« Quel avenir pour les retraites en France et en Europe ? »

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« Quel avenir pour les retraites en France et en Europe ? »
Le groupe de travail « retraitables et retraités » présente ci­dessous la première partie de son étude sur le thème « Quel avenir pour les retraites en France et en Europe ? ». Cette première partie fait un large tour d’horizon sur les retraites en Europe. Au moment où les discussions sur l’avenir des retraites en France sont à la « une » de l’actualité, elle a pour ambition de poser le regard sur les principales pistes retenues par nos voisins européens. Dans un second temps, c’est à dire dans le courant du quatrième trimestre 2010, le groupe de travail fera part de ses réflexions sur les retraites en France à la lumière des constats qui apparaîtront alors et des conséquences qu’ils pourraient générer pour les années à venir. « Quel avenir pour les r etraites en Fr ance et en Eur ope ? » Le groupe de travail « Retraités et retraitables » du syndicat A et I a choisi pour 2009­2010 le thème de réflexion : « Quel avenir pour les retraites en France et en Europe ? » Or, en novembre 2009, quelques mois avant l’ouverture des discussions de 2010 sur l’avenir des retraites en France, la CNAV a fait procéder à une étude intitulée « les Français et les retraites ». Avant d’entamer notre débat sur ce sujet il nous a paru opportun d’en rappeler les principales tendances : ­ âge de la r etr aite : 50% des Français non retraités souhaitent partir en retraite entre 56 et 60 ans, l’âge idéal étant à leurs yeux 57 ans. Cependant, pour percevoir une bonne retraite, ils sont prêts à travailler jusqu’à 62 ans, mais s’estiment contraints d’aller jusqu’à 64 ans. ­ confiance en l’avenir : 64% estiment qu’ils ne toucheront pas une retraite satisfaisante par rapport à leurs revenus. Pour 50%, le système est fiable, mais non équitable. 64% souhaitent préserver le système en le réformant. Ils sont 7% à souhaiter un système d’épargne individuelle ! ­ conser vation du système : 87% y sont favorables (23% tel qu’il est, 64% en le réformant), 47% sont d’accord pour cotiser davantage, 42% pour travailler plus longtemps, 18 % pour percevoir une retraite plus petite. 81% refusent un abaissement des pensions. ­ connaissance de l’Assur ance r etr aite : 32% savent que c’est celle de la sécurité sociale. 25% pensent qu’il s’agit …d’un système privé ! Enfin 30% ne savent pas de quoi il s’agit ! L’avenir des retraites en France peut être éclairé par l’observation de la manière dont chaque pays de l’Union européenne, chacun à sa façon, en fonction de ses coutumes et de son expérience, a construit l’architecture de son système. Au cours de l’histoire, deux régimes apparaissent en Europe : ­ en 1889, le régime « bismarckien » financé par les cotisations des salariés pour assurer un revenu de remplacement en fonction de la durée de travail effectuée, appliqué en Allemagne, Italie et en Espagne en 1921, ­ en 1911, le régime « beveridgien » pris en charge par l’Etat pour assurer un revenu de « subsistance » et devant être complété par des ressources tirées de la capitalisation, appliqué en Grande Bretagne (National Insurance Act) et aux Pays­Bas Au fil du temps, les pays européens se sont, d’une manière ou d’une autre, inspirés de ces deux philosophies économiques, chacun des membres de l’Union européenne empruntant des chemins adaptés à sa tradition. Présenter de façon exhaustive les systèmes des 27 pays constituant l’Union européenne aurait conduit à de multiples répétitions au demeurant sans grand intérêt. Le groupe de travail a, en conséquence, pris le parti de limiter ses observations de deux manières : l’une par un éclairage sur quelques pays lorsque la question traitée est complexe, l’autre sur la totalité des 27 pays lorsque cela est souhaitable et réalisable.
