Etude sur la sensitivité aux conflits du Programme PEAR Plus

Transcription

Etude sur la sensitivité aux conflits du Programme PEAR Plus
Etude sur la sensitivité aux conflits du
Programme PEAR Plus
Octobre, 2009
Search for Common Ground
Valeria Izzi
Christof Kurz
Photos des mains travaillant, femmes avec casseroles, et enfants déplacés utilisé sur un Creative Commons
License © Julien Harneis 2009. Tout autre photo © Search for Common Ground 2009.
Izzi, V and Kurz C. ŖEtude sur la sensitivité aux conflits du Programme PEAR Plus.ŗ
Search for Common Ground. Octobre 2009. Kinshasa, République Démocratique du Congo.
Pour des informations ou des copies supplémentaires, veuillez contacter SFCG (www.sfcg.org)
Résumé Exécutif
L
e Programme Elargi dřAssistance au Retour (PEAR) Plus représente la contribution de lřUNICEF à la
Stratégie des Nations Unies pour le Soutien à la Sécurité et à la Stabilisation (UNSSSS) dans lřEst de la
République Démocratique du Congo. Démarré au début 2009, le PEAR Plus vise à soutenir des solutions
durables pour le retour des déplacés internes et leur réintégration dans leurs communautés dřorigine, dans
les Provinces du Nord et du Sud Kivu, en Province Orientale (Ituri) et au Nord Katanga. Le programme
adopte une approche multisectorielle, intervenant dans les secteurs de lřéducation, de lřeau et de
lřassainissement, de la santé, et de la protection des enfants.
Afin de renforcer la dimension de construction de la paix du PEAR Plus, lřUNICEF a proposé un
partenariat à Search for Common Ground (SFCG). La présente étude a été commissionnée comme première
étape de cette collaboration en vue dřévaluer la sensibilité aux conflits du PEAR Plus et dřorienter une
deuxième phase du programme. Lřétude a été conduite sur une période de deux mois au total, commençant
par une revue des documents programmatiques et de la littérature sur les conflits dans lřEst de la RDC. Une
mission de terrain a eu lieu du 2 au 19 juillet 2009, avec des visites de Goma (Nord Kivu), Bukavu et Uvira
(Sud Kivu), et Bunia (Ituri). Ce rapport est le résultat dřune analyse basée sur la revue documentaire et des
interviews semi structurées avec 77 représentants de lřUNICEF, de SFCG, des partenaires exécutifs du PEAR
Plus et des partenaires PEAR, des autorités de lřEtat, des agences internationales, et dřautres personnes
ressources ainsi que des observations lors de deux visites sur le terrain dans les zones opérationnelles du
PEAR Plus.
Les conflits dans lřEst de la RDC sont complexes, caractérisés par une imbrication de plusieurs niveaux Ŕ
local, provincial, national, et régional, avec une prolifération des acteurs et une complexité croissante au fil
des années. Les actions des groupes armés sont les manifestations les plus visibles des conflits dans la région.
Dřautres formes de violence existent au niveau local, même si elles ne sont pas aussi sanglantes et à moindre
échelle comparées aux actions des groupes armés. Les problèmes dřaccès à la terre sont au cœur des conflits
dans lřEst de la RDC à tous les niveaux, imbriqués dans une forte méfiance entre groupes ethniques, en
particulier entre groupes qui se considèrent « autochtones » et ceux quřils considèrent non-autochtones. Les
immenses richesses minières de lřEst de la RDC représentent un des facteurs clés qui favorisent la
continuation des conflits. Lřabsence dřune bonne éducation et dřopportunités de travail rémunéré ou dřautres
activités productives pour les jeunes a créé un Řréservoirř de main dřœuvre potentiel pour la violence. En
même temps, lřEtat congolais est incapable de jouer son rôle de gestionnaire des affaires sociales et
dřarbitre ou de médiateur efficace dans les conflits sociaux.
A la base de la notion de « sensibilité aux conflits », il y a lřidée quřaucune intervention dans une
situation conflictuelle ne peut être « neutre » : il y a forcément des effets, soit positifs, soit négatifs, sur les
dynamiques conflictuelles. La définition de « sensibilité aux conflits » sřarticule donc autour de deux piliers :
(i) lřimpératif de « ne pas nuire » et (ii) les efforts de saisir les opportunités pour contribuer à la construction
de la paix et à la réconciliation. En utilisant ce cadre conceptuel, lřétude a analysé tous les aspects du PEAR
Plus et en tire cinq conclusions principales :
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
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1. LA SENSIBILITE AUX CONFLITS NřA PAS ETE PRISE EN COMPTE DANS LA CONCEPTION DU PEAR PLUS.
Le PEAR Plus est un programme de transition dřune situation dřurgence à des solutions plus durables pour
faciliter la réintégration des rapatriés récents dans leurs communautés dřorigine. Par sa nature, il aborde
donc les conséquences des conflits et non leurs causes. En particulier, il nřy a pas eu dřanalyse sur les risques
des interventions à Řnuireř, ni de stratégie systématique pour gérer les conflits qui pourraient surgir lors de la
mise en œuvre du programme. La contribution à la construction de la paix du PEAR Plus est indirecte, dans le
cadre de lřUNSSSS. Alors que « réconciliation » et « construction de la paix » ont été identifiées comme
thèmes transversaux dans le document originel du PEAR Plus, en dehors de quelques activités dřéducation à
la paix les projets exécutés ne prévoient pas des activités concrètes de réconciliation ou de mitigation des
conflits.
2. LE PEAR PLUS MANQUE DE DONNEES, DřINFORMATIONS ET DřOUTILS POUR UNE ANALYSE SYSTEMATIQUE DES CONFLITS
DANS LES LOCALITES DřINTERVENTION.
Les analyses du contexte sur lesquelles le PEAR Plus se fonde, notamment le « monitoring protection » et les
évaluations multisectorielles du Programme PEAR, ne fournissent pas suffisamment dřinformations pour une
compréhension approfondie des risques et opportunités par rapport aux conflits et à la construction de la
paix. Bien que les partenaires du programme aient généralement travaillé dans ces localités depuis quelque
temps et aient donc une bonne compréhension de la situation, cette connaissance reste anecdotique et nřest
pas capturée et analysée de manière systématique. Par conséquent, il nřy a pas non plus une base solide de
référence pour mesurer lřimpact (positif ou négatif) des programmes sur les conflits.
3. LE PEAR PLUS CONTOURNE LES ZONES A PLUS HAUT RISQUE DE CONFLITS POUR TRAVAILLER DANS LES ZONES LES PLUS
TRANQUILLES, OU LE RISQUE DE CONFLITS EST MOINS ACCENTUE.
La décision dans quelles zones le PEAR Plus devrait intervenir a été prise en considérant de multiples critères
et en plusieurs étapes. Dans ce processus de prise de décision, on donne priorité aux critères de sécurité et
de durabilité dans la sélection des localités. Ainsi, pendant la phase pilote, le programme contourne les
zones aux conflits aigus et nřintervient que dans des zones qui sont ethniquement largement homogènes et
qui ne connaissent pas de tensions majeures.
4. LES PARTENAIRES DE MISE EN ŒUVRE TRAITENT DES CONFLITS LOCAUX AU FUR ET A MESURE ET SANS APPROCHE
SYSTEMATIQUE.
Dans la mise en œuvre du projet, les partenaires ont reconnu que certaines activités ont créé quelques
tensions dans les communautés ou risquent dřavoir des effets négatifs sur les conflits existants. Face à ces
situations conflictuelles, les agents du terrain ont su trouver des solutions pragmatiques pour répondre à ces
problèmes, grâce à leur expérience et une approche improvisée mais pragmatique de médiation. Toutefois,
ces efforts, pour lřinstant, ont été seulement réactifs et les partenaires manquent dřune stratégie cohérente de
« ne pas nuire » et de gestion des conflits quand ils surgissent.
5. LA MEFIANCE MARQUEE AUTOUR DE LřACTION HUMANITAIRE DANS LřEST DE LA RDC REND PLUS DIFFICILE LřINTEGRATION
DřUNE PERSPECTIVE DE SENSIBILITE AUX CONFLITS.
A priori, lřaction humanitaire est la bienvenue parmi les populations congolaises ravagées par les guerres et
par les autorités de lřEtat. Pourtant, il y a un sentiment généralisé que lřassistance humanitaire est trop limitée
et partiale, et souvent est au seul bénéfice des intervenants plutôt que des populations locales. Des rumeurs
sur des desseins sinistres et secrets présumés de la communauté internationale circulent librement partout
dans lřEst de la RDC et, au fil des années, surtout la MONUC mais aussi dřautres agences ou ONG
internationales ont de temps à autre été ciblées par des manifestations violentes. Ceci rend lřintégration
dřune dimension de sensibilité aux conflits plus difficile, mais, en même temps, encore plus nécessaire.
Sur la base de cette analyse, trois scénarios et stratégies potentielles pour intégrer une dimension de
sensibilité aux conflits de façon plus ou moins compréhensive dans le PEAR Plus sont esquissées :
1. SCENARIO ŘSTATU QUOř
4|Page
UNICEF et Search for Common Ground
Bien quřil nřy ait pas eu dřeffort systématique dřintégrer une dimension « ne pas nuire » dans les activités
programmatiques, les risques pour le PEAR Plus dřexacerber les tensions existantes ou dřen créer de
nouvelles sont plutôt limitées. Les critères de choix des localités excluent les zones les plus conflictuelles, et les
activités sectorielles du PEAR Plus ne touchent, pour la plupart, pas directement aux Řnerfsř des conflits. Dans
les cas où des risques de conflits ont été rencontrés dans les zones dřintervention, les partenaires de mise en
œuvre ont pu gérer les tensions dřune manière improvisée et pragmatique. Autrement dit, dans sa forme
actuelle, le risque des activités de « nuire » est suffisamment faible pour considérer le Řstatu quoř comme une
option possible. Cependant, en ce moment, le PEAR Plus nřest pas en train de saisir les opportunités pour
contribuer à la construction de la paix. Avec lřoption Řstatu quoř le PEAR Plus resterait un programme aux
objectifs largement humanitaires et continuerait à contourner les conflits plutôt quřà travailler sur les conflits.
2. SCENARIO ŘSENSIBILITE AUX CONFLITS AUGMENTEEř.
Le deuxième scénario envisagerait dřaugmenter la sensibilité aux conflits dans le cadre programmatique
existant, sans des changements stratégiques profonds. Le scénario reposerait sur des modifications dans cinq
domaines clés : (i) une capacité et des outils dřanalyse des conflits améliorée; (ii) une formation sur la
sensibilité aux conflits pour les partenaires exécutifs et leur personnel; (iii) des interventions supplémentaires
pour aborder les conflits et tensions locales; (iv) une stratégie de communication pour assurer la transparence
dans la programmation et dans les relations entre les bailleurs, ONG internationales et les partenaires
locaux; et (v) une stratégie de suivi et évaluation qui se concentre explicitement sur la sensibilité aux conflits.
3. SCENARIO ŘSENSIBILITE AUX CONFLITS APPROFONDIEř
Ce scénario opterait pour la transformation du PEAR Plus en véritable programme de construction de la
paix, ce qui exigerait une remise à plat fondamentale de la logique et de la stratégie du programme, y
compris le choix des localités dřintervention. Ce scénario inclut une analyse des conflits en profondeur;
lřadoption de la réconciliation et de la construction de la paix comme objectifs clés et une flexibilité dans la
mise en œuvre du programme qui permettrait de répondre de manière systématique et stratégique aux
conflits dans les zones dřintervention ; et la mise en place dřun système de suivi et d'évaluation qui utilise les
résultats des analyses des conflits approfondies comme base de référence. Par conséquent, ce scénario aura
un impact profond au niveau de la capacité du programme de ne pas nuire et de contribuer à la
construction de la paix à deux niveaux, le micro et le macro. Ces changements nécessiteraient une volonté
«politique de la part de lřUNICEF de manière profonde et systématique dans leur façon de gérer et de
mettre en œuvre des programmes.
Le deuxième et le troisième scénario offrent des opportunités intéressantes de collaboration entre
lřUNICEF et SFCG. La philosophie de SFCG se base sur la notion de transformation des conflits, dont lřidée
est de ne pas éliminer les différences entre les individus ou les groupes, mais de les aider à voir ce qu'ils ont
en commun et de trouver des solutions aux problèmes communs. Lřexpérience de SFCG pourra donner un
apport significatif et profond au travail au PEAR Plus, en particulier par rapport à lřanalyse des conflits ; à
la promotion de la transparence et la gestion des rumeurs ; et à la mise en œuvre des activités spécifiques
visant la promotion du dialogue et de la réconciliation.
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
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Table de matières
RÉSUMÉ EXÉCUTIF
3
1.
8
INTRODUCTION
1.1 Objectifs de lřEtude
1.2 Raisonnement pour lřEtude
1.3 Processus et Méthodologie
1.4 Structure du Rapport
1.5 Remerciements
2.
8
8
9
10
10
PEAR PLUS, UNICEF ET SEARCH FOR COMMON GROUND
2.1 Aperçu du PEAR Plus
2.2 Aperçu des Programmes de Search for Common Ground en RDC
2.3 Quelques Réflexions sur des Synergies Potentielles entre SFCG et le PEAR Plus
11
11
12
14
3.
CADRE CONCEPTUEL DE LřETUDE
15
4.
ANALYSE DES DYNAMIQUES DES CONFLITS DANS LřEST DE LA RDC
19
4.1
4.2
4.3
4.4
5.
Manifestations des Conflits
Causes des Conflits
Stratégies de construction de la paix dans lřEst de la RDC
Implications pour le PEAR Plus
RÉSULTATS DE LřETUDE
5.1 Synthèse des Principaux Résultats
5.2 La sensibilité aux conflits des activités sectorielles du PEAR Plus
5.3 Considérations opérationnelles
6.
RECOMMANDATIONS
6.1
6.2
6.3
6.4
19
20
22
23
25
25
36
39
41
Scénario ŘStatu Quoř
Scénario ŘSensibilité aux Conflits Augmentéeř
Scénario ŘSensibilité aux Conflits Approfondieř
Risques et défis
42
43
50
52
ANNEXE 1 : CAUSES ET MANIFESTATIONS DES CONFLITS
53
ANNEXE 2 : SYNTHESE DES RECOMMENDATIONS
57
ANNEXE 3 : PERSONNES CONSULTEES
59
ANNEXE 4 : BIBLIOGRAPHIE
62
6|Page
UNICEF et Search for Common Ground
Acronymes
AVSI
Associazione Volontari per il Servizio Internazionale
CNDP
Congres National pour la Défense du Peuple
COOPI
Cooperazione Internazionale
CRS
Catholic Relief Services
FAO
Food and Agriculture Organisation
FDLR
Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda
HCR
Haut Commissariat pour les Réfugiés
IRC
International Rescue Committee
MONUC
Mission de lřOrganisation des Nations Unies an Congo
MSA
Multi-Sectoral Assessment
NRC
Norwegian Refugee Council
OCHA
Office for the Coordination of Humanitarian Affairs
ONG
Organisation Non Gouvernementale
PEAR
Programme Elargi dřAssistance aux Retours
PNUD
Programme des Nations Unies pour le Développement
RDC
République Démocratique du Congo
RRM
Rapid Reaction Mechanism
SFCG
Search for Common Ground
UNSSSS
United Nations Security and Stabilization Support Strategy
WASH
Water, Sanitation and Hygiene
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
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1. Introduction
L
e Programme Elargi dřAssistance aux Retours (PEAR) Plus représente la contribution de lřUNICEF à la
Stratégie des Nations Unies pour le Soutien à la Sécurité et à la Stabilisation (UNSSSS) dans lřEst de la
République Démocratique du Congo. Le PEAR Plus a démarré au début 2009, dans lřintention de
soutenir des solutions durables pour le retour des déplacés internes et leur réintégration dans leurs
communautés dřorigine, dans les Provinces du Nord et du Sud Kivu, en Province Orientale (Ituri) et au Nord
Katanga. Le programme adopte une approche multisectorielle, intervenant dans les secteurs de lřéducation,
de la santé, de lřeau et assainissement et de la protection des enfants.
Afin de renforcer la dimension de construction de la paix du PEAR Plus, lřUNICEF a établi un partenariat
avec Search for Common Ground (SFCG). Il est prévu que SFCG travaille avec les partenaires de mise en
œuvre du PEAR Plus pour intégrer une composante de construction de la paix (Řpeacebuildingř en anglais)
dans les activités du programme. La présente étude a été commissionnée comme première étape de cette
collaboration, dans le but de mieux analyser la sensibilité aux conflits du PEAR Plus actuel et dřorienter une
deuxième phase du programme avec des activités concrètes.
1.1 OBJECTIFS DE LřETUDE
Les trois objectifs suivants, élaborés dans les Termes de Référence, ont guidé lřétude :



« Analyser le contexte des conflits dans les localités dřexécution du programme PEAR Plus (causes,
acteurs, dynamiques, et catalyseurs) ;
Evaluer la sensibilité aux conflits du programme PEAR Plus, en termes de son impact (positif ou
négatif) sur les dynamiques des conflits ;
Faire des recommandations pour accroître la sensibilité aux conflits des interventions du programme
PEAR Plus. »
1.2 RAISONNEMENT POUR LřETUDE
Le PEAR Plus est un programme formulé pour sřattaquer aux conséquences des conflits, notamment au
déplacement des populations et à leur retour dans leur milieu dřorigine. Dans la formulation du programme
et sa mise en œuvre jusquř à présent, il nřy a pas eu un effort pour sřattaquer aux causes des conflits. De la
même façon, le risque que lřassistance humanitaire puisse Řnuireř, cřest-à-dire avoir un impact négatif sur les
conflits, nřétait pas systématiquement pris en considération dans la formulation du programme, ni la
possibilité de saisir des opportunités pour contribuer activement à la construction de la paix au delà des
objectifs spécifiques du projet.
Par conséquent, plusieurs questions sřimposent:

Serait-il souhaitable dřintégrer cette perspective additionnelle dans le PEAR Plus?
8|Page
UNICEF et Search for Common Ground


Si oui, dans quel degré est-ce que lřon pourrait intégrer des éléments de sensibilité aux conflits
dans le programme tel quřil est en ce moment?
Quřest-ce que cette Ŗintégrationŗ signifierait en pratique? Quels changements conceptuels,
programmatiques, et opérationnels pourrait-on envisager pour réaliser la sensibilité aux conflits du
PEAR Plus?
Lřétude vise à soutenir lřUNICEF, SFCG et ses partenaires PEAR Plus dans cette réflexion, en donnant un
aperçu des opportunités et des avantages de lřintégration systématique dřune perspective de prévention des
conflits et construction de la paix, ainsi que des risques potentiels.
1.3 PROCESSUS ET METHODOLOGIE
Lřétude a été conduite entre fin juin et août 2009 sur une période de deux mois, avec une mission dans
lřEst de la RDC qui a eu lieu du 2 au 20 juillet 2009. Le processus sřest déroulé en plusieurs étapes :

Au début, une revue bibliographique (en anglais) a été élaborée, qui a pris en considération la
documentation du PEAR Plus et des autres programmes pertinents, la documentation des
activités de SFCG en RDC, ainsi que la littérature académique sur les conflits dans lřEst de la
RDC (voir Annexe 4 Ŕ Bibliographie) ;

Ensuite une série de consultations avec 77 acteurs humanitaires, dont les responsables et agents
de terrains impliqués dans la formulation et la mise en œuvre du PEAR Plus, ainsi que les
représentants dřautres agences et ONG internationales, des autorités locales, ainsi que des
personnes ressources (voir Annexe 3 Ŕ Liste de personnes rencontrées). Les consultations ont eu
lieu au Nord Kivu (Goma), au Sud Kivu (Bukavu, Uvira) et en Ituri (Bunia) et ont pris la forme
dřentretiens semi-structurés1 ;

Elles étaient complétées par des descentes sur le terrain pour observer directement la mise en
œuvre des projets, en particulier :
Deux jours de visites des zones dřintervention du projet PEAR Plus en Ituri (territoire de
Djugu), avec lřONG de mise en œuvre COOPI ;
o Observation du projet PEAR au Sud Kivu (territoire de Walungu) avec lřONG de mise
en œuvre AVSI ;
o Observations des sites dřintervention futurs du PEAR Plus au Sud Kivu (territoire de
Walungu), avec lřIRC, lřONG de mise en œuvre.
Finalement, une demi-journée de discussion (« brainstorming ») avec le personnel clé de Search
for Common Ground à Bukavu.
o

