Etude SUTTER... p.34-40

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Etude SUTTER... p.34-40
ÉTUDE
La vocation d’un dispositif d’information et de documentation,
quelle que soit la nature de son offre, est d’atteindre le ou les publics potentiels. Les
actions de communication n’étant pas toujours suffisantes, il faut parfois mettre le
prospect en confiance et utiliser des signes qui différencient une offre des offres
concurrentes. C’est l’ensemble de ces signes de mise en confiance que décrit cette
étude : audit de conformité, certification du système d’assurance qualité, prix
qualité, certification des personnes, adhésion à un code de déontologie, publication
d’une charte qualité, étiquetage informatif normalisé, certification des produits ou
des services, publication d’essais comparatifs.
par ÉRIC SUTTER,
Bureau van Dijk
Ingénieurs Conseils
À la conquête de nouveaux
usagers des services d’information
LE TERME PEUT PARAITRE GUERRIER,
mais il s’agit bien d’avoir une attitude offensive
pour mener à bien sa mission de médiation de l’information : permettre à l’ensemble des publics
ciblés – aux différents segments de population
visés, pourrait-on dire également – de disposer des
documents et de l’information dans le cadre défini
par la mission ou la vocation du dispositif d’information et de documentation.
Le « pourquoi » est évident : vous êtes payé
pour cela. Si la direction de l’entreprise a recruté
un professionnel de l’information-documentation,
c’est pour irriguer en information et en documentation une population qu’elle a jugée stratégiquement prioritaire (dans le cadre d’un appui au développement de l’entreprise, d’une mission plus
globale d’information du public, etc.). Vous devez
donc mettre tout en œuvre non seulement pour
offrir des produits ou des prestations adaptés, mais
aussi pour toucher et fidéliser le ou les publics
visés.
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C’est volontairement que l’expression « dispositif d’information et de documentation » est
employée ici, car la problématique est similaire
quelle que soit l’offre de produit ou de service :
site web, service questions-réponses, prestation de
veille, diffusion d’un bulletin périodique, réalisation de synthèses, etc.
En théorie, deux cas de figure sont à distinguer : le cas où la population à desservir est
dénombrable car elle appartient à une entité délimitée (l’entreprise ou un département au sein de
celle-ci) ; celui où la population est externe, en
milieu ouvert.
Dans le premier cas, la conquête est à faire tout
au long de la période de montée en charge qui suit
la création de l’offre puis, d’une façon plus ponctuelle, auprès des nouveaux arrivants dans l’entreprise. On bascule vite à la phase de croisière,
donc à une préoccupation de fidélisation. De plus,
il existe peu ou pas de concurrence directe ; la
situation est proche d’une position monopolistique, même s’il existe toujours une concurrence
indirecte (les autres voies d’accès à l’information
qu’un usager peut toujours exploiter).
Dans le second cas, la situation est un peu plus
difficile car la phase de conquête est permanente :
il est rare que l’on touche la totalité du public
potentiel, du fait de son étendue, des contours
flous de la cible visée, du renouvellement permanent de la population. De plus, la concurrence
directe peut être plus ou moins forte et elle
s’ajoute à la concurrence indirecte, toujours présente.
En réalité, la démarche de conquête d’usagers
est similaire dans les deux cas, la différence résidant dans l’effort à consacrer et dans le choix des
méthodes ou des signes de mise en confiance.
Passons au « comment faire ». Deux axes de
réflexion et d’action sont à prendre en considération (parmi bien d’autres, bien entendu : nous
laissons de côté ce qui a trait à la connaissance
préalable du public, à ses besoins et attentes, ce
qui a trait à la conception et à la faisabilité technique d’une offre adaptée, ce qui a trait à la problématique de la tarification, etc.) : la problématique du « faire connaître » et celle de la « mise
en confiance ». La première relève du champ du
marketing, la seconde relève du champ de la qualité.
Nous ne nous étendrons pas sur la première
problématique, car elle mériterait un article entier.
