Le Statut de la femme dans le Roman comique
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Le Statut de la femme dans le Roman comique
「프랑스문화연구」 제20집 2010. pp. 373~399 Le Statut de la femme dans le Roman comique 1)LEE Hyeon-Jin* Table des matières Introduction Ⅰ. L’action involontaire des femmes Ⅰ-1. La femme, objet d’amour Ⅰ-2. La femme, vecteur de transformation pour l’amant Ⅱ. L’action volontaire des femmes Ⅱ-1. L’incognito féminin Ⅱ-2. L’exaltation de la fidélité Conclusion Bibliographie Introduction Les romans de la première moitié du 17ème siècle témoignent de deux tendances, comme le remarque P. Bornecque, « La première moitié du XVIIe siècle voit s’épanouir une double * Chon-buk National university 374 LEE Hyeon-Jin mode : celle des romans historiques comme Le Grand Cyrus, dont les dix tomes, remplis d’exploits héroïques et amoureux, enchantèrent tout le siècle par leur romanesque échevelé et leurs héros illustres, rois, princes ou empereurs ; celle des romans « comique », qui prennent pour sujet les laideurs de l’existence et s’efforcent de faire rire avec l’évocation de la vie de personnages « moyens », bourgeois ou gens du peuple »1). Dans les romans héroïques ou sentimentaux, tel L’Astrée d’Honoré d’Urfé, la femme est souvent un objet d’amour idéalisé, paré de toutes les grâces et de toutes les perfections. Dans les romans dits « comiques », le rôle et le statut de la femme sont plus ambigüs, et les figures féminines sont plus diverses : dans le Francion, par exemple, l’entremetteuse côtoie la femme de qualité et la paysanne. Toutefois on peut remarquer que dans ces romans les héros sont le plus souvent masculins, la femme passant généralement au second plan de l’action : Céladon est le véritable protagoniste de l’Astrée, Naïs, objet de quête pour Francion, a bien peu de part à l’action, et la jeune anglaise du Page disgracié n’occupe qu’un bref épisode du roman. Mais, au sein de cette veine comique, le Roman comique de Scarron nous présente des femmes très différentes de celles des romans héroïques ou sentimentaux, et qui ne correspondent pas à la ème représentation traditionnelle de la femme au 17 siècle. En effet, les femmes sont toutes, plus ou moins, des éléments moteurs de l’action 1) P. Bornecque, Le comédie et le burlesque dans le “Roman comique” de Scarron, XVIIe siècle, 110-111, 1976, p. 25-43 Le Statut de la femme dans le Roman comique 375 du Roman comique : dans leurs rapports avec les hommes, comme au sein de l’intrigue, les femmes sont présentées en action, ou bien provoquent l’action des autres personnages. On peut dire tout d’abord que ce rôle essentielle de la femme est une grande nouveauté, compte tenu du rôle borné accordé à la femme ème dans la société du 17 siècle. Evidemment certaines femmes intelligentes ont pu jouer un rôle important dans la société ; en particulier, à la cour et dans les salons comme le signale G. Truc : « Les femmes s’y sont fortifiées ou grandies du rôle qu’elles y ont joué. Elles ont été les institutrices d’un siècle ou deux de puissance et de poix civile. Elles ont fait quitter aux hommes, tout frémissants encore de luttes ardentes, la cuirasse et l’épée ; elles leur ont appris à parler et les ont rangés sous leur douces lois. On a vu le terrible massacreur trembler devant un sourire et s’essayer au madrigal. Ce qui était un amusement est devenu une habitude, les violences se sont adoucies ou tapies, les plaisirs, les douceurs, les discours et les ris ont abattu les ardeurs belliqueuses ; un prestige croissant a enveloppé ces compagnes aimables, jusque-là traitées un peu en vue de leur utilité ménagère, et à qui l’esprit joint à la grâce donnait un charme intimidant. Elles en ont profité »2). Mais, ces femmes ne ressemblent en rien aux personnages féminins du Roman comique : les femmes fréquentent les salons et la cour, ce qui n’est pas le cas des comédiennes de province décrites par Scarron. Leur rôle est indirect, souvent subordonné aux intrigues 2) G. Truc, Histoire illustré de la femme, Editions d’Histoire et d’art, Librairie Plon, 1941, p. 18. 