La pharmacogénétique… sans gêne !

Transcription

La pharmacogénétique… sans gêne !
InfoROUTE
La pharmacogénétique…
sans gêne !
Mise en situation
M. Laroche, anticoagulé depuis quatre semaines pour une récidive de thrombose veineuse profonde,
vous raconte qu’il a transmis un échantillon de salive à une société américaine trouvée sur Internet
pour l’établissement de son profil génétique et pour faire ajuster ses médicaments.
Contexte
Le Grand dictionnaire terminologique définit la pharmacogénomique comme étant la
« science qui a pour objet d’étudier les facteurs génétiques impliqués dans la réponse
aux médicaments afin de pouvoir offrir aux
malades ceux qui leur conviennent le mieux
tout en présentant le minimum d’effets
secondaires »1. Les progrès de cette science
en émergence devraient ouvrir la voie à une
médication « sur mesure ». Toutefois, le
génome humain est complexe et l’origine
des maladies dépend de plusieurs gènes,
probablement comme la réponse thérapeutique à des médicaments.
depuis 1970, mais que le terme pharmacogénomique (4622 abrégés) n’a pas été inclus
au vocabulaire contrôlé. Il faut rappeler
qu’on peut faire une recherche dans Pubmed en utilisant soit le vocabulaire contrôlé,
soit du texte libre (text word). Pubmed offre
des liens vers les sites Web des périodiques
et certains articles sont accessibles gratuitement en ligne. Par exemple, on retrace un
article récent de Roden et coll. sur la pharmacogénomique, ses défis et ses opportunités qu’on peut consulter gratuitement sur le
site de Annals of Internal Medicine2.
Texte final remis le 14 octobre 2007.
Révision : Martin Blais, B. Pharm.
Il est parfois difficile d’indiquer à Google
dans quelle langue nous souhaitons effectuer notre recherche. Pour des recherches de
nature scientifique, la recherche en anglais
donne souvent plus de résultats pertinents.
Ajoutez ces liens dans vos favoris et vous
pourrez faire votre recherche directement en
anglais ou en français :
Anglais : www.google.com/webhp?hl=en
Français : www.google.com/webhp?hl=fr
Peu familier avec cette science émergente,
vous souhaitez faire le point sur le sujet en
identifiant rapidement quelques sites et
articles-clés.
Première piste : Wikipédia et
Pubmed pour se familiariser
rapidement
www.monportailpharmacie.ca
Texte original soumis le 8 octobre 2007.
Google en quelle langue ?
Stratégie de recherche
Wikipédia peut être un point de départ intéressant en anglais (http://en.wikipedia.org/
wiki/Pharmacogenomics) et en français (http:
//fr.wikipedia.org/wikiPharmacog%C3% A9
nomique), notamment parce qu’il dirige vers
des sites réglementaires ou universitaires.
Wikipédia est une encyclopédie librement
distribuable que chacun peut améliorer. Cette
encyclopédie donne rapidement de très bonnes réponses. Toutefois, une confirmation des
informations qu’on y trouve est souvent
nécessaire étant donné la facilité avec laquelle
il est possible d’en altérer le contenu. Le
tableau I présente quelques sites-clés proposés
par Wikipédia afin de bien comprendre la
pharmacogénomique, notamment le portail
de la Food and Drug Administration.
En consultant le MeSH (Medical Subject
Headings ou vocabulaire contrôlé de
Medline/Pubmed – www.pubmed.com),
on constate que le terme pharmacogénétique (4729 abrégés disponibles) est utilisé
Texte rédigé par Jean-François Bussières,
B. Pharm., M.Sc., M.B.A., F.C.S.H.P.,
CHU Sainte-Justine, et Denis Lebel, B. Pharm.,
M.Sc., F.C.S.H.P., CHU Sainte-Justine.
