Etude des incidences sur l`environnement relative à la

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Etude des incidences sur l`environnement relative à la
AVIS
Réf. : CWEDD/01/AV.516
Liège, le 09 avril 2001
Objet :
Etude des incidences sur l’environnement relative
à la demande de permis d’urbanisme pour la
construction d’une route contournant Couvin et
reliant Couvin à Brûly
rue du Vertbois 13c
4000 Liège
tél. 04 / 232 98 47
fax 04 / 232 98 50
e-mail [email protected]
Avis du 09/04/01
Etude d’incidences sur l’environnement relative à une demande de permis d’urbanisme
(permis d’exécution de travaux techniques) pour la construction d’une route contournant
Couvin et reliant Couvin à Brûly
1. Données de base
Projet:
Contournement autoroutier de Couvin
Demande:
Permis d’urbanisme
Catégorie:
1 – Aménagement du territoire, grandes infrastructures de
transport et barrage
Demandeur :
MET (Ministère de l’équipement et des transports)
Auteur de l’étude :
ARIES engineering and environment, Rixensart
Autorité compétente :
DGATLP – direction de Namur
Le projet est soumis de plein droit à la réalisation d’une étude d’incidences sur
l’environnement (E.I.E.).
2. Contexte du projet
Le contournement autoroutier de Couvin est un projet en discussion depuis plus de 20
ans. En 1996, une pré-étude d’incidences a été lancée afin d’évaluer les incidences sur
l’environnement de diverses propositions de tracé. Les résultats de celle-ci ont conduit à
une décision de modification partielle du plan de secteur de Philippeville-Couvin (arrêté du
Gouvernement wallon du 29 octobre 1998) inscrivant le tracé faisant l’objet de l’actuelle
étude d’incidences (tracé est).
Le projet consiste en la construction d’une voie rapide à quatre bandes (RGG : Réseau à
grand gabarit) sur une longueur de 14 kilomètres visant à contourner Couvin et rejoindre
Brûly où débouche un tronçon autoroutier déjà construit à destination de CharlevilleMézières (France).
Il s’inscrit dans un cadre européen de liaison routière Rotterdam-Marseille (E420).
Le projet traverse majoritairement des zones forestières et quelques vallées présentant
souvent un grand intérêt biologique. L’impact du projet sur l’habitat reste limité. Le site est
repris dans son entièreté dans la Zone de protection spéciale « Entre-Sambre-etMeuse ».
3. Avis sur la qualité de l'étude
Après lecture et analyse de l’E.I.E., ainsi qu’une visite sur place en présence du bureau
d’études et d’un représentant du demandeur, le Conseil relève que l’auteur a livré une
étude de bonne qualité tout en relevant un manque de données disponibles pour une
partie du tronçon. Ce manque de données est imputable au demandeur et non au bureau.
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Le CWEDD tient cependant à relever les éléments suivants :
3.1. Il regrette que le bureau ait considéré le remblais de plusieurs dizaines de mètres de
haut visant à franchir le Ry de Rome proposé par le demandeur comme la seule
alternative. Une possibilité de viaduc existe. L’étude relève juste « qu’un pont au lieu
d’un remblais aurait des conséquences encore plus dommageables sur la qualité
paysagère ». Ce jugement de valeur n’est pas étayé et il aurait été opportun de
présenter de manière complète les avantages et inconvénients environnementaux
respectifs de ces deux alternatives. Il s’agit là en effet d’une des incidences majeures
du projet ;
3.2. Le bureau présente une étude biologique de grande qualité et relève avec précision
les diverses zones de grand intérêt biologique présentes le long du tracé ainsi que
leurs statuts respectifs. Le CWEDD regrette cependant que le bureau n’attire pas
l’attention sur les conséquences possibles du fait que certaines zones contiennent
des habitats prioritaires repris en annexe 1 de la directive européenne 92/43 relative
à la mise en oeuvre du réseau Natura 2000 et que l’ensemble est situé en Zone de
protection spéciale en vertu de la directive 79/409. Ces deux directives prévoient en
effet un certain nombre d’obligations quant à la protection ou la compensation de ces
habitats ;
3.3. Un certain nombre d’erreurs de numérotation entre le texte et le dossier
cartographique rend la consultation malaisée. Le CWEDD relève cependant la
grande qualité graphique des cartes et leur présentation ;
3.4. Dans le paragraphe relatif à la création artificielle de lisières, l’auteur ne relève pas
les impacts positifs sur la biodiversité que peut présenter une telle création ;
3.5. Les études de bruit et de mobilité sont fort complètes et précises ;
3.6. Une précision administrative s’impose quant au statut du demandeur : s’agit-il de la
SOFICO ou du Ministère de l’équipement et des transports (MET) ?
En conclusion, moyennant les remarques ci-dessus, le Conseil estime que cette
étude, de bonne qualité, aborde l’ensemble des préoccupations en matière
d’incidences sur l’environnement que l’autorité compétente a exprimées en
établissant le contenu de l’étude, et que celle-ci y trouvera les éléments pour
prendre sa décision, à l’exception notable des points 3.1. et 3.2., par rapport à la
demande.
4. Avis sur le résumé non technique
Le CWEDD remet un avis défavorable sur la qualité du résumé non technique car il
présente les problèmes suivants :
-
plusieurs paragraphes (opinion publique, faune et flore, bruit, …) font références à
l’étude d’incidences sans en faire une synthèse ;
insuffisance de documents graphiques et cartographiques (plan de secteur) ;
absence de simulations paysagères.
