Amenzu n°11 Septembre 2001 - ACBB

Transcription

Amenzu n°11 Septembre 2001 - ACBB
A M E N Z U
Bull etin d e l’A s so ciati on C ultu rell e de s Be rb èr e s de Bretagne
E D
I T
O
Une année charnière ?
C’est la rentrée….les événements
nationaux et internationaux nous
montrent que nos ennuis ne sont pas
terminés. Avec un pouvoir qui, après
avoir affiché son mépris devant les
revendications, joue la carte du
pourrissement afin de discréditer les
véritables représentants de la cause
amazighe, Boutef continue de souffler le chaud et le froid, comptant sur
le temps qui passe pour anéantir
toute opposition.
Cet été, j’étais en Algérie. J’ai vu de
bonnes choses telles que la volonté
de faire aboutir la plate-forme d’El
Kseur et une maturité certaine des
jeunes kabyles déterminés. Il y a
aussi du moins bon…comme ces
personnes toujours à l’affût du gain
ou ces opportunistes qui sont prêts à
tout pour assouvir leur soif, facile-
R I
A L
ment récupérables par le pouvoir. Il
y a également la femme qui n’est pas
assez représentée dans les Comités
de village et c’est une aberration
pour un mouvement qui combat la
dictature. Il faut avoir le courage de
balayer devant sa porte si nous voulons faire triompher la démocratie !
Il y avait enfin des propositions de
sortie de crise telles que l’autonomie
de la Kabylie ou un système fédéral.
Tout est bon à condition qu’il y ait
un débat franc avec toutes les composantes de la société en évitant les
manipulations. L’année qui commence est porteuse d’espoirs, mais
aussi de dangers dans une conjoncture internationale explosive. La vigilance ainsi que l’union sont indispensables pour faire face à tous les
défis.
Boualem Kaci – Chaouch
Numéro 11
Septembre 2001
S o m m ai r e
Éditorial
p1
L’ACBB à Douarnenez
p1
A travers la Kabylie
meurtrie
p2
La parole aux fem- p 3
mes démocrates de 4
De beaux lendemains p 5
p6
De Tahar Djaout aux p 6
tours de Manhattan
Le Congrès mondial
amazigh et le Maroc
p 7
Communiqué des
aarouch de Kabylie
p 8
L’A.C.B.B à Douarnenez
A l’invitation des responsables du festival du cinéma de Douarnenez (dont le thème cette année portait
sur les Maoris) qui s’est déroulé du 18 au 25 août dernier, l’A.C.B.B était présente au Village des Associations où nous avons tenu un stand. Des photos prises en Kabylie ont été exposées, elles ont suscité
beaucoup de questions des nombreux festivaliers qui nous ont rendus visite.
Notre association était également partie prenante dans le débat qui a eu lieu sur les évènements en Kabylie que certains voulaient
inscrire dans un cadre plus large.
D’autres associations étaient également présentes comme Tamazgha, l’A.C.B Paris ainsi
que l’Association France Algérie Brest.
Nous remercions les responsables de nous
avoir bien accueillis et nous pensons être présents chaque année à cette riche et sympathique manifestation.
Photo A.C.B.B
Page 1
Août 2001, à travers la Kabylie meurtrie
Malgré les recommandations dissuasives du Quai d'Orsay concernant la
Kabylie, j'ai tenu à m'y rendre pour
y sentir les douleurs et les espoirs de
cette région meurtrie par la répression sanglante du printemps.
Mon regard est d'abord attiré par
l'omniprésence pesante du deuil :
drapeaux noirs et banderoles noires
à travers les rues des villes et des
villages, portraits des jeunes assassinés par les balles explosives tirées
par les gendarmes, murs recouverts
de tags exprimant la colère et les
revendications, édifices publics calcinés lors de l'extrême violence du
printemps noir (sur les ruines noircies du tribunal d' Amizour, l'inscription «ici repose le pouvoir»). Les
fêtes de l'été ont été annulées
comme celle du bijou d'Ath Yenni,
les plages d’Azeffoun et de Tigzirt
boudées. Ce noir que fait oublier un
instant sur les chemins
qui montent, rocailleux,
les échappées sur les villages des crêtes d'une
beauté à vous couper le
souffle. Pendant ce
temps, à Souk-Ahras près
de la frontière tunisienne
(où je me suis rendue
pour voir les vestiges
encore meurtrier de la
ligne Morice), la vie
s'étire dans la somnolence de la tradition ; à
Oran le festival de raï bat son plein,
et Alger prépare à coups de centaines de millions le festival international de la jeunesse, en grattant, ripolinant les façades et les trottoirs.
Ailleurs donc, c'est une autre Algérie.
