Toujours de l`autre côté : la position de la Turquie par rapport à l

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Toujours de l`autre côté : la position de la Turquie par rapport à l
Toujours de l'autre côté : la position de la Turquie
par rapport à l'Europe
Analyse du film « De l'autre côté » réalisé par Akin Fatih en
2007
Introduction
La reconnaissance pour la Turquie du statut de candidat à l'entrée dans
l'Union européenne en 1999 (la Turquie était « membre associé » depuis
1963) a « marqué un tournant dans l'histoire, parfois difficile, des relations
entre Bruxelles et Ankara »1. Cet événement a causé un intérêt renouvelé
pour la Turquie en Europe, que ce soit dans les discussions politiques ou
encore dans l'art, et plus particulièrement dans l'art cinématographique, qui
retrace la succession des événements contemporains beaucoup plus vite
que les autres arts. Le film « De l'autre côté »2 réalisé par Akin Fatih
(realisateur d'origine turque, né en Allemagne) en 2007 s'inscrit dans ce
champ thématique. En donnant des visions parallèles de l'Europe et de la
Turquie, Akin Fatih souligne les principaux problèmes qui empêchent
l'intégration de cette dernière dans l'Union européenne.
Dans ce travail, on s’attachera à l'analyse de l'image de l'Europe, qui
s'est créée en contraste avec l'image de la Turquie. Premièrement, l'objet de
notre analyse sera la religion : l'Europe se définissait à l'époque par son
opposition aux musulmans. Parallèlement, on montrera comment la
religion perd de plus en plus son importance dans la société, ce qui
correspond aux changements des arguments principaux contre l'intégration
de la Turquie dans l'Union européenne (et en relation directe avec la
manière dont l'Europe se définit, son identité). Deuxièmement, on
analysera les images contrastées de l'Europe et de la Turquie. Il faut
souligner qu'il existe pour chaque image de l'Europe, et de tous les
éléments qui lui sont liés, une représentation « jumelle » ou une
représentation en miroir de la Turquie, par exemple : les manifestations à
Brême et celles à Istanbul, les relations familiales européennes et turques,
les prisons en Allemagne et celles en Turquie… etc. Troisièmement, on
expliquera les tentatives de communication entre ces deux mondes,
représentés par la relation fatale entre Ayten et Lotte et par le personnage
de Nejat, qui joué le rôle de médiateur culturel. Enfin, on verra que malgré
toutes ces oppositions, la rencontre entre la Turquie et l'Europe trouve sa
1 Hamit Bozarslan, « La candidature de la Turquie à l'Union européenne : enjeux
politiques internes et immigration », in Politique étrangère, numéro 2, 2001, p. 371
2 Le résumé du film est placé en annexe
1
place dans la culture partagée: à la base de toutes deux existent les même
mythes/récits fondateurs.
1. Le passage de la question religieuse à la question des droits
de l'Homme
Durant le XXème siècle, un certain nombre de philosophes, théoriciens,
écrivains et cinématographes ont pensé la question de l'identité
européenne. Parmi eux, certains l’ont défini par sa chrétienté, par exemple
Edgar Morin qui met le signe égal entre l'identité européenne et l'identité
chrétienne. Pour cette raison, la notion d'Europe prend une connotation
religieuse et se définit par son opposition au monde musulman. Plus
particulièrement, l'Europe se construit en réaction au monde ottoman,
comme on le constate par exemple dans la pièce Les Européens de Howard
Barker, où l'écrivain considère une bataille contre les Turques (du 12
septembre 1683, pour Vienne) comme l'événement constitutif de l'histoire
et de la création de l'Europe.
Dans notre film, la religion ne joue pas un rôle de grande importance.
