L`Enfer du décor n°5.pub - Archives municipales de Nantes

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L`Enfer du décor n°5.pub - Archives municipales de Nantes
L’Enfer du décor
Lettre d’information trimestrielle des Archives municipales de Nantes
Archives municipales de Nantes
1, rue d’Enfer
44094 NANTES Cédex 01
℡ 02-40-41-95-85 ¬ 02.40.47.38.79
Numéro 5
Février 2003
SALLE DE LECTURE
Cette année, les élèves de l’école d’architecture de Nantes ont été accueillis par les Archives
les 3 dernières semaines de janvier.
Les 110 étudiants étaient répartis en 6 groupes de travaux dirigés dont les séances s’effectuaient dans la salle du service éducatif et en salle de lecture.
Leur sujet de recherche portait essentiellement sur l’urbanisation et l’architecture ainsi que
sur les titres de propriétés, actes administratifs et conventions sur l’île de Nantes, quartier
en pleine mutation.
ACTUALITE DES FONDS
Comme chaque début d’année, le service de l’Etat civil ainsi que les mairies annexes de Chantenay et Doulon nous ont transmis les registres d’état civil de plus de cent ans. L’année 1902
est désormais communicable ainsi que les tables décennales de 1893-1902. Actuellement la
consultation se fait à partir des registres originaux en attendant le microfilmage qui interviendra courant avril.
Les cotes sont les suivantes :
Etat civil 1902
Nantes
1 Z 2 023 à 1 E 2 042
Doulon
3 Z 51
3 Z 63
3 Z 75
Chantenay 2 Z 1 E 128 à 2 Z 1 E 130
Tables décennales 1893-1902
Nantes
1 E 2043 à 1 E 2045
Doulon
3 Z 86
Chantenay 2 Z 1 E 131
Mairie de Doulon, 1 Fi 925
1
EXPOSITION
1903-2003 : centième anniversaire de la création du Tour de France.
En juillet prochain, la société du Tour de France fêtera le centième anniversaire de la création de la « Grande Boucle ». En 1903, il s’agissait de rallier les six
plus grandes villes de France. C’est ainsi qu’après Lyon, Marseille,
Toulouse et Bordeaux, les concurrents atteignent Nantes le 15 juillet. Les 21 rescapés rejoignent Paris 5 jours plus tard.
Les Archives Municipales profitent de cet événement pour présenter dans les vitrines du hall d’accueil une petite exposition sur la
« vélocipédie » vue depuis Nantes. Cinq thèmes ont été retenus :
- Les origines du vélo à Nantes. Alors que les premières courses
cyclistes ont lieu sur le cours Saint-André en 1883, le Club des Cyclistes de Nantes, fondé le 6 mai 1888, reste certainement le plus
vieux club nantais. D’autre part, Nantes, et sa proche région, devient un centre industriel pour la construction de vélos. On y fabrique les marques Phebus, Ninon, Aumon, La Nantaise-Stella, PetitBreton ou encore Gitane.
- Les vélodromes nantais. Après avoir utilisé les cours Saint-Pierre et Saint-André , la cour
de l’ancienne caserne de la Visitation ou encore le cours Cambronne, les cyclistes nantais
peuvent enfin s’entraîner sur de véritables vélodromes à partir de 1895. La première piste
est construite à Beauséjour, puis viendront les vélodromes de Longchamp (1897), le Parc des
Sports (1911) et enfin celui de la Durantière (1924), dénommé en décembre 1924 Vélodrome
Petit-Breton.
- Le premier tour de France de 1903. Si le premier Tour de France passe à Nantes, il est
intéressant de voir que notre ville restera, par la suite, une ville emblématique de cette compétition. Ainsi Nantes fut 30 fois le théâtre d’arrivées ou de départs d’étapes. Pourtant, entre 1911 et 1931, Nantes devient une simple ville de passage. Il faut attendre 1932 et le cinquantième anniversaire de la naissance de Petit-Breton pour qu’une étape s’arrête à Nantes.