Mais sous le deuil pointent la colère et
la détermination de la population de
Kabylie à faire aboutir une lutte engagée pacifiquement depuis des dizaines
d’années et ravivée par les évènements
du printemps : le « Z » de l’alphabet
berbère millénaire, symbole de la revendication identitaire fleurit partout sur les
drapeaux, les murs, les poteaux, les arbres, les fontaines. A côté des portraits
omniprésents de Matoub Lounès, chanteur assassiné en 1998 et devenu le
symbole de la jeunesse révoltée se sont
ajoutées des inscriptions comme « Massinissa, on ne t’oubliera jamais» (1er
jeune assassiné à Ath Douala ce printemps). Dans le village du bout du
monde de Tifilkout, au pied du Djurdjura, les jeunes du comité de village m’accueillent, vigilants, et m’expliquent leur
implication dans la coordination de la
wilaya de Tizi Ouzou.
Sur les murs « Kabylie autonome».
C'est une idée nouvelle qui revient souvent dans les discussions au delà du
cercle militant, et exprimée sans crainte
par des anonymes :" de toute façon ce
pouvoir ne nous envoie que des balles,
alors prenons notre sort en main" .
Dans ce village de 4000 habitants, plus
de 600 sont partis manifester à Alger le
14 juin. A Tizi Ouzou, des jeunes filles
du «collectif des femmes de Kabylie»
me racontent comment, à moins de 10,
elles ont organisé l’ extraordinaire marche de 100000 femmes à Tizi . A la
permanence du «collectif des avocats» à
Tizi ( créé pour aider les victimes et
familles de victimes de la répression),
les plaintes s’accumulent : des jeunes
avocates et avocats affirment avec gra-
vité et détermination «malgré tous les
obstacles, nous irons jusqu’au bout ! ».
Dans les familles à l’hospitalité légendaire, à Zekri, Tifilkout ou Ath Yenni,
jeunes et vieux me martèlent «40 ans de
mépris, cela suffit ; cette fois, on ne
cédera pas ! ». La rupture avec le pouvoir est totale. Ses symboles sont systématiquement balafrés du " Z". Les inscriptions en langue arabe effacées. Les
gendarmes mis en quarantaine sont cloîtrés. Le «tube» de l’été, partout, est la
chanson de Oul Lahloul «Pouvoir assassin».
Nicole Logeais
matin, tous les rideaux de fer sont
baissés ; bus, fourgons, camions se
remplissent, banderoles au vent. A 20
km à Naceria, 1° barrage de gendarmerie, infranchissable, je contourne ; à
Corso, 2° barrage : des milliers de jeunes à pied, sous un soleil torride, les
poings serrés, avancent vers les gendarmes. La colère monte irrésistiblement.
Ils me voient : «une Française ? bravo
et merci d’être venue !». Je contourne
par la côte. A Alger, quadrillée par un
imposant dispositif de répression, les
voies d’accès au stage du 5 juillet sont
bouclées. Je contourne. A Chevalley
quelques centaines d’ « éclaireurs» de la
coordination essaient d’avancer. Sous
mes yeux, insultes anti-kabyles, agressions, arrestations. La marche vers la
présidence encore une fois, n’aura pas
lieu.
Le soir, alors que s’ouvre à huis-clos un
festival- carnaval pour de jeunes étrangers, la jeunesse de Kabylie, indésirable
à Alger, étrangère dans son propre pays,
est rentrée, la rage au cœur.
Des jeunes filles pleurent :
«c’est trop de haine ! ».
Les émeutes reprennent à
Tizi Ouzou. Évidemment !
Jusqu’ à quand ?
Et dans toutes les bouches
la même question : quelles
formes de lutte inventer
puisqu'on ne peut plus
marcher ? La résistance
passive ?
La Kabylie est entrée en
rébellion contre le pouvoir,
durablement. Comme le
prouve la grandiose marche du 20 août à Ifri pour la commémoration du Congrès de la Soummam où la
Kabylie en se réappropriant son histoire
a interdit la présence des officiels sur la
terre.
Au retour, je m'arrête à Marseille
pour rendre visite à un jeune blessé
d'Azazga. Je lui apporte la cassette
"Pouvoir assassin" et lui donne des
nouvelles d'Azazga : un grand sourire malgré un corps transpercé ! Et
une question : " Ne me dis pas que
la lutte va s'arrêter ?" C'est insupportable et réconfortant à la fois.
Mercredi 8 août : journée ubuesque :
Je rentre, bouleversée par tant de
alors que s’ouvre à Alger le festival
mépris et admirative devant une
international de la jeunesse, la poputelle détermination .
lation de Kabylie et principalement la
2
N.L
jeunesse se met en marche une noule 13-08-01
velle fois vers Alger. A Tizi, 9 h du
Page
2
La parole au collectif des femmes démocrates de Kabylie
Azul Faroudja, peux-tu te présenter
aux lecteurs d'Amenzu ?
Voilà, je m'appelle Moussaoui Faroudja,
ingénieur en énergétique (université de
Tizi-Ouzou), née à Boghni à 40 Km au
sud de la ville de Tizi-Ouzou, militante
de la cause amazigh ayant participé à
toutes les actions visant la vulgarisation
de la revendication de mon peuple à
savoir l'identité amazigh, militante des
droits des femmes, notamment sympathisante de la célèbre association thighri
n'thmetut ( cri de femmes).
