Carl Maria von Weber Ouverture d`Euryanthe Robert Schumann
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Carl Maria von Weber Ouverture d`Euryanthe Robert Schumann
SAMEDI 24 MAI – 19H Carl Maria von Weber Ouverture d’Euryanthe Robert Schumann Symphonie n° 1 entracte Modeste Moussorgski Tableaux d’une exposition Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam Mariss Jansons, chef principal La tournée du RCO a été rendue possible grâce au soutien de ING direct. Coproduction Productions Internationales Albert Sarfati, Salle Pleyel. Fin du concert vers 20h50. CONCERTGEBOUW 2405.indd 1 19/05/08 10:25:17 Carl Maria von Weber (1786-1826) Ouverture d’Euryanthe, grand opéra héroïco-romantique en trois actes, sur un poème de Helmina von Chézy Allegro marcato, con molto fuoco Largo Tempo primo, assai moderato Composition : Dresde, 1822-1823. Dédié à Sa Majesté l’Empereur d’Autriche François Ier. Création : le 25 octobre 1823 au Kärtnertortheater de Vienne sous la direction du compositeur. Premières éditions : Vienne, 1824 (partition de chant)/Ernst Rudorff, Berlin, 1866 (partition complète). Fort du succès du Freischütz en 1821, qui impose Weber comme le chef de file de l’opéra romantique allemand, le célèbre impresario Domenico Barbaia, directeur du prestigieux Théâtre de la Porte de Carinthie (ou Kärtnertortheater) à Vienne, commande au compositeur une œuvre pour la saison 1822-1823. À cette occasion, Weber veut composer une œuvre d’une esthétique différente de celle du Freischütz, d’une sève moins populaire, et dont les racines vont s’alimenter dans des sources plus anciennes, appartenant au monde médiéval. La composition du livret est confiée à la poétesse Helmina von Chézy (1783-1856), qui propose un thème tiré du Roman de la violette de Gerbert de Montreuil (début du XIIIe siècle), récit qui avait déjà connu de nombreuses adaptations, notamment dans le Décaméron de Boccace et Cymbeline de Shakespeare. Le thème rejoint ceux de l’opéra à sauvetage, un genre très en vogue en Europe à la fin du XVIIIe siècle et au début du XIXe siècle : l’héroïne, Euryanthe, est accusée d’infidélité par un chevalier amoureux d’elle sans succès (Lysiart) et promise à la mort par son fiancé, qui prend dans l’opéra le nom d’Adolar ; seules les péripéties de l’action disculperont la malheureuse, entraînant la mort du traître et de sa complice Églantine. À l’origine, la preuve de l’infidélité d’Euryanthe était apportée par Lysiart sous la forme d’un détail de l’anatomie intime de l’héroïne (un signe en forme de violette sur le sein), qu’il lui avait été donné de voir grâce à la ruse d’une vieille servante qui lui avait fait assister au bain d’Euryanthe à travers un trou percé dans le mur. Cet élément de l’intrigue, trop scabreux, est remplacé par Weber par une bague ayant contenu du poison au moyen duquel Emma, la sœur d’Adolar, se suicida. Euryanthe, instruite du secret par le fantôme de la malheureuse, le confie bien imprudemment à la traîtresse Églantine, secrètement amoureuse d’Adolar et jalouse d’Euryanthe, qui n’hésite pas à retirer la bague du doigt du cadavre. Conformément au récit d’origine, Adolar emmène Euryanthe dans un lieu isolé pour la tuer. Mais un serpent monstrueux se dresse, menaçant Adolar, et Euryanthe, s’interposant, sauve les jours de ce dernier. Reconnaissant, Adolar laisse la vie sauve à Euryanthe mais l’abandonne. Le récit médiéval compte ensuite nombre de péripéties que l’opéra abrège : CONCERTGEBOUW 2405.indd 2 19/05/08 10:25:17 samedi 24 mai le roi Louis VI fait son entrée avec ses chasseurs. Il découvre Euryanthe et est convaincu de son innocence. Il la ramène en ville et rapidement les deux traîtres sont confondus. Les deux héros peuvent s’unir dans la joie générale, et le fantôme d’Emma, apaisé par les pleurs de l’innocente héroïne, trouve la paix. Les invraisemblances de l’intrigue furent dénoncées dès les premières représentations, au demeurant bien accueillies, et furent à l’origine de nombreuses coupures dans l’œuvre, rompant ainsi son équilibre originel. Mais la dramaturgie musicale de l’œuvre exerça une profonde influence sur Wagner, dont l’opéra Lohengrin (créé en 1850) exploite de façon analogue les thèmes de l’héroïne