Si, dans leur ensemble, ces pays ont adopté le principe de la retraite par répartition, deux variantes dans son application méritent attention. La majorité d’entre eux continue de s’appuyer sur le calcul à partir des annuités effectuées (système rétributif, en fonction du salaire). D’autres se sont résolus à mettre en place un dispositif de comptes notionnels (système contributif, en fonction des cotisations versées, c’est­à­dire sur la base de leur capitalisation virtuelle). Les rédacteurs de ce rapport plutôt que de décrire un par un chacun des régimes pratiqués ont privilégié une présentation comparative classée en dix rubriques : 1. Le pr incipe : système r étr ibutif et système contr ibutif Ces deux systèmes existent en Europe. a) Le système rétributif s’appuie sur les annuités effectuées et sur les salaires perçus au cours de l’activité. Il est majoritaire dans les pays de l’Union européenne tels Allemagne, Espagne, Autriche, Belgique, Finlande et France, sous des modalités diverses. b) Le système contributif peut être basé sur un régime par points (sur le modèle de certaines retraites complémentaires) ou sur le compte notionnel. ­ Le régime par points consiste à convertir les cotisations versées par les actifs en points de retraite établis en divisant les cotisations par le montant du salaire de référence de l’année considérée. Il n’est utilisé dans aucun régime de base en Europe. ­ Le compte notionnel (ou compte individuel dont dispose l’assuré) est crédité chaque année des cotisations retraite du salarié et de son employeur. L’ensemble des cotisations portées sur le compte de l’assuré constitue un « capital virtuel » converti en rente viagère. Cette rente est obtenue en divisant le solde du compte notionnel par un « coefficient de conversion » qui tient compte de l’espérance de vie de la génération de l’assuré et de la durée moyenne escomptée de la retraite de celui­ci. Ce système est appliqué en Suède, Italie et Pologne. Le passage d’un système rétributif à un système contributif demande une longue période de mise en place. En Suède 15 ans, en Italie la transition s’achèvera en 2030. ­ Remarque complémentaire : Danemark, Irlande, Royaume Uni ont adopté un système de forfait où la pension de retraite est la même pour tous et à laquelle s’ajoute un système par capitalisation. Les retraites des Pays­Bas s’appuient sur trois piliers : le 1 er géré par l’Etat, basé sur la répartition, il verse un minimum de pension. Le 2 ème , régime complémentaire (voir rubrique 9 ci­dessous) et le 3 ème , facultatif basé sur la capitalisation. 2. Or ganisation tutelle Les Etats ont conservé en général une tutelle sur les systèmes de retraite. Parmi les pays pratiquant le système rétributif, le ministère fédéral de l’Emploi et des Affaires sociales d’Allemagne exerce la tutelle des retraites ; la collecte des cotisations relève des Caisses maladie pour les salariés et les employeurs. Il en est de même en Espagne pour le ministère fédéral du Travail et de la Sécurité sociale, la gestion des pensions étant confiée à l’Institut national de la Sécurité sociale sous l’autorité de l’Etat. Les Pays­Bas se sont dotés d’un Conseil de surveillance des assurances sociales. Au Luxembourg, le ministère de la Sécurité sociale est en charge des retraites, la Caisse nationale d’assurance pension (CNAP) ayant pour mission l’octroi des prestations et la gestion de l’assurance/pension. Les retraites privées et publiques de Finlande sont sous la responsabilité du Centre finlandais pour les retraites. Parmi les pays pratiquant le système contributif, on peut citer : La Suède qui gère le système général par l’Allmänno Pension. En Pologne, il existe trois piliers : le régime public par répartition (comptes notionnels gérés par l’Office national, ZUS), la complémentaire pension obligatoire par capitalisation (fonds de pension public et plan individuel de retraite, OFE), un régime complémentaire facultatif (Fonds de pension ouvert par un système de capitalisation privé). En Italie, l’Etat exerce sa responsabilité par deux organismes : l’Institut national de prévoyance sociale (INPS) chargé des retraites du privé et l’Institut national de prévoyance des fonctionnaires de l’Administration Publique (INPDAP). Ces deux instituts gèrent 80% des retraites et ont également pour mission de fixer des objectifs stratégiques et le budget à travers le Conseil d’orientation et de Contrôle (CIV) qui leur est commun. Au Royaume­Uni, les organismes de sécurité sociale exercent leur mission sous la tutelle du ministère de la Sécurité sociale.
