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Transcription

Accompagner des élqves de CIPPA dans laconstruction de leur
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025<&pFLOH
Documentation
Année 2002-2003
Directrice de mémoire :
Florence Chaïme Dindo
N° de dossier : 02STA03426
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1.3.1
La première classe
1.3.2
La classe de CIPPA FLE Illettrisme
8
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8QHH[SRVLWLRQVXUOHVPpWLHUVXQWUDYDLOVXUOHVUHSUpVHQWDWLRQV
2.1.1
Susciter le désir d’apprendre par le questionnement
2.1.2
Rechercher une information dans l’auto-documentation de l’ONISEP
2.1.3
Apprendre à naviguer dans le site Web de l’ONISEP
2.1.4
Développer l’esprit de synthèse
2.1.5
Une auto-évaluation formative
14
14
15
16
17
8QHLQWHUYLHZILOPpHXQWUDYDLOVXUOHVWHFKQLTXHVGHFRPPXQLFDWLRQ
2.2.1
Etre capable de s’exprimer devant un groupe et oser parler de soi
2.2.2
Choisir qui sera interviewé
2.2.3
Analyser un film sur le métier de puéricultrice : « Au service de l’enfant »
2.2.4
Elaborer la grille d’entretien
2.2.5
Redonner confiance
2.2.6
Impliquer l’élève dans la conception du générique
2.2.7
Action !
2.2.8
Le montage
18
18
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19
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21
22
23
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'pYHORSSHUO¶DXWRQRPLH"
3.1.1
Provoquer le conflit socio-cognitif
3.1.2
Donner des repères efficaces
3.1.3
Améliorer l’usage de la langue
23
25
27
8QHSURJUHVVLRQGDQVOHFRPSRUWHPHQW
3.2.1
L’investissement dans le projet
3.2.2
Projet d’orientation et motivation
3.2.3
Un outil pour progresser : le questionnement
28
28
29
%LODQSURIHVVLRQQHOELODQSHUVRQQHO
3.3.1
La gestion de la classe
30
3
3.3.2
3.3.3
Une progression dans mes pratiques
Le rôle du documentaliste dans le projet personnel de l’ élève
31
32
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Situé dans la cité scolaire en périphérie de Nevers, le Lycée Professionnel Jean Rostand compte
624 élèves et 120 adultes, dont 70 professeurs. L’ enseignement, du Certificat d’ Aptitude
Professionnelle (CAP) au Bac Professionnel, est axé sur deux domaines d’ apprentissage : le
tertiaire avec les formations en secrétariat, comptabilité, commerce, services et vente ;
l’ industriel, avec les carrières sanitaires et sociales, le bio-service et les métiers de la mode et
industries connexes. Ces années de formation peuvent être prolongées par des mentions
complémentaires : aide à domicile ou services financiers.
Le lycée comprend aussi une 3e technologique et deux classes de Cycle d’ Insertion
Professionnelle Par Alternance (CIPPA). La première, constituée d’ élèves en échec scolaire, est
ouverte depuis un an ; la seconde, constituée d’ élèves illettrés ou primo-arrivants, s’ ouvre cette
année.
Trois salles informatiques en réseau disposent d’ un accès à BCDI 3, l’ internet et divers logiciels
professionnels : deux d’ entre elles sont équipées d’ un vidéoprojecteur et l’ une d’ un tableau
interactif.
/HVpOqYHV
La population scolaire est constituée de 85% de filles, ce qui s’ explique par les filières
proposées. 67% des familles d’ élèves connaissent de grandes difficultés financières, auxquelles
s’ ajoutent parfois des difficultés d’ ordre psychologique ou personnel qui ont un impact sur les
résultats et le comportement des élèves. Dans cette optique, le projet d’ établissement, rédigé
pour les années 2000-2003, établit comme priorité « l’ aide aux élèves en difficulté », notamment
en prenant en compte « l’ élève au-delà de l’ aspect scolaire dans son mal-être ».
/H&',
Le Centre de Documentation et d’ Information dispose d’ environ 2000 ouvrages documentaires et
autant de fiction. Son matériel multimédia est sophistiqué : si seulement deux ordinateurs sont à
la disposition des élèves, les caméscope et appareil photographique numériques, le banc de
montage vidéo et les magnétophones sont des outils performants pour accompagner les élèves
dans des actions pédagogiques.
5
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Je me suis spontanément engagée à travailler avec des élèves en difficulté et en particulier avec
les élèves de CIPPA. Les raisons en sont autant pratiques que personnelles.
D’ un côté, FHV GHX[ FODVVHV VRQW HQ HIIHFWLI UpGXLW (environ douze élèves par classe en début
d’ année). Il m’ est donc relativement aisé de travailler efficacement avec elles, malgré la
fluctuation des effectifs tout au long de l’ année et une population très hétérogène. De plus, les
deux animateurs CIPPA sont disponibles et ouverts à toute proposition. Ils m’ accordent du temps
et me permettent de m’ investir dans des projets construits et suivis sur plusieurs séances.
D’ un autre côté, MH VXLV SDUWLFXOLqUHPHQW VHQVLEOH DX[ GLIILFXOWpV GH FHV pOqYHV pour y avoir
déjà été confrontée : j’ ai en effet exercé trois années la profession de Conseillère à l’ Agence
Nationale Pour l’ Emploi. Mise à disposition la moitié du temps à la Mission Locale de ChâteauChinon durant cinq mois, j’ aidais les jeunes en difficulté à rechercher un emploi ou une
formation. Je participais notamment au suivi du programme TRajet d’ ACcès A l’ Emploi
(TRACE), accompagnement renforcé de jeunes en grande difficulté financière, sociale,
psychologique ou encore judiciaire.
J’ ai, en outre, compris que travailler avec ces élèves pouvait m’ amener à IDLUH pYROXHU PHV
SUDWLTXHV de façon positive : les intéresser, les motiver sans les lasser sont des paris d’ autant
plus difficiles à relever qu’ ils ont du mal à rester attentifs longtemps et qu’ ils sont réfractaires à
toute activité purement scolaire. Les séances doivent être particulièrement claires, avec des
objectifs suffisamment explicites. De plus, la classe de CIPPA n’ a pas de programme scolaire : il
est donc possible de mener des projets à long terme qui développent des compétences sociales,
c’ est-à-dire davantage liées à la communication, la vie de groupe, l’ insertion sociale et
professionnelle qu’ aux connaissances.
Ainsi, dès l’ ouverture de la première classe CIPPA, au début du mois d’ octobre, je rencontrai
une première fois les élèves. Leurs difficultés très particulières, scolaires mais aussi
psychologiques, leurs préoccupations me touchaient. Plus tard, je rencontrai les élèves de la
seconde classe CIPPA Français Langue Etrangère (FLE) et illettrisme. Ceux-là ont un
passé souvent douloureux car habité de guerres civiles, de réseaux de prostitution ou de
répression militaire. Récemment arrivés en France, ils sont souvent hébergés en famille d’ accueil
ou en foyer, loin de leurs parents. Ils sont confrontés à des difficultés liées à la maîtrise de la
langue française et à la connaissance de notre culture.
J’ ai choisi de travailler durablement avec ces deux classes pour mieux comprendre quelles
étaient ces difficultés et pour les aider à progresser par le biais des apprentissages documentaires.
Je me posais alors un certain nombre de questions : dois-je modifier mon approche des
apprentissages ? Quel niveau de compréhension suis-je en droit de supposer ? Quelles techniques
adopter ? Quel projet mettre en œuvre pour susciter leur intérêt tout en les amenant à fréquenter
le CDI ?
Or, FHV pOqYHV RQW HQ FRPPXQ GH QH SDV DYRLU GH SURMHW SURIHVVLRQQHO GpILQL HW GH PDO
FRQQDvWUHOHVVRXUFHVG¶LQIRUPDWLRQVXUOHVPpWLHUV. Ils n’ ont pas une pratique autonome de la
recherche d’ informations et fréquentent très peu le CDI. L’ orientation scolaire n’ est de surcroît
pas une priorité au Lycée Professionnel puisque la majorité des élèves a déjà choisi sa voie, et le
fichier ONISEP, situé dans un endroit peu stratégique, est peu utilisé.
Il était important, en tant que documentaliste, que j’ aide les élèves à s’ approprier les outils
d’ accès à l’ information du lycée et que je leur donne l’ occasion de développer des compétences,
6
des savoirs et des savoir-faire qu’ ils pourront réinvestir à l’ avenir. Je souhaitais également leur
montrer qu’ ils sont intégrés à la vie du Lycée et que celui-ci dispose de ressources pour eux.
Les actions mises en œuvre sont donc basées sur la connaissance des métiers, en étroite liaison
avec la Loi d’ orientation sur l’ Education du 10 juillet 1989 qui préconise que « O¶pOqYHpODERUH
VRQ SURMHW G¶RULHQWDWLRQ VFRODLUH HW SURIHVVLRQQHOOHDYHF O¶DLGH GH O¶pWDEOLVVHPHQW HW GH OD
FRPPXQDXWp pGXFDWLYH » et qu’ il dispose « G¶XQH LQIRUPDWLRQ VXU OHV SURIHVVLRQV HW OHV
IRUPDWLRQV »1. Elles se situent également dans l’ optique de notre circulaire de mission qui invite
à « O¶RXYHUWXUH « VXU OH PRQGH HW OD VRFLpWp » et à la mise à disposition des élèves de « OD
GRFXPHQWDWLRQ UHODWLYH j O¶LQIRUPDWLRQ VFRODLUH HW SURIHVVLRQQHOOH HW j O¶LQVHUWLRQ GDQV OD YLH
DFWLYH »2.
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FRPSpWHQFHV GRFXPHQWDLUHV VRQW j PrPH GH GpYHORSSHU FKH] GHV pOqYHV HQ GLIILFXOWp GHV
DSWLWXGHVjO¶H[SUHVVLRQpFULWHHWRUDOH
-
-
OH SUHPLHU SURMHW, à l’ initiative de l’ animateur CIPPA, est la réalisation d’ un panneau
d’ exposition sur les métiers. Je me propose d’ amener les élèves à connaître les sources
d’ information sur les professions et notamment la documentation ONISEP
OHVHFRQGSURMHW, à mon initiative, est la réalisation d’ un film vidéo présentant trois métiers
exercés par le personnel du Lycée Jean Rostand. Mené avec les élèves de la classe FLE
illettrisme, il permet de rencontrer des professionnels mais aussi de découvrir des moyens
techniques performants.
Pour ma part, j’ ai ainsi l’ occasion de mettre en œuvre mes compétences pédagogiques de
documentaliste, en terme d’ aide méthodologique et d’ acquisition de connaissances sur la
recherche documentaire. Je me propose aussi d’ apprécier si l’ usage de technologies nouvelles
dans le cadre d’ un projet d’ orientation peut motiver des élèves en difficulté. Enfin, je peux
accompagner les élèves sur une action durable et construite.
Dans un premier temps, je décrirai l’ origine et les difficultés des élèves ainsi que les objectifs
visés à travers les projets. Puis je présenterai les séances menées d’ octobre à janvier, avec l’ une
et l’ autre classe. Enfin, je dresserai le bilan des actions réalisées, pour les élèves et pour le
documentaliste.
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Les objectifs définis dans le cadre de ces deux projets découlent d’ une double analyse : d’ une
part, le contexte dans lequel s’ inscrit le dispositif CIPPA est marqué par la découverte du monde
professionnel et le développement de compétences sociales ; d’ autre part, les élèves sont
hétérogènes par leurs origines et leurs problématiques.
/(&217(;7(,167,787,211(/
La Mission Générale d’ Insertion de l’ Education Nationale (MGI), mise en place en 19963,
a pour objectif d’ aider les jeunes à se préparer à la vie socioprofessionnelle et de leur faciliter
l’ accès à la formation et à la qualification. En effet, la plupart d’ entre eux n’ ont pas le niveau
requis pour intégrer une formation en CAP ou BEP ou ne dispose pas des pré-requis pour suivre
une formation en alternance, du point de vue cognitif mais aussi comportemental.
FRANCE. Ministère de l’ Education Nationale. /RLQƒGXMXLOOHW
FRANCE. Ministère de l’ Education Nationale. &LUFXODLUHQƒGXPDUV
3
FRANCE. Ministère de l’ Education Nationale. &LUFXODLUHQƒGXPDL
1
2
7
Des actions, basées sur l’ alternance école-entreprise, ont été mises en place, notamment le Cycle
d’ Insertion Professionnelle Par Alternance (CIPPA). Celui-ci s’ inscrit dans le cadre d’ une
UHPRWLYDWLRQLQIRUPDWLRQ VXU OH PRQGH SURIHVVLRQQHO, afin d’ aider les jeunes à définir une
orientation et intégrer un apprentissage ou à reprendre des études en formation initiale. Un jeune
peut donc à tout moment entrer ou sortir du dispositif, dès lors qu’ une solution concrète s’ offre à
lui.
Ainsi, les activités du CIPPA visent à aider chaque jeune à faire le bilan de ses acquis et de ses
centres d’ intérêt pour qu’ il élabore un projet réaliste et acquiert les pré-requis nécessaires à une
formation professionnelle.
/(352-(7&,33$$8/<&((-($15267$1'
Le projet « Pôle insertion Jean Rostand année 2002-2003 » établit le fonctionnement d’ un
Groupe d’ Aide à l’ INsertion (GAIN) au sein du lycée qui vise à préparer et à organiser
l’ insertion scolaire, sociale et professionnelle des élèves, avec la collaboration de partenaires
extérieurs à l’ établissement. Ce projet définit les objectifs des classes CIPPA. D’ un point de vue
général, il s’ agit de « SHUPHWWUH OD SULVH GH FRQVFLHQFH GH FKDFXQ GH VHV FDSDFLWpV GH
V¶DSSURSULHUVDVLWXDWLRQG¶XQSRLQWGHYXHRULJLQDOOHVLHQ«(QGpYRLODQWDXVWDJLDLUHVHV
FDSDFLWpVHWFRPPHQWOHVXWLOLVHURQOXLGRQQHOHSRXYRLUGHGHYHQLUDXWRQRPH »4. Cette finalité
passe par différents apprentissages : savoir communiquer, exercer son esprit critique, notamment
en combattant les fausses représentations, préparer son insertion sociale et professionnelle en
développant l’ autonomie, combattre l’ illettrisme et apprendre la langue française scolaire.
Les priorités sont donc O¶DSSUHQWLVVDJH GH OD ODQJXH HW GH OD FXOWXUH IUDQoDLVHV et OH
GpYHORSSHPHQWGXUDLVRQQHPHQW pour comprendre et modifier ses représentations du monde.
/(352),/'(6-(81(6'(&,33$
/DSUHPLqUHFODVVH
Les effectifs des élèves de CIPPA sont très fluctuants du fait des entrées et sorties permanentes.
Au début de l’ action, 13 élèves sont présents : âgés de 16 à 19 ans, ils proviennent
majoritairement de 4e ou de 3e générales et n’ ont aucun diplôme. Leurs projets professionnels
sont tournés vers la vente, la restauration ou la coiffure pour les filles ; le bâtiment ou l’ armée
pour les garçons. Quatre n’ ont aucun projet, cinq ont un projet irréalisable par rapport à leur
niveau scolaire. La majorité connaît l’ échec scolaire depuis le cours préparatoire.
œ
/¶pFKHFVFRODLUH
Parler d’ échec scolaire, c’ est identifier un certain nombre de lacunes. Les plus évidentes me sont
apparues progressivement, notamment lors de deux séances pendant lesquelles j’ ai observé les
élèves sans intervenir. J’ ai aussi beaucoup échangé avec leur animateur pour me faire une
opinion plus fondée et plus précise. Ces lacunes se caractérisent par :
-
4
GHVGLIILFXOWpVGHFRPSUpKHQVLRQ liées à une mauvaise lecture, linéaire, centrée uniquement
sur le décodage du texte, sans compréhension du sens du texte, une pauvreté de vocabulaire
(400 mots en moyenne comptabilisés par l’ animateur CIPPA), des lacunes au niveau de la
« base de connaissance », notion empruntée à Michel Fayol, spécialiste de psychologie
cognitive, et qui recouvre la somme de connaissances lexicales et conceptuelles nécessaires à
chacun pour comprendre un texte écrit ou oral et pour communiquer avec les autres (« c’ est
quoi un paon ? » demande un élève)
Lycée Professionnel Jean Rostand. 3{OH,QVHUWLRQ-HDQ5RVWDQG$QQpH
8
-
GHVGLIILFXOWpVjVpOHFWLRQQHUHWjKLpUDUFKLVHUOHVLQIRUPDWLRQV, une faible aptitude à relier
les éléments de l’ apprentissage entre eux (alors que la Conseillère d’ Orientation vient se
présenter en classe le lundi, seuls deux élèves citent le CIO comme source d’ information sur
les métiers le mardi).
Ces difficultés scolaires sont amplifiées par un désinvestissement dans l’ acte d’ apprendre et une
attitude défensive vis-à-vis de l’ adulte et surtout entre eux (agressivité verbale ou physique), face
à l’ établissement scolaire (non-respect des règles) et à leur propre devenir (désintérêt et passivité
pour les activités menées en classe, retards en classe, absentéisme très important, arrêts de
travail).
œ
'HVpOqYHV©KRUVSURMHWVª
Le jeune qui construit son orientation, est acteur de son avenir. Il n’ a pas un projet, LO HVW HQ
SURMHW. Car pour accepter de bâtir un projet d’ orientation, il faut se considérer comme une
personne qui se construit et qui évolue dans un environnement. Il faut aussi connaître le monde
qui nous entoure et comprendre qu’ il est possible d’ interagir avec lui, de lui donner du sens.
