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Compte rendu
ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DE LA CFOM
SAMEDI 9 NOVEMBRE 2013
9H00 – 17H30
DOUALA
CAMEROUN
9h00 : Ouverture
Allocution du Dr Guy SANDJON, Président Conseil de l'Ordre des Médecins du Cameroun, Président
du comité d’organisation de la CFOM 2013.
Allocution du Dr Emmanuel OGANDAGA, Président Conseil national de l'Ordre des médecins du
Gabon, Président de la CFOM.
Présentation des sujets par le Dr Xavier DEAU, Président de la Délégation aux affaires européennes et
internationales du Conseil national de l'Ordre des médecins français, Secrétaire général de la CFOM.
1ère partie des débats
Formation, Etudes médicales, Harmonisation des programmes, Procédures d’autorisation d’exercer pour
les médecins migrants, Reconnaissance des diplômes, Développement professionnel continu.
Intervenants :

M. le Pr TETANYE, Vice-Président du CNOM du Cameroun, Doyen honoraire de la Faculté de
médecine
L'Ordre des médecins du Cameroun existe depuis 1957, c'est-à-dire depuis les temps coloniaux. En
réalité, c'est une loi de 1980 qui a créé cette Institution et lui donna son statut légal. L'objectif de l’Ordre
est de veiller et de contrôler l'exercice de la profession médicale sur tout le territoire. L’Ordre est animé
par une politique de promotion et de préservation du code de déontologie des médecins qui a été édicté
par un décret présidentiel. Sa mission de contrôle et d'organisation l'exercice de la profession médicale
lui a été conférée par une loi de 1990. Il s’agit donc d’un arsenal d'outils qui donnent à l'Ordre national
des médecins du Cameroun un véritable pouvoir pour régenter et contrôler la profession médicale.
L'Ordre des médecins a été fondé par le Pr René ESSOMBA, mais a été rénové et a pris toute sa
configuration moderne en tant qu’interlocuteur indépendant du gouvernement, capable de faire des
propositions, par le Dr Daniel MUNA à qui nous devons également ce beau siège de l'Ordre national des
médecins dans la capitale politique du Cameroun et qui est la propriété de l'Ordre.
Monsieur le Président, je voudrais vous demander une minute de silence au nom de ces deux acteurs
importants aujourd'hui décédés. (Les membres se lèvent et observent une minute de silence.)
Nous sommes très heureux, vous l'avez constaté, d'être conduits par une personne charismatique dans
la lignée de ces prédécesseurs, le Dr SANDJON, dont je ne présente ni les qualités ni les brillantes
prestations. (Applaudissements.)
Le problème de la formation médicale prend naissance dans un contexte très particulier. Le Cameroun
est un pays de 21 millions d'habitants avec un taux de mortalité de 62 ‰, un taux de mortalité maternelle
de 690 ‰, une espérance de vie de moins de 55 ans, un taux de couverture médicale de 1 médecin
pour 13 500 habitants, ce qui est extrêmement peu et un taux de couverture de santé qui est de 3 %
pour la population, ce qui est négligeable. Selon nos statistiques, en fonction que le Président soit à
Paris, à Bruxelles ou à Yaoundé, nous pensons avoir 4 000 médecins exerçant dans le pays, dont 1 200
à 1 500 dans la fonction publique et environ 3 000 dans le secteur privé.
Le Cameroun produit environ 350 jeunes médecins par an. C'est là tout le problème parce que pour ce
faire, l'État ne dispose que de 4 Facultés publiques. Jusqu'en 2006, la formation était principalement
assurée par la Faculté de médecine et des sciences de Yaoundé qui produit 100 jeunes médecins par
an dans le meilleur des cas. Cela ne comble donc pas le besoin en médecins.
C’est pourquoi l'État a créé trois autres Facultés : à Douala, à Buea et à Bamenda. En examinant le taux
d'occupation de ces Facultés, on comprend très bien l'étendue du problème. De plus, une seule faculté
réunit véritablement les conditions à la fois d'infrastructures, de ressources humaines et de matériel
pédagogique, critères absolument indispensables pour assurer la qualité de la formation. Les autres
sont pour ainsi dire des écoles de médecine en formation et en expérimentation. Cette situation est
d'une précarité inacceptable.
Par ailleurs, certains promoteurs privés, attirés par l’appât du gain, ont profité de la loi édictée par le
gouvernement permettant de libéraliser l'accès à la formation médicale. Malheureusement, ces
promoteurs ne disposent ni des ressources en enseignants ni d'infrastructures appropriées ni de
matériels didactiques adéquats et encore moins de Centres hospitaliers pour l'application de la
formation.
C'est cette situation qui a amené l'Ordre des médecins – et je rends hommage au Président parce que
ce n'est pas facile dans le contexte de nos pays – à se confronter au gouvernement pour indiquer que
cette situation est inacceptable au regard des exigences de qualité de la formation et des exigences de
la qualité des prestations attendues d'un médecin dans un pays où l'on fait la promotion des droits de
l'homme.
En prenant le nombre d'enseignants permanents comprenant les enseignants de rang magistral et les
enseignants que l'on peut considérer de rang sous-magistral, et en totalisant tous ces enseignants
permanents, nous constatons que seule la faculté de médecine de Yaoundé approche avec peine le
ratio acceptable d’un enseignant pour 10 étudiants. Ceci est encore plus accentué si l’on ajoute les
autres institutions d'État. Ce sont des ratios absolument inacceptables sur le plan international.
Cette situation est encore plus grave dans les institutions d'enseignement supérieur dites privées qui ont
été admises à la formation médicale par la loi. L'Ordre des médecins a malheureusement constaté que
le recrutement de ces IPES ne tenait absolument pas compte des critères d'excellence et que les
recrutements étaient massifs, puisqu'il fallait bien faire du chiffre d'affaires. Ce recrutement
d'enseignants était absolument non conforme aux exigences du CCIU et du CAMES.
Lorsque nous examinons les taux d'exigences, entre 1 100 € et 1 900 € de frais d'étude par an doivent
être payés. L'état des lieux est d’autant plus grave que la qualité des enseignants n’est pas conforme,
les infrastructures sont précaires et les ressources bibliothécaires sont quasi-inexistantes. Comment
forger un forgeron sans forgerie ni maître ? Ces IPES ne disposent pas de CHU pour la formation et
l'application.
Cette situation a amené M. SANDJON, Président de l'Ordre des médecins, à saisir les instances
gouvernementales : le ministère de la Santé publique et le ministre de l'Enseignement supérieur afin de
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demander à l'OMS d'assurer la tutelle des débats et du séminaire-atelier que nous avons convoqué à
Kribi en 2011.
Nous avons réuni dans ce séminaire-atelier l'ensemble de ce que l'on peut considérer comme les
éminences de la formation médicale de notre pays auxquelles nous avons associé tout ce que l'on peut
considérer comme autorité fiable en la matière.
Un ensemble de résolutions est ressorti de cet atelier, à savoir qu'au regard des constats que nous
avions faits, il était absolument indispensable de geler les autorisations de création de ces IPES,
d'évaluer les IPES, de fermer les IPES non conformes, d'instaurer un numerus clausus annuel et de
renforcer les capacités des Facultés d'État. Nous ne pouvons pas admettre qu'un gouvernement perde
de l'argent et de l'énergie à créer des institutions privées qui n'avaient absolument pas de quoi pérorer
au lieu de renforcer ces propres écoles de médecine en ressource, infrastructure, et matériel
pédagogique.
Après avoir adressé des résolutions au gouvernement, nous avons pensé qu'il serait peut-être plus
efficace de se présenter devant le gouvernement en faisant front commun avec les pharmaciens et les
dentistes qui déploraient exactement les mêmes problèmes vis-à-vis de ces IPES. C'est pourquoi nous
avons rédigé ce mémorandum qui a été porté au gouvernement.
De ce combat, nous avons réussi à amener le gouvernement à se rendre compte qu'il était nécessaire :
de créer un board qui serait responsable d'organiser le concours national unique des sciences de la
santé, c'est-à-dire médecine, pharmacie et dentaire ; d’avoir un examen de validation du premier cycle
pour passer en 4e année de médecine et d’avoir un examen national unique de sortie en fin de formation
pour tout le pays et pour toutes les écoles à la fois étatiques et privées. Nous avons évidemment plaidé
pour l'instauration d'un numerus clausus parce qu'il est tout de même important de ne pas clochardiser
une profession qui est considérée comme une profession d'élite et qui ne saurait se flatter d'être
médiocre.
Monsieur le Président a ainsi amené le gouvernement à légiférer. Le 10 juin 2013, le Premier ministre,
chef du gouvernement, a donc crée une commission nationale de formation médicale, pharmaceutique
et odontostomatologique ayant pour mission de piloter l'ensemble de la formation médicale
odontostomatologique et pharmaceutique sur l'ensemble du pays. C'est une véritable victoire qu'il faut
mettre au crédit de l'Ordre des médecins et de son Président. (Applaudissements.)
Pour aller plus loin, nous avons demandé que la mise en place de textes législatifs introduisant la
création : d’un concours national d’aptitude à la formation médicale, obligatoire et absolument
incontournable pour tout jeune voulant se former en médecine, en pharmacie ou en odontostomatologie
dans le pays ; un examen d'entrée en 4e année et un examen dit de certification qui confère et valide la
formation du médecin, du pharmacien et du dentiste en fin de formation.
De plus, de toutes ces 20 écoles de médecine, qui avaient véritablement essaimé le pays, avec les
qualités et les critères que je viens de décrire nous n’en avons retenu que deux : une à Baganti et l'autre
à Yaoundé.
Les défis qu’il nous reste sont de proposer : une amélioration du fonctionnement de ce Conseil national
de formation médicale parce qu'il est essentiellement administratif. Nous souhaiterions que l'Ordre des
médecins et les Doyens de Faculté de médecine soient plus impliqués dans le fonctionnement du
board ; un suivi dans le fonctionnement de ce conseil ; des sous-commissions de fonctionnement de
cette commission filière par filière. Nous ne comprenons pas que les médecins, les pharmaciens et les
dentistes se retrouvent dans les mêmes conditions parce qu’il s’agit tout de même de métiers différents.
Enfin, il est très probable que ceste exigences que nous avons mises en place doivent s'imposer à tous
les médecins qui seraient formés hors du Cameroun afin qu’ils arriment à l'exigence et à la norme
camerounaise.
Monsieur le Président, le Conseil national de l'Ordre des médecins, dans un pays en développement
comme le nôtre, ne peut pas se contenter des fonctions régaliennes et traditionnelles des Ordres des
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médecins. L'expérience camerounaise montre que l'Ordre des médecins doit véritablement s'impliquer
dans la qualité de la formation médicale. Cette stratégie, dans les pays en développement comme les
nôtres, ne peut se faire qu’en front commun avec tous les Ordres : pharmacie et odontostomatologie.
Je crois pouvoir dire que nous avons eu beaucoup de chance. Nous avons un chef de gouvernement
particulièrement actif et disposé à écouter l'Ordre des médecins, parce qu'il en a lui-même une haute
opinion. Nous devons lui rendre hommage ainsi qu’à son Premier ministre pour avoir si favorablement
suivi l'avis de l'Ordre des médecins du Cameroun.
Monsieur le Président, je voudrais au nom de l’ensemble de la communauté médicale du Cameroun et
de son président, vous remercier pour votre bien aimable attention. (Applaudissements.)
M. le Dr DEAU
La problématique de la formation des médecins au Cameroun et assez semblable à celle des médecins
en Europe. Sachez qu'en France, nous avons 635 médecins camerounais de très haut niveau de
formation et nous en sommes très heureux. Grâce à M. SANDJON nous avons pu les rassembler autour
d’une association franco-camerounaise installée à Paris.
Deux de leurs représentants, venus de Paris, sont d’ailleurs présents dans la salle et nous pouvons les
applaudir. (Applaudissements.)
Il est très important d'avoir cette liaison permanente entre les pays francophones, en particulier avec les
territoires de la métropole française.
Je cède la parole à M. ALAOUI, ancien Doyen de Rabat, Président d’honneur de la CFOM, a été la
cheville ouvrière de la CFOM pendant plusieurs années.

M. le Pr Tahar ALAOUI, Président Conseil national de l'Ordre des médecins du Maroc, Président
d’honneur de la CFOM.
Merci beaucoup Monsieur le Président. Je remercie infiniment le Vice-président TETANYE pour la
qualité de cette présentation et de l'approche qui mérite tous les applaudissements. (Applaudissements.)
Je le remercie aussi parce qu'il a fait l'introduction du thème, dont nous allons discuter aujourd'hui, de la
façon la plus démonstrative. Nous devons en effet parler de la formation médicale. Je serai le plus bref
possible, vous êtes tous des experts, vous connaissez donc chaque concept. Nous pourrons entrer dans
les détails lors la discussion.
Cette formation vise l'harmonisation des programmes, la reconnaissance des diplômes et le
développement professionnel continu dont nous avons tous le plus grand besoin. Nous avons déjà parlé
de l'autorisation des migrants. J'ajouterais un élément sur les supports d'accompagnement dont a parlé
le Pr TATANYE et je ferai deux propositions pour la forme.
Concernant la légitimité du choix du thème, je me dois en tant que membre de la CFOM de dire que
nous avions pensé à Paris au thème de la e-formation. J'en ai parlé au Présent OGANDAGA ici présent,
et lui avait dit que nous devions préparer un petit groupe de travail préliminaire et M. LUCAS, qui était
aussi concerné, m'a envoyé un autre thème qui est en cours de discussion.
Ce thème est légitime et pertinent parce que, d’une part, le Pr TETANYE a montré le rôle que nous
devons avoir. Nous sommes des gestionnaires du produit de la formation et non pas des formateurs. Je
lui donne totalement raison et j'ajoute que l'Ordre a le droit d'être à la source de la formation, de
participer à l'élaboration et au contrôle des programmes de formation, indépendamment du rôle qui lui
est attribué par la loi qui est la gestion et le suivi, voire pour certains, la reconnaissance de la spécialité.
D’autre part, nous ne pouvons pas nous passer de la régulation du rôle de l'État, cela a été démontré de
façon magistrale. Le domaine de la santé est un domaine stratégique de développement qui ne peut pas
être laissé ainsi au système libéral. L'offre de soins ne dépend que de l'État. Ce dernier a la
responsabilité de la régulation des ressources humaines dans tous les domaines. Nous ne pouvons
donc pas nous passer du ministère de l'Enseignement supérieur pour les lois, les règlements et les
décrets, du ministère de la Santé qui est un des pourvoyeurs de la politique et de sa mise en place sur le
plan constitutionnel de tous les pays et du ministère des Finances. Par ailleurs, les Facultés de
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médecine ont un rôle central dans la formation. Enfin, nous avons également besoin des instances
internationales et la dernière réunion était avec l'AMM.
La CFOM a des atouts. Elle forme une entité indiscutable partageant le socle commun de la langue, de
l’histoire scientifique, culturelle et politique ainsi que de la vision et de la démarche d’approche de la
politique sanitaire. Nous pouvons la considérer comme une sous-région dans cette grande région parce
qu’il y a beaucoup de convergences qui sont autant d’atouts de base.
La CFOM a aussi des outils fondamentaux. Je ne vais pas parler du CAMES, mais sachez qu’au moins
18 états dépendent du CAMES pour la formation des ressources humaines et en sont fiers, c'est une
expertise colossale. Je ne parlerais pas de la CIDMEF car M. FINOUSI* en parlera. Néanmoins, ayant
été longtemps membre de cette conférence, la CIDMEF apporte expertise, organisation et approche
structurante. Elle existe depuis au moins 40 ans et apporte une contribution que nous pouvons utiliser.
Enfin, politiquement c’est l’Afrique qui a commencé, avec la Convention d'Arusha en 1981, à vouloir
reconnaître les diplômes entre les pays. Cette Convention a depuis été aménagée et mise à jour, mais
perdure toujours. Certes, son application n'a pas toujours été à la hauteur, mais il n'empêche que nous
avons ici un substratum.
Nous ne pouvons pas parler de réforme des études médicales sans faire référence à la Déclaration de
Bologne de 1999, préparée par la Déclaration de la Sorbonne de 1998 rédigée par 4 états européens :
la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne et l’Italie. Elle est la base de la Déclaration de Bologne en 1999
qui est le socle de la formation universitaire et que nous allons mettre en place.