Deuxième piste : Google
Vous décidez de confirmer que l’information
sur le rapport est bien exacte. Une recherche
sur Google en anglais avec les mots-clés
« CYP2C9*3 warfarin » vous permet de
Tableau I
Hyperliens d’intérêt général
Genomics at FDA – www.fda.gov/cder/genomics
medicine coalition – www.personalizedmedicinecoalition.org
nCenter for disease control of genomics and disease prevention – www.cdc.gov/genomics
nNational Center for Biotechnology Information (BCBI) – www.ncbi.nlm.nih.gov/About/
primer/pharm.html
nCenter for disease control – NOPHG – Pharmacogenomics – www.cdc.gov/genomics/
training/perspectives/pharmaco.htm
n Genome Canada – www.genomecanada.ca
n
nPersonalised
Février 2008 vol. 55 n° 2 Québec Pharmacie
41
InfoROUTE
trouver rapidement un article sur Medscape
(www.medscape.com/viewarticle/423474_3)
qui confirme les informations du rapport.
Troisième piste : Furetage sans
gêne ! La recherche par navigation
Les recherches précédentes ont permis d’identifier plusieurs sites répertoires et sites d’organismes réglementaires. Vous trouvez des liens
vers quelques communiqués de presse de la
FDA3. Cette publication de la FDA alimente
un débat sur l’obligation pour le médecin de
recourir à des tests de pharmacogénomique
avant de débuter une anticoagulothérapie. Un
patient pourra-t-il exiger un tel test ? Ces tests
seront-ils offerts par les hôpitaux ?
Ce communiqué de la FDA, publié en août
2007, précise que l’organisme a accepté une
mise à jour de la monographie de la warfarine
afin de tenir compte du profil pharmacogénomique des patients. Cette mise à jour est moti-
Suite du cas
La consultation des sites Web précédents
vous permet de constater que les résultats
des tests de notre patient nous permettront
d’interpréter de façon plus certaine les nombreux tableaux d’interactions sur le CYP2D6.
En poursuivant votre discussion avec le
patient, ce dernier vous affirme que sa dose
de warfarine (4 mg per os une fois par jour
selon votre profil pharmacologique) est trop
élevée compte tenu de son profil génétique.
Il vous tend une copie du rapport de la
société américaine ayant réalisé son génotype. Le rapport indique une mutation
CYP2C9*3. L’interprétation accompagnant ce
résultat indique que cette mutation nécessite généralement des doses plus faibles de
warfarine et qu’elle est associée à un risque
de saignement plus élevé.
vée par le grand nombre de patients traités chaque année (plus de deux millions d’Américains)
et les risques d’effets indésirables (p. ex., saignements) et de visites à l’urgence. Dans le communiqué, la FDA soutient que de 35 % à 50 %
des patients traités par la warfarine pourraient
être porteurs d’une variante du CYP2C9 et de
VKORC1 qui pourrait nécessiter une dose de
départ plus faible que pour les autres patients.
Bien que le recours à ce type de tests soit possible pour plusieurs médicaments utilisés en
oncologie (p. ex., l’irinotécan), la FDA souligne
qu’il s’agit du premier médicament d’utili­
sation si courante qui comporte une telle
recommandation.
Suite du cas
Vous vérifiez auprès du personnel de la clinique médicale les derniers résultats de RNI
de votre patient et la valeur visée dans son
cas ainsi que la dose de warfarine prescrite.
Vous êtes en mesure de le rassurer en lui
disant que ses RNI sont bien autour d’une
valeur de 3 telle que visée. Vous lui rappelez
l’importance de se présenter à ses rendezvous pour mesurer son RNI et que, malgré sa
mutation, c’est le résultat de son RNI qui
témoigne de l’efficacité de son traitement.
Vous lui donnez rendez-vous dans quelques
jours pour parler un peu plus de sa mutation
et des précautions à prendre avec d’autres
médicaments. Conscient que cette question
risque d’être posée à nouveau par d’autres
patients, vous désirez vous documenter
davantage afin de savoir si des profils de
génotypage clinique sont offerts au Canada.
