Diversité des pratiques commerciales et marketing
Transcription
Diversité des pratiques commerciales et marketing
Assises du livre numérique 4 novembre 2013 – 9h30-18h 11e édition – Novotel Tour Eiffel Diversité des pratiques commerciales et marketing : exemples en France et à l’étranger Table-ronde animée par Virginie Clayssen, Directrice de la stratégie numérique du groupe Editis, vice-Présidente de la commission numérique du SNE, avec : Jean Arcache, Président-Directeur général de Place des éditeurs Francesca Noia, responsable commerciale chez Edigita Rebecca Smart, Directrice générale d’Osprey Group Publishing L’édition numérique en France : Place des éditeurs Place des éditeurs regroupe de nombreuses marques et publie 1 100 nouveaux titres par an, en littérature, illustrés de tourisme et jeunesse. Son catalogue recense 4 290 références et son chiffre d’affaires numérique est en progression constante, supérieure à celle du marché (x1,8 entre 2012 et 2013). Afin de devenir une entreprise numérique à part entière, le projet Place des éditeurs académie a engagé plusieurs projets innovants : - Place des éditeurs académie ou « l’édition transformée par l’interne » : pour accompagner la transformation du métier d’éditeur et l’indispensable changement de culture et d’habitudes ; - Place des lecteurs ou « l’édition au cœur de nos lecteurs » : pour une relation directe 365 jours par an avec 250 000 lecteurs actifs et qualifiés à travers des newsletters, blogs et e-mails, mais aussi grâce à l’animation de clubs, des tests marketing en temps réel et du géomarketing ; - Pick & Mix ou « l’édition qui crée de la valeur » : pour l’utilisation des techniques du marketing des encyclopédies vendues plus chères en fascicules qu’en un seul volume. Ainsi, un guide Lonely Planet peut être divisé en chapitres, vendus chacun au prix facial attractif de 3,49 euros, soit un total de 38 euros pour 11 chapitres tandis que le volume numérique complet est proposé à 21,99 euros. - L’intégrale d’un auteur ou « l’édition par le marketing du fond » : l’œuvre intégrale de Simenon a été regroupée chez un seul opérateur numérique, contre deux éditeurs papier, avec un dispositif marketing et commercial cohérent (opérations de baisse des prix, bundles numériques, communiqués de presse, Noël de Maigret à gagner dans le cadre d’une opération « pay with a tweet », point d’ancrage Web unique, animation de la communauté, etc.) ; - La recherche de nouveaux auteurs ou « l’édition accompagnée » : pour recruter de nouveaux auteurs mais aussi des lecteurs qualifiés chargés de donner leur avis sur les œuvres, dans le cadre d’un concours « Nos lecteurs ont du talent » lancé avec la Fnac ; Syndicat national de l’édition Assises du livre numérique – 4 novembre 2013 1 - Publishers square ou « l’édition sans frontières » : pour proposer des ouvrages d’auteurs français sur le marché américain où les fictions étrangères traduites ne représentent que 3 % de la fiction vendue (toutes langues confondues). La traduction est assurée en interne, avec le soutien du CNL et en co-édition avec Open Road Media. Pour donner vie à cette marque, différentes opérations marketing accompagnent la mise sur le marché (services de presse numérique, publicités sponsorisées sur les réseaux sociaux, opérations de baisse des prix, etc.). Le métier de l’édition, c’est aussi savoir prendre des risques. En l’occurrence, le digital le permet pleinement. L’édition numérique en Italie : Edigita Le marché italien du livre numérique En Italie, le taux de pénétration des e-books est encore faible puisque les ventes en ligne ne représentent que 12 % du marché du livre. Ce taux est toutefois en croissance (+5,4 %). En 2013, la part de marché des e-books, y compris l’auto-édition, devrait passer de 1,8 à 4 ou 5 %, avec 30 millions d’exemplaires vendus. En 2012, 45 % de la population a lu 1 à 2 e-books et 3,1 % de la population seulement avait lu au-moins un ebook (contre 1,3 % en 2010). En général, le prix d’un e-book est moins cher de 30 % par rapport au prix papier standard, soit un prix moyen de 5,87 euros contre 10,83 euros pour la version papier. Cette situation s’explique en grande partie par les très nombreuses actions promotionnelles sur les titres déjà en catalogue, mais aussi par l’existence de nouvelles collections à très bas prix. Les pratiques commerciales et marketing d’Edigita Edigita a été créée en 2010 par trois grandes maisons d’éditions, avec l’aide d’un consultant externe et le recours à une plateforme de distribution déjà existante. Cet opérateur fournit un support technique à la vente de livres dans le monde entier, mais est également en charge d’observer les grandes tendances du marché international et de faciliter la croissance du marché numérique, notamment en fournissant différents services : comptabilité, métadonnées et outils marketing pour les libraires, statistiques de vente pour les auteurs ou encore statistiques financières pour les éditeurs. Le catalogue d’Edigita recense 169 éditeurs, dont 48 partenaires et 121 indépendants. Ses ouvrages sont proposés à 77 % sur un format Epub (29 000 titres) et à 33 % en PDF. Entre 2012 et 2013, le nombre de titres disponibles sur le marché italien sera passé de 49 500 