lutte contre la pauvrete et genre au mexique : les femmes du

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lutte contre la pauvrete et genre au mexique : les femmes du
Université Lyon 2
Institut d’Etudes Politiques de Lyon
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET
GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES
DU PROGRAMME OPORTUNIDADES EN
ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
Sandra Bursi
Séminaire « Développement et développement durable en Amérique latine ».
Directeur de recherche : Jacky Buffet
er
Soutenance : 1 septembre 2008.
Jury : Jacky Buffet, maître de conférences de Sciences économiques à l’Institut d’études politiques de
Lyon et David Garibay, maître de conférences de science politique à l’université Lumière Lyon-2.
Table des matières
Remerciements. . .
Introduction . .
Partie 1 : autonomie, femmes et developpement. . .
Chapitre 1 : Quand le développement s’intéresse aux femmes. . .
I/ Historique des différentes approches du développement. . .
II/ Développement, politiques de lutte contre la pauvreté et genre : le cas du
Mexique. . .
Chpaitre 2. Autonomie : définitions et cadre d’analyse. . .
I/ La conception libérale de l’autonomie. . .
II/ Critiques féministes de la conception libérale de l’autonomie. . .
III/ A la recherche d’indicateurs concrets de l’autonomie. . .
Partie 2. Autonomie : Le cas des femmes Oportunidades. . .
Chapitre 1 : Méthodologie. . .
I/ Hypothèses et variables d’étude. . .
II/ Méthodologie propre à chaque hypothèse. . .
Chapitre 2 : Résultats. . .
I/ Hypothèse 1. . .
II/ Hypothèse 2. . .
III/ Hypothèse 3. . .
Chapitre 3 : Discussion. . .
I/ Coresponsabilités et autonomie au niveau individuel et familial. . .
II/ Coresponsabilités et autonomie au niveau communautaire. . .
III/ Les coresponsabilités et l’utilisation du temps des femmes membres. . .
Conclusion . .
Bibliographie . .
« Genre et développement ». . .
Lutte contre la pauvreté au Mexique: . .
Autonomie: . .
Documents officiels du programme. . .
Documents d'évaluation. . .
Questionnaires et Données statistiques . .
Annexes . .
Annexes n°1 : Questionnaire ENVIT. . .
Annexes n°2 : Les approches théoriques concernant les femmes et le
développement. . .
L’approche « Women In Development » (WID). . .
L’approche « Women And Development » (WAD). . .
L’approche « Gender and Development » (GAD) . .
Annexes n°3 : Tests statistiques. . .
Test ANOVA . .
Test du khi². . .
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Résumé . .
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Remerciements.
Remerciements.
Je tiens tout particulièrement à remercier Jacky Buffet, mon directeur de recherche, pour ses
précieux conseils et l’intérêt porté à mon sujet d’étude.
Je remercie également David Garibay d’avoir accepté d’être membre du jury et pour le temps
qu’il consacrera à la lecture de mon travail.
Merci à la Secretaria de Desarrollo Social et au programme Oportunidades de m’avoir permis
d’accéder aux résultats des enquêtes d’évaluation.
Enfin, j’exprime ma plus profonde gratitude à Lise et Thibaut pour tous ces moments
d’échange, de réflexion mais aussi de détente, bien nécessaire en période de recherche.
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LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
Introduction
Selon le rapport annuel du PNUD de 2008, 1,2 milliard de personnes vivent actuellement en
situation d’extrême pauvreté c'est-à-dire avec un dollar ou moins par jour pour vivre. Parmi
ces personnes, 70% sont des femmes.
1
En 2007, selon le CONEVAL , le Mexique comptait 105 millions d’habitants parmi
lesquels 44.7 millions se trouvaient en situation de pauvreté de patrimoine c'est-à-dire
qu’ils ne disposaient pas de revenu suffisant pour couvrir leurs besoins basiques en
alimentation, santé, habitation, habillement, éducation et transport public. De ces 44.7
millions de personnes en pauvreté patrimoniale, 21.7 millions souffrent de pauvreté de
capacités car ils ne peuvent pas satisfaire leurs besoins basiques en alimentation, santé et
éducation. Parmi ces personnes, 60% sont des femmes.