Or, en ce qui concerne la représentation d’ eux-mêmes, les élèves de CIPPA en sont réduits à une
succession de problèmes et d’ angoisses qui les met dans une situation d’ être « KRUV SURMHWV »,
c’ est-à-dire qu’ ils ne se préoccupent pas de leur avenir. « ,OV VRQW KRUV GX SURMHW GH
O¶pWDEOLVVHPHQW KRUV GX V\VWqPH KRUV GX SURMHW GH OD VRFLpWp /HXU SHUVSHFWLYH WHPSRUHOOH
G¶DYHQLU VH OLPLWH DX SUpVHQW /HV SUREOqPHV FRQFUHWV TX¶LOV UHQFRQWUHQW DX TXRWLGLHQ
Q¶DXWRULVHQW DXFXQH SURMHFWLRQ » 6. D’ où une grande difficulté à envisager l’ avenir et en
particulier une orientation professionnelle. Comment, en effet, arriver à sensibiliser à
l’ orientation cette jeune fille qui élève seule son enfant ou cette autre violée par son père ?
Dans cette optique, permettre à ces élèves d’ acquérir une représentation de l’ univers
professionnel pour les amener à envisager un possible peut paraître un objectif décalé par rapport
à leurs soucis. Mais c’ est aussi une manière de leur donner un début de confiance en leurs
possibilités.
Pour faire un état des lieux de leurs connaissances, j’ ai remis aux élèves de cette classe en début
d’ année un questionnaire (cf. annexe 1) dont j’ ai tiré plusieurs conclusions :
-
OHVpOqYHVFRQQDLVVHQWSHXOHVOLHX[G¶DFFqVjO¶LQIRUPDWLRQVXUOHVPpWLHUV à l’ exception
de la Chambre des métiers visitée en 3e au collège
LOVH[SULPHQWOHEHVRLQG¶rWUHDFFRPSDJQpV ou aidés (trois élèves)
LOV FRQQDLVVHQW WUqV PDO OD GRFXPHQWDWLRQ GX &', : seuls deux élèves citent l’ ONISEP
alors que la visite du CDI a eu lieu la semaine précédente
LOVQHFRQQDLVVHQWSDVGHVLWHVXUOHVPpWLHUVPDLVWRXVVRXKDLWHQWHQGpFRXYULU: seul un
élève évoque le site de l’ ONISEP
LOV QH FRQQDLVVHQW SDV GH UHYXHV spécialisées sur les métiers ou sur l’ orientation
professionnelle.
Aussi est-il nécessaire de développer l’ accès à l’ information et la réflexion sur les enjeux des
choix à effectuer en matière d’ orientation, par rapport à eux-mêmes et à leur environnement.
EtienneRichard et al. /HSURMHWSHUVRQQHOGHO
pOqYH, p. 60
/HSURMHWSHUVRQQHOGHO
pOqYH, p. 60
5
6
9
/DFODVVHGH&,33$)/(,OOHWWULVPH
Cette classe a pour objectif de IDYRULVHU O¶LQVHUWLRQ SURIHVVLRQQHOOH SDU O¶DFTXLVLWLRQ GH OD
ODQJXHIUDQoDLVH de jeunes étrangers primo-arrivants pour lesquels une phase de transition et de
pré-qualification est indispensable. Ils doivent être sortis du système éducatif de leur pays
d’ origine, ne pas être diplômés et avoir moins de 18 ans.
Sur un effectif de huit élèves, une jeune fille seulement est dite illettrée, les autres sont d’ origine
étrangère :
$
17 ans. Arrivé d’ Angola il y a un an avec sa sœ ur, il parle peu le français mais
bien le portugais. Il veut devenir mécanicien
16 ans. Elle vient du Congo, d’ où elle a fuit la guerre civile. Hébergée en famille
d’ accueil depuis trois mois, elle parle bien le français dans des situations simples
de la vie quotidienne. Elle veut devenir aide-soignante ou agent des services
hospitaliers
16 ans. Arrivée de l’ île de la Réunion il y a six mois, elle parle bien le français et
veut devenir couturière
17 ans. D’ origine arménienne, elle est arrivée en France il y a un an. Elle a vécu
quatre ans en Russie. Elle parle bien l’ arménien et le russe, un peu le français et
l’ allemand. Elle veut devenir secrétaire ou coiffeuse
17 ans. Kosovar d’ origine, il a vécu dix ans en Allemagne et habite en France
depuis un an. Il parle très peu le français mais l’ allemand couramment. Il veut
devenir mécanicien automobile
17 ans. D’ origine algérienne, en France depuis deux mois, elle parle très peu le
français. Elle veut devenir coiffeuse
17 ans. Française, elle vient de 3e SEGPA et veut devenir vendeuse
17 ans. Arrivée d’ Angola depuis deux mois. Elle n’ a pas de projet.
%
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6
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$
$
3
œ
/¶DSSUHQWLVVDJHG¶XQHQRXYHOOHODQJXH
La plupart des élèves ont vécu des drames liés à l’ actualité de leur pays d’ origine (guerre, exil),
qui ont été la cause d’ interruption de leur scolarité et ont entraîné des difficultés d’ apprentissage.
Ils connaissent des difficultés liées à O¶XVDJH GH OD ODQJXH IUDQoDLVH : manque de vocabulaire,
méconnaissance des normes de langage du pays d’ accueil (les élèves d’ origine africaine, par
exemple, tutoient très facilement) et difficulté de passage à l’ écrit. Ils rencontrent des problèmes
au quotidien, dans la vie sociale ou scolaire, que ce soit pour remplir un document administratif
ou pour entretenir un dialogue simple. Ils sont par ailleurs souvent hébergés dans des familles
elles-mêmes non-francophones.
L’ apprentissage d’ une seconde langue a aussi des FRQVpTXHQFHV SV\FKRORJLTXHV. Dans
Enseigner aux élèves issus de l’ immigration7, les auteurs expliquent les bouleversements
provoqués par l’ apprentissage d’ une seconde langue : une réorganisation cérébrale qui cause une
certaine fatigue, une perte d’ identité, une atteinte à l’ image de soi et donc un risque de rejet du
groupe d’ origine. Les élèves doivent manier des concepts différents dans un langage différent et
sont obligés de fournir un effort supplémentaire par rapport aux autres élèves. Parfois, cet effort,
source de fatigue, est prétexte aux conflits et à la rupture de communication. C’ est pourquoi ils
se lassent vite des activités purement scolaires et leur attention est très facilement détournée.
Pourtant, contrairement à la première classe de CIPPA, FHV pOqYHV RQW XQ LQWpUrW QHWWHPHQW
SOXV JUDQG SRXU OHV DFWLYLWpV VFRODLUHV. Ils sont davantage motivés par les propositions des
adultes, ils s’ investissent rapidement dans les projets et témoignent d’ une réelle volonté
d’ apprendre.
7
Clément, Francine/Girardin, Andrée. (QVHLJQHUDX[pOqYHVLVVXVGHO
LPPLJUDWLRQ
10
Quant à l’ élève illettrée, elle nourrit à l’ égard de l’ écrit une difficulté particulière. Le
Groupement Polyvalent de Lutte contre l’ Illettrisme (GPLI) définit les personnes illettrées
comme « GHVKRPPHVHWGHVIHPPHVGHSOXVGHVHL]HDQVSRXUTXLOHUHFRXUVjO¶pFULWQ¶HVWQL
LPPpGLDW QL VSRQWDQp QL IDFLOH HW TXL pYLWHQW RX DSSUpKHQGHQW FH PR\HQ G¶H[SUHVVLRQ HW GH
FRPPXQLFDWLRQ »8.
Cette appréhension à l’ égard de l’ écrit entraîne des difficultés à :
-
FRPPXQLTXHU
SDUWLFLSHU à la vie du groupe
LQQRYHU et à s’ adapter
WUDQVIpUHU des savoir-faire d’ une situation à une autre
DFTXpULU de nouveaux savoir-faire.
En effet, cette élève parle peu, s’ isole du groupe et ne veut participer à aucune activité. Elle
adopte une attitude très froide, voire agressive, et refuse toute activité qu’ elle ne connaît pas. Elle
souffre par ailleurs de troubles psychologiques : elle vit dans un foyer d’ accueil d’ où elle fugue
quelquefois. Le travail que je souhaite mener avec elle devra l’ amener à prendre des risques, à
oser s’ exprimer pour s’ intégrer au groupe et à accepter des situations nouvelles.
œ
'HVpOqYHVHQSURMHW
Lors d’ un entretien avec la Conseillère d’ Orientation Psychologue, j’ ai constaté que FHV pOqYHV
RQWXQHLGpHWUqVSUpFLVHPDLVVRXYHQWSHXUpDOLVWHGXPpWLHUTX¶LOVVRXKDLWHQWH[HUFHU. Ils
considèrent cette année scolaire comme une transition et un temps d’ appropriation de la culture
du pays dans lequel ils vivent avant de mener à bien leur projet professionnel.
Cependant, leur passé traumatisant déstructure la représentation qu’ ils ont d’ eux-mêmes et de
leur avenir. Certains ont du mal à accepter que la langue puisse être un frein : une élève, qui veut
devenir aide-soignante, a sollicité un stage dans une maison de retraite. Refusée en raison de sa
mauvaise maîtrise de la langue, elle ne parvient pas à admettre que la réalisation de son projet lui
demandera du temps et des efforts. D’ autres ont une image erronée du métier qu’ ils envisagent
d’ exercer : celui-ci, qui veut devenir mécanicien, passe une journée en tant qu’ observateur dans
un garage. Très vite, il arrive en retard, se plaint du froid et de la saleté. D’ autres encore,
conscients du handicap que constitue une mauvaise connaissance de la langue, s’ expriment très
peu en français et toujours avec l’ aide d’ un dictionnaire : inhibés, ils se dévalorisent et parlent
dès qu’ ils le peuvent dans leur langue d’ origine.
&200(175(3/$&(5/(6-(81(6(16,78$7,21326,7,9("
Je vise pour les deux classes des objectifs communs. Tout d’ abord, il s’ agit G¶LPSOLTXHUO¶pOqYH
GDQV XQ SURMHW qui l’ aide à se construire et à s’ inscrire dans la vie collective. Ce projet est
l’ occasion de développer une première forme d’ DXWRQRPLH : savoir prendre en compte et gérer
des contraintes liées au monde qui nous entoure. L’ exposition est, en effet, destinée à être vue
par les élèves, le personnel du lycée, mais aussi les visiteurs extérieurs ; elle doit être attractive et
le choix des informations doit être pertinent. La réalisation de la cassette vidéo implique
l’ autorisation du chef d’ établissement, l’ accord des intéressés ; elle impose des contraintes de
matériel et de temps (nous disposons d’ à peine deux mois à raison de 2 heures et demies par
semaine). Le projet vise ainsi à UHVSRQVDELOLVHUGHVpOqYHVKDELWXpVjrWUHHQFDGUpVGHSUqV
8
/LUHDX/\FpH3URIHVVLRQQHO, n° 32 sur L’ Illettrisme
11
Il s’ agit aussi de développer une deuxième forme d’ autonomie : la capacité à exercerVRQHVSULW
FULWLTXH HQ FRQIURQWDQW VHV SURSUHV UHSUpVHQWDWLRQV entre elles mais aussi avec celles des
autres. L’ objectif est de faire évoluer lesreprésentations sur les métiers (certains sont idéalisés,
d’ autres sont méprisés ou méconnus) et d’ amener l’ élève à une PpWDFRJQLWLRQ qui l’ amène à
prendre conscience de ses images mentales et de ses procédures d’ apprentissage.
Enfin, il me semble important d’ inclure OHV QRXYHOOHV WHFKQRORJLHV (informatique, vidéo) aux
travaux menés. En effet, et en particulier pour des élèves en difficulté, le support employé doit
être attractif, voire ludique. De plus, les technologies permettent d’ exploiter au mieux la bonne
volonté d’ élèves qui ne sont pas toujours récompensés de leurs efforts dans le cadre scolaire
traditionnel.
œ
/¶H[SRVLWLRQ
De façon globale, ce premier projet a pour objectif de développer chez l’ élève sa FRQQDLVVDQFH
GHV VRXUFHV G¶LQIRUPDWLRQ sur les métiers, qu’ elles soient papier ou électroniques, et de lui
permettre de les utiliser de façon autonome. Il n’ est pas question de présenter à l’ élève
l’ ensemble des sources existantes, mais de sélectionner la ou les plus intéressantes afin de
SURYRTXHUGHV FRPSRUWHPHQWVG¶HQTXrWHd’ DPHQHUO¶pOqYHjV¶LQWHUURJHU et de OXL GRQQHU
OHVPR\HQVGHWURXYHUVHXOO¶LQIRUPDWLRQSHUWLQHQWH
Ce projet est l’ occasion d’ DFTXpULU GHV FRPSpWHQFHV HQ LQIRUPDWLTXH et de lutter contre
l’ inégalité des chances entre les élèves dans ce domaine. Il s’ agit également de WUDLWHU
O¶LQIRUPDWLRQ en donnant à l’ élève les clés lui permettant de mettre en évidence les éléments
importants et la structure d’ un texte. Ce point est primordial pour des élèves qui ont des
difficultés à appréhender la composition et la logique d’ un texte et qui, de ce fait, ne sont pas en
mesure de le comprendre. Enfin, l’ élève doit rWUH FDSDEOH G¶pYDOXHU VD SURGXFWLRQ HW GH OD
FRPPXQLTXHU, c’ est-à-dire de sélectionner l’ information pertinente et de la mettre en forme.
œ
/¶LQWHUYLHZILOPpH
Ce second projet vise à développer chez l’ élève la capacité à FRPPXQLTXHU j O¶RUDO. Il n’ est
certes pas suffisant pour développer l’ usage de la langue mais il est un élément moteur de
motivation pour l’ apprendre. /¶pOqYHGRLWUpDOLVHUXQHJULOOHG¶HQWUHWLHQ : choisir les questions,
les formuler clairement. Il doit être capable d’ interroger une personne qu’ il ne connaît pas, c’ està-dire de prendre suffisamment FRQILDQFH HQ OXL pour vaincre sa timidité et s’ exprimer devant
une caméra. Il doit GpYHORSSHU VD FDSDFLWp G¶pFRXWH pour que l’ interview soit un véritable
échange.
En travaillant en relation avec le monde professionnel, l’ élève doit pouvoir ainsi comprendre que
O¶LQGLYLGX HVW DXVVL XQH VRXUFH G¶LQIRUPDWLRQ, au même titre qu’ un fichier papier ou que
l’ internet, pourvu que la stratégie d’ approche soit adaptée.
Enfin, ce projet est l’ occasion d’ acquérir des FRPSpWHQFHV GDQV OH GRPDLQH GH OD YLGpR que
l’ élève pourra mettre en œ uvre ultérieurement, notamment dans une entreprise.
81$&&203$*1(0(17%$6(685/$0(',$7,21
Ce développement de compétences s’ appuie sur des conditions nécessaires et des méthodes :
œ
$XQLYHDXGHO¶pTXLSHSpGDJRJLTXH
- O¶LQWHUGLVFLSOLQDULWpODFRQFHUWDWLRQ: il s’ agit de collaborer étroitement avec les
animateurs autour d’ un projet commun pour une meilleure cohérence de
12
l’ enseignement. En effet, les élèves en difficulté peinent à percevoir l’ objectif
général d’ une action et la façon dont celle-ci s’ articule avec d’ autres. Il est
primordial d’ agir en concertation étroite avec l’ animateur pour donner un sens à
l’ apprentissage et inscrire les objectifs dans un cadre qui ait du sens pour l’ élève
- O¶pFRXWHHWODPLVHHQFRQILDQFH : chacun de nous doit croire suffisamment en la
capacité des élèves à mener à terme les projets pour qu’ ils reprennent confiance en
eux et en l’ adulte. En effet, les élèves, en difficulté depuis longtemps, ont une
mauvaise image d’ eux-mêmes renforcée par le regard des autres élèves du lycée. Il
s’ agit de leur montrer qu’ ils sont capables, eux aussi, d’ accomplir des travaux
remarquables et dignes d’ être exposés.
œ
$XQLYHDXGHO¶pOqYH
- OHWUDYDLOHQJURXSH : il vise à provoquer la confrontation des représentations (un
conflit socio-cognitif). Les élèves prennent conscience de la relativité des opinions et
de l’ importance de la négociation, plus efficace que la violence verbale
- OH TXHVWLRQQHPHQW : il s’ agit d’ amener l’ élève à se poser des questions pour
émettre des hypothèses, verbaliser, mobiliser des connaissances et développer la
confiance en soi en trouvant les réponses par lui-même.
Plus globalement, il s’ agit de donner du sens aux apprentissages scolaires, y compris
documentaires, en les reliant à leur utilité sociale.
'(60(7,(565$&217(6$/¶(&5,7(7$/¶25$/
©/H U{OH GH O¶pFROH FRQVLVWH DORUV j GRQQHU DX MHXQH OHV PpWKRGHV HW OHV FRQQDLVVDQFHV OXL
SHUPHWWDQW GH GpYHORSSHU OD FDSDFLWp G¶DXWRQRPLH HW OD UHVSRQVDELOLWp TX¶LO H[HUFHUD WRXW DX
ORQJGHVDYLH,OV¶DJLWQRWDPPHQWGHO¶DLGHUjHQULFKLUVHVUHSUpVHQWDWLRQVSRXUTX¶HOOHVVRLHQW
OHSOXVSURFKHSRVVLEOHGHODUpDOLWp ª
Dans un premier temps, je présenterai les séances du projet d’ exposition, dont l’ objectif général
est la confrontation des représentations grâce au questionnement et à la recherche
d’ informations. Dans un second temps, je décrirai les étapes de la réalisation du film vidéo et la
manière dont les élèves ont développé leur autonomie dans l’ expression orale et dans le
maniement du matériel.