Cela couvre tout ce qui relève de la communication commerciale, des actions de promotion, de la
publicité. Si l’on veut avoir des clients, il faut évidemment commencer par faire connaître l’existence de son offre, en démontrant l’utilité et les
autres avantages que peut représenter pour le
prospect le dispositif d’information et de documentation proposé.
Mais faire connaître l’existence de son offre ne
suffit pas toujours pour déclencher « l’acte
d’achat », l’acte de consommation ou l’acte de
connexion chez le futur usager ou client. Il est
souvent nécessaire de le « mettre en confiance » et
de le rassurer : « Venez sans hésitation chez nous,
car vous ne serez pas déçu. Nous nous sommes
organisés pour vous donner entièrement satisfaction ou, au minimum, tenir nos promesses affichées sur nos supports de communication (en
terme de contenu, de présentation, de délai,
etc.). »
Il n’est plus nécessaire pour la
Eric Sutter est depuis 1993
société SVP, par exemple, de
consultant en management des
démontrer l’intérêt et la qualité
services d’information au Bureau van
de son offre en matière d’appui
Dijk Ingénieurs Conseils, après avoir
informationnel aux entreprises.
travaillé de nombreuses années à
Cette société sait vendre du serl’Association française de normalisavice de qualité ou, en tout cas,
tion (AFNOR). Il est membre actif
adapté aux attentes des entrede la commission Techniques et
prises. Son sigle vaut label
méthodes documentaires de l’ADBS
depuis de nombreuses années et
et du comité directeur d’ADBS
sa prospérité est le signe que les
Certification. Il a récemment publié
prestations offertes satisfont les
entreprises clientes : cela fait des
un ouvrage intitulé Information,
années que nombre d’entre elles
documentation, connaissances :
renouvellent périodiquement
la gestion de la qualité (ADBS Édileur abonnement. Certains
tions, 2002), dont cet article reprend
centres de documentation
une partie des propos exposés dans
internes jouissent aussi d’une
le chapitre 13.
réputation suffisante pour attirer
tout nouvel arrivant. Mais, par définition, une
telle notoriété ne s’acquiert qu’avec le temps et
avec le renfort de nombreuses campagnes de communication. D’où la mise en avant de signes spécifiques.
1
Donner confiance
aux futurs clients
Dans le domaine du commerce électronique,
des enquêtes menées aux États-Unis comme en
Europe montrent que 60 % des internautes se
méfient des sites marchands ou abandonnent une
transaction faute d’être suffisamment rassurés.
Autant de prospects perdus !
Ce problème de mise en confiance devient crucial dans le champ de l’information et de la documentation.
Certaines firmes spécialisées dans ce champ
l’ont bien compris. Citons l’exemple récent de la
transformation d’enseigne de la société Dun &
Bradstreet, l’une des enseignes internationales historiques de l’information de solvabilité. Elle faisait
référence aux noms de ses fondateurs, qui ont fait
place au seul acronyme D&B mais accompaDocumentaliste - Sciences de l’information 2002, vol. 39, n° 1-2 • 35
ÉTUDE
À L A CO N Q U ÊT E DE N O U V EAUX U SAGER S DES SER V ICES D’INFOR MATION
gné du slogan : « Decide with Confidence » (« Décidez en toute confiance »).
Comment donner confiance à des futurs clients
ou usagers et les attirer vers vous alors qu’ils sont
déjà usagers de prestations ou de vecteurs d’accès à l’information concurrents dont ils connaissent les caractéristiques, et que, n’ayant pas encore
« l’expérience » de vos prestations, ils ne peuvent
pas les apprécier ? Comment, au-delà de la description de votre offre sur les supports de communication commerciale et des « promesses »
nécessairement alléchantes qui y figurent, les rassurer et leur signifier qu’ils n’auront pas de surprise désagréable ? Comment vaincre leurs appréhensions alors qu’ils ont peut-être une image a
priori négative ou qu’ils ont en mémoire une expérience malheureuse (avec vous ou avec des prestataires de même nature) ?
