L`Inter Bras de fer autour du fauteuil présidentiel

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L`Inter Bras de fer autour du fauteuil présidentiel
Bras de fer autour du fauteuil présidentiel - Gbagbo et Ouattara comme dans un jeu d’échec
L'Inter
Abidjan Côte d'Ivoire, 2010-12-12 (L'Inter) - Untitled 1
Bras de fer autour du fauteuil présidentiel Gbagbo et Ouattara comme dans un jeu
d’échec
Comment chaque camp prépare la défaite de
l`autre - La bataille fait rage entre Gbagbo et Ouattara
Source: L'Inter
11/12/2010
La lutte pour le fauteuil présidentiel se poursuit entre les deux
candidats au second tour de l’élection présidentielle du 28 novembre
dernier, depuis la crise ouverte suite à la proclamation des résultats
dudit scrutin. Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara ne se donnent plus
de répit, chacun pour marquer des points et conforter sa position de
président légitimement élu de Côte d’Ivoire. Les deux protagonistes se
sont engagés dans une course à la légitimité, qui se joue sur le terrain
comme dans un jeu d’échec où l’on pousse un pion, attend le prochain
pas de son adversaire pour en pousser un autre, ainsi de suite jusqu’à
la victoire finale. Il ne se passe de jour sans qu’il n’y ait un pallier
nouveau de franchi du côté du Palais d’Abidjan, qu’occupe Laurent
Gbagbo, et un autre du côté de l’hôtel du Golf d’Abidjan Cocody où
Alassane Ouattara a installé ses quartiers en attendant un éclairci de la
situation en sa faveur. Tout commence par la nomination dans chaque
camp d’un Premier ministre. Début du jeu de marquage entre les deux
adversaires déterminés, chacun à aller sans réserve jusqu’au bout de la
lutte engagée. Au moment où Laurent Gbagbo se fait investir au pas
de course au Palais d’Abidjan, Alassane Ouattara, comme si rien ne se
passait chez l’adversaire, nommait son Premier ministre, en la
personne de Guillaume Soro reconduit à son poste. A la guerre comme
à la guerre, le même soir, le locataire du Palais n’attend pas minuit
pour donner le nom, à son tour, de son chef de gouvernement. Le Pr.
Aké N’gbo est désigné à ce poste. Premier acte de part et d’autre, deux
Premiers ministres nommés pour le même pays. Le lendemain
dimanche, la partie recommence avec le tenant du ‘’Palais’’ du Golf,
qui rend très vite publique la liste partielle des membres de son
gouvernement. Lundi, les consultations commencent au Palais
présidentiel où la liste du gouvernement Gbagbo – Aké N’gbo est
connue le lendemain mardi dans l’après-midi. De son côté, Alassane
Ouattara prend encore de l’avance en prenant ses premiers décrets. Au
cours de son premier conseil des ministres, d’importantes mesures sont
prises. De nouveaux responsables de l’administration sont promus, des
anciens débarqués ainsi que des ambassadeurs touchés par ces mesures
''théoriques''. Parce que ne dépassant pas le seuil de l’hôtel du Golf où
elles sont prises. Pendant ce temps, les ministres de Laurent Gbagbo
occupent les bureaux et prennent officiellement fonction comme à une
période normale. Le tenant du Palais reçoit des populations et vaque à
ses occupations, nonobstant les pressions qui lui sont faites de quitter
le pouvoir. Ouattara et Gbagbo continuent, ainsi, de poser des actes,
autant que possible pour marquer chacun sa légitimité, sa
détermination à ne point reculer et céder une parcelle à l’adversaire.
Cette défiance réciproque révèle également une montée des enchères
dans chaque camp. La lutte pouvant se terminer par un dialogue au
cours duquel chacun cherchera, évidemment, à gagner le gros
morceau.