Le but global de la Déclaration de Bologne est l'harmonisation de l'architecture du système de
l'enseignement supérieur afin qu’il soit plus transparent, plus lisible et comparable afin d'accorder la
même diplomation.
Cette Déclaration est basée sur 3 points clés que nous allons devoir aborder dans nos processus de
réforme :
un cursus universitaire fondé sur une licence effectuée en 3 ans, un master en 2 ans et un doctorat
en 3 ans de plus. C'est le système LMD que pratiquement tout état européen a abordé et accepté
avec une certaine durée. Nous verrons que la France a amendé beaucoup de choses ;
une organisation en deux semestres ;
une unité de base permettant de juger le contenu de la formation. C'est ce que les Anglo-Saxons
appellent l'European credit transfer system et que nous pouvons appeler unités de valeur, crédits ou
modules. Les Facultés peuvent faire ce qu'elles veulent, mais dans le cadre de ce système. Ce sont
des unités qui sont transférables parce que le contenu est pratiquement le même et porte sur le
même thème avec les mêmes données. Elles sont communes à tous les systèmes.
En synthèse, un crédit représente environ 25 heures de nos 30 heures. Une année de formation (2
semestres) représente globalement 15 semaines par semestre. La licence est réalisée en 2 ans et peut
valoir entre 180 à 240 crédits selon la licence. Celai peut s'appliquer à l'enseignement supérieur et pas
uniquement à la Faculté. Le master et le doctorat sont déterminés, mais c'est généralement 3 ans. Il
revient à chaque pays de l'adapter à son système.
J’ai fait une présentation de l'architecture des diplômes avec la licence en 3 ans. La médecine va couper
la 4e année parce que c’est le passage à la clinique. La 4e et 5e année représentent le master. Vous
avez ensuite le doctorat. Les appellations dépendent des pays.
Dans la mise en place de ce système, nous devons absolument considérer qu'il y a une progressivité
pour l'application. Cela va prendre du temps, mais il faut le faire. Il y a également une autonomie de
l'université pour ce qui concerne les contenus et les appellations. Par exemple, le Cameroun compte
tenu de double appartenance anglaise et française est dans une situation spécifique. Enfin, tout cela doit
surtout être vu dans un continuum de formation, parce que nous les médecins allons intégrer la
médecine générale communautaire ou familiale qui va probablement devenir une spécialité et nous
devons donc l'intégrer dans ce contexte.
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Nous avons besoin de la régulation, parce que nous ne pouvons pas le faire tout seuls. La régulation ne
peut se faire qu'à travers les conditions réglementaires établies par le ministère de l'Enseignement
supérieur sur la qualité du contenu – et il est fondamental que nous participions à l'élaboration de cette
régulation en tant que conseil –, l'accréditation des programmes qui ne peut se faire qu'en liaison avec le
contenu, les méthodes d'enseignement et la qualité de l'enseignement, et l'accréditation globale des
institutions qui ont établi une critérisation.
Dans la mise en œuvre de cette réforme dans nos pays, il me semble que nous partageons tous la
même position pour une régulation institutionnelle par la loi. Cette loi ne peut se faire qu’avec nous.
Pour la mise en place, nous avons besoin de que nous pouvons appeler Commission pédagogique
nationale. Nous avons été plus loin parce que cela fait déjà 4 ans que nous travaillons là-dessus, mais
ce n'est pas un exemple, en intégrant la pharmacie, le dentaire et les professions de santé avec un
système de passerelle.
Le fondement de notre formation initiale est le médecin de médecine générale, le médecin de santé, le
médecin de communauté, etc. Nous devons réfléchir à la place du médecin dans le système LMD et
probablement même au lieu de lui donner 4 ou 5 ans, lui donner 3 ans à partir d'un certain moment,
parce que nous avons besoin d'avoir des médecins pour une couverture optimale des besoins de santé
de la population.
Les modalités d'accès sont le concours « sélectif » avant l'entrée à la Faculté de médecine et non pas
une année après. Nous avons déjà une certaine expérience sur le sujet.
Dans l'architecture globale, nous avons des passerelles après la licence. Effectivement, deux ans après,
ils peuvent aller vers des professions paramédicales.
Cette Commission pédagogique nationale va surtout travailler avec les enseignements, les
savantes, les syndicats et le Conseil de l'Ordre sur les cahiers pédagogiques de normes
formation. Cela nous permet d’arriver au système d'habilitation qui est la sortie, au
d'accréditation qui est autre chose, à la formation continue dont je parlerai brièvement et les
d'accompagnement.
sociétés
de cette
système
mesures
Nous avons donc besoin de deux instances pour cette mise en place : le board et une instance nationale
d'évaluation pour les accréditations, parce qu'il ne faut pas que la seule instance soit juge et partie. Nous
avons besoin d'une instance autonome et indépendante afin que ces avis soient indiscutables. Elle a
comme responsabilité l'évaluation institutionnelle que vous avez faite, l'évaluation des méthodes
d'enseignement et des programmes et l'évaluation des activités de recherche dont nous ne devons pas
oublier l'indispensable existence.
La suite est la plus technique et nous ne pouvons pas le faire seuls. Vous avez amené des personnes
de l'OMS avec d'autres autorités, mais il y a aussi la CIDMEF, l'AUF, l'UNESCO. Nous avons également
deux institutions qui travaillent beaucoup et dont certains d'entre vous ont entendu parler : le tuning sur
le plan mondial et qui a pour responsabilité de définir l'approche méthodologique pour parvenir à la mise
en place des systèmes de cette nature. Ils apportent des expertises, des aides et des comparabilités et
enfin l'Institution d'enseignement supérieur est l'élément de base.
Depuis 4 ans, nous avons un premier cycle qui peut-être commun. Au bout de 2 ans, les filières de
professionnalisation peuvent aller vers les infirmiers les sages-femmes puisque nous avons maintenant
la formation sur 3 ans postbaccalauréat. Nous continuons à faire une sélection d'abord sur dossier, puis
sur concours. Nous passons ensuite au 2e cycle correspondant à la 3e, 4e et 5e année. Nous continuons
ensuite en 6e année. Nous avons eu beaucoup de discussions pour déterminer s'il fallait 6 au 7 ans.
Entrer dans le système LMD résout ce problème, parce que l’examen classant national, comme il est
réalisé en France, peut être adopté. Nous pouvons ensuite aller vers une spécialisation. Ces
spécialisations se font de 3 à 5 ans, 3 pour la spécialité de la santé générale, communautaire, familiale,
etc., les autres spécialités maintiendront leur durée, 5 ans pour la médecine et la chirurgie. C'est à nous
de décider de cela.
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Enfin, nous avons la diplomation, l'habilitation accordant le diplôme :
- de fin de cursus ;
- théorique et pratique ;
- niveau Faculté. En effet, chaque Faculté doit s'organiser, mais elle peut ensuite converger pour
déterminer si cela peut être commun ou non.
Ceci réalise l'harmonie et fonde l'équivalence. Cette dernière peut être donnée à :
- une commission ministérielle ;
- Conseil national de l'Ordre des médecins, parce qu'il a les critères et les données. Il peut prendre
cette responsabilité surtout s'il est déjà habilité à le faire. Nous ne devons pas compliquer les choses,
à chaque fois que cela existe, il faut continuer avec.
En cas de besoin, nous pouvons ajouter des crédits supplémentaires en ce qui concerne la migration ou
nous pouvons trouver des aménagements.
La formation continue est un thème qu'il faut traiter à part. Nous avons mis du temps à l’intégrer :
- Obligation : Loi – Décret. Je l’ai personnellement je l'ai introduit dans la loi de l'Ordre. C'est une loi et
il faut l'appliquer. Cette loi doit être dans le cadre des régulations parce que nous ne pouvons pas
continuer à laisser le médecin à faire ce qu'il veut quand il veut. Si beaucoup ont leur conscience pour
la formation individuelle, auto-individuelle, nous devons avoir des règles qui s'imposent à tout à
chacun.
- Création Structure dédiée :
 Faculté – M.S. CNOM
 Sociétés Savantes. Nous pouvons faire ce que nous voulons avec la construction, des modèles
existent et fonctionnent. Le Canada travaille là-dessus depuis des décennies. N'ayons pas de
complexe à chercher les modèles existant pour les adapter.
- Différentes formes de dispensation : Nous nous mettons d'accord sur la périodicité, sur les
référentiels de bonnes pratiques, sur les besoins qualitatifs de l'exercice de médecine, parce que cela
peut différer selon les pays.
Nous avons besoin les uns les autres des mesures d'accompagnement :
- des ressources humaines en nombre suffisant ;
- création (si inexistant) en médecine générale de postes de praticiens hospitaliers au CHU parce qu'ils
doivent être partie prenante du système ;
- des ressources matérielles et financières suffisantes ;
- des sites de stage, dûment accrédités, après mise à niveau ;
- mise à jour des textes législatifs réglementant l’exercice des professions médicales afin d’être en
adéquation avec la réforme ;
- stratégie d’information et de communication dirigée vers l’ensemble des acteurs concernés
(enseignement, étudiants, syndicats…) et je félicite mes confrères du Cameroun qui ont une telle
stratégie.
Mes propositions globales seraient :
- création d'un groupe ad hoc à la CFOM pour le plaidoyer pour une mise en œuvre de la réforme et
des mesures d'accompagnement auprès des pouvoirs publics. Vous avez commencé seuls, mais
nous sommes plus fort ensemble et pouvons mieux agir. Nous sommes une entité sous-régionale qui
a du poids ;
- élaboration d'un plan d'action stratégique aboutissant à une convention générale, dans cette sousrégion médicale, d'harmonisation institutionnelle, d'équivalence des diplômes et pour la circulation
des étudiants dans l'espace de la CFOM ;
- pour les médecins : une réglementation tenant compte des intérêts légitimes des États, des
conditions de la circulation ou d'installation des médecins dans la sous-région francophone de la
CFOM. Nous devons absolument avoir les idées claires là-dessus. Je m'excuse de le dire ici
ouvertement, nous ne pouvons pas déshabiller Paul pour habiller Pierre. Il faut que ce soit dans
l'intérêt le plus compris réciproquement. Cela se fera probablement dans un mouvement de va-etvient. (Applaudissements.)
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M. le Dr DEAU
Je vous remercie pour cette excellente allocution. Vous auriez été à Londres ou à Bruxelles la semaine
dernière pour faire cette même présentation, cela n'aurait absolument pas dénoté dans le contexte de
notre directive 2005/36 qui régit l'harmonisation des diplômes en Europe.
Nous devons effectivement, pour cette migration des médecins dans l'espace de la CFOM ou même
vers l'Europe, avoir des mesures d'équivalence et grâce à la Déclaration Bologne et au LMD et au
programme que nous pouvons faire d'équivalence et d'harmonisation des diplômes. Par exemple au
CNOM à Paris, il y a des commissions de qualification de procédure d'autorisation d'exercer. Nous
pouvons donc trouver des outils communs à tous nos pays pour avancer et garantir in fine la
compétence des médecins et la sécurité des patients.
Nous ouvrons donc la discussion et nous donnerons ensuite la parole au Drs FINOUSI* et MANDJEE.
M. le Pr AYADI
Le président a parlé de l’introduction d’un numerus clausus alors qu’il y a un manque flagrant de
médecins au Cameroun.
M. le Dr DEAU
Il avait indiqué, me semble-t-il, que c’était sur l’instigation et les prévisions de l’OMS à plus de 20 ans.
M. le Pr TETANYE
Il faut avoir les capacités d’utiliser ce personnel. L’État a un volant de trésorerie qui lui permet d’utiliser
ces jeunes médecins, le secteur privé en a aussi. Ce numerus clausus vise à contrôler cette
démographie afin de ne pas avoir une population qui ne soit plus du tout contrôlée. Ce numerus clausus
s’impose d’autant plus que la pression s’exerce de façon extrêmement forte sur l’État qui est interpellé
pour augmenter le nombre de médecins, mais il ne peut pas le faire sans contrôle.
M. le Dr DEAU
C’est tout le problème de la régulation qu’a abordé le Pr ALAOUI. La France s’est malheureusement très
lourdement trompée avec le numerus clausus puisqu’actuellement elle a fait venir plus de 13 000
d’Europe et hors Europe afin de combler les manques et déserts médicaux.
M. le Dr AKA KROO
Je remercie le Pr TETANYE pour ce brillant exposé. Je m’interroge, concernant le numerus clausus au
Cameroun et qui existe pratiquement dans tous les pays, et notamment sur le fait qu’il y a environ 600
médecins camerounais en France alors qu’il y a des besoins importants ici. Je viens de la Côte d’Ivoire
et il y a beaucoup de médecins camerounais qui sont confrontés au fait que nous n’avons pas encore
accédé à la réciprocité d’échange des médecins entre les 2 pays. Par conséquent, ces médecins sont
une situation illégale. C’est un véritable problème pour le Cameroun.
J’ai été interpellé par les indicateurs que vous avez présentés et je pense qu’il ne faut pas suivre les
recommandations de l’OMS. La cote d’Ivoire a été confrontée à ce problème, nous avions 1 000
médecins au chômage au moment de la crise, à cause des recommandations de la Banque mondiale
qui préconisait que l’État ne devait pas dépenser et embaucher. Or, pendant la crise, des déchets
toxiques ont été déversés dans la ville d’Abidjan et le nombre de médecins ne suffisait pas à couvrir le
problème. Il a donc fallu mettre ces 1 000 médecins à la disposition de l’État pour traiter des milliers de
personnes. Lorsque cet incident a été jugulé, il a fallu les embaucher et nous avons bien trouvé le
budget pour les payer. Par conséquent, il y a ce que la Banque mondiale recommande et l’autorité qui
doit prendre ses responsabilités.
L’Afrique centrale a un effort régional important à fournir. L’Afrique de l’Ouest a réglé le problème de
l’harmonisation des cursus de formation, nous avons le même cursus pour la médecine générale et le
même cursus pour la spécialité. Tout a été défini et nous sommes allés plus loin parce que nous avons
le même code de déontologie.
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Concernant l’accréditation, il me semble que le Cameroun fait passer le CRESA*, le nombre de dossiers
médicaux patients sont déjà sortis et mis à la disposition des États, la norme accueille des patients est
déjà rédigée. Les référentiels sont mis à disposition des États. Nous demandons même au CRESA de
nous rédiger la norme de l’examen médical déontologique des patients qui sera à la disposition de tous
les États. Votre équivalent de l’OMS régional devrait contacter le nôtre afin d’avancer sur ce plan.
L’organisme régional ici doit faire un effort, parce que si les documents sont déjà rédigés, c’est qu’il y a
du travail à faire.
M. le Dr Dominique NOANOA*, membre du CNOM Cameroun
Concernant les médecins camerounais à l’étranger, il y a, d’une part, un problème d’utilisation des
médecins. Beaucoup de médecins camerounais en France ne souhaitent pas rentrer au Cameroun
après la formation. Cela crée le problème du nombre de médecins programmés par le gouvernement
pour leur utilisation. D’autre part, il y a le problème de la qualité de la formation des médecins que
l’Ordre combat. Ce n’est pas parce que nous avons besoin de beaucoup de médecins que nous
pouvons les former sans moyens.
M. le Dr DEAU
Vous avez tout à fait raison, nous avons le même problème en Europe, la migration des médecins d’un
pays à un autre déséquilibre la problématique du numérus clausus et de la régulation. En France, le
numerus clausus est totalement contourné. Plus de 3 000 jeunes français vont se former en Roumanie
et parallèlement plus de 3 000 médecins roumains viennent exercer en France depuis 2007 par
l’application de la directive 2005-36.
En Roumanie, des hôpitaux entiers sont actuellement sans médecin et en France ces médecins
roumains ont quelques difficultés à appliquer des normes de culture médicale françaises. Nous ne
ferons pas une Europe de la paix en déshabillant Paul pour habiller Pierre comme le disait le Pr ALOUI.
Nous devons être conscients de tous ces contournements et être vigilants de ce qui peut se cacher
derrière un numerus clausus. Une régulation s’impose, elle est faite par l’État, mais il y a des moyens de
la contourner. La France en est à la fois le meilleur et le plus mauvais exemple.
