CARDIO-GREFFES HAUTE

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CARDIO-GREFFES HAUTE
CARDIO-GREFFES HAUTE-NORMANDIE
Association régie par la loi du 1er juillet 1901
Siège social : C.H.U. de ROUEN - Pavillon Derocque
Service de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire - 76031
ROUEN
Tel/Fax : 02 35 10 63 60
mail :[email protected]
http://cghn.voila.net
Rouen, le 23 avril 2015,
Le Président de Cardio-Greffes Haute-Normandie
à
- Monsieur le Président de la Métropole Rouen Normandie (cabinet du Président)
- Monsieur le Président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Rouen
Copies pour information à :
- Monsieur le Directeur général de l’agence régionale de santé de Haute-Normandie
- Madame la Directrice générale du CHU de Rouen
- Monsieur le Chef du service de chirurgie thoracique et cardiovasculaire du CHU de Rouen
Objet : Syndicat mixte de l’aéroport de Rouen – Vallée de Seine et transport des organes
en vue de transplantations
Messieurs les Présidents,
Nous nous permettons de vous adresser au nom de notre association, Cardio-Greffes
Haute-Normandie, une réflexion sur l’importance de la pérennité d’un aéroport de proximité du
CHU Charles-Nicolle accessible jour et nuit toute l’année.
La première transplantation cardiaque en Haute-Normandie a été réalisée le 6 avril 1986
par le Professeur Soyer au service de chirurgie thoracique et cardiovasculaire du CHU de
Rouen. Le Professeur Soyer est par ailleurs reconnu dans le monde entier pour la mise au point
innovante d’une méthode de remplacement de valves cardiaques sans ouverture du thorax. Le
service est actuellement dirigé par le Professeur Bessou et on peut estimer à environ 400 le
nombre de transplantations réalisées depuis 1986, le flux moyen annuel en est de 15 à 20. Par
ailleurs il y a 25 centres de transplantation cardiaque agréés en France, 430 transplantations en
2014 et environ 10.000 depuis la première du Professeur Cabrol en 1968.
La transplantation est l’ultime recours dès lors qu’un pronostic létal à court terme
est prononcé. Des méthodes alternatives provisoires et très spécifiques existent par exemple
comme les systèmes d’assistance circulatoire ventriculaire (« les pompes »), le CARMAT qui
est une grande réussite technologique, mais la transplantation d’un organe reste à l’heure
actuelle la seule solution pérenne. .
Aussi, notre reconnaissance s’adresse évidemment aux donneurs, leurs familles et aux
équipes chirurgicales, médicales et soignantes dont la sollicitude est permanente.
Nous participons activement à la promotion du don d’organes Notre objectif est de
montrer que « la greffe, ça marche ».
Membre de la Fédération Française des Associations de Greffés du Cœur et des Poumons
La transplantation est un problème de santé publique et d’égalité de tous à l’accès
aux soins en conformité avec les principes éthiques. Le problème est vital et il ne peut
être traité comme la maîtrise de dépenses publiques et de santé, acceptable par ailleurs
telle la prescription de certains médicaments génériques ou bien le développement de
l’hospitalisation ambulatoire.
Les patients, les pouvoirs publics et les institutions sont confrontés à la pénurie de dons
et à un taux de refus de l’ordre de 40%. Et aussi à l’augmentation des besoins, 20 000
personnes en liste d’attente tous organes confondus. Des mesures législatives et
réglementaires sont prises ou en voie de l’être comme dans le cadre de la loi « Santé » en
discussion au Parlement : l’amendement concernant le consentement présumé, le don de rein
entre vivants, … .
Une étape capitale du processus de transplantation est le transport des organes.
Après avoir été prélevés ceux-ci doivent être transplantés au plus vite. Ils sont placés
dans de la glace et transportés dans des containers spéciaux et on ne dispose que de quelques
heures. Tous les moyens terrestres et aériens sont bons pour les emmener à l’hôpital où seront
greffés un ou plusieurs malades. C’est l’Agence de la Biomédecine et les coordinations
régionales localisées dans les hôpitaux qui sont chargées selon des normes extrêmement
strictes de la répartition des organes entre les différents centres de transplantation sur tout le
territoire national (c’est la solidarité), avec une veille permanente 24 heures sur 24 et ceci toute
l’année. De nombreux documentaires ont été diffusés dans les médias sur ce sujet.
En chirurgie de transplantation cardiaque il est essentiel de réduire le plus
possible le temps d’ischémie (absence de circulation sanguine) afin d’obtenir dès la fin
de l’intervention une fonction cardiaque satisfaisante. Le retour d’expérience des
spécialistes a montré que le délai idéal entre le moment du prélèvement et la
transplantation était situé entre 3 et 4 heures. Entre 4 et 5 heures la durée d’ischémie est
susceptible de générer des suites opératoires difficiles et 5 heures et au delà
représentent un délai où la mortalité post-opératoire devient très importante.
Ce « temps d’ischémie » se décompose en séquences incompressibles : le
prélèvement et le conditionnement du greffon (30 mn minimum) et le temps de réimplantation
chirurgicale (40 à 60 mn minimum) et variables, soit transport uniquement terrestre avec
escorte de la gendarmerie ou hélicoptère lorsque les greffons des donneurs sont situés
approximativement dans un rayon de 150 km autour de Rouen, soit le plus souvent par avion
(données : 75% des cas par avion sur 2013 et 2014)* ce qui nécessite le transport du greffon
jusqu’à l’aéroport le plus proche, le transport aérien depuis souvent des centaines de km et le
transport entre le pied de l’avion et le bloc opératoire. Le trajet entre l’aéroport de Boos et le
CHU de Rouen est sensiblement de l’ordre de 20 mn.
