Géométrie différentielle : exercices
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Géométrie différentielle : exercices
Géométrie différentielle : exercices Séance 4 Exercice 1. Construire un atlas holomorphe sur l’espace projectif complexe CP (n), et écrire explicitement les changements de cartes. Rappels 1. Par atlas holomorphe, on entend un atlas dont les cartes sont à valeurs dans Cq , et dont les applications de changement de cartes sont holomorphes. 2. Une application (supposée C1 , au sens réel) def f : Cr → Cq : z = (z1 , . . . , zr ) 7→ f (z) = (f1 (z), . . . , fq (z)) est holomorphe si chaque fonction C → C : zi 7→ fj (z) est holomorphe. Correction. Notons π la projection de Cn+1 \{0} dans CP (n), c’est-à-dire π(z0 , . . . , zn ) = [z0 , . . . , zn ]. Dans la suite, i désigne un entier entre 0 et n. Notons également Cni une copie de Cn présentée comme suit : def Cni = Ci × {1} × Cn−i Cette notation permet de considérer de Cn vu comme sous-espace de Cn+1 \ {0} de manière adaptée au problème, en rajoutant simplement un 1 en i e position. Pour obtenir des cartes de CP (n), définissons n o def n+1 \ {0} t.q. zi 6= 0 Ūi = (z0 , . . . , zn ) ∈ C n o def Ui = [z0 , . . . , zn ] ∈ CP (n) t.q. zi 6= 0 de sorte que Ui est un ouvert de l’espace projectif complexe (car π −1 (Ui ) = Ūi ) ; définissons également zn z0 ϕi : Ui → Cni : [z0 , . . . , zn ] 7→ , . . . , 1, . . . , ↑ zi zi e i pos. L’application ϕi est bien définie, elle est continue (car ϕi ◦ π|Ūi l’est et que π est une application quotient) ; et c’est un homéomorphisme car son inverse est ϕ−1 = π|Cni : Cni → Ui i 2 et donc manifestement continu (c’est la restriction d’une application continue). Tout point de CP (n) ayant au moins une coordonnée non-nulle, il se trouve toujours un des ouverts Ui pour le contenir, ce qui montre que les Ui recouvrent l’espace CP (n). Enfin, les applications de changement de carte sont données par (dans le cas i < j, pour alléger la notation) ϕi ◦ ϕ−1 : Cnj ∩ Ūi → Cni ∩ Ūj : (z0 , . . . , zi , . . . , 1, . . . , zn ) j ↑ j e pos. 7→ ( z0 1 zn , . . . , 1, . . . , , . . . , ) zi zi zi ↑ i e pos. ↑ j e pos. et sont donc holomorphes puisque ce sont des fonctions rationelles. Les n+1 cartes (Ui , ϕi ) forment donc un atlas holomorphe pour CP (n). Ce dernier est donc de dimension complexe n, et de dimension réelle 2n. Exercice 2. On considère la fonction suivante ( 2 f : R → R : x 7→ −2 si x ≥ 0 si x < 0. Peut-on trouver un atlas différentiable A sur R, compatible avec l’atlas usuel, tel que pour toutes cartes (U, ϕ), (V, ψ) de A, la composée ψ ◦ f ◦ ϕ−1 est différentiable sur son domaine ? Correction. Prenons comme ouverts de cartes def U = ]−∞, 1[ et def V = ]−1, +∞[ et pour application de carte l’application identique (restreinte à U et V respectivement). Ces cartes forment un atlas de R répondant à la question. Exercice 3. On considère l’application f : CP (1) → CP (2) définie par f ([z0 , z1 ]) = [z0 z1 , z02 + z12 , z02 − z12 ]. 1. Vérifier que f est bien définie. 2. Montrer que f définit une application différentiable. Est-elle holomorphe ? 3 Rappel Montrer que f est bien définie revient à vérifier que 1. l’image d’un élément de CP (1) ne dépend pas du représentant (z0 , z1 ) dans C2 \ {(0, 0)}, et que 2. l’image d’un représentant de CP (1) est bien un représentant d’un élément de CP (2). Correction. Pour la clarté, notons f¯ : C2 \ {0} → C3 : (z0 , z1 ) 7→ (z0 z1 , z02 + z12 , z02 − z12 ) 1. Pour montrer que f est bien définie, il faut voir que f¯ « passe au quotient ». C’est-à-dire : ∀t ∈ C0 , ∃s ∈ C0 : f¯(tz0 , tz1 ) = s f¯(z0 , z1 ) et ∀(z0 , z1 ) ∈ C2 \ {0} : f (z0 , z1 ) 6= 0 Dans le cas présent, la première condition est clairement satisfaite car les polynômes sont homogènes de degré 2 (donc s = t 2 convient), et la seconde est facile à vérifier par l’absurde. 