalisés et sans doute les circonstances dans lesquelles les ménages ont recours à mobiles. S’ils comprennent les circonstances et les facteurs la migration comme stratégie de gestion des risques face à qui déterminent les choix migratoires des ménages (aux la variabilité des précipitations et à l’insécurité alimentaire. niveaux national, local et familial), les décideurs seront plus L’étude montre que pour certains ménages, la migration est aptes à créer des environnements favorables qui permettront un moyen avéré d’améliorer leur résilience. Pour d’autres, la aux populations de s’adapter au changement climatique migration s’avère un pis-aller qui perpétue le cycle négatif de et d’envisager la migration comme une stratégie destinée pauvreté et de pénurie alimentaire ou pire encore, érode leur à améliorer leur résilience, et non comme une tactique de résilience face aux facteurs de stress climatiques actuels ou survie dommageable à long terme. . futurs. Pour d’autres encore, et pour certaines populations particulièrement vulnérables, la migration n’est une option Les considérations qui suivent, tant sur les politiques réaliste ni pour améliorer la résilience ni pour éviter les d’orientation que sur la pratique, sont une synthèse des conséquences les plus pénibles de l’insécurité alimentaire. réflexions que l’on trouvera dans les huit rapports nationaux des études de cas. Les impacts des changements climatiques Ces constatations ont des répercussions sur les politiques sont locaux, mais les orientations mondiales en matière d’orientation qui visent à aider les populations à s’adapter, de changement climatique, de sécurité alimentaire et de voire à prospérer lorsqu’elles sont confrontées, entre développement durable influencent les choix politiques autres, à des facteurs de stress climatiques : si l’on ne nationaux et l’accès aux aides. Il y a des défis pour lesquels formule pas de nouvelles approches pour offrir davantage une action planétaire s’impose. Pour d’autres, des mesures de possibilités de subsistance et de gestion des risques aux aux niveaux national et local sont indispensables pour aider les ménages se situant à la frontière entre développement et communautés et ménages vulnérables. Les recommandations pauvreté, ceux-ci ne feront qu’accumuler davantage de ci-dessous énumèrent une série de mesures qui, dans leur retard dans leur quête d’adaptation et de développement ensemble, peuvent permettre aux populations pauvres de durable, avec pour résultat probable une migration dans prendre des décisions informées sur la migration, l’adaptation des circonstances défavorables. Cela annulera les avancées et la sécurité alimentaire, afin d’améliorer leur résilience. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 115 8.1 Décideurs mondiaux Adopter une approche équitable pour réduire les émissions de gaz à effets de serre conformément aux recommandations A l’attention des Parties à la Convention-cadre des Nations des scientifiques pour que la température mondiale Unies sur les changements climatiques n’augmente pas de plus de 2 °C, voire de 1,5 °C. L’étude « Rainfalls » apporte la preuve que certaines Les parties doivent fixer ensemble leur pic d’émissions d’ici communautés sont déjà aux prises avec les effets d’une 2015 et s’accorder afin de réduire les émissions mondiales pluviométrie changeante. Plus les pouvoirs publics retarderont d’au moins 80 pour cent par rapport aux niveaux de 1990 leur action face au changement climatique et repousseront d’ici 2050. Elles doivent aussi se mettre d’accord sur un l’adoption et processus permettant d’augmenter les niveaux de réduction d’adaptation, plus les impacts seront graves et les coûts des émissions si de nouvelles études scientifiques en élevés, tant en termes humains que financiers. démontrent la nécessité, pour être certaines d’atteindre les de mesures ambitieuses d’atténuation objectifs mondiaux en matière de température et empêcher À ce jour, les effets des émissions sont déjà considérables. que les changements climatiques ne s’emballent. Comme Selon des estimations récentes, les tendances actuelles en l’explique l’Article 2, l’objectif ultime de la convention (éviter matière d’émissions associées aux promesses de réduction les perturbations climatiques dangereuses) est le point pourraient entraîner un réchauffement de 3,5 à 6° C . Même d’ancrage pour répondre aux besoins des communautés après avoir pris des mesures d’atténuation et fait des choix vulnérables et éviter les pertes et dommages. d’adaptation, les pays, communautés et ménages vulnérables seront sans doute dépassés par les changements climatiques. Certains verront leurs moyens de subsistance et leur sécurité alimentaire se détériorer inexorablement, accompagné de pertes et d’une atteinte à leur bien-être qui dépassera, Augmenter les promesses de fonds et convenir de mécanismes innovants pour garantir un financement de l’adaptation dans les pays en développement suffisant, durable, prévisible, nouveau et supplémentaire dans l’ensemble, tout ce que l’on a connu . Les parties à Les parties doivent veiller à ce que le Fonds vert pour le climat la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements encourage la transparence, les approches participatives climatiques doivent prendre des mesures urgentes dans trois et la responsabilisation afin que les fonds et programmes secteurs (atténuation, adaptation [notamment financière] répondent aux besoins des plus vulnérables. L’adaptation et pertes et dommages) afin de s’attaquer aux causes du demande un financement robuste. Plus les efforts consentis changement climatique et de l’impact disproportionné qu’il pour permettre aux communautés vulnérables de s’adapter exerce sur les populations les plus vulnérables et les moins aux impacts du changement climatique seront importants (par responsables de ces changements. Il est nécessaire que les le biais d’un financement adéquat favorables aux populations parties s’engagent à : démunies), plus celles-ci seront en mesure de prendre des _ 116 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 décisions informées afin d’améliorer leur résilience dans le facteurs de stress climatiques, notamment en recourant à contexte des changements climatiques. Les pays développés la migration, les choix qui s’offrent à elles dépendront des se sont engagés à mobiliser 100 milliards de dollars US par initiatives que prendront les pouvoirs publics en matière an jusqu’en 2020 destinés aux dépenses climatiques. Mais de planification. De son côté, le Comité d’adaptation la somme reste insuffisante et les promesses de fonds ne se peut jouer un rôle crucial en donnant aux gouvernements sont pas encore traduites par des accords sur des sources de nationaux les moyens d’accéder aux informations et financement permettant de répondre à ces engagements. En ressources dont ils ont besoin, ainsi qu’un appui technique même temps, la voie de l’atténuation adoptée « par défaut » et humain pour que des initiatives efficaces en faveur des lors des négociations climatiques signifie que les impacts du plus démunis atteignent ces communautés vulnérables. changement climatique dépasseront sans doute les limites de Le plan de travail triennal de ce comité doit inclure une l’adaptation. Des mesures supplémentaires spécifiques seront cartographie des organes internationaux, nationaux et donc nécessaires pour compenser les pertes et dommages, régionaux en charge de l’adaptation et des ressources en plus de ce que prévoit l’agenda de l’adaptation. relatives à la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance et à la mobilité humaine. Il doit identifier des moyens Créé en 2010, le Cadre d’adaptation de Cancún de la concrets afin de faciliter la coordination entre ces différents CCNUCC a permis de créer une structure mondiale pour organes, pour ainsi répondre aux problèmes émergents et traiter de l’adaptation . Certaines parties de ce cadre sont combler les lacunes en matière de capacités, de ressources déjà fonctionnelles, comme le comité d’adaptation et le et d’information dans ces domaines. La cartographie et la Programme de travail sur les pertes et dommages. D’autres coordination émanant du comité d’adaptation devraient deviendront opérationnelles au cours des prochaines années inclure les activités relatives à la mobilité humaine du HCR, de et devront produire des organismes et mécanismes d’appui l’OMI et d’autres organisations, ainsi que des projets comme efficaces pour les pays en développement, afin de permettre l’initiative Nansen qui s’occupent de types particuliers de à ces derniers de répondre aux besoins des populations mobilité (migration, déplacement, relocalisation planifiée). vulnérables. Le Comité doit aussi formuler des principes de base pour que la migration s’effectue dans la dignité et en toute sécurité. Faciliter la coordination mondiale et régionale pour Lors de l’examen des capacités des centres régionaux, permettre aux pays en développement d’avoir accès à le Comité devrait tenir compte de leur contribution en l’aide et de définir et mettre en place leurs Plans Nationaux faveur de la coopération régionale en matière d’adaptation d’Adaptation (PNA) transfrontalière, avec ses défis et ses opportunités. Alors que les communautés locales qui connaissent des difficultés pour se nourrir et subsister entreprennent de s’adapter aux perturbations