injustement accusée, du secret dévoilé et de l’opposition entre deux couples, l’un vertueux, l’autre félon. Weber déploie dans Euryanthe une ambition nouvelle : sa conception dramatique s’élargit dans de vastes ensembles musicaux englobant plusieurs numéros, et surtout, l’œuvre est entièrement chantée. La primauté du procédé lui est ravie par la Jessonda de Spohr (créée le 28 juillet 1823 à Kassel), mais les deux œuvres marquent ensemble un tournant dans l’histoire de l’opéra romantique allemand, le portant ainsi à maturité. Par ailleurs, la trame musicale exploite de façon poussée des motifs récurrents associés aux personnages, qualifiés par le musicologue Friedrich Wilhelm Jähns dans son catalogue (1871) de Leitmotive, ce qui donna naissance au concept-clé de la musicologie wagnérienne. L’ouverture fut composée en dernier lieu par le musicien : elle réorganise dans la dramaturgie d’une forme sonate des thèmes de l’opéra. L’œuvre s’ouvre par un fougueux thème introductif, en mi bémol majeur, qui instaure un climat d’héroïsme chevaleresque. Il fait place au thème énergique et passionné de l’air d’Adolar « Ich bau auf Gott » (acte I, n° 4). Le second thème de l’exposition, en si bémol majeur, cite l’air d’Adolar « O Seligkeit » (acte II, n° 12), qui met en valeur les qualités de troubadour du héros. Une transition, fondée sur de lugubres sonneries, conduit au développement, qui s’ouvre par l’évocation du spectre d’Emma, sorte de choral décoloré et lointain, confié à huit violons soli avec sourdines, souligné par la ligne tremblotante des altos en trémolos. Le parcours tonal, modulant de façon incessante et capricieuse, à partir du ton éloigné de si mineur, traduit l’errance du spectre. Cette fugace apparition est vite dissipée par un vigoureux épisode contrapuntique, annonciateur des sombres péripéties de l’action, fondé sur un élément dérivé du premier thème d’Adolar, flanqué d’un contre-sujet tortueux, tiré du second thème de l’exposition. La réexposition ne réserve guère de surprise : le deuxième thème y est ramené dans le ton principal, dans une expression exaltée, qui marque le triomphe du bien sur le mal. CONCERTGEBOUW 2405.indd 3 19/05/08 10:25:17 Robert Schumann (1810-1856) Symphonie n° 1 en si bémol majeur op. 38 I. Andante un poco maestoso – allegro molto vivace II. Larghetto III. Scherzo : molto vivace – Trio I : molto più vivace – Scherzo – Trio II – Scherzo – Coda IV. Allegro animato e grazioso – andante – a tempo Composition : Leipzig, 23 janvier-20 février 1841. Création : le 31 mars 1841 à Leipzig par l’orchestre du Gewandhaus, sous la direction de Felix Mendelssohn. Premières éditions : Breitkopf & Härtel, Leipzig, 1841 (parties séparées)/Breitkopf & Härtel, Leipzig, 1853 (partition d’orchestre). L’année 1841 marque un tournant dans la vie de Schumann : jeune marié, poussé par de nouveaux désirs, notamment celui d’une reconnaissance par le public bourgeois de Leipzig, qui s’obtient par la conquête de la prestigieuse organisation de concert du Gewandhaus, le musicien explore avec passion les ressources de l’orchestre. Jusqu’alors il s’était presque exclusivement voué au piano (malgré différents essais de compositions symphoniques ou concertantes), dans une perspective à la fois visionnaire et autobiographique, qui l’avait maintenu dans une position en marge de la vie musicale à Leipzig. L’année précédente, il s’était consacré au lied, genre intime et par définition modeste. Cet élan, vivement encouragé par Clara, porte la marque d’une évolution artistique profonde et logique : sa démarche de musicien le pousse à explorer un genre d’une manière presque exclusive, pour ainsi dire jusqu’à épuisement, puis à se tourner vers d’autres voies. Piano, lied, musique symphonique, musique de chambre l’année suivante, jusqu’aux partitions chorales et dramatiques ultérieures, son œuvre confirme sa déclaration de 1839 : « Le piano devient trop étroit pour contenir mes idées. » S’il a naguère exploité les relations entre musique et poésie, contrairement à Berlioz et Liszt il ne souhaite pas se consacrer exclusivement, dans le domaine orchestral, à la musique à programme, comme le montre l’histoire de la Symphonie n° 1. Il s’inscrit dans une lignée de