81((;326,7,21685/(60(7,(568175$9$,/685/(65(35(6(17$7,216
Ce projet est mené avec la classe de CIPPA en difficulté scolaire. Avant mon intervention,
chaque élève a listé les métiers qui apparaissent dans les bandes dessinées d’ Astérix et Obélix.
Puis, chacun en a choisi un selon ses affinités : il en recherchera la fiche descriptive et l’ illustrera
sur un panneau d’ exposition avec l’ aide du professeur d’ arts appliqués. Ensemble, l’ animateur et
moi-même avons défini les objectifs et la progression des séances.
Ce travail est l’ occasion d’ initier les élèves à la recherche dans un fichier papier mais aussi sur
l’ internet, le logiciel BCDI donnant accès à quelques ouvrages généraux peu pertinents et trop
complexes. Les séances présentées, d’ une durée d’ une heure et demie, se déroulent en alternance
avec les périodes de stage. Elles ont lieu en co-animation, d’ abord au CDI puis en salle
informatique.
9
Ministère de l’ Education Nationale. /¶(GXFDWLRQjO¶RULHQWDWLRQ>HQOLJQH@ [document consulté le 04/12/2002].
13
6XVFLWHUOHGpVLUG¶DSSUHQGUHSDUOHTXHVWLRQQHPHQW
Après un phase de présentation mutuelle, je décide de mener un travail de questionnement de
type remue-méninges pour éveiller la curiosité et l’ intérêt des élèves.
Je forme quatre groupes de quatre élèves réunis par affinités. Chaque groupe doit choisir une
photo de professionnel en activité parmi quatre : un gendarme, une esthéticienne, un agriculteur
et un couvreur. Ces métiers sont proposés délibérément : accessibles avec un niveau CAP, ils
offrent de bons débouchés professionnels. Les élèves cherchent des questions à poser sur le
métier, comme s’ ils étaient en situation d’ entretien avec ce professionnel (cf. annexe 2). Ils
doivent aussi élaborer des réponses, si possible communes au groupe.
Il s’ agit de GpYHORSSHU FKH] O¶pOqYH XQH DWWLWXGH TXHVWLRQQDQWH VXU VHV UHSUpVHQWDWLRQV.
« Pour lire, comprendre, trier, il faut pouvoir faire des hypothèses, se poser des questions, avoir
envie de chercher des réponses (...) »10. Pour motiver l’ élève dans la démarche de prise
d’ informations, il est en effet essentiel de l’ amener à s’ interroger sur ses représentations et à les
partager avec les autres.
Ce travail sur le questionnement a pour objectif de leur donner les clés pour interroger des
professionnels, notamment durant leur stage. Mais les élèves ont du mal à se détacher de la photo
et du métier proposé pour considérer la question de façon globale et en comprendre l’ intérêt à
plus long terme. Ainsi, le groupe qui travaille sur la photo de l’ agriculteur ne cesse de dire que
c’ est un métier inintéressant et que tout le monde le connaît. J’ interviens alors en posant
beaucoup de questions pour amener les élèves à la conclusion que chaque métier est plus vaste
qu’ il n’ y paraît et qu’ il reste toujours des interrogations ; je veille cependant à partager
équitablement mon temps entre les groupes.
5HFKHUFKHUXQHLQIRUPDWLRQGDQVO¶DXWRGRFXPHQWDWLRQGHO¶21,6(3
A la séance suivante, à l’ oral, la classe regroupe les questions en grandes catégories et leur
attribue une appellation. L’ exercice vise O¶DFTXLVLWLRQ GH FRQFHSWV (qualification, promotion,
statut, conditions de travail …) pour faciliter ensuite des opérations de classification, des
regroupements plus généraux et plus abstraits. Il s’ agit de permettre aux élèves d’ exprimer avec
leurs mots des notions qu’ ils trouvent parfois obscures, comme « évolution de carrière » ou «
rémunération ».
Ensuite, ils mettent en concordance leurs propres termes avec les appellations de l’ ONISEP pour
mieux comprendre à quoi correspondent les rubriques qui apparaissent dans les fiches. Chaque
groupe dispose pour cela de la liste alphabétique des métiers issue des clés-métiers de l’ ONISEP
; les élèves recherchent la fiche correspondant au métier ainsi que les réponses aux questions
qu’ ils se sont posées.
D’ un côté, ce travail a généré des difficultés en terme de :
-
-
10
FRQQDLVVDQFH plusieurs élèves maîtrisent mal l’ ordre alphabétique
JHVWLRQ GH JURXSH un groupe perturbe les autres à cause d’ un leader désintéressé par
l’ activité, un autre ne s’ investit absolument pas. Ce dernier est constitué d’ une élève très
motivée mais aussi de deux élèves qui viennent d’ arriver (elles faisaient l’ école buissonnière
depuis un mois) et d’ une élève très inhibée
FRPSUpKHQVLRQ globalement, les élèves ont du mal à comprendre la tournure des phrases,
manquent de connaissances et ne parviennent pas à se concentrer suffisamment pour trouver
des réponses qui se trouvent pourtant dans la fiche. Par exemple, une élève ne saisit pas
Monthus, Marie. $SSUHQGUHO¶DXWRQRPLHDX&',, p. 108
14
l’ expression « se mettre à son compte ». Et, quand ils ne comprennent pas, ces élèves ont
tendance à en déduire que la fiche ne contient pas l’ information qu’ ils recherchent et
abandonnent très vite.
D’ un autre côté, le travail en groupe est un élément moteur pour la recherche de questions et
d’ hypothèses. Toutes sont autorisées et les élèves ont ainsi l’ occasion d’ exprimer leurs craintes
(« pourquoi le gendarme arrête-t-il les arabes plus que les autres ? ») et même de poser des
questions annexes (« est-ce qu’ un SDF peut toucher le RMI ? » ). Je constate que leurs
préoccupations se rapportent très souvent à des éléments négatifs : le chômage, le racisme, la
différence de traitement entre les hommes et les femmes. Des représentations émergent : par
exemple, le gendarme est très diplômé et gagne au moins 2000 euros par mois. Des échanges
sont initiés spontanément concernant l’ intérêt de tel ou tel métier, notamment celui
d’ esthéticienne.
Je tire de ces séances plusieurs conclusions :
-
OHWUDYDLOHQJURXSH DpWpFRQFOXDQW mais trop long. Alors que la première séance de deux
heures avait été très productive, la seconde s’ est essoufflée
OHVJURXSHVRQWpWpIRUPpVGHIDoRQWURSDOpDWRLUH Une meilleure connaissance des élèves
aurait été nécessaire pour les réunir de façon plus judicieuse
les élèves de CIPPA SHLQHQWjVHFRQFHQWUHU ORQJWHPSV sur une activité
la recherche sur fichier a été suffisante et je dois trouver une autre entrée plus attrayante pour
la suite.
$SSUHQGUHjQDYLJXHUGDQVOHVLWH:HEGHO¶21,6(3
J’ ai atteint le premier objectif : tous les élèves, en groupe, ont retrouvé une information dans le
fichier papier de l’ ONISEP. J’ estime, en effet, qu’ il est important de passer par cette phase de
découverte papier afin qu’ ils puissent transférer la méthode acquise dans d’ autres occasions. Je
souhaite maintenant leur présenter OH VLWH :HE GH O¶21,6(3 FRPPH XQH GHX[LqPH VRXUFH
G¶LQIRUPDWLRQ VXU OHV PpWLHUV, qu’ ils exploiteront par groupe de deux. Par ce biais, j’ entends
aussi les initier à la navigation sur l’ internet.
A l’ aide du vidéoprojecteur et du tableau interactif, je leur montre comment se connecter à
l’ internet et accéder au site de l’ ONISEP par l’ adresse. Je leur explique à cette occasion la notion
de réseau informatique et la constitution d’ une adresse internet. Enfin, sur le site de l’ ONISEP, je
leur présente les trois modes d’ accès aux fiches-métiers : par domaine, par ordre alphabétique et
par centre d’ intérêt. Ces clés existent aussi sur papier, mais j’ ai volontairement choisi l’ accès par
l’ internet. En effet, ces notions sont difficiles à assimiler et je préfère les approcher de façon
conviviale.
Je remets aux élèves un exercice pour comprendre la différence entre les notions de
« domaine d’ activité » et de « centre d’ intérêt » (cf. annexe 3). Puis je leur demande de
rechercher la fiche descriptive d’ un métier qui les intéresse et, s’ ils n’ ont pas d’ idée particulière,
de déterminer un domaine ou un centre d’ intérêt qui leur plaise de manière à faire un choix dans
la liste de métiers proposés par l’ ONISEP. Ils doivent ensuite se connecter seuls sur le site de
l’ ONISEP. Cette phase est plus longue qu’ avec d’ autres élèves car les élèves de CIPPA ont peu
de pratique de l’ informatique en général : un seul a déjà navigué sur l’ internet. Néanmoins, ils
assimilent vite les notions élémentaires, ce qui leur donne rapidement confiance en eux.
3OXVLHXUVGLIILFXOWpVVHPDQLIHVWHQWSHQGDQWFHWWHVpDQFH : tout d’ abord, la plupart des élèves
n’ a aucun matériel pour écrire. Un élève se présente même sans cartable. Je m’ interroge sur cette
attitude : désintérêt ? Rejet de l’ école ? Je dois alors passer du temps à m’ assurer que chacun a de
15
quoi prendre des notes. Et par la suite, je suis obligée de donner des directives très précises,
notamment en ce qui concerne la présentation de leur feuille de cours, et de les encadrer de près.
Ensuite, en corrigeant le premier exercice, je remarque que beaucoup d’ élèves ne comprennent
pas ce qu’ est un domaine d’ activité. Et en relevant les feuilles à la fin de l’ heure, je constate que
très peu d’ entre eux ont relevé la correction.
Même en leur donnant des règles de recherche, il faut expliquer plusieurs fois, reformuler à
chaque séance et mettre en application pour que les élèves assimilent les notions de « domaine
d’ activité » et de « centre d’ intérêt ». En fait, les niveaux des élèves sont tellement hétérogènes
qu’ il est difficile de compter sur la compréhension de chacun d’ entre eux. Il me semble aussi que
ces concepts sont trop éloignés de leurs habitudes. En effet, les élèves ont souvent à émettre des
souhaits précis sur leur orientation : on leur demande « quel métier veux-tu faire plus tard ? » et
non « dans quel secteur veux-tu exercer ? ».
-HUHQFRQWUHDXVVLG¶DXWUHVGLIILFXOWpVSOXVLQGLYLGXHOOHV : par exemple, un élève n’ a aucune
idée du métier qu’ il souhaite étudier. Et quand je l’ interroge sur ce qu’ il aime faire, par exemple
du sport ou de la musique, il me répond : « rien ». Une autre élève est désorientée lorsque je lui
parle de hiérarchie à propos du métier de serveur : en effet, elle me relate un problème qu’ elle a
rencontré avec son maître de stage. Celui-ci lui aurait reproché son agressivité et se serait plaint
de difficultés relationnelles avec elle. Depuis, elle considère que ©tous les patrons [les] prennent
pour des chiens ». Sans prendre parti, je lui pose des questions pour l’ amener à constater qu’ elle
aurait obtenu de meilleurs résultats par un dialogue ouvert. Je m’ assure également que
l’ animateur de la classe a été informé de cet incident.
En terme de gestion de la classe, je me heurte au nombre d’ élèves : de douze en début d’ année, il
est passé à vingt. Et tant de sollicitations, de surcroît en salle informatique, nécessitent beaucoup
d’ énergie et de disponibilité.
'pYHORSSHUO¶HVSULWGHV\QWKqVH
Une fois la fiche de l’ ONISEP trouvée, chaque élève doit en résumer les informations. Je
souhaite que la fiche soit imprimée, mais malheureusement, l’ imprimante de cette salle est très
capricieuse et les élèves sont obligés de travailler sur écran. Dans un premier temps, je ne leur
donne aucune directive, aucun conseil. Je sais, en effet, qu’ il vaut mieux les leur donner une fois
qu’ ils ont été eux-mêmes confrontés aux difficultés.
Je constate plusieurs problèmes :
-
OHVpOqYHVRQWGXPDOjOLUHXQHSKUDVHHQHQWLHU. Même quand je leur demande de la lire à
haute voix, ils omettent certains mots, en changent d’ autres sans s’ en rendre compte
pour résumer, LOV PHWWHQW ERXW j ERXW SOXVLHXUV GpEXWV GH SKUDVH, d’ où une impression
d’ incohérence
LOVIRQWEHDXFRXSGHIDXWHVd’ orthographe et de grammaire
LOV HPSORLHQW DOWHUQDWLYHPHQW OH SOXULHO HW OH VLQJXOLHU (« La caissière reçoit les clients.
Elles font »)
LOVVRQWWURSDWWDFKpVDXWH[WHOXLPrPH, ils ne savent pas reformuler avec leurs mots
LOVWHQWHQWGHUpVXPHUGHVSKUDVHVTX¶LOVQHFRPSUHQQHQWSDV
LOVDFFXPXOHQWGHVGpWDLOVsans parvenir à une vision globale du texte
LOVQHOLVHQWSDVOHWH[WHMXVTX¶DXERXWsurtout un texte long (plus de dix lignes)
LOV FRPSUHQQHQW XQH SKUDVH LVROpH VDQV YRLU FRPPHQW HOOH V¶DUWLFXOH DYHF OH UHVWH GX
WH[WH
16
Je laisse donc les élèves chercher seuls la manière de résumer un texte. A la séance suivante, je
fais le point sur les difficultés qu’ ils ont rencontrées ; pour illustrer mes conseils, je m’ appuie sur
des exemples tirés des meilleurs résumés. En effet, les élèves comprennent mieux une correction
qui s’ appuie sur leurs propres écrits ; surtout, comme ils manquent manifestement de confiance
en eux, il est important de leur montrer que, si leur camarade de classe y arrive, alors tous
peuvent y arriver. Enfin, je leur donne quelques conseils supplémentaires pour comprendre un
texte et le résumer (cf. annexe 4).
8QHDXWRpYDOXDWLRQIRUPDWLYH
A la séance suivante, les élèves doivent UpVXPHUODILFKHGXPpWLHUFKRLVLSRXUO¶H[SRVLWLRQ
Pour cela, ils travaillent seuls en suivant la méthode élaborée en classe. Même si tous n’ ont pas
terminé le premier exercice accompagné, je choisis de passer à la phase suivante : en effet, il est
inutile de s’ attarder trop longtemps sur le même exercice. Je veux ainsi évaluer si les progrès
sont effectifs et si les élèves ont compris le processus et les règles de base pour résumer.
Je suis agréablement surprise : en effet, les résumés produits sont clairs, concis et les phrases
bien tournées. Les élèves qui ne réussissent pas ont une attitude très désinvolte depuis le début
des séances : ils refusent de participer aux activités, ils « oublient » de ramener la feuille
d’ exercice d’ une séance sur l’ autre, ils « n’ ont pas envie ». Mais pour les plus motivés, le résultat
témoigne d’ une bonne assimilation des règles du résumé (cf. quelques exemples en annexe 5).
Le point le plus intéressant est O¶DXWRpYDOXDWLRQ, c’ est-à-dire l’ évaluation effectuée par l’ élève
sur ce qu’ il a réalisé. Son but est d’ être « XQHDXWRIRUPDWLRQ«HQPrPHWHPSVTXHVRQDXWR
pYDOXDWLRQ»11. En effet, par cette méthode, l’ élève cherche lui-même ses stratégies de correction
de l’ erreur et développe son autonomie. Je demande aux élèves d’ évaluer leur propre travail à
partir des éléments importants énumérés ensemble pour réaliser un résumé. Cette auto-évaluation
vise plusieurs objectifs :
-
amener l’ élève à SUHQGUHFRQVFLHQFHGHVHVUpXVVLWHVHWGHVHVIDLEOHVVHV
OHUHVSRQVDELOLVHU face à son travail en lui donnant le pouvoir de décision
OXLGRQQHUGHVSRLQWVGHUHSqUH pour évaluer son travail.
Je constate que les élèves sont très auto-critiques et exigeants envers eux-mêmes. L’ évaluation
que j’ effectue par la suite est en effet globalement meilleure que la leur, ce qui permet de les
conforter dans l’ idée qu’ ils peuvent réaliser de bons travaux, pourvu qu’ ils soient plus confiants
dans leurs possibilités. Pourtant, malgré cette auto-évaluation, les élèves n’ ont pas pris le parti de
revenir sur leur résumé pour l’ améliorer. J’ ai dû passer auprès de chacun d’ entre eux pour les
amener à reformuler certaines phrases, à corriger des fautes d’ orthographe : beaucoup ont ainsi
réalisé qu’ ils avaient la solution en eux-mêmes.
Enfin, les élèves ont mis en forme leur texte sur traitement de texte. Après avoir demandé
l’ opinion du professeur d’ Arts Appliqués, l’ animateur et moi-même leur avons laissé le choix de
la présentation.
81(,17(59,(:),/0((8175$9$,/685/(67(&+1,48(6'(&20081,&$7,21
Ce projet est réalisé avec la classe FLE illettrisme. Il consiste au départ à interviewer deux
personnes qui travaillent au Lycée Jean Rostand et à produire une cassette vidéo. Le projet est
volontairement modeste car nous disposons seulement de deux mois avant le départ en stage des
élèves et l’ animatrice CIPPA a pour objectif de réinvestir le travail réalisé à cette occasion.