pluviométriques et autres Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 117 Évaluer et réparer les pertes et dommages de façon à aider politiques et principes, par exemple pour que les mesures les populations vulnérables relatives aux pertes et dommages (y compris la migration Les initiatives mondiales en matière de pertes et dommages doivent aider les gouvernements nationaux à prendre en compte les besoins des populations les plus vulnérables, dont celles n’ayant pas accès aux possibilités d’adaptation ou de migration ou qui pourraient être forcées de quitter une région devenue hostile. La CCNUCC doit contribuer à faciliter l’évaluation systématique des pertes et dommages réels ou potentiels, en particulier les pertes non économiques ou difficilement quantifiables et l’érosion des moyens de subsistance, de la sécurité alimentaire et du bien-être. Un mécanisme pour les pertes et dommages devrait appuyer l’évaluation et la surveillance des perturbations pluviométriques afin de signaler à la Conférence des parties tout changement critique en matière de sécurité alimentaire/ des moyens de subsistance, de mobilité humaine ou de viabilité à long terme des paysages. Il devrait également appuyer des mesures de protection sociale et économique et et la réinstallation) soient transparentes et participatives, et qu’elles respectent les droits des populations concernées. Afin d’encourager les initiatives mondiales ou nationales qui abordent l’intensification de la mobilité humaine dans sa globalité, la Convention doit aussi coordonner ses activités avec les organismes dont le mandat couvre la gestion de la sécurité alimentaire/des moyens de subsistance et de la mobilité humaine. Enfin, la Conférence des parties doit aussi prendre acte de la nécessité d’envisager des approches relatives auà la réinsertion, à la restitution et à une série de questions opérationnelles comme les dispositions financières ou les dédommagements en faveur des communautés touchées. A l’attention des décideurs politiques spécialisés dans la sécurité alimentaire et nutritionnelle mondiale et le développement durable des assurances à prix raisonnable ou autres outils de gestion Les dernières années ont démontré combien il était difficile de des risques ou de transfert, afin de permettre aux populations relever le défi de la faim dans le monde : près d’un milliard de pauvres confrontées à une incertitude climatique croissante personnes continuent de souffrir d’une insécurité alimentaire de parer aux risques ou de les transférer. chronique. Le témoignage des communautés qui ont participé à l’étude « Rainfalls » démontre de surcroît les liens étroits Il est également nécessaire d’évaluer les capacités des entre changement climatique, sécurité alimentaire, pauvreté, gouvernements nationaux et régionaux à gérer les pertes et gestion des ressources naturelles et mobilité humaine. Ces dommages, ainsi que les besoins connexes des communautés questions ne peuvent se traiter de façon isolée. Alors que les vulnérables. La Convention a un rôle à jouer là où les capacités éléments qui les lient aux impacts des actions humaines sur nationales ne suffisent pas : elle peut faciliter les échanges les ressources naturelles se font plus évidents, les décideurs d’expériences entre régions et encourager des approches et praticiens doivent prendre conscience qu’une approche systématiques pour remédier aux pertes et dommages. Ces globale du développement durable est impérative. approches pourraient inclure une coordination des normes, _ 118 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Renforcer l’appel à la lutte contre la crise climatique et Formuler des objectifs à la suite des Objectifs du Millénaire intégrer le changement climatique et les considérations pour le développement afin d’appuyer le droit de tous à un relatives à l’égalité des sexes dans les initiatives mondiales développement durable en faveur de la sécurité alimentaire et nutritionnelle Alors que la date butoir de 2015 approche pour les Objectifs Il est très important que les décideurs mondiaux en matière du Millénaire pour le développement, les dirigeants doivent de sécurité alimentaire et nutritionnelle, dont le Comité élaborer et convenir d’une nouvelle série « d’Objectifs pour de la sécurité alimentaire mondiale et l’initiative Renforcer un développement durable » qui traitent des rapports entre la nutrition, prennent conscience de la menace que le pauvreté, environnement, changement climatique et mobilité changement climatique fait peser sur leurs objectifs communs humaine. Les dirigeants doivent reconnaître l’existence des et l’expriment haut et fort. Ces décideurs doivent incorporer facteurs de changement environnemental et leur impact sur les effets du changement climatique dans les politiques la pauvreté et la sécurité alimentaire. Ces objectifs doivent alimentaires et nutritionnelles et dans leur pratique, en exiger la contribution active de l’ensemble de la communauté tenant compte du fait que ces impacts diffèrent pour les internationale : chaque pays devra s’employer à réduire hommes et les femmes. Ils devraient aussi réitérer l’appel à le nombre de ces facteurs et garantir le droit de tous à un l’action mondiale pour confronter la crise climatique afin de développement durable. démontrer l’importance du leadership et renforcer la volonté politique en faveur de mesures énergiques. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 119 8.2 Gouvernements et partenaires d’exécution chercher à améliorer leur collaboration afin de favoriser l’efficacité et l’efficience et de relever des défis multisectoriels Le Cadre d’adaptation de Cancún a représenté un grand de plus en plus complexes. pas en avant pour les initiatives mondiales en matière d’adaptation, en établissant des processus pour appuyer Appuyer, promouvoir et mettre en œuvre des plans l’action nationale et prodiguer des conseils sur les principes nationaux et locaux participatifs et couvrant l’ensemble des d’adaptation, l’assistance et les mesures à prendre (dont la secteurs affectés migration). Il fait aussi référence à de nombreuses questions connexes (migration, vulnérabilité et sécurité alimentaire) qui demandent une approche holistique. Dans le sillage des progrès effectués à l’échelle mondiale, il est temps de s’intéresser aux niveaux national et local pour permettre aux populations pauvres et vulnérables de s’adapter aux changements climatiques et de faire des choix qui peuvent renforcer leur résilience (dont la migration). Les plans, les politiques et les pratiques des gouvernements des pays en développement, auront des implications non négligeables, aux niveaux national et local, sur l’aptitude des populations pauvres et vulnérables à s’adapter et à gérer les impacts et la variabilité climatiques. Les gouvernements des pays développés et les agences humanitaires peuvent appuyer ces efforts et promouvoir des principes et approches en matière d’adaptation qui tiennent compte des besoins des populations les plus vulnérables. En tant que partenaires d’exécution des gouvernements nationaux et des collectivités locales, les ONG humanitaires ou axées sur le développement ou l’écologie, les institutions multilatérales et les agences des Nations Unies ont la responsabilité de veiller à ce que leur pratique reflète ces principes et intègre les impacts et vulnérabilités climatiques projetés afin d’améliorer les capacités d’adaptation des communautés et des populations pauvres et vulnérables. Ces acteurs doivent également _ 120 Les gouvernements devraient anticiper les questions de sécurité alimentaire/des moyens de subsistance ou de mobilité humaine liée aux facteurs de stress climatiques et préparer des plans en conséquence. Pour cela, il faut que les processus gouvernementaux de planification aux niveaux national et local prennent en compte tous les secteurs concernés. Les plans doivent également incorporer les projections climatiques, inclure des analyses et proposer des politiques améliorées qui permettent de multiplier ou limiter les options en matière d’adaptation, avec notamment des politiques régissant le travail, les biens fonciers et les ressources naturelles, le déplacement et l’accès aux services d’appui à la migration et à la réinstallation. La planification et la mise en œuvre doivent encourager la participation et respecter les droits des populations vulnérables, y compris les migrants, les membres de leur famille ou les personnes qui se voient dans l’obligation de migrer. Elles doivent respecter les principes internationaux et les instruments relatifs aux droits de l’homme. Une bonne planification et une mise en œuvre efficaces exigent la participation des pouvoirs publics à tous les niveaux, ainsi que celle de certains ministères, lesquels doivent avoir les capacités et ressources nécessaires pour s’impliquer dans ces processus. C’est pourquoi il est nécessaire d’identifier et de combler les lacunes en matière de capacités. Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Appuyer et collaborer avec les initiatives visant à aborder les Appuyer et encourager la résilience des moyens de défis et opportunités transfrontaliers relatifs à l’adaptation subsistance et la sécurité alimentaire et à la mobilité humaine Les mesures visant à améliorer les moyens de subsistance et Certains des impacts locaux des changements climatiques la sécurité alimentaire et à multiplier les options d’adaptation résultent d’activités ou d’événements qui se sont produits loin des petits exploitants, des pêcheurs, des éleveurs et pasteurs en amont ou qui peuvent être soit exacerbés soit atténués ainsi que des ménages sans terres comprennent entre autres par des mesures visant à gérer les risques ou les ressources : la promotion d’une diversification durable des moyens au sein d’un écosystème ou bassin hydrologique commun. de subsistance ; une agriculture durable et résiliente aux De même, les impacts des perturbations climatiques, changements climatiques ; l’amélioration des pratiques qu’elles soient rapides ou progressives, peuvent provoquer agricoles et de l’accès à des aliments nutritifs diversifiés. des déplacements transfrontaliers ou rendre des zones La gestion entières inhabitables, obligeant la population à s’installer et la ailleurs. Avec l’augmentation des impacts climatiques, voire bassins hydrographiques (notamment pour l’irrigation, de la mobilité humaine, les nations doivent coopérer au l’assainissement niveau régional pour répertorier les défis transfrontaliers écosystèmes dont dépendent les moyens de subsistance. et les opportunités à effet de levier. Comme exemples de L’accès aux données climatiques locales, aux marchés, à la collaboration, citons l’échange d’informations sur les impacts microfinance, à la micro-assurance et à l’assurance indexée, projetés du changement climatique, l’étude des effets ainsi qu’à la protection sociale et à des programmes sociaux transfrontaliers potentiels d’activités telles que les barrages renforce les capacités des ménages démunis à résister aux hydroélectriques ou l’irrigation améliorée, la publication des chocs. Des programmes d’éducation et de formation peuvent stratégies climatiques et un dialogue régulier sur les défis et offrir de nouvelles possibilités en matière de revenus, tant opportunités communs. pour les migrants que pour les non migrants. Les impacts localisés de phénomènes climatiques extrêmes, Sur le site de recherche du Ghana, 85 pour cent des comme les inondations de 2011 qu’on a pu observer habitants du district tirent leur subsistance de l’agriculture au centre de la Thaïlande et dans le delta du Mékong au et de l’élevage. Or, les paysans n’ont pas accès à Viet Nam pendant les recherches de terrain pour le projet, l’irrigation et leurs cultures sont entièrement tributaires peuvent résulter tant des conditions météorologiques que des précipitations. Les communautés étudiées en Thaïlande de l’activité humaine loin en amont. témoignent d’une plus grande résilience, avec un meilleur communautaire gestion intégrée et des des l’hygiène) ressources ressources peuvent naturelles en eau/des protéger les accès aux marchés, à l’infrastructure et au crédit, ainsi qu’à des sources de revenus diversifiées, à la production agricole et à des programmes publics de protection sociale Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 121 Renforcer et étendre les actions de réduction des risques Au Viet Nam, les recherches ont été menées lors de graves de catastrophe notamment en les liant au développement inondations, les plus sévères depuis dix ans. Si le niveau de à long terme la mer montait d’un mètre dans une province située plus au Conformément au Cadre d’action de Hyogo, des systèmes d’alerte précoce et autres mesures de réduction des risques de catastrophe, y compris celles qui tirent parti des capacités et des connaissances locales, doivent être intégrés à la programmation du développement pour permettre la préparation et la survie des ménages démunis. La riposte aux catastrophes doit prendre en compte et multiplier les stratégies de développement durables à long terme, les actifs et les services déjà en place notamment l’aide à la sud, cela réduirait les capacités de décharge du Mékong, inonderait de larges bandes de terre et augmenterait peutêtre la fréquence et l’intensité des inondations en amont. Au cours des 13 dernières années, le Guatemala a été sévèrement touché par quatre phénomènes pluviométriques extrêmes associés à des ouragans ou des tempêtes tropicales : Mitch (1998), Stan (2005), Agatha (2010) et la dépression tropicale 12-E (2011). Ceux-ci ont entraîné des précipitations inhabituelles et causé d’importants dégâts. subsistance, l’éducation et les services de santé. De telles initiatives peuvent minimiser l’impact des catastrophes sur les populations déplacées, améliorer leur résilience et diminuer leur vulnérabilité. Pour cela, il faut renforcer la collaboration entre les gouvernements nationaux ou les collectivités locales, le système des Nations Unies et les acteurs humanitaires et du développement, afin de mieux coordonner les efforts et d’optimiser les apports financiers. Ces parties prenantes devraient aussi élaborer et tester des plans de contingence pour répertorier les solutions, les défis à relever et les lacunes à combler. Les initiatives visant à renforcer la résilience et les capacités d’adaptation doivent prendre forme avant qu’une catastrophe ne se produise, afin de protéger la vie et les biens des populations pauvres et leur permettre de s’affranchir définitivement de la pauvreté. Intégrer les considérations relatives à l’égalité des sexes Lorsque la migration sépare les ménages, non seulement ce sont les femmes, demeurées sur place, qui doivent désormais assumer toute la charge de travail, mais les inégalités en matière de pouvoir décisionnel et d’accès aux ressources telles que les intrants et la technologie vulnérabilisent celles chargées des travaux agricoles. L’intégration de l’égalité des genres demande que l’on étudie les impacts sur les hommes et les femmes, les garçons et les filles en tant que groupes sociaux distincts, afin que les mesures prises n’excluent ni ne nuisent à aucun d’entre eux. Elle implique un dialogue avec divers groupes sociaux pour examiner et promouvoir la sensibilisation aux rôles masculins et féminins, aux dynamiques de pouvoir et aux inégalités afin que ces groupes comprennent comment ceux-ci appuient ou limitent les capacités d’adaptation de la population. Cela peut d’ailleurs favoriser l’implication des femmes comme des hommes, briser les barrières qui empêchent la participation équitable _ 122 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 aux processus décisionnels au sein de la communauté ou des impacts locaux et améliorer l’efficacité des programmes du ménage et garantir que les membres des deux sexes gouvernementaux. bénéficient de manière équitable des initiatives en matière d’adaptation. Pour les populations déjà démunies et vulnérables, le changement climatique implique un nouvel ensemble Au Bangladesh, les femmes dont les maris émigrent se chargent des travaux agricoles en plus de leurs tâches ménagères. Les filles et les jeunes femmes sont souvent victimes de harcèlement sexuel au sein de leur communauté. Par crainte du rejet social que cela entraîne, les pères qui migrent marient souvent leurs filles très tôt, ce qui les expose à des conséquences néfastes pour la santé et interrompt leur scolarisation. substantiel de défis dynamiques. Fondamentalement, dans les secteurs de la sécurité alimentaire, de l’environnement et plus largement du développement durable, la crise climatique exige des solutions nouvelles de la part de la communauté internationale et des autorités nationales ou locales tant dans les pays développés qu’en développement. Destinées aux parties prenantes à de nombreux niveaux, les actions préconisées constituent un ensemble de mesures qui se renforcent mutuellement. Exécutées ensembles, elles permettront peut-être aux ménages et communautés Donner la priorité aux populations vulnérables et faire en vulnérables d’accéder à des options de migration et sorte qu’elles prennent part aux processus engagés d’adaptation qui amélioreront leur résilience. Les populations La priorité doit être donnée aux besoins des populations les plus vulnérables, comme celles pour qui la migration constitue une stratégie d’ajustement dommageable à long terme ou qui sont incapables d’émigrer. Les évaluations de vulnérabilité qui prennent en compte les dynamiques socioéconomiques, politiques et environnementales peuvent localiser ces populations et déterminer les causes sousjacentes de leur vulnérabilité. En outre, leur participation démunies font partie intégrante des solutions à long terme. Il est nécessaire de leur procurer des moyens et des outils, tels que des informations, des ressources et des options de subsistance, qui tiennent compte des perturbations pluviométriques. Cependant, l’avènement de solutions durables ne repose pas seulement sur les populations et les communautés locales : nous devons tous collaborer en vue de changements positifs. pleine et entière à tous les stades du processus permettra d’une part de déterminer leurs besoins et d’y remédier, et d’autre part de valoriser les savoirs locaux ou autochtones et de les intégrer aux stratégies d’adaptation. La participation et le renforcement des capacités à l’échelle communautaire peuvent améliorer le capital social au sein des collectivités, permettre de mieux faire comprendre la nature des besoins et Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 123 9- Annexe technique 9.1 Modélisation axée sur les agents Comme le montre le cadre conceptuel (Illustration 