376 LEE Hyeon-Jin sentimentales et cantonné au domaine du coeur. Alors que ces femmes ont un rôle relativement passif, les héroïnes de Scarron ont un rôle actif et fonctionnent au sein du roman comme des éléments moteurs. D’autres part, les personnages féminins de Scarron échappent également au destin subi par les héroïnes des romans sentimentaux ou héroïques. En effet ce type de littérature présente le plus souvent des histoires d’amours contrariés, de larmes, de gémissements, de deuil, de retraite, accompagnées de longs dialogues sur ces états. Généralement, les intrigues de ces romans retracent l’amour de chastes jeunes filles perturbé par des parents autoritaires et l’auteur nous conte ainsi l’histoire tragique d’une femme délaissée, s’achevant par la mort ou le couvent. Mais, dans le Roman comique, ce qu’on peut appeler de manière anachronique le « féminisme plaisant » de Scarron entre en action et donne un rôle actif à la femme qui devient maîtresse de son destin. Quel est donc précisément le statut de la femme dans le Roman comique ? On peut en fait dire qu’avec le Roman comique, Scarron fait passer les femmes au premier plan de la vie et du roman. Pour étudier le statut de la femme dans le Roman comique, nous avons choisi de suivre deux axes de réflexion. Tout d’abord, nous nous attacherons dans une première partie à examiner l’action involontaire de la femme, en particulier celle de l’Etoile, Angélique, et de sa mère La Caverne. La caractéristique de ces femmes est de provoquer l’action d’autrui, même si elles ne sont pas elles mêmes Le Statut de la femme dans le Roman comique 377 directement les sujets de l’action : elles exercent une grande influence sur les autres personnages, et donc jouent un rôle très important dans l’économie du roman. Dans notre seconde partie, nous examinerons l’action volontaire des femmes, essentiellement des héroïnes des trois Nouvelles espagnoles insérées dans le roman. En effet, ces femmes sont pleinement auprès des hommes. C’est par elles que Scarron attribue un statut nouveau à la femme, qui sort alors du rôle borné dans lequel la cantonnait une société essentiellement dirigée par des hommes. Ⅰ. L’action involontaire des femmes Scarron, dans son Roman comique, présente à peu près une vingtaine de femmes. Selon la distinction de Yves Giraud,3) on peut ranger le personnel féminin en trois catégories différentes. Tout d’abord, le Roman comique nous offre quelques figures féminines qui appartiennent au « côté cour », au pur romanesque : la princesse Porcia, Victoria Portocarrero, Sophie « mestre de camp » et vice-roi de Naples, les deux sœurs Dorothée et Féliciane de Monsalve. Toutes les femmes de cette catégorie sont les héroïnes des nouvelles espagnoles insérées dans le roman. Deuxièmement, en regard de ces figures idéalisées, la société provinciale du Mans offre certaines silhouettes qui représentent le côté trivial, commun : Mlle de la Rappinière et autres masques de burlesque, Mme Bouvillon. Enfin, on 3) Y. Giraud, La femme dans le Roman comique, Il Romanzo Al tempo di luigi XIII, Nizet, Paris, p. 121. 378 LEE Hyeon-Jin trouve les femmes qui appartiennent au monde du théâtre ou au récit rétrospectif de Destin : L’Etoile, Angélique et sa mère La Caverne, et la mère de celle-ci, deux sœurs, Mlle de Léri et Mlle de Saldagne et Inézilla l’opératrice. Parmi ces femmes, on trouve une femme qui n’est pas personnage actif, mais provoque l’action d’autrui : celles des hommes. C’est l’Etoile. Voyons le portrait de l’Etoile(chapitre VIII tel que le peint Scarron) : « il n’y avait pas au monde de fille plus modeste et d’une humeur plus douce ». Elle a une extrême modestie, elle est pleine de réserve et elle présente une douceur faite de bonne grâce et de bon coeur, de complaisance polie et de timidité. A la vérité, comme son nom l’indique c’est l’Etoile qui est au centre de tout le trame, parce qu’elle est aimée de tous les hommes, Saldagne et Saint-Far, Ragotin, La Rappinière et Rancune. Dans cette composition, l’Etoile mène une action involontaire : sa séduction opère toujours malgré sa volonté. L’autre jeune comédienne, Angélique, est un double de l’Etoile. Angélique est présentée comme enjouée, libre. Comme l’Etoile pour Destin, Angélique est le moteur indirecte des actions de son amoureux Léandre. Elle se révélera une amoureuse tout à la fois passionnée et raisonnable pour Léandre. Même si elles sont d’humeurs différentes, elles ont en commun de provoquer l’action des héros. Les femmes provoquent l’homme vers l’action. Le Statut de la femme dans le Roman comique 379 Ⅰ-1. La Femme, objet d’amour Dans le Roman comique, la femme est constamment recherchée et poursuivie. Toutes les femmes du roman subissent les atteintes de l’amour comme l’a remarqué Y. Giraud : « La femme est le but d’une conquête qui peut emprunter selon les cas des motifs et des démarches de nature fort différente »4). Ce que la femme acquiert en tant qu’objet d’amour, c’est le moyen de provoquer l’action d’autrui sans être directement un personnage actif. Alors, quelle est le rôle de ces femmes qui subissent les passions d’amour dans le Roman comique ? On peut trouver dans l’Histoire illustré de la femme, qui montre bien l’image de la femme dans la littérature du 17e siècle, une description de la femme comme ‘victime de la guerre amoureuse’ : « Les femmes ont subi les passions qu’elles inspiraient et ont étalé plus d’une fois au grand jour la « démesure » où se porte ce même cœur dès qu’il est déchaîné. On les a vues se ruiner, se perdre à plaisir, subir la tyrannie d’indignes élections, trouver jusque dans la honte un moyen d’apaiser leur frénésie »5). Nous allons donc voir comment les femmes font face, dans le Roman comique à la tyrannie et aux passions des hommes et comment elles renversent la situation à leur profit. 