article siper EnergiePlus - Cogénération Biomasse Rhône

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article siper EnergiePlus - Cogénération Biomasse Rhône
AGRICULTURE F
La diversification des activités est le maître-mot
de l’agriculture moderne. La famille Jamonet
en est la démonstration. Son dernier projet
consiste à installer une unité de méthanisation
sur une de ses parcelles.
ans le département
de la Drôme, à Bourgde-Péage, la famille
Jamonet composée des
parents (François et
Anne-Marie) et de leurs trois enfants
(Vincent, Christine et Bertrand) s’est
lancée dans un projet de méthanisation de grande envergure baptisé
Siper (Sizeranne production d’énergie
renouvelable). À la tête d’une exploitation de production céréalière (maïs,
blé, orge) sur une surface de 250 hectares, la famille avait déjà bien diversifié ses activités, depuis ses débuts
dans l’élevage de taurillons en 1976,
avec la création d’une activité de
séchage et de stockage de céréales
puis d’une activité de transport et
de négoces de produits liquides et de
D
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matières organiques d’origine agricole
(fumiers de volailles) ou issues de sites
agro-industriels (balles de riz, etc.) et
de stations d’épuration. Cette dernière
sera d’ailleurs en charge du transport
des 42 000 tonnes de matières organiques destinés à la méthanisation.
Des contrats de longue durée, entre
7 et 15 ans, ont été signés avec différentes sociétés pour garantir l’approvisionnement. Les intrants seront
Deux moteurs de cogénération
de 844 kW valoriseront
le biogaz produit
assez divers (liquides, pâteux, solides)
et proviendront de sources locales :
déchets de pâte fraiche, lactosérum,
lisier de porc, concentrés de fruits,
déchets de pomme. Le sorgho planté
en culture intermédiaire sera utilisé
comme variable d’ajustement.
Pour intégrer ces différentes matières,
le process doit être souple et comporter différentes zones de mélange et
d’hygiénisation. «Le responsable d’installation devra faire sa recette journalière la plus stable possible afin de produire un biogaz homogène en qualité
et en quantité», décrit Lionel Tricot,
chargé de développement à Rhônalpénergie-Environnement (RAEE).
À la fin du processus de mélange,
celui-ci sera transféré dans un des
deux digesteurs d’un volume de
3 400 m3. Près de 115 m3 seront injectés
chaque jour pour un temps de séjour
d’environ 59 jours. La technique choisie pour la digestion est “l’infiniment
mélangé” et elle sera mise en œuvre
par la société Envitec. Le biogaz produit lors de la réaction est stocké dans
la partie haute du digesteur appelé
ciel gazeux. La désulfuration du biogaz se fait par injection maîtrisée d’air
dans cet espace. Le biogaz est ensuite
séché puis le sulfure d’hydrogène
(H2S) est traité. Enfin, il sera acheminé vers la centrale de cogénération,
© D.R.
Une famille investit
dans la méthanisation
J Trois usages thermiques sont prévus :
autoconsommation, approvisionnement d’un
réseau de chaleur et alimentation d’une scierie.
Entretien avec Bertrand Jamonet,
responsable du projet Siper
«Nous souhaitons
récupérer de l’engrais»
composée de deux moteurs de 844 kW,
qui va donc produire de l’électricité et
de la chaleur.
L’électricité sera réinjectée sur le
réseau et bénéficiera du tarif d’achat.
En revanche, il y aura trois usages
thermiques : autoconsommation
pour chauffer le digesteur, approvisionnement d’un réseau de chaleur
desservant un centre aquatique et
des entreprises du secteur, et enfin
alimentation d’une scierie. Pour rassurer la collectivité, une chaufferie
bi-combustible (biogaz et gaz naturel)
de 6 MW sera également construite
afin de valoriser le biogaz en cas d’interruption de fonctionnement de la
cogénération et en complément si
nécessaire. «Nous avons doublé la production énergétique et le combustible
pour être sûrs que le réseau de chaleur
soit alimenté quelle que soit la situation», ajoute Lionel Tricot. Au final,
l’efficacité énergétique attendue sera
proche de 75 %. Le traitement du digestat liquide sera confié à Veolia moyennant une redevance, alors que le
digestat solide sera utilisé via un plan
d’épandage ou orienté vers la centrale
de compostage de la famille Jamonet.