11) qui changement vécu par les agents modélisés à chaque pas de a servi de base au modèle de migration axé sur les agents « temps. Cependant, les fonctions relatives à la population Rainfalls » (MMAAR) en Tanzanie, les effets sur la migration qui modifient le nombre et les caractéristiques des agents que provoquent les changements dans la variabilité et la provoqueront aussi des changements tant parmi les agents moyenne des précipitations au sein des trois communautés eux-mêmes (personnes individuelles et ménages) que reprises dans le modèle se traduisent par un changement de chez d’autres individus, au travers d’interactions sociales statut des ménages en termes de vulnérabilité. La présente modélisées. Chacune de ces trois principales formes de annexe technique fournit des informations supplémentaires modification simulée (impact des précipitations, dynamique sur la façon dont la pluviométrie affecte les processus des de la population et interaction sociale) influeront donc sur ménages et des communautés et influence, par conséquent, les conditions dans lesquelles un agent-ménage entreprend la migration des agents au sein du modèle. d’évaluer sa vulnérabilité. Le résultat de cette évaluation pèse alors sur la décision que prendra le ménage d’envoyer En Tanzanie, le modèle de simulation a été appliqué avec ou de retenir les migrants potentiels. les mêmes fonctions un pas de temps d’un mois, au cours duquel un générateur interdépendantes sont utilisées aumois de simulation suivant d’événements appelle une série de fonctions interdépendantes. (t+1) Ces dernières contrôlent le fonctionnement interne du modèle, de façon à ce que les relations entre les éléments puissent se résoudre numériquement sous les conditions indiquées au temps . Les résultats de ces fonctions au temps influencent les conditions sous lesquelles les mêmes fonctions se produisent au temps en modifiant légèrement les situations tant des agents que de leurs environnements physiques et sociaux. Le scénario des précipitations et l’impact des changements apportés à ce scénario sur les fonctions au niveau des ménages et des individus constituent le principal type de _ 124 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Impact des précipitations : Précipitations et production alimentaire : L’impact des précipitations se traduit au niveau structurel Chaque mois, l’état général de la production alimentaire (F) par l’influence saisonnière qu’elles exercent sur le marché du est évalué comme une fonction (x) des deux saisons des travail et les systèmes de production alimentaire. pluies décrites plus haut : Vuli (V) et Masika (M). Il peut être bas, moyen ou bon. Étant donné la relation non-linéaire Interprétation saisonnière des précipitations : entre précipitations et production alimentaire, le fait qu’un La pluviométrie mensuelle dans le district de Same en scénario de précipitations à un temps t aboutisse ou non à Tanzanie est évaluée mensuellement. Elle est classée selon une catégorie particulière de production alimentaire dépend les catégories suivantes : extrêmement sec, sec, moyen, du taux de réponses des ménages à l’enquête Q412a humide et extrêmement humide en utilisant des seuils définis (mois où le ménage a tendance à ne pas pouvoir cultiver par quintiles. Ces classements mensuels (r)* prennent une suffisamment pour se nourrir). signification saisonnière au travers de leur interprétation dans F = x(V, M) les scénarios Vuli (V), Masika (M) et trimestriels (R) Selon le mois de simulation à t , les valeurs , V, M et R représentent le scénario de précipitations recherché. V = (r(oct)+r(nov)+r(dec)+r(jan))/4 Dynamiques des populations : Les fonctions naissance, mariage et décès du modèle sont M = (r(feb)+r(mar)+r(apr)+r(may))/4 annuelles. Les taux de naissance définis à partir des variantes R = (r(t1)+r(t-1)+r(t-2))/3 moyennes des données du rapport World Population Prospects des Nations Unies permettent de simuler la Précipitations et marché du travail : naissance des agents et de les assigner de façon aléatoire à des Chaque mois, le marché du travail structurel de la région est ménages existants. Les agents célibataires âgés de 18 ans ou simulé comme une fonction (f) du scénario de précipitations plus ont 10 pour cent de chances de se marier chaque année. de trois mois (R). C’est pourquoi le scénario des trois derniers Le mariage ne représente aucun lien entre les ménages et ne mois a une influence sur le marché du travail structurel (L), dépend pas du fait qu’il y ait ou non un(e) partenaire éligible. qui peut être moins opportun, moyen ou plus opportun. Dans le modèle, le décès se produit en fonction des taux de Étant donné la relation non-linéaire entre les précipitations décès définis à partir des variantes moyennes des données et le bon comportement du marché du travail, le fait qu’un du rapport World Population Prospects des Nations Unies. scénario de précipitations aboutisse ou non à une catégorie particulière dudit marché dépend du taux de réponses des Interaction sociale : ménages à l’enquête Q412b (mois où le ménage n’a en Le modèle offre deux possibilités d’interaction entre les général pas assez d’argent pour se nourrir). agents ; compétition sur le marché du travail agricole et L = f (R) Juin 2013 communication entre migrants. Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 125 Compétition sur le marché du travail agricole : Les agents-ménages sont situés dans l’un des trois environnements représentant les villages. Les ménages qui se sont définis comme offrant des opportunités d’emploi à d’autres lors de l’enquête auprès des ménages gardent la même capacité d’emploi dans chaque simulation. De même, ceux qui se sont définis comme offrant de la main d’œuvre le font tout au long de la simulation. (Le même ménage peut offrir à la fois des opportunités d’emploi et de la main d’œuvre.) Évaluation de la vulnérabilité du ménage : Suite à l’impact d’un changement dans le régime des précipitations sur le marché du travail structurel et sur les niveaux de production alimentaire, chaque agent-ménage entreprend une évaluation de sa vulnérabilité où le degré de sécurité alimentaire/des moyens de subsistance qu’il expérience à t joue un rôle. Le degré de vulnérabilité de chaque ménage, ou note de vulnérabilité (v), dépend donc de ses revenus (I) et de sa production alimentaire (E), ainsi que de la taille du ménage (H). v = I/H+E/H Le taux d’opportunités d’emploi (o) offertes mensuellement par les ménages éligibles à leur village est une fonction (h) du scénario de précipitations (R) qui touche la région. Le travail est ensuite divisé entre les travailleurs disponibles sur base pseudo-compétitive (b), où le nombre de journées de travail (w) octroyé à un individu n’est pas nécessairement celui qu’il recevrait si celles-ci étaient également réparties entre tous. Revenus : Dans la simulation, les revenus du ménage sont donc une fonction (i) du rendement des récoltes (c), du rendement du cheptel (l), des travaux agricoles (w) et des transferts d’argent par les migrants (s). I = i(c, l, w, s) Seuls les ménages qui ont noté lors de l’enquête que leur o = h(R) w = b(o) utilisation des récoltes/du cheptel contribuait à leurs revenus, sont aptes à tirer un tel bénéfice de leurs terres/bétail. Les revenus des récoltes sont une fonction (j) de la superficie cultivée par un ménage (D) et du niveau de production Communication entre migrants : alimentaire structurelle (F), qui dépend lui-même de la Dans le modèle, les agents-individus sont placés dans qualité des saisons des pluies Vuli et Masika. un réseau social comprenant dix de leurs pairs, avec qui ils partagent des informations sur chacune des activités c = j(D, F) migratoires qu’ils entreprennent. Les réseaux d’agents sont Les revenus de l’élevage sont également affectés par le structurés comme dans le monde réel, mais à moindre échelle. scénario de précipitations de trois mois (R) et sont une 75 pour cent des connexions établies le sont avec des voisins. fonction (k) de l’appartenance ethnique (e) et du degré Non seulement les agents partagent leurs comportements d’impact (k) que selon les ménages, les changements dans migratoires avec leurs pairs, mais ils échangent aussi ces les précipitations ont eu sur le rendement du cheptel. informations avec tous les autres membres de leur ménage. _ 126 l = k(R, e) Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Les revenus des travaux agricoles (w) sont déterminés sur base de la compétition pour ces emplois telle qu’elle est décrite plus haut. Les individus qui appartiennent à un ménage mais sont en train de migrer à t contribuent aussi chaque mois aux revenus du ménage en effectuant des transferts d’argent (s). Dans le format actuel du modèle, la valeur relative des composantes du revenu et leur maximum et minimum mensuels potentiels figurent dans le tableau 5 ci-dessous. Équivalents des composantes : Valeur relative : Revenu mensuel max. : Revenu mensuel min. : Rendement des cultures par acre de terre (y) 6 0,5 0-0,05 Note du cheptel (l) : 1 x Vache 1 0,25 0-0,05 1 x Âne 0,5 0,125 0-0,025 1 x Boeuf 0,5 0,125 0-0,025 1 x Cochon 0,5 0,125 0-0,25 1 x Chèvre 0,25 0,063 0-0,0125 1 x Poule 0,1 0,025 0-0,05 Travail d’une personne/jour (w) 0,25 5 0-0,25 Transferts d’argent d’un migrant (s) 1 1 1 Tableau 5 : Valeur relative des composantes du revenu Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 