prophètes de malheur».
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prophètes de malheur».
À LA UNE DE SPENGLER À GORDON, EN PASSANT PAR ATTALI OU ZEMMOUR... LES PROPHETES DE MALHEUR ONT-ILS RAISON? Chaque crise a ses Cassandre. Oswald Spengler ou Alvin Hansen hier. Robert J. Gordon, Eric Zemmour ou Jacques Attali aujourd’hui. Comment fonctionnent ces machines à prophétiser? Que valent leurs prédictions? Enquête chez les «prophètes de malheur». PIERRE-HENRI THOMAS 34 8 OCTOBRE 2015 WWW.TRENDS.BE «Apocalypse business» L’angoisse fait vendre. Le business du malheur est d’autant plus florissant que les temps sont maussades. Un des exemples les plus frappants est le succès, en France, du livre d’Eric Zemmour: Le suicide français (plus de 400.000 exemplaires vendus). Il suit un autre phénomène de librairie, La France qui chute, de Nicolas Baverez, qui avait eu son heure de gloire en 2003. La France est riche en commentateurs (Marc Touati, Jean-Paul Betbèze, Marc Fiorentino, Simone Wapler, etc.) annonçant l’apocalypse. Il y a peut-être dans ce tropisme un élément très «hexagonal»: la confiance dans l’avenir est assez fortement liée à la confiance que se font les individus entre eux. Or, les Français sont extrêmement méfiants les uns à l’égard des autres, remarque Daniel Cohen (lire son interview ci-après). «En France, déclare-t-il, le mot ‘collaboration’ fait penser à Vichy et est encore pris comme une insulte.» C’est ce qui expliquerait par exemple le faible nombre d’entreprises de taille moyenne dans l’Hexagone. «Avec les entreprises moyennes, où il faut avoir une vraie intelligence des relations sociales, les Français ont JACQUES du mal», constate Daniel ATTALI Cohen, qui souligne en revanche que le succès du UNE GUERRE modèle allemand tient au Jacques MONDIALE fait qu’il est bien plus cooAttali EN 2035 ? pératif. «La réussite du modèle allemand n’est pas Un livre au titre ambitieux: Peut-on prévoir tant dans les mini-jobs ou l’avenir?. Deux expositions (l’une à Paris, les emplois précaires que l’autre à Bruxelles) basées sur un livre prédans le fait que les syndicédent (Une brève histoire de l’avenir). Deux cats ont conclu un accord films qui vont passer sur Arte ces prochains avec le patronat pour jours... Jacques Attali soigne toujours aussi échanger de la modération bien son marketing. D’autant qu’il a le chic salariale contre des hausses pour lancer des messages-chocs. De ses d’emplois», précise encore dernières interviews, on retient surtout Daniel Cohen. la prévisiond’une troisième guerre mondiale Mais les déclinistes en 2035 (mais toujours aussi madré, ne sont pas tous français. Jacques Attali ajoute: «si nous ne faisons Les Anglo-Saxons ne sont rien»). pas en reste. Ces dernières Cette nouvelle apocalypse serait la conséannées, Ian Morris (Pourquence de la suite d’événements annoncés quoi l’Occident domine dans Une brève histoire de l’avenir: déclin de le monde... pour l’instant, l’empire américain, échec de la création 2010), Niall Ferguson (The d’une gouvernance mondiale (c’est le stade Great Degeneration, 2013) actuel), donc gouvernance par les marchés et d’autres ont annoncé financiers, ce qui aboutit à une troisième le déclin de l’Occident. guerre mondiale puis, pour ceux qui en Il y a aussi ceux qui, auront réchappé, à un Etat de droit mondial. comme l’économiste améMais Jacques Attali a déjà lancé beaucoup ricain Robert J. Gordon, de prévisions. Sur la probable mort de l’euro prédisent non pas l’explofin 2011, sur un grand krach en 2015... sion, mais la stagnation. Les Face à un journaliste de l’AFP, dans les pretrente glorieuses, ces mières heures de 2013, le même Attali années de pleine croislançait: «Il y a beaucoup de perspectives sance entre 1945 et 1975, qui donnent le sentiment que 2014 et 2015 sont derrière nous, disaitseront de bonnes années.» il dès 2000. C’était une Ceci relativise cela. parenthèse illuminée, mais courte dans l’histoire de l’humanité. Nous sommes freinés, estime N’allez