M. le Dr FOFANA, Président du Conseil national de l'Ordre des médecins du MALI
Je félicite les Prs TETANYE et ALAOUI pour la qualité très didactique de leur présentation. J’ai été
quelque peu distrait et n’ai pas entendu la place du partenariat public-privé dans la formation médicale. Il
a été souligné le déficit criant en ressources humaines dans la formation et particulièrement des
structures privées de formation. Quel est donc le profil des enseignants du secteur privé ?
Au Mali, ceux qui enseignent à la Faculté enseignent également dans les écoles privées. À l’inverse,
est-ce que les spécialistes du privé, qui en ont la capacité par des tests pédagogiques, peuvent
enseigner dans les Facultés d’État ?
Une mise en commun des synergies étant souhaitée aussi bien par le Pr TETANYE que par le Pr
ALAOUI, les efforts doivent être mis en commun aussi bien pour les exigences du privé que du public
afin de participer à la bonne formation médicale.
UN INTERVENANT
Monsieur le Secrétaire général, avec votre permission, nous demandons des informations sur
l’expérience africaine et vous pourriez peut-être parler de l’expérience en France par rapport au PPP*.
M. le Pr ALAOUI
J’ai oublié de mentionner que notre Secrétaire général a géré ce service de formation et d’équivalence
au CNOM pendant des années. Il sait donc de quoi il parle.
M. le Dr FOFANA parle de partenariat public privé, nous pensons que c’est une formation quel que soit
le lieu où elle sera réalisée. Elle doit absolument être conforme aux critères exigibles pour encadrer les
conditions d’apprentissage et de compétences. Je n’ai pas voulu entrer dans les détails, mais nous
avons effectivement dans notre législation un partenariat public-privé. Il a été inscrit dans la loi de la
réforme de l’Enseignement supérieur de 2001, que tous les établissements d’enseignement supérieur
doivent avoir les mêmes standards de qualité humaine, de formation humaine, de technique
d’enseignement, de lieu de stage, etc.
9
Il n’y a pas de public-privé, mais la formation qualitative du médecin dans les conditions exigibles de sa
profession et de sa responsabilité.
Chaque pays a réalisé un certain nombre de travaux qui seront soumis à cette Commission que nous
devons mettre en place.
Par ailleurs, nous ne pouvons pas passer outre que d’avoir un plaidoyer vis-à-vis des autorités publiques
pour indiquer que l’un des besoins fondamental, existant dans tous les pays africains, est la santé avec
l’Éducation nationale et après l’habitat. C’est une exigence. Or, notre pays doit faire un plaidoyer vis-àvis des politiques parce que certaines prises de position sont un peu passéistes.
Il y a 6 ans, le gouvernement a pris la responsabilité de l’initiative de la formation de 3 300 médecins à
l’horizon 2020. Nous avons déjà ouvert le numerus clausus que nous avons mis en place afin de
graduellement nous adapter.
M. le Dr SANDJON indiquait qu’ils ont un plan jusqu’en 2035 et ils sont en train de mettre en place les
éléments. Ce plan n’est pas figé, il s’adapte.
Les Ordres des médecins peuvent être cet élément de plaidoyer et de propositions. Ils seront entendus
puisque l’État leur a délégué une partie de pouvoirs publics.
Il faut réunir toutes les expériences et les mettre sur le site pour ce groupe ad hoc. En revanche, il faut
adapter cette démarche LMD en l’adaptant à nos besoins, structures et moyens.
M. le Pr TETANYE
Le partenariat public-privé ne pose pas de problème. Le problème du partenariat est que les deux
partenaires sont à équidistance. Lorsque, par exemple, au Kenya la Fondation Aga Khan construit le
plus bel hôpital de l’Afrique orientale et fait venir des professeurs émérites dans son institution, c’est une
plus-value et la qualité de sa formation ne pose aucun problème.
Le problème du partenariat dans nos conditions ici est totalement différent, comme vous l’avez souligné
le privé n’a pas les moyens de payer le salaire des professeurs, il va donc les recruter auprès des
Facultés d’État pour leur donner des prestations et des vacations, ce qui altère la qualité de la formation
de ce qui est le socle de l’État.
C’est pourquoi nous pensons que dans des conditions le privé ne semble pas en mesure de remplir ce
tonneau de danaïde que constitue la formation médical. Cela coûte trop cher de payer ces professeurs,
d’assurer ces infrastructures extrêmement lourdes, d’assurer le matériel didactique extrêmement
couteux. Lorsque le privé est capable de le faire pour les bonnes causes, le partenariat public privé est
absolument souhaitable pour nous.
Mme le Dr EFILA EBE, Présidente du Conseil national de l’Ordre des Chirurgiens-dentistes
Il s’agit d’un numerus clausus de formation et pas d’utilisation. Les chirurgiens-dentistes se sont
opposés au nombre d’étudiants enregistrés en première année parce que les installations ne suivent
pas. La 1re promotion est arrivée en 4e année, il n’y avait pas de salles de TP. Les chirurgiens-dentistes
ont imposé ce numerus clausus plus pour une absence de moyens de formation. Nous voulons des
chirurgiens-dentistes formés, de qualité et non des perceurs de joue.
Concernant le partenariat public-privé, je suis chirurgien-dentiste installé en cabinet privé, mais je suis
enseignante à l’université de médecine de Yaoundé par besoin. Nous faisons donc ce que nous
pouvons et c’est la réalité. Nous ne pouvons pas autoriser et accepter une formation qui va dans tous
les sens. L’État a libéralisé, mais nous sommes contre cette libéralisation. L’état doit assurer son pouvoir
régalien de formation de qualité. Il en va de l’avenir de nos enfants et petits enfants. C’est pourquoi nous
avons exigé ce numerus clausus qui n’est pas figé. Si dans 2 ou 3 ans, des structures de formation
idéales et acceptables sont mises en place, nous reverrons ce numerus clausus à la hausse puisque
nous avons des chirurgiens-dentistes et qu’il est de plus en plus difficile d’aller se former à l’étranger.
Jusqu’à présent, tous les chirurgiens-dentistes en exercice au Cameroun ont été formés à l’étranger.
Nous espérons bientôt avoir la première promotion « made in » Cameroun, mais ce « made in »
Cameroun doit être labellisé et au bon niveau.
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M. le Dr BAH, Président de l’Ordre des médecins de Guinée
Je félicite les deux intervenants pour leur exposé. Je partage tout à fait l’état des lieux présenté par le
Pr TEYANYE. Nous avons le même problème. C’est un défi qui nous interpelle tous et surtout la
tendance de plus en plus forte à privatiser les Facultés de médecine à but purement lucratif sans tenir
compte des objectifs pédagogiques. L’Ordre des médecins doit être vigilant parce que nous avons
également beaucoup d’exemples en la matière dans notre pays qui ont dans un but purement lucratif
sans tenir compte des objectifs pédagogiques. Au lieu de former les médecins de demain et de laisser
ce mal perdurer, ils vont former des assassins.
En Guinée, lorsque nous avons constaté qu’il y avait cette tendance forte, nous nous sommes opposés
à l’ouverture d’une faculté de médecine et nous nous sommes confrontés au gouvernement qui avait
donné l’accréditation. Puisque nous partageons ce souci avec la population médicale, nous avons
bénéficié du soutien de tous les médecins de Guinée. À l’époque, je craignais fort que si l’on ne
respectait pas un programme pédagogique harmonisé enseigné par des enseignants de rang magistral
avec des méthodes d’évaluation harmonisées et conformes à l’OAS, nous formerions des assassins au
lieu des médecins. Aussi lorsque j’ai été assigné au tribunal, tous les médecins se sont sentis concernés
et m’ont apporté leur soutien y compris les pharmaciens. Il n’est pas évident d’avoir le soutien du
gouvernement. Il faut faire attention à cet envahissement.
Je ne parlerais pas de partenariat public-privé, mais comme l’a dit Mme EFILA EBE, la formation est une
mission régalienne de l’État. (Applaudissements.)
UN INTERVENANT
J’apprécie le cursus de formation du Maroc. Comme mon ainé de la Cote d’Ivoire l’a mentionné, je
pense que nous avons un programme de formation harmonisé.
Le stage clinique que vous programmez en 6e année est-il le pendant de la synthèse clinique ou y a-t-il
une année de synthèse clinique comme en Afrique de l’Ouest ?
M. le Dr SANDJON
Je reviens sur l’intervention de M. BAH, nous n’avons absolument pas bénéficié de l’appui du
gouvernement. Lorsque nous avons commencé à parler du problème de la formation médicale, on nous
a pris pour des fous, nous avons même été menacés. J’expliquais encore au Premier ministre que lui
avait un gendarme pour le protéger, mais pas nous, et c’est ce même ministre qui nous a pris pour des
fous lorsque nous avons commencé. Nous n’avons certes pas été assignés au tribunal comme vous,
mais c’était presque pire. Les lobbys appâtés par le gain sont très puissants et cela ne va pas s’arrêter.
Par conséquent, sans le soutien de tous, vous ne pouvez rien faire. On vous accuse d’avoir des intérêts
occultes, d’accointances politiques, tout y passe.
Cela n’a pas été un long fleuve tranquille, cela a duré 3 ans et demi et nous escamotons un système
pour ne mettre en difficulté le gouvernement. Nous avons retourné une tendance acquise, mais le coût
social est très important. Cela me fait de la peine de voir que 1 300 étudiants entre la 2e et 5e sont sur le
trottoir.
L’Ordre des médecins est une Institution indépendante sur le plan politique, économique, de la même
manière qu’un médecin qui prête serment ne doit pas se laisser contingenter par quoi que ce soit ni la
religion ni la politique ni les sentiments personnels. Cela a été très difficile.
Nous faisons partie du jury de recrutement de l’examen à l’aptitude à la formation médicale. Aucun
étudiant, qui a passé l’examen de la 3e à 4e année, n’a eu la moyenne. À l’examen de sémiologie, ils
écrivaient examen de « simiologie », c’était catastrophique. Pour amortir, le choc nous avons demandé
que ces étudiants qui passaient dans le 2e cycle reprennent la 3e année pour essayer de rattraper ceux
qui avaient entre 9,5 et 10.
11
M. le Pr TETANYE a rapidement passé ce sujet parce que nous ne voulons pas nous vanter d’une
victoire qui n’en est pas une. Nous l’avons simplement obtenu avec beaucoup d’insistance. Certains
d’entre nous, fonctionnaires dépendant de l’état, ont perdu leur poste.
Lorsque j’ai suggéré ce thème il y a 2 ans au Gabon, je ne pensais pas que nous aboutirions à ce
résultat, nous étions encore dans la lutte et il fallait absolument qu’il y ait un appui international pour
crédibiliser notre action.
Pour rassurer les confrères présents, quand je parlais de ces étudiants, aucun n’échappera à
l’évaluation. Nous avons préféré ce coût social de 1 375 étudiants qui seront sur le carreau et qui ne
seront pas médecin. Ils vont peut-être revenir faire une formation en kinésie, technicien de laboratoire ou
autres, mais ils ne seront jamais médecins au Cameroun. Pour ceux qui pensent travailler au Gabon, en
Cote d’Ivoire ou en Guinée, nous leur avons dit que malheureusement pour eux, la Francophonie va
harmoniser la formation pour qu’il n’y ait pas de « migration » non contrôlée et qu’un étudiant
camerounais aille trouver fortune ailleurs. C’est toute l’importance de nous retrouver et je ne parle pas
de la France où il faut passer la PAE.
M. le Dr MBUTUKU, Président de l’Ordre des médecins de la République démocratique du Congo
Je me joins aux félicitations pour cette présentation didactique. Nous avons tous les mêmes problèmes,
nous avons nous aussi l’impression que l’État voulait se débarrasser de la formation au profit du privé.
Chacun dans son coin voulait créer une Faculté de médecine sous prétexte de former des originaires de
sa région pour soigner les siens. Malheureusement, les conditions ne suivent pas.
Finalement, en faisant pression auprès du gouvernement, nous avons eu la chance d’avoir un ministre
médecin qui nous a associés à un audit organisationnel sur les Facultés de médecine et les filières
infirmières.
En République démocratique du Congo, 47 Facultés de médecine ont été inventoriées, dont 25 sont
étatiques. Ce sont les mêmes professeurs de la Faculté de médecine mère, qui a environ 1 600
professeurs, qui enseignent à travers toute la République. En faisant une évaluation, nous avons
effectivement constaté que des Facultés de médecine devaient fermer et le ministre a eu le courage de
prendre cette décision que nous avons soutenue. Malheureusement, la population, à qui l’on avait
promis une Faculté dans leur contrée, s’est liguée contre cette décision et le Premier ministre a dû
reculer devant cette réaction.
C’est pourquoi nous avons encore des Facultés de médecine qui continuent à fonctionner malgré nous,
mais nous continuons à faire pression sur le gouvernement parce que c’est son devoir de former.
Arrivée du Délégué du gouvernement auprès de la Communauté urbaine de Douala
M. le Dr SANDJON
Le Délégué du gouvernement de Douala, chers Présidents des Ordres de médecins, bienvenu à Douala.
Nous sommes ici réunis à la Conférence francophone des Ordres nationaux des médecins. Bien que
nous ayons déjà commencé cette réunion avec le Président de l’Ordre national des médecins du
Cameroun, le Délégué du gouvernement ouvrira officiellement cette conférence.
M. le Dr SANDJON
Je prends la parole au nom du comité d’organisation et au nom de l’ensemble des médecins du
Cameroun. Monsieur le Délégué du gouvernement auprès de la Communauté urbaine de Douala,
Madame la Présidente de l’Ordre national des chirurgiens-dentistes du Cameroun, Monsieur le
Président du syndicat national privé du Cameroun, Monsieur le Président de la conférence francophone
des Ordres des médecins, Monsieur le Président d’honneur, Monsieur le Secrétaire général et Président
de l’Association mondiale des médecins du monde (108 pays), Messieurs les membres de la CFOM,
Présidents des Ordres nationaux de vos différents pays, je vous souhaite la bienvenue dans cette salle
du Sawa Novotel pour cette 5e conférence francophone des ordres des médecins.
Je suis sûr que le nombre des pays ici présents est le plus élevé depuis la création de la Conférence et
je tiens à vous en remercier parce que nous n’imaginions pas que le déplacement de Douala serait aussi
couru lorsqu’il y a 2 ans à Libreville on m’avait demandé d’organiser cette conférence au Cameroun.
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Je souhaite également la bienvenue à la Délégation des médecins française et au Secrétaire général de
l’Ordre national des médecins de France.
Avant de poursuivre, je voudrais présenter nos ordres, acteurs de notre matinée :
- Madagascar : Mme SAMISON, Trésorière du CFOM
- Guinée : M. BAH
- Luxembourg : Mme Valérie BETSCH, juriste d’origine camerounaise et Secrétaire général.
- Gabon : M. OGANDAGA et M. MOUYOPA
- Tunisie : M. CHAABOUNI
- France : M. DEAU, Secrétaire général du CFOM, président de l’AMM, et M. VORHAUER, Secrétaire
général de l’Ordre des médecins français et Mme DARMON, juriste conseillère à l’Ordre des
médecins français et cheville ouvrière de toute cette réunion.
- Algérie : M. AYADI
- Cote d’Ivoire : M. AKA KROO et M. KOUAME son conseiller
- Croix rouge internationale de Genève : M. ESHAYA-CHAUVIN, merci de nous apporter votre
éclairage sur les aspects de sauvetage que les médecins doivent intégrer dans leur pratique
quotidienne ;
- France pour l’union FMC : M. MANDJEE qui parlera de l’enseignement postuniversitaire ;
- Maroc : M. ALOUI, le « père » de notre institution ;
- Burkina-Faso : M. SANON BAKAERY, Vice-président de l’Ordre national des médecins du BurkinaFaso ;
- Centre Afrique : en raison de la situation intérieure de son pays et de problème d’avion M. SEPOU
n’est pas présent, mais essaiera de nous rejoindre et est représenté par M. NAMBEI ;
- République démocratique du Congo : M. MBUTUKU MBAMBILI accompagné de son Secrétaire
général, M. SESE NDELE
- Mali : M. FOFANA
- Tchad : M. DJOUDOUNGSEOUGOU, Président du Conseil national de l’Ordre des médecins du
Tchad. Pour la petite histoire, le Tchad et la Centre Afrique sont les filleuls dans la filiation de cette
conférence ;
- Togo : M. AMEDEGNATO DEGNON, Président du Conseil national de l'Ordre des médecins du
Togo.