Votre première action a été l'organisation de la marche des femmes à TiziOuzou le 24 mai 2001 : 100.000 femmes dans les rues, du jamais vu ! Comment expliquer vous votre succès ?
Comment avez vous mobilisé ?
Certes, une telle mobilisation est du
jamais vu en Kabylie, pas même en Algérie pour une marche de femmes, mais
il faut savoir que le contexte et les circonstances nous ont été favorables et
qu'à l'instar de toutes les tranches de la
société kabyle, les femmes sont aussi
concernées par ce qui est arrivé .
Il fallait démontrer au pouvoir que les
jeunes qui sont sortis dans les rues ne
sont pas des voyous comme il voulait le
faire croire à l'opinion nationale et internationale mais des jeunes qui sont assoiffés de liberté, qu'ils ont des mères,
des sœurs et des femmes et qu'elles sont
dans les rues pour crier halte aux massacres de leurs enfants. Pour la mobilisation on a fait un travail de fourmi : affichage dans toutes les localités, contacts
de tous les représentants de tous les villages et quartiers notamment de la ville
de Tizi-Ouzou, déplacement lors du
conclave d'Illoula, réunion des aarachs
de Tizi-Ouzou et bien sûr information
par le biais de la presse.
Dans quelles circonstances vous est
venue l'idée de créer un collectif de
femmes ?
Les évènements qui ont secoué et endeuillé la Kabylie ont vu la naissance
d'un mouvement citoyen sans précédent,
l'appel fait par les comités de villages,
appelés aarachs (les représentants de
chaque village siégent dans une organisation ancestrale de notre société, appelée taadjmat, cadre composé exclusivement d'hommes, tradition oblige). Alors
nous, les femmes concernées par ce qui
arrive à nos enfants, automatiquement il
nous fallait trouver un moyen pour nous
organiser et crier haut et dire aux goujats qui nous gouvernent d'arrêter de
tirer avec des balles réelles sur nos enfants et faire savoir que le combat mené Vous avez appelé à la marche du 14
par les hommes pour notre Kabylie est juin de la Kabylie sur Alger, marche
sauvagement réprimée. Peux-tu me
le nôtre.
donner ton témoignage sur cette répression ?
manifester pacifiquement pour une
Algérie meilleure, comment il a
organisé la chasse au kabyle, insultes,
menaces, lynchages en public sous l' œil
approbateur des services de sécurité
(police et autres), ou comment des
policiers s'adonnaient à des sales
besognes en plein jour, des scènes de
viol dans les rues, sur les plages. C'était
une horreur.
Il n ' y a pas de femmes dans les
comités de villages . Quels sont vos
rapports avec la coordination ?
La société kabyle est une société conservatrice. Cela ne nous a pas empêchées,
nous les femmes, de nous imposer par
notre participation aux différentes ac-
tions et l’organisation de différentes
marches de contestation à travers tout le
territoire de la Kabylie, et de travailler
en collaboration avec les éléments de la
coordination qui sont favorables au
changement et au développement de
notre société notamment par l’intégration des femmes dans l’organisation
citoyenne.
Peux-tu dire quelques mots sur la marche du 8 août 2001, marche où nous
nous sommes rencontrées ?
Et la lutte pour tamazight dans le collectif des femmes ?
Le collectif des femmes est né durant les
évènements, on s'est organisé autour de
la plate forme d' El Kseur, regroupant
les revendications concernant tous les
jeunes tombés sous les balles du pouvoir
criminel,3 et dans laquelle la revendication de tamazight est inscrite sous toutes
ses formes.
L'appel a été fait par la coordination
inter wilaya des aarachs, dairas et
communes, bien sûr à l'instar de
millions de mes concitoyens j'ai répondu
à l'appel.
Je ne pourrais trouver les mots pour
décrire l'horreur que nous avons vécue,
dans une Algérie qui se dit République.
J'ai vu comment le pouvoir mafieux a pu
dresser la population de l'Algérois
contre nous les kabyles qui étions venus
Lors de la marche du 8 août, une fois de
plus le pouvoir ferme les portes de la
capitale aux kabyles. Il a sorti tout son
arsenal de guerre pour réprimer les Kabyles, on a eu droit au rituel habituel, à
savoir, insultes, propos racistes, coups
de matraque, gaz lacrymogène, tirs de
balles, emprisonnement et bien sûr une
vraie chasse aux Kabyles a été organisée
particulièrement aux alentours du stade
du 5 juillet où se déroulait un festival
pour la jeunesse étrangère afin de redorer son blason vis-à-vis de l’opinion
internationale. Ce jour-là mes copines et
moi, avons échappé miraculeusement à
la matraque des chiens de Bouteflika,
grâce à nos amis militants dans l’algérois.
Page 3
FEMMES — Tulawin
a ve c un p ro gramm e d e
contestation sur les mois à venir.
Et maintenant, quelle est votre Quelle solidarité attendez-vous
appréciation de la situation et des berbères de France en
particulier et des démocrates en
quels sont vos projets ?
général ?