Vous identifiez à partir de Google quelques
liens pertinents sur les sociétés de génotypage clinique en utilisant les mots-clés « test
ADN médicament ». Trop de résultats non
pertinents sont présentés. La recherche « test
de paternité Québec » permet d’identifier les
entreprises offrant des tests d’ADN. Au Québec, la plupart des entreprises qui offrent ces
tests proposent aussi des dépistages génétiques de toutes sortes, mais ces compagnies
offrent leurs services principalement aux
chercheurs. Elles sont toutefois disposées à
faire des tests pour des patients si ceux-ci
sont prescrits. Le Centre de pharmacogénomique au Québec (www.pharmacogeno
mics.ca/pgx) ainsi que Pro-ADN diagnostic
(www.proadn.com) sont des entreprises qui
offrent des outils de génotypage clinique aux
chercheurs intéressés à élucider non seulement la réponse aux médicaments mais
d’autres troubles et maladies causés par des
variations génétiques notamment, les récepteurs ß2 adrénergiques et les cytochromes.
Votre navigation vous mène aussi sur le site
IntermedRX (www.intermed-rx.ca). Ce site
en français présente des tableaux des différents
cytochromes et de leurs inhibiteurs, inducteurs et substrats. Les tables de Flockhart sont
aussi une des références classiques sur le sujet
(http://medicine.iupui.edu/flockhart). n
Fin du cas
Vous découvrez un nouvel outil de la National
Library of Medicine : la recherche intégrée de
toutes les banques de données (www.ncbi.nlm.
nih.gov). Une recherche avec « warfarin », par
exemple, permet d’identifier la présence du motclé dans toutes les banques de données y compris celles de nature génétique comme Gene.
Parmi les 17 résultats, vous retrouvez des gènes
comme CYP2C9 et VKORC1 ainsi qu’une foule
d’informations y étant reliées. Toutes ces informations vous permettront de répondre adéquatement à votre patient et de rêver à l’avenir de la
pratique de la pharmacie.
Références
1. Office québécois de la langue française – Grand
dictionnaire terminologique - [cité le 31 décembre
2003]; http://www.granddictionnaire.com/btml/
fra/r_motclef/index1024_1.asp site visité le 2007
0920.
2. Roden DM, Altman RB, Benowitz NL et coll.
Pharmacogenetics Research Network. Pharmacogenomics: challenges and opportunities. Ann Intern
Med. 2006 Nov 21;145(10): 749-57. [cité le 21
novembre 2006]; http://www.ncbi.nlm.nih.gov/
sites/entrez?Db=pubmed&Cmd=ShowDetailView&
TermToSearch=17116919&ordinalpos=14&itool=
EntrezSystem2.PEntrez.Pubmed.Pubmed_ResultsPanel.Pubmed_RVDocSum site visité le 20070922.
3. Wood S. New warfarin Labeling reminds physicians
about genetic tests to help guide initial warfarin
dosing. Medscape medical news [cité le 2007 08
20]; http:www.medscape.com/viewarticle/561608
_print.htm [En ligne. Consulté le 19 septembre
2007.]
42
Québec Pharmacie vol. 55 n° 2 Février 2008
Question de formation continue
12) Parmi les énoncés concernant la pharmacogénomique, lequel est faux ?
A. La pharmacogénomique est une science qui a pour objet d’étudier les facteurs
génétiques impliqués dans la réponse aux médicaments.
B. La Food and Drug Administration a permis que soit mise à jour la monographie
de la warfarine pour tenir compte du profil pharmacogénomique des patients.
C. Les cytochromes impliqués dans l’ajustement de la dose de départ de warfarine
sont les CYP1A2 et CYP1B1.
D. Le terme pharmacogenetics existe depuis 1970 dans le vocabulaire contrôlé de
Medline/Pubmed.
E. La plupart des entreprises qui offrent des tests d’ADN sont disposées à faire des
tests pour des patients si ceux-ci sont prescrits.
Veuillez reporter votre réponse dans le formulaire de la page 62 