3. Secteur public et secteur pr ivé, ser vices spéciaux Plusieurs pays distinguent deux secteurs. Notons l’Allemagne avec un régime spécial pour les 38% des fonctionnaires sous statut (62% sont sous statut privé) ; la Finlande avec un régime par répartition pour les seuls fonctionnaires ; le Luxembourg avec un régime particulier pour les fonctionnaires d’Etat, des communes et des Chemins de fer ; l’Italie où deux institutions distinctes sont en charge des salariés et des fonctionnaires : l’INPS pour le privé et l’INPDAP pour les fonctionnaires (cf.2). En Pologne, relèvent de régimes spéciaux les salariés du domaine créatif et artistique, les mineurs de fonds, les travailleurs des chemins de fer, les militaires et policiers, les employés du secteur public, les enseignants et les enseignants universitaires. 4. Age légal de la retraite Actuellement les membres de l’Union européenne se répartissent en deux groupes. 14 pays dont l’âge légal de départ est identique pour les hommes et pour les femmes : ­ 65 ans : Allemagne, Chypre, Danemark, Espagne, Finlande, Irlande, Luxembourg, Pays­Bas, Portugal, Suède, ­ 62 ans : Hongrie, Slovaquie, ­ 60,5 ans : Lettonie, ­ 60 ans : France, et 13 pays dont l’âge légal de départ hommes et femmes est différencié : ­ 65 et 62 ans : Belgique. ­ 65 et 60 ans : Autriche, Grèce, Italie, Pologne, Royaume Uni, ­ 65 et 59,5 ans : Estonie, ­ 63 et 61 ans : Slovénie, ­ 63 et 58 ans : Bulgarie, Roumanie, ­ 62 et 60 ans : Lituanie, République Tchèque, ­ 61 et 60 ans : Malte. Selon une directive de l’UE, les 13 pays qui différencient hommes et femmes devront à terme instituer un âge légal unique. Pour le Royaume­Uni, par exemple, ce sera réalisé entre 2010 et 2020 et porté à 68 ans en 2050, avec 30 ans de cotisation. La question du recul de l’âge légal reste posée quasi en permanence dans l’ensemble des pays de l’U.E (Allemagne, Espagne, France), Plusieurs pays pratiquent un système de retraite anticipée partielle applicable avant l’âge légal (Allemagne, Luxembourg) et sous conditions. 5. Age moyen de dépar t à la r etr aite L’âge moyen de sortie de l’emploi des hommes et des femmes, pour quelques pays d’Europe, est le suivant : Allemagne 62,6 et 61,5 ; Pays Bas 64,2 et 63,6 ; Royaume Uni 63,6 et 61,7 ; Suède 64,2 et 63,6 ; Espagne 61,8 et 62,4 ; Italie 61 et 59,8 ; France 59,5 et 59,4. Alors que l’objectif européen pour l’emploi des seniors de 55 à 64 ans est de 50%, peu de pays y sont parvenus : Allemagne 53,8% ; Pays­Bas 50,7% ; Royaume Uni 58,2% ; Suède 70,3% ; Finlande 56,4%. Plusieurs pays sont en dessous : Espagne 45,5% ; Italie 34,4% ; Belgique 32,8% ; France 38,2%. 6. Cotisations a) Durée Le cumul de deux conditions pour accéder à une pension complète peut revêtir plusieurs aspects : Allemagne : 45 années de cotisations et 65 ans d’âge ; cependant, une retraite anticipée est possible avec 35 années de cotisations à 63 ans et une retraite partielle à 65 ans si le salaire est inférieur à 325€. Espagne : la pension complète est acquise avec 35 années de cotisations à l’âge de 65 ans et une pension partielle avec 15 années de cotisation dont deux mois minimum au cours des huit dernières années. Belgique : le cumul est de 45 années de cotisation à 65 ans pour les hommes et 62 pour les femmes (ces âges devant être uniformisés à terme). Italie : la durée minimum de cotisation est de 40 ans, sans condition d’âge. Pologne : les durées minima de cotisations sont pour les hommes et les femmes respectivement de 25 et 20 ans. Royaume­Uni : les durées de cotisations sont différenciées, 44 ans pour les hommes, 39 pour les femmes, sans possibilité de retraite anticipée, durée ramenée pour les femmes à 30 ans en 2010. Finlande : exige pour une pension à taux plein 40 ans de résidence dans le pays à l’âge adulte.