Elle est mentionnée pour la première fois dans la scène où deux turcs
avertissent Yeter, une femme turque, de son comportement dangereux :
quelques jours auparavant, ils ont découvert qu'elle travaillait dans un
« quartier chaud ». Un des deux hommes dit à Yeter : « Tu est turque, et tu
es musulmane. », c'est-à-dire qu’ils ont défini l'identité turque par
l’appartenance religieuse : l'islam. En considérant le fait que la Turquie est
officiellement un pays laïque, on affirmera qu'il s'agit ici d'un exemple du
nationalisme à longue distance (« long-distance nationalism », le terme
créé par Benedict Anderson pour désigner le nationalisme de diaspora),
autrement dit, ces deux turcs veulent se présenter comme meilleurs que les
turcs de Turquie, et comme des meilleurs croyants même s'ils habitent au
sein d'un pays chrétien.
La religion est mentionnée pour la deuxième fois dans la scène où
Yeter explique que son mari est tué au Maraş en 1978. Dans le film, on a
cette seule allusion au massacre du Maraş alors que plus de mille
musulmans alévis ont été tués par les sunnites, qui considèrent l'alévisme
comme hérétique. Cet événement s'oppose aux principes laïques proclamés
par le gouvernement de Kemal Atatürk (1923-1938), qui a fondé la
République turque. Ils sont restés l'héritage des gouvernements suivants,
même de celui qui gouvernait à l’époque du massacre. En même temps,
l'allusion à Maraş conduit la réflexion vers les problèmes actuels en
Turquie avec des islamistes (qui sont typiques des pays où la religion
officielle est l'islam3). D'un autre côté, l'importance mineure de cet épisode
3 Amin Maalouf dans son essai Les identités meurtrières explique ce phénomène :
« […] lorsque les musulmans du tiers-monde s'en prennent violemment à l'Occident,
2
dans le film correspond au changement des conditions requises pour
l’intégration de la Turquie à l'Union européenne. En 1999, quand le statut
de candidat de la Turquie a été reconnu, l'Union européenne a abandonné
officiellement deux principaux arguments (qui, pourtant, sont demeurés
présents implicitement) contre l'intégration de la Turquie : la religion
musulmane et le niveau de développement. Ils ont été remplacés par les
« critères de Copenhague relatifs aux droits de l'Homme, à la démocratie,
au respect des minorités et à l'économie de marché »4. Dans ces conditions,
on voit ce qu’est l'identité de l'Europe aujourd'hui : ce n'est plus la religion
qui la définit, mais chacun des éléments demandés de la Turquie. De ce
point de vue, le massacre de Maras n'est pas choisi par hasard dans
l'Histoire turque : il s'agit d'une violation des droits humains parce que les
alévis sont un groupe minoritaire, et de plus c'est la communauté parmi les
plus tolérantes dans le monde musulmans (ils propagent les idées telles
que, l'amour et le respect pour tout le monde, la tolérance des autres
religions et des différents groupes ethniques, le respect pour les ouvrièrs,
l’égalité de l'homme et de la femme… etc.). Dans la même optique de
propagation des droits de l'Homme, on peut relever l'épisode dans lequel
l'officier turc, en parlant avec Nejat qui cherche les traces d'Ayten auprès
de la police, mentionne la question des kurdes. On voit que ce n'est plus la
religion qui joue le rôle décisif dans la définition de ce qu’est, ou non,
l'Europe.