compositeurs qui servent un idéal germanique de la symphonie, romantique dans son expression mais classique dans son architecture : aussi se place-t-il sous le triple patronage de Beethoven (dramaturgie), Mendelssohn (concision, recherche de simplicité et d’élégance, sérieux d’une écriture qui fait appel au contrepoint) et Schubert (lyrisme, conception de l’orchestre comme un grand ensemble de musique de chambre). Premier essai véritable et coup de maître, la Symphonie n° 1 fut conçue en quatre jours (et quatre nuits), du 23 au 26 janvier 1841, dans l’allégresse des premiers mois de mariage. Œuvre de transition, elle marque une ligne de partage des eaux entre l’« ancien » et le « nouveau » Schumann. En effet, le compositeur l’avait initialement conçue dans le cadre, qui lui était cher, de la musique à programme romantique, exploitant les affinités entre CONCERTGEBOUW 2405.indd 4 19/05/08 10:25:18 samedi 24 mai les arts, et particulièrement entre musique et poésie. Le manuscrit autographe porte des titres, désignant l’œuvre entière (« Le Printemps ») et chacun des mouvements, empruntés à un poème d’Adolf Böttger (1816-1870), poète résidant à Leipzig, important traducteur de la littérature anglaise, et futur librettiste du Paradis et la Péri. Ces titres furent retirés lors de l’édition de la partition, mais, en 1842, Schumann offrit son portrait au poète : au dos il inscrivit la formule initiale de l’œuvre, accompagnée de cette dédicace : « Début d’une symphonie, inspirée par un poème d’Adolf Böttger. Au poète, en souvenir de Robert Schumann. » La Symphonie n° 1 connut un vif succès à sa création et fut donnée régulièrement du vivant du compositeur. Irradiant une joie panthéiste, le premier mouvement, en si bémol majeur, sous-titré initialement « Frühlingsbeginn » [« Le début du printemps »], partage l’auditeur entre terre et ciel : trépidation du motif rythmique principal, répété jusqu’à l’étourdissement, accompagné d’une exubérante guirlande de doubles-croches ; appel solennel et métaphysique de l’introduction, qui correspond à la scansion des mots concluant le poème de Böttger : « Im Tale blüht der Frühling auf! » [« Dans la vallée le printemps éclate en fleurs ! »]. De ce début, Schumann disait : « La première sonnerie, je voudrais qu’elle vienne d’en haut, comme un appel au réveil ». Cette dimension spirituelle est rappelée dans le déroulement de la vaste coda, qui introduit une mélodie de choral. Le second thème de l’allegro, en fa majeur, aux inflexions délicatement populaires, est introduit par le ton de ré mineur, qui l’ombre de mélancolie. Parenthèse lyrique entre l’allegro initial et l’imposant scherzo qui lui fait suite, le larghetto en mi bémol majeur (sous-titré initialement « Abend, Idylle » [« Soir, idylle »]) déploie un chant intérieur fervent, fortement teinté de nostalgie. La mystérieuse sonnerie des trombones, à la fin, accentue le caractère crépusculaire de cette page et esquisse un arrière-plan poétique et légendaire. Rustique mais imposant, le scherzo (« Frohe Gespielen » [« Joyeux compagnons de jeux »]) en ré mineur offre la particularité de compter deux trios. Le Schumann rythmicien s’y livre à de multiples jeux d’écriture, décalages métriques et oppositions de pupitres. Dans le scherzo se forme passagèrement un tournoiement de valse. Les deux trios, plus rapides, imposent les tonalités contrastantes de ré majeur et de si bémol majeur. Après une impétueuse introduction, le finale (« Voller Frühling » [« Le printemps dans sa plénitude »]) s’organise en une forme sonate, en si bémol majeur, dominée par un allègre mouvement continu qui serpente aux cordes. D’une manière originale, le second thème, issu de l’introduction, est présenté en premier lieu en sol mineur, tonalité passagère, dans laquelle il éclate dans toute la vigoureuse rusticité de ses unissons, loin de tout académisme symphonique : il fait ensuite son apparition dans le ton convenu, en fa majeur, assagi par l’adjonction d’un contre-chant. L’orageux développement fait place à la réexposition par un épisode cadentiel qui fait chanter les cors et la flûte. La brillante coda restaure le climat dramatique du développement et l’énergie de l’introduction, dans une puissante