(Applaudissement.)
Je vous remercie d’avoir fait ce déplacement qui n’est pas facile. Vous avez tenu à être là malgré la
modicité des moyens de nos institutions pour nous faire partager l’expérience de vos pays qu’en à
l’Institution ordinale que nous dirigeons.
Je reviens sur la formation médicale dont nous avons parlée beaucoup plus que nous le pensions en
attendant le début de la cérémonie protocolaire. Les Ordres nationaux des médecins ont aussi certes la
gestion de l’éthique et de la déontologie, mais ils ont aussi un regard sur la formation médicale que nous
devons avaliser en aval, ce qui a été fait en amont. Pour avaliser, c’est-à-dire inscrire les médecins au
Tableau, il faut connaitre quelle a été la formation initiale. C’est pourquoi nous sommes obligés d’avoir
ce droit de regard sur la formation médicale. C’est ce que nous avons obtenu au Cameroun au travers
de la Commission nationale de formation médicale.
La semaine dernière, nous avons assisté au premier jury de recrutement des étudiants à l’aptitude à la
formation médicale suivant les normes dont nous avons parlées. Au Cameroun, le document de
stratégie pour la croissance et l’emploi, qui est notre plan pour 2035, a fixé un nombre de 500 médecins.
Il ne faut pas aller trop vite afin de peupler le monde médical de médecins qui n’en valent pas la peine.
Je remercie le Délégué du gouvernement et sa qualité de médecin fait que je n’ai pas eu à faire
beaucoup d’effort pour obtenir de lui tout ce que nous avons obtenu pour cette conférence.
(Applaudissements.)
Je remercie également le Consul général de France qui nous recevra à midi et qui ne pouvait donc être
présent ce matin. Il a fait, dès le départ, ce qu’il avait à faire.
13
Je remercie le Président sortant de la CFOM, M. Emmanuel OGANDAGA, qui pendant 2 ans a dirigé
d’une main de maître notre Conférence, ainsi que son Secrétaire général, M. Xavier DEAU qui a
beaucoup œuvré pour que cette conférence ait lieu ce matin.
Je remercie également l’ensemble du Bureau pour votre présence ainsi que les partenaires qui nous ont
accompagnés dans cette organisation : Orange Cameroun, les laboratoires INNOTHEC International,
Sanofi et l’assurance des médecins ASCOMA.
Je remercie enfin tout le Comité d’organisation et le CNOM du Cameroun dont certains membres sont là
depuis 2 ou 3 jours et qui sont venus de tout le pays pour la réussite de cet évènement.
Je vous remercie et vive la Communauté médicale du Cameroun, la CFOM et le Cameroun !
M. le Dr OGANDAGA
Monsieur le Délégué du Gouverneur auprès de la Communauté urbaine de Douala,
Madame la Présidente de l’Ordre de chirurgiens-dentistes du Cameroun,
Monsieur le Président d’Honneur de la CFOM, cher Pr ALOAUI,
Mesdames et Messieurs les Présidents des Ordres membres de la CFOM,
Chers confrères,
Honorables invités en vos fonctions et qualités,
Mesdames et messieurs,
Les rencontres de la CFOM se déroulent comme par enchantement, au bord d’un cours d’eau
intarissable. En effet, que ce soit à Paris, Bamako, Casablanca et aujourd'hui à Douala, le fleuve Wouri
qui se jette dans l’Océan Atlantique nous invite à prendre à nouveau le large pour une réflexion. Ce
détachement nécessaire de la routine quotidienne nous amène à nous pencher sur des sujets ayant trait
à l’évaluation de nos pratiques et la culture des valeurs ordinales qui caractérisent notre art.
Aussi, adressons nos sincères remerciements à l’Ordre national des médecins du Cameroun et plus
particulièrement à son dynamique et convivial Président, Dr Guy SANDJON, pour l’accueil et l’excellente
organisation de cette Assemblée générale ordinaire.
Monsieur le Délégué du Gouverneur auprès de la Communauté urbaine de Douala,
Chers collègues,
Chers confrères,
Mesdames et messieurs,
En novembre 2012, nous avons débattu à Paris, d’un thème central qui reste d’actualité Les soins de fin
de vie avec leur corollaire préoccupant qu’est l’euthanasie qui a permis à nos Ordres, et plus
particulièrement ceux non ressortissants de l’Europe, de mieux cerner les usages et les prescriptions
légales qui s’affrontent avec les exigences déontologiques et les convictions religieuses et
philosophiques. Cette Assemblée générale va heureusement achever un autre axe de réflexion entamé
à Paris : l’indépendance des médecins dans le contexte particulier qu’est celui des conflits armés. Elle
permettra également d’aborder un domaine essentiel, la formation. Nous l’avons déjà abordé par le biais
de ses artifices organisationnels.
En effet, comment concevoir un médecin offrant des soins de qualités sans formation initiale requise
adéquate dont la pratique quotidienne n’est pas soutenue par une formation postuniversitaire continue,
elle aussi de qualité ? La déontologie ne nous astreint-elle pas à dispenser des soins les meilleurs
possible au regard de l’évolution de la science ? Certes, les Facultés de médecine ont la primauté sur
les Ordres sur la formation initiale, mais les Ordres devraient avoir un rôle plus affirmé en matière de
formation médicale continue par la coordination de celle-ci, tant sur le plan des programmes et la qualité
de ces enseignements que de la participation obligatoire et réglementaire des confrères.
Monsieur le Délégué du Gouverneur auprès de la Communauté urbaine de Douala,
Chers collègues,
Chers confrères,
Mesdames et messieurs,
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Je m’en serais voulu si j’avais conclu mon propos sans remercier les membres du Bureau qui m’ont
accompagné pendant ce mandat enrichissant qui s’achève. Je souhaite, au moment où je passe le
témoin, que notre association, la CFOM, qui a atteint maintenant la maturité productive, puisse continuer
à œuvrer pour cette médecine francophone, encadrée par une éthique et des règles déontologiques
partagées et vives.
Je vous remercie.
M. le Dr DEAU
Monsieur le Délégué du Gouverneur auprès de la Communauté urbaine de Douala, Messieurs les
Présidents,
Je prends la parole en tant que Président élu de l’AMM. Il est évident que les droits de l’homme, les
droits des patients, l’indépendance professionnelle, les compétences, la sécurité des patients, les
principes fondamentaux de l’éthique médicale, sont universels et dépassent très largement nos
frontières.
Nous savons à quel point, au niveau international, la francophonie est importante et est le socle même
de la pensée éthique à travers le monde. Nous nous en sommes rendu compte avec M. MBUTUKU
MBAMBILI à Washington sur la Déclaration d’Helsinki, avec M. AKA KROO cette année à Bangkok à
Bali et encore à Fortaleza. Nous sommes très heureux d’accueillir au sein de l’AMM mon ami Guy
SANDJON, cela fait maintenant deux ans que nous collaborons et coordonnons nos efforts pour que
cette pensée francophone dépasse très largement nos frontières.
Par exemple, sur la Déclaration d’Helsinki, texte fondamental de 1964 sur les essais cliniques, il a fallu
que nous défendions la confidentialité, le consentement individuel, la définition des populations
vulnérables afin que certains pays, plus pauvres que d’autres, ne soient pas des terrains
d’expérimentation. Je remercie MM. MBUTUBU et AKA KROO parce que nous l’avons encore fait
ensemble à Fortaleza.
Il est fondamental que cette éthique universelle, certes déclinée au travers de nos déontologies
respectives, existe et que la francophonie continue à être le fer de lance de cette éthique universelle.
Aussi, je demande à chacun peut-être d’adhérer à l’AMM, tout à chacun peut s’inscrire et nous vous
donnerons la possibilité de le faire par mail, parce qu’il est important que la francophonie existe au-delà
de la CFOM et existe à l’AMM.
Je vous remercie de votre attention.

M. leDr Fritz NTONE NTONE, Délégué du Gouverneur auprès de la Communauté urbaine de
Douala.
Bonjour, devant toutes ces personnalités, vous conviendrez qu’il serait fastidieux d’interpeller chacun
d’entre vous. Je me permettrais tout simplement d’apprécier la présence à cette réunion de Mme la
Présidente de l’Ordre national des chirurgiens-dentistes. Pour ce qui est des Ordres des médecins, il me
semble qu’il y en a beaucoup. Je vous remercie, Madame la Présidente, de nous honorer de votre
présence à ces assises.
J’ai plusieurs fois mis de côté le discours que je devais prononcer, car devant des confrères je ne savais
pas si je devais revêtir un costume protocolaire. C’est pourquoi je me permets de vous parler
simplement. Il m’a été aussi difficile de déterminer ce que je devais dire, devais-je présenter la ville… Me
lancer dans ce type d’exercice ne serait pas intéressant puisqu’un document vous a été remis décrivant
largement la ville. Que peut donc dire un Premier magistrat à ses hôtes ? C’est embarrassant, je dois
imaginer les sujets qui vous questionnent et vos préoccupations.
C’est pourquoi j’ouvre une parenthèse pour parler de la posture d’un médecin. Lorsque l’on est médecin,
comment s’en sortir dans la gestion d’une ville ? Je ne vous ferai pas une conférence, mais en deux
mots je vous donnerai mon sentiment.
15
En tant que médecin, vous devez être fiers qu’un de vos confrères assume cette responsabilité. Douala
compte un peu plus de 3 millions d’habitants et est la capitale économique du pays.
J’ai senti que c’était une petite prolongation de ce que je faisais en tant que médecin puisque j’enseigne
la médecine dans le cadre de la santé publique. J’ai fait de la médecine hospitalière, de la santé
publique et de la médecine communautaire.
Plus que jamais, j’ai vu l’épanouissement de la définition de la santé qui n’est pas seulement l’absence
de la maladie, mais un état de bien-être d’un individu. La mission globale du maire est de veiller au bienêtre des populations, améliorer leurs conditions de vie avec la corrélation d’un bon assainissement. En
curant les caniveaux, les eaux circulant plus facilement, il y aura moins de moustiques (et peut-être
moins de paludisme) et nous parviendrons au bien-être.
Avant la réhabilitation d’une route, les usagers qui partaient d’un point de la ville étaient toujours
stressés, réajustant leur temps par rapport à leur point d’arrivée, s’énervant en tombant dans un trou,
maudissant le Délégué du gouvernement quand les enjoliveurs se cassaient. Après la réhabilitation, je
les vois soulagés, guéris et débarrassés de leur stress.
C’est en cela que consiste le travail d’un maire : une santé publique beaucoup plus large. Soyez donc
rassuré, je ne suis pas perdu même si j’ai perdu un peu la main. (Applaudissements.)
Je prolonge notre raison d’être, celle de donner aux populations un bien-être et d’améliorer les
conditions de vie quotidienne.
Sachez que je fais tout pour que le corps des médecins soit toujours fier et j’espère que j’y réussis.
La Ville de Douala qui accueille cette 5e Conférence mondiale des Ordres est très fière et très honorée.
Au nom donc de sa population, de ses magistrats municipaux, de ses conseillers municipaux, je vous
souhaite la bienvenue et un agréable séjour dans notre ville. Vous avez déjà dû constater qu’elle est très
accueillante. Si vous prenez le risque d’y passer 2 ou 3 jours, vous n’aurez plus envie de partir, on a
toujours envie de revenir à Douala.
Je remercie le Comité d’organisation de m’avoir désigné pour en assurer le parrainage. Je transmettrai à
qui de droit, au ministre de Tutelle, au ministre de la Santé publique, que tout s’est bien passé et que
vous avez eu un encadrement digne de la tradition d’accueil de la ville de Douala et du Cameroun en
général.
Je vous prie d’accepter le macaron, symbole de la Ville, que la Ville de Douala remet à la Conférence à
travers M. DEAU. Qu’il ne cesse de penser à la ville de Douala à chaque fois qu’il voit ce macaron.
(Applaudissements.)
Je déclare officiellement ouverts les travaux de la 5e Conférence en vous souhaitant qu’ils soient
fructueux et bénéfiques pour les populations de nos pays respectifs.
Je vous remercie. (Applaudissements.)
Départ du Délégué 11 h 40

M. le Dr Deepak MANDJEE, UNION-FMC.
Je présenterai d’abord les objectifs d’organisation, dans un deuxième temps l’exemple concret de ce
que nous avons mis en place et enfin l’offre de formation pour les pays francophones qui est une
mission à mon sens.
L’UNION-FMC a pour principale mission d’assurer la formation médicale continue de qualité pour les
médecins généralistes en s’appuyant sur une organisation inédite, originale et indépendante.
16
L’association s’appuie sur quatre instances :
- un comité scientifique ;
- un comité pédagogique ;
- des experts d’enseignement en médecine générale ;
- des référants hospitaliers de 135 villes non universitaires.
Le comité scientifique a la charge de valider les formations de l’UNION-FMC. Il est composé de 12
médecins de réputation nationale, voire internationale.
Le comité pédagogique conçoit les formations de l’UNION-FMC. Il est composé de plus de 150
médecins hospitalo-universitaires de premier plan, comprenant 43 spécialités médicales et recouvrant
toute la formation médicale continue pour les généralistes et les spécialistes. Ces 150 médecins
hospitalo-universitaires appartiennent à tous les CHU de France et ont été colligés avant tout pour leur
spécificité pédagogique et leur niveau scientifique.
Les experts d’enseignement de médecine générale revoient les formations pour les adapter au public
concerné. C’est l’unique organisme en France dont les sujets sont rédigés par des hospitalouniversitaires de tout premier plan qui sont ensuite ajustés polis par des experts de médecine générale
pour les présenter aux médecins généralistes. Nous avons le privilège et l’honneur d’avoir des référants
hospitaliers dans 135 villes de plus de 10 000 habitants sur les 170 existantes en France. Par
conséquent, nos dossiers pédagogiques sont construits par des PU-PH de haute volée, polis et
présentés pour les médecins généralistes et les spécialistes par des experts de l’enseignement et nous
déclinons ces dossiers au niveau de chaque ville. Nous n’envoyons pas les Parisiens à Marseille et les
Marseillais à Paris. Les médecins généralistes sont donc devant un dossier conçu de façon
extraordinaire par des personnes qu’ils connaissent. Ainsi, nous assurons une collaboration entre les
médecins généralistes et les hospitaliers qui ont un talent pédagogique certain.
Cette organisation inédite permet de proposer des formations d’excellence sur des sujets très variés et
d’être réactifs aux nouvelles problématiques.
En 2009, la France a subi une épidémie de grippe H1N1. Des demandes spontanées de médecins
généralistes et spécialistes ont émergées pour la prise en charge de cette grippe pour des patients
atteints ou suspectés d’être atteints par la grippe. Ces demandes pouvaient être spécifiques ou globales,
par exemple, sur la conduite à tenir face à la grippe chez une femme enceinte ou de manière plus
générale sur la vaccination antigrippale. Pour cela, nombre de nos membres du comité pédagogique
faisaient partie de groupes de travail en tant que comité d’expert au ministère de la Santé et parmi les
sociétés savantes faisant référence dans les pathologies concernées.
Nous avons donc élaboré un diaporama unique dans sa conception et qui a été adressé au Conseil
départemental des Vosges en 2009 et à 101 conseils départementaux pour qu’ils le distribuent. Chaque
société savante donnait ses indications pour leurs confrères et le médecin généraliste était exclu. C’est
pourquoi nous avons décidé de colliger toutes les références. Ce sont des médecins qui viennent de 10
régions différentes et de 9 spécialités différentes, ce qui représente un travail national unique en son
genre.
Nous avons eu des présentations spécifiques pour les spécialistes, c’est-à-dire que doit faire un
infectiologue face à un patient atteint de grippe ? Lorsque nous avions un public de spécialistes, nous
avions un diaporama qui leur était adapté.
Je suis africain et que je viens ici en pèlerinage. Ce pèlerinage a trois fonctions, me faire pardonner pour
mes erreurs, accompagner un malade inguérissable et me délester de mes richesses pour les partager
avec vous.
Mon discours est donc différent, je n’ai pas d’indications, mais que des choses à donner et recevoir votre
bénédiction.
