DOMINICI Maria Rosa LA PEDOPHILIE ET SES TABOUS

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DOMINICI Maria Rosa LA PEDOPHILIE ET SES TABOUS
DOMINICI Maria Rosa
LA PEDOPHILIE ET SES TABOUS
Psychotérapiste, Juge Honoraire du Tribunal pour Enfants de Bologne,
Professeur de Criminologie dans une Ecole de Spécialisation de Sociologie
Sanitaire de l’Université de Bologne.
1. Introduction
1.1. La pédophilie et ses tabous
De plus de 30 ans je m’occupe des problèmes liés aux abus sexuels sur
les enfants et, en termes clinique, je suis psychanalyste et
psychothérapeute des adultes qui, dans le 75% des cas, révèlent qu’ils
ont subi l’inceste, la violence, des harcèlements quand ils étaient des
enfants. Du point de vue juridique et plus récemment, je suis juge
honoraire du Tribunal des Enfants de Bologne. Pour le tribunal civil je
m’occupe des adoptions nationales et internationales et pour la section
criminelle je suis juge pour les audiences préliminaires. Très souvent les
ministères publics me chargent d’exécuter des rapports d’expertise pour
la « validation » sur les enfants qui ont subi l’inceste, des abus, qui se
sont prostitués ou bien qui ont été pris dans le piège de la pornographie
enfantine. Il s’agit là de cas tellement nombreux que j’ai défini « Les 3 P
», qui représentent la maladie et l’horreur de notre temps. Les 3 P se
réfèrent évidemment à la pédophilie, la pornographie et la prostitution.
Il s’agit de cas cliniques et juridiques de plus en plus fréquents, mais
difficiles à reconnaître, à dénoncer et réprimer, surtout parce qu’on écoute
et observe peu les enfants et il est difficile de croire à ce qu’ils disent. La
réalité sociale est encore centrée sur les adultes, on connaît très peu la
victimologie, et la pédophilie est un réseau invisible et horizontal, bien
renseigné sur tout ce qui le concerne et donc de plus en plus équipé, en
temps réel, pour élaborer des comportements de dissimulation adéquats.
Différentes situations deviennent des couvertures ou un alibi réciproque,
ainsi pour le satanisme et la pédophilie ou l’infiltration des pédophiles
dans les ONG internationales qui s’occupent des enfants dans les pays en
voie de développement ou du tiers-monde.
2. Observation et données
2.1 L’infiltration de la pédophilie dans les ONG qui s’occupent des enfants
Je viens de participer en tant que déléguée italienne à un séminaire
international, organisé par Terre des Hommes à Geroldwil, près de Zurich,
le 26-28 janvier 2000, sujet « La prévention de la pédophilie dans les
organisations qui travaillent à l’étranger ». Trois journées de grand travail,
60 personnes de 47 pays environ, représentants et experts de 30
associations qui développent des programmes concernant la réadaptation
des enfants (enfants des rues, objets du tourisme sexuel) et responsables
des aides humanitaires, d’alphabétisation, de mesures sanitaires. Il y
avait beaucoup de personnes, des jeunes et moins jeunes, tous avec leur
expérience, compétence et générosité pour affronter avec beaucoup de
courage et une motivation critique et dynamiquement constructive, les
expériences douloureuses d’infiltration pédophile ; le dernier cas, en
Ethiopie, exactement pour Terre des Hommes.
