L`Approche Environnementale de l`Urbanisme (AEU®) : de la

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L`Approche Environnementale de l`Urbanisme (AEU®) : de la
L’Approche Environnementale de l’Urbanisme (AEU®) : de la nécessité à la mise en œuvre
d’une approche transversale - Gwenaël Guyonvarch – ADEME
Quelles sont les caractéristiques premières de l’Approche Environnementale de l’Urbanisme et son
champ d’application ?
Selon cette démarche procédant par arbitrages, l’environnement figure comme élément fondateur
du projet d’urbanisme et non pas comme une contrainte secondaire, l’AEU® permettant d’intégrer la
dimension environnementale à chaque étape du projet.
De fait, l’AEU® a vocation à s’appliquer à des projets de diverse nature mais c’est avant tout un outil
d’accompagnement de l’élaboration des documents d’urbanisme (SCOT, PLU, carte communale) ou
de mise en œuvre d’opérations d’aménagement tels que les ZAC, lotissements, opérations de
renouvellement urbain, éco quartiers ou encore de zones d’activités économiques.
Cet accompagnement prend le plus souvent la forme d’une prestation d’Assistance à Maîtrise
d’Ouvrage (AMO) avec une fonction de questionnement permanent du projet, à l’aune de son impact
environnemental. L’AEU® offre ainsi deux avantages :
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Apporter les connaissances nécessaires pour mieux comprendre et décider;
Mettre en évidence l’intérêt d’engager des expertises complémentaires supposant le recours
à des spécialistes.
Il peut ainsi s’avérer judicieux de comparer les solutions de dessertes énergétiques s’offrant à un
territoire pour tirer le meilleur profit de ses propres ressources ou d’étudier la faisabilité d’un projet
de chaufferie bois ou encore la mise en place de techniques alternatives de gestion des eaux
pluviales.
De manière plus générale, le recours à une AEU® permettra de répondre à des questions très
pratiques :
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Quel site urbaniser ? Comment utiliser au mieux l’espace disponible, avec quelles formes
urbaines et quelle typologie d’habitat et avec quelle place réservée aux piétons et cyclistes ?
Quelle offre d’énergie offrir aux habitants tout en réduisant la consommation d’eau et en
gérant les eaux pluviales et comment optimiser l’espace de collecte et de tri des déchets ?
Comment assurer la survie des espèces animales et végétales ?
Quels sont les bénéfices de cette approche ?
L’AEU® améliore directement la qualité environnementale du projet urbain tout en contribuant
indirectement à l’intelligence globale du projet.
La qualité environnementale du projet est directement améliorée par le traitement de toutes les
thématiques environnementales, d’abord séparées, puis croisées pour embrasser tout le champ des
possibles.
Au regard de l’énergie et du climat, seront envisagés tous les facteurs tels que topographie, forme
urbaine, aménagement et ensoleillement ayant une influence directe sur la consommation
énergétique, cela pour optimiser les scenarii de dessertes énergétiques après estimation des besoins
et analyse de l’offre.
Question déplacements, levier essentiel d’économies d’énergies, diminuer les GES et contribuer à la
qualité du cadre de vie, le recours à l’AEU® pourra, par exemple, favoriser le renouvellement des
friches urbaines et l’urbanisation des zones déjà desservies par les transports en commun,
développement à la clé d’espaces publics privilégiant les déplacements doux.
Dans le même temps, et au-delà de leur réduction à la source, la maîtrise des flux de déchets passant
par une optimisation de leur collecte, réduction de coûts à la clé, l’AEU® peut à cet effet optimiser les
plans de masse et des aménagements conçus pour faciliter l’implantation des systèmes de tri et des
dispositifs de compostage domestique, cela sans oublier d’intégrer le traitement des déchets de
chantier à valoriser, une fois limités.
La gestion des eaux pluviales proche du cycle naturel doit également rester à l’esprit pour diminuer
l’extension des réseaux et le surdimensionnement des ouvrages afin de contribuer à la qualité des
espaces publics. Un AUE permettra leur infiltration naturelle et, donc, le ralentissement des
ruissellements.
Certaines collectivité peuvent également avoir intérêt à lutter contre la prédation des espaces
naturels et agricoles en intégrant harmonieusement le projet urbain au patrimoine naturel, par la
mise en place de haies bocagères, ou de vallons humides ou en concevant des espaces verts avec
fonction et entretien écologiques.
L’AEU® peut également aider une collectivité à dépolluer un site et réduire ses nuisances sonores.
Indirectement aussi, l’AEU® permet de structurer le projet en mode intelligence collective car, audelà de cette transversalité, mettant en évidence les interactions entre chaque préoccupation
environnementale, l’outil favorise la participation en faisant partager les attentes et en éclairant les
choix, ainsi que la solidarité dès lors qu’il contribue à réduire les inégalités d’accès de tous au
développement durable. Il importe en effet de voir dans le prestataire AEU® davantage un animateur
qu’un expert environnemental ; ce n’est pas un acteur supplémentaire mais un interlocuteur pour la
collectivité, fort de convictions et médiateur entre la collectivité et le maître d’œuvre allant, au-delà
du cloisonnement des structures institutionnelles, faire sauter les verrous pour laisser émerger les
synergies qui insuffleront le développement durable dans la ville.