11
Przesmycki, Halina, et al. 3pGDJRJLHGLIIpUHQFLpHp. 107
17
Avant de commencer les séances au CDI, celle-ci profite de l’ opportunité pour DERUGHU OD
UpGDFWLRQG¶XQFRXUULHUDGPLQLVWUDWLI. Je n’ ai pas assisté à cette séance qui a eu lieu en cours
traditionnel. Il s’ agissait de demander à Mme La Proviseure l’ autorisation de filmer le personnel
du lycée. Une élève a accepté de taper la lettre sur traitement de texte pendant son temps libre.
L’ animatrice, deux élèves et moi-même sommes allés la porter à Mme La Proviseure (cf. le
courrier en annexe 6).
(WUHFDSDEOHGHV¶H[SULPHUGHYDQWXQJURXSHHWRVHUSDUOHUGHVRL
Il est toujours délicat pour chacun de nous, et d’ autant plus pour des élèves primo-arrivants, de
parler de soi. Cette étape a pourtant été très bénéfique pour prendre contact avec eux, les
connaître et instaurer un climat de confiance. J’ ai, en effet, proposé pendant la première heure XQ
SKRWRODQJDJH pour donner aux élèves l’ occasion de parler de leur passé, de leurs angoisses ou
de leurs attentes vis-à-vis du pays qui les accueille.
Dans cet exercice, chaque élève et chaque adulte choisissent deux photos parmi plus d’ une
centaine : l’ une évoque une joie ou un événement positif, l’ autre une peur ou un événement
négatif. Après une phase de réflexion, chacun se présente oralement au groupe, montre les
photos qu’ il a choisies et explique ce qu’ elles lui inspirent. Les autres membres du groupe
peuvent intervenir à la fin de la présentation pour poser des questions : chacun est libre d’ y
répondre ou non.
Malgré les difficultés liées à la langue, chaque élève s’ exprime quelques minutes et identifie les
mots de vocabulaire qui lui manquent dans le dictionnaire ou auprès de ses camarades.
J’ interviens seulement de façon ponctuelle pour poser des questions et relancer le récit. Une
élève prend même la parole pendant presque dix minutes pour raconter une expérience
angoissante (son cousin à l’ hôpital suite à un accident de voiture) et pour relater les circonstances
de sa vie en France. Une autre évoque la guerre et une femme qui pleure « parce qu’ elle a perdu
ses enfants ». Seule l’ élève illettrée, mal à l’ aise, peine à trouver une photo positive et s’ exprime
la dernière ; finalement, elle se libère peu à peu et réussit l’ exercice.
Cette ambiance conviviale permet aux élèves de poser plusieurs questions, y compris aux
adultes : as-tu des frères et sœ urs ? Es-tu française ? Où habitent tes parents ? Des questions
intimement liées à la vie personnelle, auxquelles nous répondons très sincèrement !
&HWWH H[SpULHQFH VH UpYqOH WUqV ULFKH : les élèves ont besoin de s’ exprimer et de prendre
conscience de leurs points de fragilité, de leurs peurs. Pour ma part, elle m’ aide à comprendre
leurs difficultés, à travers leur parcours de vie et leurs angoisses. Je regrette d’ ailleurs de ne pas
avoir proposé le même exercice au premier groupe CIPPA, car les relations et la confiance ont
été par la suite nettement différentes d’ une classe à l’ autre.
&KRLVLUTXLVHUDLQWHUYLHZp
Le projet d’ interviews suscite un réel enthousiasme de la part des élèves. Pour choisir les
personnes qu’ ils vont interroger, nous commençons par lister les membres du personnel du lycée.
Pour cela, je sollicite les élèves par des questions comme : « qui allez-vous voir si vous êtes en
retard ? », « qui croisez-vous dans la cour du lycée, dans les couloirs ? ». Ce travail est
l’ occasion de rappeler la fonction de chacun dans l’ établissement. Par exemple, un élève se
figure que le rôle du Conseiller Principal d’ Education ne consiste qu’ à infliger des punitions. Or,
il est important qu’ il sache auprès de qui trouver une aide ou un renseignement.
18
La première personne à interviewer est déjà choisie par l’ animatrice, qui souhaite ainsi répondre
à la demande de plusieurs élèves : ce sera la Chef des travaux du secteur industriel. Pour choisir
la deuxième personne, nous procédons par vote. Les élèves ont peu l’ occasion d’ opérer ainsi. Ils
ont d’ ailleurs du mal à choisir seuls, ils s’ interpellent pour savoir ce que l’ autre a écrit, ils ne
parviennent pas à prendre cette responsabilité. Finalement, chacun liste trois métiers par ordre de
préférence et la secrétaire du Proviseur est « élue ».
$QDO\VHUXQILOPVXUOHPpWLHUGHSXpULFXOWULFH©$XVHUYLFHGHO¶HQIDQWª
Dans un premier temps, pour trouver les questions que les élèves poseront lors de l’ interview,
j’ envisage d’ analyser avec eux un film réalisé par l’ ONISEP dans la série « les clips métiers ».
l’ animatrice et moi-même pourrions le choisir en fonction des aspirations des élèves.
Malheureusement, la procédure de location des cassettes est compliquée et demande plus d’ une
semaine de délai. Je propose donc aux élèves d’ analyser un film emprunté au CDDP de Nevers :
« Au service de l’ enfant »12, qui présente une puéricultrice : son travail dans la crèche, son passé
professionnel, ses relations avec l’ équipe qu’ elle encadre et avec sa hiérarchie, ses
responsabilités auprès des enfants et des parents, sa formation, sa rémunération. Très complet, ce
film montre aux élèves un produit fini et leur donne déjà une idée de ce qu’ il est possible de
réaliser. De plus, par rapport à leur connaissance du métier, la cassette vidéo présente l’ intérêt
d’ un témoignage vivant qui leur montre la réalité du travail et éveille en eux le désir d’ en savoir
plus.
Tout d’ abord, je demande aux élèves de OLVWHU OHV pWDSHV GX ILOP, ainsi que les informations
données sur les fonctions et les conditions de travail d’ une puéricultrice. Cet exercice nécessite
une heure et demie, pour treize minutes de film. Les élèves, très motivés, participent activement.
Il faut cependant visionner plusieurs fois les scènes car ils peinent à comprendre certains mots ou
certaines phrases. Je leur demande aussi G¶DYRLUXQHVSULWFULWLTXHVXUOHILOP, ce qui s’ avère
plus difficile. Par exemple, une auxiliaire de puériculture est interviewée au milieu d’ enfants qui
jouent et qui crient, si bien qu’ on ne comprend guère ses propos. A ma question : « que pensezvous de cette scène ? », les élèves cherchent à comprendre les paroles et à les reformuler mais
aucun n’ ose dire que le son est, à ce moment, inaudible.
Ce travail est aussi l’ occasion G¶H[SOLTXHU GHV WHUPHV GH YRFDEXODLUH. Par exemple, la
puéricultrice explique son passé professionnel auprès des malades du sida et des cancéreux : la
plupart des élèves ignorent ces mots et d’ autres comme « massage cardiaque » ou « budget ».
Même si ces notions ne sont pas toujours assimilées immédiatement, il est important que les
élèves puissent les rattacher à une idée.
Nous sommes aussi amenés à H[DPLQHU O¶DVSHFW WHFKQLTXH GX ILOP : les angles de vue, les
différentes images, l’ éclairage. Les élèves acquièrent ainsi les connaissances minimales sur la
manière de filmer.
A la fin de la séance, ils s’ agitent du fait de cette demande d’ attention permanente et des efforts
exigés, plus importants que pour d’ autres élèves. Mais ces méthodes assez inhabituelles leur
plaisent : une élève me remercie même car « elle a appris des choses ». Je lui réponds que tout le
plaisir est pour moi !
(ODERUHUODJULOOHG¶HQWUHWLHQ
12
$XVHUYLFHGHO¶HQIDQW. CNDP, 1997
.
19
Cette séance a pour objectif d’ aider à la verbalisation en faisant émerger des questions à partir
des séquences détaillées du film. Collectivement, nous en reprenons les différentes étapes
décrites sur paper-board et essayons de trouver la question correspondant aux propos de la
puéricultrice. Par exemple, lorsqu’ elle explique son rôle auprès des auxiliaires de puériculture,
les élèves trouvent la question : « travaillez-vous avec d’ autres personnes ? ».
Les élèves sont confrontés à plusieurs difficultés durant ce travail :
-
OHYRXYRLHPHQW ils ne sont pas familiers de cette forme de politesse
OHYRFDEXODLUHHWODFRPSUpKHQVLRQ de notion comme budget, équipe, hiérarchie.
Ils ont aussi du mal à comprendre que certaines questions, comme celle portant sur le salaire,
peuvent être gênantes et qu’ il faut laisser à la personne la possibilité de ne pas répondre (pour
cela, j’ introduis la formule : « si cela ne vous dérange pas, pouvez-vous nous dire … ? »).
-¶H[SOLTXH DXVVL OD GLIIpUHQFH HQWUH TXHVWLRQRXYHUWH HW TXHVWLRQ IHUPpH. Je prends un
exemple simple : « aimez-vous les chiens ou les chats ? » et « quels animaux aimez-vous ? ».
Les élèves ont des réactions très singulières : l’ une d’ entre eux nous dit qu’ elle aime les lions !
Et le débat est lancé sur le type d’ animal le plus intéressant ! En effet, ces élèves ont tendance à
se laisser emporter très rapidement dans des digressions dès lors que le travail est un peu
fastidieux. Souvent, comme ils n’ ont pas bien compris la notion expliquée et n’ osent pas le dire,
ils préfèrent parler d’ autre chose. Afin de m’ assurer qu’ ils ont compris, je demande souvent aux
élèves de reformuler par eux-mêmes. Et c’ est l’ occasion de bien des surprises ! (cf. annexe 7 : la
liste des questions)
5HGRQQHUFRQILDQFH
J’ estime maintenant qu’ il est temps de passer à la pratique. En effet, j’ ai retenu du premier
groupe CIPPA que ces élèves apprennent mieux en étant confrontés à des erreurs et qu’ ils sont
réfractaires à un cours trop théorique. Pour le premier essai de tournage, je pose comme consigne
que WRXVOHVpOqYHVSDUWLFLSHQWDXSURMHW, soit en filmant, soit en interviewant. La répartition des
rôles se fait assez facilement, sauf pour l’ élève illettrée, toujours indifférente. Je partage la classe
en deux groupes : l’ un est accompagné par l’ aide-éducateur ; j’ accompagne le second. Chaque
groupe est constitué de quatre élèves et il est prévu que deux d’ entre eux interviewent tandis que
les deux autres filment à tour de rôle. Je décrirai donc plus particulièrement le travail mené avec
mon groupe.
Deux élèves interviewent l’ animatrice, deux autres filment tandis que je les conseille. Les élèves
se prêtent bien au jeu, ils sont particulièrement appliqués. Puis nous visionnons le film et je
demande aux élèves de faire leur auto-critique.
Ceux-ci se révèlent plus loquaces quand il s’ agit de critiquer leurs camarades qu’ eux-mêmes ! Je
plaisante sur ce défaut « à la française » qui veut que la critique soit toujours acerbe et leur
explique l’ intérêt d’ une critique positive et constructive. Par un questionnement approprié, je les
amène à faire les remarques suivantes :
6XUODIRUPH
-
Une bonne luminosité : les élèves ont pensé à tirer les rideaux pour éviter l’ effet de contrejour
Un effort pour filmer aussi le cadre environnant
0DLV
Trop peu de gros plans
20
-
Des bras ou des têtes coupés
Un mauvais positionnement de la caméra : la personne interviewée se trouve de profil et la
personne qui interviewe est filmée de face.
6XUOHFRQWHQX
-
Un effort considérable d’ une élève pour rebondir sur les questions et en poser de nouvelles
-
Des hésitations dans les questions
Des suites de questions incohérentes - des difficultés à rebondir sur les questions
Une rapide déconcentration
Un air triste, pas de sourire, attitude sûrement due au stress.
0DLV
Globalement, cette séance permet de dédramatiser l’ impact de la caméra et de mettre davantage à
l’ aise les élèves qui interviewent. Quant à ceux qui filment, ils constatent qu’ ils peuvent réussir
même sans n’ avoir jamais manipulé de caméscope. Ils prennent aussi conscience qu’ il est
difficile de réaliser dès la première fois un travail parfait et qu’ il est normal de tâtonner, de
réajuster. Même les adultes doivent passer par ces étapes !
,PSOLTXHUO¶pOqYHGDQVODFRQFHSWLRQGXJpQpULTXH
Nous décidons de refaire d’ autres essais. Cette fois, les élèves ont travaillé en classe la diction et
se sont entraînés à poser les questions. Le premier exercice leur a aussi permis de réaliser
l’ importance de prévoir au préalable l’ ordre des questions et leur répartition entre les
interviewers.
/HVHFRQGHVVDLWpPRLJQHG¶XQSURJUqVPDQLIHVWH : les élèves s’ expriment plus librement, les
plans filmés sont plus variés. Surtout, je constate que les élèves les plus à l’ aise dans l’ exercice
aident leurs camarades et qu’ ils se conseillent mutuellement ! Nous repérons cependant quelques
détails à améliorer : veiller à ne pas avoir de bijoux, faire attention au souffle du micro, dégager
les cheveux du visage.
Ce matin-là, nous devons interviewer la secrétaire du Proviseur. Malheureusement, elle nous fait
savoir qu’ elle ne peut nous recevoir et qu’ elle nous donnera un autre rendez-vous. Les élèves
sont déçus. Pour être certaines de mener le travail à terme et pour rester dans le même domaine
d’ activité, l’ animatrice CIPPA et moi-même prévoyons un rendez-vous avec la secrétaire des
élèves.
Nous profitons de ce moment pour réfléchir ensemble à la conception du générique (c’ est
l’ occasion d’ expliquer ce terme). Les élèves éprouvent des difficultés à imaginer des situations :
ils sont peu habitués à donner leur avis. Or, en échangeant avec eux, je découvre que beaucoup
pratiquent la musique ou la danse. Ensemble, nous convenons que chacun apporte pour la
prochaine séance une musique typique de son pays. Je me réjouis que la jeune Française ait enfin
une attitude positive : elle propose d’ amener de la musique pour un élève chinois qui vient
d’ arriver. Malgré cela, elle conserve une attitude très agressive.
Tourner le générique dure environ deux heures, réparties sur cette séance et sur les suivantes. En
effet, les élèves sont souvent absents et il est difficile d’ avoir l’ ensemble de la classe en même
temps. Cela ne facilite pas le déroulement du travail ! Je propose que chaque élève choisisse
l’ endroit où il veut être filmé. Cette séance est très ludique et nous passons de bons moments.
Comme aucun n’ a vraiment réfléchi à ce qu’ il voulait faire, certains ont des attitudes très
spontanées (deux élèves improvisent une danse, un autre chante en play-back …).
21
Cependant, quelques uns sont toujours réfractaires à l’ idée d’ être filmés sous prétexte que « l’ on
va se moquer [d’ eux] ». Les élèves et moi-même passons du temps à tenter de les convaincre. En
effet, j’ ai imposé comme condition que tous les élèves participent mais il est hors de question de
les obliger au risque qu’ ils ne jouent pas vraiment le jeu.
$FWLRQ
A la séance suivante, le jour prévu pour l’ interview de la secrétaire des élèves, la secrétaire du
Proviseur, accepte de recevoir les élèves. Deux interviews doivent donc s’ enchaîner le même
jour.
œ
/¶LQWHUYLHZGHODVHFUpWDLUHGX3URYLVHXU
Cette première interview est très concluante. En effet, tous les élèves impliqués s’ intéressent au
secrétariat. Afin que l’ ensemble de la classe participe, je demande à tous les élèves de nous
accompagner : ils sont au nombre de huit ce jour-là.
La secrétaire du Proviseur réserve le meilleur accueil aux élèves et tout se passe pour le mieux.
Les trois jeunes filles qui interviewent en profitent pour poser des questions qui les préoccupent
à titre individuel, elles prennent manifestement confiance en elles. La secrétaire propose même à
deux d’ entre elles de passer une journée au secrétariat en tant qu’ observatrices.
Pourtant, avoir demandé à l’ ensemble de la classe d’ assister à l’ interview n’ était pas une bonne
idée. En effet, tandis que les uns travaillent, les autres patientent dans le couloir car le bureau de
la secrétaire est trop étroit pour recevoir tous les élèves. Dès lors, ils se dissipent et ne suivent
pas le travail de leurs camarades.
L’ après-midi, les élèves qui n’ ont pas travaillé le matin sont chargés de l’ interview de la
secrétaire des élèves.
œ
/¶LQWHUYLHZGHODVHFUpWDLUHGHVpOqYHV
Cette interview est plus difficile à conduire. En effet, les élèves travaillent sur cette activité
depuis le matin et ont du mal à se concentrer davantage. Mais les impératifs de temps et le
respect des personnes nous obligent à achever le travail en une journée.
Cette fois, je sollicite les élèves qui n’ ont pas encore participé. Le travail n’ est pas évident, car la
secrétaire est assez intimidée et les élèves aussi ! Mais je suis satisfaite car cette fois l’ ensemble
de la classe a participé. Enfin, je demande aux élèves de se regrouper dehors afin de filmer
quelques scènes en extérieur.
œ
/¶LQWHUYLHZGHODFKHIGHVWUDYDX[
Le mardi suivant, nous nous retrouvons pour l’ interview et la visite des ateliers de couture. La
chef des travaux est très loquace et manifestement très heureuse de recevoir les élèves qui, cette
fois, sont confiants et plus sûrs d’ eux. De plus, ils ne sont que sept ce jour-là, ce qui facilite le
travail.