Le pouvoir mafieux fait dans le
pourrissement de la situation, un Je dirai aux berbères de
vrai black out, une sourde oreille s'organiser et de faire connaître
le combat de
l e u r s
s emb lab les
réprimés par le
p o u v o i r
cr im in el
d'Alger. Et aux
démocrates de
composer avec
les
v ra is
d émo c ra t es
aux revendications des Kabyles ; d'Algérie.
je dirai qu'on ne se laissera pas
faire, le combat continue , Faroudja, tu es la présidente du
d'ailleurs une série d'actions est c o m i t é M u h e n d A a r a v
prévue pour cette rentrée sociale Bessaoud , fo ndate ur d e
(Suite de la page 3)
A s so c ia t io n
C u l t u re l le de s
B e r bè re s
de B re t a g ne
A. C. B. B
MJC La Paillette
rue Pré de Bris
35 000 RENNES
tél. : 02 99 59 88 88
Fax : 02 99 59 88 89
[email protected]
R es p o ns ab le d u
Bu lle t in :
Kh a led DR ID ER
Ont collaboré à ce numéro :
Hocine
Céline
Khaled
Gérard
AIT SEDDIK
BOUTET
DRIDER
HAMON
Boualem KACI-CHAOUCH
Gérard LAMBERT
Nicole LOGEAIS
Tawès MEZIANE
Nadia
OULD-SLIMANE
Point de vue
Les évènements de Kabylie ont suscité
bien des débats et soulevé beaucoup d’interrogations de ce côté-ci de la Méditerranée.
Que n’a-t-on pas entendu comme lecture
spécieuse ? En effet, quelques-uns nous
sommaient d’en faire une traduction nationale de ces évènements au prétexte
que la misère, la hogra, l’injustice et tant
d’autres problèmes affectent tout le pays
et que ces données socio-économiques
sont la seule approche pertinente du problème. En somme, ils ne nous demandaient rien moins que de sacrifier ce que
nous considérons comme le nœud (de
l’histoire) de ce pays, la question identitaire.
Cette interprétation cynique de la situation n’est pas différente de celle du pouvoir algérien qui, depuis l’indépendance,
a toujours relégué au rang d’accessoire
cette question.
Si telle est la grille de lecture, que n’y at-on point intégré cet autre élément que
pourtant aucune photo et image des
nombreuses manifestations n’ont raté,
l'Académie Berbère : peux-tu
nous parler de cet engagement ?
Si aujourd'hui on s'est constitué
en comité autour de lui, ce n'est
qu'une reconnaissance pour tout
ce qu'il a fait pour la cause
amazighe, c'est grâce à lui si
aujourd'hui je suis fière d'être
berbère, il a su nous le
transmettre et nous le faire
aimer, ce qu'a toujours caché
l ' é c o le a l g é r i e n n e . P a r
conséquent, on s'attèle dans ce
comité à faire connaître
Bessaoud et son oeuvre aux
Algériens vu qu'il a été exilé
pendant 35 ans, interdit par les
autorités algériennes, et bien sûr
le plus important est de continuer
le combat pour l'amazighité
(Interview réalisé
par Nicole Logeais)
montrant des hommes mais surtout des
femmes et des jeunes arborer des signes,
des symboles et des slogans qui ne laissent aucun doute sur le profond attachement des kabyles à leur identité ?
N’ y a-t-il pas une indécence à ne vouloir faire dire aux manifestants que ce
que l’on a envie d’entendre ?
Les évènements, dit-on, ont repris ces
jours-ci comme s’ils avaient cessé.
Y a- t-il besoin de citer les innombrables
articles de la presse algérienne (par
exemple El Watan , Le Matin ou Liberté) qu’on ne peut suspecter de berbérisme
outrancier, pour convaincre ces nombreux amis de l’Algérie que ce pays ne
saura être entier en étant partiel.
Jusqu’à ce pouvoir qui après tant de
morts et de blessés, tant de mépris et de
violences, tant de morgue et de calculs
sordides découvre que le traitement de la
question devient urgent.
Quel crédit dans tout cela ?
La lutte pacifiste continue. Laissons ces
amis retrouver la clairvoyance et abandonner leurs contorsions de langage.
Wynna
Page 4
De beaux lendemains.
Céline Boutet
ment en question, brûlé, comme abanParler, écrire sur ce voyage est chose à revenir, un jour prochain.