- Lucien Mazan, dit Petit-Breton. Né à Plessé (Loire Atlantique) en 1882, Lucien Mazan
grandit en Argentine où sa famille est partie s’installer. Durant ce séjour, il découvre le cycliste et, à son retour en France en 1902, il devient professionnel. Il participe alors au plus
grandes épreuves : Milan-San Rémo, Paris-Bruxelles et surtout le Tour de France avec 9 participations entre 1905 et 1914 et deux victoires en 1907 et 1908.
- Le Tour de France 1957. Pour sa 44ème édition, les organisateurs du Tour de France choisissent Nantes comme ville départ. En ce 27 juin, ce sont 120 coureurs répartis en 12 équipes nationales ou régionales qui s’élancent devant le Château des Ducs. La première étape les
mènent à Granville où André Darrigade franchit, en tête, la ligne d’arrivée. Il remportera
également la dernière étape mais les spécialistes retiendront la très belle victoire au classement général de Jacques Anquetil qui, pour sa première participation réalise « un coup de
maître ».
2
LES QUARTIERS
Le Breil Malville / « Quand la ville arrive » - cahier n°4
Le groupe « Sans Mémoire, pas d’avenir, de Chézine à Malville » vient de publier
son nouveau cahier. Ce numéro réalisé avec le soutien des Archives municipales et
l’équipe du quartier Breil Barberie est principalement consacré à la construction
de la cité. Toutes les étapes de cette édification sont abordées : décision du
conseil municipal en 1955, expropriations, voirie, méthode de construction, témoignages des premiers habitants…
Le cahier est gratuit et disponible à l’accueil des Archives.
Les actions en cours …
Bibliothèque de la Manufacture / « Ville à lire ville à vivre »
Dans le cadre de la programmation « Ville à lire, ville à vivre », la bibliothèque de la Manufacture a sollicité les Archives municipales afin de proposer plusieurs animations sur le quartier Saint-Donatien Malakoff :
3 expositions sont programmées dans les locaux de la bibliothèque (1er mai-31 mai 2003 : « Les archives s’exposent dans les quartiers . octobre 2003 : « Vieux Malakoff, un quartier, des mémoires » .
second semestre 2004 : « le quartier Sully Bonnefoy »)
2 visites des Archives seront proposées aux lecteurs de la bibliothèque (jeudi 24 avril à 10h 00
et jeudi 5 juin à 10h 00)
3 séances de méthodologie seront spécialement organisées pour les lecteurs de la bibliothèque
octobre/décembre 2003 : séance de présentation des outils de recherches, Comment écrire l’histoire
de son quartier : les thèmes et les sources
Le 20 ans du lycée de Carcouët
Christophe Raverdy, professeur d’histoire au lycée de Carcouët organise une manifestation le 4 avril
2003 à l’occasion des 20 ans du lycée. Il a souhaité que les Archives municipales s’associent à ce projet.
Les Archives assurent avec lui la recherche documentaire et la réalisation d’une plaquette qui retracera l’histoire du domaine de Carcouët et son château, le chemin du Massacre et la construction du
lycée.
Association des habitants du quartier Sully/Préfet Bonnefoy
Les Archives municipales ont été contactées par Madame Marec, membre de l’association des habitants
Sully/Préfet Bonnefoy afin de mettre en place un projet autour de l’histoire et de la mémoire du quartier. Des séances de recherches seront organisées aux Archives municipales et ouvertes au public intéressé. Une collecte de témoignages est également programmée. L’association souhaite réaliser une exposition.
La bibliothèque de la Manufacture dans le cadre de son programme « Ville à vivre, ville à lire » s’associe
au projet notamment en accueillant la future exposition courant 2004. Les Archives départementales
sont également partenaire de ce projet.
