Formation des enseignants au français langue étrangère et

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Formation des enseignants au français langue étrangère et
Formation des enseignants
au français langue étrangère et seconde.
Université et IUFM, deux mondes
provisoirement cloisonnés Fatima Chnane-Davin
Jean-Pierre Cuq
IUFM d’Aix-Marseille, UMR ADEF
Introduction
En France, l’enseignement du français langue seconde à des enfants et adolescents non
francophones est devenu aujourd’hui une question majeure car elle concerne un nombre
d’élèves croissant : en 2001, le chiffre officiel des élèves nouvellement arrivés et scolarisés en France était au nombre de 24731. En 2004, le Ministère de l’éducation nationale
avançait le nombre de 39000 inscrits qui avaient besoin d’une scolarisation adaptée et
d’un apprentissage de la langue française leur permettant d’être intégrés dans le système
scolaire ordinaire.
Qui a la charge de l’enseigner et avec quelle formation ? C’est ce que nous allons examiner
dans notre article. Dans un premier temps nous situerons le contexte institutionnel de
l’enseignement du français comme langue seconde (FLS) aux élèves qu’on appelle primoarrivants ou nouveaux arrivants, puis nous présenterons les acteurs responsables des
classes qui accueillent ce public.
Nous précisons que notre objectif n’est pas de confronter une formation professionnelle
à l’IUFM et une formation universitaire mais d’analyser le degré de professionnalisation
spécifique lié aux parcours de formation initiale et continue des enseignants du FLE-FLS afin
de faire ressortir les divergences et les convergences. Nos questions partiront des constats
sur le terrain de la formation : existe-t-il une formation spécifique en FLE-FLS à l’IUFM ? À
quoi prépare la formation LMD en FLE-FLS à l’université ? Est-il possible d’envisager une
formation professionnelle universitaire en FLE-FLS afin de décloisonner les deux mondes,
celui de l’université et celui de l’IUFM à un moment où ce dernier devient une « Ecole
Interne » dans l’université. Nous proposerons ensuite les grandes lignes de ce qui pourrait
être une formation selon nous convenable pour répondre aux attentes des enseignants et
aux besoins des élèves.
Enseignement de transition et recrutement d’enseignants
La légitimation du domaine d’enseignement du français comme langue seconde n’a eu lieu
qu’en 2000 par la publication des premières recommandations officielles intitulées Le français
langue seconde destinées aux formateurs et aux enseignants des classes des nouveaux
arrivants. Or, le ministère a pris conscience de la nécessité de recruter du personnel qualifié
Le Monde du 1er juin 2001
L’IUFM d’Aix-Marseille est intégré depuis janvier 2007
IUFM Nord-Pas de Calais
Qu’est-ce qu’une formation professionnelle universitaire des enseignants ? – 2009 (215-222) Tome 1
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J.P. CUQ, F. CHNANE-DAVIN
pour les classes de FLS depuis une vingtaine d’années au moins. La circulaire de mars 1986
concernant les enseignants affectés dans les classes d’accueil stipule qu’ils « doivent l’être
selon leurs compétences et, le cas échéant, des formations suivies auprès d’organismes
spécialisés en didactique des langues étrangères ». Malheureusement, on n’est pas allé
jusqu’à tirer les conséquences de cette logique en terme de professionnalisation : les
enseignants recrutés sont soit des vacataires, soit des contractuels - ils sont engagés pour
une année scolaire -, et ils font fonction de professeurs de français langue étrangère (FLE).
Ces derniers sont souvent sans formation dans le domaine du FLS. Ils ont été formés pour
enseigner le français à des élèves dont il est la langue première, c’est-à-dire, pour l’essentiel,
à l’enseignement de la littérature et de la grammaire et non pas « l’acquisition » de la langue
française.
Formation universitaire des enseignants : formation initiale et reprise
d’études à l’université
En général, la plupart des enseignants des classes d’accueil ont reçu une formation
universitaire en lettres ou en sciences du langage, certains en langue vivante étrangère
(espagnol, anglais, allemand,…), une minorité dans des disciplines non linguistiques (DNL).