Le processus a rencontré certaines contraintes et connu quelques limitations. En particulier, le temps passé
par lřéquipe dřévaluation dans les sites dřintervention du programme a été très limité par rapport au temps
passé dans les villes principales. Ceci a réduit la possibilité dřun vrai échange avec les bénéficiaires et des
autres couches de la population locale et a rendu la vérification des informations données par les
responsables des programmes et les partenaires et observateurs difficile. Le temps limité passé sur le terrain
nřa également pas permis dřorganiser des groupes de discussion (Řfocus groupsř) comme initialement prévu.
Dřaprès les Termes de Référence, lřétude sřest concentrée sur les provinces du Nord et du Sud Kivu, et
sur le district dřIturi en Province Orientale, sans prendre en considération la situation au Nord Katanga, qui
est également une zone de mise en œuvre du PEAR Plus.
Les observations présentées dans ce rapport sont basées largement sur les opinions et les conclusions des
acteurs consultés. Les individus consultés ont été assurés lřanonymat lors des entretiens. Leurs points de vue
seront présentés comme des conclusions générales sans faire références aux individus consultés.
1
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
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1.4
STRUCTURE DU RAPPORT
Dans ce qui suit, le présent rapport donnera un aperçu des activités de lřUNICEF (en particulier le PEAR
Plus) et de Search for Common Ground (SFCG). La troisième section introduit le cadre conceptuel de lřétude,
en offrant une définition de travail de la notion de « sensibilité aux conflits » et une explication des enjeux
et défis de son application dans le contexte de la RDC.
La quatrième section vise à situer le PEAR Plus dans le contexte des dynamiques des conflits dans lřEst
de la RDC, alors que la quatrième synthétise les résultats de lřétude. La dernière section avance des
recommandations pour renforcer la sensibilité aux conflits dans les prochaines phases du programme et
discute trois scénarios différents à considérer dans la formulation des étapes successives du PEAR Plus.
1.5
REMERCIEMENTS
L'équipe tient à remercier tous les collègues de SFCG et de lřUNICEF qui ont offert assistance, conseils
ou soutien logistique au cours de cette étude. Un remerciement particulier sera adressé aux responsables de
cette étude, Lena Slachmuijlder et Annelies Claessens de SFCG, et Damian Lilly et Christian Michaud de
l'UNICEF, pour les discussions stimulantes et pour leur assistance infaillible ainsi quřà Jean Pierre Ruhimbasa
pour sa compagnie et sa participation dans la collecte de données.
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UNICEF et Search for Common Ground
2. PEAR Plus, UNICEF et Search for
Common Ground
C
ette section donne un aperçu des origines du PEAR Plus, de ses objectifs et activités prévues. Elle
présente aussi lřopérât de Search for Common Ground (SFCG) en RDC, afin dřidentifier les synergies
potentielles, et la contribution que SFCG peut offrir dans la mise en œuvre des prochaines phases du
PEAR Plus.
2.1
APERÇU DU PEAR PLUS
LřUNICEF en RDC 2 joue un rôle clé dans lřassistance aux déplacés et aux rapatriés, à travers des
programmes de grande envergure Ŕ notamment le Mécanisme de Réponse Rapide en faveur des déplacés
internes et le Programme Elargi dřAssistance aux Retours (PEAR) et le PEAR Plus en faveur des rapatriés.
Alors que ces domaines tombent, en principe, sous la responsabilité mandatée du Haut Commissariat pour les
Réfugiés (HCR), dans le contexte particulier de la RDC ces responsabilités sont partagées avec lřUNICEF au
sein du système des « clusters » pour coordonner lřaction humanitaire.
Le Mécanisme de Réponse Rapide (Rapid Reaction Mechanism, RRM) est un programme multisectoriel géré
conjointement par lřUNICEF et OCHA depuis 2004. Le RRM assiste les populations affectées par les conflits,
les désastres naturels et les épidémies, avec une attention particulière aux déplacés internes. Le programme
est mis en œuvre à travers la collaboration avec deux ONG internationales Ŕ Solidarités et International
Rescue Committee (IRC).
Alors que le MRR s'est avéré un instrument pragmatique et utile pour répondre rapidement à des crises
humanitaires, il sřest révélé progressivement quřil y avait une lacune par rapport à lřassistance systématique
aux personnes rapatriées dans leurs zones d'origine. Surtout après les élections de 2006, un nombre
important de déplacés ont commencé à rentrer, rencontrant souvent des conditions de vie précaires dans
leurs villages dřorigine.
Pour soutenir la réintégration des rapatriés dans les zones de retour lřUNICEF et ses partenaires ont
lancé, en novembre 2006, le Programme Elargi d’Assistance aux Retours (PEAR). Originairement conçu comme
une sorte de « RRM pour les rapatriés », le PEAR vise à apporter une assistance aux rapatriés qui présentent
une vulnérabilité particulière. En particulier, le PEAR soutient les rapatriés comme première étape vers une
solution durable en fournissant : (i) des informations approfondies sur la situation humanitaire dans les zones
de retour, à travers les Evaluations Multisectorielles (Multi-Sectoral Assessments, MSA) ; (ii) une assistance
matérielle comprenant des articles domestiques (non-vivres) aux familles rapatriées les plus vulnérables ; et
(iii) un accès amélioré à l'école primaire dans les zones de retour.
Les activités de lřUNICEF en RDC sont guidées par le Programme Pays 2008-2012, qui se focalise sur
quatre secteurs : (i) éducation ; (ii) Eau, hygiène et assainissement (connu avec lřacronyme anglais WASH:
Water, Sanitation et Hygiène) ; (iii) Survie et (iv) Protection des enfants.
2
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 11
Dans le cadre de la Stratégie des Nations Unies pour le Soutien à la Sécurité et à la Stabilisation dans
lřEst de la RDC (UNSSSS), lřUNICEF a été identifié comme lřagence chef de file pour la composante ŘRetour
de IDPsř. Pour assumer ce rôle, lřUNICEF a formulé le PEAR Plus comme une extension du PEAR, avec
lřobjectif de soutenir des solutions durables pour le retour des déplacés internes et leur réintégration dans les
communautés dřorigine avec une assistance multisectorielle et à plus long terme que le PEAR , dans les
provinces du Nord et Sud Kivu, en Province Orientale (Ituri) et au Nord Katanga.
Tandis que le programme PEAR est Řhumanitaireř, le PEAR Plus est un programme de Řtransitionř entre
lřassistance humanitaire dřurgence et le développement à long terme, et adopte une approche
multisectorielle qui sřarticule autour de quatre composantes : (i) eau et assainissement, en suivant lřapproche
« Villages Assainis » déjà utilisée dans le programme régulier de lřUNICEF; (ii) éducation de qualité ; (iii)
santé primaire ; et (iv) protection des enfants.
Comme dans le cas du PEAR, le PEAR Plus est mis en œuvre à travers des ONGs internationales (voir
Tableau 1), qui ont un haut degré dřautonomie dans leur zone de responsabilité. Au moment de cette étude,
lřimplémentation du PEAR Plus avait démarré seulement en Ituri, avec lřONG COOPI. Au Sud Kivu, lřIRC
venait dřêtre sélectionné comme partenaire de mise en œuvre mais les activités nřont pas encore commencé.
La planification de démarrage de PEAR Plus au Nord Kivu et au Katanga était également en cours
Tableau 1: Aperçu comparatif des programmes RRM, PEAR et PEAR Plus
RRM
Population ciblée
PEAR
PEAR Plus
Déplacés internes (et
indirectement les
communautés
dřaccueil)
Rapatriés (et
indirectement leurs
communautés)
Rapatriés et leurs
communautés
Non vivres
Non vivres
Santé et nutrition
Education
Education
Education
Eau/assainissement
Evaluations
multisectorielles
Eau/assainissement
Secteurs d’activité
Protection
Ituri
Partenaires de
mise en
œuvre
Nord Kivu
Sud Kivu
Période
2.2
Solidarités
Solidarités
COOPI
IRC et Solidarités
NRC
Oxfam
IRC
AVSI
IRC
2004 Ŕ présent
2006 - présent
2008 Ŕ présent
APERÇU DES PROGRAMMES DE SEARCH FOR COMMON GROUND EN RDC
Search for Common Ground (SFCG) est une ONG internationale dont le siège se trouve à Washington
aux Etats-Unis et à Bruxelles en Belgique. Ses programmes interviennent à Kinshasa ainsi que dans les
provinces de Sud Kivu, Nord Kivu, et Katanga, à partir de ses bureaux opérationnels à Kinshasa, Bukavu,
Uvira, Moba, Baraka et Goma. Pourtant, SFCG soutient des activités médiatiques et des partenariats avec
des acteurs locaux dans le domaine de réconciliation et des médias dans toutes les 26 actuelles et futures
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UNICEF et Search for Common Ground
provinces. Des émissions radiophoniques produites par SFCG sont diffusées sur 100 radios à travers le pays,
y inclus dans les zones dřintervention du programme Pear Plus.
Consacrées à lřorigine pour améliorer la communication autour du Dialogue Inter Congolais en 2001, les
activités de SFCG ont ensuite été élargies pour inclure de nombreuses questions liées à la construction de la
paix en RDC à de multiples niveaux. A travers la communication et le dialogue, les activités de SFCG visent
à renouveler les relations sociales qui ont été brisées par des décennies de guerre. SFCG utilise un large
éventail dřoutils, qui ont été formulés pour permettre la flexibilité dans le repositionnement stratégique selon
les circonstances.
SFCG estime que lřacceptation de lřautre commence par lřaccès aux bonnes informations. Dans lřEst de
la RDC, pourtant, lřinformation est souvent partiale et manipulée à des fins politiques et propagandistes, ce
qui empêche davantage une vraie connaissance mutuelle. Les zones les plus éloignées nřont souvent que peu
dřaccès aux informations, une situation qui aide à créer un environnement où les rumeurs, mythes et les
fausses croyances peuvent proliférer. Pour cette raison, le travail avec les médias est un élément fondamental
de la Řboîte à outilsř de SFCG.
Chaque semaine, SFCG produit 10 émissions radio en plusieurs langues congolaises, en collaborant avec
plus de 90 radios partenaires à travers le pays, en synergie avec des autres acteurs. Dans ce contexte,
SFCG donne une formation continue aux radios partenaires, en particulier pour promouvoir un journalisme
responsable en vue dřaméliorer les reportages sur les questions conflictuelles et pour éviter que les radios
contribuent à enflammer davantage les tensions (voir Encadré 1 pour un exemple). De même, SFCG travaille
avec des émissions de télévision, utilisant une variété de formats. Les bandes dessinées sont un autre outil qui
sert dřoutil efficace dans la sensibilisation sur des différents thèmes.
Encadré 1 : Exemple de programme Radio de SFCG
Lřémission Sisi Watoto (« Nous les Enfants ») est un programme produit par les enfants du moins de 18
ans, pour les enfants, et sur les enfants, qui accentue les droits et les défis des enfants dans la société
congolaise. Cette émission hebdomadaire du 15 minutes en swahili fait une attention particulière aux
expériences des enfants liés aux groupes armés qui réintègrent dans la vie civile, ainsi que les autres
enfants vulnérables (chefs de ménage, orphelins, enfants sans abris).
Le théâtre participatif est particulièrement important pour les zones qui ne sont pas desservies par les médias.
SFCG a développé une méthodologie qui utilise les techniques du ŖForum Théâtreŗ avec une vision de
transformation des conflits. Les acteurs, qui ont été formés dans lřanalyse des conflits, se mettent à lřécoute
des communautés pour identifier les conflits les plus pertinents, et ensuite créent un scénario qui reflète cette
situation. Pendant le spectacle, les spectateurs sont invités à remplacer les acteurs sur la scène. L'absence de
toute forme de loisirs dans les villages rend ces séances de théâtre extrêmement populaires, et il y a même
des indicateurs qui montrent que les gens prennent au sérieux les recommandations qui ressortent du théâtre
participatif. SFCG a mis en place un système de suivi et d'évaluation pour analyser l'impact sur le
changement dřattitudes dans le long terme. Depuis 2005, les comédiens de SFCG ont joué plus de 1,000
spectacles devant plus de 1,2 million de spectateurs dans le Sud Kivu et Nord Katanga.
SFCG est aussi actif sur le thème des violences sexuelles. En collaboration avec Amnesty International,
SFCG travaille pour une sensibilisation de masse sur la tragédie des violences sexuelles, à travers le cinéma
mobile qui utilise des projections publiques du film ŖBriser le Silenceŗ. La version intégrale du film de 60
minutes est présentée à un large public alors que les trois versions courtes visent surtout les jeunes, les
militaires et les couples. Après chaque projection, les animateurs facilitent des discussions pour renforcer les
messages du film.
Enfin, SFCG travaille sur le renforcement du dialogue et lřamélioration des relations entre les civils et les
militaires, à travers une pluralité dřactivités, y compris des sensibilisations faites par des militaires pour des
militaires de leurs unités, des activités sportives et de loisirs (ex: matchs de football) et des projets communs.
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 13
Ces activités de Řrapprochementř accompagnent des efforts de lutte contre lřimpunité, notamment à travers
une base de données sur les infractions commises par les militaires et une action de plaidoyer.
2.3
QUELQUES REFLEXIONS SUR DES SYNERGIES POTENTIELLES ENTRE SFCG ET LE PEAR PLUS
Alors que le PEAR Plus a été conçu dans une situation de conflit, surtout en vu dřaborder les
conséquences des conflits, il nřa pas été conçu dans un esprit de prévention explicite des conflits ou de
construction de la paix. Dans la formulation du programme, le facteur « conflit » a été considéré comme une
variable externe, sur laquelle aucune influence nřest possible. Cette approche suppose, implicitement, que le
PEAR Plus cible les facteurs contextuels comme le déplacement et la destruction des communautés, mais
intervient une fois le conflit terminé. Lřhypothèse est que, en agissant sur le contexte, le programme
diminuera éventuellement la possibilité dřune reprise du conflit.
Au contraire, la philosophie de SFCG est basée sur la notion de transformation des conflits. Lřidée n'est
pas d'éliminer les différences entre les individus ou les groupes, mais de les aider à voir ce qu'ils ont en
commun, au-delà de ces différences. L'objectif de la programmation de SFCG est ainsi de fonder un
dialogue sur ce qui est partagé et de définir des intérêts communs, sans ignorer ce qui les sépare et ce qui
peut être conflictuel. Autrement dit, SFCG ne considère pas les conflits comme des variables externes, mais
plutôt comme un ensemble de facteurs sur lesquels on peut avoir une influence directe.
On peut déjà voir quřil y a des complémentarités intéressantes entre le PEAR Plus et SFCG, qui valident
l'idée d'un partenariat. Sur la base de la revue de la documentation, lřéquipe avait formulé des hypothèses
de travail qui ont été testées pendant la mission. Ces hypothèses concernaient le rôle de SFCG dans les
domaines suivants :



Analyse des dynamiques conflictuelles et des capacités de paix au niveau local. Il semble que le PEAR
Plus ne soit pas fondé sur une analyse approfondie de la dynamique des conflits dans les zones de
la mise en œuvre. L'équipe a voulu évaluer dans quelle mesure SFCG pourrait aider l'UNICEF et ses
partenaires à avoir une meilleure compréhension de ces dynamiques, et des relations entre ces
dynamiques et les activités du programme.
Communication et gestion des rumeurs. Dans un environnement aussi chargé que celui de lřEst de la
RDC, les perceptions sont aussi importantes que les faits. Un programme, même bien intentionné,
peut avoir des effets négatifs sřil est perçu comme bénéficiant à un groupe plutôt qu'à un autre.
Souvent, les programmes de développement font l'objet de discours démagogiques et de
propagande. Il devient donc particulièrement important dřavoir une stratégie de communication
claire et transparente, qui puisse contrebalancer ces rumeurs.
Dialogue et promotion de la connaissance mutuelle. Finalement, lřéquipe a voulu explorer dans quelle
mesure PEAR Plus pourrait être utilisé comme un «point d'entrée» pour des activités spécifiques de
la promotion du dialogue et de la compréhension mutuelle, en utilisant la Řboîte à outilsř de SFCG.
En dépit des synergies évidentes, deux points sont à aborder avec précaution.
Le premier est dřordre conceptuel. Lřintégration dřune dimension de sensibilité aux conflits ne signifie pas
simplement lřajout dřactivités de réconciliation. Typiquement, il faut des changements structurels à un
programme pour le rendre sensible aux conflits. Ces changements pourraient concerner le choix des zones
d'intervention, des groupes cibles, des partenaires, etc. Dans le cas de PEAR Plus, ces types de changements
iraient au-delà de ce à quoi SFCG peut contribuer. Il faut néanmoins avoir une vision globale de la
sensibilité aux conflits, afin d'éviter la tentation de définir un problème en fonction des solutions disponibles.
Le deuxième avertissement est dřordre pratique. Considérant que la mise en œuvre du PEAR Plus est
déjà faite par des ONGs, lřajout dřun nouveau partenaire pour une composante Ŗtransversaleŗ dans le
domaine de la transformation des conflits soulève le risque de compliquer la situation organisationnelle du
programme. Afin dřéviter ce risque, il est important de définir précisément les modalités de mise en œuvre
(structure décisionnelle, budget, etc).
14 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
3. Cadre Conceptuel de lřEtude
L
řobjectif de cette étude est dřévaluer le PEAR Plus par rapport à sa « sensibilité aux conflits ». Dans ce
qui suit, nous offrirons une définition de travail de cette notion, et identifierons plusieurs questions clés
ainsi que les défis qui émergent dans les efforts de mise en place de la sensibilité aux conflits, en
particulier dans le contexte de la RDC.
3.1. « SENSIBILITE AUX CONFLITS » : UNE DEFINITION DE TRAVAIL
Au sens général, le terme Řconflitř signifie une divergence dřopinions perçues comme irréconciliables. En
soi, les conflits ne sont pas forcément négatifs Ŕ au contraire, on peut affirmer que chaque société a besoin
d'un certain niveau de conflit afin d'exister et d'évoluer. Il est naturel que les individus et les groupes aient
des intérêts différents et quřils soient en compétition pour réaliser leurs intérêts.
Quand on parle de sensibilité aux conflits dans le cadre de cette étude, on adopte une définition plus
restrictive du conflit, correspondant aux conflits violents. En particulier dans le contexte de la RDC, on se
réfère à tous les conflits qui ont conduit à des violences dans le passé, y compris la violence entre groupes
armés et la violence au niveau communautaire (par exemple, les conflits violents autour de lřaccès la terre).
Depuis la deuxième moitié des années 1990, la majorité des agences de développement se sont
rendues compte de la nécessité dřintégrer la sensibilité aux conflits dans leurs interventions dans des zones
de conflit ou de post-conflit. Par conséquent, beaucoup dřentre elles ont adopté des lignes directrices pour
guider leurs agents de terrain et recruté des conseillers spécialisés dans lřanalyse et la résolution des conflits.
Aujourdřhui, de nombreux organismes de développement ont leur propre méthodologie pour lřanalyse des
conflits, tel que, par exemple, le CDA (Conflict-related Development Analysis) du PNUD 3 et le CAF (Conflict
Analysis Framework) de la Banque Mondiale4. Il y a eu une augmentation significative de lřutilisation de ces
3 PNUD, 2003.
4 World Bank, 2005. Voir aussi DFID, 2002 ; GTZ, 2001 ; SIDA, 2006.
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 15
outils pour influencer la programmation 5 , ainsi quřun effort de développement des indicateurs qui sont
« sensibles aux conflits » pour permettre un suivi et une évaluation plus rigoureux des programmes de
construction de la paix. À ce jour, l'UNICEF n'a pas encore suivi cette tendance de manière systématique, et il
ne dispose pas encore des lignes directrices pour intégrer la sensibilité aux conflits à travers ses
programmes.
A la base de la notion de sensibilité aux conflits (ou conflict sensitivity en anglais), il y a lřidée quřaucune
intervention dans une situation conflictuelle ne peut être Řneutreř : il y a nécessairement des effets, soit positifs
soit négatifs, sur les dynamiques conflictuelles. Dès que lřon injecte des fonds ou de lřassistance matérielle
dans une situation conflictuelle, on affecte lřéquilibre entre les groupes en compétition. La définition de
sensibilité aux conflits sřarticule donc autour de deux piliers : (i) lřimpératif de Řne pas nuireř et (ii) les efforts
de saisir les opportunités pour contribuer à la construction de la paix et à la réconciliation.6
3.1.1
Ne pas nuire
Il est aujourdřhui bien documenté quřen dépit des meilleures intentions, les interventions humanitaires ou
de développement peuvent alimenter des tensions parmi des groupes opposés, ou renforcer les causes sousjacentes des conflits7. Les interventions ont le potentiel de « nuire » à deux niveaux : (i) au niveau micro, par
rapport aux relations intra- et intercommunautaires, dans le site de mise en œuvre du projet, et (ii) au niveau
macro, sur une échelle géographique et temporelle plus large.
Le niveau micro est le plus évident, par exemple à travers le processus de ciblage des bénéficiaires.
Comme il nřest pas possible pour un programme dřatteindre toutes les couches de la population, il est
normalement nécessaire dřidentifier des groupes cibles, typiquement selon des critères de vulnérabilité. Ce
processus pose un risque inhérent de créer des tensions entre ceux qui reçoivent lřassistance et ceux qui nřen
reçoivent pas. Ce risque est beaucoup plus élevé dans des situations caractérisées par une histoire de conflits
intracommunautaires, où le choix des bénéficiaires peut renforcer des perceptions de favoritisme au profit
de certains groupes et de discrimination contre dřautres groupes. Dans de tels contextes, même les
interventions qui paraissent apporter des bénéficies à la communauté entière pourraient involontairement
créer des tensions entre des groupes opposés.
Pour éviter de nuire au niveau micro, les intervenants doivent maîtriser les dynamiques au niveau local, à
savoir lřhistoire des tensions et des violences entre communautés et groupes ethniques, et connaître les
structures des autorités et leur rapport de forces ainsi que les mécanismes existants de gestion des conflits.
Une fois que cette analyse a permis dřidentifier les risques, il est souvent possible de les minimiser à travers
un processus de ciblage plus transparent et par une stratégie de communication plus efficace avec les
groupes adverses. Le projet peut aussi envisager de soutenir et de renforcer des institutions existantes de
gestion non-violente des conflits.
Lřimpact de lřassistance sur les conflits au niveau macro est plus difficile à discerner et à atteindre. Cela
nécessiterait une compréhension des conflits qui va au-delà des dynamiques locales, ainsi quřune
compréhension des liens entre lřintervention et les efforts mis en place par dřautres acteurs. La dimension
macro échappe souvent à ce quřon peut atteindre dans le cadre de la mise en œuvre dřun projet qui
intervient au niveau local Ŕ communautés, groupements, province. Elle nécessiterait des interventions au
niveau politico-stratégique qui sont hors de la portée des programmes à la base.
Pour une analyse des progrès dans ce domaine, voir Barbolet et al, 2005; Paffenholz, T et Reychler, L,
2007; World Bank, 2006.
6 Pour une introduction à la notion de sensibilité aux conflits, voir FEWER, International Alert and Saferworld,
2003.
7 Sur la notion de Řne pas nuireř, voir en particulier Anderson, 1999.
5
16 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
Les deux niveaux (micro et macro) sont liés, mais ils ne sont pas toujours complémentaires. Dans certaines
situations, les efforts de ne pas nuire au niveau micro peuvent même augmenter le risque de nuire au niveau
macro Ŕ et vice versa. Par exemple, un projet peut décider de travailler avec des communautés
ethniquement homogènes, pour éviter quřil y ait des perceptions de favoritisme dřun groupe ethnique parmi
les bénéficiaires. Cette stratégie sřattaque au niveau Ŗmicroŗ, mais risque de marginaliser des minorités
ethniques, renforçant en effet des tendances discriminatoires et potentiellement conflictuelles sur une échelle
plus large. De même, dans une situation où la faiblesse de lřEtat représente une cause structurelle de conflit,
la création de structures parallèles de prise de décision Ŕ justifiée par les motifs de rendre la gestion et la
résolution des conflits au niveau local plus efficace Ŕ pourrait affaiblir dřavantage la légitimité des structures
étatiques, et donc indirectement contribuer à la perpétuation des causes du conflit.
Enfin, il faut souligner que même les interventions qui visent spécifiquement la construction de la paix
pourraient être nuisibles Ŕ par exemple, en sous-estimant lřampleur et la profondeur des divisions entre les
groupes, en suscitant des attentes irréalistes, ou en créant un Ŗmarchéŗ dřactivités de construction de la paix
Ŗà la modeŗ, qui ne sřattaquent pas vraiment aux causes des conflits 8 (voir Encadré 2).
Encadré 2 : Sensibilité aux conflits des activités de construction de la paix
ŖLes organisations de consolidation de la paix pourraient trouver particulièrement difficile de
reconnaître la nécessité d'être sensible aux conflits. Cela peut être dû à plusieurs raisons, mais surtout au fait
que leur mandat les amène à supposer que leurs activités contribuent automatiquement à la création dřun
environnement pacifique. Cette hypothèse pourrait conduire à une analyse non systématique du contexte
dans lequel lřorganisation opère; un manque de planification lors de l'exécution des projets de consolidation
de la paix; un manque de coordination; ainsi que de réclamer le Ŗsuccèsŗ des interventions fondé sur des
9
relations contestables de cause-effetŗ.
3.1.2 Contribution à la construction de la paix
Le deuxième pilier est lřintégration dřune composante de construction de la paix dans toutes les
interventions, quel que soit leur domaine dřintervention spécifique. Dans ce cas, on peut également distinguer
entre le niveau micro et le niveau macro.
Au niveau micro, un projet peut viser à renforcer la cohabitation pacifique parmi les différents groupes
dans la localité Ŕ par exemple, en donnant la priorité aux activités qui apportent des bénéfices concrets aux
communautés. Les projets peuvent aussi incorporer des activités additionnelles qui ciblent la construction de la
paix dřune manière plus directe, par exemple en contribuant à dissiper les préjugés et les mythes en vue de
contribuer à une meilleure compréhension parmi les groupes.
Par rapport au niveau macro, les conflits dans les milieux locaux sont liés aux enjeux politiques et
économiques plus larges ou aux causes structurelles qui ne sont pas facilement affectées par les interventions
locales. Il serait important de choisir des interventions de développement qui contribuent à aborder les
causes des conflits (et pas seulement leurs conséquences). Parmi les multiples besoins humanitaires et de
développement, il conviendrait donc de donner la priorité à ceux qui ont une influence majeure sur les
conflits, non seulement au niveau local, mais aussi par rapport aux intérêts plus larges. Comme déjà pour le
Pour des exemples de la façon dont les activités de construction de la paix peuvent nuire, voir Anderson et
Olson, 2003.
9 FEWER, International Alert and Saferworld, 2003:9, traduction par les auteurs.
8
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 17
pilier Ŗne pas nuireŗ, la sensibilité aux conflits au niveau macro nécessite souvent un changement complet de
stratégie de la part des intervenants pour impliquer des acteurs et sřattaquer aux intérêts à des niveaux
différents.
Tableau 2 : Les dimensions de la “sensibilité aux conflits”.
Ne pas nuire
Niveau “micro”
Niveau “macro”
18 | P a g e
Construction de la paix
Eviter de créer/renforcer des
conflits dans le(s) localité(s) de
mise en oeuvre du projet (ex:
entre
bénéficiaires
et
non
bénéficiaires ; prise de décision
inclusive)
Contribuer à faire avancer la cohabitation
pacifique dans les localités de mise en
œuvre du projet (par ex. dialogue local
entre
communautés ;
activités
de
solidarité ; bonne communication autour
des actions menées)
Eviter de renforcer les causes
sous-jacentes du conflit (par ex.
éviter de cibler une zone et un
groupe ethnique au détriment des
autres)
Contribuer à aborder la résolution des
causes sous-jacentes du conflit (par ex.
faciliter
des
dialogues
intercommunautaires ;
donner
une
information exacte et impartiale qui
pourrait encourager du plaidoyer et des
prises de décisions favorisant la
transformation de ces conflits)
UNICEF et Search for Common Ground
4. Analyse des dynamiques des
conflits dans lřEst de la RDC
L
e PEAR Plus, pour lřinstant, manque dřoutils et de capacités analytiques pour
recueillir
systématiquement des données sur les causes des conflits et les analyser. La présente section offre une
analyse de base des causes des conflits dans lřEst de la RDC, qui pourrait servir de toile de fond au
développement dřoutils analytiques pouvant capturer la complexité des dynamiques conflictuelles, sans trop
compliquer la tâche des intervenants PEAR Plus.
Les conflits dans lřEst de la RDC sont caractérisés par une imbrication de plusieurs niveaux Ŕ local,
provincial, national, et régional, avec une prolifération des acteurs et une complexité croissante au fil des
années. Dans les reportages médiatiques, mais également dans quelques analyses académiques, on constate
souvent une confusion entre les causes, cřest-à-dire les conditions structurelles et les motivations profondes des
acteurs qui ont contribué aux conflits, et les manifestations, cřest-à-dire les symptômes ou signes visibles des
conflits. Les analyses mélangent également souvent les différents niveaux de conflits. En réalité, malgré de
nombreux liens, les conflits locaux connaissent souvent des dynamiques et des causes différentes de celles
des conflits à lřéchelle provinciale ou nationale. Il faut bien démêler les conflits et séparer analytiquement
les différents niveaux pour éclaircir leurs causes. Car, sans analyse propre des causes des conflits, on
nřarrivera pas facilement à trouver des stratégies dřapaisement ou de résolution.
Cette section ne prétend pas donner un traitement exhaustif de lřhistoire des conflits en RDC. Elle essaie
plutôt dřavancer un certain nombre de facteurs clés Ŕ en termes de causes et de manifestations des conflits Ŕ
qui sont particulièrement pertinents pour analyser lřimpact du PEAR Plus sur les dynamiques conflictuelles. 10
4.1
MANIFESTATIONS DES CONFLITS
Les actions des groupes armés (combats, accrochages, barrages, tracasseries de la population, violences
sexuelles, travaux forcés) sont les manifestations les plus visibles des conflits dans la région. Leurs origines et
10
Pour une vue dřensemble de lřhistoire des conflits en RDC, voir Prunier, 2009 ; Turner, 2007.
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 19
résident dans des griefs basés sur des intérêts et des revendications concrets, pour la plupart liés au contrôle
des ressources économiques et politiques. Bien que chaque groupe armé ait sa propre raison dřêtre, tous
poursuivent aussi des activités lucratives dřexploitation des ressources et dřautofinancement, ainsi que
lřimposition rampante de Řtaxesř informelles aux populations, ou des pillages et intimidations, viols
systématiques et tracasseries si les civils résistent. 11
Le recrutement des enfants soldats est pratiqué par tous les groupes armés, ciblant souvent des enfants
de moins de dix ans, les plus jeunes nřayant que six ans. Souvent drogués pour les soumettre aux autorités
des groupes armés, ils ne sont pas seulement utilisés pour le combat, mais également comme porteurs et
cuisiniers ou comme esclaves sexuels. La présence des groupes armés a aussi provoqué des déplacements
massifs de population : on estime que le chiffre global de déplacés en RDC était de 2,1 millions en juin
2009, dont 1 130 000 au Nord Kivu, environ 500 000 au Sud Kivu, et presque 170 000 en Ituri. 12
Aujourdřhui, officiellement, tous les groupes armés qui ont participé à la Conférence de Goma, début
2008, et au processus Amani (cřest-à-dire, le CNDP et la majorité des groupes Mai-Mai) nřexistent plus, car
leurs membres sont censés avoir été intégrés dans les FARDC ou démobilisés et réinsérés dans la vie civile.
Deux cérémonies de Řdésengagementř ont marqué la fin officielle de leur existence: en avril 2009 à Goma,
pour le Nord Kivu, et en juillet 2009 à Bukavu, pour le Sud Kivu. Sur le terrain, pourtant, les groupes armés
sont toujours présents dans de nombreuses localités. Et même pour les groupes intégrés dans les FARDC, le
manque dřencadrement propre crée souvent des situations où les ex-miliciens nřont changé que dřuniforme et
continuent de suivre les ordres de leurs commandants rebelles.
Alors que les conflits impliquant des groupes armés sont les manifestations les plus évidentes et les plus
sanglantes des conflits, ce serait une erreur de les considérer comme la seule forme de violence dans lřEst de
la RDC. Plusieurs autres formes de violence existent au niveau local. Par exemple, les conflits localisés autour
de l'accès à la terre ou du pouvoir traditionnel provoquent de temps en temps des violences, surtout dues à
lřabsence de mécanismes efficaces de gestion non-violente des conflits.
4.2
CAUSES DES CONFLITS
Les causes des violences récentes et de lřexistence de groupes armés et donc les causes des conflits dans
lřEst du Congo, sont en revanche complexes et pas toujours faciles à discerner. Les facteurs principaux sont
cités ci-dessous, mais de manière relativement schématique. En réalité, les facteurs interagissent les uns avec
les autres de manière extrêmement complexe.