2. Les images parallèles
Le film a une structure presque cyclique : au début du film, on voit
Nejat dans un magasin turc ou il achète de la nourriture et parle avec le
vendeur. Cette scène est répétée vers la fin du film : elle aide le spectateur
à comprendre qu'il faut reconsidérer la succession des scènes du film, c'està-dire qu’elle souligne que l'action n'est pas linéaire (et ce dans la totalité
du film, même si chacune des trois parties, « La mort de Yeter », « La mort
de Lotte », « De l'autre côté », est racontée linéairement) ; mais, par contre,
elle se déroule au même moment en deux endroits, en Turquie et en
Allemagne. Ce parallélisme (au sens de « rencontre impossible ») entre
deux flux d'action est souligné par plusieurs scènes où on voit les
personnages principaux qui s'ignorent : Ayten qui dort pendant les cours de
Nejat (qui va partir à sa recherche ultérieurement), Ayten, qui cherche sa
mère, en voiture avec Lotte et Yeter et Nejat en train dans la même scène…
ce n'est pas seulement parce qu'ils sont musulmans et que l'Occident est chrétien, c'est
aussi parce qu'ils sont pauvres, dominés, bafoués, et que l'Occident est riche est
puissant»., p. 76
4 Hamit Bozarslan, « La candidature de la Turquie à l'Union européenne : enjeux
politiques internes et immigration », in Politique étrangère, numéro 2, 2001, p. 371
3
etc. La rencontre impossible ou empêchée entre les personnages
principaux, qui se cherchent pourtant mutuellement, peut être considérée
comme la métaphore d'une rencontre impossible entre l'Europe et Turquie ;
autrement dit, elle peut exprimer la vision personnelle d'Akin quant à
l'intégration de la Turquie à l'E.U.. Pour renforcer l'idée qu'il s'agit de deux
mondes parallèles, Akin utilise les images « jumelles » de l'Europe et de la
Turquie, c'est-à-dire que, pour chaque image de l'Europe, il existe une
image couplée de la Turquie. Pour notre analyse, on a choisi trois images
particulièrement parlantes.
Dès le début du film, dans le premier cadre après le sous-titre « La
mort de Yeter », Akin nous donne des images de la manifestation (les
signes de crise sont typiques pour la représentation de l'identité
européenne) à Brême qui sont précédées par celles des symboles de
l'Allemagne : le drapeau national, l'emblème de l'aigle à deux têtes, la
cathédrale. La manifestation se passe calmement, et elle est accompagnée
de musique. L'image « respire la joie », et on voit dans le transparent :
«Proletarier aller länder vereinigt euch » 5. Un des personnages principaux,
Ali, passe à côté des manifestants avec une expression du plaisir.
L'immigrant de l'époque, mais désormais citoyen de l'Allemagne, n'est pas
touché par cette manifestation. Notons que la police n’apparaît pas dans
les différents plans. On ne ressent pas la grande importance de cette
situation. Il semble que l'image exprime la force de l'Union européenne, en
ce sens que la plupart des citoyens sont
contents, et que la crise, si elle existe, est « douce ».
D’un autre côté, au début de la deuxième partie, « La morte de Lotte »,
on voit les manifestations à Istanbul : trois groupes différents marchent en
demandant leurs droits : les Kurdes, les communistes et le groupe pour la
défense des droits de l'Homme. Un grand nombre des policiers est présent,
les manifestants du troisième groupe sont masqués (les couleurs, rouge et
noir, peuvent exprimer l'agression. Il semble qu'il s’agisse d’un mouvement
5 « Prolétaires de tous les pays, unissez vous! »
4
anti-globaliste), un homme tire en l'air, le désordre se crée immédiatement,
Ayten prend le pistolet et fuit. Néanmoins, l'atmosphère était tendue, même
avant le tir. La comparaison de ces deux épisodes est plus que complexe.
Les images sont opposées : en Europe, on a l'ordre et la tendance à
l'intégration (« unissez-vous », pas seulement dans les limites de l'UE, mais
aussi au-dehors, car on voit les paroles écrites en arabe) qui se veut le
symbole de la politique de l'UE ; en Turquie, on a le désordre et trois
groupes différents (le premier signe de la désintégration) et en plus, un de
ces groupes est constitué par les kurdes, qui portent les photos de leur
leader Öcalan - qui était pour la sécession des kurdes de la Turquie (le
deuxième signe de la désintégration, sans doute le plus explicite). Le
mécontentement de ces trois groupes exprime exactement ce que partage la
Turquie avec l'Europe : le problème avec des minorités, le respect des
droits de l'Homme, le développement.