4) Y. Giraud. « Image et rôle de la femme dans le Roman comique de Scarron », Onze études sur l’image de la femme au XVIIe siècle, Tubingen, Narr., p. 61. 5) G. Truc, op. cit., p. 16. 380 LEE Hyeon-Jin Scarron, au chapitre XIX de la première partie, écrit « L’Amour, qui fait tout entreprendre aux jeunes et tout oublier aux vieux, qui a été cause de la guerre de Troie et de tant d’autres dont je ne veux pas prendre la peine de me ressouvenir….. ». Etoile est l’Hélène de la guerre de Troie du Roman comique : presque tous les hommes du roman tournent autour d’elle, cherchent à la conquérir dans une rivalité qui dégénère parfois en guerre ouverte. Etant « la plus pure et la plus énigmatique figure féminine du roman »6), Etoile provoque l’amour des hommes. Sans Etoile qui cristallise tous les désirs, l’intrigue et la matière du Roman comique n’existeraient pas. Maurice Lever remarque que l’effet burlesque du livre provient essentiellement des mésaventures de Ragotin en montrant trois registres(réaliste, burlesque, romanesque) du Roman comique. « Scarron déploie dans ces épisodes une science incomparable de la mécanique du rire. L’effet burlesque, surgi d’un fait mineur, se gonfle, s’intensifie progressivement, roule en cascade jusqu’à la catastrophe finale »7). Sans doute, Ragotin et ses mésaventures incarnent le registre comique et burlesque du Roman comique. Mais presque toutes ses mésaventures découlent de son amour pour l’Etoile. Dès le chapitre huitième de la premier partie, on voit Ragotin s’attacher à la troupe comique parce qu’il est attiré par 6) J.-P. Chauveau, Diversité et unité du Roman comique, Mélanges Mongrédien, D’Argences, 1974, p. 166. 7) M. Lever, Le roman français au XVIIe siècle, P. U. F., p. 155-156. Le Statut de la femme dans le Roman comique 381 l’Etoile. Au chapitre X, il jette les mains avec avidité pour se faire valoir auprès d’elle qu’il raconte l’histoire de L’Amante invisible. Pour obtenir ses louanges il hausse la voix et provoque une échauffourée dont il est la victime, avec ce chapeau enfoncé sur sa tête dont il ne peut plus se délivrer, pour la même raison, au chapitre X, il mène la Rancune dans un cabaret, et tâche par son intermédiaire, d’obtenir les bonnes grâces de l’Etoile. Au chapitre XV, Ragotin offre le divertissement musical des orgues et des chants de lutrin comme sérénade à l’Etoile. « Cet homme était le véritable Ragotin qui avait voulu donner une sérénade à Mademoiselle de l’Etoile et s’était adressé pour cela à un petit châtré, organiste d’une église. Ce fut ce monstre, ni homme ni femme, qui chanta le dessus, et qui joua des orgues que sa servante avait apportées ; un enfant de chœur qui avait déjà mué chanta la basse et tout cela pour le prix et somme de deux testons, tant il faisait déjà cher vivre dans ce bon pays du Maire ». Au chapitre XVII, il fait une chute en cascade dans l’escalier. Au chapitre XIV, il aura une autre mésaventure avec son cheval pour avoir voulu accompagner le carrosse des comédiennes. Egalement amoureux de l’Etoile, La Rappinière va lui utiliser des procédés de forban. Il fait en lever l’Etoile et emploie des moyens inavouables pour attirer dans un guet-apens. La passion que l’Etoile inspire aux Saldagne, Saint-Far et Destin sont plus fatales. L’Etoile provoque au moins deux morts : Saldagne, Ragotin. De 382 LEE Hyeon-Jin plus, par la passion de Saldagne, sa rage et sa méchanceté, est poursuivie dans ce roman de comédiens et de mœurs provinciales la veine du roman de cape et d’épée. Enfin, l’Etoile permet l’union du comique, car elle provoque en partie les mésaventures de Ragotin et du tragique, car elle suscite les passions de Saldagne, de Saint-Far même et à plus forte raison de Destin. Qu’elle le veuille ou non, L’Etoile mène le jeu amoureux, elle est Hélène traînant tous les cœurs après soi, les captivant par sa grâce, sa réserve et sa pudeur, ses refus. Enfin, elle est jetée malgré elle dans les tumultes qu’elle suscite, alors qu’elle s’élève au-dessus de tous les hommes, de Destin lui-même, comme une Divinité Comme nous l’avons vu, l’Etoile a de l’influence sur tout le Roman comique, sur son intrigue principale et ses intrigues secondaires et même sur les nouvelles espagnoles qu’elle fait raconter et qu’elle écoute avec plaisir. Mais même si elle n’a pas voulu régler la conduite des autres personnages, devenu objet d’amour, elle provoque, malgré soi, l’action des autres personnages du roman. Ⅰ-2. La femme, vecteur de