Les compte-rendus opératoires précités n’ont montré que 25% de cas d’ischémie totale
supérieurs à 4 heures, ce qui est satisfaisant.*
Une mesure aboutissant à l’allongement significatif de la durée d’acheminement
des greffons cardiaques du pied de l’avion au bloc opératoire du CHU aurait
obligatoirement un impact négatif : tout se joue à la marge. Si la mise à disposition d’un
hélicoptère pour le transport des greffons depuis par exemple un aéroport distant d’une
centaine de km n’allongerait que de 10 à 20 mn le temps d’ischémie par rapport à Boos, ceci se
rajouterait malgré tout aux délais variables. Et en cas de non disponibilité de l’hélicoptère, par
exemple la nuit (la majorité des transports d’organe a lieu la nuit) ou de conditions
météorologiques défavorables la simulation d’une augmentation de 40 mn du temps de
transport (60 mn depuis un aéroport à 100 km) multiplierait par 3 les cas d’ischémie supérieurs
à 4 heures avec les conséquences potentielles rappelées ci-dessus.
Membre de la Fédération Française des Associations de Greffés du Cœur et des Poumons
Par ailleurs la transplantation d’organes et de tissus a été déclarée grande cause
nationale et relève de la solidarité inter-régionale : le système et les règles de répartition de
l’Agence de la Biomédecine ont entraîné l’acheminement vers d’autres centres de
transplantation dans d’autres régions pour ne citer les données que de 2014 et du premier
trimestre 2015 de 10 cœurs, 7 poumons, 21 foies et 4 pancréas tandis que 15 cœurs ont été
acheminés et implantés à Rouen pendant la même période*. Le transport de chaque organe
nécessite une logistique très complexe, ce sont des équipes des centres de transplantation
implanteurs qui se déplacent et viennent chercher les organes (en général 2 à 3 personnes
avec le matériel nécessaire) et sachant que l ‘on peut prélever jusqu’à 7 organes sur un
donneur (1 cœur, 2 poumons, 2 reins, 1 foie, 1 pancréas) on imagine le degré de
complexification d’un transfert entre 2 sites éloignés et les risques encourus sachant qu’une
équipe ne prend en charge qu’un organe..
Ce n’est donc pas la seule transplantation cardiaque qui serait en cause, mais
toutes les transplantations d’organes en contradiction avec les mesures envisagées par
les pouvoirs publics nationaux pour enrayer la pénurie croissante d’organes.
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simulation via ambulance
escortée aéroport à 100 km
simulation via Hélico aéroport à
100 km
réel via Boos
sujet 1
ischémie (mn)
Durée totale d'ischémie réelle et simulée
L’allongement de la durée de transport des organes « aurait obligatoirement un impact
sur les résultats des greffes ».*
Alors pour paraphraser Albert Einstein, « Dieu ne joue pas aux dés »
L’agrément des Centres de transplantation est soumis à leur activité. Le département de
l’Eure fait malheureusement partie des 3 départements métropolitains où l’activité de
prélèvement est nulle depuis de nombreuses années. Les centres de transplantation cardiaque
les plus proches sont situés à Caen et en région parisienne. Rappelons que les patients en liste
d ‘attente doivent rejoindre leur Centre dans les délais les plus brefs dès l’appel à la
transplantation si une opportunité se présente, sinon « ils passent leur tour », ce qui est une
situation particulièrement difficile à vivre. Des projets ambitieux sont en voie de se réaliser au
CHU de Rouen: implantation d’un centre interrégional de transplantation pulmonaire Normandie
- Picardie - Nord Pas-de-Calais approuvé par l’ARS (ne se pratiquent à Rouen actuellement
que les transplantations cardiaques et rénales) et d’un Centre européen d’entraînement aux
techniques de simulation médicales.
Membre de la Fédération Française des Associations de Greffés du Cœur et des Poumons
Il est hors de propos pour nous en tant que patients de rentrer ici dans le débat récurrent
concernant la localisation de l’aéroport qui serait le plus judicieux pour le tourisme par voie
aérienne à l’intention des normands, Force est de constater que le déclassement ou la
fermeture de l’aéroport de Boos entraînerait des conséquences significatives sur les transports
sanitaires et d’organes, service public s’il en est. Dans un rayon de moins de 100 km autour de
Rouen il n’y a pas d’alternative (même désormais semble-t-il au Havre - Octeville) dans les
quelques aérodromes civils recensés qui ne disposent pas des moyens matériels et techniques
pour assurer un service permanent.
C’est pour toutes ces raisons que notre Association sollicite instamment les
responsables du Syndicat Mixte de l’Aéroport de Rouen Vallée de Seine d’envisager les
solutions propres à assurer les services vitaux rendus compte-tenu des arguments qu
nous présentons.
Nous nous tenons à votre disposition, et nous vous assurons, Messieurs les Présidents,
l’assurance de notre très haute considération.
Pour le Bureau de Cardio-Greffes Haute-Normandie
Jean-Claude FENYO
* (données publiées dans la Presse régionale ou communiquées par le service de chirurgie thoracique).
Membre de la Fédération Française des Associations de Greffés du Cœur et des Poumons

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