En principe, les grosses réparations sont à charge du propriétaire et
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En principe, les grosses réparations sont à charge du propriétaire et
16 Budget&Droits 220 - janvier/février 2012 LOCATION réparations | litige Quelles réparations p En principe, les grosses réparations sont à charge du propriétaire et les petites, à charge du locataire. Anne Moriau et Isabelle Nauwelaers U ne fuite dans le toit, la cheminée qui doit être ramonée, les châssis qui mériteraient une couche de peinture... Il n’est pas toujours simple de savoir qui, du propriétaire ou du locataire, doit prendre en charge de tels travaux. Une précision : cet article concerne uniquement les locations faisant office de résidence principale pour les locataires. Et nous partons du principe que le logement répond à toutes les exigences fédérales, régionales, voire communales en matière de superficie minimum, d’apport de lumière naturelle, de ventilation, etc. contrats des clauses telles que "le locataire déclare accepter le logement dans l’état bien connu où il se trouve" (ou "en bon état") ou "le locataire s’engage à effectuer tous les travaux d’entretien". De telles clauses sont parfaitement valables, mais elles peuvent avoir de lourdes conséquences pour le locataire. Heureusement, la plupart des juges saisis de litiges entre le propriétaire et le locataire interprètent de telles clauses en faveur du locataire, surtout si elles sont équivoques ou peu claires. Contrat signé à partir du 18/05/2007 Si votre contrat de bail a été signé à partir du 18 mai 2007 ou s’il s’agit d’un contrat plus ancien mais qui ne parle pas des réparations locatives, ou pas d’une réparation déterminée, ou encore s’il s’agit d’un contrat oral, il faut se référer au code civil pour savoir ce qui est à charge de qui. Le locataire est avant tout tenu d’entretenir le logement qu’il loue : tondre la pelouse, ramoner la cheminée, détartrer le chauffe-eau... Il doit également assumer les petites réparations, aussi appelées réparations locatives. Il s’agit des réparations de moindre importance et fréquentes qui sont inhérentes à l’utilisation du logement, mais qui ne sont pas imputables à la Contrat antérieur au 18/05/2007 Dans les contrats de bail signés avant le 18 mai 2007, les propriétaires (et les locataires) pouvaient déterminer librement qui faisait quoi en matière de réparation et d’entretien. On retrouve ainsi dans bon nombre de ces anciens BD220X07_bail_4p.indd 16 IL EST OBLIGATOIRE DE DRESSER UN ÉTAT DES LIEUX AU DÉBUT DU BAIL 11/30/2011 11:48:43 AM Budget&Droits 220 - janvier/février 2012 s pour qui ? force majeure, à l’usure ou à l’ancienneté; par exemple, le remplacement d’un interrupteur, d’une prise, d’un fusible, le colmatage d’une canalisation ou d’une vitre (hors cas de force majeure). Le propriétaire doit prendre en charge toutes les grosses réparations (réparation d’un mur porteur, remplacement de poutres,...) ainsi que tous les travaux importants d’entretien (peinture ou vernissage des châssis et des portes, élimination des infiltrations d’eau,...). Il lui incombe en effet non seulement de maintenir le logement en état, mais aussi de garantir de bonnes conditions de location. C’est également au propriétaire qu’incombent toutes les réparations nécessaires imputables à : > la vétusté (remplacement d’une vieille chaudière, p. ex.); > l’usure normale (p.ex. retapisser ou remere une couche de peinture à l’intérieur, normalement tous les 9 ans); > la force majeure (remplacement d’une vitre brisée par de la grêle, p. ex.); > des réglementations administratives (type déterminé d’installation électrique, p. ex.). Attention : s’il s’avère que le locataire a commis une faute (il a, par exemple, embouti la porte d’entrée ou la porte de garage avec sa voiture) ou qu’il a fait preuve de négligence (il a laissé la cave sous eau pendant des mois, sans avertir le propriétaire), la réparation est à charge du locataire et non du propriétaire. Cela dit, le code civil énonce uniquement des principes généraux, sans entrer dans les détails; il y a donc souvent discussion, et bon nombre de litiges sur les réparations locatives ont déjà abouti en justice. L’illustration de la page 18 indique, pour les réparations les plus fréquentes, ce qui est généralement décidé par les