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Wilmart, Mickaël: Rezension über: Margarita Xanthakou, Identités
en souffrance. Une enquête ethnologique en Grèce, Paris: Odile
Jacob, 2007, in: Annales, 2009, 6.1 - Identités, S. 1431-1432,
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COMPTES RENDUS
longtemps entretenue en Grèce et à l’étranger
au profit de Konstantinos Paparrigopoulos,
pourtant tributaire d’un texte fondamental
de son prédécesseur : le « Préambule » des
VAsmata dhmotiká th␵ Elládo␵. Ekdo␪ énta
metá meléth␵ istorikh́␵ perí mesaiwnikoú
ellhnismoú [Chants populaires de l’Hellade. Édités
avec une étude historique sur l’hellénisme médiéval],
publié en 1852, à Corfou.
I. Koubourlis insiste sur les relations
étroites entre contexte politique et production
historiographique. La discipline, dans des
cadres nationaux, est largement dépendante
du discours politique du moment au point
que les limites entres les deux domaines
se brouillent, ainsi que des impératifs géopolitiques immédiats. Tel ou tel motif s’éclipse
selon le contexte. Par exemple, le propos de
1852 dans les Chants populaires n’est pas le
même que celui des Buzantinaí melétai. Perí
phgẃn th␵ neoleelhnikh́␵ e␪ nóthto␵ apó H’
ácri I’Ekatonntaethrído␵ m. C. [Études byzantines. Sur les sources de l’ethnie néohellénique, du
VIII e au X e siècle apr. J.C.], publiées à Athènes
en 1857, en ce qui concerne la place de l’orthodoxie dans l’argumentaire national(iste), la
reconnaissance de l’autocéphalie de l’Église
de Grèce par le Patriarcat de Constantinople
intervenue entre-temps, qui a libéré le nationalisme grec de toute obligation d’œcuménisme orthodoxe.
La postérité du discours de l’historien fut
grande, au point que son œuvre devint une
référence implicite. Le passé hellénique institué
par Zambélios, ou « rétabli » pour les contemporains, dans une continuité plurimillénaire
qui incluait les périodes délicates de l’empire
macédonien puis de l’Empire romain d’Orient,
venait à point nommé légitimer des ambitions
de résurrection cette fois strictement nationale, c’est-à-dire un projet irrédentiste, marqué
par l’orthodoxie mais aussi la pratique ou
l’apprentissage actif de la langue grecque, aux
dépens de l’empire ottoman, en posant ces
ambitions en « droits historiques », une formule dont on sait la capacité mobilisatrice, le
plus souvent catastrophique, dans les Balkans
et ailleurs.
Cet ouvrage peut être de nature à influer
sur l’enseignement de la perception, savante
et populaire, du passé et l’on peut souhaiter
sa diffusion dans les départements d’études
grecques, turques ou arméniennes en particulier, comme dans ceux d’histoire générale
des idées.
HERVÉ GEORGELIN
Margarita Xanthakou
Identités en souffrance. Une enquête
ethnologique en Grèce
Paris, Odile Jacob, 2007, 276 p.
Ce livre s’inscrit dans la continuité des travaux
de Margarita Xanthakou sur la Grèce. On
connaît déjà ses publications sur les Idiots de
village (1989) ou le célibat et l’inceste dans
Faute d’épouses on mange des sœurs (1993), ainsi
que ses collaborations avec Françoise Héritier.
Basé sur des enquêtes ethnographiques concentrées dans la région du Magne, l’ouvrage propose
une approche des constructions identitaires par
le biais d’histoires de vie. Chaque chapitre se
rapporte à un exemple particulier, montrant, à
travers un parcours souvent marginal, le processus complexe qui accompagne la mise en
place d’une identité plus ou moins affirmée,
plus ou moins achevée, plus ou moins vivable.
Car ce qui relie ces personnages, c’est justement
la difficulté à se construire en étant touchés par
les aléas de la vie, les injustices et les préjugés
familiaux et sociaux, la violence d’une société
tiraillée entre la mémoire de son passé et les
transformations de la modernité.
Résumer ici chaque récit biographique
choisi par l’auteur serait illusoire tant un résumé
contiendrait de simplifications et de raccourcis.
En effet, M. Xanthakou montre ici toutes ses
qualités d’ethnographe, rapportant les dialogues collectés, ses propres hésitations, les
informations complémentaires de témoins.
L’histoire de ces personnes se dévoile telle
qu’elles l’ont vécu, sans jugement, mais avec
tout le ressenti qu’elles peuvent mettre à
raconter leur vie et à construire leur identité.