Problématique foncière. Les problèmes dřaccès à la terre sont au cœur des conflits dans lřEst de la
RDC à tous les niveaux - à commencer par les disputes au sein dřune même famille autour de
lřhéritage foncier, et qui ont de temps à autre provoqué des violences. Les conflits entre agriculteurs
et éleveurs sur lřutilisation des terres fertiles limitées sont très répandus. Le problème foncier est,
principalement, un problème de gouvernance : de grandes quantités de terres sont dans les mains
des grands propriétaires fonciers, alors que la majorité des agriculteurs nřont aucun titre sur la terre
quřils cultivent.13

Crise de légitimité de l’autorité coutumière. Comme lřaccès au pouvoir coutumier est devenu un des
rares moyens pour sřassurer le contrôle des terres, la question de la terre joue aussi dans les conflits
Les conséquences de la présence de groupes armés au Nord Kivu sont bien connues et documentées. Voir
Human Rights Watch, 2002 ; 2004 ; IRC, 2008.
12 OCHA, 2009.
13 Sur la problématique foncière dans lřEst de la RDC, voir Pottier, 2003 ; Van Acker 2000, 2005 ;
Vlassenroot et Huggins, 2004.
11
20 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
internes à lřautorité coutumière. Il y a typiquement une pluralité de prétendants, chacun ayant ses
propres arguments pour revendiquer sa légitimité, et souvent ils utilisent la violence. Une perception
répandue parmi la population est quřil y a aujourdřhui une dégradation prononcée des pratiques
coutumières, un affaiblissement du pouvoir coutumier et une incapacité des autorités coutumières à
jouer leur rôle dřarbitre dans la résolution des conflits communautaires.

Méfiance interethnique. Pratiquement tous les groupes armés dans l'Est de la RDC sont constitués
autour dřune identité ethnique, sřopposant à une menace, réelle ou perçue, venant des Ŗautresŗ
groupes. La méfiance entre groupes ethniques, même quand elle ne devient pas violente, constitue
un facteur omniprésent dans toutes les relations sociales et politiques dans lřEst de la RDC. Cette
méfiance se manifeste surtout vis-à-vis de groupes considérés comme « étrangers », tels que les
Banyarwanda au Nord Kivu et les Banyamulenge au Sud Kivu, mais également au sein du groupe
des rwandophones, en particulier entre Hutu et Tutsi au Nord Kivu 14.
Malgré leurs causes de départ, notamment lřautodéfense de leurs communautés et de leurs intérêts, dans
les années passées les groupes armés ont souvent relégué cette mission initiale au second plan et sont
devenus des organisations armées autosuffisantes et génératrices de revenu : souvent, ils attaquent et pillent
les mêmes communautés quřils sont censés protéger, et établissent des alliances opportunistes avec dřautres
groupes armés de différentes origines ethniques, si cela sert leurs intérêts. Trois éléments sont fondamentaux
à cet égard.

Richesses minières. Tous les groupes armés, à des degrés divers, sont impliqués dans l'exploitation
des immenses ressources minières de l'Est de la RDC, formant souvent des alliances volatiles avec un
autre groupe, et souvent avec lřappui des pays voisins qui ont aussi leurs propres intérêts dans
lřexploitation minière. Bien que lřexploitation minière ne soit pas une motivation originale pour le
déclenchement de ces guerres, elle est devenue aujourdřhui plus importante, pour certains acteurs,
que les motivations originelles des conflits, comme lřa reconnu le Groupe dřExperts des Nations
Unies.15

Main d’œuvre pour la violence. Dans lřEst de la RDC, il nřy a pratiquement aucune possibilité
d'emploi salarié, sauf pour les organisations internationales et les ONGs. Les seules options qui
s'offrent aux jeunes sont, pour la plupart, l'agriculture de subsistance, elle-même rendue très
difficile par la rareté des terres et par les méthodes archaïques de production, ainsi que le travail
dans les mines, travail souvent laborieux et peu lucratif pour les petits ouvriers ou journaliers. Dans
ce contexte, le coût dřopportunité de rejoindre les groupes armés est minime. Pour les jeunes
désœuvrés, rejoindre un groupe armé peut être une stratégie de survie parfaitement logique,
surtout quand elle est liée à un certain prestige et à la légitimité du combat pour la Řbonneř cause
de la défense de sa communauté ethnique. Dans un climat où les enfants sont déjà inculqués de
stéréotypes et de préjugés ethniques, il est dřautant plus facile de mobiliser les jeunes autour de
revendications ethniques.

Faiblesse de l’Etat. Lřincapacité de lřEtat congolais à jouer son rôle de gestionnaire des affaires
sociales et dřarbitre impartial dans les conflits sociaux représente un leitmotiv dans la littérature et
dans les analyses politiques. Souvent surnommé « Etat fantôme » ou « prédateur», lřEtat congolais
nřa, depuis lřindépendance, jamais été capable dřétablir des institutions solides qui pourraient
aujourdřhui agir comme un contrepoids aux groupes armés. L'armée et la police ne sont pas
suffisamment formées, équipées ou payées, et sont souvent les responsables de tracasseries plutôt
que les protecteurs de la population. On observe une « privatisation » généralisée des fonctions de
lřEtat, et les services sociaux sont fournis presque exclusivement par des agences onusiennes ou des
Sur la question identitaire, voir en particulier Jackson, 2006 ; Vlassenroot, 2002 ; Willame, 1997.
Sur le rôle des richesses minières dans le financement des conflits au Congo, voir Kippin, 2008 ; Global
Witness, 2005, 2006, 2009 ; Human Rights Watch, 2005 ; Pourtier, 2004 ; United Nations, 2001, 2002,
2008.
14
15
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 21
ONG internationales. Dřune certaine manière, les groupes armés jouent une fonction quasi-étatique
dans leurs zones de contrôle et comblent ainsi le vide créé par lřabsence de lřEtat.16