Tout se déroule très bien, sauf pour la française. Elle se montre révoltée. Lors de la visite des
ateliers, elle me dit : « c’ est nul, ce qu’ on fait, c’ est même pas un cours ». Je ressens son désir de
provoquer et en même temps, sa peur de la nouveauté. Elle préfèrerait naturellement un cours où
tout est prévu et où les méthodes de travail sont connues. J’ échange avec elle sur l’ intérêt de
s’ entraîner à s’ entretenir avec un professionnel ; par mes questions, je l’ amène à me dire que ce
22
travail lui sera utile pour un entretien d’ embauche ou pendant le stage. Pourtant, elle me
rétorque : « mais jamais je n’ aurai une caméra et un micro pendant l’ entretien d’ embauche ! ».
/HPRQWDJH
Ce jour-là, l’ animatrice CIPPA est en retard et les élèves en profitent pour se disperser, les uns
au baby-foot, les autres dehors. Deux élèves sont même parties avant le cours sans donner de
raison quand elles ont su que l’ on réalisait le montage. Cette étape, en effet, comparée aux autres
séances mouvementées et animées, n’ est pas la plus attrayante pour les élèves. Cependant, je
réunis les élèves et fais le point sur leur obligation d’ assiduité et sur le sérieux que j’ attends de
leur part. Ces difficultés sont courantes selon l’ animatrice. C’ est pourquoi il existe des règles très
précises de discipline et d’ assiduité spécifiques aux classes CIPPA, avec un barème de sanctions
très clair.
Nous travaillons pendant cette séance sur les génériques de début et de fin. Les scènes, la
musique de fond, la couleur des lettres, les textes sont choisis par les élèves. Heureusement, nous
parvenons facilement à un consensus. Certains pourtant, vexés par mes remontrances,
témoignent d’ un manque évident de bonne volonté et font la moue. Mais d’ autres, plus motivés,
les incitent à se joindre au groupe. Une élève, en particulier, leur explique qu’ ils sont stupides de
se comporter ainsi. Je dois reconnaître qu’ elle est un appui précieux pour détendre l’ atmosphère !
Très vite, les génériques sont montés par deux élèves qui ont souhaité s’ initier à la technique du
banc de montage numérique. Je réalise le reste du montage. Non seulement les élèves partent en
stage la semaine suivante, mais la complexité des manipulations et surtout la longueur de
l’ opération, presque quinze heures de montage pour un film de treize minutes, me font
abandonner l’ idée d’ y faire participer les élèves. Le temps scolaire et le temps du cinéma sont
souvent incompatibles
'(/¶(/(9((1',)),&8/7($/¶(/(9((1352*5(6
Je me propose dans ce bilan d’ évaluer les résultats des actions menées par rapport aux objectifs
initiaux et au regard des difficultés rencontrées.
'(9(/233(5/¶$872120,("
3URYRTXHUOHFRQIOLWVRFLRFRJQLWLI
œ
)DLUHpPHUJHUOHVUHSUpVHQWDWLRQV
/H SURMHW G¶H[SRVLWLRQ D SHUPLV GH IDLUH pPHUJHU SDU OH TXHVWLRQQHPHQW HW O¶pEDXFKH GH
UpSRQVHVOHVUHSUpVHQWDWLRQVGHVpOqYHV. Le travail en groupe a été fédérateur d’ interrogations,
chacun a dû prendre en compte les points de vue et les apports des autres, argumenter et parfois
remettre en cause ses représentations. Partir d’ un questionnement élaboré par les élèves a
d’ ailleurs été très stimulant pour eux : c’ est une démarche qui les rapproche du réel et qui les met
en situation de demande de savoir. ©/HVTXHVWLRQVVRQWpEDXFKHVDWWHQWHVGH UHVWUXFWXUDWLRQV
UHFKHUFKHVGHSURORQJHPHQWVHWDXVVLULVTXHVGHUXSWXUH »13. En effet, les questions trouvées par
les élèves ont permis de guider la recherche dans le fichier de l’ ONISEP, de faire émerger des
13
Monthus, Marie. $SSUHQGUHO¶DXWRQRPLHDX&',, p. 54
23
représentations sur les métiers et le monde professionnel en général mais aussi de remettre en
cause certaines représentations.
Quant au groupe FLE, je regrette de n’ avoir pas avoir davantage travaillé sur leurs
représentations. En effet, faute de temps, j’ ai choisi d’ axer les séances sur une confrontation
directe avec les professionnels, sur le terrain. Le questionnement a cette fois trouvé sa réponse
directement dans le réel. Mais il manquait une phase d’ émergence des représentations des élèves
qui aurait permis d’ échanger, après les interviews, sur les questions qu’ ils se sont posées, sur la
remise en cause de certaines conceptions.
Je considère néanmoins qu’ il ne faut pas être trop ambitieux. Le projet vidéo avait plus pour
objectif de GpYHORSSHUO¶H[SUHVVLRQRUDOHHWODFRQILDQFHHQVRL. Et les élèves ont eu par la suite
d’ autres occasions de faire évoluer leurs représentations : en effet, ils partaient en stage
immédiatement après ce travail et avaient pour consigne de poser les questions élaborées en
classe au professionnel qui les encadrait. Reprendre la grille d’ interview pour l’ appliquer
concrètement sur leur lieu de stage a été l’ occasion de remettre en cause certains DSULRUL, grâce
notamment à la restitution et aux échanges suscités par l’ animatrice CIPPA à leur retour.
œ
&RQIURQWHUOHVUHSUpVHQWDWLRQV
Philippe Meirieu, dans Apprendre... oui, mais comment, évoque la nécessité d’ une interaction
entre des informations et un projet pour qu’ il y ait progression. « 6L MH YHX[ IDLUH pYROXHU OD
UHSUpVHQWDWLRQ MH GRLV GRQF GpFOHQFKHU XQ GpVpTXLOLEUH TXL UHQGUD QpFHVVDLUH VD
UppTXLOLEUDWLRQ » 14. Il explique que l’ enseignant peut jouer soit sur les informations qui ne sont
pas cohérentes avec la représentation de l’ élève, soit sur le projet qui, une fois appliqué et
exploré, n’ est pas confirmé par la réalité. Ces deux possibilités créent des situations-problèmes
qui contraignent l’ élève à réviser son opinion.
L’ exercice proposé aux élèves de CIPPA, la recherche d’ informations sur les métiers et
l’ échange en groupe les ont ainsi contraints à réviser certaines de leurs croyances, souvent bâties
à partir de connaissances très sommaires. Il a activé XQ FRQIOLW VRFLRFRJQLWLI, c’ est-à-dire que
l’ élève a généré intérieurement un conflit entre ses représentations et les savoirs apportés par
l’ exercice. Par exemple, la grille servant à rédiger le résumé les obligeait à prendre en compte
l’ ensemble des catégories qui décrivent un métier, même celles qui peuvent constituer un
obstacle et qu’ ils auraient tendance à négliger, comme le diplôme.
Mais ce travail m’ est apparu insuffisant pour des élèves qui craignent le déséquilibre et la remise
en question. Plus encore pour eux que pour d’ autres élèves, M¶DL FRPSULV OD QpFHVVLWp GH
UHQIRUFHU O¶H[SORUDWLRQ GHV PpWLHUV SDU GHV VWDJHV, des enquêtes sur le terrain ou des visites
d’ entreprise : observer un métier et appréhender concrètement son fonctionnement aide l’ élève à
se le représenter. Alors les informations acquises peuvent interagir avec le projet de l’ élève.
J’ ai en effet remarqué deux phénomènes : le premier, c’ est que FHVpOqYHVRQWXQHFRQFHSWLRQ
WUqV UHVWUHLQWH HW WUqV DG KRF GH O¶XWLOLWp GHV FRQQDLVVDQFHV. Ils cherchent à résoudre un
problème particulier par une réponse adaptée mais ne parviennent pas à avoir un point de vue
global. ©/HVWDJLDLUHQHFKHUFKHSDVODPHLOOHXUHVROXWLRQjXQSUREOqPHRXjVDVLWXDWLRQFDU
VRQLQIRUPDWLRQHVWWURSOLPLWpH(QRXWUHLOGpFLGHQRQjSDUWLUG¶XQHYXHG¶HQVHPEOHPDLVj
SDUWLUG¶XQHYLVLRQUHVWUHLQWHGHODVLWXDWLRQDFWXHOOHLOFKRLVLWXQHVROXWLRQFRUUHVSRQGDQWjXQ
VHXLO PLQLPXP GH VDWLVIDFWLRQ ª15. Ainsi, lors des exercices sur le fichier papier de l’ ONISEP,
chacun cherchait la réponse à sa question sans avoir la curiosité de lire la fiche entière ; lors des
14
15
Meirieu, Philippe. $SSUHQGUHRXLPDLVFRPPHQWp. 61
Lycée Professionnel Jean Rostand. 3{OH,QVHUWLRQ-HDQ5RVWDQG$QQpH
24
séances sur l’ internet, aucun des élèves, à ma connaissance, n’ a eu la curiosité de découvrir les
autres métiers du même domaine d’ activité que le métier qu’ il avait choisi. Ou, confronté à un
métier qu’ il ne connaissait pas, aucun ne prenait l’ initiative d’ aller lire la fiche correspondante :
il en choisissait un autre.
Le second phénomène, c’ est TX¶LOVUHGRXWHQWODQRXYHDXWpHWODUHPLVHHQFDXVH Globalement,
© OHVHQIDQWVLVVXVGHPLOLHX[GpIDYRULVpVRSUpYDXWXQHVWUXFWXUHULJLGHRXDOpDWRLUHRQWGRQF
GHV GLIILFXOWpV G¶DQWLFLSDWLRQ HW Q¶RQW SDV G¶DWWLWXGH DFWLYH GHYDQW OD QRXYHDXWpª Prendre en
charge leur vie et leur avenir leur semble un projet trop vaste qu’ ils préfèrent confier à d’ autres,
leurs parents ou leur professeur. Ainsi, les uns se dévalorisent et affirment ne rien pouvoir
réaliser de bien dans la vie tandis que les autres, qui ont déjà trouvé un apprentissage, ne voient
pas l’ intérêt d’ approfondir leur connaissance du métier qu’ ils veulent exercer. /HV GHX[
DWWLWXGHV VH FRPSODLUH GDQV O¶pFKHF HW VH VDWLVIDLUH G¶XQH UpSRQVH WRXWH WURXYpH VRQW
UpFRQIRUWDQWHV
Ainsi, travailler sur sa connaissance des métiers en liaison avec une exploitation optimale des
stages en entreprise aide l’ élève à avoir une vision plus globale de sa situation et des exigences
du monde professionnel. Mais je me rends compte que ce travail nécessite du temps et surtout
des échanges réguliers avec l’ animateur et la conseillère d’ orientation pour que l’ élève accepte
de remettre en cause ses représentations.
'RQQHUGHVUHSqUHVHIILFDFHV
œ
$FTXpULUXQHPpWKRGRORJLH
Les élèves de la première classe ont approfondi leur connaissance de la recherche GDQV XQ
ILFKLHU SDSLHU RX LQIRUPDWLTXH en utilisant l’ ordre alphabétique. Ils pourront transférer cette
capacité à d’ autres types de classification ou de classement. Pourtant, après avoir considéré dans
un premier temps qu’ il était important de leur apprendre la recherche dans le fichier papier, j’ ai
par la suite nuancé mon avis. En effet, les fiches de l’ ONISEP ne sont pas d’ usage simple et font
appel à plusieurs notions, comme le domaine ou le centre d’ intérêt, difficilement assimilables par
ces élèves qui manquent de connaissances préalables. Les appellations des métiers leur semblent
parfois confuses (« exploitant agricole » et non « agriculteur » les a laissés perplexes.). De plus,
j’ avais sous-évalué le temps passé à la recherche si bien que les séances ont duré plus longtemps
que prévu et les élèves ont eu du mal à considérer l’ objectif à long terme de l’ exercice.
D’ un autre côté, très peu de ces élèves ont accès à l’ informatique et le maîtrisent. Aborder la
recherche par un outil plus familier, comme le classeur papier, a manifestement permis de
naviguer avec plus d’ aisance sur le site internet.
(QHIIHWODUHFKHUFKHVXUO¶LQWHUQHWSOXVDWWUDFWLYHHWSOXVDLVpHDpWpIUXFWXHXVH. Pourtant,
comme pour lors des recherches sur le fichier papier, les élèves ont eu des difficultés à saisir
l’ idée de domaine et de clé intérêt. J’ ai dû les accompagner tout le long de leur recherche. Pour
ces élèves qui peinent à assimiler ces notions, il manque sur le site de l’ ONISEP un moteur de
recherche interne qui permette un accès plus rapide au métier recherché, comme c’ est le cas sur
le site de l’ ANPE. En revanche, les fiches de l’ ONISEP sont très complètes et réalistes, elles
précisent les débouchés professionnels, les avantages et les inconvénients d’ un métier et elles
informent sur les lieux de formation.
Le fait que plusieurs aient ignoré la correction est caractéristique de la difficulté qu’ ils ont à
concevoir le processus d’ une séance. Ils peinent souvent à comprendre la consigne, qui ouvre le
travail, et à intégrer l’ intérêt de la correction, qui le clôt.
16
Croizier, Monique. 0RWLYDWLRQSURMHWSHUVRQQHODSSUHQWLVVDJHV, p. 35
25
/HV pOqYHV GH &,33$ RQW DFTXLV XQH PpWKRGRORJLH qui leur a permis de développer leur
autonomie et leur confiance en eux : ainsi, certains sont revenus au CDI faire des recherches, une
élève a sollicité mon aide pour rechercher des offres d’ emploi sur le site de l’ ANPE et d’ autres
sont venus seuls faire des recherches pour eux-mêmes.
Dans un deuxième temps, les élèves ont analysé un texte pour en extraire les éléments
importants. J’ ai constaté XQHQHWWHpYROXWLRQ entre le premier résumé et le résumé final : certains
élèves ont bien intégré la reprise des informations importantes et leur reformulation. « /DSULVH
G¶LQIRUPDWLRQV GHYLHQW HIIHFWLYH ORUVTXH OH OHFWHXU QH SUHQG TXH O¶LPSRUWDQW ORUVTX¶LO VDLW
WURXYHU O¶HVVHQWLHO SDU GLIIpUHQFH DYHF FH TXL SHXW rWUH QpJOLJp »17. La démarche consistant à
résumer la fiche-métier a été utile pour amener l’ élève à rechercher les éléments importants.
Tous les élèves ont compris les appellations « conditions de travail, qualités requises,
rémunération... », ils ont assimilé la notion de catégorie et compris l’ intérêt de regrouper les
informations pour pouvoir mieux les résumer. Malheureusement, certains conservent des
problèmes de compréhension et des lacunes de grammaire ou d’ orthographe qui restent très
difficiles à surmonter.
En ce qui concerne la classe FLE, les élèves ont appris à SUpVHQWHU XQH OHWWUH à UpGLJHU XQ
TXHVWLRQQDLUH. Seule une application à venir pourra témoigner de l’ efficacité du travail. Des
difficultés se sont surtout manifestées dans leur rapport à l’ écrit : ils se refusaient la plupart du
temps à rédiger des phrases, ne s’ appliquaient pas pour écrire. C’ est la peur du passage à l’ écrit
qu’ il s’ agit maintenant de surmonter.
œ
3UHQGUHFRQVFLHQFHGHVDSURJUHVVLRQ
/¶DXWRpYDOXDWLRQ pour les premiers élèves de CIPPA a eu un effet positif : elle les a contraints
à s’ assurer qu’ ils avaient bien compris les informations de la fiche-métier et qu’ ils les avaient
toutes exploitées. Ils ont pu évaluer leur travail par rapport à la consigne. L’ autonomie, en ce
sens, consiste pour les élèves à prendre conscience de leurs difficultés et à tenter de trouver des
stratégies pour y remédier. Or, dans le cas présent, s’ ils ont tenté effectivement d’ analyser leur
travail et d’ en faire ressortir les aspects positifs et négatifs, ils n’ ont guère cherché à l’ améliorer
en réécrivant certaines phrases ou en corrigeant les fautes d’ orthographe. Cela témoigne du
VHQWLPHQW G¶LPSXLVVDQFH qu’ ils ressentent et de leur refus d’ inter-agir avec leur
environnement : ils sont persuadés qu’ ils ne pourront jamais progresser. C’ est pourquoi il était
important que je les amène à prendre conscience que chacun a besoin d’ étapes et de temps pour
arriver à un produit fini mais que tous peuvent y parvenir.
Cependant, je pense que la grille d’ auto-évaluation aurait gagnée à être davantage construite
avec les élèves. En effet, ils se seraient mieux approprié les indicateurs retenus. Avec le recul, je
choisirais de mener une recherche moins approfondie sur le fichier papier et de travailler sur les
critères d’ un bon résumé. Certes, j’ ai fait ce travail à partir des résumés d’ élèves : nous avons
exploité les meilleurs d’ entre eux pour en tirer des indicateurs et conclure à des conseils de
réalisation. Mais les élèves manquaient toujours d’ aisance dans la reformulation, qui aurait
mérité d’ être davantage travaillée.
Globalement, et plus encore pour la classe FLE, j’ ai fondé la progression des élèves sur XQ
DSSUHQWLVVDJHSDUO¶HUUHXUEn effet, l’ élève est en construction en ce qui concerne ses savoirs
mais aussi sa personnalité et sa sociabilité. C’ est en lui laissant une part de libre-arbitre qu’ il
pourra lui-même reconnaître cette erreur. « /¶HUUHXUQHGRLWSDVrWUHGLWHSDUUDSSRUWDXSRLQWGH
UpIpUHQFHGHVVDYRLUVFRGLILpVDXSURJUDPPHPDLVSDUUDSSRUWDXVXMHWDSSUHQDQWOXLPrPH»18.