Ce4)sont les détails qui attirent l'œil, et donné au cœur de la ville.
difficile, tant les émotions ont été(Suite
fortes,page
tant la découverte a été belle. Il fut ini- forcent les souvenirs. Je me rappelle cet Effectivement, elle est belle, otage noire
tiatique à plus d'un titre, un éveil des abri de bus, tout en pierres, sur la route d'un peuple opprimé. "Les gendarmes
sens et d'essence à cet ailleurs qui pour- de Tizi Ouzou à Tigzirt, belle image, sur sont interdits de sorties à Tizi et ailleurs.
rait être mien, tant l'imagination n'a pas un fond de mer et de montagne. Je re- C'est une réponse à leur mépris à notre
trahi la réalité. J'ai posé, à chaque ins- vois les grands Z blancs, gravés sur cha- égard, on ne veut pas de nous à Alger,
tant, un regard tour à tour candide, désa- que platane bordant la route pour aller à on ne veut pas nous écouter, alors pourbusé, émerveillé, intimidé devant l'im- Bougie, et la fierté de ceux qui les mon- quoi le ferions-nous ?" Et pour appuyer
mensité de ce que j'ai entrevu, tant du trent. C'est leur victoire, cette terre est la ses dires, une inscription explicite sur
point de vue des paysages, que de la leur, et ce Z les délivre, les soulage un Zerhouni frappé d'ostracisme en Kabycertitude d'être face à une entité millé- peu des atrocités commises au nom de lie. Je n'ai vu des gendarmes que sur la
naire, patrimoniale, à une société qui a quelques fausses idées et de vrais inté- route Tizi-Alger, de loin. En Kabylie, ils
l'orgueil de ses montagnes, de son his- rêts. Et il y a ces villages aux maisons si sont absents. Partout, des mots peints en
toire, de sa langue, de ses poètes retrou- hospitalières, les jeunes groupés au bord rouge, en noir, sur les murs blancs, parde la route, les petites filles, toutes de tout, des drapeaux noirs témoignent de
vés.
L'Algérie vous accueille comme elle rires et de robes légères, et ces vieilles la colère, du deuil, de l'exigence du
vous quitte, dans le bruit, la foule, les femmes aux robes kabyles, le visage changement. Pour le néophyte, l'exilé,
regards, la chaleur poussiéreuse et illuminé d'une gaieté secrète, se donnant ce bras de fer entre les Kabyles et le
moite, les désarrois de l'émotion, et vous rendez-vous au pied d'un poteau électri- pouvoir algérien est parfois presque
choquant, incompréhensible, illégitime,
mène jusqu'à la terre kabyle, à Tizi Ou- que pour quelques conversations.
zou, d'abord, cité fourmillante, anarchi- Et il y a le temps qui passe, et ramène à déplacé comme me l'a dit un Kabyle de
que, aux constructions éparses, inache- la réalité politique, à la vigilance néces- Paris dans le train nous ramenant à la
vées, fournaise au milieu des monta- saire... Car déjà, il faut rentrer, et guet- capitale française. "Comment peut-on
gnes, et de loin en loin, presque' à l'hori- ter, l'ancienne peur au ventre surgissant interdire à un ministre l'accès à une parzon, le Djurdjura. Autant de cimes que parfois des mémoires défuntes, au dé- tie du territoire national ? Comment les
de caresses au ciel, autant de soleil et de tour d'un virage laissant la route dans la jeunes peuvent-ils détruire l'infrastrucpénombre si un barrage militaire vous ture, en sachant qu'il y aura en consélumière que d'appels à la vie.
attend... ou si c'est quence une augmentation des impôts?"
La chaleur, une fois le
pied dehors vous saisit. J'ai posé, à chaque instant, un autre chose. C'est cet Mais qu'est-ce qu'un bâtiment, sinon
C'est ce bonheur volé regard tour à tour candide, dé- autre chose qui en quatre murs ? Et qu'est-ce qu'un symqui appelle, oblige aux sabusé, émerveillé, intimidée appelle à un imagi- bole, et sa force n'échappe à personne,
sacrifices de vies, à la devant l'immensité de ce que j'ai naire angoissé, une sinon une arme, un étendard à détruire
lutte obstinée. Il y a les entrevu, tant du point de vue des vigilance de chaque ou à protéger selon qu'on l'honnisse ou
paysages, bien sûr, aux paysages, que de la certitude instant, o ccultés, qu'on la vénère ? L'indignation, la
couleurs du drapeau d'être face à une entité millé- transcendés par l'ha- condamnation doit se trouver ailleurs,
bitude, le courage, parce que la vindicte, l'opprobre des
amazigh, l'ocre des ver- naire...
l'espoir, et une autre rebelles répond à l'oppression, à la
sants de terre, de poussière, le vert de la végétation, quand elle actualité.
négation culturelle, économique, ton'a pas été brûlée par les militaires, les Et pourtant, il n'est pas tard. Et pourtant, tale, à la mort.
falaises, avancées harmonieuses dans on vient de quitter les abords de la Alger est différente, ça et là, on me dit
l'azur de la mer. Harmonie, c'est le mot plage, à Bougie ou Tigzirt, ou encore les qu'il y a eu un attentat à cet endroit, un
qui sied à cette étendue infinie, aux villages de crête, de laisser des gens autre ici, au coin de cette rue pleine
mille détours, aux mille figuiers, aux souriants, pleins de soleil, attablés au d'échoppes. Rien ne le laisserait deviner,
café, flânant dans les rues, le sourire aux c'est vrai. Pour autant, ce n'est pas oumille senteurs.
