Une nuit à Dubaï

Transcription

Une nuit à Dubaï
BELLA FRANCES
Une nuit à Dubaï
Une nuit au
bout du monde
BELLA FRANCES
Une nuit
au bout du monde
Collection : Azur
Cet ouvrage a été publié en langue anglaise
sous le titre :
THE SCANDAL BEHIND THE WEDDING
Traduction française de
CHRISTINE MOTTI
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© 2015, Bella Frances.
© 2016, traduction française : Harlequin.
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Cette œuvre est une œuvre de fiction. Les noms propres, les personnages, les lieux,
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ISBN 978-2-2802-8388-5 — ISSN 0993-4448
1.
Le cœur battant à tout rompre, Georgia Blue confia
les clés de sa berline au voiturier du Al-Jafar, l’un des
hôtels les plus prisés de Dubaï. Heureusement, dans sa
robe Alaïa achetée d’occasion à Londres, elle se savait
assez élégante pour ne pas déparer dans ce cadre idyllique.
Prenant une profonde inspiration, elle pénétra dans le
hall de l’hôtel et se fondit dans la foule des clients, pour
la plupart de riches Européens.
Elle dépassa l’imposante fontaine centrale et se dirigea
vers les ascenseurs en tentant de chasser les douloureux
souvenirs qui lui revenaient à la mémoire. La dernière
fois qu’elle était venue dans ce lieu, c’était au bras de
Nick, son ex-fiancé, qui l’avait convaincue de le suivre à
Dubaï pour y célébrer leur mariage. De ce projet, il ne
restait rien, excepté une grande amertume.
Ce soir, elle avait longuement hésité avant de suivre le
conseil de Kirsty, sa colocataire. La jeune femme savait
à quel point Georgia souffrait de la trahison de Nick.
Elle lui avait parlé d’une soirée spéciale, réservée aux
célibataires, organisée au Al-Jafar. Qu’avait‑elle à perdre,
après tout ? lui avait dit son amie. Que risquait‑elle ? Il était
grand temps pour elle de tourner la page et de reprendre
en main sa destinée.
En appuyant sur le bouton d’appel de l’ascenseur, elle
aperçut le reflet de son visage sur la paroi chromée de la
cabine. Elle s’était maquillée à la hâte et ses yeux bordés
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de noir lui donnaient l’air grave. Affligée, elle détourna
le regard. Peut‑être ferait‑elle mieux de renoncer à cette
soirée, de rentrer chez elle et de regarder la télévision.
Alors qu’elle s’apprêtait à tourner les talons, une haute
silhouette masculine apparut derrière elle. Impressionnée
par l’élégance de l’inconnu et aussi par la beauté sculpturale de ses traits, elle renonça à son projet et se réfugia
au fond de la cabine dont les portes venaient de s’ouvrir.
L’homme se posta près d’elle, suivi par un groupe de
jeunes gens. Tous semblaient de joyeuse humeur et
passablement éméchés.
— Quel étage, mademoiselle ? demanda l’inconnu à
ses côtés.
Impressionnée par le ton grave de sa voix, Georgia leva
les yeux vers lui et se sentit frissonner. Seigneur, cet homme
était beau comme un dieu ! Il avait de larges épaules, une
mâchoire carrée et des yeux d’un bleu minéral, bordés de
longs cils aussi noirs que ses cheveux.
Comme elle ne répondait pas, l’inconnu reprit :
— Quel étage ?
Tout comme Nick, cet homme semblait appartenir à
la race des puissants. Son monde se situait probablement
à des années-lumière du sien. Il respirait l’opulence et la
confiance en soi.
— Mademoiselle ? demanda-t‑il de nouveau en haussant
un sourcil d’un air interrogateur.
— Pardon… euh… cinquante-neuvième étage, finit‑elle
par bredouiller sous le regard goguenard des étrangers
qui l’entouraient.
Les portes se refermèrent et la cabine entreprit sa longue
ascension. Les yeux baissés sur ses souliers, Georgia décida
de prendre son mal en patience. Elle se sentait mal à l’aise
au milieu de tous ces hommes. Quand la cabine s’arrêta
pour permettre à un couple de personnes âgées de monter
à leur tour, Georgia eut l’impression de suffoquer. Parmi
les jeunes gens bruyants qui se trouvaient là, il en était
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un qui lui faisait face et la dévisageait avec insistance.