En CIPPA, où l’ apprentissage doit être fondé sur des compétences sociales, sur la
17
18
Monthus, Marie. $SSUHQGUHO¶DXWRQRPLHDX&',p. 109
Descomps, Daniel. /DG\QDPLTXHGHO¶HUUHXU, p. 47
26
communication et le comportement dans la société, le savoir-apprendre et le savoir-être prennent
toute leur ampleur : il s’ agit d’ amener l’ élève à FRPSUHQGUHOHSURFHVVXVTXLOXLIDLWDFTXpULU
GHV FRQQDLVVDQFHV HW OH IDLW SURJUHVVHU Il se situe GDQV VD SURSUH SURJUHVVLRQ et non par
rapport à une norme scolaire.
/HVpOqYHVRQWSURJUHVVp
-
-
jSDUWLUGHVLQIRUPDWLRQVUHFXHLOOLHV : lors des recherches dans les fiches ONISEP ou lors
des interviews, les élèves recueillaient des réponses qui correspondaient ou non à leur
représentation initiale du métier
jSDUWLUGHO¶H[SpULHQFH YpFXH (classe FLE) : par exemple, en essayant plusieurs façons de
filmer, en s’ entraînant à poser les questions, les élèves prenaient conscience de la meilleure
méthode, des améliorations possibles et de leurs propres possibilités. Ils faisaient de façon
empirique des choix stratégiques.
Je veillais cependant à ne pas faire émerger d’ erreurs dont l’ élève n’ avait pas conscience. Par
exemple, si je posais la question « est-ce que tu trouves que l’ angle de vue est bon ? » et que
l’ élève me répondait par l’ affirmative, alors j’ attendais de revisionner la scène pour qu’ il prenne
conscience par lui-même qu’ un autre angle aurait probablement été meilleur.
Ainsi, j’ ai voulu fonder ces projets sur l’ expression de la créativité et de l’ imagination de chacun.
Le film vidéo notamment a été construit DYHF les élèves du début à la fin, c’ est-à-dire que j’ ai
encouragé, tout au long des séances,ODSULVHGHSDUROHHWOHFKRL[DUJXPHQWp
$PpOLRUHUO¶XVDJHGHODODQJXH
Les élèves de la première classe CIPPA avaient des difficultés liées à l’ expression et au contenu :
problèmes lexicaux, problèmes de morphologie (conjugaison des verbes), problèmes de
compréhension de la structure du texte. Grâce au tableau d’ analyse, ils ont appréhendé plus
facilement et de façon progressive la fiche-métier. Ils ont appris à H[SORLWHUOHGRFXPHQW en y
repérant les informations importantes et en les synthétisant. Ils ont acquis une méthode pour
résumer et s’ approprier un texte. Enfin, ils ont acquis du vocabulaire plus significatif que « faire,
il y a, bien, être … », termes qu’ ils emploient trop souvent.
Les élèves de la classe FLE ont fait des progrès manifestes dans l’ utilisation de la langue
française. Je le constate lors de nos échanges : ils comprennent plus vite, hésitent moins à dire
qu’ ils n’ ont pas compris, s’ expriment plus librement. Pendant les interviews, ils ont été
confrontés à XQH YUDLH VLWXDWLRQ GH FRPPXQLFDWLRQ TXL OHV LPSOLTXDLW SHUVRQQHOOHPHQW :
chacun avait un rôle à jouer, une responsabilité à assumer. C’ est par ces contraintes intégrées
qu’ ils ont progressé et pris confiance en eux.
Si l’ on reprend les différentes étapes de l’ apprentissage de la langue, on constate qu’ il commence
par une « DFFXPXODWLRQ GH PRWVFOpV SRXU GHV EHVRLQV SULPDLUHVª, il se poursuit par une
« DVVLPLODWLRQ GHV GLDORJXHV VLPSOHVª et il s’ achève par « XQH LQWpJUDWLRQ F¶HVWjGLUH TXH
O¶DSSUHQDQWGHYLHQWDFWHXUHWDXWHXUGHVDSURGXFWLRQYHUEDOH »19. /HVpOqYHVVRQWSDUYHQXVSDU
FH SURMHW DX QLYHDX GH O¶DVVLPLODWLRQ, c’ est-à-dire que la plupart sont capables d’ un dialogue
simple, pourvu que leur interlocuteur veille à ne pas parler trop vite. Par ailleurs, ils ont appris à
19
Clément, Francine/Girardin, Andrée. (QVHLJQHUDX[pOqYHVLVVXVGHO
LPPLJUDWLRQp. 154
27
adopter un registre de langage adapté à cet interlocuteur par l’ emploi du vouvoiement et de
termes spécifiques comme « budget » ou « équipe ».
Enfin, LOV RQW RVp SUHQGUH OD SDUROH devant une caméra et surmonter leurs peurs. Ces progrès
ont été rendus possibles par un climat de confiance dans le groupe et par l’ acceptation de
l’ erreur : l’ animatrice comme moi-même acceptions certaines expressions impropres comme
autant de tâtonnements. L’ erreur, dans ce cadre, est une étape pour apprendre. Pourtant, très peu
d’ entre eux, deux ou trois sur douze élèves, ont pris l’ initiative de poser de nouvelles questions,
sûrement par peur de mal formuler leur phrase. J’ espère que la confiance que ces élèves ont
acquise au cours du travail donnera aux autres plus d’ assurance à l’ avenir.
Enfin, ce travail a favorisé O¶LQWpJUDWLRQ GHV pOqYHV GH OD FODVVH )/( GDQV O¶pWDEOLVVHPHQW :
intrigués, certains élèves présents au CDI pendant les séances demandaient qui ils étaient, ce
qu’ ils faisaient. Cet intérêt a suscité chez nos élèves une certaine fierté ! Nous avons même pu
organiser une rencontre entre cette classe et une classe de seconde dans le cadre de
l’ Enseignement Civique Juridique et Social (ECJS) pour échanger sur le thème des différences
entre les pays et sur l’ intégration des jeunes.
81(352*5(66,21'$16/(&203257(0(17
/¶LQYHVWLVVHPHQWGDQVOHSURMHW
Au début, OHVpOqYHVDYDLHQWEHDXFRXSGHGLIILFXOWpVjFRPSUHQGUHOHVREMHFWLIVjORQJWHUPH
GXSURMHW. En effet, ils se projettent difficilement dans le futur, même proche, et perçoivent mal
la finalité d’ une action. Si l’ arrivée fréquente de nouveaux élèves était l’ occasion de demander
aux autres d’ expliquer les séances en cours et d’ inscrire celle du jour dans un cheminement
global, beaucoup en percevaient mal l’ utilité à court terme dans le cadre d’ une insertion sociale
ou professionnelle.
Pourtant, DXIXUHWjPHVXUHM¶DLVHQWLXQLQYHVWLVVHPHQWFURLVVDQWGHVpOqYHV. Plus le travail
prenait forme, plus ils en comprenaient la finalité. J’ ai par ailleurs toujours veillé à leur délivrer
un discours confiant qui leur renvoie la meilleure image d’ eux-mêmes. 'HVpOqYHVRQWDLQVLSX
rWUHYDORULVpV pour leurs qualités relationnelles et leur sérieux. Dans le premier groupe, plusieurs
d’ entre eux se sont démarqués par la qualité de leur résumé : je leur demandais alors d’ expliquer
à leurs camarades comment ils avaient procédé et quelle méthode ils avaient employée. Dans le
second groupe, Blandine a ainsi été félicitée pour son esprit d’ initiative et son entrain, Suzannah
s’ est investie jusqu’ à prendre sur son temps de pause pour continuer à filmer des scènes.
3RXUWDQWFHUWDLQHVGLIILFXOWpVDX[TXHOOHVMHP¶DWWHQGDLVVRQWDSSDUXHV : absentéisme, retards
en classe, élèves au baby-foot... Les élèves ont d’ ailleurs reproduit ce comportement en
entreprise. Il apparaît que beaucoup de temps et d’ énergie soient nécessaires pour leur apprendre
à acquérir cette forme d’ autonomie : se prendre en charge.
Quant à l’ élève illettrée, son comportement a peu évolué durant les séances. Elle était très
inconstante d’ une heure sur l’ autre : alors qu’ elle avait très bien participé à l’ interview de la
Chef des Travaux, elle s’ est renfermée sur elle-même dès l’ heure d’ après. Globalement, elle se
rapproche davantage du premier groupe CIPPA. L’ animatrice lui avait d’ ailleurs proposé de le
rejoindre mais elle a préféré rester dans le groupe FLE : en effet, les élèves primo-arrivants
étaient très accueillants et avaient une attitude protectrice envers elle.
3URMHWG¶RULHQWDWLRQHWPRWLYDWLRQ
28
Les élèves ont manifesté un engouement pour ces projets qui n’ étaient pas scolaires. Dans la
première classe, le travail en groupe leur a montré l’ intérêt d’ échanger sur ses représentations.
Dans la seconde classe, le support utilisé, que la plupart découvraient pour la première fois, a
suscité un plaisir particulier. Pourtant, FRQWUDLUHPHQW j FH TXH MH P¶pWDLV LPDJLQp OH IDLW GH
WUDYDLOOHUVXUXQSURMHWG¶RULHQWDWLRQQ¶HVWSDVXQpOpPHQWPRWHXU.
En effet, les élèves ne sont pas en mesure d’ pWDEOLUXQHUHODWLRQHQWUHO¶DFWLRQHQFRXUVHWOHXU
SURMHWSHUVRQQHO. Ils adoptent deux types d’ attitude par rapport à leur avenir professionnel : soit
ils sont extrêmement défaitistes et pensent ne jamais réussir dans la vie, soit ils vivent dans une
illusion de toute-puissance. Ainsi les uns répètent : « de toute façon, je n’ y arriverai pas », les
autres disent « la seule chose qui m’ intéresse, c’ est de gagner de l’ argent » ou « je connais tout
du métier de mécanicien, la seule chose qui me manque, c’ est la connaissance de la langue ».
Pour réellement construire un projet et en être l’ acteur, l’ élève doit se sentir concerné par sa
propre vie. Or, celle-ci lui est comme extérieure.
Par ailleurs, les élèves en difficulté préfèrent avoir un résultat immédiat, réussir tout de suite au
lieu de comprendre. Or, ils ont dû renoncer à réussir immédiatement pour apprendre à anticiper,
analyser, comparer et accepter ainsi que l’ apprentissage soit un SURFHVVXV. En fait, c’ est d’ avoir
travaillé VRXV OD IRUPH d’ un projet construit et évolutif qui a intéressé les élèves. Ils se sont
découverts acteurs de leur scolarité et cette situation valorisante a suscité chez la plupart une
grande motivation. C’ est ainsi que, dans la première classe, des élèves ont peu à peu pris
conscience de leurs progrès. Je l’ ai perçu notamment au travers de la participation orale. 'HV
pOqYHV WLPLGHV HW UpVHUYpV V¶H[SULPDLHQW GH SOXV HQ SOXV, tandis que les élèves « leaders
négatifs » ne se faisaient presque plus remarquer.
8QRXWLOSRXUSURJUHVVHUOHTXHVWLRQQHPHQW
Nous avons parlé d’ autonomie, de méthodologie, d’ apprentissage par l’ erreur. J’ ai aussi
beaucoup évoqué OH TXHVWLRQQHPHQW comme mode d’ émergence d’ une hypothèse, voire d’ une
solution, ou comme aide à la construction du sens. Le questionnement a toujours été pour moi,
en tant que documentaliste, un moyen de faire le point sur les connaissances des élèves, de faire
émerger des représentations et de mettre en évidence les zones d’ ombre. Il sert en premier lieu à
s’ assurer que :
-
O¶pOqYHDELHQFRPSULV : en le faisant reformuler, il est obligé d’ employer ses propres mots.
Par cette méthode, il s’ approprie le savoir
O¶HQVHLJQDQWHVWELHQjO¶pFRXWH : je proposais souvent à l’ élève une autre formulation de ce
qu’ il venait de me dire afin de m’ assurer que nous en avions la même conception.
En second lieu, OHTXHVWLRQQHPHQWVHUWj FUpHU GHV VLWXDWLRQVSUREOqPHV En effet l’ élève se
trouve confronté à une question qui devient un problème à résoudre : il est contraint d’ être acteur
de son apprentissage SRXUIDLUHpPHUJHUGHVVROXWLRQV. Si les élèves ont souvent besoin d’ être
guidés, le fait de les questionnerplutôt que de leur donner des conseils permet de les amener à
sortir de leur passivité et, devant l’ obstacle, à analyser les solutions possibles.
Mon questionnement pouvait ainsi être individuel ou collectif. J’ ai remarqué que les questions
devaient souvent être très concrètes et précises. Par exemple, leur demander « avez-vous une
idée pour le générique ? » n’ a amené aucune réponse. Par contre, quand je leur ai demandé
« avez-vous pensé à l’ endroit où vous voudriez être filmé ? A la musique de fond ? », les élèves
se sont exprimés plus facilement. Ils n’ avaient en fait pas une conception très nette d’ un
générique ou avaient peur de ne pas donner ODVROXWLRQFHOOHTX¶DWWHQGO¶HQVHLJQDQW.
Par conséquent, dans le cadre de ces projets, mon rôle a consisté à DFFRPSDJQHUOHVpOqYHVSRXU
TX¶LOV WURXYHQW OD UpSRQVH RX OD VROXWLRQ SDU HX[PrPHV. Par le questionnement et l’ écoute
constructive, je les guidais dans leur recherche pour qu’ ils sachent analyser, comparer et
29
s’ interroger. Je veillais à ne pas leur donner directement la réponse. Pour le projet vidéo, j’ aidais
techniquement les élèves, je les conseillais ponctuellement sur l’ expression ou l’ attitude à
adopter devant la caméra. Mais lHVpOqYHVRQWG€VHSUHQGUHHQFKDUJH sur le choix des prises
de vue, sur le lieu de tournage, sur l’ ordre des questions à poser. Habitués à être dirigés, ils
étaient décontenancés par ces responsabilités, modestes certes, mais qui constituent un bon
moyen de développer leur autonomie.
%,/$1352)(66,211(/%,/$13(56211(/
J’ ai beaucoup progressé pendant ces projets en ce qui concerne mes pratiques professionnelles,
et en particulier la gestion de la classe.
/DJHVWLRQGHODFODVVH
œ
/HWUDYDLOHQJURXSH
Je m’ interroge aujourd’ hui sur l’ intérêt de faire participer l’ ensemble des élèves au projet vidéo :
peut-être aurais-je dû le proposer aux élèves intéressés. En effet, la vidéo n’ est qu’ un outil parmi
d’ autres pour apprendre la langue. Il est plus ludique que d’ autres, mais je pense aujourd’ hui que
le projet aurait gagné à être mené avec des volontaires, plus impliqués et plus motivés. D’ un
autre côté, un des principes du CIPPA consiste en « OD SDUWLFLSDWLRQREOLJDWRLUHSRXUFKDFXQGHV
VWDJLDLUHVjWRXWHDFWLYLWpSURSRVpH »20 En effet, il est important de développer chez les élèves en
difficulté un sentiment d’ appartenance à la classe, voire au lycée.
Ce sentiment d’ appartenance passe par le groupe : celui-ci sert à faire évoluer les représentations
par la confrontation des différentes opinions, il permet au jeune « G¶DFFpGHUjOD FRQQDLVVDQFH
GH OXLPrPH SDU OXLPrPH DX WUDYHUV GHV DXWUHV GH VH GpFRXYULU GDQV FH TX¶LO D G¶XQLTXH HW
G¶XQLYHUVHO»21. &¶HVWSDUOHJURXSHTXHOHMHXQHHQGLIILFXOWpSHXWSUHQGUHFRQVFLHQFHGHVHV
DWRXWV GpYHORSSHU GHV FRPSpWHQFHV VRFLDOHV HW O¶HVSULW GH VROLGDULWp. En ce domaine, j’ ai
constaté plusieurs évolutions très positives pendant le déroulement des projets : les agressivités
verbales entre élèves se faisaient plus rares, les attitudes étaient plus chaleureuses, des élèves
tentaient de motiver leurs camarades, et une entraide mutuelle s’ est clairement manifestée.
Finalement, j’ ai senti un plus grand respect des uns envers les autres. Malgré cela, les élèves se
sentaient rarement concernés par ce que disaient leurs camarades : lors des échanges autour d’ un
sujet, notamment une expérience personnelle, il était difficile de maintenir l’ attention de tous les
élèves. Ils ne se rendaient pas compte que l’ expérience de chacun pouvait être utile aux autres, à
plus ou moins long terme.
Par ailleurs, j’ ai rencontré comme difficultés l’ hétérogénéité et la rotation permanente des élèves.
œ
/¶KpWpURJpQpLWp
En effet, chacun d’ entre eux possède un niveau de compréhension et d’ assimilation des
connaissances différent. Je devais donc m’ adapter à des sollicitations de nature et de niveaux
variables. Cette façon de travailler exige beaucoup de disponibilité, d’ autant plus que ces élèves
sont très demandeurs de soutien et d’ aide. Toute la difficulté consiste à leur montrer qu’ ils
peuvent, plus qu’ ils ne le croient, se passer d’ aide.