Au final, ce projet coûtera 7 millions d’euros, cofinancé à hauteur
de 325 000 euros par le ministère de
l’Agriculture, 200 000 euros par la
Région Rhône-Alpes et 100 000 euros
par le Département de la Drôme.
L’Ademe pourrait également participer
au financement de ce projet mais rien
n’est encore acté. La somme restante
sera à la charge des porteurs de projet.
Où en est Siper ?
Dès le début, la famille Jamonet a pris
contact avec RAEE, agence régionale
de l’énergie et de l’environnement spécialisée dans le conseil et l’accompagnement lors du montage et du suivi
d’opérations. «Depuis plus de trois ans,
j’accompagne le projet Siper en coordonnant les acteurs locaux et en animant le comité de pilotage, explique
Lionet Tricot. J’ai participé à l’élaboration du plan de financement et je m’occupe également de l’interface extérieure avec ERDF et avec le syndicat
des énergies pour la vente de chaleur
produite par la méthanisation.» Tout a
été fait pour consolider le projet et rassurer les investisseurs. Le dossier a été
jugé recevable par la Dréal après six
mois de procédure. La prochaine étape
est l’enquête publique dont la première réunion a eu lieu le 30 mars dernier. «Si tout va bien, il reste six mois
de procédure et nous espérons ensuite
pouvoir poser la première pierre au
quatrième trimestre 2012, souligne Lionel Tricot. Comme le réseau de chaleur
alimenté par la méthanisation doit
desservir un centre aquatique, dont
le démarrage est prévu au premier
semestre 2012, nous sommes contraints
dans le temps.» m
Comment avez-vous
eu l’idée de vous lancer dans un projet de
cette ampleur ?
Bertrand Jamonet :
Nous nous sommes
lancés dans ce projet
en 2007. Un ami de la
famille travaillant pour
b
d’ét
d’
étud
ét
ud nous avait demandé de
un bureau
d’études
réaliser des essais de sorgho biomasse en interculture. Entre deux récoltes céréalières, nous
pratiquons l’inter-culture depuis longtemps
pour nourrir les animaux et éviter de laisser
les sols à nu. Cette première expérience nous
a fait réfléchir et nous nous sommes intéressés à la méthanisation. Au départ, nous
souhaitions avoir une source de chaleur pour
chauffer nos silos mais l’étude de faisabilité a
montré qu’il était plus pertinent de s’installer
dans une zone d’activité commerciale, surtout
qu’un projet de centre aquatique était à l’étude.
Qu’attendez-vous de ce projet ?
B. J. : Nous souhaitons récupérer de l’engrais.
En effet, depuis 2009, nous avons une plateforme de compostage mais elle ne comble pas
tous nos besoins. La méthanisation nous fournira le complément et nous pourrons même
approvisionner nos voisins agriculteurs. Par
ailleurs, l’opération financière est intéressante
puisque le retour d’investissement devrait être
inférieur à dix ans.
Avez-vous d’autres projets dans le domaine
des énergies renouvelables ?
B. J. : Nous disposons d’anciens bâtiments
d’élevage désormais reconvertis dans le stockage du maïs et des sels de déneigement. Les
toitures devaient être désamiantées et réparées, alors nous avons signé un contrat avec
la société Edison Power prévoyant la réalisation de ces travaux dans le cadre de la location
des 5 600 m2 de toitures. L’entreprise va y installer des panneaux photovoltaïques en avril
prochain.
Propos recueillis par Christelle Deschaseaux
Christelle Deschaseaux
1 ER AVRIL 2011 - N°463
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