Tournant la tête de côté, Georgia s’efforça de l’ignorer.
— Alors, ma jolie, quel est votre programme ? lui
susurra-t‑il en se penchant vers elle.
Réprimant l’envie de lui répondre vertement, comme
elle le faisait parfois aux clients du pub londonien où
elle avait grandi et que tenait encore aujourd’hui Babs,
sa sœur, elle serra les lèvres.
Même si la solitude lui pesait, elle n’avait aucun désir
de sympathiser avec cet inconnu qui lui paraissait aussi
immature que ses acolytes. Tous, sauf l’homme qui se
tenait immobile à ses côtés et dont la présence l’électrisait
sans qu’elle en comprenne la raison.
Soudain, sans pouvoir s’en empêcher, elle tourna la
tête vers lui, et rougit quand leurs regards se croisèrent.
Georgia avait côtoyé des centaines d’hommes dans
le pub de Babs ou encore sur les terrains de football où
elle entraînait de jeunes enfants, mais aucun ne l’avait
autant impressionnée que cet inconnu. Il paraissait doté
de pouvoirs surnaturels, comme celui de lire en elle. Pas
de doute, il représentait un véritable danger.
Si elle devait de nouveau nouer une relation avec un
homme, il n’appartiendrait pas à la race des séducteurs. Ce
serait un homme tranquille, tendre, qui saurait panser ses
blessures. Un homme qui n’aurait pas pour but d’ajouter
une nouvelle proie à son tableau de chasse.
La cabine marqua un nouvel arrêt, le temps de laisser
descendre quelques personnes, puis reprit son ascension.
Lorsque enfin elle atteignit le cinquante-neuvième étage,
les jeunes gens se bousculèrent pour sortir.
— Allez, les gars, dépêchons-nous, la fête nous attend,
dit l’un d’entre eux. J’ai hâte de poser mes mains sur de
jolies fesses !
— Tommy, surveille tes manières, intervint le voisin
de Georgia. Nous avons une dame avec nous.
Tous les regards convergèrent vers lui et le silence se
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fit. Visiblement, son ton autoritaire avait fait son effet.
Georgia se sentit frissonner.
Fébrile, elle sortit de la cabine, qui donnait sur un
couloir brillamment éclairé par des appliques en cristal
fichées dans les murs. Un panneau doré proposait deux
choix : cinq suites sur la gauche et cinq suites sur la droite.
Sans réfléchir, Georgia opta pour la gauche et s’éloigna à
la hâte. Le couloir lui parut interminable. Lorsque enfin
elle aperçut une plaque indiquant la « Jumeirah Suite »,
elle poussa un soupir de soulagement. Elle ne s’était pas
trompée de direction.
Redressant les épaules, elle frappa à la porte, qui s’ouvrit
aussitôt sur une salle immense, bondée. Affichant un
sourire timide, elle remercia le portier qui l’avait invitée
à entrer et pénétra dans la pièce d’une démarche assurée.
Autour d’elle, les hommes et les femmes portaient tous des
tenues de soirée. Deux escaliers de marbre desservaient un
grand salon en contrebas, meublé de splendides canapés
en cuir blanc que rehaussaient des coussins cousus de
fils d’or. Sur les côtés, des mezzanines offraient d’autres
espaces de détente. Une immense baie vitrée donnait sur
le golfe Persique, baigné d’une clarté irréelle, un mélange
subtil de bleu et d’orangé. Le coucher du soleil dans cette
région du monde constituait un spectacle fabuleux, aussi
Georgia décida-t‑elle de le contempler un instant, avant de
reporter son attention sur les gens autour d’elle. Soudain,
une pensée étrange l’effleura. Qui étaient toutes ces personnes ? Comment se faisait‑il que la plupart formaient
des couples, alors qu’il s’agissait d’une soirée destinée à
des célibataires ?
Avisant une splendide jeune femme brune qui venait
dans sa direction, Georgia l’interpella :
— Excusez-moi… je ne suis pas sûre d’être au bon
endroit. On m’a dit que l’hôtel organisait une soirée pour
célibataires…
La jeune femme embrassa sa silhouette d’un regard
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torve, puis, sans répondre, se rendit au bar. Georgia
esquissa une grimace de dégoût en la voyant se lover
contre un personnage corpulent qui ressemblait à un
homme d’affaires. Sans vergogne, ce dernier plaqua une
main sur ses reins et l’attira encore plus près. De l’autre,
il caressa un de ses seins.
