44 LUX n° 225 - Novembre/Décembre 2003

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44 LUX n° 225 - Novembre/Décembre 2003
Photo Comatelec
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LUX n° 225 - Novembre/Décembre 2003
lumières EXTÉRIEURES
Le 21 décembre, les habitants de la communauté
urbaine bordelaise vont enfin profiter des 23 premiers
kilomètres du tout nouveau tramway avec l’ouverture
de trois lignes. Un chantier d’envergure – plus d’un
milliard d’euros d’investissement – qui s’inscrit dans
le remodelage en profondeur de l’agglomération
entamé depuis quelques années. Le tramway,
et son éclairage, participent ici à l’embellissement
et à la structuration du paysage urbain.
A BORDEAUX
Un tramway
nommé design
Luminaire Moon Torch
Image de synthèse : Axyz – Photo D. Le Lann
Comment sont éclairées les stations ?
La conception des stations repose sur une déclinaison identique en mobilier,
couleur et éclairage. Afin de repérer de loin les 54 stations qui seront ouvertes
dans la première phase de travaux (47 stations seront prêtes le 20 décembre, les
7 autres achevées courant 2004), un mât haut de 5 m, supportant une lanterne
équipée d’une source aux iodures métalliques à brûleur céramique de 150 W sera
installé. Un liseré de couleur bleue affirme la fonction signalétique, la couleur
des mâts et luminaires reprend le gris aluminium des stations.
L’éclairage proprement dit de la station est réalisé par un luminaire d’éclairage
indirect Moon Torch (création Elisabeth de Portzamparc ; photo ci-dessus, à gauche)
de 3,40 m de hauteur. Il est équipé de lampes aux iodures métalliques à brûleur
céramique 150 W ou 70 W avec une température de couleur 3 000 K. La répartition
photométrique du luminaire symétrique ou asymétrique peut être adaptée à la
géométrie de la surface à éclairer. A la demande du maître d’ouvrage, le niveau
d’éclairement moyen de la station est d’environ 40 lux pour une uniformité
supérieure à 60 %. Pour cette première phase, 108 luminaires Moon Signal et
382 luminaires Moon Torch ont été installés. L’ensemble de ces luminaires a été
dessiné par Elisabeth de Portzamparc, et fabriqué par Comatelec.
Lajus, lauréat en 1999 avec Brochet et
Pueyo du concours de maîtrise d’œuvre des
aménagements urbains du tramway. Pour le
mobilier, il s’associa avec Elisabeth de
Portzamparc qui, pour la première fois,
“plancha” sur des réalisations extérieures.
« J’ai voulu privilégier une esthétique
légère, rigoureuse et pure, s’explique-telle dans le magazine d’information du
Tram (mars 2001), qui s’intègre dans tous
les types de tissus urbains, ancien,
pavillonnaire, contemporain. J’ai utilisé
comme thème commun la forme du cône
inversé pour son caractère sobre et élan-
cé. J’ai conçu les différents mâts, barrières, potelets, corbeilles de propreté et
abris en recherchant la transparence et la
légèreté. L’exemple du luminaire Hestia
développé par Comatelec (4) est éloquent
: c’est un modèle pionnier de légèreté
avec un corps élancé et un style élégant,
une merveille technologique », se permetelle de préciser. Ceux qui connaissent
l’esprit et le style de Bordeaux retrouveront cette discrétion et cette fierté qui
font le caractère de ses habitants. Le
métro innovait déjà dans ce sens avec
l’alimentation électrique par le
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Un même vocabulaire
« Toutes les lignes parlent aujourd’hui un
même vocabulaire et renforcent l’identité de
la CUB, jusqu’à présent un peu abstraite
pour les Bordelais », reconnaît Bruno
Gerbier, architecte rattaché au bureau
d’Elisabeth de Portzamparc, qui a signé le
design du mobilier des stations et du matériel d’éclairage. Un vocabulaire décliné à
travers « les lisses de protection de la plateforme de circulation, les systèmes de cloutage indiquant les intersections, etc., et ce,
dans un matériau spécifique, une fonte
d’aluminium claire », précise Emmanuel
Photo Comatelec
“C
ontenir, à défaut d’inverser, la
logique du tout voiture tout en
redonnant de l’attractivité au
centre de l’agglomération », était l’un des
objectifs affichés par la Communauté
urbaine de Bordeaux (1) lorsque fut lancé le
projet d’un tramway il y a une dizaine d’années. Après l’abandon d’un projet de métro
trop coûteux, la CUB, et en premier lieu la
capitale aquitaine, ne pouvaient plus reculer pour résoudre l’épineuse équation “pollution – embouteillage – revitalisation du
centre ville”. Au-delà de la simple problématique de transport en commun, le tramway devait participer à la recomposition de
l’agglomération bordelaise en renforçant
son identité, et s’intégrer dans la requalification des espaces publics majeurs, en particulier à Bordeaux, qui mène depuis 1996
une active politique de rénovation des quartiers (2). Une approche que résume Franck
Potier, responsable urbanisme à la mission
Tramway : « Pour nous, le tramway reste
un moyen de recomposer les espaces
urbains. Il s’inscrit dans un projet de
requalification des quartiers concernés.
