utilite du dakin cooper stabilise dans les infections

Transcription

utilite du dakin cooper stabilise dans les infections
UTILITE DU DAKIN COOPER STABILISE DANS
LES INFECTIONS MAXILLO-FACIALES ET
STOMATOLOGIQUES
K.E. KONAN*
INTRODUCTION
De par sa situation anatomique et physiologique, la cavité
oro-pharyngée est l’un des sites les plus septiques du corps
humain ; elle contient une flore microbienne très dense et
très variée.
Plus de (300) trois cents espèces ont été jusqu’à présent
répertoriées.
Les espèces habituellement impliquées dans les infections
bucco-dentaires appartiennent à la flore endogène de la
cavité orale, comme l’ont montré de nombreux travaux [9].
En 1998, la pathologie infectieuse de la face et de la cavité
buccale a représenté environ 30,15 % de l’ensemble des
consultations au service de stomatologie et de chirurgie
maxillo-faciale du CHU de Treichville.
La plupart de ces infections ont un pronostic assez sévère
du fait, soit d’une prise en charge tardive, soit de l’utilisation en monotherapie des anti-inflammatoires.
En effet, 82,35 % des décès constatés en 1998 dans le
service sont dus à des pathologies infectieuses notamment
aux cellulites gangreneuses et diffuses de la face [9].
La prise en charge de nos patients en infectiologie a donc
subi une nouvelle orientation, d’abord par une étude visant
la configuration bactériologique des infections oro-cervico
maxillo faciale. C’est-à-dire le profil bactériologique de
ces infections. Cette étude nous a permis d’ajuster notre
prise en charge des infections bucco-dentaires et maxillofaciales.
Dans cette prise en charge, en dehors de l’antibiothérapie
adaptée à l’antibiogramme, il nous est paru opportun et
intéressant d’évaluer l’efficacité des solutions antiseptiques
locales utilisés pour la détersion des plaies infectées qui
sont fréquentes dans notre pratique quotidienne.
A ce titre, grande a été notre satisfaction quant à l’utilisation du Dakin Cooper stabilisé localement pour la désinfection de multiples infections habituellement lentes à
guérir.
METHODOLOGIE
Notre étude est prospective allant d’avril 2000 à juillet
2000 soit une durée de 4 mois.
Elle a été effectuée dans le service de stomatologie et de
chirurgie maxillo-faciale du CHU de Treichville.
Cette étude est purement clinique, et basée sur les constatations faites quant à l’efficacité du Dakin Cooper stabilisé
comparativement aux autres antiseptiques locaux utilisés
antérieurement à cette étude.
Inclusion
Nos patients ont tous présenté une pathologie infectieuse
de la sphère oro-maxillo-faciale avec une participation soit
purulente, soit nécrotique ou encore gangreneuse.
Ces patients n’ont pas reçu de traitement antiseptique local
antérieur à notre prise en charge.
Tous (50 patients) ont bénéficié d’une antibiothérap i e
adaptée à l’antibiogramme et ont reçu comme antiseptique
local du Dakin Cooper stabilisé.
Ils ont reçu comme traitement local par Dakin Cooper
stabilisé en deux applications par jour.
Des prélèvements bactériologiques ont été effectués à J0
avec antibiogramme et après le constat clinique de la
propreté de la lésion si cela s’avérait nécessaire (cas d’une
éventualité de greffe de peau ou de lambeau dans un but de
chirurgie réparatrice).
Le délai clinique de l’arrêt de la suppuration ou de la persistance de tissus nécrotiques ou gangrenés était, jusqu’à
cette étude, avec les autres antiseptiques de 21 jours au
minimum.
Exclusion
Tous les autres patients ayant bénéficié d’un traitement
* Docteur, Chef de clinique-Assistant en Chirurgie maxillo-faciale
CHU de Treichville - BP V 3 - Abidjan - Côte d’Ivoire.
Médecine d'Afrique Noire : 2000, 47 (12)
K.E. KONAN
529
local autre que le Dakin Cooper stabilisé ou sans antibiogramme préalable.