Affolée, Georgia regarda les couples autour d’elle et
comprit sa méprise. Les femmes n’étaient pas des célibataires comme elle. Elles vendaient leurs charmes aux
riches Européens désœuvrés de Dubaï.
Se sentant soudain comme une naufragée sur le pont
d’un bateau à la dérive, au milieu de requins prêts à la
dévorer, elle tourna les talons.
Elle avait commis une erreur regrettable. Une fois
de retour au complexe qui abritait son appartement,
elle s’installerait sur son canapé devant la télévision et
enverrait un texto à Kirsty pour lui reprocher son manque
de discernement.
Et dès demain, elle partirait à la recherche d’autres
entreprises susceptibles de lui confier des enfants à
entraîner. Il lui restait encore quelques soirées de libres,
alors mieux valait les occuper utilement afin de réunir
une partie de la somme dont Babs avait besoin. Toutefois,
elle savait qu’elle ne parviendrait jamais à trouver les
soixante mille dollars nécessaires pour solder les dettes
de sa sœur. Même ici, à Dubaï, où l’argent coulait à flots.
Au moment où elle allait fuir cet endroit détestable,
la porte de la suite s’ouvrit sur le groupe de jeunes gens
qu’elle avait rencontrés dans l’ascenseur. L’homme qui
l’avait tant impressionnée les exhorta au calme et la petite
bande obéit. De toute évidence, il était leur mentor.
Tous pénétrèrent dans la suite, un large sourire aux
lèvres, comme s’ils s’apprêtaient à participer à un festin.
Pétrifiée, Georgia n’avait d’yeux que pour leur chef
qui, se sentant observé, tourna brusquement la tête dans
sa direction. Puis, après un instant d’hésitation, il marcha
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droit vers elle. Lorsque ses lèvres esquissèrent un sourire,
Georgia faillit s’évanouir. Il était vraiment époustouflant.
Dire qu’elle avait trouvé Nick séduisant autrefois ! Cet
homme le surpassait à tous points de vue.
Lorsqu’il la rejoignit, elle leva la tête vers lui. Sa haute
stature avait un côté rassurant, de même que son regard
franc et direct.
— Ravi de vous rencontrer… de nouveau, lui dit‑il en
lui prenant délicatement la main.
Georgia le regarda la porter à ses lèvres et déposer un
doux baiser sur ses doigts. Mille frissons la parcoururent.
Sans relâcher sa main, l’homme pencha la tête sur le côté
et lui adressa le sourire le plus sexy qu’elle ait jamais vu.
Un sourire sensuel, plein de promesses… terrifiant.
— Quel est votre nom ?
— Georgia, répondit‑elle dans un souffle.
— Georgia… très joli prénom. Je suis Danny Ryan.
Le bleu de ses yeux, si intense, avait la couleur du
péché et donnait envie de s’y noyer.
— Ravie de faire votre connaissance, dit‑elle d’une
voix mal assurée.
Elle lui serra la main, puisqu’il tenait encore la sienne,
puis retira vivement cette dernière. Elle pressentait le pire
des dangers auprès de cet homme. Il était beaucoup trop
attirant, trop séduisant.
— Désolée, Danny, mais je dois m’en aller. Je me suis
trompée de fête, je crois.
— C’est bien dommage, car j’espérais avoir l’opportunité
de vous offrir toutes mes excuses pour le comportement
de mes collaborateurs, tout à l’heure dans l’ascenseur.
Quand ils boivent un peu plus que de raison, ils ne savent
plus se tenir, mais ce ne sont pas de mauvais bougres. Je
les ai réprimandés, l’un après l’autre, avant de venir ici.
J’espère qu’ils ne vous ont pas trop offensée.
— Merci, mais vous n’êtes pas responsable de leur
comportement. Inutile de vous excuser.
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Elle embrassa la salle du regard, puis reporta son
attention sur Danny. Même — ou plutôt, surtout — au
bras de l’homme le plus séduisant de la planète, elle ne
se sentait pas à sa place dans cette soirée.
— Désolée… mais je dois m’en aller, répéta-t‑elle avec
une assurance qu’elle était loin d’éprouver.