pas croire Robert J. Gordon, par une accumulation de boulets: la démographie stagne, les que le pessimisme gains de productivité générés par l’édu- est la marque cation atteignent un plafond, les inéga- de l’époque. lités augmentent, de même que l’endet- En fait, il surgit à tement du monde, la mondialisation tire les salaires vers le bas et la crise de l’en- chaque turbulence vironnement n’arrange rien. Tout cela économique. met un point final à la croissance car aucune véritable révolution technologique n’apparaît à l’horizon. Paul Krugman, Larry Summers, Patrick Artus et bien d’autres reprendront peu ou ≤ WWW.TRENDS.BE 8 OCTOBRE 2015 35 BELGAIMAGE L es salles de cinéma d’Europe accueillent ces jours-ci un documentaire qui se veut explosif. Intitulé L’oracle, il conte l’histoire d’un analyste financier et gestionnaire de fonds hors normes, Martin Armstrong. Condamné en 1999 aux Etats-Unis pour avoir monté une escroquerie portant sur 3 milliards de dollars et aujourd’hui libéré, l’homme prétend avoir été en réalité condamné parce qu’il a refusé de donner aux autorités l’algorithme censé prédire les crises. Il tente sa réhabilitation avec une prédictionapocalyptique, qu’il lance depuis plus de six mois: «Ce système est en train d’exploseret le krach, qui touchera d’abord les obligations d’Etat, aura lieu... le 1er octobre 2015.» L’aventure de Martin Armstrong montre que prédire l’avenir est un exercice à la fois difficile et médiatique. à la une économie DE ALVIN HANSEN À LARRY SUMMERS 75 ANS DE STAGNATION SÉCULAIRE REUTERS Lorsque l’Américain Alvin Hansen écrit surabondance d’épargne, trop peu de en 1938 son livre Full Recovery or Stagnademande et trop peu d’investissements. tion, il a déjà une grande carrière d’écono- Deux raisons expliqueraient cette stagnamiste derrière lui. Non seution: le ralentissement démolement comme professeur, graphique et l’absence de noumais aussi comme conseilveauté technologique réelleler du président Roosevelt ment révolutionnaire. Le fait qu’il a aidé dans la concepqu’il n’y a plus de véritable protion du New Deal, ce vaste grès technique est la thèse de programme d’investisseRobert J. Gordon. Pour lui, Interments qui devait sortir net, le smartphone, les réseaux les Etats-Unis de la grande sociaux sont certes des gadgets dépression. plaisants, mais qui ne dopent en Pour Hansen, seul l’Etat, rien la productivité. Au contraire en investissant en masse, des innovations majeures préLarry Summers pouvait éviter la «stagnacédentes comme l’eau courante tion séculaire» d’une économie (qui a permis un bond de l’espérance de au moteur fatigué. La terminologie sera vie), l’électricité ou le moteur à explosion. reprise 75 ans plus tard, par Larry Cette idée de stagnation séculaire est Summers, l’ancien secrétaire au Trésor notamment supportée dans le domaine de Bill Clinton. Dans un célèbre discours francophone par l’économiste Patrick au FMI en 2013, il explique que bien Artus, qui a publié au début de l’année avant la crise des subprimes, l’économie Croissance zéroavec la journaliste Mariefilait déjà un mauvais coton: il y avait Paule Virard. POURQUOI LES STAGNATIONNISTES AURAIENT RAISON SOURCE : THE ECONOMIST Ces deux graphiques tendent à montrer que la période exceptionnelle que nous avons vécue jusqu’à la fin des années 1970 et qui a été marquée par les trente glorieuses n’est plus qu’un lointain souvenir. La croissance du PIB des vieilles nations industrielles affiche une tendance inexorable à la baisse. Et une des grandes explications de ce manque de tonicité réside dans l’évolution de la démographie : dans nos nations, la proportion de la population en âge de travailler est en recul. Cela pèse sur l’activité économique. Ici, il n’est pas question d’un déclin momentané avant de repartir à la hausse, mais d’une stagnation dont on ne voit pas la fin. Variation annuelle du PIB réel (en %, moyenne mobile sur 10 ans) 10 Japon Italie France 6 Grande-Bretagne Allemagne Etats-Unis 2 -2 1960 1970 1980 