5. Avis sur l'opportunité du projet
Le CWEDD regrette qu’il soit appelé à remettre un avis sur le projet alors qu’il n’a pu se
prononcer sur les alternatives de tracé en son temps.
La construction d’une route d’un tel gabarit dans une région aussi pittoresque et vallonnée
entraîne incontestablement des nuisances considérables et des incidences
environnementales fortes tant pour la population (durée du chantier, coupures de
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propriétés, expropriations, bruit, ...) que pour le milieu (paysage, effet de coupure pour la
faune, destruction de sites, impact sur le régime des eaux, ...).
Le Conseil prend acte des diverses hypothèses de l’auteur relatives à l’impact du
contournement sur la circulation et la proposition de réaliser celui-ci à 2x2 bandes pour
des questions de sécurité et de déclivité. Il relève qu'il ne résoudra que partiellement la
circulation dans le centre de Couvin. A la lecture des diverses hypothèses de l'auteur, il
apparaît au Conseil que la question du gabarit du contournement reste posée.
En effet, le question de l'opportunité de ce contournement doit se poser en fonction des
usages qui lui sont destinés.
- S'agit-il d'un coutournement de Couvin à vocation "locale" et destiné à désenclaver la
région couvinoise? Dans ce cas, l'hypothèse de la deux fois une bande malgré
certains inconvénients reste crédible ;
- S'agit-il d'une route de contournement de transit? Dans ce dernier cas, pourquoi
vouloir relier toutes les voiries locales à la quatre bandes prévue? Les voiries locales
ne devraient-elles dès lors pas rester majoritairement connectées autour de l'ancienne
N5?
Le projet présenté n'est pas précis sur ces deux options : est-ce la perspective de
désenclaver Couvin qui est à l'origine du projet ou la liaison Rotterdam-Marseille?
Le Conseil relève en outre diverses questions non résolues ou non étudiées à ce jour :
-
De l’avis de l’auteur, confirmé par le demandeur lors de la visite, les informations
disponibles sont incomplètes, en particulier pour la seconde partie du tronçon, depuis
le Ry de Rome jusqu’au Brûly. Le tronçon traverse alors essentiellement une grande
zone forestière.
Les informations manquantes dans la demande portent essentiellement sur l’absence
de données géotechniques précises et sur l’équilibre remblais-déblais.
L’auteur évalue un excédent de terres à plus d’un million et demi de m³ à évacuer
pour la seconde partie du tronçon. Pour résoudre cette situation le demandeur
envisage de relever le profil en long du projet de plusieurs mètres et ce, du Ry de
Rome à la frontière française.
Le CWEDD partage l’opinion de l’auteur pour qui ce rehaussement éventuel est
fondamental et entraîne une modification significative des différents impacts dans la
seconde partie du tracé (impact sur le milieu, largeur de l’emprise, écoulement des
eaux, bruit, impact paysager...) ;
-
Le franchissement du Ry de Rome est prévu par un remblais de plusieurs dizaines de
mètres de haut impliquant la canalisation de la rivière, une fermeture de la vallée ainsi
que la destruction d’habitats prioritaires au sens de la directive 92/43 (Habitats). Le
tracé est en outre en Zone de protection spéciale. L’alternative possible est la
construction d’un viaduc principal et de deux viaducs secondaires d’accès non
envisagée.
Comme le prévoit la directive et à l’instar d’un projet allemand auquel il est fait
référence dans l’étude, il y aurait lieu de soumettre le projet actuel à l’approbation de
la Commission européenne afin d’éviter les incertitudes juridiques pouvant survenir
suite à cette situation ;
-
Lors de la visite, le Conseil a pris connaissance d’une capacité de stockage de terres
dans une carrière à proximité. Une étude devrait déterminer le réalisme d’une telle
possibilité et les impacts qu’une telle alternative entraînerait ;
-
En ce qui concerne le passage de l’Eau noire dans la première partie du tronçon,
l’auteur relève qu’il s’agit déjà d’une zone inondable et recommande la nécessité
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d’une étude complémentaire sur les impacts du franchissement sur le régime hydrique
dans cette zone et les risques d’inondations ;
-
L’absence d’un plan parcellaire précis pour la seconde partie du tracé place les
propriétaires de terrains dans une situation d’insécurité ;
-
Dans la première partie du tronçon, l’auteur relève la nécessité de procéder à des
essais géotechniques supplémentaires afin de limiter au maximum les risques
d’effondrement karstiques.
Le Conseil partage les nombreuses recommandations de l’auteur en particulier :
-
La nécessité de prévoir un bassin d’orage supplémentaire afin de maintenir la qualité
salmonicole d’un des cours d’eau (ruisseau de Pernelle) ;
La nécessaire isolation ponctuelle de certaines maisons directement soumises aux
impacts sonores du projet ;
La nécessité de l’aboutissement du Plan communal de mobilité à Couvin visant à
améliorer la circulation dans le centre de Couvin. Ce problème ne sera que très peu
résolu par la mise en oeuvre du projet examiné ici ;
L’importance d’éviter tout effet de coupure pour les exploitants agricoles et les
habitants concernés en ce y compris durant la durée des travaux ;
Les mesures relatives à l’intérêt archéologique de la zone de Nieumont ;
Les compensations écologiques pour les sites abîmés ou détruits.
Le Conseil acte le déplacement d’un des ponts dans la seconde partie du tracé afin de
mieux répondre aux besoins des riverains de cette zone.
Au vu de ces divers éléments le CWEDD remet un avis défavorable sur le projet.
Des solutions doivent être proposées en vue de résoudre les questions évoquées
ci-dessus, quitte à remettre en cause le tracé.
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