127 Production alimentaire : processus d’épreuve de sensibilité. En activant le modèle Pour que la sécurité des moyens de subsistance soit envisagée tanzanien sans y inclure de processus migratoire de la part sous l’angle de la sécurité alimentaire et des revenus, la des membres du ménage (et donc aucune contribution aux production alimentaire (E) est une fonction (q) du rendement revenus du ménage par le biais de transferts d’argent) mais des cultures (c) et de celui du cheptel (l) avec un classement constant au niveau « moyen » tant pour le marché structurel du travail que pour la production E = q(c, l) alimentaire structurelle, un seuil de vulnérabilité de T=0.04 conduit à un état d’équilibre du classement de la vulnérabilité Vu cette double approche (revenus et production des ménages pendant toute la période de simulation. Toute alimentaire), différents types de ménage peuvent être classés déviation de T=0.04 entraîne un changement graduel du comme « vulnérables » pour différentes raisons. Un ménage contenu et des catégories vulnérables au fil du temps. à très bas revenu peut ne pas devenir vulnérable étant donné le niveau de production alimentaire dont il a besoin pour Processus décisionnel concernant la migration : subsister. Par contraste, un ménage ayant une production Vulnérables ou non, les ménages prennent des décisions alimentaire très faible ne sera pas vulnérable s’il bénéficie de en matière de migration qui, même si elles passent par revenus relativement plus élevés. Les fonctions Rendement l’agent-ménage, dépendent largement des attributs des des cultures et du cheptel pour la production alimentaire individus. Que le ménage soit vulnérable ou satisfait, ses fonctionnent de la même manière que celles qui paraissent membres individuels développent tous une propension (P) contribuer aux revenus mais elles dépendent du fait que les à la migration qui est conditionnée par leur attitude envers ménages ont cité la production agricole/l’élevage comme celle-ci (A) et leurs normes subjectives (S). servant à l’alimentation du ménage et non à la vente. P = A+0.5S Seuil de vulnérabilité : En comparant leur note de vulnérabilité (v) à un seuil de L’attitude d’un individu (A) envers la migration est une vulnérabilité (T), les ménages peuvent être considérés fonction (u) de la catégorie foncière de son ménage (d), de comme vulnérables aux perturbations pluviométriques et son âge (a), de son sexe (g) et de son état civil (m). conscients d’un besoin imminent de rectifier leur situation. Les ménages qui ont une note de vulnérabilité suffisante pour A = u(d, a, g, m) les empêcher de devenir vulnérables sont considérés comme satisfaits et aptes à poursuivre leurs stratégies d’adaptation. Le seuil de vulnérabilité (T) est fixé à 0,04 suite à un _ 128 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 On déduit l’attitude d’un individu envers la migration de Vulnérabilité : l’analyse des attributs de ceux qui, dans l’enquête auprès des ◆ Un acre de terre produit le même rendement, quel que soit ménages, sont notés comme ayant émigré. Si l’attitude d’un le lieu. individu est supérieure à 0, sa norme subjective est dérivée ◆ Les opportunités de travail agricole dans un village seront du nombre de migrants actuels appartenant à la famille de saisies par ceux qui vivent déjà dans ce village. On n’introduit l’agent (B) et au réseau des pairs (n) en rapport avec la taille donc pas d’effet d’attraction pour les migrants dans les lieux du ménage (H) et du réseau de pairs (N). étudiés. B n S= —+— H N ◆ Les revenus du ménage ne reçoivent aucun supplément provenant d’activités non agricoles (dans ce modèle La propension à la migration de chaque individu est préliminaire). rapportée au ménage et classée de la plus forte à la plus ◆ Les récoltes et non le cheptel constituent la principale faible. Les ménages évaluent alors leur capacité à investir source de revenus du ménage et de production alimentaire. dans la migration, leur maîtrise comportementale perçue (C), ◆ Les terres agricoles représentent donc un flux d’actifs alors dérivée comme une fonction (y) de leurs revenus (I), de leur que les animaux d’élevage représentent un stock (sauf, dans patrimoine (G), du nombre de migrants du ménage qui sont une certaine mesure, pour la population masaï). déjà partis (B) et du coût de la migration (Q). Les revenus excédentaires détenus à la fin d’un mois civil C = y (I, G, B, Q) Le coût de la migration (Q) est fixé à 1 (pour une comparaison directe avec les sources de revenus potentielles relatives produisent une augmentation marginale des biens du ménage. du tableau 5 ci-dessus). Par contre, le coût des formes Migration : vulnérables de migration est fixé à 50 pour cent (0.5Q) du ◆ Le coût de la migration est le même pour tous les ménages, coût normal de la migration (0,5). même si les types de migration diffèrent, selon qu’elle est Hypothèses clés/demography: ◆ Le décès peut toucher n’importe quel agent à n’importe quel point du temps modélisé, quel que soit son âge. ◆ Aucun nouveau ménage n’apparaît. Le mariage est une fonction statistique et ne représente pas une union entre satisfaite ou vulnérable. ◆ Toutes les migrations modélisées sont des migrations de travail. ◆ Toutes les migrations sont réussies et produisent un bénéfice standard pour le ménage. ◆ Les capacités d’un ménage à investir dans la migration et deux ménages. ◆ Les agents deviennent économiquement actifs et éligibles pour le mariage à l’âge de 18 ans. sa volonté d’y parvenir diminuent en fonction du nombre de migrants. ◆ La propension à la migration d’un individu est la même dans des conditions avec impact (vulnérable) et sans (satisfaite). Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 129 9.2 Cartographie et références Données sur la pauvreté variabilité Azzarri, C., Wood, S., Hyman, G., Barona, E., Bacou, M. et pluviométrique) produites pour ce rapport ont été créées Guo, Z. 2012. Sub-national Poverty Map for Sub-Saharan à partir d’ensembles de données provenant de diverses Africa at 2005 International Poverty Lines (r12.04). http:// sources, et référencés ci-dessous. Lorsque l’une de ces séries harvestchoice.org/. (Ghana, Tanzanie) [Carte infranationale n’a servi que pour certains pays, ceux-ci sont indiqués entre de la pauvreté pour l’Afrique subsaharienne] Les cartes (et autres graphiques sur la parenthèses à la fin de la citation. Centre pour un réseau international d’information sur les Ces cartes sont le fruit du travail de Tricia Chai-Onn et Dara sciences de la Terre (CIESIN)/Université Columbia. 2005. Mendeloff (membres de GIS) et d’Al Pinto (cartographe), Poverty Mapping Project: Small Area Estimates of Poverty sous la supervision d’Alex de Sherbinin, du Centre pour un and Inequality. Palisades, NY: NASA Socioeconomic Data réseau international d’information sur les sciences de la Terre and Applications Center (SEDAC). http://sedac.ciesin. (CIESIN), qui dépend de l’Institut de la Terre de l’Université columbia.edu/data/set/povmap-small-area-estimates- Columbia. Le travail de cartographie a été entièrement poverty-inequality. (Guatemala, Viet Nam) [Cartographie de effectué à l’aide du logiciel ArcGIS v10 puis a été converti la pauvreté : estimations sur la pauvreté et l’inégalité] en images dans Adobe Illustrator pour la production finale. L’analyse des données climatiques pour les diagrammes Centre pour un réseau international d’information sur les situés dans le coin inférieur droit de chaque carte est l’œuvre sciences de la Terre (CIESIN). 2011. Global Infant Mortality de Michael Bell et John Del Corral, de l’Institut international Grid, 2008. Palisades, NY: CIESIN, Institut de la Terre de de recherche pour le climat et la société (IRI), qui fait partie, l’Université Columbia. [Cette série de données, mise à lui aussi, de l’Institut de la Terre de l’Université Columbia. Ils jour en 2008, est issue de la série de données publiques ont puisé dans la collection de données climatologiques de suivante : Centre pour un réseau international d’information l’IRI pour produire la série de données sur les tendances et sur les sciences de la Terre (CIESIN)/Université Columbia. variations en se basant sur le maillage des différentes zones 2005. Poverty Mapping Project: Global Subnational Infant étudiées. Mortality Rates. Palisades, NY: NASA Socioeconomic Data and Applications Center (SEDAC). http://sedac.ciesin.columbia.edu/data/set/povmap-globalsubnational-infant-mortality-rates.] (Bangladesh, Inde, Pérou, Thaïlande) [Cartographie de la pauvreté : Taux de mortalité infantile infranationaux] _ 130 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Zones urbaines Ocean Basemap. 2012. GEBCO, NOAA, CHS, OSU, UNH, CSUMB, National Geographic, DeLorme, NAVTEQ, et ESRI. Centre pour un réseau international d’information sur les sciences de la Terre (CIESIN)/Université Columbia, Institut International de Recherche sur les Politiques Alimentaires (IFPRI), Banque mondiale et Centre international d’agriculture tropicale (CIAT). 