Association des habitants du quartier Hauts-pavés/Saint Pasquier
L’association des habitants du quartier Hauts-Pavés /Saint Pasquier a sollicité les Archives municipales
en vue de réaliser une publication sur l’histoire et la mémoire du quartier. Un groupe de recherche s’est
constitué au sein de l’association il y a 5 ans. Celui-ci écrit des articles dans le journal de l’association
« Contacts »* et des expositions sur l’histoire du quartier ont déjà été programmées.
Au regard du partenariat que les Archives ont mis en place avec le groupe du Breil Malville et de l’exposition « Vieux Malakoff », Madame Moreau, présidente de l’association souhaiterait qu’un travail similaire soit effectué sur le quartier. Actuellement nous mettons en place une méthode de travail : définition des thèmes de recherche, recherche documentaire, collecte de témoignages, synthèse et mise en
valeur des sources.
* En 2002, l’association a déposé aux Archives municipales tous les numéros de « Contact ! ». Ils peuvent être
consultés sous la cote (1 per 237)
3
ACQUISITION D’OUVRAGES POUR LA BIBLIOTHEQUE (sélection)
La noblesse nantaise au XIXe siècle, LAUNAY (Marcel), WISMES (Armel de) (BG in 8°878)
Démocratie à la nantaise : chronique d'une nouvelle expression de la société civile, A Y R A U L T
(Jean-Marc) ; REGENT (Jean-Joseph) (BG in 8°891)
Mystères de Nantes et de Loire-Atlantique, PAJOT (Stéphane) (BG in 8°892)
Herder à Nantes et à Angers en 1769, COUTURIER (Daniel) (BG in 8°894)
Nantes-sur-Mer : histoire d'eau de la Loire-Atlantique, PAJOT (Stéphane) (BG in 8°897)
La mort de Jacques Vaché : Histoire d'un fait divers surréaliste, PAJOT (Stéphane) (BG in 8°
899)
La mémoire d'une ville : vingt images de Nantes, NANTES-HISTOIRE (BG in4° 545)
Royal de Luxe : 1993-2001. Entretiens avec Jean-Luc Courcoult réalisés par Odile Quirot et Michel Loulergue, BOVER (Jordi) ; DAVID (Claire) ; DELAROZIERE (François) ; PHERAILLE (BG in 4°
551)
L'aventure de la métallurgie en Loire-Atlantique : 120 d'action patronale et d'essor industriel :
1881-2001, BELSER (Christophe) (BG in 4°554)
Histoire de l'université de Nantes, 1460-1993, DERE (Anne-Claire) ; EMPTOZ (Gérard) ; MOLONARI (Jean-Paul) ; SAUPIN (Guy) (BG in 4°561)
22 octobre 1941 : le drame des 50 otages en 30 questions, LIAIGRE (Franck) (BG br 1319)
La maison Saint-Joseph de Nantes : du dépôt de mendicité à la maison de retraite (XIXe-XXe
siècles), BATARD (Marie-Françoise) ; HAUDEBOURG (Guy) (BG br 1 320)
Nantes la Belle : programme pour le deuxième canton 2001-2007, PELLERIN (Lyonel) (BG br 1
329)
Le procès des 42 : 15 janvier 1943-28 janvier 1943, COMITE DE RECHERCHES HISTORIQUES
SUR LA PERSECUTION ET LA REPRESSION ALLEMANDE, SAUVAGE (Jean-Pierre) ; TROCHU Xavier) (BG br 1 330)
Centenaire de l'école professionnelle devenue Ecole pratique de commerce et de l'Industrie : istorique de l'école (BG br 1 339)
Nantes au XIXe siècle : du fleuve à la ville, LE MAREC (Yannick) (BG br 1 343)
Les chantiers navals de Basse-Loire en 30 questions, ABED (Loïc) ; BELSER (Christophe), (BG br
1 344)
"Miroir de Nantes" : les annés 1900 - Les années 2000, BERNARD (Patrice) ; LEMOINECHEVALLEREAU (Patricia) (BG br 1 345)
Panorama des rives de la Loire : voyage de Nantes à Saint-Nazaire : fac-similé de l'édition de
1899, ORIEUX (Eugène) ; VINCENT (Justin) (BG br 1 346)
4
BASE DE DONNEES AVENIO
Sous-séries
13 Fi
La saisie de la sous-série 13 Fi (tirages photographiques des plaques
de verre) effectuée par Catherine Rogeon se poursuit. Actuellement 1 692 fiches sont accessibles dans la base Avenio.