Les mots à la fin du discours de Bernard Boêton, responsable du secteur «
Droits de l’Enfant », de T.d.H Lousanne, clarifient l’esprit : « Pendant ces
jours on a travaillé pour la vérité, pas pour l’image…. c’est difficile, mais la
vérité est la réalité et c’est le fait de reconnaître la réalité qui nous remet
en route ». Le risque d’un comportement pédophile au sein des activités
des différentes ONG qui s’occupent d’enfance, est un problème que tous
on affronté, affrontent et affronteront et beaucoup de personnes le
témoignent, comme par exemple Bernadette Mc Menamin (Australie) pour
ECPAT, Moussa Sow (Sénégal) directeur de l’association du Sénégal «
AVENIR DE L’ENFANT », Bob Cook de l’organisation britannique «
BERNARDO’S », d’autres de MEDECINS SANS FRONTIERES » et de « CASA
ALIANZA » etc., qui travaillent en Madagascar et en beaucoup d’autres
pays. L’objectif a été la création d’une banque des données pour la
circulation des informations et de la formation, pour la définition d’une
série de mesures et recommandations communes. On travaille surtout sur
la formation continue du personnel et spécialement pour les responsables
du recrutement des envoyés pour les missions à l’étranger. En effet le «
Monsieur X » du cas raconté par Moussa Sow était un délégué de haut
niveau qui avait passé toutes les grilles de sélection et qui, pour cette
raison, était un homme que l’on pouvait croire, un homme capable,
insoupçonnable, « le loup dans la bergerie ». On a parlé d’un code de
conduite commun aux organisations visant à protéger ces enfants qui ont
besoin de tout, orphelins qui cherchent de l’affection et de la protection,
un de ces enfants abusés a dit : « …mais lui, il m’a dit qu’il m’aimait »,
mais après il a aussi parlé de la terreur qu’il avait éprouvée, du sentiment
ultérieur d’exclusion « maintenant je suis homosexuel » et Moussa Sow
avait trouvé de mots simples et rassurants « Ce n’était pas toi qui avait
choisi, c’est lui qui a fait… ». Tandis qu’il nous racontait ça, ce grand
homme noir pleurait, pour soi-même, trahi dans la confiance et l’amitié,
pour les enfants violés, victimes invisibles, fragiles, impuissants,
subjugués. A l’intérieur des ONG, on créera une liste des personnes qui
ont été condamnées pour pédophilie, dans le but d’éviter des récidives.
Pendant les 3 journées, les 5 groupes qui se sont formés ont concentré
leur travail sur les procédures de recrutement, sur l’évaluation des
envoyés à l’étranger d’après les programmes, sur la collaboration
institutionnelle entre les organisations, sur les procédures judiciaires qui
souvent diffèrent entre le pays d’origine par rapport au pays de la mission
et sur le rôle des « médias » dans ces situations ; à ce propos on affirme
« …en ce qui concerne la communication publique, si la transparence doit
être une règle de base, la protection des victimes est la plus forte priorité
». Il va sans dire que mon assentiment à ce sujet est totale, en tant que
victimologue et professeur de Criminologie pour l ‘université de Bologne.
On souligne aussi le fait que pendant le congrès de Stockholm de 1996 on
avait déjà écrit bien clairement à propos de ce risque et donc j’estime
très utile, pour ceux qui ne connaissent pas ce document, d’écrire certains
passages des paragraphes 6 et 8 du « L’exploiteur sexuel » chapitre II «
Groupe fournissant les exploiteurs sexuels d’enfants »…Dans presque tous
les pays privilégiés par le tourisme sexuel, vivent des étrangers émigrés
des pays riches. Ceux-ci y se trouvent pour des raisons
professionnelles….mais on peut citer des cas de personnes expatriées qui
gagnent de l’argent en fournissant des femmes et des enfants aux
touristes sexuels…des cas connus d’étrangers qui fournissent des enfants
à des compatriotes, à des amis de passage qui les exploitent pour la
pornographie. Les programmes d’aide au développement souvent offrent
des possibilités incomparables d’accès aux enfants, comme par exemple
les cas récents au sein des ONG, où des volontaires ont abusé
sexuellement des enfants dont ils s’occupaient… Dans certains cas, des
chrétiens considérés comme des philanthropes ont créé des centres de
formation professionnelle et des foyers résidentiels dans le but de les faire
utiliser par des cercles de pédophiles. De même il y a beaucoup de
religieux qui abusent de la confiance des enfants et de la crédibilité qu’on
leur accorde en vertu de leur appartenance religieuse, pour obtenir un
accès sexuel aux enfants.