17
Nous avons fait quelque chose d’unique et c’est une première mondiale. Avant, nous avions des
visioconférences de formation médicale, c’est-à-dire des cours magistraux. Nos comités scientifiques et
pédagogiques ont réfléchi à une formation plus interactive, c’est-à-dire sonder ce que les médecins
savent et ne savent pas pour en faire le complément. Les médecins ont vraiment un acquis lorsqu’ils
sortent de cette formation. Nous ne pouvons pas révolutionner leurs connaissances en deux heures,
mais nous leur donnons des conduites leur permettant d’illuminer leur pratique quotidienne.
Il s’agit d’une expérience unique parce qu’en France 30 % des médecins font de la formation médicale
continue, donc 70 % n’en font pas. Parmi ces 30 %, 90 % demandent à un ami cardiologue qui rédige un
PowerPoint sur lequel ils échangent ensuite. 10 % font de la formation interactive. La nôtre est présidée
et expertisée par les plus grands noms de la médecine française. Moins de 1 % de médecins français en
profitent.
En général, nous exportons des pays de l’occident vers les pays en voie de développement de 4e, 5e ou
6e catégorie et je veux vous offrir cette technique dont moins 1 % de Français ne profitent pas.
(Applaudissements.)
Je demande à des patrons de donner le meilleur d’eux-mêmes gratuitement et la formation se déroule
comme suit :
- Travail à domicile des cas cliniques adressés 10 jours à l’avance ;
- Nomination d’un rapporteur par cas clinique ;
- Débriefing des cas cliniques par visioconférence avec l’expert ;
- PowerPoint de synthèse de l’expert.
C’est vraiment un accompagnement. Les personnes sont tellement gentilles et humbles que je vis un
rêve éveillé avec des personnes d’une formation et d’une hauteur médicales que j’ai rarement vues.
Nous faisons un débriefing du premier cas clinique et si le public médical n’a rien à ajouter, nous faisons
un deuxième cas, un troisième puis un quatrième. Après quatre cas, nous avons abordé toutes les
situations ou la plus grande partie des situations cliniques auxquelles sont confrontés les généralistes.
L’expert fait alors un PowerPoint des points clés qui est la synthèse.
Pourrons-nous d’un commun accord organiser cette formation au sein de tous les pays francophones ?
Nous avons plus de 200 professeurs de médecine de haut talent pas seulement chef de service, mais
avec une qualité pédagogique reconnue. Le seul coût est de pouvoir réunir entre 20 et 30 personnes.
M. le Dr DEAU
Pour être complet sur la problématique de la FMC France, nous parlons aujourd'hui de Développement
Professionnel Continu. Il n’y a DPC que lorsque nous faisons une formation avec une véritable
évaluation de cette formation. Nous avons donc marié FMC et EPP dans un seul et même global qui est
le DPC, ce que nous appelons même à la Haute autorité de santé où je siège, la Dynamique
Professionnelle Continue de la première année de médecine jusqu’à la fin de notre exercice
professionnel.
Cette dynamique n’est pas tellement dans le savoir, mais pour pouvoir évaluer la manière dont nous
travaillons, c’est plus important que le savoir. Dans l’exercice de notre profession, il s’agit de la manière
dont nous coordonnons les soins et la qualité est souvent plus dans la coordination des soins que dans
le savoir.
M. le Dr OGANDAGA
M. le Dr MANDJEE vient de présenter la formation par visioconférence. Nous devons être pratiques,
notre premier problème est Internet. Pouvez-vous expliquer comment cela se passe parce que nous
avons un problème de connexion très important et cette formation dépend d’internet ? D’autre part, nous
devons louer une salle avec un bon vidéoprojecteur.
Soyons transparents, vous dites que c’est gratuit, il y a tout de même un coût, la location de la salle, etc.
Par ailleurs, ces professeurs devront être pris en charge lorsqu’ils interviendront.
18
Par conséquent, pouvez-vous indiquer quelle est la participation financière des Ordres par participant
pour que cela soit réalisable ?
M. le Dr MANDJEE
J’ai discuté de ce problème de réalisation avant de venir ici avec M. AKA KROO. De notre côté, nous
avons demandé de l’aide au gouvernement. Je ferai tout pour que vous puissiez y avoir accès.
Pour nous, le coût de la salle n’existe pas. J’en m’en préoccupe pour vous et ai réalisé des demandes
d’aide de financement. La Ministre déléguée à la Francophonie a indiqué ne pas avoir de fonds, mais a
indiqué plusieurs pistes que nous étudions.
Le coût est d’environ 1 000 € la visioconférence du pays africain.
M. le Pr ALAOUI
L’intérêt de ce thème est démontré par l’attention accordée aux présentations et par les questions qui
ont été posées.
Il y a indiscutablement une volonté de nos Ordres que nous représentons de nous engager dans cette
réforme pour l’harmonisation de l’enseignement de la médecine, de son adaptation à la qualité afin
d’avoir un substratum univoque global convergeant permettant de considérer nos différents diplômes
dans la similitude.
Un certain nombre d’acquis sont déjà là et sur la base desquels nous pouvons continuer. C’est une des
raisons pour lesquelles nous avons besoin de créer un groupe ad hoc afin de réunir tout ce matériel et
toutes ces réalisations pour les mettre dans un canevas global pouvant être adapté par les pays.
Il a été démontré ici que les Ordres des médecins ont la responsabilité de faire un plaidoyer construit
basé sur des faits pour éclairer les décideurs et les amener à s’engager et à mettre les moyens
nécessaires administratifs et financiers afin d’avoir une formation médicale de qualité qui exige formation
et évaluation des enseignants.
Nous pouvons faire beaucoup de choses pour la formation médicale continue qui s’appelle le DPC. Les
Anglo-Saxons disent que nous sommes entrés dans la lifelong learning. C’est fini, c’est un continuum. Il
y a une telle dynamique d’innovation dans le domaine médical et médicosocial, nous sommes les seuls
en tant qu’Ordres des médecins à être ce lobbying dans le sens le plus noble du terme, mais nous
avons besoin d’avoir des dossiers qui peuvent être présentés à ces instances. Le ministère des
Finances a besoin de faits, de coûts. 1 000 €, c’est important, il faut d’abord avoir la salle, l’installation, le
serveur, etc. Nous entrons dans un domaine qui a des exigences particulières.
Cela ne nous empêche pas de faire en cours de route ce qu’il faut parce que le DPC est important. Nous
pouvons travailler avec des adaptations, nous avons une position d’une vision à moyen terme et d’action
immédiate. Ceci ne peut se faire que par une réunion d’expert à qui nous aurons donné des termes de
référence et auxquels nous donnons aussi un délai pour que la CFOM puisse l’avaliser. Nous cherchons
la validation consensuelle éclairée par la CFOM. Nous représentons une sorte de sous-région politique
qui a tous les atouts pour travailler sur ces dossiers. Il s’agit d’une question de management,
d’organisation et d’outils à mettre en place.
Cocktail déjeunatoire au Consulat général de France.
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Reprise des travaux
14h00 – 16h30 : INDEPENDANCE DES MEDECINS DANS LES CONFLITS ARMES
Sous la présidence du Dr Bruce ESHAYA-CHAUVIN (Medical Adviser/Health Care in Danger Project
International Committee of the Red Cross (ICRC))
MEDECINS, DROITS ET DEVOIRS FACE AUX ACTES DE VIOLENCE, EN SITUATION DE CRISE ET
DE CONFLITS ARMES
Intervenant :

Dr Florent-Pierre AKA KROO, Président du Conseil national de l’Ordre des Médecins de Côte
d’Ivoire, Trésorier adjoint de la CFOM
M. le Dr AKA KRO présente le livre blanc : « Droits et Devoirs des médecins face à des actes de
violence, en période de crise et de conflits armés dans l’exercice de leur profession » rédigé par le
Conseil national de l'Ordre des médecins de Côte d’Ivoire avec la collaboration précieuse du CICR.
Il rappelle que la Côte d’Ivoire a vécu 12 années de crise militaro-civile et un conflit armé en 2011.
Ce livre rappelle en les résumant :
 Les Conventions de Genève du 12 août 1949 et leurs protocoles additionnels élaborés le 08 juin
1977, en mettant en exergue les devoirs et les attentes des médecins.
 Les directives générales de l’Association Médicale Mondiale (AMM) en situation de crise et de
conflits armés.
 Le Code de Conduite : Devoirs des médecins en situation de crise et de conflits armés..
Il cite la prise de position de l’Association Médicale Mondiale sur la violence dans le secteur de la Santé
de la part des patients et des personnes proches
 Particularité; témoignages de médecins et des familles de médecins victimes de ces tristes
épisodes.
 Insistance; sur la prévention de la violence → l’Observatoire de la Sécurité des Médecins; cellule
de recensement des violences verbales et physiques.
 Mise à disposition du Corps médical: questionnaire ← confrères de l’Ordre des Médecins de
France.
Ce livre blanc sera traduit en anglais et en portugais.
M. ESHAYA-CHAUVIN
Merci pour cette excellente présentation
MEDECINS ET CONFLIT ARME AU MALI
Intervenant :

M. le Dr Lassana FOFANA, Président du Conseil national de l’Ordre des Médecins du Mali
Contexte :
- attaques et occupation des 2/3 nord du Mali par groupes rebelles et islamistes (depuis janv. 2012) ;
- pertes de vies ou traumatismes des populations concernées ;
- destruction partielle ou totale des structures et matériels sanitaires ;
- fuite des professionnels de santé ;
- absence de l’état ;
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- insécurité+++ ;
- besoins accrus en soins de santé.
Motivations :
- humanisme ;
- éthique ;
- déontologie.
Stratégie :
- Phase 1 :
o SOS lancé par le CNOM par voie de presse,
o listing des médecins volontaires au siège du CNOM  Comité de crise médico-chirurgical,
o équipes multidisciplinaires: médicaux, psychologues, gestionnaires….,
o négociations sécuritaires: occupants/HCI, notables,
o recherche de partenaires et de référants locaux,
o mobilisation logistique: transports, matériels,
o formation à l’action humanitaire et motivation,
- Phase 2 :
o prises de contact sur le terrain,
o responsables locaux,
o associations,
o personnel sanitaire restant/référants,
o ONG,
o infrastructures sanitaires disponibles,
- Phase 3 :
o actions sur le terrain,
o consultations,
o gynéco-obstétrique,
o chirurgies,
o soins,
o santé publique: info, hygiène, vaccin,
Partenaires :
- nationaux :
o Min. santé,
o Min. Action humanitaire,
o Ordres santé,
o Société civile/HCI, Conseil des Églises, ONG,
- internationaux :
o OMS,
o UNFPA, FIDA, UNICEF, ONU femmes,
o Coopération France,
o ONG : MSF, belge, MDM.
Ressources engagées x 7 missions :
- Humaines :
o enregistrées: 700 médecins,
o mobilisées : 490 médecins,
- Financières ≈ 744 Mio FCFA.
Difficultés :
- responsabilité du CNOM;
- organisation ;
- mobilisation des ressources ;
- sécurité relative ;
- collaboration des acteurs ;
- contraintes géographiques.
21
Perspectives :
- per critique :
o pérennisation des activités,
o renforcement des acquis,
o appui aux structures détruites,
o emploi jeunes,
- post critique :
o expérience aux zones déficitaires,
o expérience à partager (Cluster Santé),
o médicalisation au front/CNOM, MS, OOAS, OMS,
o emploi jeunes.
« Tous les jours, il faut lutter pour que l’amour de l’humanisme vivant se transforme en gestes concrets,
en gestes qui servent d’exemple et qui mobilisent. » Che GUEVARA.
INDEPENDANCE DES MEDECINS EN MILIEU CARCERAL EN TUNISIE
Intervenant :

M. le Dr Nejib CHAABOUNI : Président du Conseil national de l’Ordre des Médecins de Tunisie
Bases juridiques :
- un article du code pénal qui oblige à soigner les détenus comme on le ferait avec des personnes
libres.
trois articles du code de déontologie médicale disposent que :
Article 2 : « Le respect de la vie et de la personne humaine constitue en toute circonstance un devoir
primordial du médecin ».
Article 7 : « Un médecin sollicité ou requis pour examiner une personne privée de liberté ou pour lui
donner des soins ne peut, directement ou indirectement, ne serait-ce que par sa seule présence,
favoriser ou constituer une atteinte à l’intégrité physique ou mentale de cette personne ou à sa
dignité ».
Article 11: « Le médecin ne peut aliéner son indépendance professionnelle sous quelque forme que
ce soit ».
Résolutions d’institutions ou d’organisations non gouvernementales (OMS, Conseil de l’Europe, CICR,
AMM) :
- elles ont le mérite de traiter de la question de façon quasi exhaustive.
- elles ont le mérite de toutes aller dans le même sens. (droit international humanitaire)
- elles n’ont aucun pouvoir contraignant
7 principes fondamentaux de la médecine en milieu pénitentiaire :
- accès aux soins ;
- équivalence des soins ;
- consentement du patient et la confidentialité ;
- prévention sanitaire ;
- intervention humanitaire ;
- indépendance professionnelle ;
- compétence professionnelle.
Particularités de la relation entre détenus patients et médecins :
- accès parfois difficile des patients à un médecin en raison du fonctionnement de l’établissement ;
- demandes des patients complexes, indirectes, simulations et tromperie pour obtenir des avantages
indus ;
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- chantage et pressions diverses sur le médecin, avec refus de traitement, y compris vital (insuline pour
un diabète, grève de la faim...).
Les établissements carcéraux en Tunisie :
- 27 établissements carcéraux
- 6 centres de rééducation des délinquants mineurs
La population carcérale de Tunisie représente :
- 30.000 détenus (253 détenus /100.000 habitants) ;
- taux d’occupation: de 125 % à 400 % ;
- 3/4 de prévenus et 1/4 de condamnés.
Médecins / Para médicaux :
- 60 généralistes plein temps à la Prison de Mornaguia ;
- 4 médecins pour 6000 détenus ;
- 50 spécialistes vacataires.
Para médicaux non qualifiés : Gardiens de prisons.
Conditions de l’exercice médical (TN) :
- locaux inadéquats ;
- fichier non sécurisé ;
- disponibilité de moyens limités ;
- transferts entre établissements pénitentiaires et hospitaliers difficiles.
Ce qui pose le problème du secret médical et de la liberté de prescription.
Les médecins des prisons sont directement employés par le ministère de la Justice et donc subordonné
à l'administration pénitentiaire et/ou à l’autorité judiciaire ce qui expose à des pressions ou de
l’intimidation.
En 2011 :
- adhésion à l’Ordre des médecins
- allégations : participation à la torture
- gestion médicale des Grèves de la faim
En 2011, Groupe de Coordination a été crée avec :
- CNOM
- CICR
- représentant du ministère de la Justice
- représentant du ministère de la Santé
Groupe de Coordination/Action auprès des administrations :
- changement de tutelle des médecins ;
- formation: de base / continue ;
- améliorer des conditions (Moyens) ;
- recruter para médical qualifié.
Un programme de soutien à la santé a été mis en place dans trois prisons pilotes.
Soutien aux médecins avec CICR :
- observation type ;
- liste de critères d’hospitalisation ;
- PEC hospitalière adaptée.
En juillet 2012, le CICR a organisé à Tunis un séminaire de quatre jours sur la santé en détention.
Manifestations de sensibilisation
23
- grève de la faim = mode de protestation ;
- respect de l’autonomie / droit à la vie ;
- alimentation forcée = torture.
Notre équipe CROM du Conseil national a été représentée à la conférence qui s’est tenue les 26-28
mars 2013 à Amman concernant la santé des détenus dans le monde arable. Cette conférence était très
enrichissante pour les deux médecins du conseil qui ont pu y assister.
À chaque réunion, nous sentons qu’il y a une demande pour légiférer pour obliger les médecins à
alimenter de force en cas de danger. Nous avons saisi le comité national d’éthique médicale pour
émettre un avis sur le rôle du médecin face à la grève de la faim dans les prisons.
Nous avons récemment appris que le ministère a diffusé une note aux médecins les obligeant à saisir le
procureur en cas de dégradation de la santé d’un gréviste et c’est le procureur qui a la possibilité
d’obliger à réquisitionner un médecin pour l’alimentation de force.
Nous sommes en train d’agir pour prévenir la promulgation d’un texte qui instaure l’alimentation de force.