6 Fi
Le service des Archives municipales de Nantes possède un fonds
important d’affiches administratives traitant de sujets variés allant aussi bien des élections municipales, création d’écoles professionnelles, Conservatoire de musique, circulation des chiens, travaux de voirie que de la guerre 1914-1918 (ravitaillement). Ces affiches portent sur la période 1816-1918.
6 Fi 3477
Afin de publier le quatrième tome de l’inventaire des affiches (6 Fi 3001 à 6 Fi 4000 ),
Chantal Guillery a repris la saisie de la sous-série 6 Fi. Désormais le descriptif des nouvelles
affiches, en grande majorité du XIXème siècle, est consultable en salle de lecture sur la
base Avenio sous les cotes 6 Fi 3001 à 3512.
3 M
La sous-série 3 M est saisie et indexée dans
la base Avenio sous les cotes 3 M 1 à 3 M
102. Cela concerne les édifices à usage d’assistance et de prévoyance, elle renferme des
documents sur des acquisitions, des travaux
de construction et d’agrandissement, des
traités d’asiles de nuit, morgues, bureaux de
bienfaisance, crèches municipales et aussi
des créations de dispensaires dans le centre
et dans tous les cantons de la ville, ainsi que
des documents sur les hospices et hôpitaux
(Saint-Jacques et Hôtel-Dieu) et enfin la remise en état, construction et agrandissement
des restaurants et fourneaux municipaux.
Restaurant rue Dupleix, 3 M 94
5 M
Les édifices divers font partie de la sous-série 5 M
qui est indexée et saisie sous les cotes 5 M 1 à 5 M
28, elle est constituée de documents relatifs à la
construction de la manufacture des tabacs : acquisitions de terrains, adjudications, dons, constructions.
Elle renferme également des dossiers pour les transferts, construction et aménagement des poudrières
civiles.
Enfin les constructions, aménagement et agrandissements d’équipements sportifs comme le stade Malakoff devenu stade Marcel Saupin, le vélodrome Pe- Poudrière, 5 M 19
tit-Breton ainsi que les piscines municipales.
5
NUMERISATION
Débutée en octobre 2002, la nouvelle opération de numérisation de cartes et plans se termine.
En 1998-1999, 1 337 plans avaient été numérisés : plans des séries anciennes, plans modernes cotés en 1 Fi et plans des fonds des architectes Coutan et Digo ( 12 Z et 16 Z ).
Cette deuxième numérisation, qui a concerné 931 plans, a permis de terminer les séries anciennes en numérisant les documents de petit format inférieur au A3, et les capacités techniques des scanners ayant évoluées, de traiter les plans de grand format. Ces derniers ont
souvent fait l’objet d’un découpage de l’image variant de 2 à 6 fichiers.
Ce travail a été confié à la Société Archimaine de Laval spécialiste de la numérisation de documents patrimoniaux : cartes et plans, registres paroissiaux et d’état-civil, registres de recensement militaires … et donc important prestataire pour les services d’archives.
La définition choisie est de 200 dpi, définition suffisamment haute pour utiliser les images à
des fins de reproduction et d’impression.
A l’issue de la numérisation, deux séries de CD-R sont gravées : la première en format TIFF
fichiers non compressés pour la conservation et la seconde en format JPEG pour la consultation.