LES CAS CLINIQUES
Les 50 (cinquante) patients recrutés sont repartis comme
suit :
- 33 de sexe masculin,
- 17 de sexe féminin.
purulentes au Dakin Cooper stabilisé.
Les plaies traumatiques et pertes de substances suppurées
ont bénéficié d’un parage sous anesthésie générale avec
b ro s s age des lésions avec la solution de Dakin Cooper
stabilisé. Le délai de constatation clinique satisfaisante
maximum a été de 21 jours.
Tableau 1
Cocci gram positif
La moyenne d’âge était de 21 ans (3 à 56 ans).
- 6 ont présenté un NOMA frais (à la phase aiguë),
- 11 ont présenté une cellulite circonscrite suppurée,
- 4 ont présenté une cellulite gangreneuse localisée,
- 10 ont présenté une cellulite diffuse de la face et du
thorax,
- 19 ont présenté des plaies ou des pertes de substances
post-traumatiques sur-infectées dont 3 ostéites mandibulaires,
- 2 de nos patients étaient diabétiques connus et traités en
médecine interne.
RESULTATS
2 - Evolution clinique
%
25
50
Streptocoques
Gemella morbillarum
1
2
S. non groupables
18
36
S. groupables
2
4
. Groupe C
3
6
. Groupe G
1
2
Enteroccus faecalis (+)
1
2
Staphylocoques
5
10
S. aureus
3
6
S. coagulase (-)
2
4
1. Bactériologie
Les résultats bactériologiques sont exposés sur le tableau 1.
Ils concernent les prélèvements effectués à J0.
A la guérison, 31 patients ont fait l’objet de prélèvements
bactériologiques de contrôle, il s’agit des patients dont les
lésions nécessitaient une réparation chirurgicale soit par
greffe de peau soit par des lambeaux loco-régionaux.
Aucun nouveau germe n’a été mis en évidence. La durée
minimale du traitement local a été de 10 jours. Le délai
maximum étant 21 jours.
Le relais a été pris avec les tulles d’antibiotiques ou de
corticoïdes pour faire soit bourgeonner la plaie soit de
réduire le bourgeonnement.
Effectif
Bacilles gram négatif
Entérobactéries
8
16
Klebsiella pneumoniae
4
4
Escherichia coli
1
2
Citrobacter diversus
1
2
Providencia stuartii
1
2
Salmonella enteritidis
1
2
7
14
Acinetobacter baumanii
3
6
Acinetobacter sp.
1
2
Haemophilus influenzae (b)
1
2
Pseudomonas aeruginosa
1
2
Pseudomonas sp.
1
2
4
8
Non entérobactéries
Association de bactéries
La satisfaction clinique était basée soit sur l’aspect rouge
«Jambon cru» de la plaie dans les cas de perte de substance
[3] ou de Noma, soit sur l’absence totale d’écoulement de
pus voire de sérosités dans les cellulites suppurées.
Toutes les cellulites circonscrites suppurées ont tari en
10 jours (maximum) après aspiration drainage des poches
Médecine d'Afrique Noire : 2000, 47 (12)
2 germes
3 - Quantité de Dakin Cooper stabilisé
- les cellulites suppurées : en moyenne 10 fl. de 250 ml par
patient soit 1 flacon par jour (2 fois),
UTILITE DU DAKIN COOPER…
530
- le Noma : en moyenne 10 fl. de 250 ml en 10 jours par
patient,
- les plaies suppurées et les pertes de substance : en
moyenne 20 fl. par patient en 15 à 21 jours.
4 - Tolérance
Il n’a pas été signalé ou constaté d’effets gênants lors de
cette étude. Même en quantité importante soit 125 ml par
séance pour un pansement de Noma à la phase de chute
d’escarres chez des enfants de moins de 5 ans n’a pas
p roduit d’effets néfastes comme mentionnés avec les
produits iodés.
DISCUSSION
Les pathologies rencontrées dans notre étude n’ont aucun
rapport avec le sexe. Par contr e, le Noma est une pathologie
de la tendre enfance et en rapport avec la malnutrition, les
parasitoses et les fièvres éruptives (rougeole) [5, 10].
Cette pathologie assez mutilante est encore fréquente dans
nos régions (maladie de la pauvreté !).