transformation pour l’amant Dans ce chapitre, on va examiner les femmes qui, par leur action involontaire, vont transformer leurs amants. L’Etoile apparaît comme réservée et pudique, mais elle est capable de résolutions énergiques Le Statut de la femme dans le Roman comique 383 et d’actions hardies. Et Angélique qui est enjouée et libre, légère et badine, se révèlera pour Léandre une amoureuse passionnée et raisonnable. Destin et Léandre, les deux amants, ne sont passés du statut de comédiens occasionnels à celui de comédiens professionnels que par amour. Ces deux héros Destin et Léandre se sont compromis et ont renoncé à leur condition initial. Destin et Léandre se montrent comme des amoureux transformés. Le premier renonce à la gloire par amour, tandis que le second n’a épousé la condition de comédien que par passion pour Angélique. 1. La transformation du statut social « Aussitôt que je vous vis, je ne pus m’empêcher de vous aimer ». A partir du moment où Destin rencontre l’Etoile, l’Etoile règle la destinée de Destin. C’est dans une vigne romaine que Destin va au secours de deux femmes inconnues menacées par un homme brutal. Pour récompense de cette intervention, l’Etoile lève son voile : « Levez-donc notre voile, Léonore, afin que monsieur sache que nous ne sommes pas tout à fait indignes de l’honneur qu’il nous a fait de nous protéger. Elle n’eut pas plutôt m’éblouit. Je n’ai jamais rien vu de plus beau. Elle leva deux ou trois fois les yeux sur moi à la dérobée et, rencontrant toujours les miens, il lui monta au visage un rouge qui la fit plus belle qu’un ange ». Ainsi va naître son amour. Mais l’Etoile disparaît sans qu’il sache où elle demeure. Il va tout faire pour connaître son adresse. Désormais l’amour le tient tout entier et le Destin nous offre l’image la plus complète de l’amoureux transi qui est malade de passion : 384 LEE Hyeon-Jin « (…)mon esprit demeura malade et si partagé entre l’honneur en Candie et l’amour qui me retenait à Rome, que je doutais quelquefois si j’obéirais aux lettres que je recevais souvent de Verville, qui me conjurait par notre amitié de l’aller trouver sans se servir du droit qu’il avait de me commander ». Enfin en dernier lieu, c’est l’Etoile qui règle la fortune de Destin, à partir du moment où il la rencontre, qui le fait hésiter entre la gloire et l’amour, qui fait de lui un valeureux soldat voulant chercher la mort par désespoir, qui l’oblige en quelque sorte à renoncer à sa nouvelle expédition militaire pour s’en faire accompagner et protéger, qui l’entraîne en Belgique et en Hollande et qui en fait provoque son engagement dans la troupe comique et sa carrière d’acteur. En fait, Léandre est devenu acteur par amour pour Angélique. Dans le chapitre V de la seconde partie, il nous raconte son histoire. « Je suis, déclare-t-il, un gentilhomme d’une maison assez connue dans la province ….. Il(le père de Léandre) me veut faire Conseiller au parlement de Bretagne contre mon inclination, dit-il de son père, et c’est pour cela qu’il m’a fait étudier de bonne heure ». On peut deviner la catégorie à laquelle il appartient. Il appartient socialement à la noblesse. Mais, il est enflammé pour une jeune beauté. Troublé par son amour pour Angélique, il ne suit plus ses classes. Sa révolte devient ouverte. « Depuis que je devins amoureux d’Angélique, je n’allai plus au Le Statut de la femme dans le Roman comique 385 collège et ne manquai pas un jour d’aller à la comédie. Les pères jésuites me voulurent remettre à mon devoir, mais je ne voulu plus obéir à de si malplaisants maîtres après avoir choisi la plus charmante maîtresse du monde » Quand la troupe comique quitte la Fléche pour Angers, il prend une résolution désespérée : devenir acteur. « (…)dès la matin, changeant mon habit en celui de mon valet, qui était de ma taille, je le laissa à la Fléche pour vendre mon équipage d’écolier(…..) j’en pris le chemin après vous et vous attrapai à Duretail, où plusieurs personnes de condition qui y couraient le cerf vous arrêtèrent sept ou huit jours. Je vous offris mon service et vous me prîtes pour votre valet, soit que vous fussiez incommodé de n’en point avoir, ou que ma mine et mon visage, qui peut-être ne vous déplurent pas, vous obligeassent à me prendre ». Ainsi, Léandre prouve son amour en quittant une situation, confortable et tous les avantages attachés à son rang. Et d’ailleurs, il accepte les épreuves et les rebuffades pour être près de sa bien-aimée. 