Soutien des pays voisins. Le « facteur régional » est une des dimensions les plus analysées des
conflits dans lřEst du Congo Ŕ en particulier le rôle joué par le Rwanda et lřUganda, et, dans une
moindre mesure, le Burundi. Des individus influents au sein du gouvernement rwandais sont
soupçonnés dřavoir de forts intérêts politiques et économiques et miniers au Nord et au Sud Kivu,
tandis quřils justifient leur assistance par leur devoir de défendre la population Tutsi des attaques
des autres communautés et de prévenir un nouveau génocide. 17
Alors que lřhistoire des conflits diffère quelque peu dans les trois provinces qui ont fait lřobjet de cette
étude, les principaux facteurs sont très similaires: une compétition constante et croissante pour lřaccès à la
terre, imbriquée avec une manipulation des identités ethniques à lřépoque coloniale et postcoloniale. Dans
tous les cas, la situation a été déstabilisée encore davantage par les intérêts politiques et économiques des
pays voisins.18
4.3
STRATEGIES DE CONSTRUCTION DE LA PAIX DANS LřEST DE LA RDC
Lřaccord de paix conclu en 2002 à Sun City, Afrique du Sud, a mis fin à la guerre de 1998, dite
« deuxième guerre du Congo », et a ouvert la voie à une transition démocratique, sans cependant arrêter la
violence dans les provinces de lřEst du pays. A partir de la fin 2007, une série de stratégies de construction
de la paix ont été adoptées et mises en œuvre (voir Encadré 3 pour une synthèse).
Encadré 3 : Initiatives politico-diplomatiques pour la paix dans l’Est de la RDC
Communiqué conjoint de Nairobi (Novembre 2007). Adopté par le Gouvernements de la RDC et du
Rwanda, le Communiqué engage les deux pays à collaborer contre les « groupes armés dřorigine
étrangère » et notamment les FDLR.
Conférence pour la Paix, la Sécurité et le Développement (Janvier 2008). La Conférence, tenue à Goma
avec la participation des principaux groupes rebelles actifs dans le Nord et le Sud Kivu (à l'exception des
FDLR), a abouti à lřadoption dřun Acte dřEngagement, qui engage les parties à une cessation immédiate des
hostilités sur toute l'étendue des deux provinces, le Nord et le Sud Kivu, et à s'abstenir de commettre des
actes nuisibles à la paix et à la sécurité.
Programme Amani (lancé en Janvier 2008). Le Programme Amani (ou Ŗpaixŗ en Swahili) est une initiative
du gouvernement congolais ayant comme objectif dřaccompagner le processus politique et de jeter les bases
pour la sécurisation, la pacification et la reconstruction des provinces du Nord et du Sud Kivu.
United Nations Security and Stabilization Support Strategy (UNSSSS, initié en Juillet 2008). LřUNSSSS,
dont lřidée originelle était conçue même avant la Conférence de Goma comme « stratégie de sortie » de la
MONUC, constitue un programme intégré des Nations Unies pour renforcer la sécurité, promouvoir la
restauration de lřEtat et créer les conditions dřun développement durable dans des endroits clés de lřEst de
la RDC affectés par les conflits, notamment dans le district de lřIturi, dans les provinces du Nord et du Sud
Kivu, dans la province du Maniema et dans le Nord de la province du Katanga. LřUNSSSS sřarticule autour
Pour une analyse récente du rôle de lřEtat congolais, voir Trefan, 2009.
Sur le poids de la dimension régionale dans les conflits au Congo, voir Eriksen, 2005 ; Mathieu-Willame,
1999 ; Prunier, 2009.
18 Voir lřannexe 1 pour un aperçu des causes des conflits dans lřEst de la RDC. Voir aussi PNUD/CPAP,
2008a ; 2009.
16
17
22 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
de 4 composantes Ŕ la sécurité, la restauration de lřautorité de lřEtat et le retour des réfugiés et déplacés et
la relance communautaire.
Plan de Stabilisation et Reconstruction de l’Est de la RDC (STAREC, lancé en juin 2009). Le STAREC vise à
la consolidation des acquis des opérations militaires, le rétablissement de lřautorité de lřEtat, la sécurisation
des populations civiles, lřintégration des déplacés et réfugiés et la relance économique à lřEst. Le plan, avec
une durée initiale de six mois, comprend 3 composantes (sécuritaire, humanitaire et sociale, et de
stabilisation et relance économique). Il couvre le Haut Uele, lřIturi, le Nord et Sud Kivu, le Maniema et le
Nord Katanga. Le STAREC prend comme point de départ lřUNSSSS, dans une perspective dřappropriation
nationale. Les priorités de lřUNSSSS sont étendues pour couvrir dřautres zones géographiques au delà des
« axes prioritaires » et dřautres secteurs dřintervention au delà des composants de lřUNSSSS. LřUNSSSS va
être ajusté pour devenir un cadre dřappui au STAREC.
Ces initiatives politico-diplomatiques nřont pas pour autant arrêté les conflits dans lřEst de la RDC. Au
Nord Kivu, la violence a de nouveau éclaté en août 2008, et encore en novembre de la même année,
lorsque le CNDP a saisi de larges terrains dans les territoires de Masisi et Rutshuru et a avancé jusquřaux
portes de la ville de Goma. Le lancement d'une opération militaire conjointe de la RDC et du Rwanda contre
les FDLR (opération Umoja Wetu, ou « notre unité » en swahili) au début de lřannée 2009, et l'arrestation
par les forces rwandaises du leader du CNDP, Laurent Nkunda, ont une fois de plus suscité l'espoir d'un
avenir plus pacifique. Toutefois, dřaprès de nombreux observateurs, lřopération Umoja n'a pas résolu le
problème des FDLR, mais lřa simplement déplacé ailleurs. La majorité des forces des FDLR se sont éparpillées
dans les forêts de Walikale et du Lubero et surtout au Sud Kivu, provoquant une augmentation de l'insécurité
dans la partie nord de la province (surtout dans les territoires de Shabunda et Kalehe, et dans une moindre
mesure au Mwenga et Walungu).
Lřimpact de ces initiatives a été limité pour lřinstant en raison de deux contraintes majeures. En premier
lieu, les stratégies de construction de la paix à ce jour se sont penchées presque exclusivement sur la question
des groupes armés. Elles prônent une solution militaire et comptent sur les alliances avec les puissances
régionales (Rwanda et Uganda), adoptant de facto leurs intérêts dans la poursuite des FDLR. Pourtant, les
conflits dans lřEst de la RDC sont beaucoup plus complexes et profondément enracinés dans des enjeux
locaux liés à la compétition pour le contrôle des terres et dřautres ressources ainsi que le pouvoir politique.
Deuxièmement, l’attention portée à ces conflits au niveau local a été insuffisante, et les efforts dans ce
domaine ont été sur une moindre échelle et de façon peu systématiques. En ce qui concerne les programmes de
réconciliation et de construction de la paix, le niveau local ou « micro » des conflits est resté largement le
domaine des organisations de base locales, parfois soutenues par des acteurs internationaux. Toutefois, ces
interventions sont typiquement menées à petite échelle, avec peu de perspectives de durabilité, et sans
structure organisationnelle stable ou stratégie de long terme. Par exemple, alors quřil y a une pluralité
dřefforts de « médiation » et de « résolution informelle des conflits » autour des questions foncières, on ne
retrouve pas de stratégie cohérente à travers les provinces pour aborder ces conflits. Il est donc révélateur
que lřon vienne juste de commencer, en 2009, à travers quelques programmes du PNUD et de lřUNHCR en
collaboration avec lřUN Habitat, à aborder les questions épineuses des conflits autour de lřaccès à la terre,
ou pour la succession au pouvoir coutumier.
4.4
IMPLICATIONS POUR LE PEAR PLUS
Sur la base de cette analyse des causes des conflits en RDC, nous pouvons entamer une réflexion sur le
rôle que le PEAR Plus pourrait jouer et comment il pourrait se situer par rapport aux deux niveaux, le micro
et le macro, et aux deux dimensions du Řne pas nuireř et de la construction de la paix. Le tableau suivant
offre une telle réflexion sur la contribution potentielle du PEAR Plus dans les tentatives de mitigation ou de
résolution des conflits :
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 23
Tableau 3 : Causes des conflits et impact potentiel des interventions PEAR Plus
Contribution
Niveau ŘMicroř
Causes
Problématique
foncière
Crise de l’autorité
coutumière
Méfiance
interethnique
Richesses minières
Main d’œuvre pour la
violence
Faiblesse de l’Etat
Soutien des pays
voisins
potentielle du PEAR Plus
Niveau ŘMacroř
Ne pas nuire
Construction de la
paix
Ne pas nuire
Construction de
la paix
Impact direct
Impact indirect
Impact direct
Impact indirect
Non
Non
Impact direct
Non
Impact direct
Impact direct
Impact direct
Impact indirect
Non
Non
Non
Non
Impact direct
Impact direct
Impact indirect
Impact indirect
Impact direct
Impact indirect
Impact direct
Impact indirect
Non
Non
Non
Non
Comme indiqué dans le tableau, le PEAR Plus (en vertu de son mandat et de ses domaines d'activités)
n'a pas d'impact lřesprit direct sur plusieurs dimensions clés concernant les conflits en RDC. Il faut garder à
cette considération, pour être conscients de ce qui est réaliste dans le cadre du PEAR Plus.
24 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
5.
Résultats de lřEtude
C
ette section donnera un aperçu des principaux résultats de cette étude dřévaluation du programme
PEAR Plus et discutera leurs implications pour la sensibilité aux conflits du programme dans lřavenir.
5.1
SYNTHESE DES PRINCIPAUX RESULTATS
Cinq observations majeures sont ressorties de cette étude: la non-prise en compte de la sensibilité aux
conflits dans la conception du PEAR Plus ; le manque de données et dřanalyse systématique des conflits ; le
contournement des zones conflictuelles; la manière improvisée du PEAR Plus de traiter les conflits locaux ; et
les défis liées à une méfiance généralisée de lřaction humanitaire de la part de la population et des
autorités.
Résultat 1: La sensibilité aux conflits n’a pas été prise en compte dans la conception du PEAR Plus
Le PEAR Plus est un programme de transition dřune situation dřurgence à des solutions plus durables pour
faciliter la réintégration des rapatriés récents dans leurs communautés dřorigine. Par sa nature, il aborde
donc les conséquences des conflits et non leurs causes. Dřaprès les acteurs impliqués dans la conception du
programme, la question de comment le programme pourrait aborder les conflits ou si le programme serait
sensible aux conflits nřa pas explicitement fait lřobjet des discussions programmatiques initiales.
Par conséquent, au niveau du principe de Řne pas nuireř, la formulation du projet nřa pas prise en
considération la possibilité que le PEAR Plus puisse avoir des conséquences négatives sur les dynamiques des
conflits, ni au niveau micro ni au niveau macro. Même si quelques interlocuteurs lors des interviews ont
mentionné le concept de Řne pas nuireř, ils ont admis que le concept nřavait pas été pris en compte dans la
conception du programme.
La réconciliation et la construction de la paix ont été identifiées comme objectifs transversaux dans le
document programmatique originel du PEAR Plus. 19 Le document indique également que lřUNICEF utiliserait
les analyses des conflits déjà menées par dřautres acteurs (par ex. le PNUD) pour identifier des activités qui
pourraient contribuer de manière significative aux objectifs de construction de la paix et de la réconciliation
communautaire. Au cours des consultations, il nřy avait pas dřindication quřune analyse approfondie des
19
Voir UNICEF, 2008b: 20.
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 25
conflits ait été systématiquement utilisée dans lřélaboration du PEAR Plus. Le document programmatique
précise également que l'UNICEF utilisera des groupes de bénéficiaires (ex : femmes, jeunes) comme « agents
de paix », avec des interventions programmatiques ciblées. Ainsi, lřéducation à la paix reste la seule activité
dans le PEAR Plus qui vise spécifiquement la construction de la paix, attaché au volet éducation.
La contribution à la mitigation voire résolution des conflits du PEAR Plus est indirecte, à travers son
apport à la construction de la paix globale dans le cadre de lřUNSSSS. Selon la logique de lřUNSSSS, le
pilier Řrelèvement précoceř (Řearly recoveryř) est un des quatre éléments clés pour arriver à la stabilisation
de la RDC, notamment les volets politique, sécuritaire, et la restauration de lřautorité de lřEtat. La logique
derrière ce raisonnement est simple : sans retour dans leurs zones dřorigine et sans quřils y trouvent des
moyens de survie et une infrastructure de base incluant lřaccès à lřeau potable, une éducation pour leurs
enfants et une couverture médicale minime, les rapatriés ne vont pas rester dans leurs milieux dřorigine, mais
plutôt migrer vers dřautres zones ou ces services de base existent, ce qui accroîtrait les tensions dans ces
zones, souvent déjà fortement peuplées et permettrait aux groupes armés de contrôler les zones rurales plus
facilement.
Tableau 4 : Le PEAR Plus et la Sensibilité aux Conflits
Ne pas Nuire
Niveau
« micro »
Pas systématique dans la conception du
programme
Improvisée dans lřaction du terrain
Niveau
« Macro »
Résultat 2 :
Pas dřattention explicite au principe « ne
pas nuire »
Construction de la Paix
Pas systématique
Seule intervention de construction de la
paix : Education à la paix
Supposition
dřune
relation
« automatique » entre réintégration et
construction de la paix
Le PEAR Plus manque de données et d’analyse systématique des conflits
Les informations pertinentes sur les dynamiques conflictuelles dans les communautés dřintervention
recueillies par le monitoring protection ainsi que par les MSA ont été suffisantes pour informer les
responsables et agents du terrain du programme PEAR Plus pour une exécution efficace de leurs activités.
Pourtant, même si le PEAR Plus opérait dans les zones de tensions intercommunautaires, les informations
récoltées actuellement sur les conflits dans le cadre du monitoring protection et des MSA ne seraient pas
suffisantes pour un engagement actif dans la construction de la paix. Pour cela, il faudrait des informations
plus détaillées à tous les niveaux : sur les acteurs Ŕ individus et groupes Ŕ leurs intérêts, les localités, la
nature exacte des conflits, une brève histoire des tensions existantes ainsi que des tentatives précédentes de
résolution des conflits. Le monitoring protection, qui sřest concentré sur les manifestations des conflits,
notamment la situation sécuritaire, la présence de groupes armés, et les incidents de violations des droits
humains, et les MSA sur la situation humanitaire, ne sont pas en position de fournir des renseignements
détaillés sur les causes des conflits.
La façon dont les informations sont recueillies et la qualité des données qui sont disponibles pour les
responsables des programmes et qui influencent la stratégie programmatique et la mise en œuvre des
programmes PEAR et PEAR Plus, ont un impact sur la sensibilité aux conflits desdits programmes sur plusieurs
niveaux. Dřabord, si les informations sur les dynamiques conflictuelles sur place ne sont pas correctes, soit
parce quřelles sont incomplètes, soit parce quřelles ne sont plus dřactualité, lřassistance peut facilement mettre
les bénéficiaires en danger, en faisant des cibles pour les groupes armés. Cette situation mettrait également
26 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
en danger les agents de terrain des ONG partenaires. De plus, le ciblage de certaines zones et populations
à lřexclusion des autres est souvent interprété comme une prise de position en faveur dřune communauté au
détriment des autres groupes et pourrait entraîner des hostilités contre les ONGs ou leurs employés. En tout
état de cause, il nřest jamais avantageux pour une ONG humanitaire ou de développement dřêtre perçue
comme partiale, car cela rend son aide moins efficace, et rend également la tâche des organisations à
contribuer à la construction de la paix plus difficile, voire impossible.
Encadré 4 : Instruments clés de collecte des données sur les conflits
Les évaluations multisectorielles Ŕ mieux connues sous leur acronyme anglais MSAs (Multi-Sectoral
Assessments) Ŕ sont une des composantes-clé du programme PEAR. Elles offrent une description détaillée des
besoins humanitaires dans les zones concernées. Les résultats des MSA sont partagés avec les organisations
membres du Cluster retours et relance communautaire au niveau provincial et national pour mieux cibler les
interventions des acteurs humanitaires et pour fournir une base pour le suivi de lřassistance donnée. La
plupart des MSA sont disponibles en ligne sur la page web du PEAR et ainsi sont accessibles à tous les
autres acteurs humanitaires (www.pear.cd) . En dehors des MSA « standards », les partenaires du PEAR
mènent aussi des évaluations rapides, dans la foulée dřune crise, dès que la situation sécuritaire permet
lřaccès à la zone. Les partenaires du PEAR ont mené 862 évaluations rapides et 198 évaluations
multisectorielles dans 940 localités de lřEst de la RDC depuis novembre 2006.
Le monitoring protection est un outil de renseignement et de collecte des données sur la situation sécuritaire
et le respect des droits des déplacés sous lřégide du Haut Commissariat pour les Réfugiés pour le compte du
Cluster protection du système des Nations Unies. Le HCR a contracté plusieurs ONG internationales et
congolaises pour la mise en œuvre de la collecte systématique et continue de données sur la protection des
civils, surtout des enfants et des femmes (voir tableau ci-dessous).
Les zones évaluées sont choisies par le Cluster en fonction des besoins dřinformation sur la situation
sécuritaire et des droits humanitaires dans des secteurs spécifiques, y compris les zones de déplacement et
de retour. Chaque analyse est composée dřun « scoring » quantitatif, mais aussi dřune analyse narrative. Les
données sont collectées sur la base dřun questionnaire qui, en quelques questions, essaie de donner un
aperçu global de la situation sécuritaire actuelle et de lřéventualité que la contrée reste calme à lřavenir. Le
score de Řdurabilitéř (entre 0 et 16) comprend des informations sur la présence des autorités de lřEtat, des
groupes armés, sur les relations entre les groupes armés et sur la possibilité dř opérations militaires.
Organisations chargées de collecte des données :
Ituri
PEAR – MSA
Solidarités
Monitoring Protection
Oxfam Quebec
Nord Kivu
NRC
NRC
Sud Kivu
AVSI
Arche dřAlliance
Pain pour les Déshérités.
Cette information sur les conflits existe, cependant, souvent auprès des agents de terrain des
organisations partenaires du PEAR et PEAR Plus, certains dřentre eux, surtout ceux dont la base
opérationnelle est proche ou dans les communautés dřintervention, étant familiers des dynamiques
conflictuelles locales. Il faudrait donc créer un forum ou un mécanisme pour mieux capturer cette information
de manière systématique et analytique pour instruire la conception et la mise en exécution des programmes
de réconciliation ou de mitigation des conflits locaux. Dans ce contexte, certains aspects du programme
CDR/Tuungane de lřIRC au Sud Kivu pourraient servir de modèle pour une collecte de données rigoureuse
avec la collaboration des communautés dřintervention et sous supervision de chercheurs internationaux.
Pourtant, même le programme CDR se concentre principalement sur lřimpact des interventions sur les
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 27
indicateurs humanitaires et de développement socio-économique et non sur les dynamiques conflictuelles
locales.
Résultat 3 :
Le PEAR Plus contourne les zones des conflits pour travailler dans les zones sans
conflits majeurs
Le processus de prise de décision pour sélectionner les zones dřintervention du programme est tel quřune
combinaison des priorités de sécurité et de durabilité triomphe sur les critères humanitaires et sur dřautres
critères, comme la gravité des tensions intercommunautaires. Par conséquent, un des résultats cruciaux de
cette étude est la conclusion que le PEAR Plus « contourne » (voir encadré 5 ci-dessous pour une explication
du concept) les zones aux conflits aigus et travaille dans des zones largement pacifiées, sans tensions
interethniques majeures.
Une exception à cette stratégie actuelle qui évite les zones conflictuelles pourrait être lřaxe FiziMinembwe dans le Sud Kivu. Lors des consultations menées par lřéquipe au Sud Kivu en juillet 2009,
lřUNICEF entretenait des réflexions sur la possibilité de choisir cet axe prioritaire de lřUNSSSS comme zone
dřintervention du PEAR Plus. Depuis, selon les responsables de lřUNICEF, des discussions ont eu lieu avec lřIRC
au Sud Kivu pour explorer comment intervenir dans ces zones. Ceci serait un développement significatif, car
la zone comprend une population importante de Banyamulegwe qui, jusqu'à présent, a été largement exclue
de l'assistance humanitaire.
Encadré 5 : Conflits et Interventions
Le chercheur britannique Jonathan Goodhand propose un schéma de trois façons dont les interventions
extérieures pourraient agir sur les dynamiques conflictuelles :
Contourner les conflits («working around conflict») : Les bailleurs évitent de traiter des conflits ou les
traitent comme une externalité négative quřils ne peuvent pas influencer… Dans les lieux où il y a conflit
ouvert, les bailleurs retirent leur soutien et arrêtent les programmes dřassistance au développement.
Travailler dans les conflits («working in conflict») : Les bailleurs acceptent quřil est nécessaire dřêtre plus
sensible aux dynamiques conflictuelles et adoptent des stratégies et programmes appropriés…Ces
programmes ne sřattaquent pas aux conflits à court terme, mais pourraient réduire la prédisposition aux
conflits du pays dřintervention.
Travailler sur les conflits («working on conflict») : Cela nécessiterait une concentration explicite sur la
gestion et la résolution des conflits. Cela entraînerait également des programmes qui sřattaquent en même
temps à la cupidité des individus et aux injustices qui motivent les rébellions, par le biais de programmes
qui limitent les opportunités de sřenrichir comme les lois et régulations internationales, des conditions
attachées à lřassistance extérieure ou la création dřopportunités de générer des revenus alternatifs pour
ceux qui ont profité des conflits.
Goodhand, Jonathan. 2001. Violent Conflict, Poverty and Chronic Poverty. Manchester,UK: Chronic Poverty
Research Center Working Paper 6, May 2001. Disponible au http://www.chronicpoverty.org/uploads/
publication_files/WP06_Goodhand.pdf
Critères de sélection des zones dřintervention du PEAR Plus
Les zones dřintervention du PEAR Plus ont été choisies en fonction de plusieurs critères et en plusieurs
étapes. Au cours de cette étude, il est apparu que les opinions sur la hiérarchisation des critères de sélection
des zones divergent parmi les différents acteurs du PEAR Plus.
28 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
Parmi les critères de sélection des zones dřintervention mentionnées lors des entretiens avec les acteurs
du PEAR Plus, on trouve les suivants :





Situation sécuritaire
Localisation sur les axes prioritaires de lřUNSSSS ;
Fort degré de Ŗdurabilitéŗ des retours
Retours nombreux, vulnérabilité de la population et besoins humanitaires urgents
Précédentes activités du PEAR y compris MSA et distribution NFI
Même sřil est vrai que tous ces critères jouent un rôle dans la prise de décisions sur les milieux
dřintervention du PEAR Plus, il nřy a pas de hiérarchisation claire entre les critères, ce qui a contribué à la
priorisation de critères divergents entre les provinces et les zones PEAR Plus.
Situation sécuritaire
Evidemment, les zones potentielles dřintervention doivent être accessibles physiquement et, surtout, au
niveau de la sécurité. Etant donné lřinstabilité latente ou ouverte dans plusieurs régions de lřEst de la RDC, les
interventions PEAR Plus (et même les interventions PEAR) ne sont envisageables que dans les zones largement
sécurisées, cřest-à-dire sans combats ou groupes armés actifs et sans hostilités récentes ouvertes.
Il faut noter que lřUNICEF a été très consciente du risque que lřétablissement du PEAR Plus dans un
endroit en particulier pourrait donner à la population déplacée une fausse assurance de sécurité, et donc
encourager les retours dans des zones encore très dangereuses pour la population. Ce risque a été
particulièrement présent au Nord Kivu, par rapport au Sud Kivu et à lřIturi. Pendant les entretiens conduits à
Goma, plusieurs représentants des agences humanitaires ont déploré la tendance du gouvernement et de la
MONUC à déclarer « sécurisées » des zones qui sont encore à haut risque de violence. Selon plusieurs
interlocuteurs, cette tendance serait aussi le résultat de la volonté des bailleurs de passer à une phase
« post-conflit », en dépit de la persistance de tensions et de la présence de groupes armés dans de
nombreuses contrées du Nord Kivu.
Localisation sur les axes prioritaires de l’UNSSSS
Dřaprès le document programmatique du PEAR Plus, le programme sřinscrit explicitement dans le cadre
du plan de stabilisation des Nations Unies, et il y a une perception parmi les différents acteurs du PEAR Plus
que le choix des zones dřintervention du programme serait prédéterminé dans le sens où elles devraient être
localisées sur les axes prioritaires définies par lřUNSSSS. 20 Dans le même temps, il y a un souci de la part
de lřUNICEF de maintenir un Ŗespace humanitaireŗ pour le programme, sans dépendre dřune manière trop
directe des priorités politiques et diplomatiques et de sřassurer que lřassistance est donnée aux rapatriés
seulement quand la situation est durable. Cette tension crée une certaine confusion en ce qui concerne la
sélection des sites d'intervention.
En réalité, la quatrième composante de lřUNSSSS (Retour et Réintégration) nřest pas forcément liée aux
axes prioritaires. Parmi les critères de sélection des lieux dřintervention énumérés dans le document UNSSSS,
on trouve les suivants21 :

Zones pacifiées sans combats ;
Les axes prioritaires définies par lřUNSSSS sont les suivants : Ituri : axe Bunia-Gety-Boga ; Nord Kivu :
axes Masisi-Sake et Rutshuru-Ishasa ; Sud Kivu Ŕ axes Bukavu-Hombo, Bukavu-Walungu-Shabunda, et FiziMinembwe.
21 Voir UNSSSS Integrated Strategic and Programmatic Framework - Component 4: Return, Reintegration
and Recovery, Draft of 14 June, 2008, p. 5.
20
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 29