En conclusion, l’indépendance du médecin est compromise par :
- l’encombrement des prisons ;
- le manque de moyens ;
- la tutelle du médecin vis-à-vis de l’administration pénitentiaire et judiciaire ;
- la politique sécuritaire et répressive qui règne dans les prisons.
INDEPENDANCE DU MEDECIN EN MILIEU CARCERAL EN ALGERIE
Intervenant :

M. le Pr Abdelaziz AYADl, Président du conseil régional de l’Ordre des médecins d’Annaba ALGERIE, Secrétaire général adjoint CFOM.
M. CHAABOUNI a tout dit, il est effectivement très difficile de parler d’indépendance du médecin en
milieu carcéral.
J’ai été convié à une réunion du CICR à Amman en Jordanie en avril 2013, était également présents :
- AMM ;
- les Ordres médicaux ;
- les syndicats des médecins arabes.
J’ignorais tout du milieu carcéral et ce que j’ai vu m’a frappé, des médecins assistaient à la torture.
À la suite de cette réunion à Amman, nous avons décidé d’un commun accord que chaque pays
organiserait une réunion. Ainsi à la 13e journée annuelle de l’Ordre des médecins, j’avais choisi le sujet
de la médecine carcéral. J’avais invité :
- le ministère de la Justice qui à ma grande surprise a pleinement participé ;
- les CICR de Genève et d’Alger, mais celui de Genève n’est pas venu ;
- les médecins légistes d’Alger et d’Annaba ;
- les médecins de prisons ;
- le CROM de TUNIS jumelé avec le Conseil de l’Ordre de Sousse ;
- les médias.
Nous y avons étudié les thèmes de :
- l’indépendance du médecin ;
- la mortalité en milieu carcéral CHU ;
- l’épidémiologie des violences en milieu carcéral ;
- la liberté conditionnelle pour des raisons de santé ;
24
- le médecin tunisien en milieu carcéral.
En résumé, la pratique de la médecine en milieu carcéral pose des problèmes particuliers liés :
- au statut du malade détenu qui est privé de liberté ;
- la structure qui est un milieu clos avec des conditions de vie difficiles ;
- l’émergence des maladies contagieuses ;
- la surpopulation carcérale ;
- la structure médicale inadéquate ;
- le milieu anxiogène.
En Algérie, le médecin est recruté par le ministère de la Justice. L’organisation des soins est confiée à la
Direction générale de l’administration pénitencier. Le cadre règlementaire pénitentiaire et de la
réinsertion sociale est expliquée par les articles 57 et 86. Le médecin doit obligatoirement être inscrit au
Conseil de l’Ordre et doit répondre aux articles 7, 12 et 46 du code de déontologie.
Le code de déontologie dispose :
- à l’article 12 que « Le médecin, sollicite ou requis pour examiner une personne privée de liberté ne
peut, directement ou indirectement, ne serait-ce que par sa seule présence, favoriser ou cautionner
une atteinte à l’intégrité physique ou mentale de cette personne ou sa dignité. »
- À l’article 13, « Le médecin ne doit jamais se départir d’une attitude correcte et attentive. Il doit
respecter la dignité du malade. »
Le code de l’organisation pénitencier et de la réinsertion sociale des détenus (Loi N° 05-04 du 06/02/05)
traite de :
- les droits des détenus ;
- la prise en charge médicale (Art. 57 et 65) ;
- les visites des parloirs ;
- la correspondance ;
- les biens des détenus ;
- les plaintes et réclamations.
L’article 57 dispose que « Le droit à la prise en charge médicale est garanti pour toutes les catégories
des détenus, des prestations médicales sont assurées aux détenus à l’infirmerie de l’établissement ou
en cas de nécessité dans toute autre structure sanitaire. »
Concernant l’épidémiologie des violences, sur les 66 cas étudiés, il s’agit surtout d’urgences medico
judiciaires fréquentes représentant 0,48 % présentes dans la vie quotidienne des détenus. C’est aussi :
- le silence des victimes ;
- la faible motivation des victimes
- la surpopulation.
Derrière ces problèmes, se cachent toujours des problèmes bureaucratiques.
Les violences sont surtout représentées par :
- les coups et blessures volontaires à 83 %
- les agressions sexuelles à 12 %. C’est le chiffre tabou parce qu’il y a des problèmes de délai, le
secret médical et les victimes refusent toute la déclaration.
Concernant la liberté conditionnelle pour raison de santé, le code de l’organisation pénitentiaire et de
réinsertion sociale (Loi n° 05-04 du 06 février 2005) dispose qu’il faut satisfaire aux points suivants pour
bénéficier de la liberté conditionnelle pour cause médicale :
- être condamné définitivement ;
- être atteint d’une maladie grave ou d’une infirmité permanente incompatible avec sa maladie ;
- la maladie influe négativement et de manière continue sur son état de santé psychique en milieu
carcéral ;
- le dossier médical doit comporter l’avis de 3 médecins experts.
25
L’arrêté interministériel du 13 mai 1997 est relatif à la couverture sanitaire des détenus des
établissements pénitentiaires relevant du ministère de la Justice. L’article 8 dispose que
« l’hospitalisation en cas de nécessité, les investigations et les consultations spécialisées sont assurées
dans les structures sanitaires publiques. »
Concernant la mortalité, sur 3 ans et sur 937 autopsies, 35 détenus ont été autopsiés, soit 4 %. La
mortalité est de 42 % après 50 ans, de 12 % entre 20 et 30 ans et 97 % des décès ont lieu au CHU. Les
pathologies sous-jacentes étudiées sont surtout cardiaques et notamment néoplasiques.
La pathologie carcérale représente un problème sérieux qui peut engendrer parfois le pronostic vital de
nos détenus. Un contrôle régulier des personnes privées de liberté s’impose. Il permet le dépistage et la
prise en charge précoce de la pathologie et d’éviter d’éventuels problèmes médico-légaux.
Nos recommandations à la suite de cette journée ont suivi les recommandations internationales
notamment de l’OMS et de l’International center for prison studies. Il s’agit de faire en sorte que ces
médecins travaillant en milieu carcéral doivent être affectés par le ministère de la Santé et non pas par
le ministère de la Justice. C’est un point fondamental, l'Ordre national des médecins doit être une force
de proposition, car nous sommes une institution élue et indépendante. Nous devons pouvoir visiter les
prisons et notamment les détenus.
En conclusion, certes l’exercice de la médecine en milieu carcel est spécifique, difficile, mais requiert de
la prudence, de l’humanisme, car il s’agit d’un malade et d’un malade prive de liberté.
J’en termine par une citation de Jules Lequier « L’homme est libre en quelques-uns de ses actes, de là
dérive pour lui la responsabilité de tous ses actes. »
M. le Dr ESHAYA-CHAUVIN
Toutes mes félicitations aux deux derniers intervenants pour leur lecture. Il n’y a rien à ajouter, vous
avez tout dit. Néanmoins, lorsque l’on parle de l’indépendance du médecin, je ne suis pas sûr que le
seul fait de déplacer le médecin du ministère de la Justice au ministère de la Santé résoudra tous les
problèmes. Il persistera des difficultés.
La question des grèves de la faim qui se pose en beaucoup de lieu, ne doit pas être perçue comme le
chantage d’un détenu, elle est souvent la dernière arme dont ce dernier dispose pour faire passer ce
qu’il a envie de dire. D’après les quelques expériences que j’ai acquises dans ce domaine, le détenu en
grève de la faim a besoin de pouvoir parler avec quelqu’un en toute confiance. Grâce à cette relation qui
s’établit entre le détenu et le médecin, ce dernier va pouvoir lui faire partager les risques de son attitude,
seule attitude viable à son égard puisque l’alimentation forcée est perçue comme une torture.
INDEPENDANCE DU MEDECIN AU CONGO KINSHASA

M. le Dr Antoine MBUTUKU MBAMBILI, Président du Conseil national de l'Ordre des médecins
de la République démocratique du CONGO
Nous remercions les organisateurs de nous avoir invités pour parler de l’indépendance du médecin en
République démocratique du Congo.
Les éléments régissant l’indépendance du médecin en RDC sont :
- la création de l’Ordre des médecins en 1968 (Ordonnance-loi 068/70 du 1er mars 1968) ;
- l’existence d’un code de déontologie médicale sanctionné par une ordonnance présidentielle
(N° 70/158 du 30 avril 1970).
L’Indépendance est une liberté d’action, de soigner et de décider sans interférence. Cela suppose une
grande responsabilité, mais cette dernière entraine des contraintes qui sont :
26
- le code de déontologie médicale ;
- les connaissances scientifiques médicales actuelles et éprouvées ;
- l’environnement.
Lorsque le malade consulte le médecin, un contrat tacite s’établit entre le médecin et son malade et qui
repose sur 3 piliers :
- la confiance du malade envers le médecin ;
- la responsabilité du médecin envers son malade ;
- l’indépendance du malade et du médecin, mais nous allons parler ici de l’indépendance du médecin.
Lorsque le malade s’adresse à un médecin, il doit être assuré que le médecin va l’écouter et le secourir.
C’est la base même tacite qui scelle les relations entre médecin et malade. L’absence de confiance crée
le doute sur les soins à recevoir, c’est la rupture du contrat.
Le médecin qui accepte de prendre en charge, de dispenser ses soins, engage sa responsabilité qui se
traduit par la prise d’une décision médicale. Cela exige du médecin d’être compétent, d’avoir une
conscience, l’expérience et l’éthique.
Concernant l’indépendance, le malade choisit librement son médecin et le médecin agit librement guidé
par son propre jugement et ses connaissances médicales. Cette indépendance est souvent menacée à
travers les âges et les sociétés. Plusieurs facteurs peuvent la mettre à mal et c’est le cas de RDC.
Il s’agit de l’indépendance du médecin face :
- aux autorités politiques et situations politiques ;
- à ses connaissances médicales ;
- à l’interdépendance des médecins ;
- aux structures de soins ;
- au malade et son entourage ;
- à l’argent ;
- à la décision médicale.
1. Autorité politique et situations politiques :
• la RDC a traversé presque 16 ans de rebellions et d’agressions à l’est du pays ;
– plusieurs atrocités de la guerre (déplacement des populations, détérioration des
conditions de vie, séparation des familles, épidémies…) ;
– viols et Violences sexuelles sur la population civile surtout les femmes et les mineurs ;
– destruction des structures de santé ;
• l’indépendance du médecin est contrariée ;
• les médecins sont menacés et doivent :
– faire preuve de courage exceptionnel ;
– soigner au sacrifice de leur vie.
Un hommage doit être rendu à tous ces médecins qui exercent leur profession dans pareilles conditions.
2. L’indépendance et connaissances médicales :
Le malade a droit aux soins de qualité et pour cela le médecin apporte les soins en fonction des
connaissances médicales actuelles et éprouvées.
L’indépendance du médecin est acquise quand les actes posés sont déterminés par le jugement de sa
conscience et les références à ses connaissances scientifiques pour l’intérêt du patient. Il y a parfois une
inadéquation entre les indications et la prise en charge des patients et la pratique médicale up to date
parce que les médecins ayant la connaissance et la formation, ils se tournent vers des structures qui ne
leur permettent pas d’agir correctement. Il y a donc une frustration.
3. L’indépendance et interdépendance des médecins :
Dans une médecine d’équipe, les décisions se prennent collégialement et sont surtout hiérarchisées. La
responsabilité individuelle est parfois mise à mal. Par exemple en RDC, l’IVG n’est pas légalisé et un
médecin peut se dégager de sa responsabilité dans l’équipe en refusant de la pratiquer.
27
4. L’indépendance et structure des soins :
Les structures de santé posent aussi des problèmes. L’indépendance et la responsabilité des médecins
diffèrent selon le secteur public ou privé. En RDC, les soins médicaux sont assurés par le secteur public
et le secteur privé.
Dans le secteur public, l’indépendance du médecin est globalement assurée dans les grandes villes. En
revanche, dans les zones rurales, les autorités locales peuvent influer sur la décision médicale, ce qui
met à mal l’indépendance du médecin.
Dans les institutions militaires de santé, le commandement militaire peut agir pouvant mettre à mal
l’indépendance du médecin.
Dans le secteur privé, en RDC des entreprises ont créé leur centre de santé où il y a une subordination
des soins des employés et des médecins qui y travaillent. Il y a une limitation quantitative et qualitative
des prescriptions en raison de leur coût. Il y a donc une dualité entre le code de travail et le code de
déontologie parce que c’est le code du travail pour les entreprises alors que c’est le code de déontologie
pour le médecin. Le médecin doit faire valoir ce dernier qui est au-dessus du code du travail, mais il y a
parfois une incompréhension. Le médecin doit savoir gérer les deux.
Dans les hôpitaux privés, la rentabilité semble être le seul leitmotiv. Les prescriptions sont limitées
quantitativement et qualitativement en raison de leur coût et au choix des pathologies à traiter. La dérive
de cette rentabilité est par exemple un médecin qui décide de transferts des malades dans une autre
autorité médicales jugés trop onéreux par la clinique privée.
5. L’indépendance, malade et entourage :
Un médecin doit savoir s’imposer à son patient et son entourage. Le médecin ne peut pas céder à une
demande d’examen, de soins ou de prescriptions non justifiés médicalement. En RDC, il y a une inflation
des certificats de complaisance (congé maladie, rapports médicaux autorisant les soins à l’étranger,
voire des certificats de décès pour assurance, faux rapports médicaux). L’ordre des médecins combat
cette pratique par la sensibilisation des médecins et par les mesures disciplinaires (en collaboration
avec le ministère de la Santé). Certains médecins ont été sanctionnés pour ce type de faits.
6. L’indépendance du médecin et argent :
On constate :
- une précarité de la vie sociale du médecin ;
- une pratique des honoraires sous table ;
- les commissions pour les actes demandés et référés à un autre praticien. Nous assistions
actuellement dans le secteur de la radiologie principalement que les confrères font une ristourne
lorsque le médecin est adressé et chacun envoie le malade là où il veut avoir une ristourne. Nous
combattons activement ces pratiques ; (Applaudissements.)
- une irruption des agences de transfert des soins médicaux à l’étranger en direction de l’Inde par des
Indo-Pakistanais : 10 % de rétrocession au médecin qui réfère les malades ;
- Les rapports du médecin avec les laboratoires pharmaceutiques orientent les prescriptions du
médecin ;
Tout ceci concourt à la réduction de l’indépendance du médecin. Le syndicat et l’Ordre des médecins
s’emploient à l’amélioration des conditions sociales, mais l’environnement est difficile.
7. Le médecin et l’indépendance de la décision médicale :
Une décision médicale peut-elle être indépendante ? Le médecin propose les décisions médicales ou
thérapeutiques qu’il juge meilleures pour la guérison de son malade. L’acte médical exige du médecin
compétence, conscience, expérience, aptitude, éthique et indépendance d’esprit. Cela fonde la
confiance du patient envers le médecin et met en évidence la responsabilité professionnelle du médecin.
En conclusion :
- Les différents facteurs complexes entravent l’indépendance du médecin en RDC ;
- le combat est loin d’être gagné ;
28
- le Conseil de l’ordre des médecins s’emploie à favoriser la régression de la limitation de cette
indépendance dans le seul but de mieux servir le malade ;
- notre seule préoccupation est de protéger la population.
(Applaudissements.)
SOINS DE SANTE EN DANGER
M. le Dr Bruce ESHAYA-CHAUVIN (Medical Adviser/Health Care in Danger Project International
Committee of the Red Cross (ICRC)
Je suis présent ici aujourd'hui parce que j’ai été invité par M. DEAU lors de la signature du Memorandum
of understanding entre l’AMM et le CICRE sur le projet soins de santé en danger. Cela signifie que pour
nous l’AMM est un partenaire privilégié du projet parce que nous pensons que sans les associations
médicales nationales nous ne pourrons rien faire. Je pense aussi que l’AMM, isolée, a moins de chance
de réussir à faire passer son message que si elle le fait avec un réseau.
Nous parlons des :
- blessés et malades ;
- structures de santé ;
- personnel de santé ;
- transports ;
dans les situations de conflit, mais aussi dans les situations dites d’urgence. Le droit international
humanitaire s’applique pour les situations de conflit, mais beaucoup de situations ont des grands
besoins et pour lesquelles le droit international humanitaire ne s’applique pas. Néanmoins, comme le
livre dont a parlé M. AKA KROO, les droits humains s’appliquent.