Les chiffres de la pauvreté au niveau mondial et au Mexique nous montrent bien que
les femmes sont plus touchées par la pauvreté. La pauvreté semble donc avoir une plus
grande incidence en fonction du sexe et plus particulièrement en fonction du « genre ».
Le genre renvoie aux différences socialement construites entre hommes et femmes qui
expriment les différences biologiques qui existent entre les deux sexes. Le genre est
donc une construction sociale qui se traduit par un ensemble de règles, coutumes et
pratiques qui régissent les relations homme/femme et définissent leurs rôles, obligations et
responsabilités. Les deux genres ainsi distingués ne sont pas valorisés de la même façon
et ne bénéficient pas des mêmes opportunités. En découle alors des inégalités de genre
c'est-à-dire une série d’inégalités injustifiées, entre hommes et femmes, qui sont véhiculées
2
et confirmées par les lois et règles, explicites ou implicites, de la société.
Ainsi, les femmes, qui de manière générale sont en situation de désavantage dans
la société, le sont encore plus en situation de pauvreté. Les inégalités de genre ainsi que
les inégalités relatives à l’appartenance ethnique, à la classe ou à la génération entrent
en interaction, et rendent les femmes plus vulnérables à la pauvreté et plus longtemps
prisonnières de ce processus. Au Mexique, les normes sociales et culturelles confinent les
femmes à la sphère domestique ou à des emplois sans rémunération ou précaires. Elles se
voient ainsi nier l’accès aux opportunités éducatives, d’emploi et souvent de santé. Elles se
retrouvent donc en situation de plus grande pauvreté, et ce, de façon plus durable.
Le programme Oportunidades, crée en 1997 par le gouvernement mexicain sous le
nom de Progresa, part du constat que
« Les familles qui vivent en condition de pauvreté de capacités affrontent
quotidiennement, beaucoup plus que d’autres groupes sociaux, de multiples
obstacles pour mettre en œuvre les actions qui leur permettraient de surmonter
leur condition. Le programme Oportunidades cherche à promouvoir les capacités
individuelles et collectives qui permettraient aux familles de rompre avec
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Consejo Nacional de Evaluación de la Política de Desarrollo Social
KABEER, Naila. Intégration du genre à la lutte contre la pauvreté. p 1 à5.
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Introduction
la transmission intergénérationnelle de la pauvreté et accéder, ainsi, aux
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opportunités qu’offre le développement en condition de plus grande équité ».
Pour ce faire, le programme agit dans trois domaines : l’éducation, la santé et l’alimentation,
et place au centre de son fonctionnement les femmes et les mères de famille car celles-ci
sont, plus que les hommes, impliquées dans le bien être de leur famille.
En matière d’éducation, Oportunidades permet la distribution de bourses scolaires
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aux enfants, du primaire jusqu'à la preparatoria . Le montant de ces aides, distribuées
tous les deux mois, est calculé de manière à compenser le revenu que représentait le
travail des enfants, et augmente aussi avec le niveau d’étude. Dans le domaine de la
santé, une attention particulière est apportée à toute la famille. Chaque membre doit se
rendre à des rendez-vous de dépistage de certaines maladies ainsi qu’à des discussions de
sensibilisation et de prévention autour de grands thèmes de la santé. Quant à l’alimentation,
le programme fournit des suppléments nutritionnels aux membres les plus vulnérables de la
famille (femmes enceintes, enfants). Ainsi, le programme entend en finir avec la dénutrition,
réduire la mortalité infantile et maternelle et plus généralement améliorer la santé de tous
les membres de la famille. Oportunidades permet aussi à ces membres de bénéficier d’un
accès à l’épargne et au crédit. Notamment, grâce à l’initiative Jovenes con Oportunidades,
le programme permet aux jeunes en fin de scolarité d’ouvrir un compte épargne et leur
fournit une aide financière pour réaliser leurs projets. Enfin, avec la composante Adultos
mayores, Oportunidades fournit une aide financière aux membres des familles bénéficiaires
de plus de 70 ans.