Il s’agit pour la plupart de cas féminins frappés
durement dans leur existence : viol, inceste,
homosexualité mal vécue, exil, rejet par une
société villageoise qui vous catégorise (d’idiot
du village par exemple), souvenirs de guerre
civile. Autant d’itinéraires personnels, autant
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COMPTES RENDUS
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de constructions parfois absconses décrites
sous la forme d’un récit ethnographique où la
parole de l’individu tient une place particulière,
avant que l’auteur n’en propose une analyse
dans le cadre de sa problématique.
Elle pose alors toutes les questions que la
notion d’identité provoque : les articulations
entre identités individuelles et collectives, le
mode d’installation et d’affirmation du discours identitaire, qu’il soit construit, par l’individu ou le groupe, ou imposé de l’extérieur.
Surtout, l’auteur pose la question cruciale de
la stabilité et de la possible pluralité des identités. En effet, le prisme des études ethnologiques, sociologiques et historiques a souvent
poussé le chercheur à déposer sur ses sujets
d’études une étiquette unique sans prendre
en compte les variations qu’un groupe ou un
individu fait subir à son identité au fil du temps,
du contexte ou même de l’interlocuteur. Or,
au regard des exemples maniotes, il semble
que l’identité ou les identités soient plus changeantes qu’on ne le croit et qu’au contraire la
notion même d’identité ne peut échapper à
la critique du flou. Car c’est bien la notion que
veut interroger M. Xanthakou en évitant de
l’utiliser sans discernement. Elle est pour elle
non seulement un « instrument » mais surtout
« un outil » qu’il faudra « affûter » pour mener
à terme son travail d’interprétation (p. 265).
Surtout, à la suite de Georges Devereux, elle
prend en compte l’affect (de l’interlocuteur et
de l’ethnologue) qui influence la reconstitution des histoires personnelles et de fait l’affirmation ou la réception d’une identité à un
moment donné. La problématique n’est certes
pas nouvelle, la notion d’identité étant très discutée, mais l’approche biographique – c’est-àdire à l’échelle de l’individu – permet d’envisager concrètement l’incertitude que provoque son utilisation. On aurait aimé toutefois
une solution à cette insoluble question et
peut-être une réflexion complémentaire sur la
notion d’habitus.
Pour sortir du particulier et interroger des
groupes plus vastes, M. Xanthakou propose un
avant-dernier chapitre sur les minorités albanaises et pomaks qui est sans doute abordé
trop rapidement. Pourtant, l’émigration albanaise aurait pu prolonger les interrogations de
l’auteur sur la mouvance de l’identité. On ne
trouve ici nulle mention des changements de
prénoms et de noms, ainsi que de religions,
de certains de ces migrants à leur arrivée en
Grèce, phénomène pourtant connu des spécialistes du sujet. Mais devant les questions qu’elle
soulève tout au long de son livre, on pardonne
à l’auteur ce survol et on espère même qu’il
est le prélude à une étude plus approfondie de
l’identité fluctuante en contexte de migration.
MICKAËL WILMART
Shannon L. Fogg
The politics of everyday life in Vichy France:
Foreigners, undesirables and strangers
Cambridge, Cambridge University Press,
2009, 226 p.
Constatant que les problèmes matériels de la
vie quotidienne sous l’Occupation sont toujours
relégués au second plan dans les études sur la
période 1, Shannon Fogg opte, dans cet ouvrage,
pour le renversement de l’angle d’analyse en
partant des difficultés matérielles pour en montrer les conséquences politiques et sociales.
Ces problèmes quotidiens « influèrent directement sur l’évolution de l’opinion publique »,
tout en obligeant le gouvernement à adopter
des réponses, « ce qui influença ses décisions
politiques » (p. 54).
Pour illustrer ce point de vue, S. Fogg s’est
penchée sur les relations quotidiennes que
nouèrent les Français, à travers les questions
d’approvisionnement et de logement, avec différentes catégories assimilées à la figure de
l’étranger (évacués et réfugiés, nomades, juifs).
S’appuyant sur des sources variées (rapports
de préfets, de gendarmerie, du Contrôle technique, mémoires et enquêtes orales), l’historienne a centré ses recherches sur le Limousin
(plus particulièrement la Creuse et la HauteVienne), région qui constitue un terrain privilégié pour analyser les relations que nouèrent
populations locales et étrangères en raison de
sa situation géographique (situé au centre de la
France, le Limousin apparaissait comme une
région refuge) et économique (région rurale,
donc attractive dans un contexte de pénurie
alimentaire).