Danny fronça les sourcils, comme s’il était contrarié
qu’elle s’éclipse sans son autorisation. Il était probablement
le genre d’homme à être peu habitué à ce qu’on lui fausse
compagnie. Mais Georgia ne se sentait pas en mesure
de supporter l’ambiance de cette soirée. Et même si elle
souffrait de la solitude, elle ne devait pas succomber au
charme d’un homme comme Danny.
Soudain, le jeune importun qui l’avait un peu ennuyée
dans l’ascenseur se matérialisa à leurs côtés, suivi de près
par ses acolytes. Danny le toisa sans aménité.
— Que veux-tu, Tommy ?
Le jeune homme se tassa sur lui-même et prit un air
contrit en se tournant vers Georgia.
— Je suis désolé pour ce que j’ai dit… et fait dans
l’ascenseur.
— Ce n’est pas grave, répondit Georgia tout en regardant autour d’elle.
Alors qu’elle cherchait une issue, une volée de jeunes
femmes aguichantes, outrageusement maquillées, vinrent
se joindre à leur groupe. Il y en avait pour tous les goûts :
des blondes, des brunes, des Latines au teint mat ou des
Nordiques à la peau nacrée.
Happé par deux splendides créatures, Tommy les prit
par la taille et tourna les talons, bien décidé à profiter de
l’aubaine. Ses amis suivirent le mouvement.
Georgia leva les yeux vers Danny puis les détourna très
vite. Seigneur ! Il devait penser qu’elle était aussi facile
que ces jeunes femmes. Pire, il devait lui aussi rechercher
la compagnie de l’une d’entre elles. Il était impossible
qu’un homme comme lui soit célibataire et cherche l’âme
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sœur. Georgia se sentit vaciller, comme prise au milieu
de sables mouvants. Il fallait vraiment qu’elle se sauve.
— Je dois partir, dit‑elle très vite en reculant de
quelques pas.
— Attendez ! intervint Danny en lui prenant la main.
Pourquoi ne pas rester encore un peu ?
— Non, désolée… Je ne suis pas à ma place ici. Ce
n’est pas le genre de fête que j’apprécie.
Sans lui lâcher la main, Danny jeta un coup d’œil
autour de lui. Avec une moue désapprobatrice, il déclara :
— Je comprends ce que vous ressentez. Ce n’est pas
non plus ce à quoi je m’attendais.
Reportant son attention sur Georgia, il demanda :
— Et si nous cherchions un endroit un peu plus…
civilisé ?
Georgia voulut fuir son regard intense, sans toutefois
y parvenir. Il y avait quelque chose de fascinant dans le
bleu si pur de ses yeux, sans la moindre nuance de gris
ou de vert. Elle pourrait se perdre dans ces yeux-là…
sans aucun retour en arrière possible.
Chassant l’envoûtement qui la menaçait, elle s’efforça
de se remémorer le but qu’elle poursuivait : gagner le
plus d’argent possible pour aider Babs à solder une partie
de ses dettes. Ensuite, elle prendrait l’avion et rentrerait
définitivement en Angleterre.
— Merci, mais je préfère partir. Je ne suis pas d’humeur
festive.
Danny parcourut la salle du regard jusqu’à ce qu’il
repère ses compagnons. Il les observa un petit moment,
la mine sévère, puis détourna les yeux d’un air dégoûté.
Tous avaient trouvé une partenaire qui se laissait embrasser
et caresser à loisir.
— Attendez-moi une minute, lui dit‑il. Il faut que je
prévienne mes collaborateurs. Ils ne se rendent pas compte
du piège dans lequel ils sont en train de tomber. Ensuite,
je vous emmènerai ailleurs, dans un endroit plus décent.
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Sans lui donner le loisir de répondre, il se dirigea vers
deux de ses compagnons. Tandis qu’il les prenait à partie,
sans doute pour leur faire la leçon, Georgia observa la foule
autour d’elle. Elle commençait à avoir la nausée. Jamais
elle n’avait fréquenté d’endroit de ce genre ni rencontré
des escort girls professionnelles. Elle ne les jugeait pas,
mais se sentait à mille lieues de leur univers.
Danny s’adressa à chacun de ses collaborateurs à tour
de rôle, les interrompant dans leurs élans passionnés.
Certains semblaient rechigner à entendre raison, d’autres
ouvraient de grands yeux effarés.
