Libertango A Piazzolla
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Libertango A Piazzolla
LIBERTANGO Astor Piazzolla Quelques éléments biographiques : Astor PIAZZOLLA (1921-1992) est né en Argentine à Mar del Plata, un port de pêche à 420 kms au sud de Buenos Aires sur la côte atlantique, mais vit son enfance à New-York de 1925 à 1936 Dès l'âge de 8 ans, il commence à apprendre le bandonéon que son père, Vicente Piazzolla (Nonino) lui a acheté, instrument étroitement associé au tango argentin. Des leçons du pianiste hongrois Bela Wilda, disciple de Rachmaninov, il apprend à aimer Bach, auquel il voue une grande admiration. C'est dans cette période de son enfance qu'il fait la connaissance de Carlos Gardel, le légendaire chanteur de tango, avec lequel il joue un petit rôle dans le film "El dia que me quieras" (1935) de John Reinhardt . Lorsqu'il revient en Argentine, il joue avec différents ensembles de tangos avant de se joindre à l'orchestre d'Anibal Troilo, célèbre tanguero, considéré comme maître du bandonéon. A partir de 1944, il accompagne le chanteur Francisco Florentino, puis dirige son propre orchestre en 1946 et commence ses études de composition avec le célèbre compositeur Alberto Ginastera. Peu à peu, alors que ses arrangements sont jugés peu conventionnels et trop complexes, il se détourne du tango et de sa carrière de musicien professionnel pour composer des oeuvres symphoniques, qu'il présente à un concours à Buenos Aires en 1949. Il gagne alors un prix qui lui permet de poursuivre ses études musicales en France. Bien qu'il pense être destiné à la musique classique, c'est grâce à la clairvoyance de Nadia Boulanger en 1954 qu'il reviendra à la composition de tangos, auxquels il se consacrera définitivement. De retour en Argentine, puis à New York, il crée un tango innovant, loin de celui de l'orchestre typique, sans chanteur ni danseurs, qu'il joue debout, un pied sur une chaise. A la mort de son père en 1959, il compose "Adios Nonino" pour lui rendre hommage. En 1968, sa collaboration avec Horacio Ferrer lui fait reconsidérer le Tango Cancion (chanté) qui lui apporte une certaine popularité avec la composition de "Balada para un loco" chanté par Amelita Baltar. Après une entrée au Teatro Colon de Buenos Aires où il rencontre diverses formations orchestrales, Piazzolla crée en 1976 le "Quinteto Tango Nuevo" (piano, contrebasse, guitare, violon et bandonéon) L'oeuvre de Piazzolla a apporté au tango les influences de la musique classique et du jazz. Bien que s'inspirant du tango traditionnel, Piazzolla lui ajoute une rythmique plus dynamique, un phrasé plus passionné avec des harmonies savantes, une structure plus sophistiquée, indépendante de la danse et des mots, où la diversité des thèmes n'altère pas la cohérence de l'oeuvre qu'il joue désormais en concert avec une virtuosité magnétique et envoûtante : le Tango Nuevo (nouveau tango) est né ! Le Tango : ses origines et ses rythmes De toutes les musiques du XXème siècle, le Tango est celle qui intègre le champ le plus large de cultures issues des autochtones, de l'esclavage et de l'immigration: la Milonga argentine, le Candombé africain, la Habanera cubano-espagnole, le mélodisme et la nostalgie des italiens, la tradition populaire espagnole, les influences diverses d'Europe, le bandonéon allemand. Le Tango est né à la fin du XIXème dans les bas fonds de Buenos Aires en Argentine et de Montevideo en Uruguay, issu essentiellement du métissage de trois danses, le Candombé dansé par les esclaves noirs, très rythmé et qui parle de la misère d'un peuple, la Habanera d'origine cubano-espagnole, et la Milonga venue de la Pampa argentine, sorte de complainte des paysans solitaires, accompagnée d'une guitare à la mélodie simple et répétitive. C'est aussi en France que naît le chanteur qui apportera une expression nouvelle au tango, Carlos Gardel, toujours vénéré comme un dieu par les argentins, 70 ans après sa mort. Musicalement, le tango se caractérise par son rythme très accentué et par le développement du thème. La mélodie évite les grands intervalles et sert avant tout à illustrer le texte: . "Le tango a ceci de particulier: c'est un mini-opéra qui parle d'amour, de