6
Cette opération de numérisation a nécessité une bonne préparation des documents :
- sélection des plans selon plusieurs critères
y cote afin de terminer les séries anciennes
y intérêt des documents tels les plans généraux de la ville
y séries thématiques identifiées comme le dépôt de mendicité, le musée des Beaux –Arts
- légère restauration des déchirures afin de faciliter la manipulation
- établissement pour le prestataire d’un tableau descriptif des documents qui lui étaient
confiés, tableau portant cote, type de support (calque, canson), état, technique (aquarelle,
encre) , format (en prévision du découpage de l’image en plusieurs fichiers) et observations
(permettant de signaler la présence d’informations à numériser au verso ou l’existence de
retombes)
Plan de nivellement, 1 Fi 1435
7
Afin de pouvoir les envoyer pour numérisation, nombre de plans précédemment non identifiés et non communicables ont fait l’objet d’une description et analyse saisies dans la base
Avenio.
Ces plans cotés de
1 Fi 1 285 à 1 Fi
1 505 concernent
entre autres le musée des Beaux-arts,
le théâtre Graslin 1
Fi 1346 à 1 Fi 1365,
le dépôt de mendicité
ou
hôpital
Saint–Jacques 1 Fi
1 366 à 1 Fi 1426
de même que des
plans généraux de
la ville : plans Demoget de 1877, plan
de 1941 et plans de
n i v ell e m en t
de
1838.
Musée des Beaux-Arts, 1 Fi 623
Pour donner accès aux images de ces plans numérisés, un logiciel de consultation va être installé sur un des postes informatiques en salle de lecture équipé d’un écran 21 pouces.
Ce logiciel a été développé par Archimaine sous le nom « Archivnumérisées ».
Il permet de visualiser facilement les
images avec des fonctionnalités de zoom
progressif, de zoom sur zone, d’affichage simultanée de la partie zoomée et
de la totalité du document en vignette
pour mieux se repérer, de déplacement
des images par glissement ou par
« ascenseur » et d’imprimer partiellement ou en totalité le plan visualisé avec
rappel de certaines mentions figurant
dans la base de données.
Dépôt de mendicité, 1 Fi 1426
Cette base de données est constituée d’un export des fiches descriptives des plans saisies
dans la base de données « Avenio ».
Elle comporte les champs de description suivants : cote, titre, analyse, date, échelle, format,
technique, auteur, fonds ; et des champs permettant la recherche : index de noms de lieux,
d’édifices, de personnes, de mots matières.
8
HISTOIRE
Les tisserands nantais à la fin de l’Ancien Régime1
Nantes, grand centre industriel textile (1760 – 1840)
Lorsque l’on évoque les ouvriers nantais, on songe avant tout à l’histoire du 20ième siècle, aux
grands centres d’activité que furent les Batignolles ou bien les chantiers navals. On songe
aussi aux grands moments de tensions sociales, de la naissance du mouvement ouvrier au
tournant des 19ième et 20ième siècle2 à la participation des ouvriers nantais aux grands événements de l’histoire nationale que furent le Front Populaire, la Résistance, ou les événements
de 19683. On songe en fait à la classe ouvrière contemporaine telle qu’elle s’est imposée sur
la scène politique et sociale, à l’échelle locale autant que nationale, grâce à la conscience
qu’elle a progressivement acquise d’elle-même et qui imprègne la mémoire produite par le
groupe social et ses organisations.
Cependant, ce monde
n’est pas né de rien. Le
tais plonge ses racines
tié du 19ième siècle, et
monde du travail de
lui-ci a connu une imporcours de la période
quée par une vigoureuse
portance et le dynatextile4. Célèbres sont,
factures d’indiennes de
18ième siècle, dont les
conservées dans les muconservation de ces piètémoigne d’une mémoire
celle élaborée par le
20ième siècle. Les filatuplantées à Nantes à parEchantillon de toile, août 1818, F2 C 20 d 7
lement connues6. Enfin,
rands nantais a été décrite par A. Guépin et E. Bonamy en 18357.