Le cœur au bord des lèvres, Georgia serra son sac contre
elle et tourna les talons. Il était hors de question qu’elle
reste une minute de plus dans cet endroit ! Soudain, elle
entendit des cris, puis la foule devant elle se clairsema.
Des policiers venaient de faire irruption dans la suite.
Seigneur, que se passait‑il ? Voilà qu’elle se retrouvait au
beau milieu d’une descente de police !
Danny se matérialisa soudain à ses côtés.
— Pourquoi la police intervient‑elle ? lui demanda-t‑elle,
affolée.
— Je ne vois qu’une seule raison à cela et je pense
que nous ferions mieux de nous éclipser.
D’un geste ferme, il lui agrippa le bras et prit la direction des escaliers. Perchée sur ses hauts talons, Georgia
peinait à le suivre.
— Je pourrais me tromper, reprit Danny, mais j’ai
bien peur que cette soirée ait été organisée de manière
illégale. D’où cette descente de police.
— Quoi ? Que voulez-vous dire ? Je me doutais bien
qu’il se passait quelque chose d’étrange ici. On m’avait
dit qu’il s’agissait d’une soirée pour célibataires… Je suis
institutrice. Je risque mon poste !
— Vous n’êtes pas la seule…
Ils atteignirent le bas des marches et gagnèrent une
immense terrasse circulaire abritant une piscine nichée
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au milieu d’une végétation luxuriante. Des couples sur des
chaises longues s’étreignaient sans vergogne. Visiblement,
personne ici ne s’était encore rendu compte que la police
avait investi la place.
Georgia détourna les yeux. Une vague de panique
l’étreignit à l’idée d’être arrêtée par la police dans ce
lieu de débauche. Elle avait des devoirs envers sa sœur
aînée, qui avait tout sacrifié pour l’élever, lui offrir un
foyer confortable et qui continuait à travailler comme
une forcenée pour subvenir à leurs besoins.
— Danny, vous ne comprenez pas ! cria-t‑elle. Je risque
gros si on m’arrête !
— Je vais empêcher cela. Suivez-moi… Je sais où
nous allons pouvoir nous réfugier en attendant que toute
cette agitation cesse.
Ils franchirent une porte vitrée et s’engagèrent dans un
long couloir désert capitonné de velours pourpre. Comme
Georgia peinait à le suivre, Danny passa un bras autour
de ses épaules pour l’aider à progresser plus vite. Plus ils
s’éloignaient, plus les bruits de la fête leur parvenaient
de manière étouffée.
— Et… vos compagnons ? demanda Georgia.
— Je leur ai dit quoi faire et quoi dire en cas de
besoin… S’ils s’en souviennent, tout ira bien pour eux.
Et pour vous aussi, je vous le promets.
Un peu rassérénée, Georgia pressa le pas. Elle espérait
que Danny disait vrai et que rien de grave ne lui arriverait.
A son arrivée à Dubaï, elle avait été prévenue. Il ne fallait
absolument pas connaître de déboires avec la police. Elle
travaillait pour une école internationale réputée qui ne
tolérait aucun écart de conduite de la part de son personnel.
Mais qui la croirait innocente si on l’arrêtait ? Avec sa
robe sexy et son maquillage outrancier, on la prendrait
pour l’une de ces filles à la réputation douteuse. Une fois
qu’elle aurait donné son adresse et celle de son employeur,
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elle serait expulsée sans autre forme de procès — ou pire
encore, incarcérée.
Après un dédale de couloirs et de marches, Danny et
elle se retrouvèrent sur une nouvelle terrasse, mais à un
étage inférieur. Ils la traversèrent puis s’arrêtèrent devant
une lourde porte ornée de nacre. Danny l’ouvrit à l’aide
d’une clé qu’il sortit de sa poche. La porte donnait sur
un ascenseur privé.
Un peu craintive, Georgia s’immobilisa.
— Je… êtes-vous sûr que ce soit sans danger ?
Danny lui prit la main et la serra dans un geste de
réconfort.
— Faites-moi confiance. Tout ira bien. Je connais
assez de monde ici pour nous sortir d’embarras. Là où je
vous emmène, nous serons tranquilles.
Comme Georgia semblait indécise, il se pencha vers elle.
— D’accord ?
— D’accord, dit‑elle en pénétrant dans la cabine.
