Espace, corps, communication
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Espace, corps, communication
Sous la direction de Alain Mons Espace, corps, communication L’Harmattan L’Harmattan Hongrie L’Harmattan Italie 5-7, rue de l’École-Polytechnique 75005 Paris (France) Hargita u. 3 1026 Budapest (Hongrie) Via Bava, 37 10214 Turin (Italie) 2004 MEI « MÉDIATION & INFORMATION ». Revue internationale de communication UNE « REVUE-LIVRE ». — Créée en 1993 par Bernard Darras (Université de Paris I ) et Marie Thonon (Université de Paris VIII), MEI « Médiation et information » est une revue thématique bi-annuelle présentée sous forme d’ouvrage de référence. La responsabilité éditoriale et scientifique de chaque numéro thématique est confiée à une Direction invitée, qui coordonne les travaux d’une dizaine de chercheurs. Son travail est soutenu par le Comité de rédaction et le Comité de lecture. UNE « REVUE-LIVRE » INTERNATIONALE. — MEI « Médiation et information » est une publication internationale destinée à promouvoir et diffuser la recherche en médiation, communication et sciences de l’information. Onze universités françaises, belges, suisses ou canadiennes sont représentées dans le Comité de rédaction et le Comité scientifique. UN DISPOSITIF ÉDITORIAL THÉMATIQUE. — Autour d’un thème ou d’une problématique, chaque numéro de MEI « Médiation et information » est composé de trois parties. La première est consacrée à un entretien avec les acteurs du domaine abordé. La seconde est composée d’une dizaine d’articles de recherche. La troisième présente la synthèse des travaux de jeunes chercheurs. Monnaie Kushana, représentation de Miiro Source : Hinnels, J., 1973. Persian Mythology. Londres : Hamlyn Publishing Group Ltd. Médiation et information, tel est le titre de notre publication. Un titre dont l’abréviation M E I correspond aux trois lettres de l’une des plus riches racines des langues indo-européennes. Une racine si riche qu’elle ne pouvait être que divine. C’est ainsi que le dieu védique Mitra en fut le premier dépositaire. Meitra témoigne de l’alliance conclue entre les hommes et les dieux. Son nom évoque l’alliance fondée sur un contrat. Il est l’ami des hommes et de façon plus générale de toute la création. Dans l’ordre cosmique, il préside au jour en gardant la lumière. Il devient Mithra le garant, divin et solaire pour les Perses et il engendre le Mithraïsme dans le monde grec et romain. Retenir un tel titre pour une revue de communication et de médiation était inévitable. Dans l’univers du verbe, le riche espace sémantique de mei est abondamment exploité par de nombreuses langues fondatrices. En védique, mitra signifie “ami ou contrat”. En grec ameibein signifie “échanger” ce qui donne naissance à amoibaios “qui change et se répond”. En latin, quatre grandes familles seront déclinées : mutare “muter, changer, mutuel…”, munus “ q u i appartient à plusieurs personnes”, mais aussi “cadeau” et “communiquer”, meare “passer, circuler, permission, perméable, traverser…” et enfin migrare “changer de place”. © Auteurs & Éditions de l’Harmattan, 2004 ISBN : 2-7475-7576-4 Direction de publication Bernard Darras Rédaction en chef Marie Thonon Édition Pascal Froissart Secrétariat de rédaction Gisèle Boulzaguet Comité scientifique Jean Fisette (UQÀM, Québec) Pierre Fresnault-Deruelle (Paris I) Geneviève Jacquinot (Paris VIII) Marc Jimenez (Paris I) Gérard Loiseau (CNRS, Toulouse) Armand Mattelart (Paris VIII) J.-P. Meunier (Louvain-la-Neuve) Bernard Miège (Grenoble) Jean Mouchon (Paris X) Daniel Peraya (Genève) Comité de rédaction Dominique Chateau (Paris I) Bernard Darras (Paris I) Pascal Froissart (Paris VIII) Gérard Leblanc (École nationale supérieure « Louis-Lumière ») Pierre Moeglin (Paris XIII) Alain Mons (Bordeaux III) Jean Mottet (Tours) Marie Thonon (Paris VIII) Patricio Tupper (Paris VIII) Guy Lochard (Paris III) Correspondants Robert Boure (Toulouse III) Alain Payeur (Université du Littoral) Serge Proulx (UQÀM, Québec) Marie-Claude Vettraino-Soulard (Paris VII) Les articles n’engagent que leurs auteurs ; tous droits réservés. Toute reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de son auteur ou de ses ayants droits, est illicite. Université de Paris VIII UFR-SAT de communication, Revue MEI « Médiation et information » 2, rue de la Liberté 93526 Saint-Denis cedex 02 (France) Tél. & fax : 33 (0) 1 49 40 66 57 Courriel : [email protected] Revue publiée avec le concours du Centre national du livre Illustration de couverture : « Lundi 29 mai », in Jean-Louis Jacopin, 2004. Urbano (éphémérides). Manuscrit. (Reproduit avec l’aimable autorisation de l’auteur.) Espace, corps, communication Présentation Alain Mons * Université de Bordeaux III (« Michel-de-Montaigne ») L’agencement entre les espaces et les corps dans une société dite de “communication” engendre des compréhensions conceptuelles et sensibles renouvelées d’une multiplicité singulière. Telle était l’interrogation de départ à laquelle les auteurs de ce numéro de MEI ont bien voulu contribuer. Façon de souligner aussi que les questions de l’espace et du corps en leur couplage, ou par leur télescopage, font partie du champ de la communication. Il s’agissait donc d’appréhender nos espaces contemporains à travers la disposition des corps, avec leurs déplacements ou emplacements. Il s’agissait de saisir les corps dans leur relation au Dehors, à des lieux, à des objets, à des médias, configurant la spatialité. Ceci dans un contexte de mise en circulation généralisée des hommes, des images, des technologies, des formes, favorisé par toutes les possibilités de transport d’aujourd’hui. M. Merleau-Ponty a écrit : « Il ne faut donc pas dire que notre corps est dans l’espace ni d’ailleurs qu’il est dans le temps. Il habite l’espace et le temps » 1… Cela veut dire pour le phénoménologue que le corps embrasse l’espace, que celui-ci n’a de sens que par rapport à celuilà, et que je prends conscience de mon corps dans une relation à l’espace où il se “situe” tant bien que mal. Alors l’espace n’existe que “perçu” par un corps sensitif. Tous ces paramètres ont été parcourus par les textes de ce numéro de différentes façons. À partir de la réception de ces derniers trois grands axes, ils se sont esquissés puis confirmés comme spontanément. D’abord un ensemble d’articles concerne l’espace urbain et ses paradoxes. Avec la déambulation, les marcheurs de la ville font l’objet de recherches pointues (Sonia Lavadinho, Yves Winkin). A contrario, l’immobilité de certains corps dans la cité vient contrecarrer l’impératif des flux, comme le dit finement Alain Gauthier. Certains lieux sont interrogés de façon singulière, comme les cimetières (Patrick Baudry) ou la bande dessinée avec Tintin qui engendre un territoire de sens, comme le remarque Pierre * 1 [email protected] Maurice Merleau-Ponty. Phénoménologie de la perception. Paris, Gallimard, coll. « Tel », 1945, p. 162. 1 MEI « Espace, corps, communication », nº 21, 2004 Fresnault-Deruelle. Aussi, les images matérielles et les images mentales viennent à se confondre à travers les expériences de circulation spatiales ou artistiques (Alain Mons). Un deuxième axe se dégage avec l’espace du virtuel et ce que le corps y devient, mettant en branle des processus complexes de couplage (JeanMax Noyer) dont les sciences sont l’enjeu, notamment avec les corps artificiels proliférant des technologies (Marcin Sobieszczanski) et les corps réels enchâssés dans des réalités virtuelles (Alain Bouldoires). Parallèlement, la question des lieux décidément inépuisable vient hanter tous ces dispositifs, notamment avec le mur et ses métamorphoses électroniques (comme le rappelle Norbert Hillaire). Le troisième axe de textes concerne l’esthétique de notre monde, et entre en résonance avec ce qui précède. Ainsi l’Otsuka Art Museum au Japon dont parle François Seguret, dégageant les figures ironiques de notre culture dans la scénographie virtuelle du musée même. Avec le cinéma, le corps est transformé par le morphing à l’encontre d’un corps magique qu’incarnait Buster Keaton (Olivier Jeudy). Justement il s’agit de repérer le tracé de corps éperdus que nous offrent les œuvres de Bacon ou d’Artaud (Alain Milon) à travers des cartes transformables. Or c’est dans la chambre que tout finit, comme lieu ouvert et fermé où les corps se réfugient dans la pénombre, dans le murmure, décrit poétiquement et philosophiquement par Benoît Goetz. Les trois articles des doctorantes dans la rubrique « Hypothèses » recoupent absolument ces domaines de l’espace urbain, du virtuel, de l’esthétique, des images, avec la photographie sur des corps de ville (Laetitia Devel), la vidéo de Bill Viola suspendant le corps (Frédérique Seyral), ou bien l’anonymat urbain et sa circulation, son entre-voir (Anne Jarrigeon). Je remercie chaleureusement la philosophe Anne Cauquelin et l’anthropologue François Laplantine pour leurs entretiens substantiels à partir de notre motif. Les questions de l’altérité, de la singularité, de la fragilité, de l’imperceptible, de l’inachèvement, y sont abordées avec une grande liberté et pertinence par rapport à notre thème, chacun à sa façon, remettant en cause les découpages rigides et les clôtures mentales… Ces textes et entretiens font apparaître une transversalité profonde entre des approches anthropologiques, communicationnelles, esthétiques, philosophiques, et qui devient évidente dès que l’on met en relation les phénomènes de la contemporanéité et de ses contrastes. 2