2011. Global Rural-Urban Mapping Project, Version 1 (GRUMPv1): Urban Extents Grid. Palisades, NY: NASA Socioeconomic Data and Applications Center (SEDAC). http://sedac.ciesin.columbia.edu/data/ set/grump-v1-urban-extents. [Cartographie mondial ruraleurbaine] Précipitations moyennes (carton en médaillon) New, M., Lister, D., Hulme, M. et Makin, I. 2002: A highresolution data set of surface climate over global land areas. Climate Research 21:1-25. Données disponibles sur http:// www.cru.uea.ac.uk/cru/data/hrg/tmc/. [Série de données haute résolution sur le climat des zones terrestres] Terres agricoles (carton en médaillon) Fond cartographique Fischer, G., Nachtergaele, F., Prieler, S., van Velthuizen, DeLorme Publishing Company, Inc., 2010, Roads.sdc: un sous-ensemble de DeLorme World Base Map (DWBM). 2010, DeLorme Publishing Company, Inc., Yarmouth, Maine, États-Unis. H.T., Verelst, L. et Wiberg, D. 2008. Global Agro-ecological Zones Assessment for Agriculture (GAEZ 2008). Laxenburg, Autriche et Rome, Italie : IIASA et FAO. [Évaluation des zones agro-écologiques pour l’agriculture] Lehner, B., Reidy Liermann, C., Revenga, C., Vörösmarty, C., Variabilité pluviométrique/fréquence Fekete, B., Crouzet, P., Doll, P., Endejan, M., Frenken, K., (carton en médaillon) des sécheresses Magome, J., Nilsson, C., Robertson, J.C., Rodel, R., Sindorf, N., Wisser, D. 2011. Global Reservoir and Dam Database, Variabilité pluviométrique/fréquence des sécheresses (carton Version 1 (GRanDv1): Reservoirs, Revision 01. Données en médaillon) fournies par le NASA Socioeconomic Data and Applications Ce carton représente le coefficient de variation des Center précipitations (SEDAC). http://sedac.ciesin.columbia.edu/data/ multiplié par l’indice de précipitations collection/grand-v1. [Base de données mondiale sur les standardisé (SPI) sur six mois. Le SPI représente le nombre barrages et réservoirs] d’écarts-type de la valeur observée par rapport à la moyenne à long terme pour une variable normalement National Geographic Basemap. 2012. National Geographic, distribuée de façon aléatoire. Comme les précipitations ESRI, DeLorme, NAVTEQ, PNUE-WCMC, USGS, NASA, ne sont pas normalement distribuées, on procède d’abord ESA, METI, NRCAN, GEBCO, NOAA, IPC. à un ajustement pour transformer les valeurs ajustées des Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 131 précipitations en une distribution statistique normale. Les climatologiques (CPC) : CPC Unified Precipitation gauge données proviennent du site suivant : based global data set, v1p0. [Analyse des précipitations mondiales] PNUE (Programme des Nations Unies pour l’environnement). Ces données sont produites à une résolution de 0,5° lat/ 2010. Global Risk Data Platform: Drought Coefficient of lon. À télécharger sur : http://iridl.ldeo.columbia.edu/ Variation. Disponible à l’adresse suivante : http://preview. SOURCES/.NOAA/.NCEP/.CPC/.UNIFIED_PRCP/.GAUGE_ grid.unep.ch/?preview=home&lang=fr (Consulté en juillet BASED/.GLOBAL/.v1p0/. (Pérou uniquement) 2010) National Oceanographic and Atmospheric Administration Précipitations pendant la saison des pluies : déviation par rapport à la moyenne (graphique) Toutes les données proviennent (NOAA), Centres nationaux pour la prévision environnementale (NCEP), Centre de prévisions climatologiques (CPC) : CPC Merged Analysis of Precipitation (CMAP): Analyses of global de l’informathèque de l’IRI. On trouvera ci-dessous les séries utilisées. Le document complet sur les sources originales des données est téléchargeable sur le lien « dataset documentation » precipitation using gauge observations, satellite estimates, and numerical model predictions. [Analyse des précipitations mondiales] Ces données sont produites à une résolution de 2,5° lat./ disponible pour chacune des URL reprises ci-dessous. lon. et téléchargeables sur http://iridl.ldeo.columbia.edu/ Il est à noter que ces sources originales représentent des monthly/. (Ghana, Guatemala, Tanzanie) données mondiales de réanalyse maillées et basées sur les données des stations météorologiques disponibles (pour CPC Unified) et sur des données satellitaires et des modèles numériques (pour CMAP et Aphrodite), la couverture des données observées étant souvent peu fournie. Cela signifie que les résultats de l’analyse de la variabilité et des tendances pluviométriques seront différents de ceux obtenus par les stations météorologiques locales et repris dans les rapports des études nationales. SOURCES/.NOAA/.NCEP/.CPC/.Merged_Analysis/. Research Institute for Humanity and Nature (RIHN), Institut de recherche météorologique de l’Agence japonaise de météorologie : RIHN aphrodite Asian precipitation from APHRODITE V1003R1. Ces données sont produites à une résolution de 0.5° lat./ lon. et téléchargeables sur http://iridl.ldeo.columbia.edu/ SOURCES/.RIHN/.aphrodite/.V1003R1/. (Bangladesh, Inde, Thaïlande et Viet Nam) National Oceanographic and Atmospheric Administration (NOAA), Centres environnementale _ 132 nationaux (NCEP), pour Centre la de prévision prévisions Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 133 10- Notes 1 La sécurité alimentaire peut être définie comme une « 6 3.5° C : d’après le Climate Action Tracker http:// situation […] où toutes les personnes, en tout temps, ont climateactiontracker.org/news/116/Durban-Agreements- économiquement, socialement et physiquement accès à une a-step-towards-a-global-agreement-but-risk-of-exceeding- alimentation suffisante, sûre et nutritive qui satisfait leurs 3C-warming-remains-scientists.html ; 6° C d’après l’AIE. besoins nutritionnels et leurs préférences alimentaires pour 7 leur permettre de mener une vie active et saine ». FAO, « migrants climatiques » dans un rapport du Programme L'état de l’insécurité alimentaire dans le monde 2001, Rome des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). D’autres : FAO, 2002. auteurs et institutions, comme l’Organisation internationale 2 Tubiello, F. N., et G. Fischer. 2007. Reducing climate El-Hinnawy, E. (1985) a proposé la première définition de pour les migrations (OIM), ont affiné et complété sa change impacts on agriculture: Global and regional effects of définition en 2007. mitigation, 2000-2080. Technological Forecasting and Social 8 Change 74 : 1030-56 environnementale actuelle et future : Myers, N. (2005) Le document suivant tente de chiffrer la migration Jennings, S. and J. Magrath. What happened to the Environmental Refugees: An Emergent Security Issue. 13e seasons? Article présenté à la Conférence sur la saisonnalité, Forum économique, Prague, 23-27 mai. Christian Aid (2007) Future Agricultures Consortium International. 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Rapport des Groupes de travail I première enquête mondiale de ce genre, qui s’appuie et II du GIEC. [Field, C.B., V. Barros, T.F. Stocker, D. Qin, sur un travail de terrain pour explorer les changements D.J. Dokken, K.L. Ebi, M.D. Mastrandrea, K.J. Mach, G.- environnementaux et la migration dans 23 études de cas. K. Plattner, S.K. Allen, M. Tignor, et P.M. Midgley (eds.)]. Warner et al. (2009) (« In Search of Shelter ») ont fait Version anglaise : Cambridge University Press, Cambridge, connaître les résultats d’EACH-FOR aux décideurs politiques, 5 Royaume-Uni, et New York, NY, États-Unis, 582 p. Résumé en particulier dans le cadre du processus CCNUCC. en français à l’intention des décideurs : https://docs.google. 10 com/file/d/0B1gFp6Ioo3akZWloNDdVZGkzeDg/edit?pli=1 Genève, Organisation internationale pour les migrations _ 134 Hugo (2008) Migration, development and environment. Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Brown, O (2008), Migrations et changements climatiques, 2009. Lilleør, H.B., Van den Broeck, K., Economic drivers Organisation internationale pour les migrations (OIM), Série of migration and climate change in LDCs. Global Environ. Migration Research n° 31, Genève, OIM / Morrissey (2009) Change « Environmental Change and Forced Migration: A State Warner, K., C. Ehrhart, A. de Sherbinin, S. Adamo, and T. of the Art Review°». Document d’information du Centre Chai-Onn (2009) In search of shelter: Mapping the effects d’études sur les réfugiés. Oxford : Centre d’études sur les of climate change on human migration and displacement. réfugiés. / Tacoli (2009) « Crisis or Adaptation? Migration CARE/CIESIN/UNHCR/UNU-EHS/World and Climate Change in a Context of High Mobility.°» p. 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Document d’analyse n° 201. d’information pour l’équipe d’étude transatlantique sur le Février 2011. changement climatique et la migration du Fonds Marshall 14 pour l’Allemagne. Gemenne (2010) « La migration, une patterns and shorelines will contribute to mass migrations on stratégie d’adaptation possible ? Synthèse », IDDRI, Science a scale never before seen. Scientific American, janvier 2011. Po, Paris. Thomas et Rendón (2010) « Confronting climate Hummel et al. (2012) Climate Change, Environment and displacement: Learning from Pakistan’s floods°». Refugees Migration in the Sahel. Selected Issues with a Focus on International, Washington. Warnecke, A., Tanzler, D., Vollmer, Senegal and Mali. Document de travail n°1. Francfort-sur- R.(2010) Climate change, migration, and conflict: Receiving le-Main. Renaud, F. Dun, O., Warner, K. Bogardi, J. (2011) A communities under pressure. 