juges. Ne perdez toutefois pas de vue qu’un juge différent pourrait, dans certaines circonstances, prendre une autre décision. Si le locataire est négligent Si votre locataire n’entretient pas correctement le logement ou n’effectue pas les petites réparations, il en est lui-même la première victime, puisqu’il occupe le logement. Mais vous avez néanmoins le droit, en tant que propriétaire, de lui rappeler ses obligations. Le schéma de la page 19 résume la voie à suivre. S’il s’agit de dégâts mineurs (une tache sur un mur, par exemple), il peut éventuellement aendre la fin du bail pour réparer et remere ON CONSIDÈRE COMME DE L’USURE NORMALE LE FAIT DE DEVOIR REPEINDRE LES MURS APRÈS 9 ANS NOTRE CONTRAT TYPE T Une clause de bon sens ■ Notre contrat type pour la location d’un immeuble à usage de résidence principale propose un texte équilibré quant aux droits et aux devoirs des deux parties. Pour les réparations, il précise ce qui suit : "Les réparations locatives et le menu entretien sont à charge du locataire. Ils comprennent notamment : le ramonage annuel des cheminées utilisées; l’entretien des installations de gaz, d’électricité et de chauffage; l’entretien des installations sanitaires; la désobstruction des décharges d’eaux usées; le remplacement des vitres brisées; l’entretien des revêtements des murs et des sols, ainsi que des portes, fenêtres, volets, serrures...; l’entretien du jardin. BD220X07_bail_4p.indd 17 ■ Toutes les autres réparations sont à charge du bailleur et notamment celles qui résultent de I’usure normale, de la vétusté, d’un cas de force majeure ou d’un vice de I’immeuble." 17 le logement dans un état conforme à l’éventuel état des lieux dressé au début de la location. Mais si les dégâts risquent d’empirer en l’absence d’intervention (vitre brisée, par exemple), vous pouvez exiger que votre locataire répare le dommage. Il va de soi que vous devez d’abord parler au locataire. S’il ne réagit pas, ne tardez pas à lui envoyer une mise en demeure par recommandé, histoire de vous ménager une preuve écrite de votre démarche. Ce n’est que si ces démarches restent vaines que vous pouvez envisager un procès devant le juge de paix, pour demander que le locataire soit condamné : > soit à respecter ses obligations ainsi qu’au paiement d’un dédommagement et/ou d’une astreinte qui sera appliquée s’il ne répare pas et que le dommage risque dès lors de s’aggraver; > soit à la dissolution du bail s’il s’agit d’une faute gave. Si c’est le propriétaire qui est récalcitrant En pratique, c’est cee hypothèse-là qui est la plus fréquente : que le propriétaire se fasse tirer l’oreille pour effectuer les travaux ou réparations qui lui incombent. La démarche à suivre par le locataire est résumée dans le schéma de la page 19. Avant tout, il est évidemment essentiel d’informer le propriétaire des problèmes et de lui demander de les résoudre dans un délai raisonnable. Prenez contact d’abord oralement mais, s’il ne s’exécute pas immédiatement, passez très vite à l’écrit (mise en demeure par recommandé) afin de vous ménager une preuve de votre démarche. Vous avez tout intérêt à vous manifester rapidement : à défaut, si votre propriétaire est de mauvaise foi, il pourrait aller jusqu’à vous réclamer un dédommagement sous prétexte que vous ne l’avez pas averti à temps du problème et que vous avez donc laissé la situation s’aggraver ! Si le propriétaire persiste à faire la sourde oreille, l’étape logique suivante consiste à vous adresser au juge de paix : > soit pour une procédure en conciliation, si vous pensez que vous avez des chances d’aboutir à un accord avec le propriétaire. Cee procédure est gratuite. Il ne s’agit pas d’un procès, le juge de paix essaie simplement de concilier les deux parties, sans condamner l’une d’entre elles; > soit pour un procès pur et simple, si vous estimez que la probabilité de trouver un arrangement est minime ou si la procédure en conciliation échoue. Vous pouvez alors demander au juge de paix l’autorisation de faire effectuer les réparations à charge du propriétaire, ou la résiliation du bail. Deux possibilités s’offrent à vous pour introduire un procès : soit en adressant une requête au juge de paix (en principe, vous pouvez le faire tout seul, sans l’aide de personne; cela revient à environ 35 €), soit en assignant l’autre