Un seul acte de violence entraine des conséquences sur une large population au moment où les besoins
sont particulièrement importants. J’ai parlé de la Syrie qui était un exemple dans la région d’un très bon
réseau de santé publique. Il faudra une génération pour le refaire.
Le CICR collecte des informations sur les violences exercées sur le terrain. Elle les collecte dans 22
délégations. Nous avons compilé ces données et elles sont à votre disposition sur notre site.
Le message clé est que les victimes ne sont pas nous, mais vous. C’est-à-dire que ce sont les
personnes sur le terrain, le système public, le système privé, les ONG locales, qui sont les premières
victimes sur le terrain.
Parmi les victimes par catégorie, ce sont les personnels médicaux qui paient le prix fort. S’il est plus
simple d’être uniquement menacé que d’être tué, un médecin menacé qui ne va pas à l’hôpital
représente le même résultat pour le patient.
Nous avons peu évoqué la question des armes dans les hôpitaux et les menaces des groupes armés.
Nous avons parlé des pressions venant des familles elles-mêmes, mais l’interaction des groupes armés
dans les hôpitaux posent des problèmes d’indépendance évidents.
Le problème des checkpoints a été évoqué.
Le CICR organise une grande consultation internationale qui se terminera en avril 2014. Nous
convoquons les personnes dans les workshops et nous les faisons travailler ensemble afin de dégager
des recommandations : que feriez-vous pour améliorer la situation. Il n’y a rien de neuf dans la question
de la violence exercée à l’égard des patients ou du personnel de santé, mais que pouvons-nous faire ?
Certaines recommandations sont issues des sociétés nationales elles-mêmes, par exemple nous avons
discuté de l’explosion qui suit, c’est-à-dire qu’il y a une première explosion, tout le monde arrive et il y en
a une deuxième : que faire ? Nous n’avons pas de réponse, mais nous savons que pour le personnel de
santé qui intervient dans ces situations, il y a une balance à respecter entre accès et sécurité.
29
Nous aurons deux très importants workshop, un à Sidney dans quelques semaines pour lequel nous
avons fait venir des militaires. Nous voulons travailler avec eux pour déterminer comment améliorer la
situation des combats autour des hôpitaux, comment améliorer les checkpoints et la protection
d’évacuation des blessés et l’indépendance comme cela a été évoqué, comment faire lorsque l’on doit
en tout lieu, en tout temps, respecter l’indépendance des soignants.
Les législations nationales sont un sujet qui a été discuté dans presque toutes les présentations de cet
après-midi, comment une législation nationale protège ou pas son personnel de santé ? Comment une
législation nationale permet-elle d’avoir une pratique éthique vis-à-vis des patients ?
Fin janvier de l’année prochaine, une trentaine de pays vont se réunir à Bruxelles pour discuter de ce
problème, l’AMM y sera présente.
C’est une mobilisation globale comme un énorme caillou à tirer qu’aucun d’entre nous ne parvient à tirer
seul. Nous devons nous y mettre tous ensemble, ce n’est pas simplement le CICR et les associations
médicales nationales, ce sont les autres associations de professionnels dans vos pays, le ministère de
la Santé, tout autre qui peut sur le terrain être utile et contribuer à ce qui essentiel. Je cite :
- le comité international de médecine militaire. Je ne savais même pas que cela existait, ce sont tous
les services de santé des armées d’une centaine de pays qui se réunissent et qui discutent des
questions d’éthiques dans les situations de conflit qui sont eux-mêmes demandeurs pour travailler
avec nous sur cette problématique ;
- le conseil international des infirmières avec lesquelles nous avons aussi signé un accord de principe
- la fédération internationale des hôpitaux.
Ce projet porte sur quatre ans, il a été lancé en 2011 et nous devons rapporter à la fin 2015 et nous
espérons que ce processus ne s’arrêtera pas là. Ce projet s’inscrit entre deux conférences
internationales de la Croix rouge qui regroupe tous les 4 ans à Genève tous les gouvernements qui ont
signé les conventions de Genève, les sociétés nationales de Croix rouge et de croissant rouge et le
CICR et la Fédération. Cet ensemble fait progresser le droit international humanitaire.
Chacun son livre, il y a celui de la Côte d’Ivoire, j’ai apporté une vingtaine d’exemplaires du guide pour le
personnel de santé confronté à la violence armée dans lequel vous retrouverez beaucoup de choses qui
existent dans le document qui a été préparé par la Côte d’Ivoire. Je travaille actuellement sur un
enseignement à distance pour ce livre afin de donner la possibilité à tous ceux qui n’auront jamais le
livre entre les mains d’accéder à son contenu.
Vous avez beaucoup parlé d’indépendance, mon discours traite plus volontiers d’impartialité. Nous
avons le droit de ne pas être neutres, mais le jour où nous mettons notre blouse blanche, nous devons
être impartiaux. C’est un message fondamental.
Nous ne changerons rien ici de la situation des soins de santé en danger, mais c’est sur le terrain et
chez vous que ces tables rondes doivent être organisées. Partout où le CICR sera, il vous aidera et
contribuera à faire en sorte de mettre autour de la table tous les acteurs qui doivent contribuer à
résoudre le problème.
M. le Dr DEAU
Nous aussi nous avons notre livre. Si nous parlons de neutralité en Suisse, d’impartialité au CICR,
d’indépendance dans nos codes de déontologie. En France, nous réhabilitons le terme de laïcité. À la
suite de la Révolution et de la séparation de l’église et de l’État en France, l’Ordre des médecins s’est
posé vers cette laïcité. On en parle aussi dans les pays anglo-saxons où il n’a pas la même signification.
Cela veut dire que dans toutes nos missions d’ordre public, dans toutes nos missions de médecin, nous
nous devons d’avoir une identité culturelle et religieuse certes, mais lorsque nous enfilons nos blouses
blanches, nos convictions personnelles ne doivent pas transparaitre au-devant de notre exercice et nous
devons effectivement cette indépendance, confiance et responsabilité dans nos rapports humains.
30
La laïcité se conjugue au quotidien et s’apprend. Nous avons quelques problèmes France où il y a des
identités religieuses excessivement fortes. Moi-même dans ma patientèle, certaine patiente refuse de se
faire examiner ou même de me serrer la main ou de regarder leur visage. C’est parfois grave et on se
demande comment les aider alors qu’elles ont cette attitude vis-à-vis des médecins masculins soignants.
LE MEDECIN FACE AUX CRIMES DE GUERRE (Exemples du KOSOVO et du RUANDA)
Intervenant :

M. le Dr Walter VORHAUER, Secrétaire général du Conseil national de l'Ordre des médecins
français.
Tout a été dit sur la position du médecin et sa lutte pour garder son indépendance. Les médecins face
aux crimes de guerre représente l’autre versant, c’est la prise de position du médecin acteur ou témoin
dans les crimes de guerre. Ce n’est pas un épiphénomène, cela existe et je citerais bien sûr des
exemples anciens comme l’implication du personnel de santé pendant la période noire en Argentine, qui
avait la possibilité de diminuer la résistance des détenus à fin d’interrogatoire et ensuite de liquidation.
Qu'est-ce qu'un crime de guerre ? Toute atrocité commise en temps de guerre, mais qu’est-ce qu’un
temps de guerre ? Sa définition est beaucoup plus précise, un crime de guerre est une violation grave
du droit humanitaire international. Le code juridique définissant les règles des conflits armés ne repose
ni sur un document unique ni sur une définition acceptée par tous.
Il s’agit d’une série de traités internationaux, de résolutions adoptées par le Conseil de sécurité des
Nations Unies, de normes comportementales acceptées par les États (droit coutumier) et de précédents
déterminés par divers tribunaux internationaux.
Il ne s’agit pas de réguler le fait qu’un État puisse ou non utiliser la force. Au contraire, ce droit
s’applique aux individus après qu’un conflit armé ait été déclaré. L’objectif de ce droit est de limiter le
nombre de pertes civiles et de minimiser les souffrances.
Les crimes de guerre recouvrent notamment les violations des lois et coutumes de la guerre qui
comprennent, sans y être limitées :
o les assassinats,
o les mauvais traitements ou la déportation des populations civiles dans les territoires
occupés,
o l’assassinat ou les mauvais traitements des prisonniers de guerre ou des personnes en
mer,
o l’exécution des otages,
o le pillage des biens publics ou privés,
o la destruction perverse des villes ou villages ou la dévastation que ne justifient pas les
exigences militaires.
Ceci est à distinguer du génocide. En effet, si la première utilisation du terme « génocide » se réfère à
l’Holocauste, ce concept ne fait néanmoins pas partie de la liste des crimes dressés par la charte du
tribunal de Nuremberg.
Toutefois, sous l’insistance de Raphaël LEMKINE, universitaire polonais à l’origine du terme
« génocide », les procureurs au Tribunal de Nuremberg décident de l’inclure dans les accusations
formulées à l’encontre des Nazis les plus puissants jugés au tribunal, et dans leurs remarques finales.
Pourtant, il existe un concept de crimes contre l’humanité imprescriptibles, c’est-à-dire l’assassinat,
l’extermination, la réduction en esclavage, la déportation ou tout autre acte inhumain commis contre
toutes populations civiles, ou bien les persécutions pour des motifs politiques, raciaux ou religieux,
lorsque ces actes ou persécutions sont commis à la suite d’un crime contre la paix ou d’un crime de
guerre, ou en liaison avec ces crimes.
31
Il s’agit d’un concept ancien. Le terme « crime contre l’humanité » est utilisé pour la première fois par
George WASHINGTON WILLIAMS, universitaire afro-américain, dans une lettre ouverte adressée au
Roi Léopold II de Belgique en 1890, dans laquelle il évoque la lamentable situation des droits de
l’homme observée au Congo, à l’époque quasi-colonie privée du Roi.
Qu’en est-il de la position du médecin et de sa déontologie ? En temps de paix, il n'existe aucune
convention internationale fixant le contenu de la déontologie médicale. Celle-ci n'est réglementée qu'au
niveau national par les règlements professionnels et relatifs à la santé publique. Les règles contenues
dans ces différents instruments nationaux ne présentent pas de grandes divergences, et les principes
essentiels de l'éthique médicale sont identiques dans tous les pays.
L'Association médicale mondiale (AMM), par exemple, a rédigé et adopté en novembre 1983 un code
international d'éthique médicale, dont les fondements résident dans :
- le serment des médecins de 1948 (Déclaration de Genève) ;
- le code international de l'éthique médicale de 1949 régulièrement amendé (Fortaleza 2013),
applicable en tout temps ;
- des règles spécifiques en cas de conflit armé et en cas de torture sur des prisonniers (Conventions
de Genève et Protocoles).
Les références de texte ne manquent pas, mais ce sont des références qui n’ont aucune valeur
contraignante.
Ce code stipule notamment des obligations fondamentales telles que :
- ne pas nuire ;
- ne pas infliger de souffrances supérieures aux bénéfices prévisibles de guérison ;
- respecter le consentement éclairé du malade.
En temps de paix, le non-respect des principes d'éthique médicale peut faire l'objet de sanctions
disciplinaires prononcées par des organisations de professionnels. Il peut également constituer un délit
pénal et être passible de poursuites devant les tribunaux nationaux.
En période de conflit, la protection générale accordée à la mission médicale par le droit humanitaire est
liée au respect des principes de la déontologie médicale.
Les Conventions de Genève et leurs protocoles défendent avant tout ces notions en stipulant que nul ne
sera puni pour avoir exercé une activité médicale conforme à la déontologie, quelles qu'aient été les
circonstances ou les bénéficiaires. Effectivement, si ces dispositions pouvaient être réunies dans des
traités de nature internationale afin qu’il y ait un code de déontologie universel auquel se référer, cela
aurait pour effet de protéger le médecin et de lui apprendre ce qu’il doit absolument respecter.
Ainsi, le fait de pratiquer des actes non conformes à l'éthique médicale et qui nuisent gravement à la
santé physique ou mentale des personnes, ou le fait de refuser délibérément de donner les soins
nécessaires à une personne malade ou blessée, constituent des crimes de guerre.
En temps de guerre, les violations des règles d'éthique médicale peuvent constituer des crimes de
guerre et encourir des sanctions pénales devant les tribunaux internationaux ou nationaux (au titre de la
compétence universelle). C’est une nouveauté, arrivée des tribunaux internationaux.
La déontologie médicale en tant que telle est donc hissée au rang de norme obligatoire du droit
international, en l’absence d’un texte de portée internationale ratifié par les États. Les Conventions de
Genève imposent le respect de règles précises. Des réglementations nationales ou des ordres
contraires à ces principes ne peuvent donc pas être imposés au personnel médical, quelles que soient
les circonstances. Cela aurait bien entendu une force beaucoup plus probante s’il s’agissait d’accords
internationaux.
Les faits de guerre ne sont pas anecdotiques et il convient de rappeler quelques chiffres relatifs aux
morts violentes dans l’histoire récente des conflits humains par comparaison aux grandes catastrophes
32
naturelles. Les faits de guerre sont prégnants, permanents et nous concernent tous. Nous en avons
maintenant connaissance du fait de la mondialisation et de la circulation de l’information.
De 1900 à 1987, on a estimé qu’il y avait 169 202 000 morts dans le monde par faits de guerre :
1900-1917 Russie
1 066 000 (soupçonné)
1900-1920 Mexique
1 417 000 (soupçonné)
1900-1987 Royaume-Uni
816 000
1909-1918 Turquie
1 883 000
1917-1987 Union soviétique
61 911 000
1917-1949 Chine (Seigneurs de guerre)
910 000
1919-1923 Turquie (Ataturk)
878 000
1923-1949 Chine (guérilla communiste)
3 466 000
1926-1982 Portugal
741 000
1928-1949 Chine nationaliste
10 075 000
1933-1945 Allemagne nazie
20 946 000
1936-1945 Japon
5 964 000
Les conflits des nations se sont ensuite transformés et on a vu apparaitre ce que l’on appelle les
« démocides », c’est-à-dire à l’intérieur de pays, de régions, localisés qui n’ont plus cette portée
européenne ou mondiale que l’on a connue par le passé :
1944-1987 Yougoslavie (Tito)
1 072 000
1945-1987 Vietnam
1 678 000
1945-1948 Pologne
1 585 000
1949-1987 Chine communiste
35 236 000
1948-1987 Corée du Nord
1 663 000
1975-1979 Cambodge
2 035 000
1958-1987 Pakistan
1 503 000
1965-1987 Indonésie
729 000
Cela correspond aussi bien aux morts violents que les morts de population privées de soins et de
nourriture.
C’est à comparer à la fatalité ou aux catastrophes naturelles. Les séismes, les tremblements de terre,
les tsunamis font beaucoup de morts. C’est malheureusement, l’arbre qui cache la forêt. Tous les jours
les faits de guerre sont constitutifs de morts beaucoup plus importants que d’autres éléments.
Il y a des conflits qui changent de nature et sont contemporains :
1959 - 1962
1959 - 1963
1972
1973
1992 - 1998
1991 - 1995
1998 - 2001
1993 – 1995
Burundi
Rwanda
Burundi
Burundi
Bosnie
Croatie
Kosovo
Burundi
1993 - 1994
Rwanda
1996 – 2001
Afghanistan
50 000 Hutus
10 000 Tutsi
150 000 Hutus
25 000 Hutus
200 000
50 000
10 100
50 000 Tutsis
100 000 Hutus
800 000 Tutsis
1 000 Hutus
70 000
Il y a également le fait terroriste, la décolonisation, les luttes idéologiques et politiques. Deux périodes
sont à distinguer :
- avant le 11 septembre 2001 ;
- après le 11 septembre 2001.
33
La période après le 11 septembre 2001 a été l’implication d’une grande nation qui nous avait donné des
leçons de démocratie dans le passé, les États-Unis d’Amérique. Ils ont changé leur comportement après
les attentats de New York et ont impliqué l’ensemble du droit humain.
La décolonisation, la lutte politique, les estimations variées pour la guerre d’Algérie indiquent entre
250 000 et 500 000 morts par les émeutes, la guerre et les attentats.
Les rôles du médecin dans ces contextes de violence peuvent être :
- médecin acteur ;
- médecin témoin ;
- médecin expert.