2. La transformation du caractère masculin Au chapitre III de la deuxième partie, Scarron nous présente un homme qui passe d’un caractère violent et impétueux à celui d’un amant doux et aimable: c’est le baron de Sigognac. Quand la troupe de la mère de la Caverne et de son mari, prise pour une bande de bohémiens, a été emmenée en son château, le baron de Sigognac 386 LEE Hyeon-Jin manifeste l’impétuosité et la violence de son caractère. « Le bruit que nous faisons et que faisaient les brutaux et les ivrognes qui nous avaient amenés fit sortir d’une salle basse le seigneur du château, suivi de quatre ou cinq casaques ou manteaux rouges de fort mauvaise mine. Il demanda d’abord où étaient les voleurs de bohémiens et nous fit grand peur ; (...) il chargea à grands coups d’épée ceux qui nous avaient pris, qui disparurent en un moment, les uns blessés, les autres fort effrayés ». Au paragraphe suivant, le narrateur décrit son caractère et sa position sociale. « Ce gentilhomme, chez qui nous étions, était fort riche, plus craint qu’aimé dans tout le pays, violent dans toutes ses actions comme un gouverneur de place frontière et qui avait la réputation d’être vaillant autant qu’on le pouvait être. Il s’appelait le baron de Sigognac ; au temps où nous sommes il serait pour le moins un marquis et, en ce temps-là, il était un vrai tyran de Périgord » Mais le baron si rude s’humanise, il prend plaisir à la comédie. « Le baron nous faisait manger à sa table, ses gens nous servaient avec empressement et nous disaient souvent qu’ils nous étaient obligés de la bonne humeur de leur maître, qu’ils trouvaient tout changé depuis que la comédie l’avait humanisé ». Mais, il devient « éperdument amoureux » de la mère de La Caverne. L’amour est entré dans le cœur du baron, mais il n’a pas explosé ; le baron humanisé, subjugué, semble le laisser se montrer avec une retenue toute pleine de délicatesse. Le Statut de la femme dans le Roman comique 387 Il était sans humanité et sans civilité, le voici plein de bonté et de générosité, de discrétion, de prévenances. Cet épisode présente ainsi un personnage masculin que l’amour transforme en l’améliorant. Ainsi, ce seigneur féodal violent et tyrannique, grand chasseur, étranger à l’amour, subitement métamorphosé et humanisé par une comédienne, montrant une véritable délicatesse de sentiments et un amour profond et sincère. Ⅱ. L’action volontaire des femmes Dans cette partie, nous pouvons remarquer sur le pouvoir de narration accordé par Scarron à Inézilla, l’opératrice. L’auteurnarrateur délègue son pouvoir à une femme, Inézilla : elle se charge de raconter les Nouvelles Espagnoles. Nous allons examiner ici des femmes sensiblement différentes des comédiennes décrites plus haut. Les femmes dont nous allons parler renversent le rapport entre l’homme et la femme à leur profit. Ainsi font la princesse Porcia dans l’Histoire de l’amante invisible, Victoria dans A trompeur, trompeur et demi, Sophie dans Le juge de sa propre cause. Par opposition à l’Etoile qui agit toujours involontairement, les femmes des nouvelles espagnoles agissent en pleine conscience. Ainsi, comme le remarque Jacques Morel, elles se présentent « non plus comme une idole ni comme un professeur de galanterie, mais comme l’incarnation d’une certaine bonne santé morale et amoureuse ». Bien que la condition inférieur de la femme soit restée la base de 388 LEE Hyeon-Jin toute société, dans toutes les civilisations, jusqu’à l’époque contemporaine, on peut néanmoins trouver dans le Roman comique un effort visant à donner à la femme un rôle actif. En effet, dans son roman, Scarron engage l’homme à la fidélité et à la constance. Les lois de la guerre amoureuse ont imposé des pertes sévères aux ème femmes au 17 siècle. Les femmes sont devenues victimes de la passion et se sont ruinées. Cette réflexion de Georges Truc nous montre les débauches des hommes de l’époque. « L’aristocratie du siècle, d’ailleurs, et ce n’est pas à sa louange, ne se borna point à ce commerce et garda des mœurs ou fréquenta des endroits où elle rencontra la canaille. De grands seigneurs eurent de terribles plaisirs, les lieux et les personnages infâmes abondèrent en ces jours moins policés que les nôtres et de grasses ardeurs se satisfirent, parmi ces gens d’apparat, sans contrainte et sans retenue. Aucun âge d’ailleurs, depuis le paradis terrestre, n’a plus connu dans l’innocence les trouble de la chair….. »8). Dès qu’une amante avait cédé, elle pouvait craindre d’être traitée non plus en déesse mais en proie qu’on pille et qu’on laisse. Par contre, dans le Roman comique les femmes imposent la soumission et la constance aux hommes et une femme abandonnée reconquiert un volage. L’initiative de la liaison amoureuse est à la femme, son rôle dominant se poursuit jusqu’au dénouement. Le roman accomplit, au sein de la fiction, un mouvement d’émancipation de la femme. Si Scarron a voulu montrer, à travers l’Etoile et Angélique des femmes qui provoquent l’action d’autrui avec 8) G. Truc, op. cit., p. 34. Le Statut de la femme dans le Roman comique 389 l’insertion des nouvelles espagnoles, il