partie en justice (via un huissier de justice; cela revient nettement plus cher que la requête). Comme il s’agit généralement d’affaires relativement simples, vous 11/30/2011 11:48:46 AM 18 Budget&Droits 220 - janvier/février 2012 LOCATION réparations | litige RÉPARATIONS LES PLUS FRÉQUENTES: À CHARGE DE QUI ? sur base de la jurisprudence relative aux règles du code civil en orange = à charge du locataire en bleu = à charge du propriétaire cheminée : ramonage cheminée : réparations sanitaires : entretien (p. ex. réglage des robinets et remplacement des joints, réparation des fuites sauf si elles sont dues à l’ancienneté ou à une faute de construction, débouchage du WC ou des éviers,...) toit : réparations sanitaires : grosses réparations (p. ex. remplacement, lorsqu’ils sont usés, des robinets,du flotteur de chasse d’eau, du tuyau du chauffe-eau, etc.) façades : réparations et peinture boiler ouchauffe-eau : grosses réparations fenêtres : peinture ou vernissage boiler ou chauffe-eau : entretien (réglage et détartrage, p. ex.) vitres : remplacement des vitres cassées sauf si force majeure papier peint et peinture : renouvellement (environ tous les 9 ans) balcon : réparations sols et escaliers : grosses réparations tuyaux d’évacuation d’eau et égouts : grosses réparations électroménager cuisine équipée : entretien (filtre lave-vaisselle, dégivrage frigo, etc.) installation de chauffage : entretien (purger les radiateurs, nettoyer le brûleur,...) électroménager cuisine équipée : grosses réparations, remplacement si usé installation de chauffage, : conduites d’eau et de gaz : grosses réparations jardin : entretien (tonte de la pelouse,taille des haies,...) trottoir : nettoyage, p. ex. après une chute de neige trottoir : réparations portes extérieures : peinture ou vernissage clés, serrures,boîte aux lettres : entretien pouvez vous défendre tout seul, sans l’assistance d’un avocat. Le juge prononcera un jugement même si la partie adverse ne se présente pas aux audiences. Ne pas faire justice soi-même installation électrique : grosses réparations installation électrique : entretien (p. ex. remplacer les interrupteurs, prises, fusibles,...) Bon nombre de locataires confrontés à un propriétaire récalcitrant à effectuer des travaux envisagent de faire effectuer eux-mêmes la réparation et d’envoyer ensuite la facture au propriétaire. Nous déconseillons toutefois cee solution. Le propriétaire peut en effet très bien LA CONCILIATION DEVANT LE JUGE DE PAIX EST GRATUITE MAIS LES DEUX PARTIES DOIVENT ÊTRE LÀ BD220X07_bail_4p.indd 18 fosse septique et puits : réparations contester à ce moment la nécessité des travaux. Et comment prouver la nécessité une fois que les travaux ont été effectués ? C’est une mission quasiment impossible. Ou encore, le propriétaire risque de contester le montant de la facture. Et s’il est du genre à avoir plus de mal à extraire un euro de sa poche que de l’eau d’un caillou, bonne chance pour le convaincre de régler la facture ! Il n’y a qu’un seul cas précis dans lequel vous pouvez envisager de procéder aux réparations pour le compte du propriétaire sans demander 11/30/2011 11:48:46 AM Budget&Droits 220 - janvier/février 2012 son accord préalable : si vous ne pouvez pas le contacter (parce qu’il est à l’étranger sans GSM pour plusieurs semaines, par exemple) et que la réparation est particulièrement urgente (toit soufflé par une tempête,...). Le cas échéant, prenez si possible des photos de la situation avant réparation, afin de pouvoir, au besoin, démontrer ultérieurement le caractère très urgent des travaux. Ou vous pensez pouvoir mere le propriétaire sous pression en ne payant plus (une partie de) votre loyer tant que les travaux ne sont pas effectués ? Cela peut constituer une solution provisoire, pour autant que vous lui ayez d’abord envoyé une mise en demeure par recommandé et qu’il n’ait pas réagi. Mais ne laissez en aucun cas le litige s’éterniser trop longtemps. Sachez que les juges n’apprécient pas beaucoup que l’on fasse justice soi-même. Nous vous conseillons dès lors de prendre les précautions suivantes : > informez le propriétaire du motif pour lequel vous retiendrez une partie du loyer. > Il doit s’agir d’un réel problème de perte de jouissance. Il n’est pas acceptable de retenir une partie du loyer pour un problème