Nous travaillons en collaboration avec les
communes traversées par les lignes dans
une approche qualitative. Elles font des
propositions, et la maîtrise d’œuvre propose en retour des recommandations qu’elles
sont libres de suivre ou non. Mais tout le
monde en a compris l’intérêt, d’autant que
nous
aidons
financièrement
les
communes. » Bref, un tramway synonyme
de qualité de vie, pour laquelle le nouveau
matériel d’éclairage a été sollicité (3).
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Photo Comatelec
sol qui permet de préserver la
belle perspective du Pont de Pierre qui
enjambe la Garonne et de ne pas encombrer le centre ville historique d’une forêt
de caténaires.
PHILIPPE GODARD
(1) Communauté urbaine de Bordeaux :
650 000 habitants, 250 km2.
(2) Remodelage des quais de la rive gauche :
la partie “éclairage”, conçue par le concepteur
lumière Laurent Fachard, s’inspire de la “lanterne”
Lanterne Hestia
Comment sont éclairés les espaces concomitants ?
L’intégration du tramway dans le tissu urbain a généré un traitement des espaces
concomitants laissé à l’appréciation des communes traversées par les lignes.
Là encore, la lumière a été repensée dans le cadre d’une réhabilitation des voies
et des paysages urbains. Ainsi, pour l’avenue Thiers, qui relie sur 4 km la rive
gauche de Bordeaux à Lormont et Cenon, et qui a été redessinée avec le tapis
de gazon central pour accueillir la ligne du tramway, Elisabeth de Portzamparc
a voulu intégrer, sur les supports de LAC, un luminaire de dimensions
minimalistes, possédant toutes les qualités optiques d’un luminaire classique,
afin de libérer l’espace au maximum. « Nous avons développé un bloc optique
miniaturisé (µR) permettant d’intégrer la lampe aux iodures métalliques
à brûleur céramique 150 W, commente Michel Pouchin, ingénieur éclairagiste
chez Comatelec. Les faibles dimensions de ce bloc optique offrant toute liberté
créative aux designers, il a pu s’intégrer dans le luminaire aux lignes très effilées
qui caractérisent la lanterne Hestia (photo). » 240 lanternes ont été implantées
sur les supports de LAC à une hauteur de 7 m, espacées d’environ 22 m
sur une largeur de 6,2 m. Le niveau de luminance est d’environ 2,5 cd/m2 ,
pour un éclairement moyen de 35 lux sur la chaussée.
en cuivre de Bordeaux pour éclairer de façon sobre
les façades de pierre blanches des immeubles du
XVIIIe siècle (Thorn, mâts Technilum, Fontes de
Paris et GHM) de la place Pey-Berland, autour
de la cathédrale, place des Victoires et place des
Quinconces, l’une des plus grandes d’Europe.
Deux lignes vont s’y croiser.
(3) Les villes traversées multiplient les projets
d’aménagement liés au passage du tramway. Ainsi,
Talence se dote d’un vrai centre ville, crée une ZAC
et ouvre un complexe cinématographique. Pessac
conforte sa coulée verte, soigne les bords des stations.
(4) Comatelec a déjà réalisé plusieurs luminaires
“originaux” pour Bordeaux, dont le fameux Eden,
dessiné par J.-M. Wilmotte, pour éclairer le centre
ville historique (éclairage indirect en lampes à
iodures métalliques à brûleur céramique). Le
fabricant a équipé de nombreux autres quartiers,
avec des matériels dessinés eux aussi par J.-M.
Wilmotte, tels que les Kali, reconnaissables à leurs
cônes inversés, les Citea (en modèles midi, mini
ou maxi), supportés par des ensembles Equinoxe.
> Maître d’ouvrage : Communauté urbaine
LES INTERVENANTS
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lumières EXTÉRIEURES
de Bordeaux, assistée d’A’Urba
(agence d’urbanisme)
> Maître d’œuvre (projet général) :
groupe d’études Tramway
> Maître d’œuvre aménagements
urbains : Brochet/ Lajus/ Pueyo
> Paysagiste : agence Signes
> Design mobilier urbain :
Elisabeth de Portzamparc
> Design matériel roulant :
Absolut Design/ Lanoire et Corrian
> Eclairage : Comatelec
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