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Rainfall variability, food security climate adaptation: Social networks and co-development in and human mobility: An approach for generating empirical On trouvera une description des méthodes de terrain et des Northwest Africa. Applied Geography (2011), doi:10.1016/j. evidence. InterSecTions n° 10. Bonn : UNU-EHS. apgeog.2011.10.002. McAdam et Saul (2010) An Insecure 16 Climate for Human Security? Climate-Induced Displacement d’approches novatrices dans des études comme : Groenewold and International Law. Sydney Centre, Document de travail et Bilsborrow (2008) Design of samples for international 4. Bronen (2011) Forced Migration of Alaskan Indigenous migration surveys: Methodological considerations and Communities due to Climate Change, in Afifi et Jäger (eds.) lessons learned from a multi-country study in Africa and Environment, Forced Migration and Social Vulnerability p Europe. I: Bonifazi et al. (2008): Migration in Europe. 87-98, Springer, Heidelberg. 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Climate change (Wiley Interdisciplinary Reviews) _ 136 Les méthodes de recherche « Rainfalls » se sont inspirées Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 1, issue 4, 517-524. Piguet et al. (2011) Migration and élevé, moyen ou bas, le seuil se situant aux points suivants : climate change. Cambridge University Press. Cambridge. revenu annuel par habitant (bas = moins de 1 000 dollars US, Pour une réflexion sur la migration en tant que stratégie de moyen = > 1 000 dollars US et < 3 000 dollars US, élevé = gestion des risques : Stark et Zakharenko (2012a) Differential > 3 000 dollars US) ; indice du développement humain (bas, Migration Prospects, Skill Formation, and Welfare. Review of moyen, élevé et très élevé en suivant la définition du PNUD) International Economics, Vol. 20. Stark et Janubek (2012b). et nutrition (retard de croissance modéré et aigu de > 40 % = Migration networks as a response to financial constraints: bas, > 20 % < 40 % = modéré, et < 20 % = élevé). Onset and endogenous dynamics. Journal of Development 20 Economics, 2012. certain nombre d’indicateurs qui permettent de se faire Les huit pays sélectionnés ont aussi été classés selon un Pour une documentation complète sur les instruments une idée des changements survenus aux plans économique de recherche, voir le protocole de recherche « Rainfalls » et démographique. Les trois variables suivantes ont été (Rademacher et al. (2012)) sélectionnées en raison de leur pertinence pour les recherches 17 Ce qui distingue un échantillon aléatoire d’un échantillon du projet « Rainfalls » : (1) Croissance annuelle moyenne aléatoire stratifié, c’est que le deuxième permet d’inclure des du PIB, 2007-2011 (Source : Rapport sur le développement sous-populations clés. dans le monde 2012, Banque mondiale) ; (2) Contribution de 18 Pour classer les pays de recherche, il faut avant tout l’agriculture au PIB (Source : Rapport sur le développement leur attribuer une place en termes de développement dans le monde, Banque mondiale) et (3) Taux annuel de socioéconomique. À cette fin, et conformément au fait croissance de la population, 2011 (Source : Rapport sur que le projet s’intéressait tout particulièrement à la sécurité le développement dans le monde, Banque mondiale). alimentaire, on a eu recours à trois indicateurs largement Pour chacune de ces variables, les pays ont été classés en diffusés : (1) Produit national brut par habitant (Source : utilisant les seuils suivants : Croissance économique (élevée = Rapport sur le développement dans le monde 2012 : Égalité croissance annuelle de > 6 %, faible = croissance annuelle de des genres et développement, 2011, Banque internationale < 4 %) ; Perspectives d’emploi non agricole (élevées = < 20 pour développement/Banque % de la valeur ajoutée en agriculture, faibles = > 20 % de la mondiale, Washington, DC ; (2) Indice du développement valeur ajoutée en agriculture) ; et Progrès dans la gestion de humain (Source : Rapport sur le développement humain la croissance de la population (élevé = croissance annuelle de 2011, Durabilité et équité : un meilleur avenir pour tous, © < 1 %, modéré = croissance annuelle de > 1 % <20%, faible 19 la reconstruction et le 2011, Programme des Nations Unies pour le développement) = croissance annuelle de > 2 %). ; et (3) Pourcentage des enfants de moins de cinq ans 21 souffrant d’un retard de croissance modéré à aigu (Source : La de : Promburom, Panomsak ; Sakdapolrak, Patrick (2012). situation des enfants dans le monde 2012 : les enfants dans Projet « Là où tombe la pluie ». Étude de cas : Thaïlande. un monde urbain, Fonds des Nations Unies pour l’enfance Résultats de la province de Lamphun, Thaïlande. Rapport (UNICEF), février 2012.) Les catégories étaient les suivantes : n° 7. Bonn : Institut de l’Université des Nations Unies pour Juin 2013 Les informations reprises dans cette section sont tirées Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 137 l’environnement et la sécurité humaine (UNU-EHS). 22 Piguet et al. (2011) Migration and climate change. Cambridge University Press. Cambridge. Nations Unies pour l’environnement et la sécurité humaine (UNU-EHS). 29 Les informations reprises dans cette section sont tirées de PNUD 2010 : Human security today and tomorrow. Thai : Rademacher-Schulz, Christina, et Edward Salifu Mahama human development report 2009. Bangkok : Programmes (2012). Projet « Là où tombe la pluie ». Étude de cas : Ghana. des Nations Unies pour le développement. Résultats du district de Nadowli, Haut Ghana occidental, 23 Les informations reprises dans cette section sont tirées Ghana. Rapport n° 3. Bonn : Institut de l’Université des de : Ho, Raúl ; Milan, Andrea (2012). Projet « Là où tombe Nations Unies pour l’environnement et la sécurité humaine 24 la pluie ». Étude de cas : Pérou. Résultats de la province (UNU-EHS). de Huancayo, Pérou. Rapport n° 5. Bonn : Institut de 30 l’Université des Nations Unies pour l’environnement et la définie comme un déplacement de moins de six mois, alors sécurité humaine (UNU-EHS). que la migration temporaire dure six mois à deux ans. Tout 25 MINAM (Peruvian Ministry of Environment). Segunda Dans le présent ouvrage, la migration saisonnière est déplacement de plus de deux ans est considéré comme une Comunicación Nacional del Perú a la Convencion Marco de migration permanente. las Naciones Unidas sobre Cambio Climático. Lima, Peru : 31 MINAM, 2010. agricultural planning in West Africa, Mitteilungen/Institut für 26 Les informations reprises dans cette section sont tirées de Laux 2009. Statistical modeling of precipitation for Wasserbau, Université de Stuttgart, Heft 179, ISSN 0343- : Khoa, Nguyen Viet ; Thao, Nguyen Cong ; van der Geest, 1150, 198 pages. Kees (2012). Projet « Là où tombe la pluie ». Étude de cas 32 : Viet Nam. Résultats de la commune de Hung Thanh dans « l’éducation » ont donné comme raisons de leur migration Les migrants ne se déplaçant ni pour le « travail » ni pour le delta du Mékong, Viet Nam. Rapport n° 8. Bonn : Institut le « mariage » (5 %) et « autres » (2 %). de l’Université des Nations Unies pour l’environnement et la 33 sécurité humaine (UNU-EHS). recherches de terrain effectuées par Sergio Rolando Ruano 27 Les informations reprises dans cette section sont tirées de Les informations reprises dans cette section sont tirées de et Andrea Milan dans le district de Cabricán, au Guatemala. MS (1999) « El Niño and Health°». Équipe spéciale sur le : Murali, J. ; Afifi, T. (2012). Projet « Là où tombe la pluie ». 34 Étude de cas : Inde. Résultats de Janjgir-Champa, Inde. changement climatique et la santé. Genève, Suisse. ; SNET Rapport n° 4. Bonn : Institut de l’Université des Nations Unies (2010) « El Niño y la Oscilaciòn del Sur°». Ministerio de pour l’environnement et la sécurité humaine (UNU-EHS). Medio Ambiente y Recursos Naturales –MARN-. El Salvador. Les informations reprises dans cette section sont tirées de : Voir aussi: OMS (2000), « El Niño et ses répercussions sur la Ahsan, Uddin Ahmed ; Hassan, Selim Reza ; Etzold, Benjamin santé », Aide-mémoire n° 192, https://apps.who.int/inf-fs/ 28 ; Neelormi, Sharmind (2012). Projet « Là où tombe la pluie ». fr/am192.html Étude de cas : Bangladesh. Résultats du district de Kurigram, 35 Bangladesh. Rapport n° 2. Bonn : Institut de l’Université des Water Balances in Guatemala°», American Geophysical _ 138 Pedreros et al (2010) « The Effect of El Niño on Agricultural Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Union, Réunion convoquée à l’automne 2010. Plattner, S.K. Allen, M. Tignor, et P.M. Midgley (eds.)]. Les informations reprises dans cette section sont tirées de : Cambridge University Press, Cambridge, Royaume-Uni, et Liwenga, Emma T. ; Kwezi, Lukas ; Afifi, Tamer (2012). Projet New York, NY, États-Unis, 582 p. Résumé à l’intention des « Là où tombe la pluie ». Étude de cas : Tanzanie. Résultats décideurs : © 2012, Groupe d’experts intergouvernemental du district de Same, Tanzanie. Rapport n° 6. Bonn : Institut sur l’évolution du climat, https://www.ipcc-wg1.unibe.ch/ 36 de l’Université des Nations Unies pour l’environnement et la srex/downloads/SREX_SPM_French.pdf sécurité humaine (UNU-EHS). 