Chaque courbe des collines, chaque lèvres, des conducteurs
blié.
vallée, chaque souffle de vent inspire la fous s'alpalgant dans Mais c'est un autre pays obscur, La détermination en
douceur, la quiétude, jusqu'au ciel, de une bonne humeur tein- violent, haineux, silencieux qui Kabylie est intacte;
feu, de nuit, de gris quelquefois, qui tée de fausse agressivi- s'immisce, s'infiltre comme une l'effervescence des
s'offre au regard, vibrant hommage à cet té. Mais c'est un autre mauvaise herbe, et étouffe le sem- mois précédents s'est
en-bas que l'été, certainement doit adou- pays obscur, violent, blant de normalité qui s'installe muée en la certitude
cir. Aux crépuscules, les étoiles descen- haineux, silencieux qui en dépit de tout, en attendant les partagée, commudent et se donnent en parures, prêtant s'immisce, s'infiltre prochains combats, le prochain niante, tacite que le
leur brillance aux villages de crêtes, comme une mauvaise affront.
m o u v e m e nt
ne
"colliers de perles" scintillantes des hau- herbe, et étouffe le sems'éteindra pas, loin
teurs, maintes fois chantées, aux dessins blant de normalité qui s'installe en dépit s'en faut, et que le refus de se conformer
mystérieux, inaccessibles, et pourtant si de tout, en attendant les prochains com- au diktat officiel, de pardonner les asproches qu'il suffirait de tendre le bras bats, le prochain affront. La traversée sassinats, les fautes, les incompétences
pour s'en saisir et les emporter au loin. des villages amène des commentaires politiques, est définitif, indiscutable.
Mais il faut rester au pied des monta- acerbes, ostensiblement satisfaits:
gnes à les admirer en silence, le temps "Vois comme elle est belle, la gendar(Suite page 6)
qu'elles s'apprivoisent et vous appellent merie!". Le regard se pose sur le bâtiPage 5
De beaux lendemains (suite)
Le marasme politique, économique
oblige à une crispation identitaire forte,
à l'intransigeance, sans nul autre choix
possible dans l'immédiat.
La Kabylie est une des Algérie, superbe, immense, moderne, cultivant
ces contradictions, à l'image de ces
trois personne qui marchent devant
nous; au milieu un homme, à gauche, une femme, à droite une autre
femme. L'une porte le hidjab. Un incident sur la route nous fait rire, et tous
trois se retournent vers nous, les sourires laissant deviner une hospitalité généreuse, un désir de connivence, de
complicité dans la joie. Plusieurs mondes se côtoient, s'opposent, se défient.
Mais il serait trop simple de s'en tenir à
une seule vision, l'Algérie kabyle est
infiniment plus complexe, un entrelacs
d'amitiés, de luttes intestines, de médisances aussi, dangereuses, de poussées
libératrices et de traditions ancrées enserrant parfois les individus dans une
autre injustice, un autre reniement de
leur identité, un autre hermétisme.
S'il peut sembler futile de parler de
ces paysages kabyles à l'heure des
morts, des douleurs exhalées, de la
colère, ces montagnes, ces rivières,
ces forêts sont autant de souvenirs
doux au cœur, d'attachements intrinsèques qui fondent la volonté inaltérable, la conviction immuable que ce
bijou abritant des biens plus précieux
encore, ce ferment intellectuel, culturel, humain mérite que l'on se donne
à lui avec force et sensibilité.
On ne revient pas indemne d'Algérie.
"I wig ig bwi wadu
Inasen m ad ulayen
Awit ay d tirga nernu"
Aït Menguellet
C. B
De Tahar Djaout aux tours de Manhattan
L' opinion publique internationale se
réveille, pro fo ndément cho qu ée
par la violence terroriste qui s'est abattue sur les tours de Manhattan
et par là sur des milliers de civils américains, allongeant ainsi la liste sinistre
des victimes de tous les intégrismes de
part le monde.
Pourtant les cris du peuple algérien qui
a vu sous ses yeux tant d'horreurs, tant
d' hommes et de femmes égorgés, décapités, d'enfants brûlés dans des fours
lors des attaques sanglantes des GIA
sont parvenus depuis longtemps jusqu'à
nous, à ceux qui ont voulu les entendre.
En 1991 défilaient dans les rues d'Alger
des jeunes "afghans" préparés à la
guerre sainte depuis 1984 par Ben Laden dans les camps de Peschawar construits par les USA. Des jeunes que le
pouvoir algérien avait livré aux idéologues islamistes installés
dans l'école.
Des jeunes à
qui on a caché
l'identité et la
culture et qui
ont cherché
dans les prêches enflammés et haineux des islamistes dispensés dans les
mos qu ées
sous contrôle
de l'État une appartenance, une référence. Des jeunes qui, à l'appel du FIS
(légalisé par le pouvoir algérien) ont
gagné les maquis arrosés de dollars
saoudiens et se sont transformés en as-
sassins de journalistes et d' intellectuels
(le 1er était Tahar Djaout en mai 93)
puis de femmes et d'enfants.