Une formation qui est renforcée (initiative personnelle : avec toutes les contraintes que cela
comporte : aucun aménagement des horaires des cours pour des enseignants qui exercent
leur métier et qui redeviennent étudiants) parfois par un DU (diplôme universitaire), ou par
une mention FLE en licence, en maîtrise (aujourd’hui Master 1 : M1) ou un DEA (Master 2 :
M2) FLE. Mais il est vrai que dans les masters actuels, toutes les universités ne proposent
pas, loin s’en faut, d’unité d’enseignement (UE) spécifique au FLS. Autrement dit, il n’y a
pas de spécialisation FLS en termes de formation professionnelle diplômante développant
des compétences spécifiques pour enseigner à des allophones dans un milieu homoglotte.
Même les universités qui ont complété leur offre de formation par des UE de FLS, ne peuvent
parfois le faire que de façon relativement générale car elles s’adressent indistinctement à
toutes les catégories d’étudiants (Français en formation initiales, étrangers, enseignants en
reprise d’études).
Même si on peut faire dans telle ou telle université un doctorat sur un sujet portant sur le FLS
(mais alors la formation est à objectif universitaire), il n’existe donc pas de cursus complet
(LM) entièrement consacré au FLS et préparant à l’enseignement dans les écoles ou dans le
secondaire. Cela est dû au fait qu’il n’existe pas de concours de recrutement spécifique (et
donc pas de reconnaissance de cette spécialité disciplinaire) pour le FLS, ni même d’option
spécifique dans les concours existants, en lettres ou en langue vivante par exemple. Certes
les titulaires de l’enseignement primaire ou secondaire par ailleurs titulaires d’une licence,
d’un M1 ou d’un M2 en FLE peuvent accéder à des postes sur profils spécifiques pour
enseigner à des non francophones, mais aucun enseignant français n’est réellement et
spécifiquement formé initialement à ce type d’enseignement. A l’inverse, les vacataires ou
contractuels recrutés parce qu’ils ont eu au moins une formation approchante (en FLE) ne
peuvent espérer, hors de la voie des concours auxquels leur parcours universitaire ne les
prépare guère, obtenir un poste sur la durée. Or, l’absence de pérennité des enseignants
est handicapante pour l’évolution des dispositifs d’accueil et d’intégration (DAI) et le suivi
des élèves dans la phase post CLIN- CLA.
Pour toutes ces raisons, on peut dire que l’université ne participe pas directement, pour
le moment du moins, à la professionnalisation des personnels de la fonction publique qui
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IUFM Nord-Pas de Calais
Formation des enseignants au français langue étrangère et seconde. Université et IUFM, deux mondes provisoirement cloisonnés
travaillent dans le domaine du FLE-FLS.
Formation initiale au métier d’enseignant à l’IUFM
Si l’université permet d’accéder à des diplômes universitaires, l’IUFM demeure l’organisme qui
prépare à toute formation professionnelle (CRPE, CAPES, Agrégation, ...) des enseignants
du premier et du second degré, toutes disciplines confondues. Au terme de cette formation,
nous le rappelons, les futurs enseignants doivent acquérir des compétences professionnelles
s’organisant dans quatre domaines :
- la ou les disciplines enseignée(s) : consolider leur connaissance des concepts et
notions, des démarches et méthodes, acquérir des savoirs didactiques en termes de
conception, d’évaluation, ...
- les situations d’apprentissage : mise en œuvre, analyse,... ;
- la conduite de la classe et la prise en compte de la diversité des élèves : autorité,
relation pédagogique, gestion de la classe, ... ;
- l’exercice de la responsabilité éducative et l’éthique professionnelle : situer leur
mission, connaître les structures de l’administration, identifier le rapport de l’école avec
son environnement social économique et culturel, identifier les partenaires...
Ces compétences sont alors validées selon trois modalités : les stages en responsabilité, les
modules de formation et le mémoire professionnel. Mais cette formation ne concerne que
le français langue maternelle. Quant à celle du FLE/FLS, elle n’y est pas encore dispensée
ou elle n’y est introduite que de façon passagère, sous forme de formation optionnelle
de quelques heures pour une initiation en didactique du FLE-FLS (en général pour les
stagiaires qui effectuent leur stage en responsabilité à l’étranger). Outre le fait de ne savoir
où placer cette formation initiale (filière lettres ? filière LVE ? autres ?), la vraie raison réside
dans la non reconnaissance institutionnelle des diplômes d’un domaine marginal, celui du
FLE/FLS.