Le premier grand changement dans l’humanité est la création du procès de Nuremberg. Il y a toujours
eu des règlements de compte, des tribunaux d’exception, etc., mais on a institué ici un tribunal
international qui n’a pas manqué de traduire des médecins devant les juges :
- Karl BRANDT autorité médicale suprême du IIIe Reich, chargé notamment du programme Aktion T4
utilisé pour euthanasier les malades mentaux et les handicapés, condamné à mort et exécuté ;
- Karl GEBHARDT, président de la Croix-Rouge allemande, jugé pour avoir pratiqué des expériences
sur les prisonniers des camps et condamné à mort et exécuté ;
- Waldemar HOVEN, médecin de camp, jugé pour avoir euthanasié massivement les déportés,
condamné à mort et exécuté
- Joachim MRUGOWSKI, médecin et chef de l'Institut d'hygiène de la SS, jugé pour expérimentation
sur les prisonniers des camps, condamné à mort et exécuté.
Il y a les acteurs oubliés, ceux dont on n’a pas parlé. Je prends l’exemple de l’Asie pour montrer
l’universalité des problèmes.
Au Japon, l’Unité 731 se chargeait de faire des expériences sur les hommes, vivisections sans
anesthésie, amputations, pour tester les armes biologiques. Un médecin pouvait :
« Pour mettre au point un traitement des engelures, des prisonniers étaient mis à l’extérieur dans de
l’eau glacée et forcés de laisser leurs bras exposés au froid. Leurs bras étaient alors régulièrement
arrosés d’eau jusqu’à ce qu’ils soient complètement gelés. Le bras était ensuite amputé. Le médecin
répétait le procédé depuis le bas du bras de la victime jusqu’à son épaule. Une fois les deux bras
complètement amputés, les médecins faisaient de même avec les jambes jusqu’à ce qu’il ne reste
qu’une tête et un torse. La victime était alors utilisée pour des expériences portant sur la peste et
d’autres agents pathogènes. »
Les expériences réalisées par la seule Unité 731 sont responsables de 3 000 décès !! Cela doit nous
interpeller.
Il convient de s’interroger sur le rôle des médecins « anonymes », respectueux des ordres de leur
hiérarchie ou des autorités d’État et dont l’action a pu peu ou prou contribué à la violation des droits
humains, lors des guerres civiles, des coups d’État, ou encore par leur statut de médecin militaire. J’ai
été heureux d’apprendre que les médecins militaires commençaient à s’intéresser à ce problème parce
qu’ils étaient eux soumis à une hiérarchie militaire, ce n’est pas rien pour le médecin militaire. J’ai
toujours été très étonné en France, alors que l’on fête le centenaire d’Albert Camus, du silence de nos
médecins militaires après les corvées de bois de la guerre d’Algérie.
Il y a aussi ceux qui sont connus comme criminels de guerre, mais méconnus comme médecins. Par
exemple :
- Radovan KARADŽIĆ, docteur en médecine spécialiste psychiatre ;
- Sosthène MUNYEMANA, fiché par Interpol depuis 2006 pour participation au génocide et crimes de
guerre lors du génocide au Rwanda en 1994 à la suite du mandat d'arrêt international émis par Kigali,
et Docteur en médecine.
Les médecins témoins sont ceux en première en ligne, les Médecins Sans Frontières ou du Monde,
toutes les ONG de cette nature apportent leur secours aux populations en détresse, aux victimes de
catastrophes d'origine naturelle ou humaine, de situation de belligérance. Ils œuvrent dans la neutralité
et en toute impartialité, ils s’engagent à respecter les principes déontologiques et à maintenir une totale
34
indépendance à l'égard du pouvoir, ainsi que de toute force politique, économique ou religieuse.
Volontaires, ils mesurent les risques et les périls des missions qu’ils accomplissent et ne réclameront,
pour eux ou leurs ayants droit, aucune compensation. C’est aussi une nouveauté depuis la seconde
guerre mondiale, l’intrusion bénéfique des médecins des ONG sur le théâtre des opérations. Ils sont
témoins et rapportent ce témoignage.
Mais il y a aussi tous ces médecins anonymes qui par leur présence, leur action discrète, directe,
empêchent trop de dérapages des autorités, parfois à grands risques pour eux ou leur famille. J’ai été
particulièrement impressionné par la présentation de la République Démocratique du Congo où ces
situations sont répétées à l’Est. Cela existe, cela continue d’exister et il faudra peut-être qu’un jour
l’international sache montrer du doigt ces pratiques.
Les médecins experts sont une nouveauté parce que leur action est intégrée dans une démarche
judiciaire : rechercher si une atteinte à l’intégrité de l’homme implique l’intervention d’un tiers ou tout
mécanisme qui ne serait pas naturel et contraire à l’ordre établi. C’est la notion même de l’expertise.
Il s’agit de :
- d’observer :
o les lésions produites,
o leurs origines et mécanismes,
o l’environnement,
- d’archiver :
o confection de scellés,
o conservation des scellés,
- de colliger :
o descriptions,
o relevés,
o photographies,
o rapports.
Et cela indépendamment :
- du recueil des témoignages de :
o crimes de guerre,
o génocides,
o violences organisées,
o tortures, etc.
- par :
o la découverte d’archives,
o les dires de survivants,
o de témoins, d’associations (ONG, Amnesty, etc.),
o les aveux,
o le renseignement, etc.
Et dans un cadre toujours précis :
- sur mandat d’une autorité judiciaire internationale :
o le Tribunal Pénal International pour le Rwanda,
o le Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie,
o la Cour Internationale de Justice,
- sur mandat d’une autorité judiciaire nationale : selon une commission rogatoire internationale, sous
réserve de l’acceptation des autorités locales ou l’envoi de missions médicales sur un terrain
d’opérations étranger, en accord avec le pays d’accueil et en coopération avec d’autres nations.
Par exemple :
- le médecin missionné contractuellement par le TPI :
o au Ruanda,
o en Bosnie,
- le médecin mis à la disposition du TPI :
o au Kosovo,
35
- le médecin missionné par l’autorité politique :
o au Pakistan (Karachi),
o en Thaïlande (Tsunami),
- le médecin missionné ponctuellement par l’autorité judiciaire.
Je me limiterai donc à deux exemples pour démontrer l’apparition du médecin expert dans ce théâtre
mondial :
- le Ruanda: une enquête sur une personne ;
- le Kosovo: une enquête sur un État.
C’est la contribution de l’expertise médicale contre une personne et la contribution pendant l’enquête sur
un système d’état, ce sont donc des aspects différents, mais qui ont existé.
Joseph Staline a dit : « La mort d'un homme est une tragédie; la mort d’un million est une statistique. »
En 1994, survient une tragédie au Rwanda et 6 ans après, en février 2000, des preuves matérielles sont
recherchées dans le cadre d’une action de justice internationale, à charge et à décharge.
Le mis en examen est M. Laurent SEMANZA, né en 1944 dans la commune de Musha en préfecture de
Kigali rural et arrêté le 27 mars 1996 à Yaoundé au Cameroun sur demande du gouvernement de Kigali.
Il est mis en accusation le 22 octobre 1997 pour génocide, incitation directe et publique à commettre le
génocide, crimes contre l'humanité et violations graves des conventions de Genève. Il réfute l’accusation
portée en stigmatisant un « pseudo charnier » constitué à partir d’un cimetière et dont on a expertisé les
restes 6 ans après.
Le bilan a démontré que 79 % des personnes tuées l’ont été par application d’objets contondants, à
12 % par des objets tranchants et finalement peu par armes à feu avec 2 %.
La mission judiciaire internationale a apporté des preuves à charge pour le mis en examen. Il a été
condamné à 24 ans 1/2 d’emprisonnement, porté à 35 ans en appel.
L’indépendance du médecin dans le cadre de son expertise a été d’apporter des éléments à un tribunal
international indépendant par nature.
Une autre mission plus « à chaud » et plus générale se devait de recueillir des éléments en faveur de
crimes de guerre systématisés par une politique d’État : le Kosovo en 1997, une véritable descente aux
enfers. Jean Rostand a écrit « Tuez un homme, et vous êtes un assassin. Tuez des millions d’hommes,
et vous êtes un conquérant. Tuez chacun, et vous êtes un dieu. »
Cette fois-ci, cela se passe de façon différente pour que l’indépendance du médecin expert demeure
respectée. Il est dans une situation différente, dans un cadre de théâtre de guerre. Faire des expertises
dans ce domaine a une influence sur l’indépendance du médecin. De plus, il agit dans le cadre d’une
nation, de sécurité, etc.
La recherche était de parti pris parce que l’on a cherché beaucoup plus globalement sur le territoire au
Kosovo pour repérer, préparer, chercher, découvrir, étudier, prouver et restituer. Il s’agissait de
populations qui ont fait l’objet d’agression de façon organisée et notamment les médecins cette fois-ci
sur des critères religieux. Il s’agissait de population musulmane et lorsque nous avons « reconstitué »
les tombes, il fallait respecter les règles d’usage (corps tourné vers la Mecque).
Les résultats ont été tout à fait probants, il s’agissait à :
- 79 % de morts par armes à feu
- 17 % morts traumatiques (couteau, baïonnette)
Parmi une population de notables, les médecins, notaires, etc., étaient systématiquement arrêtés et tués
pour faire fuir la population.
Pour terminer, il convient de souligner qu’il existe aussi une dimension psychologique pour le médecin
confronté à ces types de situation. D’abord l’émotion selon :
- l’environnement culturel ;
36
- l’implication médiatique ;
- les victimes (nombre, âge, sociologie, appartenance au groupe) ;
- la nature de l’événement :
o naturel,
o catastrophe,
o violent :
• guerre,
• crime,
• attentat,
- les acteurs :
o les survivants,
o les spectateurs,
o les intervenants :
• les secours,
• les forces de l’ordre,
• les funéraires,
- la localisation de l’événement :
o à proximité,
o aux antipodes,
o dans l’Histoire,
- la représentation de l’événement :
o l’info sonore,
o l’image,
o la répétition,
o le détail.
L’événement se mesure donc pour le médecin plus par ses effets psychologiques que par lui-même.
C’est d’ailleurs ce qui s’est passé au Kosovo, lorsque nous sommes entrés, nous, médecins, avons fait
un débriefing en milieu psychiatrique, c’est important afin que le souvenir de l’enfer ne devienne pas
l’enfer des souvenirs…
C’est une nouvelle activité médicale qui se doit de respecter l’indépendance. Mon rêve est de voir un
jour édictés des traités portant une déontologie et qui aura force internationale et qui permettra au
médecin inculpé dans son pays de dire qu’il a agi en fonction de la déontologie et que la loi n’est pas
compatible avec les traités signés, mais il faut les signer.
M. le Dr DEAU
Cet exposé majeur nous laisse sans voix parce que les images et les propos très forts parlaient d’euxmêmes.
Je propose au président de faire une motion afin que cet atelier sur l’indépendance du médecin puisse
se conclure par une résolution qui sera communiquée.
Indépendance, neutralité, impartialité sont des principes déontologiques essentiels à l’exercice de la
médecine en toute circonstance. Ces principes doivent être respectés par tous les médecins, mais aussi
par toute autorité politique gouvernementale, militaire, culturelle ou religieuse. Le principe d’une telle
motion permettrait de terminer cet atelier avec un message fort de la CFOM.
DIASPORA CAMEROUNAISE À PARIS
Intervenant :

M. le Dr Léopold TAGNE, Médecin généraliste et urgentiste
37
Je me présente, je suis médecin généraliste et urgentiste et j’exerce depuis une vingtaine d’années en
région parisienne.
Avant de commencer, je voudrais remercier la CFOM et toute l’organisation de nous donner l’occasion
de nous exprimer, c’est une forme de reconnaissance. Nous en sommes honorés dans une assemblée
avec autant de compétences réunies.
Je fais donc partie de ces médecins qui sont régulièrement interpellés parce que l’on se demande que
font les 650 médecins en France alors qu’il y a un fort déficit dans nos pays aussi bien de médecins que
de ressources logistiques ou autres. Cette question revient en permanence.
Beaucoup d’entre nous ont essayé beaucoup de choses et malheureusement ces actions n’étaient pas
soutenues.
Je suis ici en tant que représentant du bureau de France de l’Ordre des médecins du Cameroun qui a
été justement installé pour essayer d’apporter quelques réponses à cette question essentielle comme à
d’autres.
Ces médecins existent et sont préoccupés par les mêmes questions sauf qu’ils n’ont pas eu l’occasion
de parler de ce qu’ils pouvaient apporter.
Il est donc important pour nous aujourd'hui d’avoir cette opportunité exceptionnelle de nous exprimer
pour indiquer qu’effectivement quelques réponses vont se mettre en place parce que ce chantier du
bureau de l’Ordre en France, nous donnera l’occasion de faire un annuaire, une de nos premières
missions, afin que nos compatriotes puissent lorsqu’ils ont des patients à adresser à l’étranger de
pouvoir prendre contact avec des médecins et avoir des retours.
Nous avons énormément d’attente et il nous faut un minimum de cadre structurel, par exemple si nous
voulons faire de l’enseignement comme cela a été expliqué dans les précédentes interventions, nous ne
savons pas comment faire. Nous ne savons pas comment faire pour passer 15 jours ou 3 semaines
dans un établissement pour exercer.
Il doit y avoir plus que 650 médecins parce qu’il s’agit des médecins référés parce que d’autres ont un
diplôme et n’exercent peut-être pas.
Nous souhaitons avec le soutien de notre tutelle, l’Ordre des médecins du Cameroun, avec le
compagnonnage de l’Ordre des médecins de France que cette structure que nous sommes en train de
mettre puisse donner l’opportunité d’aider ces médecins de la Diaspora à donner d’un peu d’eux-mêmes
ou d’avoir les moyens de le faire.
Nous espérons que ce chantier qui a été ouvert nous donne la possibilité d’avoir des réponses à la
question que font les 650 médecins d’origine camerounaise en France ? (Applaudissements.)
M. le Dr DEAU
Pour répondre à cette allocution, il est évident que la CFOM peut être un des vecteurs de ce
compagnonnage entre les médecins de toute origine exerçant en France et leur tutelle ordinale de leur
pays d’origine.
C’est un outil à mettre en place et c’est surtout sur le mode du compagnonnage dans l’exercice et
compagnonnage dans la formation médicale continue qui se fera d’une manière relativement gratuite.
M. le Dr SANDJON
Nous arrivons au terme de notre Assemblée générale. Nous travaillons d’arrache-pied depuis hier pour
offrir ce que vous avez vu aujourd'hui dans un cadre convivial et de compagnonnage.
Nous allons mettre un terme à nos échanges. Je dis toujours qu’il faut faire et faire savoir et pour faire
savoir nous devons nous appuyer sur les médias dont certains sont présents aujourd'hui. Ils sont très
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vigilants et nous poserons certainement des questions au cours de la conférence de presse qui va
suivre.
Messieurs les journalistes, je tiens à vous dire que nous serons à votre disposition pour répondre à
toutes vos interrogations sur l’ensemble de nos travaux et pourquoi pas, pour ce qui concerne le
Cameroun, quelle est la position de l’Ordre national des médecins par rapport aux examens d’aptitude à
la profession médicale qui ont lieu il y a quelques jours dans notre pays.
Je remercie en votre nom tous les Présidents des Ordres des médecins des pays ici présents. De
mémoire de président de l’institution ordinale, je ne crois pas avoir vu autant de Présidents des Ordres
en un même lieu au même moment pour réfléchir sur des thèmes très variés et qui nous interpellent
tous. Vous aurez noté que la plus grande partie de problèmes soulevés se sont déroulés dans nos pays
qui ont un peu de retard dans le développement qui se répercute parfois sur notre façon d’appréhender
les problèmes.
Nous avons beaucoup à apprendre des Ordres qui datent de 1945 pour ce qui est de la France et
d’autres pays. La meilleure façon d’avance et d’étudier ce qui se fait de bien à l’extérieur et rejeter ce qui
ne l’est pas.
Je voudrais préciser que le bureau du CFOM a été renouvelé hier. Cette conférence a été dirigée
pendant deux ans par le Docteur Emmanuel OGANDAGA et c’est lui qui m’a amené à la CFOM.
(Applaudissements.)
(Conférence de presse.)
18h30 : FIN DES DEBATS
20h30 : DINER DE GALA EN COMPAGNIE DE CONSUL GENERAL DE FRANCE AU DOMICILE DU
PRESIDENT SANDJON
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