montre l’action directe des femmes, qui vont prouver leur ruse et leur intelligence. Ⅱ-1. L’incognito féminin Dans cette partie, on va examiner quelques éléments qui font preuve du statut supérieur de la femme, et en même temps témoignent du rejet de l’autorité de l’homme. Ces éléments proviennent de l’incognito féminin : déguisement, anxiété de l’amant face à une femme inconnue, lettre fausse, galant ne reconnaissant pas sa maîtresse, embarras du coupable, dénonciation du volage. Ainsi, en fait, les ruses et les complots fruits d’un « féminisme » plaisant de Scarron, finiront par imposer la fidélité et la constance à l’homme. Dans les nouvelles espagnoles (chapitre 9, 22, 14), il y a un déguisement, le voile : « A Rome, les filles de condition qui ne sont pas encore mariées portent un voile ». Le Roman comique présente ce déguisement dès la première rencontre (comme dans la nouvelle l’Histoire de l’amante invisible), et le plus souvent le voile ne sera levé qu’à la fin de l’intrigue. Les femmes masquées ne sont donc pas visibles : on ne peut pas les contempler, les dévisager, et l’on doit se contenter de leur conversation. Dans la première nouvelle, l’Histoire de l’amante invisible, le héros Dom Carlos rencontre une dame masquée et inconnue. A cause du masque porté par l’héroïne, l’homme n’entend que la voix de la femme et les paroles qu’elle prononce. Dans la scène 390 LEE Hyeon-Jin suivante, la femme masquée et Dom Carlos ont un dialogue par la fenêtre grillé. L’initiative est à la femme, qui a vu et aimé le héros dans une scène antérieure non racontée, c’est elle qui, protégée par l’incognito du masque, enfreint les interdits, franchit d’emblée la distance séparatrice, aborde le jeune homme et engage la conversation ». L’homme se plaint d’un incognito qui dure trop longtemps à son gré : « Dom Carlos lui dit que la chose n’était pas égale ; car, ajouta-t-il, vous me voyez et savez qui je suis et moi je ne vous vois point et ne sais qui vous êtes », le masque exacerbe son désir de la voir. « Il est vrai qu’il regretta beaucoup son invisible et que, songeant continuellement en elle, il trouva cette belle chambre plus triste qu’une prison, que l’on ne trouve jamais belle que par-dehors ». Dans la deuxième nouvelle, le masque joue un rôle très important. La deuxième nouvelle, A trompeur, trompeur et demi nous présente une dame nommée Victoria qui a été abandonnée par son amant Fernando. Elle le suit jusqu’à Madrid et, déguisée en duègne, réussit à empêcher, par d’habiles stratagèmes, son mariage avec une certaine Elvire. Grâce à ses efforts, Elvire peut épouser un amoureux de longue date qu’elle préfère à Fernando, tandis que Victoria devient la femme de celui-ci. Victoria ne s’apitoie pas sur son sort, elle décide plutôt de venger. Pour se venger de l’inconstant, elle emploie des procédés divers. D’abord, elle se déguise :« Victoria, habillé en veuve de médiocre condition ». Le déguisement de Victoria en dame de compagnie lui Le Statut de la femme dans le Roman comique 391 permet d’entrer au service de sa rivale. Et d’ailleurs, elle révèle à Elvire les engagements de son volage fiancé. Elle fabrique la fausse lettre qui convainc Elvire de son infidélité. Ainsi, le masque joue pour la femme un rôle très important. Grâce au masque, à chaque fois, les épreuves amoureuses sont décidées et sont menées par le partenaire féminin. Il en est de même pour la troisième nouvelle, Le juge de sa propre cause. On voit une jeune fille déguisée en homme qui est devenu officier supérieur de l’armée impériale et vice-roi de Valence. Elle a accompli des actes traditionnellement réserves aux hommes. A la femme déguisée succède la femme couverte de gloire, exemple de courage et de bravoure. Ⅱ-2. L’exaltation de la fidélité Que veut transmettre Scarron à travers ces nouvelles espagnoles ? Il incite les hommes à la fidélité et à la constance. Ces nouvelles espagnoles exaltent la fidélité, la constance en amour, en dépit des travers du sort, de l’ingéniosité malveillante et de la brutalité des jaloux. Les nouvelles espagnoles illustrent, chacune à sa manière, la même conception élevée, héroïque et passionnée de l’amour. Dans l’histoire de l’amante invisible, l’amour de Dom Carlos est magnifiquement récompensé parce qu’il a fourni la preuve éclatante de sa fidélité à une amante pourtant « invisible ». Dès la première rencontre, la dame invisible refuse de se faire 392 LEE Hyeon-Jin connaître. Bien plus, la dame invisible manifeste quelque inquiétude en apprenant que Dom Carlos a dansé avec une autre femme ; les avertissements, et les avances de la dame masquée rendent notre galant perplexe. Carlos est enlevé et est transporté dans un palais magnifique où, la maîtresse du lieu tente vraiment de lui faire oublier son inconnue, en