démarche unificatrice. CONCERTGEBOUW 2405.indd 5 19/05/08 10:25:18 Modeste Moussorgski (1839-1881) Tableaux d’une exposition – Orchestration de Maurice Ravel Promenade. Allegro giusto, nel modo russico – senza allegrezza, ma poco sostenuto Gnomus : Vivo Promenade. Moderato commodo e con delicatezza Il Vecchio Castello (Le Vieux Château). Andante Promenade. Moderato non tanto, pesante Tuileries. Allegretto non troppo, capriccioso Bydlo. Sempre moderato pesante Promenade. Tranquillo Ballet des poussins dans leurs coques. Scherzino. Vivo leggiero Samuel Goldenberg et Schmuÿle. Andante Limoges - Le Marché. Allegretto vivo sempre scherzando Catacombae / Sepulcrum Romanum (Catacombes / Sépulcre romain). Largo Con mortuis in lingua mortua (Avec les morts, dans une langue morte). Andante non troppo, con lamento La Cabane sur des pattes de poules. Allegro con brio e feroce – andante mosso – allegro molto La Grande Porte de Kiev. Allegro alla breve. Maestoso. Con grandezza – meno mosso, sempre maestoso Composition : du 2 au 22 juin 1874 à Saint-Pétersbourg. Dédicace : à Vladimir Vassilievitch Stassov. Première édition : Bessel, Saint-Pétersbourg, 1886. Orchestration de Maurice Ravel : 1922. Première exécution : le 19 octobre 1922 à l’Opéra de Paris par les Concerts Koussevitsky sous la direction de Serge Koussevitsky. Première édition : Édition russe de musique, Moscou, 1929. Durée : environ 35 minutes. Œuvre emblématique de la musique russe et seule partition instrumentale substantielle de Moussorgski avec Une nuit sur le mont chauve, ce cycle écrit à l’origine pour piano est un hommage à l’architecte, aquarelliste et designer Victor Alexandrovitch Hartmann (1834-1873). Ce dernier est l’un des principaux artisans du mouvement néo-russe qui, touchant principalement l’architecture et les arts décoratifs, rejette les valeurs et les canons académiques de l’Occident et puise son inspiration dans la Russie médiévale et populaire. À la suite du décès prématuré de Hartmann, une exposition est organisée par Vladimir Stassov, importante figure de la vie culturelle pétersbourgeoise. Ce grand érudit, auparavant mentor du Groupe des Cinq (qui s’est dissout vers 1872), est le principal soutien de Moussorgski. Après la mort du musicien, il fait éditer la partition, faisant paraître en tête de chaque pièce une brève description du tableau de Hartmann correspondant. La plupart des pièces qui ont inspiré Moussorgski sont des études ou des aquarelles, réalisées par Hartmann lors d’un long voyage dans différents pays d’Europe. L’imagination puissante du musicien s’en empare, donnant naissance à une œuvre d’une écriture insolite, aux violents contrastes, qui associe des emprunts à la musique populaire à des procédés avant-gardistes. CONCERTGEBOUW 2405.indd 6 19/05/08 10:25:19 samedi 24 mai Commande du chef d’orchestre russe Serge Koussevitsky, qui avait fondé à Paris en 1921 sa société de concerts, la version orchestrée par Ravel se veut un hommage à Moussorgski mais aussi à l’orchestre de Rimski-Korsakov. Empruntant à la palette orientaliste du Groupe des Cinq des parties virtuoses pour les vents et l’emploi d’une percussion diversifiée, Ravel ne fait pas pour autant œuvre d’épigone. Il donne de la partition de Moussorgski une lecture moderne, notamment par l’utilisation d’un saxophone et d’un tuba ténor solistes. Des combinaisons de timbres et des effets, produits de l’alchimie ravélienne, mettent en lumière l’étrangeté de l’œuvre. Promenade. Ce fil conducteur subit, au fil de l’œuvre, des variations dictées par les différentes émotions ressenties par le musicien au cours de sa visite. Cet autoportrait musical évoque, sous sa première forme, la démarche pesante du musicien. La mélodie s’inspire d’une chanson traditionnelle célèbre, Slava, présentée dans un contexte archaïsant évoquant la musique chorale populaire de la Russie. Gnomus. Ce premier tableau fut inspiré par le dessin d’un casse-noisette prenant la forme d’un « gnome marchant avec gêne sur ses jambes déformées ». Le caractère fantastique et inquiétant du personnage est traduit par de constants changements de tempo et de texture, ainsi que par des harmonies ambiguës et chromatiques. Il Vecchio Castello. Faisant suite