Zones déclarées Řdurablesř par le «monitoring protection » ;
Zones dans lesquelles les conflits risquent de rebondir à cause de la circulation continue des armes,
dřun fort taux de criminalité et des tensions entre groupes ethniques ;
Zones à proximité des conflits en cours (à moins de 100km) ;
Zones qui font parties des localités prioritaires identifiées par le Cluster Retour et Relance
Communautaire.
LřUNSSSS permet donc aux agences de lřONU de choisir des zones qui correspondent à une multitude
de critères. Ce sont des critères assez similaires aux principes établis par le PEAR Plus, avec un accent plus
prononcé sur lřimportance de choisir des zones « à risque » dans lesquelles les conflits pourraient rejaillir
dans lřavenir sans intervention de réconciliation et de construction de la paix.
Si on regarde les zones dřintervention de la phase pilote du PEAR Plus, cřest seulement dans le Sud Kivu
quřelles se trouvent autour des axes prioritaires de lřUNSSSS. En Ituri et au Nord Kivu, les zones
dřintervention du PEAR Plus sont très éloignées des axes prioritaires.
Fort degré de “durabilité” des retours
Lřévaluation rapide de monitoring protection est, la plupart du temps, la première étape dans le
processus de détermination des zones où intervenir dans le cadre des programmes PEAR et PEAR Plus.
Les zones évaluées par les agences de monitoring protection sont choisies par le cluster en fonction des
besoins dřinformation sur la situation sécuritaire, des droits humains et humanitaires dans des secteurs
spécifiques, y compris dans les zones de déplacement et les zones de retour. Chaque évaluation est
composée en partie du « scoring » quantitatif, mais aussi dřune analyse narrative pour donner plus de
détails sur la situation sécuritaire et de protection non capturée par les indicateurs numériques.
Au Nord Kivu, le monitoring protection est utilisé de manière systématique pour la détermination des
zones dřintervention du PEAR et par conséquent du PEAR Plus 22 . Au Sud Kivu, à cause du système de
monitoring protection sur la base de rapports continus des agents de terrain, les décisions sur la priorisation
des zones dřintervention sont basées moins sur des critères numériques que sur des jugements subjectifs des
agents de terrain et des partenaires de protection.
Par rapport à la sensibilité du PEAR Plus aux conflits, les zones priorisées par le PEAR sont les zones les
plus Řdurablesř. Par exemple, au Nord Kivu, les interventions PEAR de la NRC se sont concentrées tout
dřabord sur le territoire de Beni, qui a été pacifié depuis 2003 et nřa pas été touché par la campagne du
CNDP depuis 2007 et nřest pas non plus un refuge important pour les FDLR. Le territoire est majoritairement
Nande et ne connaît pas de conflits autour de lřoccupation des terres ou du contrôle des ressources minérales
comme les territoires du ŘPetit Nordř (Masisi, Rutshuru, Walikale). Par conséquent, le territoire de Beni a
également été choisi comme première zone cible du PEAR Plus.
Evidemment, dans un programme de transition qui est bâti sur un engagement des communautés comme
le PEAR Plus, il faut un degré de stabilité dans les communautés ciblées qui permette la réalisation dřune
vision à moyen ou plus long terme. La mise en œuvre dřun programme de relance communautaire comme le
PEAR Plus serait difficile ou même impossible dans des zones aux tensions aiguës. Pourtant, en évitant non
seulement les zones Řchaudesř, cřest-à-dire les zones de tensions accrues ou de présence des groupes armés,
mais aussi dans des zones où on trouverait des tensions intercommunautaires ou des conflits fonciers, le PEAR
Plus sřest privé dřune opportunité dřavoir un impact positif sur la mitigation des conflits et la réconciliation
intercommunautaire.
Plus précisément, le programme PEAR interviendra dans les zones qui auront au moins un score de
durabilité de 9. Les zones aux scores entre 9 et 12 recevront une intervention PEAR light et les zones aux
scores entre 13 et 15 auront une intervention PEAR. Seulement les zones les plus durables, cřest-à-dire qui
atteignent un score de 16, seront considérées pour une assistance dans le cadre du Programme PEAR Plus.
22
30 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
Retours nombreux, vulnérabilité de la population et besoins humanitaires urgents
Pour les cadres de lřUNICEF impliqués dans la conception du PEAR Plus, la priorité dans le choix des
zones dřintervention avait été donnée aux zones à forts retours récents et aux zones ayant des indicateurs
humanitaires préoccupants, sur la base dřinformations fournies par les MSA existants. Pourtant, malgré les
efforts pour donner priorité aux critères de retour et de besoins humanitaires urgents, il reste un certain
nombre de questions sur la mise en application de ces critères à définition souple.
Premièrement, le concept de Řretourř est un concept bien flou dans un contexte dřinstabilité récurrente,
où les déplacements sont fréquents et où les civils sont des déplacés internes un jour et deviennent des
rapatriés le lendemain quand la situation sřest calmée. Les concepts de Řdéplacésř et de Řrapatriésř sont
particulièrement difficiles à appliquer dans les cas où les déplacés restent dans les alentours de leurs
communautés dřorigine ou dans des familles dřaccueil dans les milieux urbains. De la même manière, il nřest
pas toujours évident de savoir si on peut classer comme Řrapatriésř les personnes qui ont migré dřun endroit
de déplacement dans une localité près de leur communauté dřorigine, mais quřon empêche de rentrer dans
leur village dřorigine à cause de lřoccupation de leurs maisons ou de leurs terres ou même à cause de la
présence persistante de groupes armés. Dans de telles situations, le ciblage des ménages de
« retours
récents » par rapport à dřautres ménages peut être controversé et peut provoquer de nouvelles tensions
entre les rapatriés récents et ceux qui sont restés sur place ou qui sřétaient réinstallés il y a plus longtemps.
Ainsi la situation que lřéquipe dřévaluation a rencontré sur le terrain dans les zones PEAR Plus actuelles
(en Ituri) ou prospectives (au Sud Kivu) reflètent cette ambiguïté du concept de retour. Tandis que les
responsables de lřUNICEF nous ont assuré que les zones ont été choisies en grande partie à cause de la
présence importante de rapatriés récents, les interlocuteurs dans les communautés déclaraient que la
majorité de la population était rentrée il y a deux ou trois ans déjà. Cette information était également en
contradiction avec les renseignements trouvés dans les MSA.
Deuxièmement, la question de lřacuité des besoins humanitaires est marquée par la même ambiguïté.
Malgré les affirmations des responsables du PEAR Plus que les zones ciblées étaient choisies en fonction des
besoins humanitaires accrues, la réalité sur le terrain ne semble pas toujours valider ces propos. Même une
analyse superficielle de la totalité des MSA menés dans lřEst de la RDC démontre clairement quřil y a des
besoins humanitaires plus urgents dans dřautres groupements et territoires que ceux choisis par le PEAR
Plus.23
Cela indique quřil y a bien dřautres critères, notamment les questions de sécurité et de durabilité, qui ont
guidé la prise de décision sur les lieux dřintervention. On peut donc conclure que parmi toutes les zones
dřintervention du PEAR, celles où coïncident un environnement politique et militaire stable, un fort taux de
retour et des besoins humanitaires urgents ont été sélectionnées pour les interventions du PEAR Plus.
Lřargument ici nřest pas de trancher sur la question si une région mérite des interventions plus quřune autre,
mais juste de démontrer que lřautomatisme invoqué par les acteurs du PEAR Plus dans la sélection des zones
dřintervention sur la base de critères apparemment objectifs cache un choix plus ou moins précis dřintervenir
dans certaines zones et non dans dřautres.
Activités PEAR précédentes
Le PEAR Plus nřintervient que dans les zones dans lesquelles le PEAR a déjà été actif. Par conséquent, le
premier triage des zones dřintervention possibles a déjà eu lieu lors du programme PEAR initial, cřest-à-dire
des évaluations multisectorielles ainsi quřune distribution des non-vivres ont déjà eu lieu au moment où le
PEAR Plus commence ses activités dans une communauté.
Par exemple, il faudrait juste comparer les indicateurs humanitaires des MSA menés dans les territoires de
Shabunda ou de Fizi et le territoire de Walungu.
23
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 31
Activités existantes des partenaires exécutifs
Dans certaines régions, il y a dřautres critères qui ont été invoqués pour, entre autres, justifier le choix
des zones dřintervention. Notamment, au Sud Kivu, les zones dřintervention proposées par lřIRC figurent
parmi les zones dřactivités du programme Community-Driven Reconstruction/Tuungane déjà en cours. Selon
les responsables de lřIRC, les communautés les plus performantes pendant les étapes précédentes du
programme ont été choisies pour les interventions du PEAR Plus. Cela veut dire que, malgré le fait que les
zones choisies semblent plus ou moins conformes aux critères multiples de sélection des zones dřintervention
du PEAR Plus, le choix des zones dřintervention suit une logique propre aux programmes de lřIRC plutôt
quřune logique imposée par lřUNICEF ou le PEAR Plus.
Conclusion
On en conclut donc que la sélection des zones dřintervention du PEAR Plus est issue de multiples logiques
suivant une chaîne de prise de décision illustrée ci-dessous :
1ère étape: sécurité
2ème étape:
durabilité
• Zone déclaré
sécurisé par
MONUC/ FARDC
3ème étape: besoins
humanitaires
• Protection
monitoring:
• score de
durabilité
• si durable
recommandation
pour MSA
4ème étape:
préférence de l'ONG
exécutive
• PEAR
• MSA (évaluation
multi-sectorielle)
• gravité des
besoins
humanitaires
• PEAR Plus
A la fin de cette chaîne de prise de décision, le choix des zones a été réduit aux zones les plus sécurisés
et les plus durables, cřest-à-dire au final des zones dans lesquelles on ne trouve pas de conflits
intercommunautaires ni dřautres conflits ouverts.
La perception exprimée par plusieurs acteurs clés du PEAR Plus lors de cette étude que le choix des
zones est plus ou moins prédéterminé par les contraintes extérieures et par le cadre de concertation de
lřUNSSSS et la concertation humanitaire nřest donc guère correcte.
Comme illustré par le tableau 5, la logique et les critères de sélection des zones ont varié dřune
province à lřautre, au moins dans la phase pilote du PEAR Plus :
Tableau 5 - Les aires d’intervention du PEAR Plus
Site PEAR
Gravité des
besoins
humanitaires
Zones
d’activités
existantes
des ONG
1 - 2 ans
Oui
Elevée
Non
Oui
> 2 ans
Oui
Moyen
(inconnu)
Oui
> 2 ans
Oui
Moyen
Oui
Axe UNSSSS
Score de
durabilité de
16
Retour
récent
Ituri
Non
Oui
Nord Kivu
Non
Sud Kivu
Oui
Ce qui est commun à toutes les zones choisies pour la phase actuelle du PEAR Plus, est que les zones sont
toutes affectées par les conséquences des guerres et violences, sans être les lieux où lřon trouverait les
dynamiques conflictuelles les plus profondes au cœur des guerres récentes dans lřEst de la RDC.
32 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
Pourtant, cette sélection des zones dřintervention nřest guère figée. Elle est, au moins en partie, un choix
de la part du bailleur et des organisations de mise en œuvre. Il semblerait quřils disposent dřune marge de
manœuvre plus significative quřils ne le croient dans la sélection des lieux ciblés par le programme.
Résultat 4 :
Les organisations de mise en œuvre du programme traitent des conflits locaux au fur
et à mesure et sans approche systématique
Etant donnée lřabsence dřune approche systématique pour traiter les conflits, les quelques conflits qui ont
surgis dans les zones dřintervention PEAR Plus actuelles ont été abordés par les partenaires de mise en
exécution dřune manière réactive et improvisée. Utilisant leur compréhension des milieux locaux et leur
expérience dřagents de terrain pragmatiques, ils étaient bien capables de gérer la grande majorité des cas
et de résoudre les différends dřune manière acceptable pour tous (voir lřencadré 6 pour un exemple tiré de
lřexpérience du PEAR en Sud Kivu, et lřencadré 7 pour un exemple du PEAR Plus en Ituri). Il nřy avait que
quelques cas dans lesquels il paraissait difficile, voire impossible, dřenvisager une solution, parce que les
problèmes allaient au delà de ce qui pouvait être contrôlé par le projet.
Encadré 6 : Distribution des NFI au Sud Kivu
Au Sud-Kivu, une distribution de NFI ciblait deux communautés, dont une qui habite à proximité d'une route
principale, et l'autre, qui habite loin de la route. A cause du manque d'accessibilité des villages en voiture,
la distribution devait se faire sur la route principale. La communauté située plus loin devait passer par le
village de la communauté proche de la route principale.
Le personnel du PEAR craignait que cela puisse mettre la population en danger, alors qu'ils retournaient à
leur village avec les NFI. C'est pourquoi ils ont décidé de mener les deux distributions en même temps plutôt
que l'une après l'autre. Ainsi, tout le monde était occupé par la collecte de leurs articles et le risque
d'attaques était réduit.
Encadré 7: Création des points d’eau en Ituri
Les partenaires du PEAR Plus en Ituri ont signalé plusieurs cas de tensions au cours des activités de
lřaménagement des points dřeau. En particulier, ils ont fait état de plaintes par les familles qui vivaient trop
loin des points dřeau, et ne pouvaient donc pas en bénéficier. Dřaprès le personnel du PEAR Plus, ces
tensions ont toujours été calmées sans beaucoup de difficultés, avec un recours aux autorités coutumières, qui
ont convaincues les familles à accepter la localisation des points dřeau. Il nřy a, cependant, aucun moyen de
savoir si ces tensions ont été effectivement résolues ou simplement temporairement étouffées.
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 33
Résultat 5 :
Il y a une méfiance généralisée entre la population, les autorités et les associations
humanitaires
Lors des discussions avec les autorités, bénéficiaires, et les associations humanitaires on constate une
profonde crise de confiance entre les différents acteurs de lřaction humanitaire dans lřEst de la RDC. 24
A priori, lřaction humanitaire est bienvenue parmi les populations congolaises ravagées par la guerre et
les violences successives. Pourtant, il y a un sentiment généralisé que lřassistance humanitaire est trop limitée,
partiale, et souvent ne sert que les intérêts des organisations humanitaires et de leurs employés eux-mêmes.
Parmi les bénéficiaires et la population générale, on se plaint constamment que, comparée au nombre
significatif des ONG qui opèrent dans les zones de déplacement et dřinsécurité dans les deux Kivus et en
Ituri, lřassistance qui arrive auprès des populations sur place est très limitée.
Parmi les victimes des guerres il y a une perception que cřest les organisations humanitaires eux-mêmes
qui créent ou contribuent à la création des déplacés. Lřadage Řno Nkunda, no jobř que lřon entend souvent au
Nord Kivu suggère quřil y aurait même une symbiose essentielle entre les actions du CNDP et les intérêts
présumés des organisations humanitaires à maintenir un climat dřinsécurité pour créer de nouvelles vagues de
déplacements, qui, à leur tour, aident à mobiliser davantage de fonds pour une expansion dřune véritable
industrie de lřhumanitaire.
Encadré 8 : Rumeurs autour de l’assistance humanitaire en Ituri
Au début de la crise en Ituri, en 1999, il y avait des rumeurs, mises en circulation par certains membres de la
communauté Hema, que lřorganisation Médecins sans Frontières (MSF) avait introduit le cholera dans le but
de tuer les enfants Hema. La situation a dégénéré rapidement, et des véhicules de MSF ont été pris en
embuscade et attaqués à coups de pierres. En conséquence, lřorganisation avait décidé de se retirer du
district en Janvier 2000.
Encadré 9 : Conclusions de l’exercice participatif d’analyse des conflits et capacités de paix dans la
province du Nord Kivu, conduit par le PNUD et la Cellule Provinciale d’Appui à la Pacification en 2008
Les consultations menées au cours de cet exercice ont porté à la surface un manque de confiance de la
population vis-à-vis de la communauté internationale (par exemple : les allégations de complicité entre la
MONUC et les groupes armés ; les accusations contre les ONG de gérer le problème des déplacés comme «
fonds de commerce » ; la méfiance vis-à-vis de la communauté internationale par rapport à lřemploi du
personnel local, etc.). Indépendamment de la fiabilité ou non de ces allégations, cette méfiance est un
obstacle qui empêche une véritable collaboration entre les acteurs internationaux et les communautés à la
25
base.
Partout dans les zones à forte action humanitaire les bénéficiaires font état des cas de corruption ou de
népotisme dans la gestion des fonds ou des biens et matériaux destinés aux populations vulnérables par les
De nombreuses manifestations populaires contre la MONUC, surtout lřexplosion de colère violente
occasionnelle, comme par exemple en novembre 2007 à Goma, ne sont que lřexpression la plus ouverte de
cette méfiance. IRIN. DRC: Peacekeepers wounded during North Kivu protest, 5 novembre 2007; en ligne au
http://www.irinnews.org/PrintReport.aspx?ReportId=75158, accédé le 15 août 2009.
25 PNUD, 2009: 55.
24
34 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
agents du terrain des grandes ONG internationales ou nationales. Selon ces témoignages, les abus prennent
des formes diverses. Parfois les vivres, non-vivres, ou matériaux de construction seraient divertis et vendus sur
les marchés locaux par les employés des ONG eux-mêmes ; parfois il y aurait connivence entre les agents
des ONG et les autorités coutumières pour une distribution aux groupes loyaux aux chefs locaux plutôt
quřaux plus démunis. Dans dřautres cas, il y aurait même un Řrecrutementř des bénéficiaires pour un partage
de lřassistance entre les humanitaires et ces bénéficiaires non-légitimes. Dans un tel climat de méfiance, les
rumeurs sur les desseins malveillants présumés de la communauté internationale circulent librement (voir
lřEncadré 8).26
A cela sřajoute un train de vie de quelques travailleurs expatriés des organisations internationales perçu
comme outrageux par les populations locales. Il y a une perception que les expatriés se promènent dans leur
Land-cruisers 4x4 pour leur propre plaisir et font la fête le soir dans les restaurants, bars, et boîtes de nuit
de Goma ou Bukavu.
Dans ce climat de méfiance généralisée, il est difficile, voire impossible pour tout programme
dřassistance humanitaire dřopérer sans contribuer aux perceptions que lřassistance humanitaire soutient
souvent les inégalités existantes et crée de nouvelles tensions plutôt que de contribuer à leur diminution ou
leur résolution. Bien que l'élimination complète de cette méfiance soit impossible, il y a cependant une
certaine marge de manœuvre pour améliorer progressivement les perceptions de la population vis-à-vis de
la communauté internationale, notamment en améliorant la transparence et la communication dans la
fourniture de l'assistance.
Il y a également un clivage profond entre les autorités de lřEtat et les acteurs humanitaires partout dans
lřEst de la RDC. Les autorités se plaignent régulièrement du manque de transparence de la part des agences
humanitaires dans la gestion de leurs budgets et souvent même dans les activités concrètes. Plusieurs
représentants de lřEtat rencontrés dans le cadre de cette enquête ont vivement critiqué les organisations
humanitaires de vouloir tout contrôler, leur propres budgets, leur programmes, les lieux dřintervention et
quřils ne sřassocient aux autorités quřau moment de lřinauguration dřune école ou dřautres infrastructures
finies mais pas dans la planification ni dans lřexécution des programmes.
Même si les autorités ont fait état des bonnes relations avec les agences internationales, ils déploraient
le déséquilibre dans la distribution de fonds entre les ONG internationales et les autorités officielles, mais
également le manque de progrès visible même dans les zones où de multiples agences internationales sont
actives. Les autorités, en général, partagent lřopinion de la population quřil y a beaucoup de gaspillage de
fonds dans les agences internationales et quřil y a un problème de détournement de fonds et enrichissement
de leur personnel. On note aussi des cas dans lesquels les agences humanitaires deviennent les Řboucs
émissairesř faciles lors des rivalités entre les différentes autorités étatiques.
Ces sentiments sont certainement partagés du côté des acteurs humanitaires, qui nřont souvent que peu
de regard pour les autorités, quřils jugent corrompues et peu compétentes et desquelles ils ont peur quřelles
souhaitent sřimmiscer dans leurs affaires pour exercer un contrôle sur leurs programmes. Cet état des choses
est préoccupant surtout par rapport au rôle clé que la reconstruction de lřEtat joue dans la stratégie de
construction de la paix de la communauté internationale. Il est difficile dřassister au renforcement de
lřautorité de lřEtat quand ses représentants sont écartés et quand ce sont les agences internationales qui
tiennent apparemment les rênes de toutes les activités de reconstruction des infrastructures et des services de
base.
26
Voir aussi IRIN, 2007.
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 35
5.2
LA SENSIBILITE AUX CONFLITS DES ACTIVITES SECTORIELLES DU PEAR PLUS
5.2.1
Education
Dřaprès le document originel du PEAR Plus, lřobjectif du secteur éducation est « [dř]améliorer la qualité
de lřéducation et lřaccès à lřéducation dans les zones de retour ». Lřaccès à lřéducation est essentiel dans une
perspective de reconstruction et relèvement précoce, considérant que les déplacés fondent souvent leur
décision de rentrer sur les opportunités disponibles pour leurs enfants de fréquenter lřécole. En même temps,
lřéducation joue un rôle important dans la prévention des conflits et dans la construction de la paix dans lřEst
de la RDC à deux niveaux :
En premier lieu, lřéducation peut contribuer à réduire le « réservoir de main-dřœuvre» des jeunes nonqualifiés et désenchantés, sans espoir dřun meilleur avenir et prêts à se rendre aux mains des seigneurs de
guerre. Pour ce faire, cependant, il est nécessaire que les programmes dřéducation réussissent à toucher les
enfants « à risque », comme les enfants démobilisés et les enfants non accompagnés. Il est aussi nécessaire
que lřéducation reçue soit de bonne qualité et débouche sur des opportunités de travail.
En deuxième lieu, lřéducation peut, à long terme, aider à atténuer la méfiance au sein des communautés,
à inculquer aux enfants un sentiment nationaliste et à contrecarrer les mythes et stéréotypes qui, jusquřà
présent, ont nourri les tensions intercommunautaires. De même, lřéducation peut combattre les croyances qui
alimentent les violences sexuelles - par exemple, la croyance diffuse que les rapports sexuels avec une fille
vierge pourraient guérir le SIDA - ainsi que les préjugés contre les victimes de violences sexuelles.
Cependant, ces résultats positifs ne sont pas automatiques : des expériences dans des autres pays montrent
que les écoles peuvent également être au premier plan dans la promotion des discours ethniques exclusifs et
discriminatoires.
Ces éléments « préventifs » se retrouvent, dřune certaine manière, dans le document originel du PEAR
Plus. En sřappuyant sur lřexpérience de lřUNICEF en éducation à la paix, le PEAR Plus prévoit des
interventions pour accroître la sensibilisation des jeunes et adolescents sur les thèmes liés à la paix (à travers
des activités de formation, de soutien aux médias, etc.), et pour la promotion des « leaders de la paix »
parmi la jeunesse. Cependant, ces éléments nřont été repris que de manière très limitée dans le document du
programme de COOPI en Ituri, et n'apparaissent pas du tout dans la proposition de projet de l'IRC dans le
Sud Kivu.27 On constate ainsi un écart important entre lřintention originale du programme PEAR Plus et sa
mise en œuvre sur le terrain.
Alors que les documents évoquent dans des termes généraux, les enfants « vulnérables », il nřy a pas de
stratégies spécifiques pour cibler certains types de vulnérabilités et risques que lřon retrouve dans les
différentes zones de mise en œuvre, comme, par exemple, les enfants dans les carrières minières du
territoire de Djugu, en Ituri (voir encadré 9). Cette lacune risque de compromettre ou même effacer
complètement la seule composante du projet qui vise explicitement la « construction de la paix ». Surtout, en
ne sřattaquant pas aux tensions et conflits dřune manière délibérée et systématique, le projet risque de créer
un écart plus profond entre les enfants qui ont accès aux écoles et ceux qui ne sont pas en mesure dřaccéder
à lřéducation (encadré 10).
Encadré 9: Ecoles et centres de rattrapage dans le Sud Kivu
La visite dřun site du programme PEAR dans le Sud Kivu (aire de santé de Chierano) a bien démontré que
même une activité qui est apparemment simple comme la reconstruction des écoles peut renforcer lřexclusion
Le terme « éducation à la paix » nřest pas mentionné du tout dans le document de lřIRC. Voir International
Rescue Committee, 2009.
27
36 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
de certains groupes, comme dans ce cas les enfants démobilisés et dř autres enfants qui nřont pas accès à
lřéducation formelle, si le programme ne fait pas un effort délibéré pour inclure tous les groupes parmi les
bénéficiaires du programme et sřil nřy a pas une attention parallèle sur les centres de rattrapage ou sur dř
autres activités pour les enfants hors de lřécole.
Pendant la visite dans lřaire de santé de Chierano, on nous a montré lřécole PEAR, qui vient dřêtre construite
près dřun centre de rattrapage. Les deux institutions ont le même directeur, mais les financements du PEAR ne
couvrent que lřécole régulière, qui est en ciment, alors que le centre de rattrapage est en paille. Le directeur
a exprimé sa crainte que cette différence puisse créer du mécontentement parmi les enfants démobilisés qui
fréquentent les cours professionnels dans la structure en paille comme ils ont déjà, dans le passé, été déçus
par des promesses dřassistance non-tenues : une ONG internationale avait commencé un programme de
formation professionnelle pour les enfants démobilisés, qui aurait dû être suivi par la distribution de Ŗkitsŗ
pour le démarrage des activités professionnelles. Le projet a été interrompu pour des raisons inconnues
après la fin de la phase de formation sans fournir les kits, ce qui a provoqué la colère des bénéficiaires, qui
ont exprimés leur colère vis-à-vis du personnel du centre.
Encadré 10 : Les enfants des carrières minières en Ituri
Dans les zones dřopération du PEAR Plus en Ituri, le travail des enfants dans les mines dřor est non seulement
un obstacle au développement de lřenfant et aux efforts de promouvoir une éducation de qualité, mais
également un risque pour la sécurité. Alors que plusieurs de ces enfants viennent des territoires avoisinants,
attirés par la chimère de la richesse facile, il y en a beaucoup qui sont originaires des localités de mise en
œuvre du PEAR Plus et qui ont quittés lřécole car leur famille nřétait pas en position de payer leurs frais de
scolarité.
En dehors des conséquences graves du travail dans les mines, les enfants sont également exposés aux
crimes, aux violences, aux drogues, à lřexploitation sexuelle et à la prostitution. Plus grave, pourtant, est le
potentiel de mobilisation pour des causes néfastes que présente ce véritable réservoir de main dřœuvre des
jeunes déshérités. Dřaprès des témoignages, nombreux dřentre eux seraient des anciens enfants-soldats ou
jeunes combattants.
À l'heure actuelle, le PEAR Plus nřa pas abordé ce problème spécifique des enfants des mines, ni dans ses
interventions dans le domaine de lřéducation ni dans les activités de protection. L'équipe dřévaluation a
appris qu'il existe un autre programme qui est en train dřêtre lancé par l'UNICEF pour aider ces enfants et
sensibiliser les communautés contre le travail des enfants. Bien quřil soit bienvenu, il est important qu'une
attention sur la question des enfants des mines d'or soit également incorporée dans le PEAR Plus. Il sřagit dř
un des défis clés pour la protection des enfants et pour la sécurisation du pays, surtout dans les communautés
où se trouvent les mines ou les groupements avoisinants.
5.2.2
Eau, Hygiène, Assainissement (WASH) et Santé28
Dřaprès le document du PEAR Plus, lřobjectif de la composante « WASH » est « dřaméliorer la santé
publique à travers la promotion de bonnes pratiques hygiéniques, et un meilleur accès à lřeau potable et
aux infrastructures sanitaires », en utilisant une version plus rapide et simplifiée du modèle « Villages
Assainis » de lřUNICEF. Lřobjectif de la composante Santé est de réduire la mortalité maternelle et
Il sřagit de deux composantes distinctes du PEAR Plus, mais elles sont traitées ensemble ici parce quřelles
soulèvent des questions similaires par rapport à la sensibilité aux conflits.
28
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 37
infantile29, principalement à travers la réhabilitation des centres de santé, des campagnes de vaccination et
de nutrition, et la distribution de moustiquaires.
Bien quřil nřy ait pas de lien direct entre ces composantes et les causes des conflits, il y a un risque de
Ŗnuireŗ au niveau micro. La présence dřinfrastructures dans certains villages peut facilement créer des
attentes (et donc des frustrations) dans dřautres villages. Ces problèmes peuvent être atténués si la
couverture des infrastructures (ex : centres de santé) est élargie pour servir les villages voisins. De telles
solutions ont été adoptées « de facto » sur le terrain à Ituri, mais il nřy a pas des directives explicites et
systématiques à ce propos.
En dehors des tensions qui peuvent surgir entre les villages, il y a aussi un risque de créer des tensions au
sein des communautés dřinterventions. Ces tensions se manifestent en particulier lors de la localisation des
points dřeau. Par exemple, dans la zone de mise en œuvre du PEAR Plus à Ituri, il y a une prolifération de
conflits autour du bornage entre localités, et même des revendications de sécessions de certaines communes
qui aspirent à devenir indépendantes. La présence dřun point dřeau est très important à cet égard parce
que il pourrait légitimer lřexistence indépendante dřune localité.
Même dans les cas où il nřy a pas de conflits de frontières ou des revendications sécessionnistes, la mise
en place de points dřeau a le potentiel dřêtre à la base de nombreuses tensions. Dans certaines localités, les
habitations sont dispersées et certains ménages nřont pas accès aux points dřeau aménagés, même sřils
figurent, en principe, parmi les bénéficiaires. Actuellement, les partenaires exécutifs du PEAR Plus nřont pas
dřapproche systématique pour aborder ce genre de conflit. Pour lřinstant, la localisation des points dřeau se
fait sur la base de critères techniques, cřest-à-dire on choisit dřaménager des points dřeau qui puissent servir
le plus de personnes possible, ainsi que sur lřopinion des autorités coutumières. Cette approche improvisée a
été utile pour résoudre un certain nombre de tensions, mais il y a aussi un risque dřabus et
dřinstrumentalisations par les chefs, autorités, ou dřautres élites locales en leur faveur.
Pour rendre les activités WASH plus sensibles aux conflits, on pourrait réviser les critères de ciblage
pour assurer que tous les ménages au sein dřune localité aient accès aux points dřeau aménagés. Ceci peut
signifier avoir plus dřun point dřeau aménagé dans certaines localités pour que tous les groupes au sein de
la communauté en bénéficient. Il sera donc important dřavoir des critères objectifs et fixes pour déterminer le
nombre et la localisation des points dřeau, et de les communiquer clairement aux bénéficiaires. Il faudrait
également avoir une politique cohérente par rapport aux tensions liées aux divisions profondes entre des
groupes au sein dřune même communauté pour ne pas attiser les revendications de sécession pour éviter que
ces revendications soient utilisées pour obtenir des points dřeau supplémentaires.
5.2.3
Protection
Dřaprès le document du PEAR Plus, lřobjectif de cette composante est de « renforcer les mécanismes de
protection pour créer un environnement propice pour la prévention de toutes formes de violence, exploitation
et abus contre les femmes et les enfants ». Comme déjà noté dans le volet éducation, on constate quřil y a
des différences entre la formulation initiale dans le document conceptuel et la réalisation par les
partenaires. Par exemple, tandis que le document PEAR Plus originel préconise une attention spécifique aux
enfants démobilisés on ne la trouve pas dans les documents programmatiques des partenaires de mise en
œuvre.
Il y a une perception généralisée dans les milieux humanitaires en RDC, dont les agences impliquées
dans le PEAR et dans le PEAR Plus, que la protection et la prévention ou la résolution des conflits sont des
concepts similaires. Lřindice le plus visible de ce point de vue est que la composante Protection traite des
questions liées aux origines et à la résolution des conflits. Ainsi, lors de lřévaluation, les interlocuteurs ont
« To reduce facility based maternal mortality ratio to less than 1% and under 5 mortality rates
to less than 2/10,000/day in IDP returnee areasŗ.
29
38 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
souvent mis sur le même pied les activités de protection et de résolution des conflits, supposant quřassurer la
protection des bénéficiaires contribue automatiquement à la mitigation ou bonne gestion des conflits. Il faut
ainsi garder à lřesprit que les deux termes ne sont pas synonymes, en particulier :