ouvrier contemporain
monde ouvrier nandans la première moimême au-delà dans le
l’Ancien Régime. Cetante évolution au
1760 – 1840, marindustrialisation, l’immisme du secteur
en effet, les manula seconde moitié du
productions
sont
sées nantais5. La
ces dans des musées
bien différente de
monde du travail du
res mécaniques imtir de 1785 sont égala misère des tisse-
Nantes, en cette période, apparaît donc comme un grand centre industriel d’autant plus que
les ouvriers du textile côtoient de nombreux autres ouvriers travaillant dans des branches
variées et des structures diverses, de la chambre du tailleur d’habit et de l’échoppe du cordonnier aux grandes manufactures métallurgiques, verreries ou encore corderies, en passant
par les fabriques moyennes des tanneurs ou des chapeliers, sans oublier les chantiers navals.
L’importance et la diversité de l’industrie nantaise, la richesse de l’histoire sociale de Nantes, la particularité de son inscription dans le cours de la Révolution française8 sont autant
d’éléments qui incitent à étudier l’identité sociale et culturelle des ouvriers nantais au cours
de la période 1760 – 1840, ses fondements et ses évolutions, afin de comprendre comment le
peuple nantais vécut les bouleversements économiques de ces années mais aussi – puisque,
dans l’histoire, le peuple n’est pas passif, ne se contente pas de subir – comment il a réagi, et
en particulier comment il a participé à la Révolution.
9
Une chose est d’estimer que l’histoire des ouvriers est intéressante, une autre est de pouvoir
l’écrire tant il est vrai que les humbles des 18ième et 19ième siècles sont peu présents dans les archives, faute d’avoir produit une mémoire collective comparable à celle des ouvriers du 20ième
siècle. Ils ne sont cependant pas complètement rejetés dans l’obscurité, notamment grâce aux
riches séries de documents conservées par les Archives Municipales de Nantes. Sont particulièrement connus les ouvriers les plus virulents grâce aux archives de police et de justice9 et ceux
travaillant dans des métiers organisés en corporation10. Les archives des corporations nantaises
sont très précieuses11.
Les procès-verbaux de visite et de contravention des corporations textiles de Nantes :
une source aux multiples enseignements
Procès-verbal de visite chez le Sieur Pierre Vion, maître tisserant et descriptif du métier à tisser,
10 juillet 1780, HH 163 n° 30
Les corporations regroupaient les maîtres privilégiés, c’est-à-dire les seuls habilités à fabriquer
et à vendre un type d’articles sous l’Ancien Régime. Trois corporations existaient pour le secteur textile : les tisserands produisaient des toiles de lin, les sergers des draps de laine et des
basins12, enfin les bonnetiers. La direction des corporations était assurée par des jurés. Régulièrement ceux-ci procédaient à des inspections afin de vérifier l’application des règlements,
qu’il s’agisse de la qualité de la fabrication ou de l’application de la police du travail. Au cours de
ces tournées, parfois délicates, ils étaient accompagnés de commissaires de police qui rédigeaient des procès-verbaux, dont plusieurs centaines sont conservées.
Ces procès-verbaux nous renseignent sur la taille des ateliers puisque le nombre de métiers est
indiqué. Voici, par exemple, l’extrait d’un procès-verbal dressé lors d’une inspection des jurés
bonnetiers chez un maître de leur profession :
« sommes transportés de compagnie dans la boutique et demeure du sieur Maurice l’un
des maîtres dudit corps, sise rue du bois-tortu, paroisse Saint-Nicolas, où estant entrés lesdits
10
garde auroient demendés audit Maurice combien il avoit de métiers à fabriquer des bas, il auroit répondu qu’il en avoit deux. Lesdits gardes voyant qu’il y en avoit trois, ils auraient dit audit
Maurice pourquoy il faisoit une fausse déclaration attendu qu’ils en voyoient trois ; à l’endroit il
auroit déclaré aux dits garde que le troisième n’estoit point à luy, qu’il estoit au sieur Blanches,
ouvrié fabriquant de bas qu’il avoit reçu pour travailler chez luy comme ouvrié »13
Grâce à ces procès-verbaux, nous apercevons également les circuits économiques, et donc les
positions sociales. En effet, les jurés traquent les ouvriers clandestins, appelés chambrelans14.