Formation continue à l’IUFM Quant à la formation continue, elle est organisée, en général dans toutes les disciplines, à
l’IUFM en tant qu’opérateur ou organisateur. Or, le FLE-FLS y entre difficilement et rares
sont les IUFM qui dispensent une formation de ce type. Tout d’abord la raison principale est
le manque de formateurs dans ce domaine. On juge que c’est un domaine qui s’adresse à
une minorité d’élèves, ce qui ne justifie pas un vrai plan de formation. Une raison que les
enseignants demandeurs d’une telle formation réfutent et trouvent non fondée.
Formation à la certification FLS
La mise en œuvre de la passation de cette certification complémentaire n’a eu lieu qu’en
2005 (la circulaire qui la préconise date de 2002) dans certaines académies. En général sans
formation en FLE-FLS, les candidats doivent satisfaire aux critères d’évaluation suivants (la
circulaire de 2004) :
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« La connaissance et l’expérience des principales méthodes d’enseignement d’une langue étrangère et
d’une langue seconde,
La connaissance et l’expérience des matériels pédagogiques disponibles,
La connaissance et l’expérience des techniques de classe pour les publics d’élèves non francophones
(capacité du candidat à organiser une séquence de langue étrangère ou une séquence de langue seconde
pour des élèves débutants ou pour des élèves avancés ; pédagogie de l’erreur et de son traitement,
La connaissance des textes réglementaires qui concernent l’accueil et la formation des élèves non
francophones,
La connaissance des conditions de la scolarisation dans les établissements français de l’étranger,
La connaissance des divers aspects des programmes de l’école primaire et du collège concernant la maîtrise
de la langue et l’enseignement des langues étrangères et régionales
La connaissance des grandes familles de langue et des systèmes d’écriture, en vue de permettre une
comparaison entre fait de langue en français et fait de langue d’origine des élèves,
La capacité à évaluer les compétences des élèves (et la connaissance des principaux outils d’évaluation
existant à cet effet,
La capacité à élaborer un plan individualisé de formation pour les élèves et à négocier avec l’équipe
d’établissement un plan d’intégration progressive dans la classe d’inscription,
NB. : Le jury appréciera particulièrement des candidats la possession des diplômes de lettres mention FLE
et des divers diplômes de langue. »
Or, les rapports des jury mentionnent souvent que les candidats qui se présentent sont
incapables de faire la différence entre didactique du FLE et celle du FLS. Ils sont incapables
également d’analyser le contexte de scolarisation des élèves qui relèvent du FLS et qui ont
des besoins spécifiques à satisfaire pour être intégrés dans des classes dites ordinaires.
Cela nous amène à poser les questions suivantes :
•Comment l’IUFM et l’université peuvent-ils contribuer ensemble à une formation
adéquate ?
•Que peut-on proposer en terme de formation articulant théorie et pratique,
décloisonnant formation universitaire et formation professionnelle ?
Des propositions d’une formation professionnelle universitaire en FLS
Proposer un plan de formation en français langue seconde, langue de scolarisation, c’est
former des professionnels avec des compétences spécifiques. Il s’agit donc de :
– fournir aux enseignants l’apport théorique nécessaire pour lire des situations pratiques de
classe différentes de celles du FLM pour lesquelles ils ont été formés initialement.
– les préparer à faire face à une classe de FLS, où les besoins des élèves sont multiples
(langue de communication, de scolarisation et d’acculturation).
La professionnalisation en FLS
Par professionnalisation, nous désignons le fait de permettre à une personne de devenir un
professionnel capable de mobiliser un savoir, un savoir-faire dans un domaine particulier. Ce
qui ne peut se faire évidemment que s’il y a une reconnaissance sociale et institutionnelle
légitimant une pratique sociale. En France, cela suppose au minimum l’ouverture d’options
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Formation des enseignants au français langue étrangère et seconde. Université et IUFM, deux mondes provisoirement cloisonnés
de FLS aux concours de professeurs des écoles ou des collèges et lycées existants. Il
suffirait parfois d’adapter les diplômes actuels. À titre d’exemple, à l’université Aix-Marseille I,
et depuis la mise en place de la réforme LMD, il existe bien dans le département sciences
de l’éducation un Master recherche 1re année « Pratique professionnelle des enseignants
et des formateurs ». C’est un master qui permet de doter les étudiants d’un référentiel de
compétences, de réfléchir sur la pertinence de sa pratique enseignante en l’analysant.
À l’approche de l’intégration de l’IUFM à l’université, créer un Master similaire mais spécifié
intitulé par exemple « Pratique professionnelle des enseignants et des formateurs en FLEFLS » permettrait aux futurs enseignants d’intégrer à leur cursus une formation et une
certification FLS. Cette formation devrait comprendre des modules en didactique des langues,
en didactique du FLE-FLS, en méthodologie et une initiation à l’approche interculturelle.