Comment se démarquer des autres fournisseurs
d’information et « montrer » que vous êtes le
meilleur (ou, en tout cas, conforme à des exigences publiées) ?
C’est toute la problématique des « signes »,
sceaux, estampilles, labels ou autres certificats qui
« garantissent » la qualité d’une offre et la tenue de
la promesse de satisfaction. Ce peut être l’aboutissement de vos efforts faits en matière de management de la qualité et la valorisation de vos
investissements en la matière. Ce peut être aussi
une exigence de la part de certains clients.
Certains auteurs, comme Étienne Drouard, distinguent :
- l’auto-labellisation (« faites-moi confiance
puisque je vous le dis ») ;
- le référencement (« nous avons sélectionné
pour vous les meilleurs ») ;
- les codes de conduite (« faites confiance aux
membres de notre club ») ;
- l’audit (« n’hésitez pas, ce que je déclare a été
vérifié ») ;
- la certification (« ayez confiance, les contrôles
ont été faits de façon indépendante »).
Pour les deux derniers cas, l’attestation ou le
certificat de conformité est délivré par un organisme certificateur indépendant du fournisseur et
des clients, ce qu’on appelle une « tierce partie ».
Il faut savoir que les différents systèmes de certification varient selon la nature de l’entité certifiée,
la nature du système de certification, le statut de
l’organisme de certification, la nature du référentiel, le type de vérification, la nature de l’attestation
et le type de suivi. Certains labels peuvent être
promus avec grand renfort de publicité mais couvrent des exigences « basiques » auxquelles
presque tous les fournisseurs ou prestataires peuvent satisfaire, ou ne couvrent qu’une seule composante des attentes des usagers (protection des
données personnelles, moyen de paiement, sécurité des transactions, moralité du contenu, etc.).
36 • Documentaliste - Sciences de l’information 2002, vol. 39, n° 1-2
Le choix entre une modalité ou une autre est
spécifique à chaque organisme ; il dépend de son
histoire, de sa stratégie marketing, de la notoriété
du label parmi sa clientèle, des coûts induits pour
obtenir le label ou le promouvoir... et de l’existence ou non d’un organisme certificateur pour le
type de certification envisagé.
2
L’audit
de conformité
Certains dispositifs documentaires doivent être
conformes à des normes (cas de la norme NF Z
42-013 pour l’archivage électronique). Cette
conformité peut être démontrée par le biais d’un
audit réalisé par un auditeur externe indépendant
ayant une double compétence : compétence en
audit de type qualité et compétence dans la technique documentaire mise en œuvre. Un tel audit
peut être suffisant pour répondre aux exigences
du législateur ou pour rassurer le client sur les
caractéristiques effectives du dispositif mis en
place.
3
La certification
du système d’assurance
qualité
L’objet de ce programme est de certifier la
conformité du système qualité de l’entreprise aux
exigences de la norme ISO 9001 (principalement
centrée sur l’organisation de la qualité au sein de
l’entreprise). L’assurance de la qualité est « la partie du management de la qualité visant à donner
confiance dans la satisfaction des exigences pour la
qualité » (ISO 9000).
L’avantage de ce type de certification réside dans
la notoriété et le caractère mondial du référentiel
(la norme ISO 9000), ainsi que dans les nombreux
accords de reconnaissance mutuelle passés entre
les organismes certificateurs des différents pays.
Le référentiel fait l’objet d’un suivi au sein de l’ISO
et a été révisé en 2000 pour intégrer l’apport des
démarches de qualité totale et le développement
des activités de service.
Ce type de certification fait partie des critères de
sélection des fournisseurs par de nombreuses
entreprises clientes (elles-mêmes parfois certifiées)
et par l’État dans le cadre des marchés publics.
Quelques entreprises d’information (courtiers,
cabinets conseils, etc.) sont actuellement certifiées
ISO 9001.
