Stratégie de rémunération – Garder le cap dans le brouillard

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Stratégie de rémunération – Garder le cap dans le brouillard
Stratégie de rémunération – Garder le cap dans le brouillard économique
Par : Normand Fafard, MBA, CRHA
Contexte
Le contexte économique actuel est comparable au brouillard. Tel un marin, on sait quand on y pénètre, mais on ignore sa
densité et le temps requis pour le traverser. Il faut utiliser une bonne boussole, éviter les récifs et garder le cap pour se
rendre à bon port. Pour plusieurs employeurs, le moment est venu d’adopter de nouvelles stratégies de gestion financière
tout en fidélisant les employés talentueux dont les services seront requis au moment de la reprise.
La rémunération, un outil à double tranchant
Dans un tel contexte, les deux fonctions de la rémunération deviennent plus évidentes. D’une part, gérée de façon
stratégique, elle devient un levier important d’attraction, de fidélisation et de mobilisation. D’autre part, elle représente
un outil majeur du contrôle des coûts fixes pour la majorité des employeurs. On pourrait donc penser que, pour réussir à
attirer, fidéliser et mobiliser les employés, il faut perdre du terrain sur le plan financier et vice versa. On pourrait aussi
croire avec raison qu’un positionnement à mi-chemin, qui consisterait à accorder à tous les employés de faibles
augmentations de salaire générant de modestes économies et contribuant peu à la capacité d’attraction, de fidélisation et
de mobilisation, entraînerait une perte sur les deux plans.
Quel parcours tracer?
La stratégie de rémunération optimale pour une entreprise est celle qui tient compte de ses caractéristiques propres ainsi
que de ses environnements interne et externe qui seront déterminés en répondant aux questions suivantes :


Quelles sont les exigences de notre modèle d’affaires en matière de recrutement, de fidélisation et de
mobilisation des employés talentueux?
 Quelle promesse (employee value proposition) voulons-nous tenir envers nos employés?
 Tous les emplois et tous nos employés ont-ils la même valeur stratégique?
Quelles étaient les caractéristiques de notre marché des talents avant la présente situation économique et qu’estce qui a changé depuis?
 Quel était notre positionnement sur ce marché? Que voulons-nous qu’il soit lorsque l’activité économique
reprendra?
La stratégie émanant d’une telle réflexion correspondra davantage au modèle d’affaires de l’entreprise, à sa capacité
financière et au positionnement recherché sur les marchés d’emploi qui l’intéressent.
Stratégies en temps de brouillard
Conserver les effectifs talentueux et assurer une gestion intelligente des coûts de main-d’œuvre sont des finalités
universelles dans le contexte actuel. On les atteindra plus en suivant une démarche où les stratégies de rémunération sont à
la fois adaptées aux besoins de l’entreprise et solidement arrimées à la promesse faite aux employés. Voici quelques
pratiques gagnantes qui se distinguent dans une très grande variété de contextes organisationnels.
Rémunération en lien avec la performance
Le succès ou la survie de l’entreprise dépendent de sa performance financière; il est donc essentiel d’établir des liens de
cause à effet entre la performance et la rémunération, soit faire en sorte que la bonne performance se traduise par un effet
favorable sur la rémunération individuelle ou collective. Les liens produisant les meilleurs résultats sont les suivants :
Performance
Rémunération
Budget d’augmentation de la masse salariale
Performance financière de l’entreprise
(capacité de paiement)
→
Taux de progression salariale annuelle
Financement des régimes de bonification
Développement des connaissances, des compétences
et de la maîtrise des fonctions
→
Taux de progression salariale annuelle
Contribution en résultats concrets et réalisation
d’objectifs mesurables
→
Valeur des régimes de bonification
Performance individuelle et rémunération différenciée
Cette stratégie a pour but de créer des écarts importants entre les employés à fort potentiel et très performants et les
autres. Conséquemment, la distribution des ressources financières limitées est concentrée sur un plus petit nombre
d’employés dont la contribution à court et à long termes est nettement supérieure à celle des autres. Ces écarts sont créés
au moyen de diverses composantes de la rémunération globale :
Taux de progression
salariale annuelle
Ratio comparatif
Taux de rémunération
variable versé
Employés à fort potentiel et très
performants [1]
De 6 % à 10 % pour une performance qui
excède nettement les attentes de l’emploi
De 105 % à 125 % du salaire cible de
l’échelle salariale
De 125 % à 200 % du taux cible de l’emploi
Autres employés
De 0 % à 2 % pour une performance qui
correspond aux attentes de l’emploi
De 95 % à 105 % du salaire cible de
l’échelle salariale
Maximum de 100 % à 110 % du taux cible
de l’emploi
Il va de soi que, dans le contexte d’une telle stratégie, on évitera des augmentations salariales égales (en %) pour tous les
employés. Quoique cette pratique soit facile à administrer et à communiquer, elle affaiblit la capacité de l’entreprise à
fidéliser ses employés très performants. En contrepartie, la mise en œuvre et la gestion soutenue de cette stratégie de
différenciation requiert du courage de la part des dirigeants et des gestionnaires.
Communiquer la valeur de la rémunération globale
Dans un contexte où les ressources financières sont limitées, il devient essentiel de communiquer à tous les employés la
valeur économique de certaines composantes et la valeur en expérience-employé d’autres composantes de la rémunération
globale.
La clarté et la fréquence des communications des dirigeants et du service des ressources humaines, la reconnaissance non
pécuniaire et la confiance exprimée à l’égard des employés sont toutes des façons d’améliorer l’expérience-employé au
cours d’une période plus exigeante.
Ne jamais perdre de vue la promesse faite aux employés
L’employeur qui aura maintenu l’essence de sa promesse envers ses employés pendant cette période difficile aura un net
avantage sur ses concurrents quand il s’agira d’attirer et de fidéliser les ressources requises au moment de la reprise. Même
si des fins d’emploi et un gel salarial ont été nécessaires pour pallier les effets de la crise, le fait d’avoir gardé le cap sur la
philosophie de gestion et sur les valeurs organisationnelles conférera à l’employeur un positionnement solide sur son marché
d’employés talentueux au moment de la reprise.
Souplesse dans l’organisation du temps de travail
Quoique moins stratégique, une organisation du travail plus souple permet des réductions de masse salariale tout en
réduisant au minimum les fins d’emploi de ressources qualifiées. Voici quelques exemples d’organisation du temps de travail
qui favorisent de tels résultats :


 emploi partagé;
horaire réduit, flexible ou compressé;
politique de congé sans solde avec règles d’admissibilité et de durée assouplies;
 télétravail;
anticipation des vacances et utilisation des heures supplémentaires accumulées.

Poursuivre la réflexion
Parmi ces stratégies de temps de crise, lesquelles seront encore optimales quand l’économie reprendra?
Normand Fafard, M.B.A., CRHA, agit à titre d’associé chez Normandin Beaudry, une firme d'experts-conseils en actuariat,
ressources humaines et communication stratégique. On peut le joindre par téléphone 514 285-1122, poste 305 et par
courriel [email protected].
[1]
Les pratiques présentées sont des exemples pour illustrer les écarts possibles.
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