Cinq pages sont insuffisantes pour raconter et partager toutes les choses
qu’on a dites, échangées, apprises. Il est toutefois intéressant la façon
avec laquelle les groupes d’étude ont réussi, avec courage et après avoir
hésité au début sur une proposition de ma part concernant la « pédophilie
féminine », à mettre au point une équipe de recherche et travail à ce
sujet, qui, peut-être, représente un des derniers tabous qu’il faut vaincre
et qui devient encore pire et inquiétant lorsqu’ il y a une interaction entre
satanisme et pédophilie féminine. Mais avant de parler de ces sujets, il
faut indiquer des données importantes produites par Bernard Cordier,
psychiatre et expert du Tribunal dans les cas de pédophilie. « Il y a les
actes pédophiles dans la famille, c’est-à-dire l’inceste, et à l’extérieur de la
famille; selon l’âge, de 0 à 5 années on parle d’infantophilie et jusqu’à 13
années de pré-adolescentophilie. Du point de vue clinique, moins du 5%
sont des pédophiles secondaires avec schizophrénie et déficience
intellectuelle. Dans la plupart des cas il s’agit de maladies obsessionnelles,
impulsives, angoisse de passer à l’acte, c’est-à-dire on passe à l’acte pour
décharger l’angoisse. On peut parler de pédophilie latente dans les cas où
il se produit des actes pédophiles pour réaction, ou bien chez les
adolescents gros et timides on parle de pédophilie exploratoire.
Cordier identifie les pédophiles primaires comme les séducteurs qui
passent beaucoup de temps avec les enfants, par exemple, les
professeurs, les instructeurs de sport, etc., qui sont des manipulateurs,
exclusifs, impuissants avec les adultes et qui, en général, connaissent bien
les enfants dont ils abusent ; les agressifs qui passent moins de temps
avec les enfants, ils les détestent et ils n’attaquent que les enfants
inconnus ; le pédophile séducteur qui a des sentiments d’amour, pénètre
rarement, ne fait que de la « fellation », et en général il s’agit d’une
personne névrotique,
infantile, pleine de conflits et qui fait des
prosélytes. L’affirmation que jusqu’à présent on n’a pas trouvé une cause
génétique ou biologique, réduit l’hypothèse du « processus de répétition »
qui n’existe que dans le 30% des cas. Il est important de considérer à
quelle âge il y a eu l’agression, quel type de lien il y a entre la victime et
l’agresseur, la durée de la relation et la modalité de l’initiation. Il est
important de souligner la limite entre prévention et inquisition. Aussi pour
les deux magistrats présents, Jürgen Dubbers et Renate Winter, il faut
éviter « l’abus dans l’abus », qui arrive très souvent dans les affaires de
séparation conflictuelle. Moi aussi, je viens de faire une expertise pour le
Ministère Public concernant une accusation de ce genre.
2.2 La relation occulte entre pédophilie et satanisme
L’enfant est l’expression maximale de la pureté et donc il représente la
réalisation maximale de la transgression et de la perversion, de l’offense
de la « sacralité » du corps, sans doute virginal. Pour cette raison, depuis
toujours, le cadeau le plus cher à Satan est un corps enfantin, jeune,
vierge, c’est le corps qui contient et représente l’innocence qui doit être
salie, contaminée, corrompue. Dans la documentation directe des faits,
des pratiques occultes, des rituels de jeunesse, de satanisme, les enfants
étaient violés, torturés, parfois sacrifiés et tous ces actes avaient toujours
une connotation érotique et une finalité érotique, donc étant donné que
cet érotisme était pratiqué ou suscité par des adultes et pour les adultes,
il est évident qu’il y a une connexion et une combinaison entre pédophilie
et satanisme. Inquiétants sont les faits qui se sont produits récemment à
Modène et le choix d’un nom comme celui de « Bambini di Satana » (les
Enfants de Satan). Souvent il y a la présence d’un intermédiaire féminin,
d’un initiateur féminin qui entraîne le martyre de beaucoup d’enfants ;
souvent il s’agit de la mère, d’une soeur, d’une parente ou bien d’une
voleuse d’enfants qui est protégée par sa même appartenance au sexe
féminin. Il faut se dénuer de ces idées préconçues.
2.3 Pédophilie féminine
La pédophilie ne veut pas seulement dire pénétration, bien au contraire il
s’agit en général de rapports sexuels par os ou tactiles, le type de
sexualité de la pédophilie féminine qui ne laisse aucune trace, exception
faite pour la dévastation psychologique et psychosomatique chez l’enfant.