Certains modules seraient plus particulièrement destinés aux enseignants de disciplines
non linguistiques, eux aussi confrontés aux problèmes que posent les classes hétérogènes
du point de vue linguistique et culturel.
Pour nous, un master à l’université ou un module de formation à l’IUFM devrait avoir alors
comme grandes lignes de formation :
– La didactique du FLS : Présentation des notions, des concepts, du champ et des références
didactiques nécessaires au domaine. Il s’agit d’amener les personnes en formation à
une maîtrise des savoirs transversaux à la didactique des langues pour comprendre la
didactique du FLS et la situer par rapport au FLM et au FLE. C’est une façon de dépasser le
cloisonnement FLE/FLS/FLM par comparaison et analyse afin de dégager les passerelles
indispensables.
– Le français de scolarisation et l’approche interdisciplinaire : il s’agit de permettre, d’une part,
aux personnes en formation de comprendre les besoins disciplinaires langagiers spécifiques
à la discipline « français » et transversaux des autres disciplines non linguistiques (DNL). La
langue outil, ici le français, est langue enseignée et langue d’enseignement. Ce qui nécessite
une prise en compte de la situation des élèves non francophones. D’autre part, il s’agit de
former à penser son enseignement dans un ensemble et de travailler en coopération avec les
enseignants des autres disciplines qui sont chargés des mêmes élèves afin d’harmoniser les
méthodes de travail et les modes de fonctionnement dans l’enseignement du FLS. Former
à enseigner la langue de scolarisation c’est fournir les bases linguistiques pour travailler
dans sa discipline et accompagner les élèves dans leur parcours scolaire dans une langue
seconde.
– La méthodologie du FLS : il s’agit d’une formation sur le plan théorique et pratique à
la méthodologie du FLS. Cela pourrait se faire par l’observation et l’analyse des diverses
situations d’enseignement du FLS dans le monde pour aller vers une contextualisation. En
effet, les contextes sont multiples et différents les uns des autres. Ainsi, la méthodologie
FLS utilisée au Canada n’est pas celle mise en œuvre en Afrique francophone, ni celle en
application dans les classes bilingues ou les classes passerelles en Belgique et d’accueil en
France. Il existe sûrement des généralités mais il y a beaucoup de spécificités d’un contexte
à l’autre. Pour faire ressortir ces généralités et ces spécificités, on propose dans un premier
temps un travail d’analyse de méthodes, de textes ou recommandations officiels, de savoir
ou de référentiels de compétences. Puis vient un travail de contextualisation, en termes
de savoirs et de savoir-faire. Par exemple, le contexte français, qui est marqué par une
grande complexité, exige de l’enseignant qu’il sache faire acquérir à l’élève primo-arrivant
la langue de communication, les formes des discours pour étudier et comprendre toutes les
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disciplines, les outils de langue qui structurent les énoncés oraux et écrits, l’interdisciplinarité
pour relier les disciplines scolaires et l’interculturalité pour comprendre le monde d’où l’on
vient et le monde où l’on arrive.
– L’approche interculturelle : former à cette approche c’est former l’enseignant à être un
« passeur culturel » (Zakhartchouk, 1999). Par culture ici, il s’agit de la culture anthropologique,
objet donné, différente d’un pays à l’autre ; de la culture cultivée, objet construit, héritage
différent d’un contexte à l’autre ; de la culture en tant que rapport au monde, aux autres et
à soi.
– La pédagogie du projet : former à la pédagogie du projet en FLS c’est fournir dans un
cadre global à l’enseignant les éléments nécessaires pour développer chez les élèves des
compétences multiples telles que les compétences langagières de communication et les
compétences textuelles (raconter, décrire, définir, identifier, organiser… pour faire un portrait,
rédiger un récit, un règlement, une fiche, une charte…). En inscrivant l’apprentissage dans
un projet, l’enseignant aide l’apprenant à dire le monde autrement.