20
21
Lycée Professionnel Jean Rostand. 3{OH,QVHUWLRQ-HDQ5RVWDQGDQQpH
Blanchard, Elisa, et al. /HVFRPSpWHQFHVVRFLDOHVO¶DFFRPSDJQHPHQWGHVMHXQHVHQGLIILFXOWpV p. 39
30
/¶KpWpURJpQpLWpVHPDQLIHVWHDXVVLSDUO¶DWWLWXGHHQFODVVH : beaucoup d’ élèves n’ ont pas leur
matériel, pas de feuille de cours. D’ autres se dispersent vite, se déconcentrent facilement. Dans
les comportements envers l’ adulte, une différence claire existe entre les deux classes : dans la
première CIPPA en effet, les élèves ont souvent grandi dans un contexte familial difficile,
rencontrant des conflits d’ autorité avec leurs parents. J’ ai dû souvent leur demander d’ avoir une
attitude correcte, par exemple quand ils s’ adressaient à moi tout en regardant ailleurs. Au
contraire, les élèves de la classe FLE ont grandi dans un environnement où l’ autorité de l’ adulte
est admise, ils témoignent DSULRUL du respect à l’ égard de l’ enseignant : ils n’ ont jamais eu de
parole déplacée, leur regard était franc.
œ
/DURWDWLRQGHVpOqYHV
Elle est inscrite dans le projet CIPPA comme l’ occasion de « F{WR\HUG¶DXWUHVSHUVRQQHVD\DQW
GHVYDOHXUVHWGHVFXOWXUHVGLIIpUHQWHV«/DURWDWLRQGHVpOqYHVDXWRXUGHVDFWLYLWpVPXOWLSOLHUD
OHV FRQWDFWV HQWUH HX[ pYLWHUD OHV FKRL[ FODVVLTXHV SDU DIILQLWp GH YDOHXUV HW GpYHORSSHUD GHV
FDSDFLWpVG¶DGDSWDWLRQjGHVVLWXDWLRQVGHJURXSHQRXYHOOHV». Il est bien question une nouvelle
fois d’ amener l’ élève à être confronté à la nouveauté, à modifier ses représentations pour
s’ adapter. Mais en terme de gestion de la classe, FHWWH H[LJHQFH QpFHVVLWH XQH FDSDFLWp j
FRQVLGpUHU OD FODVVH FRPPH DXWDQW G¶HQWLWpV GLIIpUHQWHV et à adapter son apprentissage et sa
façon de le transmettre en fonction de l’ élève. De plus, j’ ai vite compris qu’ il est difficile de
gérer un tel groupe classe sans une connaissance préalable de la personnalité et de l’ histoire des
élèves.
8QHSURJUHVVLRQGDQVPHVSUDWLTXHV
œ
8QWUDYDLOVXUODGXUpH
La chance de pouvoir travailler sur plusieurs séances autour d’ un projet m’ a permis de cerner
avec plus de justesse les difficultés des élèves pour essayer d’ y remédier lors de la séance
suivante. En effet, notamment pour la classe FLE, j’ ai dû m’ adapter et apprendre à parler
lentement, à identifier et expliquer les mots difficiles. De plus, ce que j’ apprenais d’ une des
classes, je le réinvestissais dans l’ autre classe.
Par exemple, j’ ai tiré comme enseignement du premier groupe que des séances courtes, qui
rendent l’ élève acteur et le mettent en situation, sont motivantes. J’ ai compris aussi que le travail
en groupe doit être très structuré et ne pas durer trop longtemps.
Ainsi, j’ ai souvent changé mon plan de séance et modifié son contenu : par exemple, j’ avais
prévu des travaux en sous-groupe pour trouver les questions de l’ interview. Mais finalement,
cela m’ a semblé trop compliqué et trop long. Je pensais que le projet d’ exposition prendrait
moins de temps que le projet vidéo : ce ne fut pas le cas. En effet, je n’ avais pas pris en compte
les différences de motivation et d’ investissement des élèves.
Ce travail sur la durée m’ a permis en outre de SUHQGUHHQFRPSWHOHVHIIRUWVHWODSURJUHVVLRQ
des élèves davantage que leur performance : par exemple, je pouvais féliciter des élèves qui
avaient rédigé un second résumé mieux construit que le premier, malgré les fautes d’ orthographe
et les maladresses dans l’ expression. Je pouvais évaluer les élèves de la classe FLE sur les efforts
fournis et l’ application à s’ exprimer correctement en français. Une évaluation en classe
traditionnelle, davantage basée sur une norme pré-établie, risque de les mener au découragement
et au sentiment d’ injustice.
Ces projets ont permis d’ instaurer XQ FOLPDW FKDOHXUHX[ HQWUH HX[ HW PRL, la communication
étant facilitée. Notamment avec la classe FLE, les relations ont été de plus en plus conviviales et
nous ont conduits à avoir confiance les uns envers les autres. Notamment en ce qui concerne les
31
techniques audiovisuelles, l’ animatrice et moi-même n’ étions plus vraiment des enseignants,
nous devenions nous aussi des apprenants.
œ
/DFROODERUDWLRQDYHFOHVDQLPDWHXUV
Les animateurs m’ ont toujours accompagnée, à la fois pendant la construction des séances et
pendant la séance elle-même. En effet, ils ont un rôle essentiel à jouer auprès des élèves de
CIPPA : à la fois formateurs et accompagnateurs, ils ont des fonctions d’ insertion,
d’ accompagnement du jeune dans sa vie sociale et professionnelle et aussi des fonctions de
coordination et d’ animation de l’ équipe pédagogique et des partenaires extérieurs. Leur rôle est
primordial, depuis l’ accueil du jeune jusqu’ à sa sortie, à l’ école et sur le lieu de stage. Ils
connaissent individuellement les élèves, leur parcours et leurs problématiques.
Aussi était-il très important de bâtir la progression des séances en collaboration avec eux,
d’ animer les séances avec eux, à la fois pour donner une cohérence aux enseignements et pour
assurer l’ autorité de l’ adulte.
œ
/¶DSSRUWGHVWHFKQRORJLHV
L’ internet et le caméscope se sont révélés être des outils indispensables pour VXVFLWHU OD
PRWLYDWLRQ et GpYHORSSHU O¶DXWRQRPLH dans les méthodes de travail et les modes opératoires :
les élèves ont reproduit seuls des étapes déjà accomplies en groupe et ils ont dû organiser des
informations pour pouvoir les communiquer. Surtout, FHVVLWXDWLRQVSHUPHWWHQWDX[pOqYHVHQ
GLIILFXOWpG¶rWUHDFWLIV. Ils prennent conscience de leurs possibilités et réalisent un produit fini
très rapidement. « 3DUFH TXH FH VRQW GHV VXSSRUWV G¶LQIRUPDWLRQ >O¶XVDJH GHV QRXYHOOHV
WHFKQRORJLHV@ VXSSRVH O¶RUJDQLVDWLRQ HW O¶DVVLPLODWLRQ GH VDYRLUV « 3DUFH TXH FH VRQW GHV
RXWLOVH[LJHDQWVOHVUpDOLVDWLRQVTX¶LOVSHUPHWWHQWVRQWYDORULVDQWHVHWMXVWLILHQWWRXVOHVHIIRUWVGH
OD SDUW GHV pOqYHV »22. Les productions sont en effet le fruit d’ un long travail et les élèves
réalisent ainsi qu’ ils sont capables de mener à bien un projet. Par ailleurs, les séances sur
traitement de texte ont été réexploitées pour la validation du B2i.
-H PH VXLV IRUPpH j O¶DXGLRYLVXHO HQ PrPH WHPSV TXH OHV pOqYHV. J’ ai passé beaucoup de
temps à apprendre la manipulation du caméscope et du banc de montage. Et j’ ai vite réalisé qu’ il
ne suffit pas de connaître la technique pour réaliser un bon film et pour encadrer une équipe
d’ apprentis réalisateurs. En effet, je me suis vite heurtée à mon propre manque de connaissances
en terme d’ éducation à l’ image : quel plan choisir en fonction du sens que l’ on veut exprimer ?
Quelle pertinence a cette image dans le cadre de l’ interview ? Comment ne pas lasser ? Quelle
utilité du hors-champ à ce moment précis ?
J’ ai très vite ressenti la nécessité de me former à l’ audiovisuel avant d’ entamer un projet de cette
sorte avec des élèves. En effet, pour être valorisant, le film doit être impérativement réussi. Les
élèves en difficulté ont besoin d’ être fiers d’ eux-mêmes et de leur travail. En contrepartie, je ne
pense pas que nous aurions pu passer des séances à découper le film scène par scène, à envisager
les plans, à repérer les lieux, à renouveler les essais. Et mon objectif premier était bien de donner
aux élèves un maximum d’ autonomie : j’ étais comme un producteur qui fournit les moyens,
organise le travail et assure les relations avec les partenaires. Les élèves devaient réfléchir, faire
des choix, se heurter aux difficultés techniques, être critiques. Mais si j’ avais eu davantage de
formation préalable, j’ aurais probablement pu délivrer des conseils plus avertis et plus efficaces.
/HU{OHGXGRFXPHQWDOLVWHGDQVOHSURMHWSHUVRQQHOGHO¶pOqYH
œ
$LGHUO¶pOqYHjUpIOpFKLUVXUOXLPrPH
Ministère de l’ Education Nationale. &RQWULEXWLRQGHVWHFKQRORJLHVQRXYHOOHVDX[VWUDWpJLHVG¶DLGHDX[pOqYHVHQ
GLIILFXOWp p. 295
22
32
Le documentaliste a des compétences en terme de questionnement sur les représentations.
Développer chez l’ élève l’ habitude de formuler des questions pour une recherche documentaire
l’ aide à cerner son objet de recherche ou de débat et, par extension, à préciser sa pensée : il
dispose ainsi d’ une méthode et d’ outils pour UpIOpFKLUVXUVRQSURMHWSHUVRQQHO.
En outre, le documentaliste comprend la problématique de l’ insertion professionnelle, utilise les
nouvelles technologies, sait accueillir, écouter, négocier et gérer des débats. Il aide l’ élève à
mieux se connaître, à s’ interroger efficacement pour trouver la meilleure solution. Il l’ amène à
accepter l’ erreur comme un moyen de progresser, à réfléchir sur ses propres procédures et à
s’ auto-évaluer.
Le Conseiller d’ Orientation Psychologue, quant à lui, aide l’ élève à GpILQLU VRQ SURMHW
SHUVRQQHO : il envisage avec lui les différentes filières de formation, le conseille dans son choix
de métier, travaille sur la représentation de soi, les motivations, les intérêts et les aptitudes de
l’ élève.
Son activité peut être enrichie par l’ implication du documentaliste : en amont ou en aval d’ un
entretien, l’ élève peut rechercher des informations qui lui permettront de découvrir ou
d’ approfondir une filière, un métier. Le documentaliste donne à l’ élève les outils pour rechercher
une adresse, contacter une école, un professionnel, écrire une lettre de demande de stage. Il peut
mener en collaboration avec le COP des séances sur la connaissance de soi et sur la découverte
du système éducatif. La multiplicité des intervenants garantira à l’ élève une plus grande
objectivité des informations et l’ aidera à se construire une opinion personnelle.
J’ ai regretté de ne pouvoir animer de séance en collaboration avec la COP, mais nos emplois du
temps n’ étaient guère compatibles. Et les élèves de CIPPA ont des entretiens réguliers avec elle,
au moins un par trimestre. L’ animateur me disait à ce propos constituer le lien entre elle et moi,
entre la connaissance de soi et la recherche d’ informations.
œ
$LGHUO¶pOqYHjIDLUHGHVFKRL[UDLVRQQpV
« /HMHXQHFRQVWUXLWVRQRULHQWDWLRQDXOLHXGHODVXELU«1XOQHSHXWGpFLGHUjVDSODFH3RXU
HIIHFWXHUVRQFKRL[LOUHoRLWLQIRUPDWLRQDLGHHWFRQVHLO »23
En matière d’ information sur les métiers, les élèves en échec scolaire n’ ont souvent pour seule
référence que leurs pairs, c’ est-à-dire leur famille ou le groupe dont ils font partie. Ils n’ ont pas
suffisamment confiance en leurs possibilités pour aller chercher l’ information par eux-mêmes et
ont trop tendance à demander autour d’ eux. Dans Motivation, projet personnel, apprentissages24,
Monique Croizier considère que ce type de comportement peut être porteur de désinformation.
L’ élève se fie à son environnement proche et n’ a qu’ une vision parcellaire, voire erronée, de la
réalité des choses. Dans ce contexte, je considère que mon rôle est bien de fournir à l’ élève le
moyen de V¶LQIRUPHUSRXUIDLUHGHVFKRL[HQWRXWHDXWRQRPLH J’ ai essayé d’ amener les élèves
à tenir compte de leurs possibilités et de leurs goûts personnels et non pas seulement de critères
matériels, tels que la rémunération ou le lieu de formation.
En effet, dans le domaine de l’ orientation, le documentaliste a un rôle primordial pour
accompagner l’ élève dans ses recherches. Il l’ aide à se repérer dans les fichiers de l’ ONISEP ou
du CIDJ (Centre d’ Information et de Documentation pour la Jeunesse), il lui donne les moyens
de s’ informer sur les métiers mais aussi sur le monde du travail. Pour cela, les fichiers papier,
l’ internet, les cédéroms ou les vidéos sont des outils précieux. L’ utilisation de la documentation
sur l’ orientation peut être même un moyen de faire venir au CDI des élèves qui jusque là n’ en
23
24
Rapport annexé BO N° 4 du 31 août 1989, p. 20
Croizier, Monique 0RWLYDWLRQSURMHWSHUVRQQHODSSUHQWLVVDJHV, chap. 1
33
voyaient pas l’ utilité. Ainsi, dans le cadre des projets présentés, OHV pOqYHV GH &,33$ RQW
GpFRXYHUWOH&',FRPPHXQOLHXGHUHVVRXUFHVVXUOHVPpWLHUVHWOHPRQGHGXWUDYDLO, et pas
seulement comme un lieu de lecture ou de recherches dans le cadre scolaire.
Le documentaliste peut même faire du CDI un « FHQWUHGHUHVVRXUFHVGXPRQGHpFRQRPLTXHHW
GHV ILOLqUHV GH IRUPDWLRQ »25. Il peut choisir de réaliser un pôle emploi, notamment en Lycée
Professionnel, et diffuser des offres d’ emploi, des plaquettes d’ établissements scolaires, des
informations sur les forums de métiers, ou proposer des visites d’ entreprises, des aides aux
techniques de recherche d’ emploi. Il est le lien entre le monde scolaire et le monde de
l’ entreprise.
&21&/86,21
De la mise en place de forums des métiers aux journées portes ouvertes, des circulaires
officielles aux projets d’ établissement, l’ élaboration du projet personnel de l’ élève prend
actuellement de plus en plus d’ importance. La pression est d’ autant plus forte que le monde
professionnel exige l’ acquisition de compétences multiples et la capacité à s’ adapter aux
changements, liés entre autres au développement des technologies. Bien souvent, il faut pouvoir
changer de métier en cours de vie. Mettre en œ uvre des projets permet à l’ élève d’ expérimenter
des démarches de recherche, de réflexion et de réalisation qui lui donnent des clés pour
construire son avenir et développer son adaptabilité au marché du travail.
Pour les élèves en difficulté, OH&',GRLWrWUHXQOLHXGHUHVVRXUFHVHW G¶DLGH où ils peuvent
exprimer sans crainte leurs interrogations et trouver l’ aide nécessaire pour s’ informer, rechercher
les lieux de formation, contacter des organismes, recueillir de la documentation. « 1H SDV
RXEOLHUTXHPHWWUHXQpOqYHDXFHQWUHGXV\VWqPHpGXFDWLIF¶HVWDXVVLOXLGRQQHUOHVPR\HQVGH
V¶LQIRUPHU VHXO HW G¶DJLU GH IDoRQ DXWRQRPH SRXU YLVHU VRQ LQVHUWLRQ GDQV OH PRQGH
SURIHVVLRQQHO ».26 En effet, l’ élève doit pouvoir acquérir dans son établissement scolaire des
savoirs et des compétences qui feront de lui un citoyen responsable, inséré socialement et
professionnellement. Grâce à ces deux projets, les élèves se sont ainsi enrichis d’ une meilleure
connaissance d’ eux-mêmes et du monde du travail. Ils se sont initiés à l’ informatique et à la
vidéo numérique. Ils ont pris confiance en eux-mêmes mais aussi en l’ adulte.
En tant que documentaliste, j’ ai pu mettre en valeur la nécessité d’ acquérir des compétences
documentaires qui permettent aux élèves en difficulté d’ améliorer leur expression, de développer
leur autonomie et d’ enrichir leurs représentations.
Pourtant, il est difficile pour les élèves d’ avoir une vision à moyen ou à long terme de ce futur.
Alors que l’ éducation à l’ orientation s’ adresse en priorité aux élèves en difficulté, ces derniers la
vivent depuis des années comme une sanction. Par la suite de difficultés scolaires, ils ont été
orientés vers des filières SDUGpIDXWsans que soient toujours pris en compte leurs désirs et sans
avoir le choix. En un an, l’ école leur demande de choisir un métier, alors qu’ ils sont investis d’ un
sentiment d’ impuissance face à leur devenir. Or, certains élèves n’ ont pas le niveau pour intégrer
un apprentissage, d’ autres ne sont pas prêts à suivre un cursus scolaire traditionnel. Et leurs
difficultés personnelles sont parfois telles qu’ ils se refusent à envisager un avenir.