La prise en charge du Noma est multidisciplinaire allant du
Pédiatre au Chirurgien réparateur Maxillo-Faciale en passant pas les bactériolo gistes. La phase la plus spectaculaire
du traitement revient au chirurgien maxillo-facial qui doit
re fa i re l’esthétique du patient. Mais avant, il faut une
stérilité du site receveur de la greffe ou du lambeau. D’où
l’importance de la prise en charge des lésions dès leur inst a l l ation avec un antiseptique puissant utilisable sans
modération. C’est à ce niveau que le Dakin Cooper stabilisé nous a donné entière satisfaction.
Sur les 50 patients, aucune surinfection n’a été notée et le
délai maximum de guérison a été de 21 jours (minimum
10 jours).
Ce gain de temps, comparat ivement aux constat at i o n s
antérieures avec d’autres antiseptiques locaux (minimum
21 jours), est une donnée importante dans la prise en
charge des patients.
Le Dakin Cooper stabilisé, par son action bactéricide évidente nous a permis de réduire le délai d’hospitalisation
des infections maxillo-faciales et par ricochet faire une
économie de santé à nos populations.
Tous les patients ont été revus, certains ont été opérés (11
patients) de séquelles de Noma ou de réparation cutanée
(par greffe ou lambeau) avec des résultats excellents.
Les patients diabétiques ont eu les mêmes résultats que les
autres avec, bien entendu, une stabilisation de la glycémie.
CONCLUSION
Le Dakin Cooper stabilisé, solution d’hy p o ch l o rite de
Sodium à 0,5 %, associé à une bonne antibiothérapie guidée par un antibiogramme est une pièce maîtresse dans la
prise en charge des «infections ouvertes» de la sphère oroc e rv i c o - m a x i l l o - fa c i a l e. Cliniquement et bactéri o l ogi quement son action est rapide, efficace, et bien tolérée.
C’est un produit qui nous permettra de faire une véritable
économie dans le coût de la santé. Car paradoxalement les
infections touchent plus les patients démunis qui devront
payer très cher pour leurs soins.
BIBLIOGRAPHIE
1 - ACHARD JL
Révision accélérée en Odonto-Stomatologie.
Edition Alaoine 365P. 1998.
2 - ADOU A., ASSA A., ANGOH Y., GADEGBKU S.
Les antibiotiques en Odonto-Stomatologie et chirurgie maxillo-faciale.
Enseignement post-universitaire, déc. 1988, Yamoussoukro.
3 - ADOU OI ADOU
Cellulites diffusées et anti-inflammatoires.
Thèse de Médecine mai 1997 - Abidjan.
4 - ASSA A.
Les cellulites péri-maxillaires en Côte d’Ivoire : Aspects cliniques et
statistiques à propos de 276 cas.
Revue d’Odonto-Stomatologie Tropicale, Tome XII, 1989.
5 - ASSA A., GADEGBEKU S., ANGOH Y.
Contribution au traitement des séquelles de Noma.
Annales de l’Université Nationale de Côte d’Ivoire Série B (Méd.) Tome
XXI, 1981.
6 - BOY-LEFEVRE ML., ROGER Y., SEBALD M.
Anaérobies et pathologies bucco-dentaires.
Editions Médicales R-P Specia. janvier 90, 127 P.
7 - CERNEA P.
Traitement des cellulites d’origine dentaire.
Encyclopédie Méd. Chir. Stomatologie, 22037, D10, 5 -1952 - 8P.
8 - CHIKHANI L., GUILBERT F.
Soins post-opératoires en stomatologie et chirurgie maxillo-faciale.
Encyclopédie Méd. Chir. Stomatologie 22077 - A10, A 11- 1953 - 10 P.
9 - KOUAME BCK.
Profil bactériologique des infections bucco-dentaires en stomatologie et
chirurgie maxillo-faciale (CHU Treichville).
Thèse Méd. juillet 1999 Abidjan.
10 - MONTANDON D.
Traitement des séquelles de Noma.
Encycl. Méd. Chir. Stomatologie 22050, T10,1993,4 P.
Médecine d'Afrique Noire : 2000, 47 (12)