Le mariage force

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Le mariage force
Le cauchemar des femmes forcées au mariage!
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Ce devait être de merveilleuses vacances. Patricia venait d'avoir 16 ans, Nadia,
17. «On allait découvrir l'Algérie, le pays de notre père, dont il ne parlait jamais!»,
se souvient Patricia Filali. Mais à la fin du séjour, leur père refuse de les ramener
en France: il les abandonne chez des amis, «à treize dans un trois-pièces».
Après trois ans de séquestration, Patricia parviendra à échapper à son sort.
Nadia, elle, se résigne: elle épouse Brahim, celui que son père a choisi pour elle.!
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Trente-quatre ans plus tard, Patricia Filali publie aujourd'hui son histoire*, celle
de deux sœurs aux destins opposés: l'une vit «libre et heureuse» dans la Loire,
l'autre dépérit à Constantine, recluse dans une petite maison où elle cohabite
avec sa belle-famille. «La vraie Nadia est morte», a lâché un jour l'aînée à sa
cadette.!
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À son retour en France, Patricia a eu énormément de mal à oublier ces trois
années de «bourrage de crâne», ponctuées de «“Allah Akbar” toute la journée» :
«C'est comme un viol, affirme-t-elle. Je ne pouvais pas en parler. Moi qui avais
toujours vécu à l'occidentale, j'avais honte de mes origines et peur des
hommes.» Alors, quand elle apprend qu'un délit de mariage forcé devrait bientôt
être introduit dans le Code pénal, Patricia clame sa «joie» et son «soulagement»:
«Il y a encore tellement de jeunes filles victimes de mariages forcés!»!
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Cette pratique, que l'on retrouve principalement dans les familles originaires de
Turquie, du Maghreb, d'Afrique noire ou d'Asie, est difficilement chiffrable. Un
rapport du Haut Conseil à l'intégration avait évalué, en 2003, à 70.000 le nombre
d'adolescentes menacées de mariages forcés en France. «Sachant qu'en 2007,
on a dénombré 60.000 femmes ayant subi une excision, donc ensuite un
mariage forcé, indique Isabelle Gillette-Faye, directrice du Gams (Groupe pour
l'abolition des mutilations sexuelles féminines), on est aujourd'hui au minimum à
70.000 mariages forcés en France.» Ces dernières années, le Gams aidait
environ 200 jeunes filles par an. «C'est retombé à quelque 80 cas l'an dernier,
indique la directrice, mais nous enregistrons une forte reprise depuis cet été.»

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