b) Taux de cotisations Le taux de cotisation le plus élevé se trouve en Italie ,30%, alors que la moyenne européenne est de 20%. Il est en général réparti entre salariés et employeurs dans des proportions variables. En Allemagne, il est de 19,1% (9,55% à la charge du salarié ; 9,55% de l’employeur, aucune cotisation n’étant perçue sur les salaires inférieurs à 325 €/mois). En Espagne il est de 28,3% (4,7% à la charge du salarié ; 23,6% de l’employeur). En Finlande, le taux moyen de cotisation sécurité sociale est de 21,1%, sans plancher ni plafond. En 2016, il sera fixé pour le salarié à 7,5% pour la retraite. Au Luxembourg, les cotisations sont au taux de 24%, gérées par le Centre commun de sécurité sociale (16% à la charge du salarié, 8% de l’employeur). Il existe un plafond de cotisation égal à 5 fois le salaire social minimum soit 8413 €/mois. En Suède, les 18,5% de cotisations perçues par l’Agence gouvernementale sont répartis en 16% pour la répartition et 2,5% pour la capitalisation. En Pologne, les cotisations obligatoires sont fixées à 19,52% avec parité entre salarié et employeur (9,76% pour chacun) et un plafond fixé à 30 fois le salaire national moyen. Sur ces cotisations : 12,22% sont affectés à l’Office national des assurances sociales ; 7,30% au Fonds de pensions ouvert désigné par l’intéressé (2 ème pilier). Au Royaume­Uni, le fonds national d’assurance (NIF) reçoit une cotisation sur salaire de 8,95% à la charge du salarié (sur les salaires compris entre 89 et 595 livres/semaine) et de 10.9% à la charge des employeurs (cotisation non plafonnée). 7. Les taux de r emplacement Faire une synthèse des taux de remplacement serait complexe et conduirait à des conclusions inexactes, tant les solutions apportées sont divergentes. On peut, par contre, faire le point sur trois pays, appuyés sur le système rétributif, sur trois autres sur le système contributif et sur le système particulier du Royaume­Uni. Les taux de remplacement dans les trois pays à système rétributif est en théorie de 68% en Allemagne (64% prévus en 2030), 59% en Espagne et 77,5% en Finlande. Ces trois pourcentages recouvrent cependant des réalités différentes. En Espagne, les 50% se calculent sur les 15 dernières années ; après 35 ans de cotisations, il peut atteindre 85% (60% du salaire de base, plus 2% par année supplémentaire au delà de 35). En outre, il est tributaire d’un plafond de cotisation limité à 1,7 salaire moyen. En Finlande, le taux de 77,5% s’atteint avec une carrière complète de 20 ans à 65 ans, sur la moyenne des salaires de la carrière. Les taux de remplacement dans les trois pays retenus pratiquant le système contributif (Suède, Italie, Pologne), tiennent compte de l’espérance de vie et de l’âge de départ à la retraite. En Italie, il représente 68% du revenu, il est basé sur les dix dernières années d’activité dans les deux régimes de retraite (Etat et secteur privé). En Pologne, il est basé sur les dix dernières années d’activité. Le montant de la pension est égal à la somme des cotisations accumulées dans le compte individuel après indexation, divisée par l’espérance de vie moyenne restant au moment de la retraite. Il représente 33% (pour les femmes) et 47% (pour les hommes) du dernier salaire soit 40,5% à 64,5% du salaire moyen respectivement pour les femmes et pour les hommes. Ces différences sont la conséquence de la prise en compte de la durée de vie plus grande pour les femmes (80 ans contre 71 ans pour les hommes) entraînant des moyennes mensuelles plus faibles. Au Royaume­Uni, la pension de base (PSB), proportionnelle à la durée de cotisation s’élève en moyenne à 93€/semaine. Les régimes à prestations généralement définies assurent aux salariés en moyenne 60% du dernier salaire. La pension d’Etat additionnelle (SERP), réservée aux salariés verse une pension proportionnelle au salaire et égale à 20% du salaire moyen de l’ensemble de la carrière. L’indexation des pensions peut être basée soit sur les prix (Espagne, Italie), soit à la fois sur les salaires et les prix (Finlande : 20% sur les salaires et 80% sur les prix), soit en fonction d’un plancher d’augmentation des salaires (Suède où les pensions sont revalorisées lorsque la croissance des salaires est supérieure à 1,6%). En Suède, le taux de remplacement peut atteindre 60% mais devrait diminuer pour les générations futures. 8. Les minima, plancher s, plafonds Dans ce domaine, on peut distinguer plusieurs catégories : des pays ignorent les minima, planchers et plafonds (Finlande), d’autres n’ont pas de pension minimum dans le régime général (Allemagne), certains ont un minimum exprimé en pourcentage du dernier salaire (Pologne), des pays ont un minimum et un plafond (Suède : 700 € indexé sur les prix, et non prise en compte de la partie du salaire supérieure à 7,5 fois le quotient de base) enfin certains fixent un plafond (Espagne : 1,7 fois le salaire de base).