La deuxième image, qui sera l'objet de
cette analyse, est l'image de l'avion. Au
contraire de ce que cette image peut
signifier dans le film européen (le progrès,
la vitesse, la communication, la libre
circulation des Hommes et des idées6,
etc.), ici l'avion porte des corps mortels, et
ce dans deux situations : la mort Yeter et
celle de Lotte. Dans la troisième apparition
de cette image, Ayten arrive en Allemagne
illégalement. Le passage des frontières qui
est une des caractéristiques du film
européen ici est mis en question. D'un
côté, les corps morts sont comme la
réponse ironique à l'idée européenne de l'échange libre. De l'autre côté,
l'entrée illégale d'Ayten, souligne le fait que les frontières entre les deux
pays sont ouvertes, mais seulement dans une direction, celle de l'Europe
vers la Turquie. Par ce détail, Akin stigmatise la relation inégale entre les
deux nations : l'Europe se veut supérieure à la Turquie..
La troisième image sera celle des prisons dans deux pays. Cette
représentations exprime le mode de la vie du pays qu’elle illustre. En
l'Allemagne, la cellule d'Ali est construite pour une personne. Par contre,
Ayten partage sa cellule avec plusieurs autres filles. Dans le premier cas, la
sentence est en accord avec l'individualisme occidental, mais de manière
hypertrophique, c'est-à-dire, sans possibilité d'interaction. D'ailleurs, à
l'Orient, elle correspond à la cohabitation, et le principe de punition est
similaire.
6 Par exemple, dans le film, « L'auberge espagnole » de Klapisch l'image de l'avion est
utilisé pour exprimer toutes ces valeurs positives.
5
3. La rencontre impossible/fatale
L'idée des images parallèles exprime, au niveau sémantique,
l'impossibilité d'une rencontre entre les personnages principaux ; et en
même temps, à un second niveau, elle figure la non-rencontre entre deux
mondes : l’occident et l’orient. La relation entre Ayten et Lotte peut être la
métaphore de la relation entre ces deux mondes, au sens de la tension
attraction-répulsion. On montrera maintenant cette relation en expliquant
dans un premier temps la situation de chacune des deux parties.
La mère d'Ayten est une prostituée. Il s'agit d'un stéréotype de pauvreté
de l'orient où les femmes se vendent, elle vendent leurs corps dans l'Ouest.
Ce stéréotype montre le contraste entre l'orient et l'occident, où même la
prostitution dans les pays occidentaux vaut mieux que la misère à l'orient.
On a ici une situation typique de la domination occidentale. Ayten est ellemême pauvre (malgré l'aide de sa mère), et elle est touchée par les
problèmes d'inégalité sociale en Turquie (elle mentionne la question de
l'éducation plusieurs fois, de même que sa mère) et par le manque de
liberté individuelle. Pour ces raisons, elle est membre d’un organisation
anti-gouvernementale pour la défense des droits de l'Homme et l’égalité
entre les individus. Elle comprend l'importance de l'éducation en tant que
seul moyen par lequel la Turquie peut s'approcher de l'Europe. Elle étudie
la sociologie, ce choix montre l'intérêt pour les problèmes qui sont les plus
actuels en Turquie. Par contre, Lotte, dont la mère apparaît comme une
figure intellectuelle (on la voit travailler avec un ordinateur), étudie
l'anglais et l’espagnol : ce choix montre les différentes tendances en
l'Europe : le respect et l'intérêt pour les autres cultures qui sont à la base de
ce qu’est l'UE aujourd'hui. Lotte, qui est blonde et dont la peau est
extrêmement pale (sans y voir des intentions raciales, ce fait ne semble pas
avoir été choisi par hasard ; elle correspond au stéréotype de l’arienne),
représente un fort contraste, ne serait-ce qu’au sens visuel, qui préfigure
tous les autres contrastes entre les deux filles. Au moment de la rencontre
avec Ayten, elle vient d'arriver du voyage en Inde. Cette notion de voyage
exprime l'intérêt postcolonial de l'Occident pour l'Orient, mais il ne s'agit
pas d'un Orient réel, mais d’un Orient dont l'image est offerte à la
télévision, aux programmes touristiques.