à la Promenade, ici mélancolique, ce tableau évoque « un château médiéval devant lequel se tient un troubadour ». Italienne par son rythme de sicilienne, la chanson de ce ménestrel, confiée au saxophone, est profondément russe par sa mélodie. Tuileries. Après une robuste Promenade, cette charmante pièce rappelle la tendresse et la complicité que le musicien, au caractère abrupt et difficile avec les adultes, entretenait avec les enfants, comme en témoigne l’original cycle de mélodies Les Enfantines. Bydlo. Sans transition, cette pièce ramène l’auditeur en terre slave. Le titre, emprunté au polonais, ne signifie pas, comme il l’est souvent dit, « chariot », mais « bœuf » : Stassov décrit « un chariot polonais, avec d’énormes roues, tiré par un bœuf ». À l’écrasant fortissimo initial, Ravel substitue un pianissimo suivi d’un crescendo, altérant ainsi la dramaturgie de la pièce. Cette rude évocation a été interprétée comme une symbolisation du joug sous lequel la Russie maintenait à cette époque le peuple polonais. Ballet des poussins dans leur coque. Une plaintive Promenade fait place à ce scherzo léger et virtuose, inspiré par une étude de Hartmann pour les costumes d’un ballet intitulé Trilby ou l’Elfe d’Argyle, d’après Charles Nodier, représenté en 1871 au Grand Théâtre de Saint-Pétersbourg. Samuel Goldenberg et Schmuÿle. Dans cette pièce dramatique, Moussorgski confronte deux portraits réalisés par Hartmann dans la ville polonaise de Sandomir. Le thème de Samuel Goldenberg est inspiré d’un authentique chant juif du XVIIIe siècle. Étrange et suppliant, celui de Schmuÿle déroule sa mélopée à la trompette bouchée, soutenue par deux bassons CONCERTGEBOUW 2405.indd 7 19/05/08 10:25:19 plaintifs. La virtuose superposition des deux thèmes traduit de façon éloquente le fossé séparant les classes sociales. Mar Mari chef Conc sept il a é philh à ac inter post sym nom sym en s occu ses f du C Mari Péte l’âge et so a été supp philh Mrav le pi au C il a e Swa Kara il a r Kara com de S que son dirig tour la tê d’Os de P pres Japo com Limoges – Le marché. Cette évocation brillante et volubile du caquetage des commères commence de façon plutôt conventionnelle, puis évolue, au fur et à mesure que la conversation dégénère en dispute, vers un discours de plus en plus original, fracturé de ruptures. Une coda bouillonnante emporte l’auditeur vers le tableau suivant, qui offre un contraste saisissant. Catacombae / Sepulcrum Romanum. Sommet expressif du cycle, cette méditation sur la mort, d’une nudité impressionnante, est balayée de violents clairs-obscurs d’intensité qui traduisent l’angoisse et la révolte du musicien face à l’inéluctable ; sentiment d’autant plus aigu que Moussorgski avait été témoin d’un malaise de Hartmann, signe avant-coureur de sa mort prochaine. Con mortuis in lingua mortua. Il s’agit de l’écho décoloré, vacillant, de la Promenade. La Cabane sur des pattes de poules. La célèbre sorcière des contes russes, dévoreuse d’enfants (qui vit dans une cabane montée sur pattes de poule pivotant pour faire face à sa proie), suscite chez le musicien une pièce d’une agressive modernité. Martelé et franc au début, le chromatisme omniprésent se charge d’un parfum mystérieux et maléfique dans la partie centrale, aux sonorités impalpables peuplées d’appels et de cris. La Grande Porte de Kiev. Ce finale trouve son inspiration dans une aquarelle représentant un projet pour l’érection à Kiev d’un monument destiné à commémorer l’attentat manqué contre Alexandre II, le 4 avril 1866. Surmonté d’une coupole en forme de casque, flanqué d’un clocher à bulbe, il évoque la Sainte Russie, médiévale et légendaire. Moussorgski fait retentir un hymne grandiose, au caractère un peu archaïque, et introduit entre ses différentes présentations une citation d’un chant de la liturgie orthodoxe russe, Comme tu es baptisé dans le Christ. Une volée de cloches réintroduit le thème de la Promenade, avant le dernier retour de l’hymne triomphal, exprimant ainsi la foi du musicien en la Russie éternelle. Anne Rousselin CONCERTGEBOUW 2405.indd 8 19/05/08 10:25:19 samedi 24 mai Mariss Jansons Mariss Jansons est devenu le sixième chef principal de l’Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam en septembre 2004. De 1979 à 2000, il a été le chef principal de l’Orchestre philharmonique d’Oslo, qu’il a aidé à accéder à une reconnaissance internationale. Il a ensuite occupé le poste de directeur musical de l’Orchestre symphonique de Pittsburgh avant d’être nommé chef principal de l’Orchestre symphonique de la Radio bavaroise en septembre 2003 – un poste qu’il occupe aujourd’hui parallèlement à ses fonctions à la tête de l’Orchestre du Concertgebouw. Né à Riga (Lettonie), Mariss Jansons a emménagé à SaintPétersbourg (à l’époque Léningrad) à l’âge de 13 ans. Sa mère était cantatrice et son père, le chef Arvid Jansons, a été pendant plusieurs années le suppléant du directeur de l’Orchestre philharmonique de Léningrad, Yevgeny Mravinsky. Il a étudié le violon, le piano et la direction d’orchestre au Conservatoire de la ville. En 1969, il a entrepris des études avec Hans Swarowsky à Vienne et avec Herbert von Karajan à Salzbourg. Deux ans après, il a remporté le Concours Herbert von Karajan de Berlin. Mariss Jansons a commencé à collaborer avec l’Orchestre de Saint-Pétersbourg en 1973, après que Mravinsky lui ait proposé de devenir son assistant. Depuis cette époque, il a dirigé l’ensemble lors de nombreuses tournées. Il a en outre été applaudi à la tête de l’Orchestre philharmonique d’Oslo et de l’Orchestre symphonique de Pittsburgh dans les lieux les plus prestigieux d’Europe, d’Amérique et du Japon, et notamment dans des festivals comme le Festival de Lucerne, le Festival d’Édimbourg ou les BBC Proms. Invité régulier du Festival de Salzbourg, il dispose enfin de sa propre série au Musikverein de Vienne. En tant que chef invité, Mariss Jansons s’est produit avec le Philharmonique de Berlin, le Philharmonique de Vienne, l’Orchestre symphonique de Boston, l’Orchestre symphonique de Chicago, les orchestres de Cleveland et de Philadelphie, le New York Philharmonic Orchestra, l’Orchestre philharmonique d’Israël et le London Symphony Orchestra. Ancien chef principal invité du London Philharmonic Orchestra, il a par ailleurs dirigé le concert du Nouvel An à Vienne en 2006. En plus des nombreux disques qu’il a gravés avec l’Orchestre philharmonique d’Oslo et l’Orchestre du Concertgebouw, Mariss Jansons a enregistré avec le Philharmonique de Berlin, le Philharmonique de Vienne, l’Orchestre de Philadelphie et le London Philharmonic Orchestra. Certains de ses disques ont été récompensés par des prix internationaux, dont un Prix Edison et un Grammy Award. La série qu’il a réalisée avec l’Orchestre du Concertgebouw pour son propre label, RCO Live, a quant à elle reçu un excellent accueil public et critique. Membre de la Royal Academy of Music de Londres et de la Société des Amis de la musique de Vienne, Mariss Jansons a reçu de nombreuses récompenses, parmi lesquelles la grand-croix de l’Ordre du Mérite, qui lui a été remise par le Roi Harald de Norvège en personne. En mai 2006, il a aussi été décoré de l’Ordre des Trois Étoiles, la plus haute distinction de l’État letton. Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam Quelques années après sa création en 1888, l’Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam était déjà l’un des meilleurs orchestres européens ; un orchestre « absolument magnifique, plein de jeunesse, de vigueur et d’enthousiasme », comme le déclarait Richard Strauss en 1897. Son statut d’orchestre royal date de 1988. Avec plus de 1 100 albums, CD et DVD à son actif, il est aujourd’hui considéré dans le monde entier comme un orchestre symphonique de premier plan. Le fait qu’il n’ait connu qu’un petit nombre de chefs principaux a joué un rôle décisif dans son évolution. Le caractère de l’Orchestre du Concertgebouw a été modelé par l’acoustique unique de la grande salle du Concertgebouw, par ses longues périodes de collaboration avec les six chefs principaux qu’il a connus depuis sa création et par plusieurs générations d’instrumentistes. L’Orchestre du Concertgebouw doit sa réputation à ses cordes de velours, à ses cuivres « dorés » et au timbre unique de ses bois. Il réunit aujourd’hui 120 virtuoses, chacun de ces instrumentistes perpétuant une tradition d’interprétation qui procure à l’ensemble un son et une