5.3
La protection comme concept est concernée par un état final Ŕ la réalisation des droits individuels Ŕ
tandis que la résolution des conflits doit être concernée par un processus de négociation pour
satisfaire les intérêts de toutes les parties ;
La composante protection touche surtout aux conséquences des conflits plutôt quřaux causes ;
La composante protection vise les individus vulnérables, alors quřune composante de prévention des
conflits et construction de la paix devrait cibler toutes les catégories, dont les auteurs des violences ;
La composante protection cible exclusivement les femmes et les enfants Ŕ considérées comme les
plus vulnérables Ŕ pourtant, la composante de construction de la paix devra aussi adresser le rôle
des hommes ;
La composante « protection » nřaborde pas spécifiquement les identités communautaires ou les
conflits fonciers ou de distribution des ressources.
CONSIDERATIONS OPERATIONNELLES
La sensibilité aux conflits ne concerne pas seulement les activités mises en place, mais aussi les pratiques
opérationnelles utilisées. Un programme peut apparaître pertinent aux dynamiques des conflits au niveau de
ses objectifs et des activités prévues, et pourtant il peut avoir un impact négatif sur les conflits parce que les
modalités de recrutement et dřachat de biens des agences exécutives sont perçues comme discriminatoires
contre certains groupes ou injustes en général.
Le sujet du recrutement est particulièrement sensible dans lřEst de la RDC, où il nřy a pratiquement pas
dřopportunités de travail salarié sauf pour les agences et ONGs internationales. Il y a eu plusieurs incidents
dans lesquels les ONGs ont suscité la colère populaire, des fois même des protestations violentes, contre les
acteurs internationaux, coupables, aux yeux de la population, dřutiliser des pratiques non transparentes pour
le recrutement de leur personnel (voir lřEncadré 11)
Dans le contexte de cette étude, lřéquipe nřa pas pu examiner en détail la question des procédures de
recrutement des partenaires, actuels et futurs, du PEAR Plus. Toutes les organisations PEAR et PEAR Plus
interviewées nous ont assuré que leurs procédures sont transparentes et justes. Pour la plupart dřentre elles,
les qualifications étaient beaucoup plus importantes dans le choix du personnel du programme que dans les
critères ethniques. Pour autant, en général, leur stratégie paraît être de ne pas embaucher des personnes
issues du milieu dřintervention pour les positions de gestion et de supervision, tandis que les agents de
terrains, dont les mobilisateurs communautaires, les ingénieurs, les infirmières sont pour la plupart originaires
de ces zones dřintervention.
Il est clair, toutefois, quřil nřy a pas de stratégie formalisée pour assurer la sensibilité aux conflits dans
le recrutement ou lřachat des biens. La décision des modalités de recrutement est laissée aux partenaires de
mise en œuvre. Même si lřéquipe dřévaluation nřa pas observé de problèmes évidents dans les pratiques
actuelles, il est conseillé d'adopter une démarche cohérente pour aborder ces questions d'ordre opérationnel
dans la mise en œuvre de PEAR Plus.
Encadré 11: Recrutement du personnel des ONGs en Ituri
Lorsque la crise en Ituri a éclaté en 1999, peu dřagences humanitaires étaient présentes dans la zone. A la
suite de la crise, il y a eu une arrivée importante dřONGs (tel que lřOxfam ou COOPI) qui ont amenées du
personnel congolais originaire dřautres provinces. L'arrivée des Congolais Ŗnon originairesŗ de la zone nřa
pas bien été perçue par les locaux. Leur appartenance ethnique est devenue une question d'agitation
politique. Surtout, des leaders dřopinion Hema accusaient ouvertement la communauté humanitaire
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 39
dřimpartialité. Par exemple, un intellectuel Hema a déclaré en 2004 que la communauté internationale était
en train de mener un "génocide" contre les Hema en recrutant du personnel d'ailleurs:
L'ONU et les ONGs internationales sont impliquées dans le génocide des Hema, et dans la déstabilisation
d'Ituri. Les ONGs se comportent comme si elles vivaient dans un pays conquis, comme si Ituri était le terrain
de crypto-colonialisme. Les ONGs continuent à amener des travailleurs congolais du Kinshasa ou des Kivus,
prétendant qu'ils ne peuvent pas recruter des gens locaux parce qu'ils ont besoin dřun personnel neutre.
Dites-moi, comment quelqu'un de Kinshasa peut- être neutre lorsque le gouvernement Kabila est entièrement
30
responsable du conflit en Ituri?
Bien que ces déclarations soient clairement motivées par un agenda politique identitaire, elles peuvent avoir
une influence considérable, en particulier sur les jeunes désœuvrés.
30
Entretien avec Professor Karimagi Pilo, citée par Pottier, 2006 : 162.
40 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
6. Recommandations
S
ur la base de lřanalyse précédente et des résultats de lřévaluation, cette dernière section donnera un
aperçu des stratégies possibles pour intégrer une perspective de prévention des conflits dans le
programme PEAR Plus. Dřabord, revenons rapidement à lřanalyse des conflits et à la description de
lřexpertise de SFCG citée au-dessus pour une exploration du potentiel dřun mariage entre les activités PEAR
Plus avec les interventions de SFCG dans le contexte de lřEst de la RDC. Le tableau 6 donne un aperçu des
recommandations qui suivront.
Tableau 6 : Changements et interventions potentiels pour rendre le PEAR Plus plus sensible aux
conflits31
Causes
Contribution potentielle du PEAR Plus
Niveau Řmicroř
Ne pas nuire
Construction de la
paix
Problématique
foncière
Analyse des conflits
Facilitation du
dialogue
Théâtre participatif
Programmes de
radio locaux
Crise de l’autorité
coutumière
Méfiance
interethnique
Analyse des conflits
Facilitation du
travail des autres
agences/institutions
Non
Théâtre participatif
Analyse des conflits
Education à la paix
Théâtre participatif
Théâtre participatif
Ciblage des groupes
Activités de
solidarité
Communication des
choix des
bénéficiaires
Programmes de
radio
Niveau Řmacroř
Ne pas nuire
Construction de la
paix
Analyse de lřimpact
des conflits locaux
sur les conflits
macros et les intérêts
politiques
Sensibilisation à une
échelle régionale/
nationale sur le droit
foncier
Programmes de
radio
Non
Non
Choix des zones
ciblées
Programmes de
radio sur lřentente
interethnique à une
échelle régionale/
nationale
Bonne communication
du choix des
bénéficiaires
Bonnes relations
avec tous les
groupes
Rappel : couleur verte indique des activités qui pourraient avoir un impact direct ; couleur jaune indique un
impact indirect.
31
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 41
Richesses
minières
Main d’œuvre
pour la violence
Non
Non
Non
Non
Analyse des conflits
Théâtre participatif
Ciblages des
groupes dřenfants
Sensibilisation
Programmes de
radio locale Ŕ Sisi
Watoto
Education
appropriée pour
tous les enfants
Cours de
rattrapage
Assistance aux
autorités pour
mieux communiquer
avec la population
Analyse des conflits
macros
Coordination avec
dřautres agences qui
assistent les jeunes
Programmes de
radio régionaux/
nationaux
Impliquer les
autorités à tous
niveaux et
transparence
Non
Non
Non
Non
Faiblesse de l’Etat
Inclusion des
autorités dans les
décisions
Analyse des conflits
Théâtre participatif
Soutien des pays
voisins
Non
Les bases ainsi jetées pour une réflexion profonde sur les options dont lřUNICEF et les partenaires PEAR
disposent, dans ce qui suit, trois scénarios et stratégies potentielles sont esquissés avec une discussion des
avantages et risques que chaque option présente :



6.1
Scénario ‘statu quo’, qui examine les conséquences et les risques de continuer avec le PEAR Plus
exactement comme il est maintenant.
Scénario ‘sensibilité aux conflits augmentée’, avec une intégration systématique des éléments Řne pas
nuireř et lřajout de quelques activités de réconciliation et construction de la paix, mais sans
changements radicaux dans la stratégie globale ou lřampleur des interventions;
Scénario ‘sensibilité aux conflits approfondie’, qui repense et restructure radicalement le choix des
zones dřintervention et lřapproche programmatique de l'intervention afin de transformer le PEAR
Plus en un véritable programme de construction de la paix.
SCENARIO ŘSTATU QUOř
Le PEAR Plus, tel quřil a été conçu et dans la façon dont il est mis en œuvre en ce moment contourne les
conflits et évite de travailler dans des zones aux conflits Řchaudsř. Ainsi, lřévaluation nřa pas repéré un impact
néfaste du programme existant sur les dynamiques conflictuelles, et, bien quřil nřy ait pas eu dřeffort
systématique dřintégrer une dimension « ne pas nuire » dans les activités programmatiques, les risques pour
le PEAR Plus dřexacerber les tensions existantes ou dřen créer de nouvelles sont plutôt limités pour plusieurs
raisons, à savoir :
Les critères de choix des localités excluent les zones les plus conflictuelles, et par conséquent limitent la
possibilité dřavoir un impact négatif au niveau « micro ». Les zones dřintervention du PEAR Plus en Ituri sont
ethniquement homogènes (peuplées presque exclusivement par les communautés Alur) et les zones
sélectionnées au Sud Kivu, qui sont presque exclusivement peuplées par les membres de lřethnie Bashi,
nřaffichent pas de fortes tensions intercommunautaires non plus. Certes, l'homogénéité ethnique n'est pas une
garantie de paix sociale. Toutefois, étant donné que dans l'Est de la RDC les tensions sont souvent liées aux
identités ethniques, les communautés ethniquement homogènes sont généralement moins à risque de violence.
Les activités sectorielles du PEAR Plus ne touchent, pour la plupart, pas directement aux Řnerfsř des
conflits dans lřEst de la RDC. Par exemple, le PEAR Plus ne traite pas de manière directe la question des
terres (sauf dans le choix des sites des écoles ou des centres de santé à reconstruire dans les cas oú le site
42 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
nřa pas été prédéterminé). Par conséquent, dans la grande majorité des sites, il est peu probable que le
PEAR Plus ait un impact négatif sur les causes des conflits.
Dans les cas où des risques de conflits ont été rencontrés dans les zones dřintervention, les partenaires de
mise en œuvre ont pu gérer les tensions dřune manière pragmatique et improvisée et ils ont ainsi su éviter une
escalade des conflits ou lřéruption des violences32.
Le risque de nuire, au moins au niveau micro, est donc suffisamment faible pour considérer le Řstatu quoř
comme une option possible. Cependant, en ce moment, le PEAR Plus nřest pas en train de saisir les
opportunités pour contribuer à la construction de la paix. Autrement dit, avec lřoption Řstatu quoř le PEAR Plus
continuerait à travailler Řautourř des conflits plutôt que Řsurř les conflits.
6.2
SCENARIO ŘSENSIBILITE AUX CONFLITS AUGMENTEEř
Le deuxième scénario vise à augmenter la sensibilité aux conflits, dans le cadre programmatique
existant. Pourtant, dans ce scénario, tout le programme, à commencer par la collecte de données et lřanalyse
contextuelle jusquřaux interventions devra tenir compte des deux éléments de la sensibilité aux conflits, de la
dimension « ne pas nuire » et de la dimension « construction de la paix ». Par conséquent, ce scénario
renforcerait la capacité analytique des partenaires PEAR Plus et introduirait des outils spécifiques pour que
les interventions soient en mesure de répondre aux conflits localisés et pourraient saisir les opportunités de
contribuer à la construction de la paix, ce qui assurerait une sensibilité aux conflits accrue de toutes les
interventions sans, pour autant, nécessiter des changements profonds de choix des zones ou communautés
ciblés ou de la stratégie dřintervention générale.
Le scénario prévoit donc une sensibilité aux conflits augmentée dans la mesure où il reposerait sur cinq
volets de modifications clés :
1.
2.
3.
4.
5.
Une capacité dřanalyse des conflits améliorée
Une connaissance approfondie de la sensibilité aux conflits parmi les partenaires exécutifs et leur
personnel
Des interventions supplémentaires pour aborder les conflits et tensions locales
Une stratégie de communication pour assurer la transparence dans la programmation et dans les
relations entre les bailleurs et ONG internationales et les partenaires locaux
Une stratégie de suivi et dřévaluation qui se concentre explicitement sur la sensibilité aux conflits
En détail, les changements proposés seraient les suivants :
6.2.1
Sélection des Zones dřIntervention
Ce scénario ne prévoit pas de changement par rapport à la sélection des zones dřintervention. Le
programme continuera donc à opérer dans des zones dans lesquelles il nřy a pas des tensions
intercommunautaires particulièrement prononcées.
6.2.2
Analyse des conflits et du contexte améliorée
Incorporer une composante d’analyse des conflits dans les outils existants (protection monitoring,
MSA)
Comme décrit ci-dessus, bien que les acteurs humanitaires dans lřEst de la RDC collectent déjà de riches
informations sur la situation dans les communautés dřintervention lors du « protection monitoring » et des
Cette réflexion se base sur lřobservation de la mise en œuvre du PEAR Plus en Ituri, ainsi que sur
lřobservation du PEAR.
32
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 43
MSA, ces documents ne contiennent souvent que peu ou pas dřinformations sur les dynamiques conflictuelles
locales. Il nřest guère possible de rendre un programme humanitaire ou de développement plus conscient des
conflits qui existent dans leurs milieux dřopération sans disposer de renseignements spécifiques et qui sont mis
à jour fréquemment sur les causes, acteurs, et dynamiques conflictuelles, ainsi que sur les mécanismes
existants dřarbitrage ou de gestion des conflits.
Les éléments suivants seront surtout importants à tenir en compte, par rapport à lřhistoire et à la nature
des conflits locaux :




Est-ce que quřil y a une histoire de violences entre groupes ethniques ou autres communautés? Est-ce
que ces tensions influencent le processus de retour ?
Quels sont les enjeux des conflits :
o Est-ce quřil y a des conflits fonciers ? Est-ce que les conflits fonciers sont entre individus ou
entre communautés ou groupes ?
o Est-ce quřil y a des conflits pour le contrôle des ressources naturelles/minérales ?
o Est-ce quřil y a des conflits autour de la succession au pouvoir coutumier ? Est-ce que la
légitimité du pouvoir coutumier est contestée ?
Dans le passé, quels ont été les déclencheurs de la violence communautaire ?
Est-ce quřil y a des mécanismes locaux de résolution des conflits ? Est-ce que ces mécanismes
fonctionnent comme prévu ? Si non, pourquoi pas ?
Parfois ces questions font déjà partie des enquêtes des MSA ou du « protection monitoring », mais il
nřexiste pas de cadre dřanalyse systématique des conflits locaux commun à tous les partenaires du PEAR
Plus. Ce scénario propose ainsi dřintégrer une section dédiée spécifiquement aux conflits dans les MSA
suivant grosso modo les questions esquissées ci-dessus.
Les informations sur les tensions existantes dans les communautés dřintervention serviront de base pour la
planification dřune stratégie qui cible spécifiquement les tensions repérées dans les MSA.
Collecte d’informations continue
A lřheure actuelle, une des limites sérieuses du PEAR Plus est lřabsence dřune analyse constante de
lřévolution de la situation sur le terrain. A lřEst de la RDC, la situation est très fluide et change souvent
rapidement : une localité peut paraître pacifique un jour, puis rapidement devenir instable. Il est donc
problématique que les évaluations de sécurité et stabilité utilisées par le PEAR Plus soient effectuées
sporadiquement ou soient rarement mises à jour. Cela rend aussi difficile, voire impossible, de suivre et
d'évaluer efficacement l'impact du programme sur les dynamiques de conflits.
Il serait ainsi essentiel de mettre à jour régulièrement lřanalyse des conflits dans chaque lieu
dřintervention et de continuer à recueillir autant dřinformations que possible sur les causes et dynamiques
conflictuelles pour assurer que les interventions nřexacerbent pas les tensions et pour ajuster lřapproche de
mitigation des conflits. Cette collecte de données sur les conflits régulière et continue pourrait se faire sur
base de deux modèles opérationnels différents :
A. Modèle « Arche d’Alliance » : LřONG congolaise Arche dřAlliance (AA) est partenaire de lřUNHCR
au sud du Sud Kivu pour le « protection monitoring ». Contrairement aux autres partenaires du
« protection monitoring » dans lřEst de la RDC qui collectent des données sur la protection et les
conflits de manière occasionnelle, AA a adopté un modèle de collecte de données permanente à
lřaide des informateurs issus de et basés dans les communautés dřintervention à plein temps qui
envoient des mises à jour sur la situation conflictuelle ou politique constamment par téléphone. Ainsi,
AA dispose toujours dřune vision exacte et actuelle des faits et dynamique dans les communautés.
Ainsi, le modèle AA permettrait aux partenaires PEAR Plus dřajuster leurs stratégies dřintervention
pratiquement au jour le jour et de réagir rapidement au cas où les informateurs rapporteraient un
accroissement des tensions ou lřexacerbation des conflits existants.
44 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
B.
Modèle « savoir existant non exploité » : Le deuxième modèle potentiel pour la collecte de données
continue dans les lieux dřintervention ne nécessiterait pas de recrutement des informateurs sur place,
mais profiterait au maximum des connaissances des dynamiques de conflits qui existent déjà parmi
le personnel des partenaires de mise en œuvre. Les agents du terrain lors de leur travail quotidien
et de leurs visites dans les milieux dřintervention ont souvent une connaissance des dynamiques de
conflits assez détaillée et nuancée prise directement à la source, notamment lors de leurs
interactions directes et fréquentes avec les autorités locales et les bénéficiaires. Pour le moment, ce
savoir nřest pas systématiquement recueilli ou analysé par les partenaires exécutifs. Ce deuxième
modèle de collecte de données continue proposerait donc dřorganiser des séances régulières
(mensuelles ou bimensuelles) de discussions facilitées avec le personnel du terrain pour réfléchir à
une manière méthodique sur les évolutions de la situation conflictuelle et sur lřinteraction de ces
dynamiques avec la mise en œuvre du projet.
Théâtre participatif comme moyen de collecte de données
La méthodologie du théâtre participatif, qui est déjà utilisée avec succès par Search for Common
Ground (voir description détaillée ci-dessus) au Sud Kivu, pourrait, en dehors de son rôle dans la construction
de la paix locale, servir de complément indispensable à une analyse continue des dynamiques conflictuelles.
Les équipes théâtrales ont été formées en méthodologie dřanalyse des conflits et, au moins en partie, les
spectacles théâtraux ont pour but dřavoir une meilleure connaissance des conflits existants, des enjeux et des
acteurs. Le théâtre participatif est un outil créatif et non-menaçant pour aborder des sujets délicats qui ne
ressortiraient pas naturellement dans des réunions formelles dans les communautés. Les acteurs tiennent
également des réunions régulières avec les autorités et autres acteurs pour s'informer sur les principaux
problèmes dans chaque communauté, et, sur cette base, ils interprètent des pièces théâtrales pertinentes. Il
est donc recommandé dřintégrer le théâtre participatif systématiquement dans tous les sites de mise en
œuvre du PEAR Plus non seulement comme outil de mitigation des tensions existantes, mais également en tant
quřoutil de collecte de données.
6.2.3 Formation en vue dřune connaissance approfondie de la sensibilité aux conflits parmi les
partenaires exécutifs et leur personnel
Former les partenaires de mise en œuvre sur les notions de « ne pas nuire » et de la construction de la
paix et de leur mise en application dans l’action humanitaire
Il sera nécessaire dřinvestir dans la formation du personnel pour leur donner le savoir et les outils
nécessaires pour identifier les risques dans le PEAR Plus dřexacerber les tensions existantes ou dřen créer de
nouvelles pour ensuite être en mesure de concevoir des stratégies adéquates pour minimiser ce risque.
Actuellement, même quand les agents du terrain se rendent compte que les activités ont un impact négatif sur
les tensions locales, ils ne disposent pas de moyens pour soulever ces questions et pour y répondre
systématiquement. La formation proposée devra adopter une approche participative qui valorise et profite
de lřexpérience concrète des agents du terrain.
Nous recommandons en particulier les actions suivantes :