A quoi bon lutter ? Elle n’avait pas d’autre choix que
de suivre Danny.
La cabine entama son ascension. Apparemment, ils se
rendaient tout en haut de l’immeuble.
Les portes s’ouvrirent sur une immense suite, merveilleusement décorée. La pièce principale donnait sur une
terrasse en contrebas éclairée par des lampadaires en
cuivre. Sur les côtés, Georgia aperçut d’autres pièces,
plus petites, mais tout aussi luxueuses. L’une d’entre elles
abritait un piano à queue. Sur les murs, elle reconnut des
toiles de maîtres. L’ensemble du décor témoignait d’un
goût exquis.
— Cet endroit vous convient‑il ? demanda Danny
en l’entraînant vers le salon. Nous y serons au calme,
rassurez-vous.
Danny se comportait en maître des lieux, comme si cet
endroit lui appartenait. Se pouvait‑il qu’il habite cette suite ?
Impressionnée par le luxe qui l’entourait, Georgia se
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sentait affreusement mal à l’aise. La situation échappait à
son contrôle. Elle ne s’était jamais attiré d’ennuis dans sa
vie, ni à l’école ni à l’université. Elle savait distinguer le
bien du mal. Et la seule erreur qu’elle ait jamais commise
avait été de croire en Nick, en son amour, et d’avoir accepté
de le suivre à Dubaï.
Conscient du trouble qui l’habitait, Danny s’approcha
d’elle et posa les mains sur ses épaules pour l’obliger à
le regarder.
— Georgia… tout va bien ?
Elle lui adressa un regard éperdu.
— Je ne peux pas avoir d’ennuis… Je ne peux pas
me le permettre. Je dois garder mon travail. C’est tout
ce que j’ai.
Danny hocha la tête d’un air sérieux et, contre toute
attente, Georgia en éprouva un immense réconfort. Elle
n’avait aucune raison de faire confiance à cet homme, mais
son instinct lui disait qu’elle était davantage à l’abri dans
cette suite de rêve qu’au milieu de toutes les personnes
interpellées par la police. Et ce n’était pas simplement
dû au grand calme affiché par Danny. Ses mains sur ses
épaules lui donnaient des frissons délicieux et elle n’avait
aucune envie de fuir ce contact.
Au bout d’un moment qui lui parut interminable, Danny
finit par secouer la tête, comme pour chasser une pensée
inopportune et dit :
— Asseyez-vous sur un canapé pendant que je passe
quelques appels.
Avant de la lâcher, Danny se pencha vers elle, la dévisagea
longuement puis se redressa comme à contrecœur. Ses
doigts effleurèrent ses lèvres, puis il se détourna. Quand
il se fut éloigné, Georgia ressentit comme un grand vide.
Le charme était rompu.
Elle prit place sur un canapé et se laissa aller contre
les coussins moelleux. Sur le guéridon à sa droite, une
lampe exhalait un parfum délicieux. De l’autre côté, sur
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une commode, trônait un grand vase rempli d’orchidées
de toutes les couleurs. Et en face d’elle, l’immense baie
vitrée offrait une vue splendide sur le golfe.
Son téléphone à l’oreille, Danny se dirigea à l’autre
bout de la suite.
— Sarwar ? C’est Danny. Ecoute, j’ai besoin que tu
me rendes un service…
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BELLA FRANCES
Une nuit à Dubaï
Dubaï, une fête qui dérape, une descente de police…Et un
séduisant inconnu qui la sauve in extremis. Georgia pensait
avoir échappé au pire, jusqu’au moment où elle découvre
des photos du brûlant baiser qu’elle a échangé avec son
beau sauveur. Prise au coeur d’une tempête médiatique,
Georgia risque de perdre son emploi d’institutrice…
A moins de se laisser tenter par la solution que lui propose
Danny Ryan : l’épouser. Un mariage de façade, le temps
que le scandale passe, ensuite chacun reprendra le cours
de sa vie. Georgia n’aurait jamais imaginé commettre
une telle folie, mais la voilà sur le point de lier son destin
à celui de cet homme qu’elle ne connaît pas, mais qui la
trouble plus qu’elle ne le voudrait…
Au bout du monde, une seule nuit de passion
peut bouleverser toute une vie…
1er janvier 2016
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2016.01.42.5378.6
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