41 3,5°C d’après le Climate Action Tracker http:// ILes répondants à l’enquête auprès des ménages ne climateactiontracker.org/news/116/Durban-Agreements- donnaient pas toujours une réponse précise. Dans de tels cas, a-step-towards-a-global-agreement-but-risk-of-exceeding- 37 l’enquêteur ne réitérait pas la question. Il arrivait aussi que les 3C-warming-remains-scientists.html ; 6 °C d’après l’AIE. personnes interrogées donnent deux réponses là où il n’en 42 fallait qu’une. C’est pourquoi, dans des cas exceptionnels, the global scale°». Institut Walker pour la recherche sur le il arrive qu’en additionnant les pourcentages de ce tableau système climatique. Université de Reading et équipe du (surtout pour la Thaïlande, le Pérou et l’Inde), on arrive à projet QUEST-GSI, 2009. Article présenté à la conférence Voir par exemple Arnell, N. « Beyond 4° C: Impacts across une somme totale légèrement supérieure ou légèrement internationale « 4° C and beyond°», Oxford, septembre inférieure à 100 pour cent. 2009. 38 Paavola, J. 2003 Vulnerability to Climate Change in 43 Le cadre d’adaptation de Cancún comprend des dispositions Tanzania: Sources, Substance and Solutions. Article présenté sur un ensemble d’approches en matière de gestion des lors de l’atelier inaugural de l’initiative sur la vulnérabilité en risques (paragraphe 14), ainsi que des conseils sur une série Afrique australe (SAVI), Maputo, Mozambique, 19-21 juin de questions de mobilité humaine liées aux changements 2003. climatiques (paragraphe 14(f)). La sécurité alimentaire et des 39 Agrawala, S., Moehner, A., Hemp, A., van Aalst, M., moyens de subsistance est mentionnée dans les notes en bas Hitz, S., Smith, J., Meena, H., Mwakifwamba, S.M., Hyera, de page. T. et Mwaipopo, O.U., (2003), Development and Climate 44 Change in Tanzania: Focus on Kilimanjaro, Organisation l ’ O N U : h t t p : / / w w w. u n . o r g / a p p s / n e w s / s t o r y de coopération et de développement économiques, Paris : asp?NewsID=42298&Cr=refugee&Cr1=climate. France. Liens vers le site de la conférence Nansen 2011 : http:// 40 GIEC, 201 : Gestion des risques de catastrophes et de Initiative Nansen : Communiqué de presse de www.nansenconference.no/ et le rapport de la conférence : phénomènes extrêmes pour les besoins de l’adaptation au http://www.unhcr.org/4ea969729.pdf changement climatique. Rapport des groupes de travail I et 45 II du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution la migration dans le contexte de l’adaptation aux impacts du du climat [Field, C.B., V. Barros, T.F. Stocker, D. Qin, D.J. changement climatique. 1/CP.16, paragraphes 11-35 ; le paragraphe 14(f) aborde Dokken, K.L. Ebi, M.D. Mastrandrea, K.J. Mach, G.-K. Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 139 À propos du projet Where The Rain Falls Le projet de recherche « Where The Rain Falls : Changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration » est un partenariat entre CARE International et l’Institut pour l’Environnement et la Sécurité Humaine de l’Université des Nations Unies (UNU-EHS). Il bénéficie de l’appui financier du Fonds pour la recherche du Groupe AXA et de la Fondation John D. et Catherine T. MacArthur. Son ambition est de permettre aux universitaires, praticiens et décideurs de mieux comprendre comment la variabilité des précipitations affecte la sécurité alimentaire et des moyens de _ 140 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 subsistance et pèse sur les décisions des ménages en matière de 3) collaborer avec les communautés pour identifier des mobilité/migration au sein des populations particulièrement moyens de gérer la variabilité pluviométrique, la sécurité exposées aux impacts du changement climatique. L’étude alimentaire et des moyens de subsistance et la migration. se focalise sur les variations pluviométriques tant perçues que mesurées (p. ex. longues périodes sèches ou humides, Le projet explore les trois questions suivantes (qui ont un sécheresses ou inondations, précipitations erratiques) et le rapport direct avec les trois objectifs de recherche cités ci- décalage des saisons. Les variations pluviométriques influent dessus) : sur le rendement des cultures et l’élevage du cheptel, ce qui peut avoir une incidence sur la production alimentaire 1) Dans quelles circonstances les ménages envisagent-ils la locale, la disponibilité alimentaire et les prix et provoquer migration comme stratégie de gestion des risques en réponse une insécurité et des pénuries alimentaires. En général, les à une variabilité pluviométrique accrue et à l’insécurité habitants adoptent diverses stratégies pour surmonter le alimentaire ? stress et les variabilités associés à la sécurité alimentaire et des 2) Quels sont les scénarios où la variabilité pluviométrique moyens de subsistance. Nous avons essayé de comprendre et la sécurité alimentaire seront susceptibles d’influencer pourquoi fortement la mobilité humaine dans certaines régions du certaines populations réagissent de façon différente aux difficultés que causent l’instabilité des régimes monde au cours des 20 ou 30 années à venir ? climatiques et l’insécurité alimentaire. Nous avons cherché à 3) Dans le contexte du changement climatique, quel savoir dans quelle mesure les modifications météorologiques ensemble de politiques garantira au mieux le caractère pèsent sur les décisions en matière de migration, laquelle volontaire de la mobilité humaine, c’est-à-dire son choix est l’un des mécanismes auxquels ont fréquemment recours parmi d’autres mesures de gestion des risques liés aux ceux qui éprouvent ce type de pénibilité. changements climatiques, plutôt que de la perpétuer comme une stratégie de survie, adoptée après épuisement de toutes Le projet s’est fixé trois objectifs : les autres possibilités ? Le projet explore ces alternatives dans 1) comprendre les interactions actuelles entre variabilité certaines régions du monde particulièrement affectées. pluviométrique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migrations ; Vous pouvez consulter les études de cas, la modélisation et 2) comprendre les interactions potentielles de ces facteurs au obtenir des renseignements supplémentaires sur nos sites cours des décennies à venir, lorsque l’impact des changements web : www.wheretherainfalls.org, www.ehs.unu.edu, www. climatiques commencera à se faire plus fortement sentir ; carefrance.org et www.careclimatechange.org . Juin 2013 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration _ 141 Imprint UN Campus, Hermann-Ehlers-Str. 10, 53113 Bonn, leur source. La notice suivante figurera de façon visible sur Tel.: + 49-228-815-0200, Fax : + 49-228-815-0299 toute reproduction : « Where The Rain Falls : Changement e-mail : [email protected] climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration » © 2012 CARE France. Reproduction autorisée. Copyright : © UNU-EHS & CARE France 2012 and 2013 Le rapport et des images haute résolution sont disponibles à Design : Souple/HOP! l’adresse suivante : www.wheretherainfalls.com Translation : WordLink Impression : Sopedi ISBN : 978-3-944535-04-3 Print run : 1500 e-ISBN : 978-3-944535-05-0 Les opinions exprimées dans le présent rapport sont celles Impression respectueuse de l’environnement de leurs auteurs et ne représentent pas nécessairement celles de l’Université des Nations Unies, de CARE International, de l’Université Columbia ou du projet « Where the Rain Falls Warner, K., Afifi, T., Henry, K., Rawe, T., Smith, C., de » (Where The Rain Falls). Questions et commentaires sont Sherbinin, A. (2012). Where The Rain Falls : Changement les bienvenus. Prière de les adresser aux auteurs principaux climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance par l’intermédiaire de Koko Warner ([email protected]. et migration. Analyse et conclusion de la phase de recherche edu) ou Kevin Henry ([email protected]). Les requêtes du projet « Where the Rain Falls ». Bonn : UNU et CARE des médias sont à adresser à Kimberly Bennett (bennett@ carefrance.org). L’Université des Nations Unies et CARE donnent permission à toutes les organisations à but non lucratif de reproduire le présent ouvrage, en tout ou en partie, à condition de citer _ 142 Where The Rain Falls (Là où tombe la pluie) : changement climatique, sécurité alimentaire et des moyens de subsistance et migration Juin 2013 Le projet « Where the Rain Falls » (Là Où Tombe La Pluie) évalue l’impact des variations de la pluviosité sur les sociétés, grâce à une compréhension plus détaillée des liens entre variation pluviométrique, sécurité alimentaire, moyens de subsistance et migration dans huit pays d’étude : Bangladesh : Kurigram, division de Rangpur Ghana : district de Nadowli, région du Haut Ghana Occidental Guatemala : municipalité de Cabricán, département de Quetzaltenango Inde : district de anjgir-Champa, Etat de Chhattisgarh Pérou : district de Huancayo, région de Junín Tanzanie : district de Same, région du Kilimanjaro Thaïlande : district de Thung Hua Chang, nord de la Thailande Viet Nam : province de Dong Thap Le changement climatique entraîne déjà des évènements climatiques extrèmes, comme des sécheresses et des innondations, donnant lieu à des situations d’insécurité alimentaire et déplacements de populations. Les résultats de cette étude permettront de guider les politiques en termes de changement climatique et leur mise en œuvre, en prenant en compte des aspects pratiques importants, et ainsi, lutter contre la pauvreté en protégeant les populations les plus vulnérables. L’ensemble des résultats et des enseignements tirés du projet – un protocole de recherche, un rapport d’étude de cas ainsi qu’un rapport de synthèse à destination des responsables politiques – sont disponibles à l’adresse suivante : www.wheretherainfalls.org. Un projet de : Soutenu par : Copyright © CARE France et UNU-EHS. Juin 2013