F.D.BONY
Crise post-électorale - Comment chaque camp prépare la défaite de
l`autre - La bataille fait rage entre Gbagbo et Ouattara
Passées les heures chaudes de la crise née de la proclamation des
résultats des élections en Côte d'Ivoire, place désormais à „ la guerre
froide «. Les camps Gbagbo et Ouattara opposés dans les urnes et
décidés à en découdre, ont changé „ d'armes de combat «. Les
grenades lacrymogènes, les balles chaudes des fusils, les pneus
enflammés des rues d'Abidjan et de l'intérieur du pays, sont ainsi
remplacés par les offensives diplomatiques, les pressions financières,
les discours musclés et tout autre forme d'intimidation, avec pour
ultime but de faire plier l'adversaire. Dans cette nouvelle bataille, plus
voilée, chaque camp élabore ses stratégies et se donne les moyens
d'atteindre son objectif. Alassane Ouattara, le président déclaré élu par
la Commission électorale indépendante (Cei) et fortement soutenu par
la communauté internationale, s'est retranché depuis, à l'hôtel Golf de
Cocody, où il a aménagé des locaux pour en faire son cabinet
présidentiel en attendant, certainement, de remporter ce bras de fer et
s'installer dans un palais digne de ce nom. Il en est de même pour les
ministres du gouvernement Soro, qui, selon des sources, ont eux-aussi
commencé à meubler des chambres en matériel de bureau pour y
exercer leurs fonctions, le temps d'être installés dans des ministères
officiels. L'hôtel du Golf prend ainsi les allures d'un palais
présidentiel, d'où Alassane Ouattara envoie des signaux forts à son
adversaire Laurent Gbagbo, pour dire qu'il est aux commandes de
l'Etat et que „ la recréation est terminée «. Décrets de nomination,
décisions de révocation de cadres, communiqués de gouvernement, le
régime installé au palais du Golf multiplie les actions visant à assurer
son autorité. Des cadres pro-Gbagbo dans l'administration publique,
des ambassadeurs en poste dans certains pays, ont ainsi été remerciés.
Histoire d'affaiblir diplomatiquement le locataire du palais du Plateau,
qui subit depuis la proclamation de sa victoire par le Conseil
constitutionnel, un matraquage tous azimuts des acteurs de la
communauté internationale qui le somment de quitter le pouvoir.
Après ce gel des relations diplomatiques qu'il semble avoir bien réussi,
Alassane Ouattara veut fermer les robinets financiers à Laurent
Gbagbo. Un étouffement financier pour lequel l'ancien directeur
général du Fonds Monétaire International (FMI) a mis en branle tout
son réseau dans le monde des finances. La Banque Mondiale, l'Union
Européenne, la Banque Africaine de Développement ont ouvertement
„ menacé le camp Gbagbo de sanction, s'il refuse de céder le pouvoir
au président élu Alassane Ouattara «. Le 5 décembre dernier, le
président élu selon la Cei et les Nations Unies, a adressé un courrier à
la Banque centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (Bceao), la plus
haute institution financière de la sous-région ouest-africaine, dans
laquelle la Côte d'Ivoire se taille la part du lion. Dans ce courrier, il
invite les autorités de cette banque à ne reconnaître que la signature de
son ministre des Finances, à savoir Charles Koffi Diby et mettre les
fonds à la disposition de son Premier ministre Guillaume Soro. C'est
également la même pression que Ouattara exerce sur les régies
financières (Douanes, Impôts et Trésor) qui sont les principales
pourvoyeuses de fonds de l'Etat en interne. L'administration Ouattara
a opéré des changements à la tête de ces régies, dans le souci de
contrôler les mouvements de fonds. Les fonctionnaires et autres agents
de l'Etat, les fournisseurs, les entreprises privées ont aussi été mis en
garde contre toute collaboration avec le régime Gbagbo. Une pression
qui jette le flou dans l'esprit de ces travailleurs. Ouattara casse ainsi le
moral de ce groupe de travailleurs de l'Etat et freine ainsi le
dynamisme de l'administration. Même stratégie pour le corps
préfectoral, notamment ceux en fonction dans les zones centre nord et
ouest, qui expliquent depuis quelques jours que les incidents qui ont eu
lieu dans leurs zones, n'entachent pas la crédibilité du scrutin
présidentiel. Cet argument conforte la position de Guillaume Soro et
donne force à la victoire d'Alassane Ouattara. Le contrôle des médias
d'Etat fait partie de la stratégie de l'équipe du président en poste à
l'hôtel du Golf. A défaut de prendre l'appareil en main, il a procédé à
des nominations de cadres de la télévision, qui se trouve ainsi divisée
entre pro-Ouattara et pro-Gbagbo. Par ailleurs, et selon des sources, le
président déclaré par la Commission électorale indépendante, ne serait
pas opposé à l'idée de créer sa propre chaîne de télévision pour porter
sa voix. Alassane Ouattara ne lâche donc pas prise, convaincu qu'il
tient le bon bout. Le hic cependant, c'est que les décisions musclées
qui sont prises ne produisent pas encore l'effet recherché. Leur
application bute contre la réalité du pouvoir qui, à l'évidence, échappe
Laàréalité
Ouattara.