1990 2000 2010 2014 Population en âge de travailler (en % de la population totale) 70 65 60 Japon Italie France 55 Grande-Bretagne Allemagne Etats-Unis 50 1960 1970 1980 36 8 OCTOBRE 2015 WWW.TRENDS.BE 1990 2000 2010 2020 2030 2040 2050 prou de ce discours sur le retour de la croissance zéro. N’allez pas croire, cependant, que le pessimisme est la marque de l’époque. En fait, il surgit à chaque turbulence économique. Les crises de 1836-1839 et 1846-1848 sont ainsi le terreau sur lequel le sulfureux diplomate français Joseph Arthur de Gobineau va penser «la mort des civilisations» et construire ses thèses racistes. A la même époque, l’économiste anglais Stanley Jevons s’inquiète déjà de la diminution des réserves de charbon du Royaume-Uni. Les thèses déclinistes prendront cependant leur envol lors de la première longue dépression internatio- Beaucoup d’économistes pensent en termes de cycles. Certains tablent sur des cycles de deux ou trois ans, d’autres de huit à 10 ans, d’autres de 40 à 60 ans... nale qui a lieu de 1874 à 1896 et qui a des échos très actuels. La crise a son origine dans une crise bancaire, à Vienne. Elle provoque un krach boursier en Europe. La croissance s’effondre, d’autant que les mines d’or de Californie commencent à se tarir et que certains parlent — déjà — d’essoufflement technologique. C’est à ce moment que l’historien australien prédit le «déclin de la race blanche» alors que le philosophe allemand Oswald Spengler (lire l’encadré «Le chantre du déclin») commence à rédiger ce qui deviendra Le déclin de l’Occident. Un essai qui sera la bible des déclinistes jusqu’à aujourd’hui. L’autre grande dépression est celle de 1929-1940, qui présente elle aussi bien des similitudes avec notre époque. Elle commence également par une crise financière, qui se mue en vaste crise économique et fait surgir des idées noires quant à l’impossibilité d’une croissance future. C’est à ce moment que certains lancent le concept de «stagnation séculaire» qui sera repris 75 ans plus tard. PIERRE DOCKÈS, PROFESSEUR D’ÉCONOMIE À L’UNIVERSITÉ DE LYON 2 «La notion de déclin n’est pas neutre. Elle suppose une certaine vision du monde.» Une telle conception étonne Pierre Dockès: «Se projeter aussi loin dans le temps est assez extraordinaire, quand on y pense». Alors, sommes-nous à la veille d’une inexorable stagnation, d’un monde sans croissance, de siècles de morosité économique? Un retour dans le passé permet de modérer cette crainte. «En 1937, après quelques années de reprise, la crise revient avec une violence extrême, rappelle Pierre Dockès: la Bourse plonge, le PIB s’effondre, le chômage remonte au sommet qu’il avait atteint en 1933... Les économistes, en particulier Alvin Hansen, conseiller du président Franklin D. Roosevelt, en arrivent à la conclusion que l’on entre dans une stagnation séculaire. Avec des arguments très semblables à ceux d’aujourd’hui : la démographie baisse, l’innovation ralentit, les occasions d’investir se raréfient, etc. Cette conviction va perdurer de 1937 à 1950. Elle se poursuivra pendant les premières années des trente glorieuses. Cela relativise sensiblement le débat actuel sur la stagnation séculaire: ce n’est pas la première fois que l’on y a cru!» «Les êtres humains ont du mal à penser le retournement, ajoute Pierre Dockès. Ils pensent que la tendance qu’ils vivent va durer éternellement, aussi bien la croissance que la récession. A chaque crise, et surtout lors des dépressions longues, lorsque règnent des tensions sociales et que la croissance est beaucoup plus modérée, on voit apparaître ces thèses déclinistes. Mais à l’horizon de ces discours, il y a des aspects politiques tragiques. Cela s’est terminé deux fois par une guerre mondiale. Et c’est cela qui fait peur aujourd’hui», ajoute-t-il. ≤ OSWALD SPENGLER LE CHANTRE DU DÉCLIN Philosophe allemand mort tion pouvait s’autodétruire en 1936, chantre de la révoen l’espace de quatre ans. lution conservatrice et antiC’est en 1924 que Paul