Je peux citer les mots d’une patiente et de deux enfants. « Quand j’étais
au collège et j’avais peur, j’allais me coucher dans le lit de la surveillante ;
elle me protégeait, me serrait, me caressait et me disait que je devais
rester toujours une fille, pour rester pure et elle me touchait, pour
m’enseigner, où je ne devais jamais me faire toucher par personne,
surtout par les hommes. Si je n’arrivais pas à me tranquilliser, elle me
massait le ventre et les cuisses et j’étais étourdie et puis j’éprouvais du
plaisir et je m’endormais et me réveillais car elle m’embrassait sur la
bouche ». La dame en question n’a jamais eu un cycle menstruel normal.
Elle est passée de la boulimie à l’anorexie grave. Maintenant elle a 32 ans,
elle est en cours d’analyse car elle est tombée amoureuse d’un homme.
Lors de l’interrogatoire, un enfant de trois ans dit : « maman a mis sa «
minette » sur mon « zizi ». Papa et ses amis regardaient, le frère de 10
ans raconte: « maman nous faisait voir comme nous devions faire et puis
elle préparait le panier-repas à mon frère et la serviette pour moi. Elle
nous menait chez des amis et le matin elle venait à contrôler si nous
étions allés à la maternelle et à l’école, puis elle voulait savoir tout et voir
comment nous avions fait, si nous avions fait mal elle nous réprimandait
ou bien elle nous enseignait ».
Deux petites-filles, deux cas pour lesquelles j’ai fait une expertise pour le
Ministère Public.
Une petite-fille de 5 ans, confiée depuis une année et demi à une famille,
a toutes les dents pourries et crache toujours pendant les entretiens
audio-visuels tournés, me dit: « Dégoût la salive ! Dégoût la salive de
maman ; elle prenait le lait de papa et puis elle le mettait dans ma
bouche, dégoût, elle me faisait tout derrière, très mal et odeur de caca ».
D’autres choses encore.
Quelquefois je voudrais ne pas écouter, ne pas comprendre, l’esprit et le
coeur se refusent, je serais tentée de laisser à d’autres personnes ces
souffrances, puis je pense que je serais lâche, je pense à ces enfants qui
ont écouté, qui ont hurlé de douleur, qui étaient désorientés et peut-être
n’ont-ils pas compris, mais ils sont capables de se souvenir et de raconter
et moi je dois les aider à « dénoncer », à démontrer qu’ils disent la vérité,
ils doivent être croyables, dans le temps maximum accordé par la loi, 6
mois, sans même respecter leur « temps de réaction ».
Eux, avec tous leurs droits violés, ils doivent démontrer l’horreur qu’ils ont
subie, pourquoi croit-on que les enfants mentent plus que les adultes ? Et
alors, comme le dit Bernard Boëton, « c’est reconnaître la réalité qui nous
remet en marche ».
Si je n’avais pas la foi, parfois je renoncerais, comme par exemple, il y a
peu de jours, pendant une « validation », quand une petite-fille m’a dit : «
Fais-toi le signe de la croix pour moi ». « Pourquoi ? » « J’ai encore peur,
maman, quand nous ne faisions pas ce qu’elle voulait, elle suspendait ma
sœur et moi par les pieds au crochet des rideaux et avant de nous frapper
avec le bâton, elle nous faisait le signe de la croix en nous griffant ». «
Montre-moi comment elle faisait », pour trois jours j’ai eu les traces
rougeâtres des égratignures.
Extrait de :
LES DIEUX SONT DEVENUS DES MALADIES, Psychiatrie, psychologie et
théologie en dialogue, par Tonino Cantelmi, Silvestro Paluzzi, Ermes
Luparia, avant-propos par S.E. Card. Camillo Ruini, Symposium National,
4-5 mars 2000, Rome, Université « Lateranense » (de Latran ), SODEC,
ed. ROMANE DI CULTURA
CHAPITRE DEUXIEME
PSYCHIATRIE ET PSICHOLOGIE AU SEUIL DU TROISIEME MILLENAIRE :
PROBLEMES CLINIQUES NOUVEAUX
D) LES ABUS