à 65 000, titres auto-édités compris. Par ailleurs, le taux d’e-books disponibles en même temps que l’édition papier sera passé de 35 à 48 %. Edigita propose une tarification dynamique, en gérant plus de 3 000 changements de prix par mois. Dans le cycle de vie des livres numériques, le prix est bas au début, avant d’augmenter dans le temps et de rejoindre le prix de l’édition papier. Edigita propose aussi des promotions d’une durée de 24 heures ou moins. Pour attirer vers le numérique, de nombreux e-books gratuits sont offerts, ainsi que des previews. Edigita recourt également largement aux e-mailings et à d’autres canaux non conventionnels (ventes directes, B2B, sites Internet dédiés, etc.). Syndicat national de l’édition Assises du livre numérique – 4 novembre 2013 2 En 2014, Edigita réfléchit à de nouvelles pistes comme le pay per view pour les ouvrages professionnels, mais aussi les points de vente physiques et les modèles mixtes (papier et numérique). L’édition numérique au Royaume-Uni : Osprey Group Publishing Le marché britannique du livre numérique Il est difficile d’évaluer le nombre exact de ventes de livres au Royaume-Uni : l’Association des éditeurs britanniques les évalue à 4 milliards, tandis que l’institut Nielsen en recense 1,5 milliard. La démarche est plus difficile encore concernant les e-books. Quoi qu’il en soit, leur part de marché moyenne représente 20 % (10 % pour la non fiction et 50 % pour la fiction, ce taux étant toutefois biaisé par le succès de Cinquante Nuances de Grey). Cette part est stable d’une année sur l’autre, mais le marché numérique s’apprête à connaître une nouvelle phase de développement avec la récente faillite du modèle traditionnel AudioGO, la fin de la vente d’ouvrages auto-édités par Kobo ou encore la hausse des abonnements. Un autre changement fondamental se produit : le déplacement du physique vers le numérique, ce qui entraîne une baisse des ventes de détail. Aller chercher les lecteurs, qui sont désormais géographiquement éparpillés, impose aux éditeurs de sortir de leurs fonctions traditionnelles. Certes, les éditeurs en ligne n’ont pas encore trouvé le moyen de répliquer ce que font les libraires en termes d’exposition des ouvrages, mais cela viendra. Aux Etats-Unis par exemple, Zolabooks tente de devenir un détaillant. Il est primordial de donner aux éditeurs numériques les mêmes moyens que pour le papier. Un autre défi majeur est celui de l’auto-édition, qui impose aux éditeurs de « dépasser l’auteur » dès lors qu’ils ne peuvent plus compter sur lui en tant que marque. Face à ce phénomène qui prend de plus en plus d’ampleur aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, les éditeurs essaient de définir de nouveaux modèles, pour travailler avec les auteurs d’une autre manière. Les stratégies marketing d’Osprey Osprey Group Publishing se focalise pleinement sur le lecteur, ce qui impose de mieux le connaître pour bien communiquer avec lui et le fidéliser. Il s’agit certes de gagner de l’argent, mais aussi et surtout de bâtir une véritable communauté et d’instaurer des relations solides. Cela passe par la création d’une marque à destination de tel ou tel groupe, et de faire de cette marque la voix des lecteurs. L’objectif est de répondre aux besoins des « enthousiastes de niche » que sont les lecteurs d’ouvrages militaires, historiques ou de science-fiction par exemple. Afin d’élargir sa communauté de lecteurs, Osprey favorise également la croissance externe. Le groupe a ainsi récemment acquis un éditeur spécialisé en nutrition et bien-être. Les lecteurs sont pleinement impliqués, puisqu’ils sont invités à aider Osprey à sélectionner certains titres, mais aussi à développer ses contenus via le crowd sourcing. Des ouvrages ont ainsi été publiés suite aux suggestions des lecteurs. Ils ne l’auraient à coup sûr pas été sinon. Savoir quel contenu parfois très spécifique intéresse les lecteurs est impossible sans des liens forts noués avec une communauté. Osprey favorise également une relation symbiotique entre ses auteurs et ses lecteurs, les uns et les autres s’attirant mutuellement – là encore autour de la notion de marque. Ainsi, 19 auteurs acceptent régulièrement de se rendre à leurs frais dans des Syndicat national de l’édition Assises du livre numérique – 4 novembre 2013 3 conférences sur la littérature fantastique, où ils présentent leur travail mais aussi de celui d’autres auteurs de la marque. Par ailleurs, plusieurs centaines de blogueurs rédigent régulièrement des critiques. Face à la montée en puissance de l’auto-édition, Osprey expérimente une forme de collaboration avec une communauté d’auteurs. Osprey propose aussi des abonnements ou des opérations de type « un livre papier acheté, un e-book offert » — ce type de publicité est très efficace. Ce type de promotion fait sans doute plus sens que les opérations de baisse de prix, qui tendent parfois à diminuer la valeur des livres. Enfin, la confiance affichée aux lecteurs et aux communautés est la meilleure arme de protection du copyright et de lutte contre le piratage. D’autant que le groupe part du principe qu’il est pire d’être invisible que d’être piraté ! Syndicat national de l’édition Assises du livre numérique – 4 novembre 2013 4