tragédie, de choses tristes, mais il raconte tout en trois minutes. Ses mélodies sont très bonnes et ses textes très forts." La danse, elle, est un raccourci saisissant de l'humanité: un mélange d'érotisme, d'animalité, de séduction et de rejet et le besoin impérieux de liberté. Le tango est une collusion physique qui balaye tous les tabous. Le Tango nuevo : "Il y a eu le t ango instrumental, le tango dansé et le tango chanté. En d'autres termes, il y a eu le tango classique, qui va de la fin du 19ème siècle jusqu'à Carlos Gardel, qui l'a élevé à un haut degré d'expression et de popularité. Ensuite le tango classique a suivi sa propre voie, et parallèlement, il a connu une évolution intéressante grâce à des hommes comme Astor Piazzolla qui a apporté des éléments modernes. C'est pour cela que le tango suscite encore l'intérêt et qu'il continue à vivre." Le Bandonéon: 'Le mot bandonéon vient de Heinrich Band (1821-1860), un facteur allemand d’instruments de musique, qui donne son nom à un "Carlsfelder Konzertina" présenté à l’exposition industrielle de Paris en 1849 . Description de l'instrument De forme carrée, plus petit que l’accordéon, le bandonéon se présente comme un instrument à vent portatif. L'air est insufflé par un soufflet étiré puis compressé par les bras du bandonéoniste. Aux deux extrémités du soufflet, deux caisses d'harmonies, actionnées par des boutons, renferment un système de languettes métalliques , les anches, mises en vibration sous la pression de l'air. La texture sonore de l’instrument présente une rondeur et un velouté chaleureux. Son soufflet particulièrement souple et ample (complètement étendu, un bandonéon mesure plus d'un mètre) lui permet un phrasé aussi vaste que celui de la voix humaine (Facture du bandonéon - 990 ko) Dans les années 1960, Astor Piazzolla innove en créant le "Tango nuevo" (nouveau tango) qui ne se chante plus, ne se danse plus, devient musique de concert, et porte l'expression artistique de son style à son apogée, lui permettant d'être tout à la fois compositeur et interprète de ses musiques, après avoir intégré les canons de la musique classique, les harmonies complexes du jazz. « J'écoute du Tango depuis l'âge de huit ans et je reconnais que certains de ces grands musiciens ont influencé ma musique. Je les respecte parce qu'ils ont trouvé un style propre. Quand on crée, il faut avoir son propre style. Sans style, il n'y a pas de musique. » Analyse musicale de Libertango : Il dure environ 3mn et est interprété par un sextette ( groupe de 6 musiciens ) Bandonéon, Piano, Guitare, Violon, Violoncelle et Contrebasse Ce Tango est de forme Thème et variations : Le thème principal est en la mineur et comporte 16 mesures 2 mesures de motif sur Mi 2 mesures sur Ré dièse 2 mesures sur Ré 6 mesures sur Do 3 mesures sur Si Et 1 mes de conclusion . Le rythme : un demi soupir et sept croches avec des accents sur 2-5 et 7 . C'est le bandonéon qui joue le thème . Le thème est envoûtant et dynamique . Les autres instruments jouent l'accompagnement sur une rythmique répétitive (emprunt à la habanera) : 1ère Variation : 16 mesures Le thème est rejoué par le bandonéon . Un contrechant mélodique apparaît au violoncelle . Il comporte des notes tenues longues et une mélodie en notes régulières . C'est une mélodie chantante et lyrique qui contraste avec le déhanchement rythmique du thème . Les autres instruments accompagnent . 2ème Variation: 16 mesures Duo mélodique entre le violoncelle et le violon qui dominent dans le sextette . Le bandonéon est au second plan Le piano, la guitare et la contrebasse sont au troisième plan sonore . 3ème Variation : 16mesures Le Bandonéon est à nouveau au premier plan et joue une extension mélodique du thème ( fort reconnaissable malgré tout) . La transition s'effectue avec 8 accords accentués joués Forte . 4ème Variation : Les 8 premières mesures du thèmes reviennent deux fois de suite dans un Forte général . C'est le Bandonéon qui joue le thème . 5ème Variation et Conclusion : Un contrechant est fait à la guitare à sur les 8 premières mesures jouées deux fois . La conclusion s'effectue dans un decrescendo du Sextette sur une dernière reprise lancinante des huit premières mesures .