4
Les « prix
qualité »
Il s’agit de récompenser les entreprises qui ont
fait un effort particulier en matière d’amélioration
ou de maîtrise de la qualité totale et qui ont su
conquérir durablement une large clientèle. Les
prix qualité les plus connus sont les suivants :
- the Deming Application Prize (créé au Japon
en 1951 et qui a été à l’origine du succès de l’économie japonaise) ;
- the Malcolm Baldridge National Quality
Award (créé aux États-Unis en 1987) ;
- le Prix européen de la qualité totale, créé par
The European Foundation for Quality Management (EFQM) en 1991 ;
- le Prix français de la qualité, décerné par le
Mouvement français de la qualité, au niveau régional et au niveau national.
Pour obtenir cette récompense, l’entreprise
gagnante doit satisfaire à des critères nombreux et
particulièrement exigeants, impliquant la mobilisation de l’ensemble du personnel. Le questionnaire d’évaluation constituant le référentiel est
réparti en huit à dix thèmes selon les prix, chacun
des thèmes étant noté sur un nombre de points
variables. Obtenir le prix est pour l’entreprise une
récompense prestigieuse ; cela a un impact considérable sur son image et sur sa renommée et met
en confiance les futurs clients.
On peut citer l’exemple du centre de documentation rattaché au ministère portugais de
l’Éducation, qui a reçu récemment le prix de la
qualité de l’administration portugaise (calqué sur
le prix européen EFQM) : preuve que des structures documentaires de taille moyenne (moins de
vingt personnes) peuvent engager une démarche
approfondie et efficace en matière de gestion de la
qualité.
5
La certification
des personnes
Attester que le personnel chargé de traiter et de
diffuser l’information dispose de compétences professionnelles reconnues – indépendamment de
l’intérêt de cette attestation dans d’autres circonstances comme le recrutement ou l’évolution de
carrière – peut constituer un élément qui rassure
le futur client : « Ayez confiance, vous êtes en
contact avec du personnel qualifié qui saura comprendre vos attentes et vous délivrer des prestations adaptées. »
La validation des connaissances et des acquis
de l’expérience professionnelle par une tierce par-
tie peut donner lieu à la délivrance d’un certificat
de niveau de compétences. Depuis 1995, l’Association des professionnels de l’information et de
la documentation (ADBS) assure la fonction d’organisme certificateur pour les professionnels de
l’information-documentation, en s’appuyant sur
un référentiel de compétences établi au niveau
européen et en respectant la norme européenne
EN 45013 de certification des personnes. Elle distingue quatre niveaux de compétences (assistant
en I-D, technicien gestionnaire en I-D, ingénieur
manager en I-D, expert en I-D). Le certificat est
attribué après examen d’un dossier déclaratif, notation de plusieurs « preuves » de compétences et
entretien avec un jury. Il fait l’objet d’une surveillance annuelle et doit être renouvelé tous les
cinq ans.
Pour les concepteurs d’applications de gestion
électronique de documents, il existe un programme de certification mis en place par l’association américaine de l’industrie informatique
CompTIA. Cette certification (Certified Document
Imaging Architect) est délivrée aux personnes qui
satisfont à un test d’évaluation couvrant dix
aspects du processus de gestion électronique des
documents (équipement de saisie et de numérisation, équipement de stockage, facteurs affectant
les performances, dispositifs de communication,
caractéristiques d’affichage, d’impression, etc.). Le
test, informatisé, comporte soixante-huit questions
techniques tirées aléatoirement au sein d’un réservoir de questions et les candidats doivent avoir
répondu positivement à au moins cinquante-trois
d’entre elles.