Aux Pays­Bas, le minimum de retraite est de 50% du salaire minimal, le maximum de 70% du salaire minimum net pour un célibataire. En Suède, il existe des dispositifs de solidarité financés par l’Etat qui complètent le nouveau système, par exemple pour les périodes non cotisées. 9. Les assur ances complémentair es Certains pays ont institué une assurance complémentaire obligatoire : Danemark et Pologne (par capitalisation), Finlande et Suède (en partie par capitalisation ­ voir § 6b), Grèce, Royaume­Uni et France. En Suède l’assurance obligatoire peut être gérée soit par conventions collectives soit par des systèmes privés. Une part des cotisations obligatoires est versée à des comptes individuels en capitalisation aboutissant à une rente au montant variable ou garanti. Aux Pays­Bas, le régime complémentaire obligatoire est administré par des fonds de pension sectoriels et par branche d’activité. En Pologne l’assurance obligatoire peut être complétée par une assurance facultative, les deux par capitalisation. D’autres pays pratiquent des assurances complémentaires facultatives : Allemagne, Autriche, Belgique, Italie, Portugal, Espagne. En Allemagne, ces assurances s’appuient sur la capitalisation par contrat individuel ou contrat d’entreprise : 20 millions de salariés relèvent de conventions collectives de prévoyance vieillesse collective donnant droit à des primes de l’Etat (154 € pour un célibataire). En Belgique il s’agit également d’assurance par capitalisation par entreprises ou par groupes d’entreprises. En Italie, deux systèmes d’assurance complémentaires facultatifs cohabitent : les fonds de pension fermés collectifs et redistributifs, les fonds de pension ouverts généralement individuels. Au Portugal, les fonds de pensions privés sont favorisés par incitation fiscale. En Espagne l’assurance facultative peut être gérée par l’entreprise, une association, sur une base individuelle. Enfin, le Royaume­Uni présente un système facultatif original : obligatoire pour les entreprises de plus de 5 salariés, il est facultatif pour le salarié qui verse une cotisation entre 20€ et 5702€ (sans participation financière de l’employeur). La part des retraites complémentaires dans le total des retraites est de 28%. 10. Les par ticular ités spécifiques à quelques pays Les régimes de retraite dans l’Union européenne ne présentent pas un caractère homogène sur tous les points, même si un grand nombre de caractéristiques se retrouvent souvent avec des applications diverses. Cette rubrique n’ambitionne pas de dresser une liste exhaustive de toutes les particularités existantes. Elle se limitera en conséquence à sept d’entre elles : ­ l’Allemagne a instauré un taux de remplacement minimum garanti par la loi. Il est actuellement de 68% (64% en 2030), ­ en Finlande, les bénéficiaires de pension peuvent déduire un certain montant à l’impôt local sur le revenu, ­ en Pologne, le cumul pension de vieillesse/revenu professionnel est possible sans restriction sous condition d’avoir atteint l’âge légal de la retraite. Le cumul pensions d’invalidité/activité professionnelle est également autorisé avec un strict encadrement, ­ au Royaume Uni la pension de base ne peut dépasser un plafond fixé à 93€ par semaine, ­ en Italie, les fonds de pension complémentaires ouverts peuvent offrir un pécule, le TRF (traitement de fin de rapport) équivalent à 6,91% de la rémunération du travailleur au moment de son départ de l’entreprise. Le TFR se calcule en mettant chaque année de côté 6,91% du salaire brut, ­ en Suède à chaque droit correspond une cotisation, les contributions de l’Etat sont de 15% du total des cotisations, ­ aux Pays­Bas, il existe une décote de 2% par année de résidence hors du pays et les pensions obligatoires peuvent atteindre 100% du dernier salaire. 11. Constats, per spectives a) Quelques constats (ainsi qu’il a été procédé au paragraphe précédent sur les particularités des systèmes, ils se borneront à sept) : ­ les Etats sont très intéressés par l’évolution des systèmes de retraite et conservent en conséquence une tutelle sur leur fonctionnement, ­ des régimes complémentaires existent en général, soit sous forme obligatoire, soit sous forme facultative et peuvent être basés sur la répartition ou sur la capitalisation, voire partiellement sur les deux, ­ dans la plupart des régimes, il existe une surcote pour les années travaillées au delà de l’âge légal de retraite et en deçà une décote pour les durées de cotisations incomplètes, ­ les minima vieillesse sont une aide sociale à la charge de l’Etat,