– La gestion de l’hétérogénéité et la prise en charge des élèves en difficulté : l’hétérogénéité
culturelle, linguistique et le passé scolaire constituent un défi à relever pour le professeur de
français langue seconde. Il peut être confronté, dans la même classe, à plusieurs origines,
cultures et surtout parcours scolaires, allant de l’élève analphabète jamais scolarisé jusqu’à
celui qui a un bon niveau en passant par les peu scolarisés ou mal scolarisés dans la langue
d’origine. On parle certes dans ces cas de pédagogie différenciée mais les enseignants
dans des situations pareilles ont surtout besoin de pistes méthodologiques et d’activités
pratiques pour gérer une telle hétérogénéité. Certains dispositifs de formation en Adaptation
Intégration Scolaire (AIS) peuvent aider l’enseignant à accélérer cette prise en charge.
– L’évaluation en langue seconde : c’est une compétence qui exige une formation à l’utilisation
et à l’adaptation de certains outils référentiels de compétence ou ce certification tels que :
* le Cadre européen commun de référence pour les langues, incontournable aujourd’hui
pour toute évaluation et auto-évaluation en langues étrangères ;
* le Référentiel général d’orientation et de contenus du FLS : une mine de grilles de
compétences à adapter et à réorienter pour évaluer les élèves ;
* le DELF scolaire : une version récente du DELF proposée par le CIEP pour évaluer la
progression des élèves nouvellement arrivés en langue étrangère/seconde.
Il ne s’agit pas d’une application standard mais d’un accompagnement de l’enseignant
pour qu’il fabrique, en articulant plusieurs référentiels, ses propres outils d’évaluation et ses
supports d’observation assurant le suivi des élèves pendant toute leur scolarisation en FLS
(grilles, tests, ...).
Former à l’évaluation en langue seconde c’est permettre à l’enseignant de chaque discipline
de comprendre toute la démarche de l’apprenant en situation de production linguistique
dans une langue non maternelle.
Conclusion
Former et professionnaliser au métier de professeur de FLS, c’est développer des compétences et des gestes professionnels propres à un domaine qui relève à la fois des sciences
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Formation des enseignants au français langue étrangère et seconde. Université et IUFM, deux mondes provisoirement cloisonnés du langage (la didactique des langues) et des sciences de l’éducation (la didactique des
disciplines, les théories de l’apprentissage, l’évaluation, la psychologie, la sociologie, etc.).
De ce fait, une vraie professionnalisation des enseignants du FLS ne peut faire l’impasse
sur le rapprochement de la sphère de la recherche universitaire et du terrain réel, la classe.
Car la nécessité d’articuler recherche et formation est un moyen d’impliquer et d’engager
l’enseignant praticien dans les travaux de l’enseignant chercheur. En effet, en participant
activement à sa propre formation par l’analyse et la théorisation de sa pratique professionnelle, le praticien comprend sa pratique, la formalise, la compare, l’analyse, la régule et la
fait évoluer selon les besoins de ses élèves qui peuvent être différents d’une académie à
l’autre, d’un établissement ou d’une classe à l’autre.
Si la formation des enseignants se fait aujourd’hui en France dans les IUFM, ces derniers
vont vivre l’intégration à l’université. Cette intégration est une chance à saisir pour valoriser
et légitimer la formation en FLE-FLS jusqu’ici négligée : c’est une occasion pour que les
enseignants formateurs et les enseignants-chercheurs puissent travailler ensemble et
articuler la formation théorique académique en didactique des langues et didactique du
FLE-FLS et la formation pratique sur le terrain.
Nous sommes donc tout à fait en phase avec ce que disait hier ici même Joaquim Dolz sur
le statut et le rôle des professions enseignantes et le rapport au savoir et à la recherche
(clarifier et légitimer les contenus de formation).
Former des enseignants en FLS, ce ne serait donc pas seulement dispenser des cours à
l’université d’un côté et organiser des modules didactiques en IUFM d’un autre, mais rendre
capable un professionnel de mobiliser des savoirs et des savoir-faire dans un contexte réel,
celui de la classe d’accueil d’allophones, différente d’une classe ordinaire de natifs. C’est ce
que disait Lessard en 1996 :
« Comment travailler de façon efficace en milieu universitaire sur des savoirfaire psychopédagogiques et didactiques si cela n’est pas en direct avec l’activité
de formation en milieu scolaire ? Comment concevoir une formation didactique
véritablement pratique si le didacticien n’est pas, à un moment du processus de
formation, sur le terrain des classes [...] ? Comment institutionnaliser une approche
réflexive de l’enseignement si nous dissocions formation théorique – le domaine
universitaire – et formation pratique le domaine des praticiens ? »
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J.P. CUQ, F. CHNANE-DAVIN
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IUFM Nord-Pas de Calais

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