A ce moment là, dans nombre de pays
occidentaux, on donnait l'asile politique
à des islamistes considérés comme opposants politiques. C'est de son asile de
Virginie aux USA qu' Anouar Haddam
en 1994 a revendiqué l'attentat boulevard Amirouche et le détournement
d'avion à l'aéroport d' Alger du 24 décembre. C'est de Londres que partaient
les fax revendiquant les multiples attentats. Mitterrand pensait qu'il fallait laisser le pouvoir au FIS. Et la France refusait l'asile politique aux démocrates
algériens. De nombreux médias semaient la suspicion par la question "qui
tue qui ?". Souvenez-vous de ces années
où tombaient jour après jour les journalistes algériens : aucun n'a eu droit à une
(Liberté 16-09-01)
minute de silence sauf
de la part de citoyens qui, comme nous
dans l’ASDA*
ont essayé de dénoncer ces crimes et
leurs complices et appeler à la solidari-
té.
Alors, aujourd'hui que l'Amérique est
touchée dans sa chair, le terrorisme islamiste doit être combattu par la communauté internationale. Enfin ! Et tant
mieux. L' histoire tragique a fini par
nous donner raison. Car personne aujourd'hui ne pose la question "qui tue
qui ?"
Cependant il ne faudrait pas que ce
sursaut salutaire occulte les responsabilités anciennes et actuelles dans ce
déferlement de haine et ne se fasse au
détriment du peuple afghan. Que l'on
dénonce d'abord l'idéologie islamiste
rétrograde et porteuse de haine qui
nourrit le terrorisme. Que l'on dénonce les responsabilités du pouvoir
algérien qui a favorisé ce mouvement
fasciste contre la montée des forces
démocratiques et qui maintenant libère des terroristes alors qu' il a fait
tirer sur la jeunesse de Kabylie. Que
l'on dénonce les États du golfe, financiers de ces hordes barbares. Que l'on
dénonce toutes les bases arrières et les
complicités de ce terrorisme y compris
aux États-Unis. Et que l'on apporte un
soutien sous toutes ses formes aux
forces démocratiques qui luttent dans
les pays ravagés par cette terreur.
Alors peut - être que les cris des victimes, toutes les victimes, américaines,
algériennes ou afghanes auront été enfin
entendus.
Hocine Aït Seddik, Nicole Logeais,
Gérard Hamon, Tawès Méziane,
membres fondateurs en 1994
et militants de l'ASDA
_____
*ASDA (Association de Solidarité avec
les Démocrates Algériens)
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Évènements de Kabylie : le combat continue !
Coordination inter wilayas des arouch,
daïras et communes
Déclaration
ques, à travers un communiqué du gouvernement
diffusé par l’Unique (ENTV), nous informe d’une
rencontre clandestine avec des représentants fantoches, faisant état de négociations, que nous
avons rejetées et dénoncées publiquement, dans
le fond et dans la forme.
Non satisfait de ces complots, voulant pousser
notre mouvement vers une impasse ou un pourrissement, ce pouvoir sans scrupules, une fois de
trop, use de son arsenal de guerre pour réprimer
une marche pacifique des délégués de villages et
de quartiers.
Les délégués de l’inter- wilayas réunis aujourd’hui le
5 octobre 2001 au théâtre Kateb Yacine de Tizi - Ouzou :
- exigent la libération immédiate des détenus de
ce jour, 5/10/2001 ;
- dénoncent ces pratiques malsaines répétées ;
- mettent en garde le pouvoir quant aux conséquences fâcheuses qui en découleraient et dont il
sera le seul responsable ;
- défient le Chef du gouvernement à rendre publics les noms et les images de ces pseudo représentants qu’il a eus comme hôtes.
- Conscients de notre responsabilité, de la gravité
de la situation et des enjeux qui pèsent sur notre
mouvement, nous sommes aujourd’hui interpellés, plus que jamais, à changer de stratégie vis-àvis de ce pouvoir et de ses acolytes.
- Un conclave extraordinaire interwilayal aura lieu
le jeudi 11 octobre 2001 à Bgayet pour engager la
réflexion sur les perspectives.
Photo Liberté 6/10/01
Notre mouvement citoyen, né dans la douleur des
événements du Printemps noir 2001 (une centaine
de morts et des milliers de blessés), qui s’inscrit
dans la voie résolument pacifique pour la satisfaction pleine et entière des revendications légitimement exprimées par la jeunesse et fidèlement
synthétisées dans la plate-forme d’El-Kseur.
Après s’être doté d’un cadre de concertation et organisationnel au niveau wilaya et inter-wilayas, il a engagé plusieurs actions populaires et pacifiques, notamment les marches historiques au niveau local
(Bouira, Begayet et T. O.) et au niveau national le 14
juin 2001 à Alger qui a drainé des millions de citoyennes et de citoyens pour la remise de notre plateforme de revendications, violemment réprimée, entraînant une dizaine de morts et des centaines de
blessés et de détenus.