du pouvoir
La réalité du pouvoir
La réalité du pouvoir
A contrario, le camp Gbagbo reste solidement fixé, parce qu'investi par
le Conseil constitutionnel, qui quoi qu'on dise, demeure l'institution en
charge d'investir les présidents élus de Côte d'Ivoire. En prêtant
serment devant le professeur Paul Yao N'Dré (ce qui n'a pas été le cas
pour Alassane Ouattara ndlr) le samedi 4 décembre dernier au palais
du Plateau, Laurent Gbagbo s'assure ainsi le confiance des institutions
de la République et de tous les autres services de l'Etat qui sont
attachés aux lois de la République. Ainsi l'Assemblée nationale, le
Conseil constitutionnel, la Cour suprême, les Forces de défense et de
sécurité, pour ne citer que ceux-là, reconnaissent comme seul chef
Laurent Gbagbo. En tout cas, contrairement à Alassane Ouattara, qui
appelle à „ l'esprit républicain « des Fds et autres institutions, Laurent
Gbagbo n'a pas les mêmes efforts à faire, dès l'instant qu'il a été oint
par la plus haute juridiction en matière électorale en Côte d'Ivoire. De
là découle toute la différence entre les pouvoirs Gbagbo et Ouattara.
Adossés à cette légalité constitutionnel, les pro-Gbagbo ne sentent
plus le besoin de se débattre pour convaincre. Ils feignent donc ignorer
tous les coups durs que leur portent l'administration du Golf, tout
comme les flèches qui pleuvent de l'extérieur du pays. Au lendemain
de sa formation, le gouvernement de Laurent Gbagbo et son Premier
ministre Gilbert-Marie Aké N’gbo s’est donc mis au travail,
minimisant les actes posés par le gouvernement Soro. Les passations
de pouvoirs dans les locaux des ministères au plateau ont connu une
accélération particulière. Crise oblige. Les nouveaux locataires,
comme dans une situation normale, définissent leurs programmes
d'activité et les défis qu'ils entendent relever à la tête des départements
ministériels qui leur ont été confiés. Plus question de parler de cette
crise qui est pourtant présente. Une stratégie qui consiste à négliger les
actes de l'adversaire pour en tuer les effets dans l'oeuf. Sur le terrain,
notamment dans les régies financières, les hommes de Gbagbo sont
bien en place. Pas de passation avec les personnalités nommés par
Alassane Ouattara. Au niveau du corps préfectoral, dont ceux de la
zone Cno ont basculé dans le camp de Guillaume Soro, le ministre de
l'Intérieur de Laurent Gbagbo mobilise ceux restés fidèles à son
patron. Il leur a rappelé les fondamentaux de leur fonction, qui
consistent à relayer l'autorité de l'Etat dans leur zone d'exercice. Le
ministre Guiriehoulou a saisi en effet l'occasion de cette rencontre
avec les préfets pour condamner l'attitude de leurs collègues qui ont
remis en cause les décisions du Conseil constitutionnel et rallié le
camp Ouattara. Dans sa stratégie, le camp Gbagbo a mis la main sur
les médias d'Etat, qui font black-out sur tout ce qui concerne Alassane
Ouattara depuis son retrait à l'hôtel Golf. Les chaînes de télévision
internationale qui relayaient les voix du président déclaré par la Cei
ont été suspendues d'émissions sur le territoire national. Isolant ainsi
Ouattara des Ivoiriens. Pour redorer son image fortement ternie au
plan international, à travers les messages de condamnation et
d'injonction à quitter le pouvoir, Laurent Gbagbo a envoyé des
missions à l'étranger. Des missions qui semblent porter fruit. En tout
cas, le ton est plus apaisé et la question d'un dialogue pour une
réconciliation entre les deux camps en conflit en Côte d'Ivoire, est de
plus en plus évoquée dans le cadre de la résolution de la crise née des
élections. Le dernier communiqué du Conseil de sécurité de l'Onu
invite à cet effet „ toutes les parties prenantes ivoiriennes à faire
preuve d'un maximum de retenue et à travailler ensemble pour
restaurer une paix durable et encourager la réconciliation politique du
pays «. Mais en attendant de s'engager dans cette voie ouverte par le
Conseil de sécurité, les deux camps continuent de bander les muscles.