Les jurés se trouvent parfois dans des situations embarrassantes :
« lesdits jurés nous ont fait voir remarquer et avons vu ledit Touzare à travailler du méttier de sarger et à faire une pièce de cotton montée sur le méttier. Lesdits jurés lui ont demendé combien contient la pièce de cotton qu’il est à faire ; il a répondu qu’il y en a cinquante-huit
aunes. Les jurés lui ayant fait part de la sentence déjà rendue contre lui et qu’ils entendoient
faire la saisie de la pièce de cotton, ledit Touzard a déclaré ne point s’opposer à la saisie, d’autant que la pièce ne lui appartient point et est au contraire à un des maîtres sargers »15
L’ouvrier clandestin nargue les jurés car il travaille pour un maître alors même que les jurés sont
réputés défendre le privilège de ces mêmes maîtres !
Parfois, l’ouvrier saisi réagit violemment comme ce tisserand, chez lequel les jurés et le commissaire sont :
« entrés de compagnie chez le nommé Hublin tisserand forain demeurant proche la chapelle de miséricorde paroisse Saint-Simillien, où estant lesdits jurés luy auroient demendés la
visitte, à quoy ledit Hublin leur auroit répondu avec impétuositté voillà mon méttier, voyé la
toille quy est montée dessus, à l’endroit lesdits jurés se sont mis en devoir d’en déroller quelques aulnes comme il est portés sur les statues afin de voir cy [si] la toille éstoit bien fabriquées. Lesdits jurés n’en avoient pas encore dérolé une demie aulnes que ledit Hublin a dit holà
et f… vous n’en dérollerez pas davantage je m’y opose »16
Enfin, ces procès-verbaux nous montrent comment les ouvriers ont pu participer à la naissance
de la Révolution, utiliser les idées nouvelles et engager le combat contre les privilèges. Ainsi, les
tisserands de Pirmil, exerçant dans la paroisse de Saint – Sébastien, subissaient le privilège des
maîtres tisserands nantais de pouvoir s’approvisionner les premiers au marché aux fils. Or, au
cours du premier semestre de l’année 1789, les tisserands de Pirmil enfreignent collectivement
ce privilège, justifiant leur action par le recours aux thèmes en débat au cours des mois marqués par la campagne des Etats Généraux :
« Etienne Retaillaud nous a déclaré qu’il avoit le droit d’entrer au marchez comme tout autre, que le marchez étoit libre et qu’il ne s’y présantoit que dans le dessein d’achepter du fil
pour se fairre saisir, que les maîtres n’avoient aucuns droits de l’en empescher, qu’ils étoint
[étaient] plusieurs qui seroint [seraient] dans le même cas, qu’ils avoint [avaient] de quoy présenter aux maîtres »17
Cette réponse signale l’engagement d’une action inspirée par les idées nouvelles. Si l’on ne craignait pas l’anachronisme, on pourrait même parler d’une campagne de désobéissance civile.
11
A la veille de la Révolution, Nantes apparaît donc comme une grande cité industrielle. Une
part importante de la population est constituée d’ouvriers. Ceux-ci subissent les bouleversements économiques et sociaux liés à l’industrialisation, en particulier le dérèglement de l’activité des corporations. Toutefois, il serait erroné de réduire les ouvriers à des masses inertes qui se contentent de subir ces mutations, avant de se contenter, au cours de la décennie
révolutionnaire, de répondre à des incitations extérieures. Afin d’éviter de tomber dans ce
piège, l’historien s’efforce de traquer l’ensemble des traces de la vie ouvrière. Il utilise alors
des documents élaborés à l’origine dans un tout autre but. Ainsi, les procès-verbaux de visite
et de contraventions des corporations, rédigés à la fin du 18ième siècle par des hommes qui
cherchaient à imposer l’application des règlements et à obtenir la soumission des ouvriers à
l’ordre économique et social en vigueur sous l’Ancien Régime, révèlent aujourd’hui à l’historien
l’ampleur des bouleversements économiques et de la contestation sociale qu’ils provoquaient
chez les hommes qui y étaient confrontés. Ainsi, c’est par la ruse que l’historien peut restituer la vie ouvrière au tournant des 18ième et 19ième siècles.
