Jean-Louis Trintignant, la mélancolie et l`étrangeté

Transcription

Jean-Louis Trintignant, la mélancolie et l`étrangeté
Jean-Louis Trintignant, la mélancolie et l'étrangeté
Écrit par Administrateur
Jeudi, 10 Octobre 2013 13:12 -
Jean-Louis Trintignant, qui a annoncé sa décision de quitter la scène après un dernier récital
de poésie, mercredi soir à Vannes, possède le charme et l'étrangeté de ceux qui ont côtoyé la
folie et la mort, désormais avide, après une intense carrière tout en haut des affiches, de nature
et de contemplation.
Acteur perfectionniste à la voix monocorde si particulière, Jean-Louis Trintignant, qui aura 83
ans le 11 décembre, est une personnalité complexe et inquiète, cérébrale et réservée, plus chat
que chien. Il disait avoir longtemps abrité le culte de la folie, avoir passé sa vie à se détruire, à
mettre un terme à ses amours et à ses amitiés par refus du confort, avoir eu des tentations
suicidaires.
"Je reconnais n'avoir jamais été très gai", indiquait cet acteur de stature internationale, ajoutant:
"Pour moi, il n'y a pas de grands auteurs qui n'aient pas su parler de la mort. Voyez Brassens,
Brel, Ferré. C'est pour cela que je préfère Shakespeare à Molière !"
Ce pessimisme l'accompagnait bien avant la mort de sa fille Marie - tuée en 2003 sous les
coups de Bernard Cantat - avec qui il entretenait une grande complicité. Mais ce décès tragique
va dorénavant le hanter : "j'aurais pu arrêter ma vie à ce moment-là". Poussé par ses proches,
il remonte toutefois sur scène, trouve une "thérapie" dans les poèmes de Prévert et Apollinaire,
tient à distance la mélancolie qui le submerge.
Visage ridé et voix encore plus creusée, il vit depuis une trentaine d'année près d'Uzès (Gard),
pas loin de ses chères vignes, sa passion de l'âge mûr : "Mon Midi est un peu à mon image :
austère, pas très chaleureux. Le calme règne et cela me convient".
Un jeu nerveux et sensible
Né en 1930 à Piolenc dans le Vaucluse, ce fils d'industriel et neveu du coureur automobile
Maurice Trintignant est élevé à la dure avec un sens de l'honnêteté qui ne l'a jamais quitté.
Jeune homme timide donnant l'impression d'être toujours ailleurs, il suit à Paris les cours de
comédie de Charles Dullin.
1/3
Jean-Louis Trintignant, la mélancolie et l'étrangeté
Écrit par Administrateur
Jeudi, 10 Octobre 2013 13:12 -
Il débute sur scène en 1951, jouant Schiller et Shakespeare, et à l'écran dans "Si tous les gars
du monde", de Christian Jaque (1956). Il tourne la même année au côté de Brigitte Bardot ("Et
Dieu créa la femme", Vadim). Il dit avoir été choisi parce qu'il était "joli". Sa liaison avec BB fait
les choux gras de la presse.
Au retour d'un traumatisant service militaire en Algérie, le comédien, passé à côté de la
Nouvelle vague, redémarre sa carrière avec "Les Liaisons dangereuses" (Vadim, 1960). Son
jeu nerveux et sensible séduit. C'est avec sa composition d'amoureux romantique dans "Un
homme et une femme" (avec Anouk Aimée) de Lelouch (Palme d'or 66 à Cannes) que sa
carrière prend un tournant décisif.
Il devient alors l'acteur qui tourne le plus - une soixantaine de films en 20 ans -, à l'instar de
Belmondo et Delon. En 1969, il reçoit à Cannes le prix d'interprétation pour le rôle du juge
incorruptible dans "Z", de Costa-Gavras.
Jean-Louis Trintignant étoffe son répertoire de jeune premier pour camper toute la gamme des
traîtres, de crapules ou de personnages ambigus, voire inquiétants. Il est un intellectuel
complexe dans "Ma Nuit chez Maud" (Rohmer), un financier cynique dans "La Banquière"
(Girod), un médecin machiavélique dans "Passion d'amour" (Scola), un homme traqué dans
"Un Homme est mort" (Deray).
Ce passionné de courses automobiles (il terminera 7e aux 24H00 de Spa-Francorchamps en
1981) tourne avec les plus grandes : Catherine Deneuve ("Je vous aime", 1980), Isabelle
Huppert ("Eaux profondes", 1981) ou Fanny Ardant ("Vivement dimanche", 1982).
Mais, fatigué des tournages et indifférent au vedettariat, Jean-Louis Trintignant, qui a interprété
au total quelque 130 rôles, ralentit sa carrière cinématographique dans les années 80, au profit
du théâtre. Il s'illustre entre autres dans des Lectures de grands textes.
Cela ne l'empêchera pas de tourner par la suite dans des "coups de coeur" comme "Regarde
les hommes tomber" (Audiard), "Trois couleurs/Rouge" (Kieslowski) ou "Ceux qui m'aiment
prendront le train" (Chéreau). Il fait sa dernière apparition - et quelle apparition ! - au cinéma,
2/3
Jean-Louis Trintignant, la mélancolie et l'étrangeté
Écrit par Administrateur
Jeudi, 10 Octobre 2013 13:12 -
dans "Amour", de l'Autrichien Michael Haneke (Palme d'Or 2012 à Cannes et Oscar du meilleur
film étranger). Il obtient alors le César du meilleur acteur.
Jean-Louis Trintignant, qui a réalisé deux films sans grand succès ("Une journée bien remplie"
et "Le maître-nageur"), a épousé en premières noces l'actrice Stéphane Audran puis la
réalisatrice Nadine Marquand avec qui il a eu trois enfants, Marie, Pauline (morte quand elle
était bébé) et Vincent. Le couple a divorcé. Il vit avec Marianne Hoepfner, ancienne pilote de
course automobile.
3/3