Par exemple, la moto de la campagne touristique de l'Inde est
« Incredible India », c'est-à-dire, l'Inde du rêve, l'image de l'Inde7 construit
7 Mais aussi l'identité de l'Inde (du point de vue occidental) se construit à l'intérieur de
la représentation, c'est-à-dire, à « l'intérieur du jeu du pouvoir et de l'exclusion ».
(Stuart Hall, « Qui a besoin de l' "identité"? », in Stuart Hall, Identités et cultures,
6
selon les goûts de l’occident, qui cherche ce qui est exotique et
radicalement différent, mais en même temps, agréable, parce que les
occidentaux ne sont pas généralement intéressés par la pauvreté ou les
maladies (sauf s'il y existe un certain plaisir de triomphe narcissique en
comparaison avec la puissance de leur monde et l'indigence de l'Inde). Son
intérêt premier pour Ayten peut être causé par les mêmes raisons, par la
même attraction pour l'Autre. Pourtant, Ayten « casse » ce stéréotype de
l'Orient imaginaire en apportant avec elle des problèmes réels concernant
les droits de l'Homme, les droits de la libre expression… etc. Elle
représente l'orient qui est conscient que la résolution de ses problèmes n'est
pas dans la reproduction du modèle de l'Ouest, mais que, chaque société
doit créer ses propres modèles politiques, économiques… etc. Du fait de
cette conscience, Ayten ne croit pas que l'intégration à l'UE puisse résoudre
les problèmes de la Turquie. Elle explique à Susanne, la mère de Lotte,
que les ambitions de l'UE par rapport aux pays sous- développés sont
colonialistes. Il semble qu'Akin serait d'accord avec Amin Maalouf en
disant que « il y a toujours […] un hiatus entre objectif annoncer de
civiliser les autres […] et la volonté évidente […] de les dominer »8. Dans
une réflexion similaire, on verra la relation entre Lotte et Ayten. En arrivant
en Turquie, elle dit à sa mère que elle va rester pour aider Ayten. Selon sa
mère, c'est une perte du temps, mais Lotte explique que c'est la première
fois qu'elle trouve un sens à sa vie. Au sens métaphorique, cette phrase
exprime que l'Occident se conceptualise par rapport à l'Orient, et en même
temps, il garde sa position de « dominant » (celui qui est capable
d’apporter de l'aide). La brève rencontre entre les deux filles se clot de
manière. Lotte est tuée accidentellement par des enfants kurdes dans la
rue. À travers cette histoire, on a vu un certain nombre d’exemples où
l'Orient n'était pas compris correctement et où l'aide de l'Ouest n'était pas
acceptée. Dans ce film, on assiste à un fort malentendu de ce type entre
Ayten et Susanne. La mort de Lotte est une double mort symbolique pour
Susanne: la mort de l'Orient imaginaire (où elle avait voyagé dans sa
jeunesse, ainsi qu’en Inde), et la mort de l'Ouest fantasmé. Son arrivée en
Turquie et sa décision d'aider Ayten a pour elle la signification d’une
première vraie rencontre avec l'Orient et elle comprend qu'on ne peut aider
l’Autre en gardant une position hautaine (ce que l'Europe essaie souvent de
faire). D’un autre côté, Ayten comprend que l'activisme militant ne peutpas
être la solution.
Éditions Amsterdam, Paris, 2008, p. 272)
8 Amin Maalouf dans l'entretien avec Ottmar Ette, « Vivre dans une autre langue, une
autre réalité », 15 septembre 2007, p. 89
7
Conclusion
Akin Fatih dans son film nous montre quelle est la seule possibilité
pour la rencontre entre l'Europe et l'Orient, dans ce cas, entre l'Europe est
la Turquie. Il est évident qu'il existe un phénomène d'attraction/répulsion
des deux côtés, et tous deux se définissent l'un par rapport à l'autre. Pour
une rencontre réussie et positive, il faudrait que l'Europe sorte de sa
position intouchable et de l'autre que la Turquie fasse un grand effort de
changement quant au respect des droits de l'Homme et des autres droits
élémentaires.