flexibilité uniques. Pendant les cinquante années du « règne » de Willem Mengelberg, l’Orchestre du Concertgebouw a été dirigé à plusieurs reprises par des compositeurs de l’envergure de Richard Strauss, Gustav Mahler, Claude Debussy et Igor Stravinski. Des célébrités comme Béla Bartók, Serge Rachmaninov et Serge Prokofiev se sont également produites avec lui comme solistes dans leurs propres œuvres. Depuis cette époque, l’orchestre n’a jamais cessé d’entretenir ce lien avec la création contemporaine en collaborant CONCERTGEBOUW 2405.indd 9 19/05/08 10:25:20 régulièrement avec des compositeurs comme Bruno Maderna, Peter Schat, Luciano Berio, Hans Werner Henze, Luigi Nono ou John Adams. L’Orchestre du Concertgebouw a été applaudi dans le monde entier grâce à ses interprétations de la musique du romantisme tardif. Son association avec la musique de Mahler, qui date des nombreux concerts que le compositeur a dirigés en personne au Concertgebouw, a atteint des sommets à l’occasion de l’organisation des festivals Mahler de 1920 et de 1995. Bernard Haitink a par ailleurs produit une forte impression en dirigeant l’orchestre dans l’intégrale des symphonies de Mahler et dans le cadre des Matinées de Noël. Depuis qu’Eduard van Beinum a attiré l’attention de l’Orchestre sur les symphonies de Bruckner et la musique française, le compositeur autrichien fait lui aussi partie de son répertoire. En dirigeant l’orchestre lors de nombreux concerts et sur de nombreux enregistrements, Riccardo Chailly a contribué de façon significative à l’histoire de la musique contemporaine et de l’opéra. Ses interprétations de Mahler ont notamment reçu un excellent accueil public et critique. En 2004, l’arrivée de Mariss Jansons a inauguré une nouvelle ère : tout en continuant de privilégier des compositeurs comme Mahler, Bruckner et Richard Strauss, l’orchestre a commencé à se tourner vers de grands compositeurs du XXe siècle (Chostakovitch, Messiaen). Pendant ses deux premières saisons au poste de chef principal, Mariss Jansons a dirigé un répertoire qui s’étendait de Haydn et Mozart à des compositeurs contemporains néerlandais en passant par Henze (à qui il a commandé une œuvre). Le son et le répertoire de l’Orchestre du Concertgebouw ont été modelés par les nombreux chefs de renommée internationale avec lesquels il a travaillé – Arthur Nikisch, Karl Muck, Bruno Walter, Otto Klemperer, Rafael Kubelik, Pierre Monteux, Eugen Jochum, Karl Böhm, Herbert von Karajan, Georg Solti, George Szell, Carlos Kleiber, Leonard Bernstein, Colin Davis, Kurt Sanderling, Kirill Kondrachine, Carlo Maria Giulini, Kurt Masur, Lorin Maazel et Zubin Mehta, sans oublier le chef invité honoraire Nikolaus Harnoncourt. Le Concertgebouw d’Amsterdam est connu dans le monde entier pour son acoustique exceptionnelle. Dessiné par l’architecte Adolf Leonard van Gendt et officiellement inauguré le 11 avril 1888, il a été rénové à l’occasion de la construction d’une nouvelle aile dans les années 1980. Depuis plus d’un siècle, il est au cœur de la vie musicale néerlandaise. En 2006, sa fréquentation a atteint le chiffre impressionnant de 820 102 visiteurs, ce qui fait de lui la salle de concert la plus fréquentée au monde. Chef principal Mariss Jansons Chef émérite Riccardo Chailly Chef lauréat Bernard Haitink Chef invité d’honneur Nikolaus Harnoncourt Premiers violons Vesko Eschkenazy*, leader Liviu Prunaru*, leader Tjeerd Top Marijn Mijnders Ursula Schoch Marleen Asberg Keiko Iwata-Takahashi Robert Waterman Janke Tamminga Tomoko Kurita Henriëtte Luytjes Borika van den Booren Tony Rous Christian van Eggelen Maaike Aarts Nienke van Rijn Junko Naito Richard Lazar Benjamin Peled Valentina Svyatlovskaya Ferd Edith Yoko Vinc Viol God Greg Joha Fred Fred Chri Wim Yke Arth Dani Soph Chri Bene Seconds violons Henk Rubingh Caroline Strumphler Susanne Jaspers Josef Malkin Angela Davis Anna de Vey Mestdagh Paul Peter Spiering Arndt Auhagen Kirsti Goedhart Annebeth Webb Petra van de Vlasakker Herre Halbertsma Marc de Groot Cleora Waterman-Keeler Monica Grosman Mirte de Kok Eke van Spiegel Cont Thom Jan Mari Ruu Guib Rob Caro Frits Geor Flût Emil Kers Herm Mari Altos Ken Hakii Michael Gieler Gert Jan Leuverink Roland Krämer