6
L’adhésion déclarée
à un code de déontologie
Il s’agit généralement d’un instrument élaboré
collectivement au niveau d’une profession
(ensemble d’individus exerçant le même métier ou
ensemble d’entreprises offrant le même type de
prestations), instrument qui décrit un certain
nombre de règles de nature éthique (respect de la
confidentialité des demandes de recherche documentaire, objectivité des analyses, etc.). Comme
les codes de pratique publicitaire dans d’autres
domaines, les codes d’éthique ne garantissent pas
la qualité intrinsèque des produits ou prestations
d’information. Déclarer adhérer à un code de déontologie rassure l’usager ou le client sur ces aspects
éthiques, lesquels peuvent avoir une incidence
stratégique pour celui qui s’adresse à un fournisseur externe (la confidentialité notamment).
Plusieurs codes existent dans le champ de l’information-documentation (voir le hors texte
Documentaliste - Sciences de l’information 2002, vol. 39, n° 1-2 • 37
ÉTUDE
À L A CO N Q U ÊT E DE N O U V EAUX U SAGER S DES SER V ICES D’INFOR MATION
de la page ci-dessous), les premières réflexions sur
les droits et les devoirs des professionnels remontant à 1976 (mais encore bien avant pour ce qui
concerne le monde des bibliothèques).
La déclaration de l’adhésion à un code de bonne
conduite relève de l’autolabellisation. En théorie,
le respect du code est assuré par l’association professionnelle qui l’a établi, mais en général sans
actions de contrôle organisées (l’association intervient surtout lors d’une plainte).
Dans le même ordre d’idée, il faut mentionner
l’adhésion de certains sites web aux « principes de
qualité du NetScoring » dans le champ de l’information de santé.
7
La publication d’une
charte qualité
C’est une modalité à la portée des petites unités documentaires comme des grandes entreprises
d’information. Une charte qualité, c’est afficher
publiquement sur un mode déclaratif un certain
nombre d’engagements (nous nous engageons... à
mettre en ligne la revue de presse chaque matin
avant neuf heures, à vous fournir les documents
primaires en moins de quarante-huit heures, à
Exemples de codes de déontologie
• Le code établi par l’European Council of Information Association (ECIA),
qui regroupe neuf associations nationales de professionnels de l’informationdocumentation ; code adopté par l’ADBS en décembre 1999 (et publié ici-même
en mars 2000, vol. 37, n° 1, p. 42-43).
• La Charte des iconographes destinée à préserver la qualité des illustrations
• Le code établi par les courtiers en information au niveau européen
• Le EUSIDIC Codes of practice publié par The European Association of
Information Services (EUSIDIC)
• La Charte des membres de l’Association des professionnels de la GED
(APROGED)
• Le Code de déontologie établi par le Groupement français de l’industrie de
l’information (GFII) et qui s’applique à tous ses membres
• Le code d’éthique e-santé (ehealth Code of Ethics) pour les sites consacrés
à la santé
• La « net éthique », ensemble des règles de savoir-vivre et de politesse à
respecter sur Internet (utiliser un langage courtois, ne pas transférer de gros
volumes d’informations sans les avoir comprimés, ne pas accéder à des sites
ou à des données protégés, respecter le droit d’auteur, etc.)
• La Charte de l’Internet, règles et usages des acteurs de l’Internet en France ;
elle a été publiée en 1997.
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vous fournir une réponse par messagerie dans la
demi-journée, à traiter vos demandes de recherche
documentaire jusqu’à telle heure, à vous orienter
vers les sources spécialisées si l’information n’est
pas disponible sur place, etc.).
C’est une série de promesses faites aux clients
(et que vous êtes en mesure de tenir parce que
vous vous êtes organisé pour cela et que vous maîtrisez les processus de travail). Le client sait que les
promesses seront tenues du fait de l’affichage
public (un non-respect ferait vite perdre toute crédibilité à l’organisme).
Quelques prestataires publient de tels « engagements ». C’est le cas de Yahoo! France qui s’engage sur le respect de la vie privée et la confidentialité des informations personnelles fournies, de
Heptaline, un prestataire spécialisé dans l’élaboration de sites web (engagement qualité en six
points) ou de eQuesto, pour ne citer que quelques
exemples liés à Internet.