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Toutes ces aides sont complétées par une aide plus générale donnée directement aux
mères de familles, tous les deux mois. Elle permet de couvrir une partie des besoins en
alimentation et des frais relatifs à la scolarisation des enfants (fournitures, uniformes).
L’attribution de ces aides se base sur le concept de coresponsabilité, c'est-à-dire
que leur distribution est conditionnée par l’engagement des familles bénéficiaires et plus
précisément des mères de famille. Cette pratique permet, d’une part, aux membres des
familles de tirer pleinement profit des effets du programme et, d’autre part, les intègre
activement à la réalisation des objectifs.
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Ainsi, les aides sont conditionnées par l’assistance scolaire des enfants et par la
participation des membres de la famille à la composante santé du programme. Ils doivent
assister aux rendez vous programmés par les dispensaires, participer au Paquete Esencial
7
Basico et aux réunions éducatives mensuelles. Le programme ayant développé son action
autour du rôle des mères de famille, il leur incombe la charge des coresponsabilités. En effet,
les mères de famille reçoivent directement l’aide financière et en sont responsables. Elles
veillent donc à ce que les coresponsabilités soient réalisées. Ainsi, les mères de familles
se rendent au dispensaire pour assister à leurs rendez-vous et réunions éducatives et y
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Programa Institucional Oportunidades 2002- 2006. p 48.
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Equivalent du lycée.
Environ 185 pesos par mois. Montant réévalué tous les six mois en fonction de l’inflation.
Les enfants doivent au minimum assister à 85% des classes pour recevoir une bourse et les autres aides financières qu’offrent
le programme.
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Paquete Esencial Basico de Servicios de Salud : Actions préventives et de détection des problèmes de santé, réalisées pour
chaque membre de la famille de manière gratuite au travers de rendez vous programmés.
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LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
amènent aussi leurs enfants. Elles les conduisent aussi très souvent à l’école pour être sur
que ceux-ci y assistent.
Le programme Oportunidades est destiné aux foyers en condition de pauvreté de
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capacité habitant en zone rurale et à partir de 2002, en zone urbaine . Ils sont selectionnés
de la façon suivante :
Dans un premier temps, on sélectionne les localités rurales et urbaines les plus
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marginalisées grâce à un indice de marginalité , puis on s’assure de l’accès aux services
scolaires et de santé, nécessaires au bon fonctionnement du programme. Ensuite, à
l’intérieur des localités sélectionnées, il est demandé aux familles de répondre à des
enquêtes (Encuestas de caracteristicas socioeconomicas de hogares (ENCASEH) relatives
à leur revenu et conditions de vie. Des points leur sont, ensuite, attribués selon ces
caractéristiques et déterminent si elles peuvent bénéficier du programme. Quand elles sont
déclarées éligibles, il revient aux familles de faire la démarche d’inscription auprès des
bureaux du programme les plus proches. En 2005/2006, le programme comptait 5 millions
de familles bénéficiaires, soit quatre familles sur cinq en condition de pauvreté de capacité.
Il est à ce jour le plus grand programme de lutte contre la pauvreté mis en place au Mexique.
Une particularité importante à souligner est que chaque année les résultats du
programme et le respect des règles d’opération sont évalués par des organismes
gouvernementaux et indépendants à partir des enquêtes Encelurb pour les zones urbaines
et Encel pour les zones rurales. Il existe, donc, une littérature très abondante des effets,
souhaités ou non du programme sur ces trois principaux axes d’action (éducation, santé
et alimentation) et sur des thématiques annexes telles que les relations communautaires
ou familiales.