S. Guicheteau
Doctorant Université Rennes – 2.
12
Maquette : Chantal GUILLERY et Sophie GUERIN
Impression des 250 exemplaires : Centre municipal d’édition
_____________________________________
1 Je remercie les Archives municipales de Nantes d’avoir bien voulu insérer dans leur bulletin cette présentation de
la thèse que je rédige sous la direction d’Alain Croix.
2 Sur l’histoire du mouvement ouvrier nantais, voir Y. Guin, Le mouvement ouvrier nantais, essai sur le syndicalisme
d’action directe à Nantes et à Saint-Nazaire, Paris, Maspéro, 1976.
3 D’autant que les ouvriers nantais ne furent pas les derniers à participer à ces événements, voir G. Noiriel, Les ouvriers dans la société française XIXe-Xxe siècles, Paris, Le Seuil, 1986.
4 Le développement de l’industrie nantaise s’inscrit pleinement dans l’histoire économique nationale, voir S. Chassagne, Le coton et ses patrons, France 1760-1840, Paris, EHESS, 1991.
5 Les articles issus de ces manufactures composaient également les cargaisons de la traite négrière. Voir Musée de
l’impression sur étoffes (Mulhouse), Toiles de Nantes des XVIIIe et XIXe siècles, catalogue de l’exposition présentée au Château des Ducs de Bretagne, 21 avril-19 juin 1978.
6 Avant Ferdinand Favre, maire sous la Monarchie de Juillet et le Second Empire, issu d’une famille d’indienneurs, un
autre manufacturier a été maire de Nantes : Saget, patron d’une filature mécanique, était maire de Nantes lors de
la seconde tentative des chouans dans la nuit du 27 au 28 vendémiaire an VIII (19-20 octobre 1799).
7 A. Guépin et E. Bonamy, Nantes au XIXe siècle, statistique topographique, industrielle et morale, Nantes, P. Sébire, 1835, pour l’édition originale ; troisième édition par Phénix Editions, Maison des Sciences de l’Homme Ange
Guépin, 2000.
8 L’interprétation de l’an II et la mémoire de cet épisode ont suscité nombre de publications. Voir R. Cobb, Les armées révolutionnaires, instrument de la Terreur dans les départements, avril 1793-floréal an II, Paris—La Haye,
Mouton, 1961 et Nantes-Histoire, Fragments des mémoires nantaises de 93, Nantes, 1993.
9 Notamment les portefais, ancêtres des dockers.
10 Les ouvriers masculins de l’artisanat sont donc les mieux connus pour la fin de l’Ancien Régime. On possède sur
eux des renseignements plus importants que sur les ouvriers des manufactures. Par conséquent, les hommes sont
donc mieux connus que les femmes.
11 Elles nourrissent, avec les archives du tribunal de simple police, l’ouvrage de l’hisorienne américaine C. Truant,
The rites of labor, Brotherhoods of compagnonnage in Old an New Regime France, Ithaca an London, Cornell University Press, 1984. Les archives des corporations constituent les liasses 60 à 187 de la série HH des AMN.
12 Les bassins sont des tissus de lin et de coton.
13 AMN, HH 108, pièce 9, 31 août 1754. L’orthographe est conservée ; la ponctuation et l’accentuation sont rétablies.
14 En ertu de l’endroit où ils travaillent.
15 AMN, HH 163, pièce 25, 12 octobre 1769.
16 AMN, HH 174, pièce 21, 25 août 1759.
17 AMN, HH 174, pièce 35, 7 février 1789.

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