lui offrant son amour et ses biens, mais il proteste et sa fidélité à l’amante invisible reste inébranlable. Enfin, Carlos découvre pour sa plus grande joie que la belle invisible et sa ravisseuse ne sont qu’une même personne, qui a ainsi voulu éprouver sa fidélité. Dans la nouvelle A trompeur, trompeur et demi, Don Fernand de Ribera représente l’amour libertin, léger et inconstant ; c’est d’ailleurs le seul cas d’inconstance dans tout le livre : la tentation de l’infidélité n’effleure jamais les personnages féminins. Don Fernand est bien fait, spirituel, noble, riche, il sait parler d’amour, et son entreprise réussit bien vite auprès d’une Victoria trop crédule. Mais après avoir été abandonnée et trahie, celle-ci, qui aime le volage, entreprend à son tour de le reconquérir. Quant au dénouement, Victoria demande à Dom Fernand de rendre compte de son infidélité et celui-ci répare sa faute. Quant au Juge de sa propre cause, il fait de la fidélité une véritable religion. Les péripéties extraordinaires, les coïncidences merveilleuses mises en scène dans cette nouvelle ont paru invraisemblables aux critiques. Mais cette nouvelle ne fait pas oublier que le véritable combat se situe dans les cœurs livrés aux tentations de l’infidélité, du découragement ou du désespoir. Même si Dom Le Statut de la femme dans le Roman comique 393 Carlos pense que sa maîtresse est morte ou infidèle, il lui reste fidèle. « Dès le jour même, cette fidèle amante parla au mestre de camp de dom Carlos et lui fit trouver bon que ce cavalier…..Voilà notre amant infortuné au service de sa maîtresse qu’il croyait morte ou infidèle ». Conclusion Traditionnellement, la femme est symbolisé par la lune et l’homme par le soleil. La femme est ainsi le plus souvent, dans la société comme dans les romans du 17ème siècle un être passif écarté de l’action. Elle s’impose et en impose aux hommes par des vertus fondamentales autant que par ses grâces sensibles. Cependant le Roman comique rompt avec cette représentation traditionnelle de la femme. Le Roman comique, roman des « comédiens », se compose des aventures vécues au jour le jour par ces derniers dans la ville du Mans. Les deux femmes principales du roman sont des comédiennes, qui vivent par conséquent loin du monde de la cour et des salons. Au ème 17 siècle, le métier de comédienne se confond souvent dans les esprits avec la prostitution, la débauche et l’ignorance. D’ailleurs, jusqu’au début du 17ème siècle, la présence féminine n’est guère permise au théâtre à cause de l’effarante grossièreté de la scène. Dans le théâtre ancien ou antique, on ne connaissait guère la présence des comédiennes. En 1545, l’engagement d’une Marie Fairet 394 LEE Hyeon-Jin dans le théâtre français est une grande première. Gustave Fagniez, qui s’est intéressé à la présence de la femme sur la scène de l’époque écrit :« En 1592, dans la troupe de Valeran, à Bordeaux, il n’y a qu’une femme, seulement elle ne joue pas la farce ». G. Truc résume ainsi la condition des comédiennes au 17e siècle. « La promiscuité des coulisses n’est point pour arrêter la médisance, et, à ces origines, les loges où on s’habillait restaient, communes aux deux sexes. L’homme déjà suspect et réprouve, en une certaine manière, par l’Eglise, que ne devait-on dire de la femme ! »9). Pourtant ce sont bien les comédiennes que Scarron a choisies de placer au centre de son œuvre. Toute l’intrigue de l’œuvre découle de ces femmes, et les histoires de ces comédiennes sont développées et commentées avec beaucoup de soin. D’ailleurs les comédiennes que Scarron nous présente sont en fait des femmes vertueuses. Scarron nous décrit des femmes au cœur noble, capables de fidélité, de courage et de généreux dévouement. Le choix d’héroïnes de condition médiocre, et en particulier de ces comédiennes au destin exceptionnel correspond bien au destin romanesque de Scarron : par la présence de ces femmes qui appartiennent, par leurs origines au monde de la noblesse, et par leur métier, au monde du théâtre, Scarron parodie le style épique et héroïque et fait la satire des procédés romanesques traditionnels. Ce choix illustre également le fait que « la Nature prend quelquefois plaisir à favoriser ceux que la fortune a pris en aversion » comme le 9) G. Truc, op. cit., p. 19. Le Statut de la femme dans le Roman comique 395 déclare Destin. Ce qui revient à dire que Scarron juge les êtres selon leur mérite et non selon leur naissance. Les personnages de Scarron, loin des héros parfaits et inaccessibles des romans héroïques ou sentimentaux, sont de condition médiocre. En choisissant comme personnages des comédiens ambulants de l’époque de Louis XIII, Scarron cherche à écrire un ouvrage qui soit « bien plus à notre usage, et plus selon la portée de l’humanité », s’opposant par la