Toutes ces caractéristiques font du programme Oportunidades un programme innovant
et très complet. A ce propos, en 2003, à l’occasion de l’ouverture d’un forum d’analyse du
programme, le président de la Banque Interaméricaine de Développement (BID), Enrique
Iglesias, présenta Oportunidades comme « le modèle de lutte contre la pauvreté pour
l’Amérique latine et le monde». Il souligna l’importance de son action focalisée sur la
famille et plus précisément sur les femmes qu’il définit comme « les administratrices de la
pauvreté ». Ainsi, comme reconnaissance de ses bons résultats, le programme se vit offrir
un prêt de mille milliards de dollar. En 2007, la BID félicite une fois de plus Oportunidades
et encourage d’autres pays d’Amerique latine à l’adopter. Oportunidades représente, pour
les organisations internationales, le modèle à suivre en matière de lutte contre la pauvreté
et constitue, à cet égard, un intéressant sujet d’étude.
Mon travail traitera de la perspective de genre du programme. En effet, Oportunidades
cherche plus particulièrement à lutter contre la transmission intergénérationnelle de la
pauvreté en affrontant les inégalités de genre, qui comme nous l’avons vu, rendent les
femmes et leur famille plus vulnérables. Le programme a donc adopté un certain nombre
d’objectifs relatifs au genre, c'est-à-dire à l’équité des opportunités pour les femmes et les
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hommes :
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De 15 000 à 1 million d’habitants.
Etablit par le CONAPO (Consejo Nacional de Poblacion). Intègre les éléments suivants : Pourcentage de population
analphabète de 15 ans ou plus, pourcentage d’habitations sans eau, pourcentage d’habitations sans égout, pourcentage d’habitations
sans électricité, nombre moyen de personne par pièce, pourcentage d’habitations avec sol en terre, pourcentage de la population
travaillant dans le secteur primaire
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Programa institucional Oportunidades 2002-2006. p54.
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Introduction
∙
Atteindre l’équité grâce à l’égalité d’opportunités dans l’éducation et la santé pour les
filles et les garçons.
∙
Améliorer la condition de la femme par un renforcement de sa position dans la famille
et dans la société, en augmentant ses capacités et son autonomie grâce à l’accès à
l’information et à la connaissance de son développement personnel ainsi que par la
participation active à la prise de décision
Pour ce faire, il a été décidé de confier les aides financières, directement aux femmes,
afin, d’une part, d’élargir leur champ de décisions au sein de leur foyer, et d’autre part, de
promouvoir une participation active et un plus grand engagement de celles-ci au sein de
leur communauté. Dans le même esprit, à partir du secondaire, les bourses scolaires sont
plus élevées pour les filles, et la composante santé du programme est plus particulièrement
destinée aux femmes, notamment par le dépistage du cancer cervico -utérin, par des
conseils en matière de contraception et une attention particulière aux grossesses.
Nous nous intéresserons dans ce travail aux femmes membres et plus précisément
aux mères de famille puisque même si le programme existe depuis onze ans, il n’est pas
encore possible de se prononcer pour les filles.
Mon questionnement est relatif au deuxième objectif du programme concernant le
genre, que nous venons de citer auparavant, objectif qui présente l’autonomie comme étant
la clé de l’amélioration de la condition de la femme. Il m’a donc semblé intéressant de traiter
de l’effet du programme sur l’autonomie des femmes bénéficiaires. Après une première
recherche documentaire, il est apparu que certains aspects du programme et leur relation
avec l’autonomie avaient déjà été traité, notamment l’aide financière versée directement
aux mères. J’ai donc décidé de me focaliser sur les coresponsabilités, parce que cellesci sont principalement réalisées par les femmes et doivent leur permettre de tirer profit de
façon plus importante des bénéfices du programme. Ainsi, l’autonomie étant un bénéfice
escompté, il est intéressant de voir si les coresponsabilités participent, effectivement, à son
renforcement.