Organiser des séances de formation approfondie des employés de lřUNICEF et des partenaires de
mise en œuvre sur les notions de « ne pas nuire » et de la construction de la paix et de leur
application dans la programmation humanitaire ;
Mener des séances de planning avec les responsables des programmes de PEAR Plus (UNICEF et
partenaires) sur la réalisation du principe de « ne pas nuire » dans la gestion et dans les activités
du PEAR Plus et de la paix ;
Organiser des ateliers trimestriels avec tous les employés des agences de mise en œuvre du PEAR
Plus, surtout avec les agents du terrain, pour évaluer lřimpact sur les conflits des activités et des
pratiques. Ces ateliers pourraient être suivis dřune réflexion au niveau des responsables des
programmes de tous les partenaires exécutifs pour encourager une réflexion dans les provinces et
les organisations sur les défis rencontrés et sur des modifications programmatiques potentielles;
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 45

6.2.4
Sur la base des résultats des ateliers, il sřagirait de codifier les leçons apprises et les bonnes
pratiques dans la gestion des risques de « nuire ».
Interventions qui abordent les tensions locales contribuant à la construction de la paix
Théâtre participatif autour des dynamiques conflictuelles existantes au niveau local
Le théâtre participatif est un outil polyvalent pour aborder les questions jugées trop sensibles par les
communautés et qui sont ainsi rarement discutées dans un forum formel et en public. Il est donc un instrument
idéal pour encourager des discussions sur les questions liées aux tensions et aux conflits locaux, notamment
les conflits fonciers, les animosités intercommunautaires ou entre des groupes divers ou même les différends
entre les autorités et la population. Il est également un instrument efficace pour les messages de
sensibilisation.
SFCG a une expérience de longue date avec le théâtre participatif dans lřEst de la RDC, notamment au
Sud Kivu. Les acteurs sont formés en analyse et stratégies de résolution des conflits ainsi que dans dřautres
sujets importants à leur travail comme les lois foncières ou les droits de lřhomme. Avant leurs séances dans les
communautés, ils font souvent des recherches dans les communautés pour mieux connaître et anticiper les
problématiques sur place. Les spectacles théâtraux sont extrêmement populaires dans les communautés,
surtout dans les communautés rurales où les opportunités de divertissement sont rares. Dans la méthodologie
employée par les théâtres communautaires soutenus par SFCG, les acteurs essaient de discuter les points de
vue différents sur les questions conflictuelles lors des spectacles et démontrent les conséquences néfastes de
lřescalade des conflits et de la violence et prônent les moyens de résolution des conflits pacifiques à travers
des instruments ou des cadres de concertation différents.
Nous recommandons lřutilisation du théâtre participatif surtout dans les communautés dans lesquelles les
MSA ou les autres interactions des agents du terrain avec les acteurs locaux indiquent des tensions ouvertes
ou latentes. Le théâtre participatif pourrait également être utilisé pour la sensibilisation sur les thèmes de
protection des enfants ou des femmes.
Le théâtre participatif pourrait être soit mis en œuvre sous la supervision de SFCG sur demande et en
étroite collaboration avec les partenaires exécutifs, soit avec une implication plutôt indirecte de SFCG au
niveau de la formation et de lřassistance technique aux organisations de mise en œuvre du PEAR Plus qui
recruteraient eux-mêmes des acteurs et géreraient les activités des troupes théâtrales.
Fonds flexibles pour des activités de construction de la paix au niveau communautaire
Les interventions du PEAR Plus sont bien prédéterminées déjà au moins au niveau de la nature des
projets. Cela veut dire que les communautés nřont pas dřopportunité dřimposer leurs propres priorités. Le
programme a déjà pris la décision pour eux. Comme dans un contexte de conflit, il faut souvent réagir avec
flexibilité et parfois rapidement pour sřattaquer aux tensions existantes ou montantes. Il serait donc
souhaitable que le PEAR Plus considère un outil de financement de projets communautaires additionnel qui
rendrait le programme plus souple et mieux placé pour répondre aux dynamiques conflictuelles. Ces fonds
additionnels devraient être utilisés soit pour augmenter des projets communautaires dans les domaines
établis par le programme : Eau et assainissement ; éducation ; et santé, soit pour financer des autres
initiatives de construction de la paix dans les communautés dřintervention.
Feuilletons de radio et discussions radiophoniques sur les conflits fonciers, le droit foncier, et les
moyens de résolution pacifique des conflits fonciers
Développer des émissions de radio organisées autour dřun ou de plusieurs feuilletons radiophoniques sur
les problèmes fonciers, les stipulations du droit foncier, et les moyens de résolution pacifique des différends
autour de la terre. Les feuilletons seront produits par SFCG ou un de ses partenaires et distribués aux
stations de radio locales. Les journalistes locaux seront formés dans la matière pour ensuite organiser des
séries dřémissions sur la radio locale avec des experts en droit foncier ou en résolution des conflits qui
répondront aux questions des auditeurs. Ces émissions devraient être développées en étroite collaboration
46 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
avec les partenaires PEAR Plus ainsi que les organisations travaillant sur les conflits fonciers, comme UN
Habitat et UNHCR dans le Nord et le Sud Kivu et la Commission foncière et RCN en Ituri pour ne pas doubler
ou contrecarrer les efforts existants dans ce domaine.
Les agents de terrain des partenaires PEAR Plus faciliteraient la remise des questions aux experts dans
les communautés ciblées par le programme. Ils feront le suivi après chaque émission pour faciliter la
médiation des problèmes fonciers par les structures appropriées et pour assurer leur suivi par ces structures
ou par les autorités. Ces efforts devront être appuyés également par les séances de théâtre participatif. Au
cas où un cas concret serait résolu pendant la durée du programme, les émissions de radio devraient
discuter les éléments qui ont contribués à sa résolution pacifique.
Activités de solidarité intercommunautaire
Des activités supplémentaires pourraient être organisées pour soutenir les efforts de résolution de
conflits locaux pourraient être organisées pour améliorer la compréhension entre les communautés et pour les
encourager à identifier leurs intérêts communs et à les poursuivre et les traduire en actions communes au
bénéfice de toutes les communautés. Ces activités pourraient cibler les relations entre les communautés
ethniques autant que les relations entre autorités et certains groupes sociaux ou les militaires et la
population. Une meilleure compréhension entre les communautés dans des domaines dřintérêt communs
pourrait préparer le terrain pour aborder des sujets plus sensibles, mais elle aide aussi à contrer les rumeurs
et les informations erronées qui surgissent facilement dans les situations de tensions et les rendent plus
résistantes à la résolution.
Renforcement de la composante d’éducation à la paix du PEAR Plus
Dans la formulation actuelle du PEAR Plus, la composante dřéducation à la paix représente la seule
activité de « construction de la paix » proprement dite. Pourtant, ce volet du PEAR Plus nřa pas été priorisé
pour lřinstant dřaprès les observations en Ituri, et ne joue pas un rôle majeur dans la proposition de projet
pour la mise en œuvre du programme au Sud Kivu. Ainsi, dans le cadre du programme existant, cette
composante pourrait être renforcée par les actions suivantes :




Former les enseignants de manière approfondie sur lřéducation à la paix, et mettre à leur
disposition des matériels variés 33 pour promouvoir des messages de paix et de non-violence
pertinents et adéquats au contexte.
Former des jeunes animateurs et leur donner une assistance supplémentaire pour organiser des
séances extrascolaires dřéducation à la paix animés par les jeunes pour les jeunes autour des
questions de lřidentité et de lřaccès aux ressources.
Organiser des échanges culturels et sportifs entre les enfants des zones ciblées et les enfants des
zones environnantes, afin d'accroître la connaissance mutuelle et combattre les préjugés.
Organiser des activités de dialogue et de rencontre entre les enfants des écoles régulières et les
enfants des centres de rattrapage (ex : activités sportives, projections vidéo, théâtre, musique et
danse).
Programmes de radio pour la jeunesse
Les programmes de radio pour la jeunesse soutenus par SFCG, surtout le programme Sisi Watoto, des
émissions produites par les jeunes pour les jeunes sur des sujets qui concernent les enfants et les jeunes
congolais, ont connu une popularité énorme dans toute la RDC. Ces programmes pour la jeunesse seront un
complément utile pour les activités dřéducation à la paix dans les écoles et les communautés. Le programme
devrait aborder les questions liées au rôle que les jeunes pourraient jouer dans la réconciliation
En dehors du guide pour les enseignants du Ministère de lřéducation distribué actuellement par les
partenaires PEAR Plus. Le guide officiel ne semble pas couvrir toute la gamme des sujets liés à lřéducation à
la paix.
33
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 47
intercommunautaire et dans la construction de la paix, ainsi que les questions du travail des enfants dans les
carrés miniers et la protection et les droits des enfants en général. Ces programmes pourraient être
complétés par des échanges intercommunautaires ou des dialogues entre jeunes des divers groupes
ethniques pour renforcer les liens entre les communautés autour des intérêts communs entre les jeunes ou des
activités sportives ou sociales des jeunes.
6.2.5
Communication et transparence dans lřaction humanitaire
Renforcement de la communication pour augmenter la transparence dans la gestion du programme
Dans une large mesure, le risque de nuire est lié à une méfiance généralisée, parmi les populations de
lřEst de la RDC, vis-à-vis des acteurs humanitaires, qui sont soupçonnés dřêtre corrompus et de tirer profit de
la souffrance de la population. Pour contrebalancer cette méfiance et pour prévenir et gérer les perceptions
et les rumeurs qui sèment le doute et le mécontentement contre lřassistance internationale, il est recommandé
dřadopter une stratégie de communication qui cible les acteurs clés dans les groupements et communautés
dřintervention utilisant des radios locales. Cette stratégie de communication renforcée incluerait les activités
suivantes :




Soutenir les stations de radio locales avec des formations en gestion et techniques pour organiser
des émissions sur lřassistance humanitaire, sa logique, ses défis, ses modalités dřaction ;
Former les journalistes locaux sur le système dřaide internationale, critères de bonne conduite,
transparence et comptabilité dans lřaction humanitaire ;
Organiser des émissions en direct avec les responsables des ONG partenaires du PEAR Plus pour
mieux expliquer aux communautés locales leur logique dans le choix des localités et des
bénéficiaires et le volume et la nature exacte de lřaide apportée.34
Utiliser les radios pour mettre à jour la population sur la mise en œuvre du PEAR Plus, y inclure des
informations sur lřutilisation des fonds du programme.
Renforcement de la transparence des actions des autorités de l’Etat
Pour améliorer les relations entre les autorités et les populations, il faudrait promouvoir des débats et
discussions publiques qui impliquent les responsables politiques et administratifs dans les groupements
communautaires. Il faudrait, progressivement, établir un partage dřinformation régulier et habituel et une
collaboration plus étroite pour réaliser les intérêts communs entre les communautés et leurs gestionnaires. En
plus, les autorités sont des acteurs centraux dans la gestion à long terme des conflits locaux, mais ils ne
seraient en position de servir de médiateurs dans les conflits localisés que si la population leur fait confiance.
Des forums réguliers, pour discuter des sujets ayant traits aux tensions dans les zones dřinterventions suivant
le modèle des Tribunes dřExpression Populaires (TEP) que SFCG a déjà utilisés dans dřautres régions de la
RDC, pourraient au cours des interventions, contribuer à une plus grande transparence dans la gestion des
affaires locales. Des programmes de radio devraient ensuite faire le suivi et reprendre les sujets discutés lors
des TEP pour assurer que le dialogue entre les responsables de lřEtat et les communautés perdure.35
6.2.6
Suivi et évaluation
Afin de suivre et évaluer l'impact du PEAR Plus dans son ensemble sur les dynamiques de conflit, il est
indispensable dřavoir, au départ, une véritable analyse des conflits, qui permettrait de construire une base
de référence et des indicateurs de progrès. En l'absence dřune telle analyse (qui nřest pas prévue dans ce
scénario), il faudrait créer une stratégie de suivi et évaluation sur la base des informations et analyses
Il faudrait noter que ces émissions risquent de devenir des outils de propagande pour les agences du
PEAR Plus ou pour leur bailleur. Il faudrait donc que lřengagement en faveur de la transparence soit sérieux
et compréhensif de la part du bailleur et de la part des organisations responsables pour sa mise en œuvre.
35 Il est évident que la participation des autorités dans de tels forums ou des émissions de radio nřest guère
garantie. Les partenaires qui exécutent les programmes devront prendre faire des efforts pour créer des
bonnes relations de travail avec les autorités dès le début.
34
48 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
existantes. Toutes les activités de collecte et dřanalyse de données décrites ci-dessus (voir 7.2.2) ont
également une dimension de suivi et dřévaluation quřil faut capturer et développer systématiquement. Ainsi,
SFCG pourrait travailler avec les partenaires exécutifs du PEAR Plus dans le développement des indicateurs
pour évaluer régulièrement la sensibilité aux conflits des activités humanitaires et en même temps lřimpact
des activités de construction de la paix. Lřimpact repéré, positif ou négatif, des interventions doivent être
discutées lors des réunions trimestrielles avec tous les partenaires du PEAR Plus (voir 7.2.3) et formeront la
base des décisions programmatiques ou des ajustements de stratégie subséquents.
6.2.7
Coordination
Il est essentiel que les activités décrites ci-dessus soient bien intégrées dans une stratégie globale de
sensibilité aux conflits du PEAR Plus et non pas que quelques activités additionnelles qui opéreraient à côté
des activités originelles de nature humanitaire du PEAR Plus. Cela veut dire que le scénario 2 envisage une
intégration autant que possible des activités proposées de Search for Common Ground et les partenaires
exécutifs des volets « traditionnels » du PEAR Plus. Etant donné les cultures différentes des organisations
humanitaires et des organisations qui travaillent sur la réconciliation et la résolution des conflits, cela
nécessitera que les partenaires exécutifs du PEAR Plus deviennent plus sensibles aux conflits et incorporent
une perspective de « ne pas nuire » dans toutes les activités programmatiques et même dans les procédures
opérationnelles, tandis que, en même temps, le partenaire de résolution de conflits (SFCG) devient plus
capable de travailler dans lřhumanitaire et dřintégrer leurs méthodes dans la programmation humanitaire. Il
paraît évident quřune bonne et étroite coordination sous la direction de lřUNICEF doit être de rigueur pour
réaliser cette vision.
Plan illustratif des interventions :
Mois
Activités
Préalables
Formation du personnel des MSA en méthodologie dřanalyse de conflits et collecte de
données sur les conflits
Mois 1
MSA avec analyse des conflits abrégée
Formation de tous les employés des partenaires en analyse de conflits et en principes
de base de mitigation et gestion des conflits
Revue des pratiques opérationnelles, surtout par rapport au recrutement et à la
fourniture et à lřachat des matériels
Planification de la stratégie de mitigation des conflits spécifique à chaque zone
dřintervention avec tous les partenaires exécutifs de la zone
Mois 2
Formation de toutes les équipes du terrain dans la méthodologie du théâtre
participatif
Premières séances de théâtre participatif dans les communautés dřintervention sous la
supervision des formateurs/experts de SFCG
Emissions de radio des partenaires de PEAR Plus sur le choix des communautés et des
bénéficiaires, la logique du programme et sa mise en œuvre
Mois 3-12
Théâtre participatif mensuel dans les communautés oú les tensions sont plus sérieuses
pour aborder les conflits les plus aigus et bimensuel dans les autres communautés
Consultations exhaustives avec les communautés et tous les acteurs influents sur les
priorités humanitaires et la contribution de lřassistance de PEAR Plus à la résolution
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 49
des conflits
Mise en œuvre des projets de PEAR Plus
Feuilletons et programmes de radio sur les conflits fonciers, la loi foncière et la
gestion des conflits
Education à la paix et des programmes pour les jeunes
Tribunes dřExpression Populaires
Suivi régulier pour évaluer lřimpact des projets sur les conflits : réunions trimestrielles
de tout le personnel des partenaires exécutifs pour évaluer la sensibilité aux conflits
en groupe
6.3
SCENARIO ŘSENSIBILITE AUX CONFLITS APPROFONDIEř
Ce scénario opte pour la transformation du PEAR Plus en véritable programme de construction de la
paix, ce qui exige non seulement des changements au niveau des activités, mais aussi une remise à plat
fondamentale de la logique et de la stratégie du programme. Ces changements sont tout à fait réalisables,
mais ils nécessiteraient une volonté politique de la part de lřUNICEF de modifier plus profondément leur
façon de gérer et de mettre en œuvre des programmes.
Ce scénario inclut une analyse des conflits en profondeur; une flexibilité accrue pour adapter la mise en
œuvre du programme aux résultats de l'analyse des conflits; et un système de suivi et d'évaluation qui utilise
ces résultats comme une base de référence. Par conséquent, ce scénario aura un impact profond au niveau
de la capacité du programme de « ne pas nuire » et de contribuer à la construction de la paix aux deux
niveaux, micro et macro.
6.3.1
Sélection des zones dřintervention
Si le PEAR Plus envisage de devenir un véritable programme de construction de la paix, cela devra se
refléter dans le choix des localités dřintervention dans lesquelles le programme est actif. À ce jour, le
programme a travaillé dans des collectivités qui sont le plus souvent ethniquement homogènes, qui nřont pas
une histoire de conflits locaux importants, et ont des mécanismes locaux de gestion des conflits qui
fonctionnent relativement bien. Cela ne signifie pas, bien entendu, qu'il n'y ait aucun risque de conflit.
Toutefois, par rapport à la plupart des autres endroits de la région, ce risque est relativement limité.
Il existe une perception répandue parmi les observateurs que les partenaires et la sélection des zones
d'intervention est déjà «fixée» par lřUNSSSS et ne peut pas être modifiée. Comme on lřa montré dans la
section précédente, cependant, ce n'est pas le cas: le lien avec lřUNSSSS est interprété différemment dans
les différentes provinces, et en Ituri et au Nord Kivu les sites dřintervention du PEAR Plus sont hors des axes
prioritaires de lřUNSSSS.
Dans ce scénario, la sélection des aires dřintervention devra:


Adopter une approche de Ŗne pas nuireŗ au niveau macro, avec lřinclusion de groupes quřont été,
jusquřici, laisse de cote, y compris pour des raisons logistiques et dřinaccessibilité (comme les
Banyamulenge au Sud Kivu);
Favoriser les sites où le projet peut avoir une valeur ajoutée particulière pour promouvoir la
réconciliation entre les communautés.
50 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
Il convient de noter que le fait de travailler "sur" les conflits ne signifie pas, nécessairement, intervenir
dans des localités instables et non sécurisées. Il signifie plutôt sélectionner des zones où la coexistence
intercommunautaire peut être problématique, et viser à mitiger ces tensions par le programme.
6.3.2
Analyse des conflits
Conduire régulièrement des analyses participatives des conflits dans les localités de mise en œuvre du
PEAR Plus.
Afin de devenir un véritable programme de construction de la paix, le PEAR Plus devrait être fondé sur
une analyse approfondie des dynamiques conflictuelles dans les localités de mise en œuvre. Contrairement
au scénario précédent, il ne se sřagirait pas simplement de collecter les informations sur les types de conflits
existants et leur histoire, mais aussi dřanalyser leurs causes structurelles, le rôle joué par les différents
acteurs, et les relations entre les dynamiques locales et les conflits au niveau Ŗmacroŗ. Les modalités de
collecte dřinformation vont au-delà des simples questionnaires et adoptent des approches plus participatives.
6.3.3
Formation
Mise en œuvre d’un programme de formation systématique et approfondi sur les thèmes pertinents
pour la sensibilité aux conflits
En plus des recommandations déjà avancées pour le scénario précédent, cette formation se focalisera
sur lřanalyse des conflits, et sur le développement de compétences spécifiques (médiation, négociation,
écoute active, gestion des traumatismes) pour la gestion du programme dans des situations potentiellement
conflictuelles.
6.3.4
Communication
Renforcer la communication pour augmenter la transparence dans la gestion du programme et en vue
de gérer les perceptions et les rumeurs qui sèment le doute et le mécontentement contre
l’assistance internationale
La recommandation est la même que dans le scénario précédent, mais l'accent sur la transparence et
l'échange d'informations peut être encore plus fort. Il sera important, en particulier, dřavoir un mécanisme de
gestion des plaintes, auquel les bénéficiaires et les autres membres de la communauté peuvent se référer
pour dénoncer des cas de corruption ou mauvaise gestion du projet. Cela donnera un signal sans précédent
de transparence et d'appropriation locale.
6.3.5
Activités de construction de la paix
Identifier et mettre en œuvre des activités de construction de la paix particulièrement nécessaires sur la
base de l’analyse des conflits.
Contrairement au scénario précédent, les activités de construction de la paix ne sont pas identifiées « à
priori », mais elles dépendent directement des types de conflits qui ressortent de lřanalyse. Sur cette base,
Search for Common Ground pourra identifier les outils qui sont plus adéquats. En général, le théâtre
participatif est proposé comme outil dřanalyse et en même temps comme base pour lřidentification
participative dřactivités de construction de la paix pertinentes.
6.3.6
Suivi et évaluation
Incorporer la sensibilité aux conflits dans le cadre du Suivi et Evaluation du projet, sur la base de
l’analyse des conflits.
Autrement dit, le S&E du projet devra mesurer non seulement le succès du projet vis-à-vis de ses
objectifs en matière dřéducation, WASH, santé et protection, mais aussi son incidence sur les dynamiques des
conflits. Est-ce que le programme était en mesure de sřattaquer et de mitiger les causes des conflits? Est-ce
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 51
que le programme a été capable de renforcer les systèmes et les mécanismes pour la résolution non-violente
des conflits? À cet effet, des indicateurs devront être élaborés sur la base de l'analyse des conflits, ainsi que
des méthodologies de vérification.
6.4
RISQUES ET DEFIS
L'adoption des scénarios de sensibilité aux conflits Ŗaugmentéeŗ ou Ŗapprofondieŗ nřest pas sans risques
et défis.
En premier lieu, il pourrait être difficile dřassocier les partenaires concernés, en particulier par rapport
à lřexpansion des outils dřanalyse et lřévaluation pour inclure les dynamiques conflictuelles. Cette
recommandation va, en effet, dans la direction contraire par rapport à lřorientation courante : le HCR,
OCHA et lřUNICEF sont en train de discuter comment modifier le Ŗprotection monitoringŗ et les MSA pour les
rendre plus Ŗlégersŗ, et les fonder dřavantage sur des données quantitatives, ce qui rendrait plus facile la
comparaison et le classement des différentes situations, ainsi que la surveillance des tendances au fil du
temps. Au contraire, ce scénario demande plus dřinformations qualitatives, qui ne peuvent pas toujours être
capturées par des indicateurs quantitatifs. Il est important pour l'UNICEF de prendre note de ce dilemme. Un
plaidoyer sera nécessaire vis-à-vis des partenaires pour promouvoir lřidée dřune analyse qualitative, pour
compléter la collecte des données quantitatives. Si les partenaires sont opposés à approfondir et
systématiser leur analyse sur les conflits, lřUNICEF pourrait décider de créer une capacité dřanalyse des
conflits au sein de ses programmes.
Similairement, lřutilité dřune formation sur les thèmes de la sensibilité aux conflits pourrait ne pas être
initialement évidente pour les partenaires, surtout si cela vient sřajouter à un programme de travail déjà
surchargé. Il est donc important de commencer par une sensibilisation sur ces questions, en se fondant, autant
que possible, sur les expériences réelles du staff du terrain.
Enfin, les activités de communication risquent de devenir (ou dřêtre perçues comme) des outils de
propagande par les agences de PEAR Plus ou par leur bailleur. Il faut donc que lřengagement soit aussi
transparent que possible, et quřil soit complet et sérieux de la part du bailleur et des agents de mise en
œuvre.
52 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
Annexe 1
Causes et manifestations des conflits dans les Provinces
du Nord et du Sud Kivu et dans le district de l’Ituri
Nord Kivu
Sud Kivu
Ituri
Enjeux de fond
Contrôle des terres
Terres fertiles dans les montagnes du
Masisi et Rutshuru
Immigration des Banyarwanda
organisée par le pouvoir colonial
Belge depuis les années 30
Pouvoir politique et
instrumentalisation des
identités ethniques
Favoritisme de Mobutu pour les
Banyarwandas, surtout des Tutsis dans
les années 70 Ŕ de larges concessions
foncières sont données aux
Banyarwandas
Remise en question de la nationalité
congolaise des Banyarwandas par les
autres groupes ethniques (Nande,
Hunde, Nyanga, Tembo…) et par le
gouvernement (loi sur les nationalités
de 1981)
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
Terres fertiles dans les montagnes du Sud
Kivu, surtout dans les hauts plateaux
dřItombwe
Existence et expansion des communautés
Rwandophones connues sous le nom de
Banyamulenge à partir des années 1950
suite aux crises successives au Rwanda et au
Burundi
Terres fertiles dans les montagnes et hauts
plateaux de lřIturi, surtout dans les
territoires de Djugu et Irumu
Priorité donnée aux Hemas dans
lřadministration coloniale et lřaccès aux
ressources au détriment des Lendus
Favoritisme de Mobutu pour les
Banyamulenges dans les années 1970 Ŕ
contrôle des pâturages et terres fertiles
Favoritisme de Mobutu pour les Hemas ;
les Hemas acquièrent encore plus de
terres lors de la zaïrianisation des années
1970
Remise en question de la nationalité
congolaise des Banyamulenges par les
autres groupes (Bashi, Bembe, Warega…)
et par le gouvernement (loi sur les
nationalités de 1981)
Tensions accrues épisodiques entre les
grands propriétaires fonciers Hemas et les
communautés Lendus en 1966, 1973,
1990, 19997
P a g e | 53
Déclencheurs
Exclusion des Banyarwandas de la
conférence nationale de 1990
Exclusion des Banyamulenges de la
conférence nationale de 1990
Rébellion du RCD en 1998, soutenu par
lřOuganda, qui entraîna un afflux dřarmes
et légitima la violence comme mode de
gestion des conflits
Guerre civile au Rwanda depuis
1990 Ŕ implication des Hutus et Tutsis
congolais dans la crise Rwandaise
Création des groupes armés dřauto-défense
Banyamulenge dans les années 1980
Disponibilité des armes à feu à cause des
guerres des rébellions de 1996 et 1998
Eruption des violences locales entre
les groupes ethniques se considérant
autochtones (au début surtout Hundes
et Nyangas) au Walikale et Masisi en
mars 1993
Guerre civile au Rwanda depuis octobre
1990 et implication de quelques
Banyamulenges du côté du Front Patriotique
Rwandais (FPR)
Effacement de lřautorité de lřEtat avec la
guerre de 1998
Génocide au Rwanda et déferlement
dřun million de réfugiés Rwandais du
Nord et du Sud Kivu y compris des
responsables du génocide et des
milices interahamwes en avril 1994
Génocide au Rwanda et déferlement dřun
million de réfugiés Rwandais du Nord et du
Sud Kivu y compris des responsables du
génocide et des milices interahamwes en
avril 1994
Attaques contre le territoire Rwandais
et contre les communautés Tutsis au
Nord Kivu par les milices Hutus
formées et entraînées dans les camps
de réfugiés
Attaques contre le territoire Rwandais et
contre les communautés Tutsis au Nord Kivu
par les milices Hutus formées et entraînées
dans les camps de réfugiés
Déclenchement des violences lors dřun
conflit local autour de lřextension dřune
concession par un propriétaire Hema
contre la résistance de la communauté
Lendu dans le territoire de Djugu en juin
1999
Conflagration des violences et émergence
des groupes armés ethniques soutenus par
lřOuganda, le Kinshasa, ou le Rwanda
Manifestations
Combats continus
54 | P a g e
Guerre de lřAFDL et campagne
Rwandaise pour la rentrée des
réfugiés et traque des interahamwes
en 1996
Guerre de lřAFDL et campagne Rwandaise
pour la rentrée des réfugiés et traque des
interahamwes en 1996 avec une forte
participation Banyamulenge
UNICEF et Search for Common Ground
Lutte féroce militaire entre de multiples
groupes armés pour le contrôle de Bunia
et les riches terres et mines dřor du district
Exactions contre les
civils
Guerre du RCD soutenu par le
Rwanda et lřOuganda depuis août
1998 Ŕ multiplication des groupes
rebelles et des groupes armés MaiMai
Guerre du RCD soutenu par le Rwanda et
lřOuganda depuis août 1998 Ŕ multiplication
des groupes rebelles et des groupes armés
Mai-Mai
Six groupes armés majeurs et de
nombreux groupes locaux sřaffrontent
entre 1999 ; les violences se concentrent
sur Djugu et Irumu mais se répandent sur
toute lřétendue du district
Présence continue de exinterahamwes (nommés FDLR depuis
2000) surtout dans les territoires de
Lubéro, Walikale et Rutshuru
Fuite massive de la population en Tanzanie,
y compris des Banyamulenges
Les principaux groupes armés : lřUnion des
Patriotes Congolais (UPC) (Hema, dřabord
soutenus par lřOuganda, depuis 2002 par
le Rwanda) ; Le Parti de lřUnité et de la
Sauvegarde de lřIntégrité du Congo
(PUSIC) (Hema du Sud) ; le Front
Révolutionnaire Patriotique en Ituri (FRPI)
(Lendu, GOC) ; et le Front National
dřIntégration (Lendu, Ouganda)
Emergence du CNDP et de Laurent
Nkunda en 2004
Présence continue des FDLRs au nord et ouest
de la province du Sud Kivu
Contrôle de larges parties du Masisi
et du Rutshuru par le CNDP entre
2005 et 2008
La collaboration des gouvernements
congolais et rwandais pour la traque des
FDLRs depuis 2008 a entraîné un
dispersement des FDLRs vers le centre et le
sud du Sud Kivu
Arrêt de Laurent Nkunda en janvier
2009
Collaboration des gouvernements
congolais et rwandais pour la traque
des FDLR depuis 2008
Présence continue des groupes armés MaiMai et Banyamulenge non-démobilisés et
entraînement militaire continu
Recrutement des enfants dans les
groupes armés
Recrutement des enfants dans les groupes
armés
Les combats en Ituri entre 1999 et 2004
ont causé plus de 50,000 morts
Viols de filles et femmes sur une
grande échelle
Viols de filles et femmes sur une grande
échelle
De graves massacres ethniques entre
Hemas et Lendus
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 55
Pillages, tracasseries, « taxes »
illégales et travaux forcés contre les
civils
Pillages, tracasseries, « taxes » illégales et
travaux forcés contre les civils
Destruction et incendies des villages
entiers comme rétribution ethnique
Enfants travaillants dans les carrés
miniers
Enfants travaillants dans les carrés miniers
Viols massifs, pillages, tracasseries,
travaux forcés, recrutement forcé des
enfants
Dynamiques conflictuelles actuelles locales
56 | P a g e
Occupation des terres par les
groupes armés et leurs affiliés, surtout
au Masisi et au Rutshuru
Occupation des terres par les groupes armés
et leurs affiliés
Occupation des terres par les affiliés des
anciens groupes armés, dans quelques
contrées dans les territoires de Djugu et
Irumu
Contrôle des ressources minières
contesté entre les groupes armés,
militaires, et les autorités coutumières
et autorités de lřEtat surtout au
Walikale, mais aussi au Masisi et
Rutshuru
Contrôle des ressources minières contesté
entre les groupes armés, militaires, et les
autorités coutumières et autorités de lřEtat,
surtout dans les territoires de Shabunda et
Kalehe, mais aussi Walungu et Uvira
Présence de quelques groupes armés nondémobilisés au sud du territoire dřIrumu
Contrôle politique et économique
contesté entre les groupes armés, le
pouvoir traditionnel, et le pouvoir de
lřEtat surtout au Řpetit nordř
Contrôle politique et économique contesté
entre les groupes armés, le pouvoir
traditionnel, et le pouvoir de lřEtat
Contrôle des ressources minières contesté
entre les groupes armés, militaires, et les
autorités coutumières et autorités de lřEtat
surtout dans le territoire de Djugu
Contestation du pouvoir coutumier
entre les familles prétendantes ou
entre les représentants de clans ou
ethnies différentes surtout au Řpetit
nordř
Contestation du pouvoir coutumier entre les
familles prétendants ou entre les
représentants de clans ou ethnies différentes
Contestation du pouvoir coutumier entre
les familles prétendantes ou entre les
représentants de clans ou ethnies
différentes
UNICEF et Search for Common Ground
Annexe 2
Synthèse des recommandations et scénarios proposés
Logique
Choix des zones
d’intervention
Scénario 1
Scénario 2
Scénario 3
Statu quo
Sensibilité aux conflits augmentée
Sensibilité aux conflits approfondie
Part de l’hypothèse que l’approche
existante est suffisamment sensible aux
conflits sans devoir s’insérer aux efforts
de peacebuilding
Augmentation des éléments clés pour
renforcer la dimension ‘ne pas nuire/do
no harm’ à travers tous les aspects du
programme
Révision fondamentale du Programme
en vue de s’attaquer d’une manière
directe et délibérée aux conflits sur tous
les niveaux conflictuels
Priorité à l’action humanitaire, c-a-d que
les critères humanitaires sont clés pour
déterminer les zones d’interventions
Identifier des domaines dans lesquels le
PEAR Plus peut contribuer à la
construction de la paix
Zones ‘durables’ sans tensions ou conflits
interethniques graves
Zones ‘durables’ sans tensions ou conflits
interethniques graves
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 57
Choix délibéré des zones aux conflits
fonciers et interethniques pour apporter
un soutien à leur résolution
Collecte de données
et analyse
Continuation de l’approche actuelle
Augmenter la fréquence des évaluations
de protection avec un élément d’analyse
des conflits élargi
Ajustement des instruments de collecte
de données avec un module d’analyse
de conflits intégré aux MSA
Formation approfondie des enquêteurs
des MSA dans l’analyse des conflits
Collecte de données régulière soit par
des agents de terrain, soit par des
informateurs communautaires ;
contribution du théâtre participatif à une
meilleure compréhension des conflits
Ateliers trimestriels d’analyse des
données sur les conflits pour informer la
planification et la mise en œuvre du
PEAR Plus
58 | P a g e
UNICEF et Search for Common Ground
Collecte de données continue
Adopter le modèle d’Arche d’Alliance des
informateurs indépendants de terrain
pour assurer une analyse constante des
dynamiques conflictuelles
Analyse constante des données sur les
conflits pour informer la stratégie
programmatique et les activités de
mitigation des conflits
Annexe 3
Liste des personnes consultées
Province du Nord Kivu
Agences des Nations Unis
Félix Ackebo
Célestin Mirindi
Robert Lussier
Alphonse Siteke
Félicien Molima
Guillaume Sauval
Marie Dimond
Angela Murru
Holly Berman
Christine Goyer
Spyros Demetriou
Chargé de protection, UNICEF
Chargé dřéducation, UNICEF
Chargé de communication, UNICEF
Chargé de communication, UNICEF
Program Specialist et Chef de Bureau, Nord Kivu, UNICEF
Emergency Specialist, UNICEF
Chef de Bureau Nord Kivu, PNUD
Administratrice Chargée de Protection, UNHCR
Administratrice Principale Chargée de la Protection, UNHCR
Administratrice Chargée de la Protection (Kinshasa), UNHCR
Stabilization Team Leader (Eastern Coordination), MONUC
Goma
Goma
Goma
Goma
Goma
Goma
Goma
Goma
Goma
Goma
Goma
3 juillet 2009
3 juillet 2009
3 juillet 2009
3 juillet 2009
4 juillet 2009
4 juillet 2009
4 juillet 2009
17 juillet 2009
17 juillet 2009
17 juillet 2009
4 juillet 2009
Médias
Magloire Paluku
Directeur, Radio Kivu One
Goma
5 juillet 2009
Goma
4 juillet 2009
Goma
Goma
11 juillet 2009
13 juillet 2009
Goma
13 juillet 2009
Bukavu
Bukavu
6 juillet 2009
6 juillet 2009
Bukavu
6 juillet 2009
Bukavu
Bukavu
Bukavu
Bukavu
Bukavu
Uvira
Uvira
Uvira
6 juillet 2009
6 juillet 2009
6 juillet 2009
6 juillet 2009
8 juillet 2009
10 juillet 2009
10 juillet 2009
10 juillet 2009
Bukavu
Bukavu
6 juillet 2009
6 juillet 2009
Bukavu
7 juillet 2009
Organisations Non-Gouvernementales
Passy Amani
Réseau dřéducation civique au Congo (RECIC)/Save the
Children
Bavon Mwabila
Emergency Food Security and Coordinator Specialist, NRC
Jean Emmanuel Mihigo
Coordinateur de Projet Informations, Conseil et Assistance
Mupfuni
Légale (ICLA), NRC
Jules Mbokani
Officier ICLA, NRC
Province du Sud Kivu
Agences des Nations Unis
Michel Dubois
Harouna Dan-Malam
Cyprien Maheshe
Jean-Claude Chigwrhe
Jean Bisimwa
Danielle Keulen
Alex Bertrand
Ilaria Carpen
Bernard Leloup
Tahirou Diao
Jackie Keegan
Chef de Bureau (Sud Kivu), PNUD
Coordinateur Provincial dřappui à la lutte contre la Pauvreté,
PNUD
Responsable de suivi et évaluation (Programme Pauvreté) ,
PNUD
Chargé de Programme, PNUD
Emergency Officer, UNICEF
Chef de Bureau, Sud Kivu, UNICEF
Chargé dřinformation , UNICEF
Conseillère de stabilisation, MONUC
Chef de Sous-Office, MONUC
Chargé dřinformation, MONUC
Chargée de protection, UNHCR
Organisations Non-Gouvernementales
Filippo Mazzarelli
Chef de Base et Coordinateur Programme PEAR, AVSI
Richard Bwiru
Responsable local du Programme PEAR PLUS, AVSI
Musharamina
Jean Paul Munganga
Coordonnateur a.i., ADI-Kivu
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
P a g e | 59
Severin Mirindi
Ingénieur, AVSI
Christian Stangel
Muriel Tschopp
Chef de Bureau, IRC
Coordinatrice du Programme Community-Driven
Recovery/Tuungane, IRC
Chef de bureau, IRC
Dieudonné Kalala
Tshiswabantu
Jean-Baptiste
Mukungiwa-Kabizi
Eric Mufungizi
Léon Masirka
Chancelle Furabanu
Baudouin Kipaka
Léon Baruani
Pacifique Ngombwa
Dupont Ntererwa
Alfred Bulakali
Nestor Nkuruziza
Aldegonde Kyakimwa
Autorités Locales
Demilie Andre Kibala
Mariette Chirume
Severin Mugangu
Ecoles
Simon Bulonzu Kazungu
Marie-Claire
Ntanabwijira Nshokano
Nestor Bukeduce
Albertine Shabulionzenze
Rwabashosi Boyimkembe
Bukavu
Cierano
Ruhoko
Bukavu
Bukavu
6 juillet 2009
6 juillet 2009
Walungu
8 juillet 2009
Technicien génie civile, IRC
Walungu
8 juillet 2009
Technicien en développement rural, IRC
Ingénieur, IRC
Animatrice de terrain, IRC
Coordonnateur, Arche dřAlliance
Directeur du Bureau de Bukavu, SFCG
Coordonnateur DME, SFCG
Assistant Producteur Médias, SFCG
Coordonnateur Théâtre, SFCG
Coordonnateur Médias, SFCG
Coordonnatrice Cinéma Mobile, SFCG
Walungu
Walungu
Walungu
Uvira
Bukavu
Bukavu
Bukavu
Bukavu
Bukavu
Bukavu
8 juillet 2009
8 juillet 2009
8 juillet 2009
10 juillet 2009
7 juillet 2009
7 juillet 2009
7 juillet 2009
7 juillet 2009
7 juillet 2009
7 juillet 2009
Conseiller Chargé des Questions des Grands Lacs,
Gouvernement Provincial
Conseillère Chargée des questions sociales et Humanitaires,
Gouvernement Provinciale
Administrateur de Territoire dřUvira
Bukavu
7 juillet 2009
Bukavu
7 juillet 2009
Directeur, Ecole Primaire de Chierano
Enseignante et animatrice, Ecole primaire de Chierano
Walungu
Walungu
8 Juillet 2009
8 juillet 2009
Vice Président du Comité des Parents, Ecole Primaire de
Chierano
Directrice Adjointe, Ecole Primaire de Ruhoko
Président du Comité des Parents, Ecole Primaire de Ruhoko
Walungu
8 Juillet 2009
Walungu
Walungu
8 Juillet 2009
8 Juillet 2009
Charge de planification, suivi, évalution, UNICEF
Chargé hygiène et assainissement, UNICEF
Chargé de la protection, UNICEF
Chargé dřéducation, UNICEF
Chargé des Affaires Humanitaires, OCHA
Chargée des Affaires Humanitaires Adjointe, OCHA
Bunia
Bunia
Bunia
Bunia
Bunia
Bunia
14 juillet 2009
14 juillet 2009
14 juillet 2009
14 juillet 2009
16 juillet 2009
16 juillet 2009
Bunia
Bunia et
Djougou
Djougou
Bunia
13- 16 jl 2009
13-16 jl 2009
Bunia
15 juillet 2009
Bunia
14 juillet 2009
Uvira
8 juillet 2009
10 juillet 2009
District d’Ituri
Agences des Nations Unis
Roots Bondowe Virihi
Leandre Nyangezi
Félix Monga
Antoine Maleka
Willy Lukemba
Magalie Salazar
Organisations Non-Gouvernementales
Andrea Burelli
Coordinateur, COOPI
Benjamin Kane
Responsable Volet « Protection » du PEAR Plus, COOPI
Nelson Mandundu
Eric Mpolesha
Cedric Mokuku-Mambola
Société Civile
Jean-Bosco Lalo
60 | P a g e
Psychologue/formateur, COOPI
Chargé évaluation rapide et multisectorielle et de plaidoyer,
Oxfam Québec
Assistant a la coordination, monitoring et protection, Oxfam
Québec
Président, Société de lřIturi
15 juillet 2009
15 juillet 2009
UNICEF et Search for Common Ground
Commission foncière de lřIturi
Roger Mgule
Commissaire permanent
Théobald NřGulo
Président adjoint
Louise Tajeki
Membre
Zheobald Nkulo
Membre
Guillaume Manganga
Membre
Gilberte Manzima
Membre
Ngule Roger
Membre
Autorités et services publiques
Hon. Pierre Claver
Député Provincial (Province Orientale)
Bedidjo
Chef de Groupement de Zengo
Unega Waga
Chef de Groupement de Londroma
Aliker Unega Lodda
Chef de Groupement de Lodda
Pitua
Administrateur, PPSSP
Dr. Justin Mukonkole
Medicin chef de zone, Aire de Santé de Zengo
Etude sur la sensibilité aux conflits du Programme PEAR Plus
Bunia
Bunia
Bunia
Bunia
Bunia
Bunia
Bunia
15,16 jl 2009
15,16 jl 2009
16 juillet 2009
16 juillet 2009
16 juillet 2009
16 juillet 2009
16 juillet 2009
Djougou
14 juillet 2009
Djougou
Djougou
Djougou
Djougou
Djougou
14 juillet 2009
14 juillet 2009
14 juillet 2009
14 juillet 2009
14 juillet 2009
P a g e | 61
Annexe 4
Bibliographie
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