8
L’étiquetage informatif
normalisé
Pour faciliter le choix du futur client et éviter
une déception après la souscription d’un abonnement, il est important que celui-ci dispose d’une
information détaillée concernant l’offre et plus spécialement le contenu du produit d’information.
L’expérience montre que les notices descriptives
diffusées par les producteurs de banques de données ou leurs distributeurs ne sont pas toujours
détaillées et que leur approche globale cache des
zones d’ombre sur la qualité réelle du service électronique.
Prenons l’exemple des banques de données sur
les entreprises. Les fiches publicitaires du producteur peuvent mentionner que les notices descriptives des entreprises comportent un champ
dédié aux dirigeants, un autre dédié au chiffre d’affaires, etc. ; ce qui permet à l’usager de savoir quel
type d’informations il trouvera en consultant telle
banque de données. La consultation effective peut,
le cas échéant, fortement le décevoir si ces champs
ne sont pas remplis pour la totalité des entreprises
ou pour les entreprises de tel pays. Il en est de
même pour les mises à jour : la publicité peut indiquer que la banque de données est mise à jour
quotidiennement (ce qui n’est pas forcément faux)
mais les enquêtes effectuées auprès des entreprises
pour collecter les données peuvent être annuelles
(et les données enregistrées au fur et à mesure
qu’elles parviennent chez le producteur).
D’où l’idée d’une « étiquette informative » comportant des renseignements détaillés sur les
champs et leur taux de remplissage, les délais réels
de traitement et de mise à jour, etc., selon une
grille commune à tous les producteurs. Une telle
grille a été établie par le Groupement français de
l’industrie de l’information (GFII) pour qu’elle soit
utilisée par ses membres.
Une grille similaire a été développée en 1996
par un organisme anglais (Centre for Information
Quality Management), mis en place conjointement
par The Library Association et par UK Online User
Group, lequel a « labellisé » jusqu’en janvier 2000
quelques banques de données en ligne ou sur cédérom après vérification effective des informations et
publication de l’étiquette informative. L’expérience,
trop coûteuse, n’a malheureusement pas été poursuivie.
9
La certification des
produits ou des services
Il s’agit d’attester que les caractéristiques d’un
produit ou d’un service sont bien conformes à un
référentiel technique. Ce référentiel peut être une
norme ou une charte qualité. Il doit spécifier les
caractéristiques garanties (mesurables), les modalités de contrôle (quand ? comment ?), être
approuvé par un comité de certification, et être
publié.
La plus connue des certifications de produit en
France est la « marque NF », cette estampille collée à l’arrière de nombreux appareils électroménagers (mais aussi dans le domaine de la construction, des composants électriques, etc.) et qui
atteste que ledit appareil est conforme aux normes
techniques de l’Afnor (normes dimensionnelles,
d’aptitude à l’emploi, de sécurité, etc., selon le cas).
Un organisme certificateur indépendant et accrédité effectue périodiquement et sur un lot de produits des contrôles chez le fabricant et des essais
en laboratoire pour vérifier la conformité des
caractéristiques aux normes en question.
Pour les services (transport, déménagement,
formation, restauration, etc.), le processus est similaire (existence d’un référentiel publié, organisme
certificateur accrédité, contrôles périodiques), si
ce n’est que les contrôles sont d’une autre nature :
client mystère, enquête de satisfaction auprès des
usagers, etc.
Un produit d’information électronique, une
prestation de veille, un service de renseignements
par téléphone peuvent très bien faire l’objet d’un
référentiel décrivant les caractéristiques qualitatives et d’un certificat de conformité par un organisme indépendant et impartial.
Dans le domaine des produits à finalité pédagogique, signalons, par exemple, la marque
« Reconnu d’intérêt pédagogique » attribuée par
Quelques labels de sites Internet
➔ Trust-e, développé aux États-Unis, est limité à la gestion des données personnelles (mais il n’y a pas d’audit systématique et sa valeur est contestée par
nombre d’instances).