∙
Hypothèse 1 : Se rendre au dispensaire pour réaliser le paquete esencial basico et
participer aux réunions éducatives, permet aux femmes Oportunidades d'acquérir
une meilleure connaissance de leur corps et des méthodes de planification familiale
qu'elles utilisent de plus en plus. Leur confiance en elle et leurs compétences
s'en trouvent donc renforcées, ainsi que leur participation à la prise de décision
concernant la contraception, la santé et les enfants.
∙
Hypothèse 2 : Participer aux réunions éducatives, se rendre au dispensaire, amener
les enfants à l'école, sont autant d'activités qui conduisent les femmes Oportunidades
à sortir des plus en plus de leur foyer augmentant ainsi leur liberté de mouvement.
Ces sorties permettent le développement des contacts et du dialogue entre femmes.
Des réseaux d’entraides informels ainsi que des groupes de femmes défendant leur
droit se créent. La participation de ces femmes à la prise de décision au sein de leur
foyer ainsi qu'au sein de la communauté se renforce.
∙
∙
Hypothèse 3 : La participation aux coresponsabilités est contraignante. Elle
représente une charge horaire de travail trop importante pour les femmes
Oportunidades et constitue une entrave au travail rémunéré.
Une fois définies ces hypothèses, j’ai parcouru les résultats statistiques des enquêtes
d’évaluation à ma disposition. Dans un premier temps, j’avais sélectionné les enquêtes de
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LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
2003, réalisées en zones rurales, qui fournissaient des informations sur des foyers intégrés
depuis 1998, et sur des foyers ayant les mêmes caractéristiques économiques et sociales
mais n’étant pas membres du programme. Ces enquêtes m’auraient permis d’étudier l’effet
des coresponsabilités sur l’autonomie sur une période de cinq ans, ce qui constitue une
durée suffisante pour évaluer un changement. Cependant, en m’intéressant au détail des
questions, il est apparu que cette enquête ne me permettait pas de tester mes hypothèses.
J’ai alors décidé d’utiliser deux enquêtes de 2004 (ENCELURB et ENVIT) réalisées en
milieu urbain, qui se sont avérées être un peu plus adaptées. J’ai alors réalisé une série
de calculs statistiques afin de tester les hypothèses. Il est toutefois important de signaler
que, ces enquêtes n’ayant pas été conçues pour mon questionnement, certains éléments
de mes hypothèses n’ont pas pu être prouvés. Dans ce cas la, j’ai fait état des résultats des
évaluations traitant de ces sujets et j’ai proposé de nouvelles hypothèses.
Ceci a été en effet le plus gros problème auquel j’ai été confronté. Il y a quelque
chose de frustrant à ne pas pouvoir tester jusqu’au bout une hypothèse, une sensation de
travail non fini. Compte tenu de cette contrainte, j’ai tout de même réussi à tirer quelques
conclusions sur l’autonomie des femmes Oportunidades
En somme, dans une première partie, j’ai décidé de m’intéresser plus particulièrement
à la thématique « femmes et développement » puis « genre et développement » afin
de comprendre sur quelles bases historiques et théoriques s’est construit Oportunidades.
Puis, toujours dans cette partie, je présenterai différentes définitions et conceptions de
l’autonomie jusqu’à parvenir à ma propre définition et à l’élaboration d’un cadre d’analyse.
La deuxième partie de ce travail a pour objectif principal de tester les trois hypothèses
de recherche. Pour ce faire, j’exposerai la méthodologie suivie puis les résultats obtenus.
Enfin, j’analyserai le tout et tirerai des conclusions.
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Partie 1 : autonomie, femmes et developpement.
Partie 1 : autonomie, femmes et
developpement.
Chapitre 1 : Quand le développement s’intéresse aux
femmes.