2. Soit (Ui , ϕi ) (i = 1, 2) les cartes usuelles de CP (1), et (Vj , ψj ) (j = 1, 2, 3) les cartes usuelles de CP (2) [à ceci près, par rapport à l’exercice , que ces cartes sont prises à valeur dans Cn , et pas dans Cni ⊂ Cn+1 ]. De rapides calculs donnent : 1+z 2 1−z 2 si i = 0, j = 0 , z z z 1−z 2 si i = 0, j = 1 2 , 1+z 2 1+z 2 z 2 , 1+z 2 si i = 0, j = 2 1−z 1−z −1 (ψj ◦ ϕi )(z) = z 2 +1 z 2 −1 si i = 1, j = 0 , z z 2 z z −1 si i = 1, j = 1 z 2 +1 , z 2 +1 2 z z +1 si i = 1, j = 2 z 2 −1 , z 2 −1 ce qui prouve que chaque changement de carte est holomorphe sur son domaine. Par ailleurs, le diagramme suivant est commutatif C2 \ {0} f¯ / C3 \ {0} π1 π2 CP (1) f / CP (2) 4 ce qui prouve la continuité de f , et donc le fait que f est différentiable (en fait, holomorphe). Exercice 4. Montrer que l’ensemble Sym+ (n, R) ⊂ Mat(n, R) des matrices n × n réelles, symétriques et définies positives, muni de la topologie induite, admet une structure de variété différentiable et en donner la dimension. Prudence ! L’intuition « inégalité stricte ⇒ ouvert » n’est pas forcément une évidence ici. Correction. Nous allons montrer que l’ensemble Sym+ (n, R) est un ouvert de l’ensemble Sym(n, R) de toutes les matrices symétriques, ce qui prouvera qu’il s’agit n(n+1) d’une sous-variété de Sym (n, R) ' R 2 , de dimension n(n+1) . 2 La voie de la facilité est d’utiliser le critère de Sylvester qui stipule qu’une matrice symétrique est définie positive si et seulement si tous ses mineurs principaux sont strictement positifs. Les mineurs principaux d’une matrice A (carrée, d’ordre n) sont les n déterminants des sous-matrices carrées placées dans le coin supérieur gauche de A. On peut donc définir une fonction qui à une matrice symétrique associe ses n mineurs principaux : ce sont des polynômes, donc cette fonction est continue, donc n + l’image réciproque de (R+ 0 ) , qui n’est autre que Sym (n, R), est un ouvert. Une autre idée est de remarquer qu’une matrice symétrique est définie positive si et seulement si ses valeurs propres sont toutes strictement positives. Donc en définissant f : Sym(n, R) → R qui envoie une matrice sur sa plus petite valeur propre, on voit que Sym+ (n, R) = f −1 (R+ 0) et est donc un ouvert, car la plus petite valeur propre dépend continûment de la matrice... et une démonstration de ce fait est dans la version longue, ci-dessous. Voyons maintenant la version longue : pour qu’une matrice soit définie positive, il faut que la forme quadratique associée le soit. On peut restreindre l’étude de cette forme quadratique à la sphère unité et, par compacité, il faut et il suffit que le minimum atteint sur la sphère soit strictement positif : Sym+ (n, R) = {A ∈ Sym(n, R) t.q. ∀x ∈ Rn \ {0}, hAx, xi > 0} = {A ∈ Sym(n, R) t.q. ∀x ∈ Sn−1 , hAx, xi > 0} = {A ∈ Sym(n, R) t.q. min hAx, xi > 0}. n−1 x∈S Considérons la fonction f : Sym(n, R) → R : A 7→ min hAx, xi n−1 x∈S 5 et montrons qu’elle est continue (l’esprit vif du lecteur attentif aura immédiatement remarqué que f (A) n’est autre que la plus petite valeur propre de A). Soit (Ak ) → B une de matrices symétriques. Nous voulons montrer que la suite suite convergente def mk = f (Ak ) converge vers f (B). Pour chaque k, notons xk (resp. y ) un point de la sphère réalisant le minimum f (Ak ) (resp. f (B)), de sorte que mk = f (Ak ) = hAk xk , xk i ≤ hAk y , y i → hBy , y i = f (B). (*) Supposons maintenant que mk ne converge pas vers f (B). Cela veut dire qu’il existe et une sous-suite mki telle que |mki − f (B)| > . Par compacité, et en passant éventuellement à une sous-sous-suite, on peut également supposer que la suite xki converge vers un élément x sur la sphère. On a alors hBy , y i ≥ lim hAki xki , xki i = hBx, xi ≥ hBy , y i = f (B) i en utilisant successivement l’inégalité (*) et la définition de y , réalisant le minimum f (B). D’où l’égalité, et ainsi une contradiction avec le fait que mki était -loin de f (B). Ceci prouve la continuité, et achève l’exercice. Exercice 5. Montrer que CP (1) est difféomorphe à la sphère S2 (en tant que variété différentiable réelle). Aide Construire un difféomorphisme explicite en identifiant une carte de CP (1) à une carte de S2 . Correction. L’application définie par morceaux ( [1 − z : x + iy ] f : S2 → CP (1) : (x, y , z) 7→ [x − iy : 1 + z] si z 6= 1 si z = 6 −1 donne le difféomorphisme demandé, comme on le vérifie aisément en utilisant la projection stéréographique depuis chaque pôle (vérifiant |z| = 1) sur la sphère, et les cartes usuelles de CP (1).