➔ Webtrust a été développé par l’association des comptables américains et
s’étend à des sites d’autres pays.
➔ Webtrader a été développé en Grande-Bretagne par l’association des
consommateurs pour les sites de commerce électronique.
➔ Trustinfo, développé par le réseau des chambres de commerce et d’industrie
(WorldChambers) en tant que tierce partie, garantit des informations objectives et vérifiables. C’est donc un premier niveau de garantie sur l’existence de
l’entreprise, sur la réelle propriété du site Internet et sur la réalité de ses activités et de ses produits ; il ne garantit cependant pas la qualité d’organisation
de l’entreprise ni la satisfaction des clients en ce qui concerne les produits ou
les services fournis.
➔ L@belsite a été développé en France « par des commerçants pour des commerçants », c’est-à-dire par la Fédération des entreprises du commerce et de la
distribution (FECD), la Fédération des entreprises de vente à distance (FEVAD)
et d’autres organismes professionnels, dans le cadre du Conseil national du
commerce et de l’Institut international du commerce électronique. Un audit est
effectué pour vérifier la conformité du site aux vingt-sept règles édictées par l’association L@belsite. Un comité d’habilitation délivre alors un certificat d’habilitation. Un contrôle « au fil de l’eau » est prévu pour vérifier les engagements
pris. Il couvre principalement trois aspects : la réalité et l’identité du commerçant derrière le site, la conformité à la réglementation et à la déontologie de la
vente à distance adaptée au média Internet, la transparence et la protection
des données à caractère personnel.
➔ Le service confiance Webcert a été développé en France par l’Association
française pour l’assurance qualité (AFAQ) pour certifier les sites de commerce
électronique. Il se présente comme une démarche globale avec un test d’achat
(évaluation du parcours client), une exploration du site et un audit d’organisation des services opérationnels. Il garantit la sécurité et la loyauté des transactions.
➔ Webvalue est la marque de certification mise en place début 2001 par le
bureau Veritas, selon un référentiel spécifique.
le ministère de l’Éducation nationale en vue de
guider les enseignants dans le monde du multimédia. Un logo permet d’identifier les logiciels et
les créations multimédias qui, après expertise par
un public d’enseignants et de spécialistes du
domaine, répondent aux besoins et attentes du
système éducatif.
Plusieurs labels ont été mis en place à travers le
monde pour qualifier les sites Internet et pour
« rassurer » les clients, notamment ceux des sites
pratiquant le commerce électronique. Ces labels
ne résultent pas tous cependant d’un processus de
certification indépendant, ils ne suivent pas tous le
même schéma d’évaluation ou d’audit ou ne s’appuient pas tous sur un référentiel publié. (Voir le
hors texte ci-dessus.)
En France, la certification des produits et des
services est régie par la loi n° 94-442 du 3 juin
Documentaliste - Sciences de l’information 2002, vol. 39, n° 1-2 • 39
ÉTUDE
À L A CO N Q U ÊT E DE N O U V EAUX U SAGER S DES SER V ICES D’INFOR MATION
1994. Elle fait notamment obligation de publier le
référentiel qui sert de base à la certification de
conformité.
Sur un autre plan, il faut aussi évoquer la certification de la fréquentation des sites web. Pouvoir
annoncer à des futurs clients que son site web est
très fréquenté, en tant que preuve de qualité
(« Voyez ! Il satisfait déjà de nombreux clients ! »)
constitue un argument attractif. Pour rendre crédible cette « notoriété » qui n’a pas encore connu
l’épreuve du temps, l’idée est de faire intervenir
une tierce partie qui délivre un procès-verbal suite
à la mise en place de marqueurs de mesure et
d’autres contrôles de nature technique. En réalité,
il s’agit surtout de rassurer les annonceurs publicitaires présents sur le site...