­ le calcul de la pension peut être basé soit sur les meilleures années (en France 25), soit sur les dernières années (Pologne 10, Espagne 15), ­ le passage du système des annuités au compte notionnel s’est traduit par une diminution des pensions entre l’ancien régime et le nouveau (en Italie jusqu’à 35% en moins), ­ en Suède, il existe un arbitrage entre âge de départ à la retraite et montant de pension pour chaque génération. Par ailleurs, le système ne garantit pas le pouvoir d’achat des pensions liquidées. A noter qu’en Pologne l’Etat devra ajouter aux cotisations des actifs 30 milliards de Zlotys pour faire face aux pensions versées par l’Office national ZUS. b) Quelles perspectives ? Tous les pays européens souhaitent trouver des solutions pour mettre un terme aux déficits des budgets des organismes de retraite quel que soit le système en place. La baisse des pensions n’étant pas en général retenu leurs recherches vont dans deux directions : l’augmentation des recettes, la diminution des dépenses. Cependant, au Royaume­Uni, pour remédier à l’insuffisance des pensions de certains salariés deux dispositifs sont envisagés : une seconde pension de l’Etat (doublant le montant actuel) et des fonds communs de pensions assortis d’avantages fiscaux et sociaux. En 2050, le total des pensions versées devrait se répartir en 40% pour l’Etat et 60% pour le privé. L’accroissement des recettes peut revêtir plusieurs formes : soit la hausse des cotisations versées par les salariés et/ou les entreprises, soit l’allongement de la période pendant laquelle les cotisations sont versées. Cet allongement peut être réalisé par le report de l’âge légal de la retraite (67 ans pour l’Allemagne en 2030) ou par la modification de la durée de cotisation (au delà de 40 ans). A noter que 71,7 % des Polonais sont opposés à l’augmentation de l’âge de la retraite et que 20,5% seulement accepteraient l’augmentation de celui des femmes au niveau de celui des hommes. Les Polonais souhaiteraient un âge légal de départ à la retraite de 55,3 ans pour les femmes et 59,5 ans pour les hommes. Cette modification peut aussi faire l’objet d’incitations à prolonger son activité au delà de l’âge légal de la retraite (surcote) ou à ne pas l’interrompre par un départ avant (décote). Il est aussi envisageable de faire contribuer l’Etat pour la prise en charge de certains droits (Suède, Allemagne et Italie), ou de procéder à des transferts directs des ressources de l’Etat aux régimes de retraite (Belgique). Aux Pays Bas, le projet de porter l’âge de la retraite à 67 ans soulève de nombreuses oppositions. La réduction des dépenses peut, elle aussi, revêtir de multiples aspects. On peut citer : le calcul de la pension sur un certain nombre des meilleures années salariées ou sur les dernières années travaillées (en Espagne, 15 au lieu de 8 antérieurement), le recul de l’âge légal de la retraite (actuellement débattu en Espagne par exemple), la création de retraites pour partie en répartition, pour partie en capitalisation (Suède). Pour ce qui concerne les revalorisations, elles peuvent être réduites en les faisant porter sur les prix au lieu des salaires ou sur les salaires nets au lieu des salaires bruts. Toutes les solutions explorées ou mises en oeuvre s’appliquent au détriment des retraités futurs (par la diminution parfois très forte des pensions) et des retraités actuels (par des revalorisations insuffisantes). Elles ont toutes en commun soit d’augmenter les recettes soit de diminuer les dépenses quel que soit le fonctionnement des régimes de retraites concernés et cela sans en changer l’assiette de prélèvements. Et pourtant malgré les mesures prises en Europe, plusieurs régimes restent fragiles ; par exemple, le système suédois, souvent montré en exemple. Il connaît, avec la crise, des difficultés importantes qui conduiraient à une baisse des pensions de l’ordre de 4,5% si les règles adoptées étaient appliquées. On comprend alors pourquoi 60% des suédois n’ont pas confiance dans leur système de retraite. La prise en charge des retraites ne se résume pas à une simple opération comptable et son objectif est de résoudre un problème de société profondément humain : la recherche de nouvelles ressources de financement est une piste qui mérite attention si l’on veut résoudre durablement la question. Une dernière remarque en conclusion de ce tour d’horizon des systèmes de retraite dans l’Union européenne : les régimes de retraite en France sont certes très complexes, mais n’ont rien à envier sur ce point aux régimes de l’ensemble de l’Europe qui le sont très souvent au moins autant, sinon plus. Les responsables du Groupe de Travail