exclusivement de confort, par exemple une installation électrique vétuste qui entraîne des désagréments, mais qui est néanmoins encore opérationnelle et sûre. > Il doit s’agir d’une réparation qui incombe au propriétaire. Vous devez être bien certain de ne pas être vous-même en charge de la réparation. > La réaction doit être proportionnelle au dommage subi. Pas question par exemple d’arrêter de payer le loyer s’il y a simplement un radiateur défectueux. Mais si toute l’installation de chauffage rend l’âme au plus fort de l’hiver, c’est différent ! Concrètement, vous ne pouvez retenir la totalité du loyer que si le logement est devenu QUE FAIRE SI LES DÉGÂTS NE SONT PAS RÉPARÉS ? Vous êtes locataire Vous êtes propriétaire le propriétaire ne répare pas les dégâts le locataire n’entretient pas le logement ou ne répare pas les dégâts, et il y a un risque d’aggravation 19 totalement inhabitable. > Pour prouver que vous êtes de bonne foi et disposé à payer le loyer si le problème est résolu, vous pouvez verser la partie retenue du loyer sur un compte spécial. Quoi qu’il en soit, ne perdurez pas longtemps dans cee voie; si le propriétaire fait le mort, mieux vaut intenter sans tarder une procédure en justice de paix. Le locataire s’oppose aux travaux Dernier cas de figure : le propriétaire veut procéder aux travaux, mais le locataire s’y oppose, par exemple parce qu’il ne veut pas que l’on pénètre chez lui en son absence. A-t-il le droit de refuser les travaux et/ou de demander un dédommagement pour les désagréments que cela lui occasionne ? S’il s’agit de réparations urgentes, comme le toit qui fuit, le propriétaire peut passer outre son refus et effectuer les travaux sans son autorisation. Bien entendu, le caractère urgent ou non des travaux peut prêter à discussion; le cas échéant, le juge de paix pourra se prononcer sur la question. La loi prévoit que le locataire n’a pas droit à une diminution de loyer si les travaux durent moins de 40 jours. S’ils durent plus longtemps, le locataire peut déduire une partie du loyer, à calculer en fonction de la durée des travaux (à compter dès le premier jour) et de la partie du bâtiment qui est inutilisable. Et si le logement devient totalement inhabitable en raison des travaux, le locataire a le droit de demander au juge de paix de prononcer la résolution du bail. ■ dans un premier temps, parlez-en avec lui s’il ne bouge pas, envoyez-lui une lettre recommandée dans laquelle vous le mettez en demeure de procéder aux réparations dans un délai raisonnable dans un premier temps, parlez-en avec lui NOS CONSEILS Agissez sans tarder s’il ne réagit toujours pas : ne faites faire vousmême les réparationsque si celles-ci sont très urgentes et que le propriétaire est injoignable, et envoyez-lui ensuite la facture; voyez les conseils ci-dessus si vous retenez une partie du loyer, veillez bien à prendre une série de précautions (voir ci-dessus) si le propriétaire ne réagit toujours pas, vous pouvez vous adresser au juge de paix pour une procédure en conciliation (1) ou un procès pur et simple s’il ne bouge pas, envoyez-lui une lettre recommandée dans laquelle vous le mettez en demeure de procéder immédiatement aux réparations s’il ne réagit toujours pas, vous pouvez envisager un procès devant le juge de paix (1) Cette procédure a du sens uniquement si vous pensez que le propriétaire se présentera devant le juge et qu’il est disposé à aboutir à un accord. BD220X07_bail_4p.indd 19 T ■ Que vous soyez confronté à un locataire négligent ou à un propriétaire récalcitrant à exécuter des travaux, ne laissez pas la situation telle quelle. Informez oralement la partie adverse du problème et de la nécessité d’effectuer des travaux ou réparations. Si vous ne recevez pas un bon accueil, envoyez très vite une mise en demeure par recommandé, afin que l’on ne puisse pas vous reprocher par la suite d’avoir tardé à signaler le problème. ■ Si la partie adverse continue à faire la sourde oreille, n’hésitez pas à soumettre le litige au juge de paix. Surtout si vous êtes locataire, puisque c’est vous, finalement, qui êtes la première victime de la situation. Procéder d’autorité aux travaux ou retenir une partie du loyer est plutôt mal vu par les juges; évitez dans la mesure du possible de recourir à de telles solutions extrêmes. 11/30/2011 11:48:46 AM