démocratique (sans pour Valéry écrit cette phrase autant soutenir le célèbre: «Nous autres civinazisme), Oswald Spengler lisations, nous savons a connu la célébrité avec maintenant que nous son essai Le déclin de l’Occisommes mortelles.» Après dent. Un ouvrage écrit juste 1918, nous découvrons avant et pendant la Predonc que nous vivons dans mière Guerre mondiale, un monde qui peut finir. Oswald Spengler mais paru après l’armistice. Cette idée de finitude a été Une vaste fresque histodéveloppée par des historique où il tente de décrire les cultures riens (comme Arnold Toynbee). Elle surcomme des êtres «biologiques» qui nage aussi dans une série de livres déclivivent, se développent et meurent selon nistes, dont certains sont de grands un cycle quasi naturel. La vie et la mort succès de librairie. On se souvient des civilisations est d‘ailleurs un thème de La France qui tombe, de Nicolas prépondérant après le premier conflit Baverez ou, plus récemment, du Suicide mondial qui a démontré qu’une civilisafrançais d’Eric Zemmour. BELGAIMAGE Les prophètes de malheur se partagent donc en deux grandes catégories. Il y a ceux qui pensent déclin et ceux qui pensent stagnation. Ce n’est pas du tout la même chose. «La notion de déclin n’est pas neutre. Elle suppose une certaine vision du monde», explique Pierre Dockès, professeur d’économie à l’Université de Lyon 2 (1). Lorsqu’on parle de déclin, on parle en effet de la chute d’une nation ou d’une civilisation, souvent au profit d’autres nations ou civilisations concurrentes. C’est aussi une vision d’une économie mercantiliste. Le stock de richesses est fini et le gain de l’un est donc la perte de l’autre. «Cette notion de déclin est surtout reprise par des philosophes, des journalistes, des essayistes», poursuit-il. Car les économistes actuels, eux, parlent plutôt de stagnation ou de croissance zéro. Penser en termes de stagnation, c’est prendre appui sur des éléments chiffrés: une longue baisse de la croissance, un épuisement des ressources, une évolution de la population, etc. Beaucoup d’économistes, aussi, pensent en termes de cycles. Or, si l’on pense que l’histoire se répète, le déclin n’est pas l’apocalypse. C’est seulement une des saisons de l’année. Certes, les économistes sont très partagés sur leur durée: certains tablent sur des cycles de deux ou trois ans, d’autres de huit à 10 ans, d’autres de 40 à 60 ans... En revanche, si l’histoire est pensée comme une flèche, la stagnation devient un phénomène plus angoissant car elle devient séculaire. Cette idée d’histoire pensée comme une flèche vient du christianisme. Le monde est fini et il se terminera le jour du jugement dernier. Le Moyen Age pensait plutôt que l’histoire se terminerait par une chute. Mais avec la Renaissance et les Lumières, on la pense sous forme de progrès. «Cependant, dès le début des années 1950, il y a eu une remise en cause de l’idée très lourde de progrès général de l’esprit humain», observe Pierre Dockès. C’est dans ce courant que s’inscrivent par exemple Robert J. Gordon et ceux qui le suivent. Ils estiment qu’après une période exceptionnelle de croissance entre 1870 et aujourd’hui, nous allons retrouver la croissance très faible qui avait caractérisé l’humanité jusqu’alors. BELGAIMAGE Déclin ou stagnation? WWW.TRENDS.BE 8 OCTOBRE 2015 37 The perfect solution for your portfolio management. The vwd portfolio manager is the perfect solution for private banking, wealth and asset management, family offices and foundations. 