même occasion à ce qu’il dénonce comme « le livre du monde le mieux meublé ». Les personnages féminins de Scarron, appartenant à cette humanité moyenne jouent un rôle déterminant dans l’économie du roman. Elles sont loin de n’être que des idoles ou des objets de galanterie pour l’homme, bien au contraire, ce sont elles qui règlent les destins des personnages masculins. Ainsi esquisse-t-il, dans son Roman comique, les prémices d’une lutte pour le droit des femmes à l’autonomie, lutte qui s’est poursuivie jusqu’à l’époque contemporaine. Conformément aux principes essentiels des gens de théâtre, tels que les décrit Maurice Lever, à savoir le « nomadisme » et la « pluralité », la comédienne, « être hybride », nous est présentée en action. Elle est ainsi bien différente de la courtisane, dont la parure se trouve naturellement centrée sur un seul lieu, la Cour. Les femmes de Scarron, toujours nobles, sans cesse en action, sont, elles, le mouvement même. 396 LEE Hyeon-Jin L’action de ces femmes est d’abord, comme nous l’avons vu, « involontaire ». Elles sont objets d’amour, et à ce titre sont constamment recherchées et poursuivies. L’Etoile, en particulier, est le point de convergence de tous les fils de l’intrigue. Tous les hommes du roman subissent l’influence des femmes : Destin et Léandre apparaissent comme des amoureux transformés et soumis. Le Baron de Sigognac a lui été véritablement « poli par l’amour ». Mais les femmes du Roman comique, en particulier les héroïnes des Nouvelles espagnoles, exercent également une influence volontaire et consciente. En préservant son anonymat derrière un masque, elle se rend supérieure à l’homme qui la courtise. Elle se montre rusée et intelligente. Abusée ou trompée, elle provoque l’embarras du coupable et dénonce le volage. L’initiative est dans son camp du début à la fin. Les Nouvelles espagnoles suggèrent ainsi au lecteur masculin les risques de l’ « infidélité » et de la déloyauté. Ce « parti-pris des femmes » est une des grandes nouveauté du Roman comique ; et on en attendait pas moins d’un écrivain qui fut marié à celle qui allait devenir la femme la plus influente du royaume, la maîtresse du Roi Soleil, la fameuse Mme de Maintenon. Bibliographie Bornecque (P .), « Le Comique et le burlesque dans Le Roman comique », XVIIe siècle, 1976. Chauveau (J.-P.), « Diversité et unité du Roman comique », Mélanges Mongrédien, D’Argences, 1974. Le Statut de la femme dans le Roman comique 397 Giraud (Y.), « La femme dans Le Roman comique », Il Romanzo francese al tempo di Lui gi XIII, Adriatica-Nizet, 1976. __________, « L’Image et rôle de la femme dans le Roman comique », Onze études sur l’image de la femme au XVIIe siècle, Tubingen, Narr., 1984. Lever (M.), Le Roman française au XVIIe siècle, P.U.F.,1981. Mortier (R.), « La Fonction des nouvelles dans Le Roman comique », C.A.I.E.F., 18, 1996. Morillot (P.), Scarron. Etude biographique et littéraire, LecèneOudin, 1888. Rousseau (J.), « La Femme voilée. Les premiers rencontres dans Le Roman comique », ibid, Corti, 1981. Scarron, Le Roman comique l’édition de Jean Serroy, Paris, Gallimard, 1985, Folio. Truc (G.), Histoire illustré de la femme, Editions d’Histoire et d’art, Librairie Plon, 1941. 398 LEE Hyeon-Jin 《국문요약》 스카롱의 「로망 코미크」에 나타난 여성의 지위 이현진 17세기 전반기의 소설은 크게 두 가지의 경향으로 나누어진다. 「그랑 시뤼스」와 같이 영웅적 수훈들로 가득한 역사소설이나 오노레 뒤르페의 「아스트레」와 같은 감정소설이 그 한 경향이고, 다른 하나는 「로망 코미 크」나 「프랑시옹」과 같이 주로 일반 서민들의 삶이 환기되어 나타나는 소 설의 경향이다. 그렇다면 이러한 두 가지 경향의 소설에서 여성이 차지하는 위치 혹은 역할은 어떠한가? 「아스트레」와 같은 감정 소설에서 여성은 흔히 온갖 매 력들과 장점으로 치장된, 이상화된 사랑의 대상으로 나타나는 반면, 스카 롱의 「로망 코미크」에 등장하는 여주인공들은 17세기에 구현되고 있는 전 통적인 여성의 이미지와는 다르게 나타난다. 즉 소설에 등장하는 모든 여 성들은 다소간에 차이는 있을지언정, 작품의 줄거리를 이끌어나가거나 다 른 인물들의 행위를 유발하기도 한다. 「로망 코미크」에 나타난 여성 작중인물들의 이러한 역할은 17세기 당 시의 사회에서 여성에게 부여된 역할과 ‘여배우’라는 직업이 당시에 가진 가치에 비추어볼 때 대단한 새로움이 아닐 수 없다. 이 연구에서 우리는 스카롱이 자신의 소설 「로망 코미크」에서 여성에게 부여한 그 새로운 위 치를 작중인물들과의 관계를 분석함으로써 파악하고자 하였다. Le Statut de la femme dans le Roman comique 399 1부에서는 에뚜왈, 앙젤리크, 라 카베른느등의 여주인공들이 비록 소설 에서 직접적으로 행위의 주체는 아니지만 다른 인물들의 행위를 유발하거 나 영향을 미치는 역할을 하는 양상을 1. ‘사랑의 대상’으로서의 여성, 2. ‘연인의 변형매체’로서의 여성으로 나누어 고찰하였다. 데스탱이나 레앙드 르뿐 아니라 거의 모든 작중인물들은 여성의 영향을 받는다. 2부에서는 소설 안에 삽입되어 나오는 세 개의 ‘에스파뇰 이야기’의 여 주인공들이 행하는 역할을 통해 스카롱이 여성에게 새로운 위치를 부여하 는 양상을 고찰하려 하였다. 또한 이 삽입된 소설의 서술을 이네질라라는 여성이 맡고 있는 사실도 주목할 만하다. ‘여성 익명성’에서 우리는 여성의 우월성을 드러내는 동시에 남성의 권 위를 거부하는 것을 보여주는 몇몇 요소들을 분석하였다. 자크 모렐의 표 현을 빌리자면, 이 여성 인물들은 하나의 ‘단순한 우상과 같은 인물’이나 ‘우아함을 제창하는 인물’이 아닌, 일종의 ‘정신적인 건전함과 사랑스러움 의 표상’으로 이 소설에서 구현되고 있다. 이렇듯 적어도 스카롱은 소설이라는 틀 안에서 여성의 해방을 이루게 된다. 또한 스카롱은 여성들을 그들의 ‘태생’에 의해서가 아닌 그들의 ‘가 치’ 그 자체에 의해 여성들의 존재를 판단하기에 이른다. Mots-clés(주제어) : Le Roman comique (로망 코미크), Scarron (스카 롱), les figures féminines (여성 인물들), l’objet d’amour (사랑의 대상), l’incognito féminin (여성 익명성) 10) 논문투고일 : 2010. 3. 31. 최종심사일 : 2010. 5. 11. 게재확정일 : 2010. 5. 13.