Le projet urbain ainsi porté par l’AEU® devient pleinement collaboratif, partant de la mise en débat
des questions environnementales entre élus, techniciens, représentants associatifs et habitants
suscitant compréhension et donc vision partagée des enjeux et de la recherche, par la discussion, des
solutions innovantes les plus pertinentes. L’adhésion se fait d’autant plus naturellement que l’AEU®,
par son approche spécifique du territoire, permet au projet porteur d’économies via la recherche de
compacité et de performances du bâti, de rester respectueux de l’identité locale en valorisant le
patrimoine naturel ou bâti.
De fait, le projet ne vient pas raser l’existant mais se construit autour des caractéristiques
géographiques et historiques du site, tout en laissant primer qualité de vie et lien social.
Comment l’outil s’articule-t-il dans le temps ?
Pour tenir ses promesses, l’AEU® doit naturellement intervenir le plus en amont possible du projet,
devenant en quelque sorte l’épine dorsale s’articulant autour de quatre étapes-clés :
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Etape-clé n°1 : l’analyse des enjeux environnementaux, temps fort de sensibilisation des
parties prenantes, à partir de l’identification et du diagnostic croisé des principaux enjeux
environnementaux du projet ; ce travail s’effectuant sous forme d’ateliers réunissant élus,
experts techniques et représentants associatifs permet de faire émerger la culture commune
environnementale.
Etape-clé n°2 : la définition des objectifs environnementaux et de principes d’aménagement
pour la prise de décision. Cette étape vise à parvenir à un consensus autour de ces objectifs
environnementaux, ainsi que sur leur hiérarchisation, pour définir les orientations et
aménagements intégrant les critères techniques, économiques et sociaux, occasion de se
déterminer sur l’opportunité éventuelle de diligenter d’autres investigations sur des
solutions opérationnelles.
Etape-clé n°3 : la transcription opérationnelle des propositions retenues, aboutissement du
travail de conception permet de rédiger recommandations et clauses environnementales qui
seront incluses dans les documents d’urbanisme (SCOT, PLU) ou contractuels (ZAC,
lotissements, ORU)
Etape-clé n°4 : Le suivi et l’animation des projets, phase ultime pour suivre et contrôler dans
la durée l’application des préconisations environnementales au cours des travaux
d’aménagement et de construction, cela en s’assurant de leur appropriation et en facilitant
la mise en œuvre de la démarche HQE® dans les constructions.
Peut-on mettre en œuvre cette approche dans tout contexte ?
L’une des forces de l’AEU®, c’est précisément sa capacité à être déployée à différentes échelles
territoriales, que ce soit, entre autres, à celle d’un quartier, d’une commune ou d’une
intercommunalité, ainsi qu’ à différents stades du projet urbanistique, qu’il s’agisse de la commande,
des études opérationnelles, de la planification ou de la programmation, et cela aussi bien pour des
projets neufs ou des projets de rénovation. Cela en fait une démarche particulièrement flexible et
donc facilement adaptables aux enjeux des territoires.
C’est la raison pour laquelle l’ADEME soutient fortement cette approche à travers la création d’un
système d’aide spécifique, des formations et la parution d’un guide méthodologique, ou encore, le
lancement d’appels à projets par les Directions régionales de l’Agence.
Quel bilan dressez-vous à ce jour de la mise en œuvre de cette approche quatorze ans après son
initialisation ?
Plus de 900 AEU® ont été réalisées au niveau national, formation à la clé de 400 professionnels.
Nous disposons à présent de nombreux retours d’expériences et de témoignages de collectivités, que
l’ADEME diffuse à travers ses fiches « Exemples à suivre », parfaites illustrations des bénéfices directs
d’amélioration de la qualité environnementale des projets urbains et des bénéfices indirects liés à
l’intelligence globale du projet.
Pouvez-vous nous citer un cas emblématique de mise en œuvre de l’AEU® sur un territoire ?
Je pense notamment à la Commune de Vezin-le-Coquet, au cœur du Pays de Rennes. Cette commune
de 4.000 habitants a réalisé une AEU® sur une ZAC pour concilier préservation des ressources,
qualité de vie et solidarité sociale. L’AEU a en particulier permis de fixer un certain nombre de
principes d’aménagement :
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la maîtrise de l’étalement urbain en faisant le choix de logements collectifs ou semi-collectifs
groupés ;
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le développement d’énergies renouvelables via la mise en œuvre d’un réseau de chaleur
bois-énergie et l’utilisation de l’énergie solaire pour l’eau chaude sanitaire ;
la création d’un écosystème urbain, la ZAC étant conçue autour d’une trame verte ;
la gestion alternative des eaux pluviales, grâce à la fixation d’un coefficient d’imperméabilité
des sols et la récupération des eaux pluviales pour les usages domestiques ;
enfin, la solidarité sociale, favorisée dans des espaces publics, des centres d’activité et
l’aménagement d’accès doux.
La conception des études en amont et de manière transverse s’avère donc un investissement de base
essentiel, compte tenu de leur effet de levier.