10
Les essais comparatifs
publiés
La réalisation d’études comparatives (ou benchmark) de produits avec publication des résultats
met en évidence les différences de qualité et positionne les produits les uns par rapport aux autres.
Rien n’empêche une entreprise de faire état des
résultats de ces études comparatives si ceux-ci sont
favorables à son produit et peuvent rassurer le
futur acheteur. Ce « signe » est d’autant plus fort
que l’indépendance de l’organisme qui a réalisé le
benchmark est notoire et que les critères d’évaluation rejoignent les critères d’appréciation des usagers. Le fait qu’un produit soit ainsi reconnu le
meilleur vaut label.
Des études de ce type sont fréquemment réalisées en matière de logiciels par le Centre d’expérimentation des progiciels (CXP). Des cabinets
d’étude en publient également.
Bien que l’approche soit un peu différente –
mais il s’agit bien d’une démarche d’évaluation
avec des résultats publiés – il faut évoquer les
« notations » de services électroniques d’information. L’attribution de « cœurs » à un certain
nombre de banques de données accessibles par
Télétel dans le Répertoire des banques de données
pour les entreprises publié par FLA Consultants
constitue bien l’équivalent d’un label qualité attribué par une tierce partie. Quatre critères principaux étaient pris en compte : le volume et la couverture des données, la sophistication de la
recherche, le temps d’accès aux réponses, et le graphisme des écrans.
11
Un argument à
manier avec prudence
La portée commerciale d’un label dépend évidemment de la notoriété du label et du degré de
confiance accordé par la clientèle (connaissance
des éléments garantis, crédibilité fondée sur la
rigueur d’attribution du label et sur des retraits
éventuels, etc.). Il revient à l’organisme certificateur ou à la profession d’en assurer la promotion.
Par définition, un label doit rester un signe distinctif et un signe clair. Trop de systèmes de labellisation nuit à la clarté distinctive et génère la
confusion. On peut craindre une telle situation en
ce qui concerne les sites Internet si la prolifération actuelle des labels n’évolue pas vers une
concentration de l’offre.
Le développement de la labellisation est un
moyen, parfois, pour assainir un secteur d’activité
et éliminer progressivement les brebis galeuses ou
les amateurs, lesquels peuvent discréditer toute
une profession par leurs pratiques douteuses et
entraîner la perte de confiance de la clientèle.
Le premier à obtenir un label peut facilement en
tirer avantage du fait qu’il se distingue de ses
confrères. Lorsque toutes les entreprises ou
presque disposent du même label, le signe distinctif s’estompe et ne devient plus un critère de
choix pour le client (mais on peut penser que le
niveau de qualité de la profession est alors devenu
globalement satisfaisant, ne laissant plus de place
à des surprises désagréables.
Certains labels peuvent être trompeurs dans la
mesure où le client ne connaît pas toujours le
contenu du référentiel, ni donc sa limite. Certains
produits certifiés le sont pour des caractéristiques
liées à la sécurité mais pas forcément pour des
caractéristiques de durabilité. Certains labels ou
processus d’évaluation concernant les sites Internet (comme SiteInspector) ne concernent que les
caractéristiques informatiques ou de télécommunications et non le contenu des informations ou
des services. En tant que client, il est utile de s’informer sur la portée du (ou des) label(s) mis en
avant par le fournisseur ; en tant que fournisseur
ou prestataire, il est prudent de communiquer sans
générer des attentes démesurées !
Attirer le prospect pour qu’il devienne client
n’est cependant qu’une étape dans le processus
« marketing ». Il faut ensuite qu’il ne soit pas déçu
par la prestation effectivement consommée et qu’il
ait envie de revenir. C’est toute la problématique de
la fidélisation de la clientèle : elle peut s’appuyer
sur une politique tarifaire différenciée ou sur des
« privilèges », mais doit surtout reposer sur la maîtrise durable de la qualité de l’offre servie.
JANVIER 2002
40 • Documentaliste - Sciences de l’information 2002, vol. 39, n° 1-2