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Oui, répond l’ancien conseiller du président français François Mitterrand. «Nous pouvons prévoir l’avenir, a-t-il déclaré au micro de France Culture. Tout le monde peut le faire.» Mais si nous ne nous essayons pas à la prévision, c’est d’abord parce que nous avons peur. «C’est comme un check-up, poursuit Jacques Attali. Nous n’avons pas trop envie de savoir ce qui nous attend.» C’est aussi parce que nous sommes devenus d’indécrottables égoïstes. «Une doctrine se met en place (elle se traduit dans les discours souverainistes, la publicité, etc.): moi d’abord, maintenant, tout de suite, observe Jacques Attali. Nous ne pensons plus qu’à très court terme. Les médias ne s’intéressent qu’aux sondages, les patrons qu’aux cours de Bourse, les politiques qu’à leur indice de popularité. Mais si nous avions pensé il y a 20 ans, aux grands problèmes d’aujourd’hui, ils ne seraient pas arrivés.» PG à la une économie «L’ORACLE», («THE FORECASTER», EN ANGLAIS) Ce documentaire conte l’histoire de Martin Armstrong. Condamné en 1999 aux Etats-Unis pour escroquerie et aujourd’hui libéré, le gestionnaire de fonds prétend avoir été en réalité condamné parce qu’il a refusé de donner aux autorités l’algorithme censé prédire les crises. Car prévoir l’avenir n’est pas le prédire. «Prédire c’est penser que l’avenir est déterminé et s’y résigner puisqu’il est déterminé, dit-il. Prévoir, au contraire, c’est créer les conditions pour que ce que l’on a prévu de mauvais n’arrive pas.» Et Jacques Attali de prévoir une troisième guerre mondiale en 2035... z (1) Pierre Dockès et d’autres analysent ces théories du déclin dans un numéro de La Revue économique, 2015/5 intitulé «Fin de monde : analyse économique du déclin et de la stagnation (1870-1950)», Les Presses de Sciences Po. L’idée que la marche des affaires suit des cycles est aussi vieille que l’économie. Adam Smith, déjà, distinguait l’état progressif, l’état stationnaire et l’état de déclin. Un siècle plus tard, le Français Clément Juglar compare les dynamiques économiques à l’œuvre dans trois pays (France, Etats-Unis et Royaume-Uni) et il estime qu’elles répondent à des cycles d’environ huit ans. Alvin Hansen, Simon Kuznets, Maurice Allais,... Presque chaque économiste va ensuite y aller de son cycle en mettant en exergue des causalités les plus variées: inventions technologiques, évolution de la masse monétaire, fluctuation des prix des matières premières... Le Britannique William Stanley Jevons a même émis l’idée que les cycles écono- PG NIKOLAÏ KONDRATIEFF LE MARTYR DU CYCLE ÉCONOMIQUE Nicolaï Kondratieff miques de 10 ans qu’il avait découverts étaient liés à l’apparition des taches solaires! Un statisticien russe, Nikolaï Kondratieff, se penche lui aussi sur l’évolution des prix. Il met à jour des cycles plus longs, entre 40 et 60 ans. Une découverte qui le conduit à sa perte, car il prédit que si la crise des années 1930 est terrible, elle ne signifie pas la fin du capitalisme. Staline ne supporte pas ces idées anticommunistes et le statisticien est fusillé en 1938. L’Autrichien Joseph Schumpeter reprendra ses travaux et, aujourd’hui encore, les cycles de Kondratieff sont abondamment cités dans la littérature économique. POURQUOI LES DÉCLINISTES AURAIENT RAISON L’économiste russe Nikolaï Kondratieff avait imaginé que l’économie était portée par des grandes vagues cycliques générées par des innovations mar- quantes. Mort en 1938, il n’a naturellement pas pu prévoir celles qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, ce qui a été le travail de ses disciples. Deux remarques : 1. Les SOURCE : THE ECONOMIST vagues de croissance et de déclin s’accélèrent. La 1re vague s’est étendue sur une soixantaine d’années, alors que la 5e, dans laquelle nous nous trouvons, ne devrait durer qu’une trentaine d’années. 2. Nous sommes à la fin de cette 5e vague, soit dans la phase de déclin, ce qui explique l’ambiance pessimiste du moment. Nous sommes à la fin du cinquième cycle de Kondratiev Première révolution industrielle Machines à vapeur, (métiers à tisser hydrauliques, naissance chemins de fer, aciéries... d’une industrie sidérurgique…) 1re vague 1785 2e vague 1845 60 ans Electricité, chimie, moteur à combustion interne (essence, diesel) 1950 50 ans Informatique, nouveaux médias, réseaux sociaux 4e vague 3e vague 1900 55 ans Pétrochimie, électronique, aviation… 5e vague 1990 40 ans 2020 30 ans WWW.TRENDS.BE 8 OCTOBRE 2015 39