Le rôle du médiateur culturel, joué par Nejat, turc professeur de la
langue et de la littérature allemande, est indispensable pour cette
compréhension. Dans le film, il est le médiateur entre deux mondes, et
enfin, il est celui qui explique que, malgré tous les conflits et les
malentendus, la rencontre entre l'Europe et la Turquie pourrait être possible
au niveau culturel. Susanne lui demande la raison d’un tel monde dans la
rue et il lui raconte l'histoire, issue du Coran , d'Isaac : le fils sacré de Dieu.
A partir de cette parabole, elle comprend que l'Europe et la Turquie
partagent les mêmes récits fondateurs de l’identité nationale, même si l’une
est chrétienne et l'autre est musulmane. S'il existait un point commun au
départ, cela signifie que les lignes ne sont pas tout à fait parallèles, et que
les mondes ne devraient pas rester toujours séparés.
8
ANNEXE
Les rôles principales :
- Nejat (rôle interprété par Baki Davrak), fils d'Ali, professeur de la
littérature allemande à Hamburg, propriétaire d’une librairie allemande à
Istanbul
- Ali (rôle interprété par Tuncel Kurtiz), veuf, immigrant turc en
Allemagne
- Yeter aka Jessy (rôle joué par Nursel Kösel), prostituée d'origine
turque à Brême, Ali l'a payée pour n’avoir des rapports sexuels qu’avec lui
et pour habiter ensemble, tuée par Ali
- Ayten aka Gül (rôle interprété par Nurgul Yesicaf), fille de Yeter,
activiste turque pour les droits de l'Homme
- Lotte (rôle joué par Patrycia Ziolkowska), étudiante en langue
anglaise et espagnole, petite-amie de Ayten, tuée par des enfants dans une
rue à Istanbul
- Susanne (la rôle jouée par Hanna Schygutta), mère de Lotte
L'histoire :
« Malgré les réticences de son fils Nejat, Ali, qui est veuf, décide de
vivre avec Yeter, une prostituée d'origine turque comme lui. Mais Nejat,
jeune professeur d'allemand, ne tarde pas à se prendre d'affection pour
Yeter lorsqu'il comprend qu'elle envoie presque tout son argent à sa fille en
Turquie, pour lui payer des études supérieures.
La mort accidentelle de Yeter éloigne durablement le père de son fils.
Nejat se rend à Istanbul dans l'espoir de retrouver la trace d'Ayten, la fille
de Yeter. Mais Nejat ignore qu'Ayten, activiste politique d'une vingtaine
d'années, a fui en Allemagne pour échapper à la police turque.
A Hambourg, Ayten sympathise avec Lotte, une étudiante allemande
aussitôt séduite par le charme et l'engagement politique de la jeune Turque.
Lotte propose même à Ayten de l'héberger chez elle, malgré les réticences
de sa mère, Susanne. Arrêtée et placée en détention, Ayten est finalement
reconduite à la fronière puis incarcérée en Turquie.
« Sur un coup de tête », Lotte décide de tout abandonner et de se
rendre en Turquie, où elle se heurte à une bureaucratie pesante : tous les
efforts pour faire libérer Ayten semblent vains. Elle rencontre Nejat par
hasard et devient sa colocataire. Un événement tragique fait prendre à
Susanne la décision de venir à Istanbul pour remplir la mission de sa fille.
En se rapprochant de Susanne, Nejat ressent le besoin de renouer avec son
père qui vit désormais en Turquie, au bord de la mer Noire. Il décide alors
de partir à sa recherche. »9
9 L'histoire du film est disponible en ligne sur le site :
http://www.cinemovies.fr/fiche_film.php?IDfilm=15042
9

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