Maintenant que ces projets sont achevés, j’ ai le sentiment que les membres de l’ équipe
éducative, et en particulier le documentaliste, veillent avant tout à développer chez ces élèves des
compétences qui préparent au mieux leur intégration dans la société. Peut-être l’ objectif est-il
avant tout de OHXUUHGRQQHUFRQILDQFHHQHX[, de OHXUSHUPHWWUHG¶DFTXpULUXQHDXWRQRPLH
25
26
Bayard-Pierlot, Jacqueline / Birglin, Marie-José/H&',DXFRHXUGXSURMHWSpGDJRJLTXH, p.152
/H&',DXFRHXUGXSURMHWSpGDJRJLTXH, p.153
34
suffisante dans la vie quotidienne, de OHV UHQGUH FDSDEOHV G¶HVSULW FULWLTXH HW GH FXULRVLWp à
l’ égard de leur environnement. Très peu d’ entre eux trouveront une solution dans l’ immédiat
mais il est primordial de les responsabiliser par rapport à leur avenir et de leur transmettre des
outils efficaces qui les aideront plus tard à pouvoir s’ adapter et évoluer positivement.
Le documentaliste doit donc être particulièrement disponible pour ces élèves qui ont des
difficultés scolaires mais aussi personnelles, il ne peut faire l’ impasse sur leur histoire et sur
leurs conditions de vie. Il est une personne ressource qui peut les aider au quotidien, les écouter
et les conseiller. Finalement, l’ une des finalités de notre métier ne se situe-t-elle dans
l’ accompagnement de ces élèves en difficulté ?
35
6200$,5('(6$11(;(6
/HSURMHWG¶H[SRVLWLRQ
Questionnaire sur les métiers
Annexe 1
Réalisation d’ une fiche métier : grille de questionnement
Annexe 2
Exercice sur l’ internet
Annexe 3
Le résumé de la fiche métier
Annexe 4
Deux exemples de résumés d’ élèves : coiffeur et vendeur
Annexe 5
/HSURMHWYLGpR
La lettre à Mme Moreau
Annexe 6
Les questions de l’ interview
Annexe 7
36
48(67,211$,5(685/(60(7,(56
$11(;(
Ce questionnaire est individuel et anonyme. Il sera utile au documentaliste pour t'
aider à
t'
informer sur les métiers.
/
,1)250$7,21685/(60(7,(56
&RQQDLVWXOHVOLHX[RWXSHX[WURXYHUGHODGRFXPHQWDWLRQVXUOHVPpWLHUVHWRXOHV
HQWUHSULVHV"
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------(VWXGpMjDOOpHGDQVXQGHFHVOLHX["
Oui (passe aux questions Œ)
Non (passe aux questions)
4XHVWLRQVŒ
2HVWXDOOpH"
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------$VWXWURXYpOHVUpSRQVHVjWHVTXHVWLRQV"
Oui.
Non (pourquoi ?) :------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------3HX[WXQRWHUODRXOHVUDLVRQVTXLW
RQWDPHQpjWHUHQGUHGDQVFHOLHX ?
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------(VWFHTXHWXDVpWpELHQDFFXHLOOLH"
Oui
Non
4XHVWLRQV 
Pour quelle(s) raison(s) n'
y es-tu pas allé(e) ?
Je suis un peu intimidé(e) par les lieux que je ne connais pas
Je pense que ça ne sert à rien
Je préférerais être accompagné(e)
Je n'
ai rien à y chercher de particulier
Autre (précise) : ----------------------------------------------------------------------------------------
37
/(&',
Sais-tu où tu peux trouver de la documentation sur les métiers au CDI ?
Oui (précise )-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Non
Connais-tu un ou des sites Internet qui t'
informent sur les métiers ?
Oui
Non
6LRXL lesquels ---------------------------------------------------------------------------------------------6LQRQ souhaites-tu en découvrir ? ----------------------------------------------------------------------6DLVWXTXHOOHVUHYXHVWXSHX[WURXYHUDX&',SRXUW
LQIRUPHUVXUOHVPpWLHUVHWOHPRQGHGX
WUDYDLO"
Oui
Non
EXPRESSION LIBRE
(FULVFHTXHWXDVHQYLHGHGLUHVXUOHTXHVWLRQQDLUHVXUOHFKRL[G
XQPpWLHUOHVTXHVWLRQV
TXHWXWHSRVHVO
LQIRUPDWLRQTXLWHPDQTXH«
----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
38
&RQQDLVWXOHVOLHX[RWXSHX[WURXYHUGHODGRFXPHQWDWLRQVXUOHVPpWLHUVHWRXOHVHQWUHSULVHV"
2HVWXDOOpH"
/DFRQQDLVVDQFHGHVOLHX[G
LQIRUPDWLRQ
12
10
8
6
Les lieux que l'élève connaît
Les lieux où l'élève est allé
4
2
0
Chambre
des
métiers
CIO
ANPE
Mission
Locale
CDI
GRETA
CCI
AFPA
39
3HX[WXQRWHUODRXOHVUDLVRQVTXLW
RQWDPHQpjWHUHQGUHGDQVFHOLHX"
/HVUDLVRQVTXLO
RQWDPHQpjV
\UHQGUH
6
5
4
3
2
1
0
Trouver un
apprentissage
Renseignements sur
métier/formation
Curiosité
"Obtenir un avenir"
Aide
40
6DLVWXRWXSHX[WURXYHUGHODGRFXPHQWDWLRQVXUOHVPpWLHUVDX&',"
&RQQDLVWXXQRXGHVVLWHV,QWHUQHWTXLW
LQIRUPHQWVXUOHVPpWLHUV"
6DLVWXTXHOOHVUHYXHVWXSHX[WURXYHUDX&',SRXUW
LQIRUPHUVXUOHVPpWLHUVHWOHPRQGHGXWUDYDLO"
12
10
8
oui
6
non
4
2
0
Documentation au CDI sur les
métiers
Site internet sur les métiers
Revue sur les métiers et le monde
du travail
41
5($/,6$7,21'
81(),&+(0(7,(5
$11(;(
2EMHFWLI construire une grille d'
analyse d'
un métier
&RQVLJQHV
une photo illustrant un métier, note dans le tableau ci-dessous les questions que tu te poses. Imagine les réponses.
'DQVXQSUHPLHUWHPSV à partir d'
Désigne un rapporteur qui présentera le travail du groupe.
'DQVXQVHFRQGWHPSV à partir de la fiche ONISEP, trouve dans quelle rubrique tu peux trouver la réponse à ta question.
2UJDQLVDWLRQ groupe de trois élèves
LE METIER :
/$48(67,2148(-(0(326(
/$5(3216(48(-
,0$*,1(
/$5(3216('211((3$5/$),&+(
21,6(3
42
$11(;(
/(6,7('(/¶21,6(3
2EMHFWLI rWUH FDSDEOH GH QDYLJXHU VXU OH VLWH GH O¶21,6(3 KWWSZZZRQLVHSIU HW GH
UHFKHUFKHUXQHILFKHPpWLHUSDUGRPDLQHG¶DFWLYLWpRUGUHDOSKDEpWLTXHHWFHQWUHG¶LQWpUrW
&RQVLJQH
1) Indique par une croix l'
entrée utilisée dans les recherches suivantes :
-H
FKHUFKH
OHV
KRUDLUHV GH WUDYDLO
G¶XQHFDLVVLqUH
-H
FKHUFKH
j
GpFRXYULUOHVPpWLHUV
GXVRFLDO
-HYHX[XQPpWLHUR
MH
PH
GpSODFH
VRXYHQW
-H FKHUFKH TXHOOH
IRUPDWLRQ LO IDXW
SRXUrWUHFKDUFXWLHU
-H YHX[ WUDYDLOOHU HQ
FRQWDFW DYHF OHV
DQLPDX[
'RPDLQHG¶DFWLYLWp
2UGUHDOSKDEpWLTXH
&HQWUHG¶LQWpUrW
&KRLVLVXQPpWLHUTXLW
LQWpUHVVHHQUHFKHUFKDQWSDUODOLVWHDOSKDEpWLTXHOHVGRPDLQHV
G
DFWLYLWpRXOHVFHQWUHVG
LQWpUrW
Le métier que je choisis :
,PSULPHODILFKHPpWLHUFRUUHVSRQGDQWHHWUHPSOLVOHWDEOHDXVXLYDQW
43
1RPGXPpWLHUFKRLVL
$FWLYLWpV
&RQGLWLRQV
GHWUDYDLO
4XDOLWpVUHTXLVHV
6DODLUH
1LYHDXG
pWXGH
$XWUHLQIRUPDWLRQ
44
$11(;(
NOM :
Prénom :
Classe :
RESUME DE LA FICHE METIER
2EMHFWLI j SDUWLU GH OD ILFKH PpWLHU FKRLVLH VXU OH VLWH GH O
21,6(3 http://www.onisep.fr
UpGLJHXQUpVXPpSRXUO
H[SRVLWLRQVXUOHVPpWLHUV
4XHOTXHVFRQVHLOVSRXUUpVXPHU
-
repérer les titres
repérer les mots en gras ou en italique
s'
appuyer sur les paragraphes du texte
ne pas accumuler trop de détails. Essayer de généraliser (ex: ne pas écrire « des pommes, des
poires », mais écrire « des fruits »)
faire des phrases complètes. Ne pas oublier d'
ajouter des mots de liaison (et, car, mais, en
effet …)
reformuler avec ses propres mots
1RWHOHPpWLHUTXHWXDVFKRLVL
5HPSOLVOHWDEOHDXVXLYDQW
$FWLYLWpV
&RQGLWLRQV
GHWUDYDLO
4XDOLWpVUHTXLVHV
6DODLUH
1LYHDXG
pWXGH
45
5pGLJHOHUpVXPp
-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
021(9$/8$7,21
OUI
(VWFHTXHM¶DLpFULWGHVSKUDVHV
FRXUWHV"
(VWFHTXHM
DLIDLWDWWHQWLRQjQH
SDVPHWWUHWURSGHGpWDLOV"
(VWFHTXHM
DLELHQUpVXPpWRXVOHV
SDUDJUDSKHVGXWH[WHLQLWLDO"
(VWFHTXHM
DLYpULILp
O
RUWKRJUDSKHGHFHTXHM
DLpFULW"
(VWFHTXHM¶DLUHIRUPXOpDYHFPHV
SURSUHVPRWV"
NON
Pas
suffisamment
/
(9$/8$7,21'8
'2&80(17$/,67(
OUI
NON
Pas
suffisamment
46
47
48
$11(;(
Classe de CIPPA
Groupe 2
Lycée Jean – Rostand
58000 Nevers
Madame Anne-Marie Moreau
Proviseure du lycée Jean Rostand
9 boulevard Saint – Exupéry
58000 Nevers
Nevers, le 10/12/2002
Madame La Proviseure,
Notre classe de CIPPA groupe 2 souhaiterait visiter votre établissement.
Nous voudrions interroger et filmer les personnels du lycée pour nous
entraîner à l’ entretien professionnel.
Nous vous remercions de bien vouloir nous autoriser à contacter différents employés
du lycée.
Nous vous prions d’ agréer, Madame, l’ expression de nos sentiments
respectueux.
La classe de CIPPA.
49
/,67('(648(67,216
$11(;(
1. Pouvez-vous vous présenter ?
2. Depuis combien de temps travaillez-vous au Lycée ?
3. Quel diplôme avez-vous ?
4. Comment avez-vous fait pour obtenir ce diplôme ?
5. Etes-vous responsable d’ une équipe d’ une ou de plusieurs personnes ?
6. Travaillez-vous seule ou avec d’ autres personnes ? Si oui, lesquelles ?
7. Avez-vous un budget ?
8. Avez-vous des tâches administratives ? (question destinée à Mme Meynier, chef des
travaux)
9. Quel genre de tâches administratives faites-vous ? (question destinée aux secrétaires)
10. Quelles capacités faut-il pour exercer ce métier ?
11. Souhaitez-vous ou pouvez-vous progresser dans votre métier ?
12. Aimez-vous ce que vous faites ?
13. Est-ce qu’ il y a une tenue particulière pour exercer ce métier ?
14. Si cela ne vous dérange pas, pouvez-vous nous dire combien vous gagnez ?
15. Avant de devenir (PpWLHU), qu’ avez-vous fait d’ autre ?
50
%,%/,2*5$3+,(
7(;7(62)),&,(/6
FRANCE. Ministère de l'
Education Nationale, de la Recherche et de la Technologie. Circulaire
n° 86-123 du 13 mars 1986 : Missions des personnels exerçant dans les centres de documentation
et d'
information. %XOOHWLQ2IILFLHOGHO¶(GXFDWLRQ1DWLRQDOH, n° 12, 27 mars
1986, p. 1147-1149.
FRANCE. Ministère de l'
Education Nationale, de la Recherche et de la Technologie. Loi n° 89486 du 10 juillet 1989 : Loi d'
orientation sur l'
Education. %XOOHWLQ 2IILFLHO GH O¶(GXFDWLRQ
1DWLRQDOH, n° spécial n°4, 31 août 1989, 30 p.
FRANCE. Ministère de l'
Education Nationale, de la Recherche et de la Technologie. Circulaire
n° 96-134 du 10 mai 1996 : Mission générale d’ insertion professionnelle des élèves. %XOOHWLQ
2IILFLHOGHO¶(GXFDWLRQ1DWLRQDOH, n° 20, 16 mai 1996, p. 1486.
%52&+85(6
Lycée Professionnel Jean Rostand. 5DSSRUWGXFKHIG
pWDEOLVVHPHQW$QQpHVFRODLUH.
10 p.
Lycée Professionnel Jean Rostand. 3{OH,QVHUWLRQ-HDQ5RVWDQG$QQpH.
0212*5$3+,(6
6XUODSpGDJRJLHGHVpOqYHVHQGLIILFXOWp
Blanchard, Elisa / Duval, Dominique. /HVFRPSpWHQFHVVRFLDOHVO
DFFRPSDJQHPHQWGHVMHXQHV
HQGLIILFXOWp. Reims : CRDP Champagne-Ardenne, 2000. 272 p.
Clément, Francine/Girardin, Andrée. (QVHLJQHUDX[pOqYHVLVVXVGHO
LPPLJUDWLRQ. Paris : Nathan,
1997. 191 p. (Outils pour la classe).
Descomps, Daniel. /D G\QDPLTXH GH O¶HUUHXU GDQV OHV DSSUHQWLVVDJHV. Paris : Hachette
Education, 1999. 175 p. (Pédagogies pour demain).
FRANCE. Ministère de l'
Education Nationale. &RQWULEXWLRQ GHV WHFKQRORJLHV QRXYHOOHV DX[
VWUDWpJLHVG
DLGHDX[pOqYHVHQGLIILFXOWp. CRDP Poitiers, 1995. 305 p.
Meirieu, Philippe. $SSUHQGUH RXL PDLV FRPPHQW" Paris : ESF, 1987. 4. Où l’ on cherche à
établir que l’ on ne va pas simplement de l’ ignorance au savoir sans obstacle ni conflit. p. 58-62.
Monthus, Marie. $SSUHQGUH O¶DXWRQRPLH DX &',. Paris : Hachette éducation, 1997. 208 p.
(Pédagogies pour demain).
Presmycki, Halina / De Peretti, André, préf. 3pGDJRJLHGLIIpUHQFLpH. Paris : Hachette Education,
1991. 159 p. (Pédagogies pour demain).
51
6XUOHSURMHWSHUVRQQHOGHO¶pOqYH
Bayard-Pierlot, Jacqueline / Birglin, Marie-José. /H&',DXFRHXUGXSURMHWSpGDJRJLTXH. Paris :
Hachette Education, 1991.159 p. (Pédagogies pour demain).
Croizier, Monique. 0RWLYDWLRQ SURMHW SHUVRQQHO DSSUHQWLVVDJHV. ESF, 1995. 143 p.
(Pédagogies).
Etienne, Richard et al. /H SURMHW SHUVRQQHO GHO
pOqYH. Paris : Hachette Education, 1992. 207 p.
(Pédagogies pour demain).
Pradel-Pavési, Christien / Réal-Douté, Monique. &RQVWUXLUH GHV SURMHWV DYHF OHV pOqYHV. Paris :
Hachette Education, 1999. 91 p.(Communication).
3(5,2',48(6
Guernier, Marie-Cécile. Les enseignants, les documentalistes et l’ illettrisme ou quand les
représentations s’ en mêlent. /LUH DX /\FpH 3URIHVVLRQQHO, printemps 2000, n° 32, p. 4-5. Titre
du n° : l’ illettrisme
Schiff, ClaireLes élèves nouveaux-arrivants : obstacles linguistiques et motivation scolaire.9(,
(QMHX[, octobre 2001, hors-série n°3. Titre du n° : la scolarisation des élèves nouvellement
arrivés en France.
6,7(,17(51(7
MJENR. /¶(GXFDWLRQ j O¶RULHQWDWLRQ >HQ OLJQH@ Paris : MEN. [document consulté le
04/12/2002]. Disponible à l’ adresse : www.education.gouv.fr/orient/educ.htm
9,'(2&$66(77(
$XVHUYLFHGHO¶HQIDQW . CNDP, 1997 . 1 vidéocassette VHS 1/2 pouce, 13 min. : coul., SECAM,
sonore. + 1 livret (11 p.). (Images à lire ; 4058)
52
$FFRPSDJQHUGHVpOqYHVGH&,33$GDQVODFRQVWUXFWLRQ
GHOHXUSURMHWSHUVRQQHO
5(680(
Présentation de deux projets menés avec deux classes CIPPA, l’ une constituée d’ élèves en échec
scolaire, l’ autre de primo-arrivants. Une exposition sur les métiers vise à confronter leurs
représentations et à travailler l’ expression écrite ; un film vidéo, à partir d’ interviews de trois
membres du personnels du lycée, cherche à favoriser la relation avec un employeur et à
développer la communication orale.
0276&/(6 élève en difficulté / projet personnel de l’ élève /
l’ orientation / écriture du support audiovisuel / représentation mentale
éducation
à
Lycée Professionnel Jean Rostand
Nevers
53

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