Malgré cette violence subie par notre mouvement, par
les tenants du pouvoir maffieux et assassin, fidèle à
nos principes directeurs, nous avons engagé d’autres
actions pacifiques à Alger (le 5.7.2001 et le 8.8.2001)
qui ont été stoppées par les forces de répression munies d’armes de guerre aux portes d’Alger.
À notre grande surprise, après avoir arrêté le principe
d’une marche à Alger pour la date symbolique du 5
octobre, la présidence de la République choisit un
moment de grande écoute (durant la mi-temps du
match JSK-WA Casablanca) pour diffuser un communiqué opaque, confus et dilatoire invitant notre mouvement à déposer la plate-forme d’El-Kseur, tout en “Ulac smah ulac”
reconnaissant la légitimité et l’objectivité des revendi- “Le combat continue”
cations.
Tizi Ouzou, 5 octobre 2001
En réponse à cette invitation, bien que venue tardivement, notre mouvement a accepté naïvement et sagement de déposer symboliquement la plate-forme
d’El-Kseur.
Le pouvoir, fidèle à ses manœuvres machiavéli-
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Congrès Mondial Amazigh
Lettre d'Information, N° 2, septembre 2001.
Arbitraire au Maroc
Deux militants amazighs viennent d'être victimes
de l'arbitraire des autorités de la monarchie marocaine. Il s'agit de Ali Harcherras, vice-président du
Congrès mondial amazigh (CMA), président de
l'association Tilelli à Goulmima ainsi que Hamid
LIHI, président de TADA (coordination des associations amazighes au Maroc) et militant de l'association Tilelli à Goulmima.
En effet, suite à une convocation des autorités provinciales d'Errachidia, il a été fait savoir aux deux
militants qu'il leur est interdit d'organiser de manifestation publique sous peine qu'ils soient poursuivis pour trahison.
Une manifestation publique est prévue pour le
mois d'octobre, manifestation du mouvement amazigh (berbère) au Maroc. Et ces deux militants sont
parmi les organisateurs qui travaillent depuis des
mois à la préparation de cette manifestation.
Est-ce pour empêcher cette marche que les autorités marocaines ont agit de la sorte ? Une chose est
sûre : les autorités marocaines ne veulent pas que
les Imazighen sortent dans la rue. Plusieurs activités (rassemblements, conférences, réunions publiques,...) ont été déjà interdites par les autorités marocaines.
On se rappelle bien également de l'épisode 1994
quand Ali Harcherras et six de ses collègues enseignants, tous de Goulmima, ont été arrêtés suite à la
manifestation du 1er mai 1994 à laquelle ils ont
participé avec des banderoles revendiquant la reconnaissance de Tamazight. La forte mobilisation
suscitée, aussi bien dans la région qu'ailleurs dans
le monde, a contraint les autorités marocaines à les
libérer quelque temps plus tard.
Et c'est suite à cela que Hassan II, lors de son discours du 20 août 1994, promet l'enseignement "des
dialectes berbères", promesse qui est restée lettre
morte.
Le Congrès mondial amazigh condamne fermement cette attitude des autorités marocaines et exprime son soutien et sa solidarité indéfectibles
avec les deux militants. Et nous appelons l'ensemble des acteurs du mouvement amazigh partout
dans le monde à dénoncer la politique antiamazighe des autorités marocaines et apporter leur
soutien à Ali Harcherras et Hamid Lihi.
Communiqué
Nous, Hamid LIHI et Ali HARCHERRAS, citoyens marocains, militants du Mouvement Culturel Amazighe et membres de l'association socioculturelle TILELLI à Goulmima :
- Informons l'opinion publique nationale, amazighe et internationale que les autorités provinciales d'Errachidia, qui nous ont convoqués le mercredi 29 août 2001, nous ont notifié que nous sommes "interdits d'entreprendre toute sorte de manifestation publique, sous peine d'être poursuivis
pour trahison", en nous rappelant les événements
qui ont secoué la région depuis l'indépendance,
notamment l'affaire Addi Ou Bihi en 1957 et l'épisode de 1973,
- Considérons cette forme d'interdiction anticipée,
fondée sur un jugement d'intentions, comme une
atteinte grave à nos droits civiques et politiques,
garantis, pourtant, par la Constitution et le code
des libertés publiques,
- Appelons les citoyens épris de justice et les organisations des Droits Humains à nous soutenir et à
dénoncer ces agissements intimidants des dites
autorités, qui privent des citoyens de leurs droits
de manifestation et d'expression,
- Exprimons notre gratitude à la population de la
région pour le soutien qu'elle nous a apporté dans
cette épreuve,
- Réaffirmons notre détermination à continuer notre combat jusqu'à satisfaction des revendications
légitimes de notre région et du Mouvement Culturel Amazighe.
Goulmima, le 4 septembre 2001
Hamid LIHI
Ali HARCHERRAS
************
Congrès Mondial Amazigh
47, rue Bénard
75 014 Paris (France)
Tel : (33) 1 45 45 72 44
Fax : (33) 1 49 81 02 32
Émail : [email protected]
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