Guus Jeukendrup Jeroen Quint Pieter Roosenschoon Jeroen Woudstra Eva Smit Eric van der Wel Picc Vinc Hau Luca Alex Nico Jan 10 CONCERTGEBOUW 2405.indd 10 19/05/08 10:25:20 samedi 24 mai Ferdinand Hügel Edith van Moergastel Yoko Kanamaru Vincent Peters Violoncelles Godfried Hoogeveen* Gregor Horsch* Johan van Iersel Fred Edelen Fred Pot Chris van Balen Wim Straesser Yke Viersen Arthur Oomens Daniël Esser Sophie Adam Christian Hacker Benedikt Enzler Cor anglais Ruth Visser Contrebasses Thomas Braendstrup Jan Wolfs Mariëtta Feltkamp Ruud Bastiaanse Guibert Vrijens Rob Dirksen Carol Harte Frits Schutter Georgina Poad Contrebasson Guus Dral Flûtes Emily Beynon* Kersten McCall* Herman van Kogelenberg Mariya Semotyuk-Schlaffke Piccolo Vincent Cortvrint Hautbois Lucas Macías Navarro* Alexei Ogrintchouk* Nicoline Alt Jan Kouwenhoven Tuba Perry Hoogendijk Timbales Marinus Komst* Nick Woud* Clarinettes Jacques Meertens* Hein Wiedijk Clarinette en mi bémol mineur Arno Piters Clarinette basse Davide Lattuada Percussion Herman Rieken Gustavo Gimeno Jan Pustjens Harpes Petra van der Heide Gerda Ockers Bassons Ronald Karten* Gustavo Núñez* Helma van den Brink Jos de Lange * musiciens principaux Cors Jacob Slagter* Jasper de Waal* Fons Verspaandonk Jaap van der Vliet Peter Steinmann Sharon St. Onge Paulien Weierink-Goossen Trompettes Frits Damrow* Peter Masseurs* Hans Alting Bert Langenkamp Trombone Bart Claessens* Jörgen van Rijen* Nico Schippers Trombone basse Raymond Munnecom 11 CONCERTGEBOUW 2405.indd 11 19/05/08 10:25:21 Salle Pleyel | Prochains concerts DU mercredi 28 mai AU VENDREDI 6 juin MERCREDI 28 MAI – 20H SAMEDI 31 MAI – 20H Ludwig van Beethoven Ouverture d’Egmont Wladyslaw Szpilmann Concertino pour piano Leonard Bernstein Symphonie n° 3 « Kaddish » Claudio Monteverdi L’Orfeo – Favola in musica Livret d’Alessandro Striggio Orchestre de Paris Choeur de l’Orchestre de Paris Maîtrise de Paris John Axelrod, direction Didier Bouture, Geoffroy Jourdain, chefs de chœur Patrick Marco, chef de choeur Ewa Kupiec, piano Ana Maria Martinez, soprano Samuel Pisar, récitant version de concert d’après la production du Teatro MARDI 3 JUIN, 10H30 ET 14H30 MERCREDI 4 JUIN - 17H30 VENDREDI 6 JUIN - 14H30 SAMEDI 7 JUIN - 11H Poupées russes - conte musical Real de Madrid Les Arts Florissants, choeur et orchestre Les Sacqueboutiers de Toulouse William Christie, direction Maria Grazia Schiavo, La Musica, Euridice Dietrich Henschel, Orfeo Sonia Prina, La Messaggiera, Proserpina Luigi De Donato, Caronte Antonio Abete, Plutone Agustín Prunell-Friend, Apollo Œuvres de Nikolaï Miaskovski, Igor Stravinski, Piotr Ilyitch Tchaïkovski, Nikolaï Rimski-Korsakov, Sergueï Prokofiev, Modest Moussorgski et Maurice Ravel Concert en famille Orchestre de Paris - JMF Michael Güttler, direction Hélène Codjo, conception et écriture Laure Goujet, narration Sacha Poliakova, illustrations Les Arts Florissants sont subventionnés par le Ministère de la culture et de la communication, la Ville de Caen et le Conseil régional de Les Arts Florissants sont en résidence au Théâtre Zoltán Kodály Danses de Galanta Dmitri Chostakovitch Concerto pour violon n° 1 Igor Stravinski L’Oiseau de feu – version de 1919 Orchestre Philharmonique de Radio France Gustavo Dudamel, direction Nikolaj Znaider, violon VENDREDI 6 JUIN - 20H Basse-Normandie. Leur mécène est Imerys. de Caen. dimanche 1er juin - 11h Œuvres de Wolfgang Amadeus Mozart à Giacomo Puccini Concert en famille Orchestre National d’Île-de-France Chœur d’enfants des écoles primaires Samuel Jean, direction Arnold Schönberg Pélleas et Mélisande Alban Berg Altenberg Lieder Gustav Mahler Symphonie n° 10 (adagio) Orchestre de l’Opéra national de Paris Pierre Boulez, direction Laura Aikin, soprano Production Opéra national de Paris. Production Orchestre National d’Île-de-France. Président : Laurent Bayle Éditeur : Hugues de Saint Simon Rédacteur en chef : Pascal Huynh Correctrice : Angèle Leroy Stagiaires : Marie-Anaya Mahdadi, Émilie Moutin Imprimeur SIC | Imprimeur France Repro | Licences 7503078, 7503079, 7503080 VENDREDI 30 MAI – 20H Maquettiste : Elza Gibus Mécène de l’art de la voix partenaires média Salle Pleyel CONCERTGEBOUW 2405.indd 12 19/05/08 10:25:21