Il m’est apparu nécessaire, pour bien commencer ce travail, de présenter, dans un premier
temps, une approche historique de la thématique « Femmes et Développement ». Le
programme Oportunidades s’est construit autour du rôle de la femme. Il est donc intéressant
de se demander à partir de quand et comment les femmes ont été intégrées aux projets
11
de développement. Nous présenterons aussi les différents courants théoriques , nées de
la rencontre des théories féministes et des théories du développement, qui ont milité en
faveur de cette intégration et ont permis sa réalisation. Enfin, nous nous intéresserons plus
particulièrement à l’apparition et à l’utilisation du concept d’autonomie comme une approche
innovante de développement.
Dans un deuxième temps, nous présenterons un historique des politiques de lutte
contre la pauvreté au Mexique et ce pour mieux comprendre sur quelles bases s’est construit
le programme Oportunidades. Nous verrons, là aussi, à partir de quand et comment les
femmes ont été intégrées à ces politiques.
I/ Historique des différentes approches du développement.
1. Les années cinquante et soixante : l’approche bien être.
Dés les années trente, les économistes et les dirigeants des pays coloniaux commencent
à s’intéresser au développement des colonies. Puis, après la seconde guerre mondiale,
la reconstruction constitue la principale priorité des politiques de développement. A cette
même période, a lieu un événement important qui marque le début d’une mobilisation
internationale pour les droits des femmes. En 1946, à l’occasion de la Commission pour
les droits de l’homme, une Commission de la condition de la femme est organisée afin
d’examiner les inégalités homme/femme et établit quatre domaines dans lesquels les
discriminations sont les plus présentes :
Les droits politiques et possibilités de les exercer
Les droits légaux
L’accès des filles à l’éducation et à la formation
Le travail
11
« Women In Development » (WID), « Women And Development » (WAD) et « Gender And Development » (GAD). Pour plus de
precision, voir annexe 2.
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11
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
Cette commission a permis, notamment grâce à l’engagement de sa présidente Eléanor
12
Rosevelt, de faire figurer dans l’article 2 de la Déclaration universelle de droits de l’homme
le sexe comme n’étant pas un motif de discrimination.
13
Puis, dans les années cinquante , avec l’indépendance de nombreuses colonies,
les économistes et sociologues occidentaux se demandent comment promouvoir le
développement dans ces nouveaux pays. Ils mettent alors au point une nouvelle théorie,
la théorie de la modernisation, qui servira de stratégie d’action pour les grandes agences
de développement. Selon cette théorie, la modernisation s’apparente à l’occidentalisation,
14
ensemble d’institutions, de valeurs et de technologies permettant le « décollage »
des pays dits pauvres. La modernisation est envisagée comme un processus linéaire
et naturel permettant le passage d’une économie et d’une société traditionnelle à une
15
économie moderne de type occidentale . En somme, le développement est ici synonyme
de croissance économique et d’occidentalisation. Il ne peut se faire qu’avec l’aide des pays
occidentaux.
Sur la base de cette approche, les pays occidentaux mettent en place dans les années
40 et 50 des programmes de développement destinés à moderniser les colonies. On
donne la priorité à la construction d’infrastructures (électricité, système d’irrigation, hôpitaux,
écoles) qui permettront d’assurer la prospérité économique.
« Le système d’oppression patriarcale de leurs propres sociétés fut renforcé par
la nôtre ; un double système de pouvoir masculin se mit en place accentuant
la subordination et la marginalisation économique des femmes avec leurs
16
enfants. » « Selon C. Moser, cette approche est fondée sur trois présomptions:
les femmes sont les bénéficiaires passives du développement, la maternité est le
rôle le plus important pour les femmes et l’éducation des enfants est leur tâche
la plus effective. Cette approche se concentre donc sur la famille dans laquelle
la femme est un agent de reproduction et l’homme un agent de production ;
son principal défaut est de considérer que les caractéristiques biologiques des
femmes constituent à elles seules le problème et qu’il suffit d’influencer leur
comportement reproductif pour le résoudre au lieu de leur donner les moyens de
transformer leurs rôles. Elle crée chez les femmes, vues comme des bénéficiaires
17
et non comme des actrices, une dépendance dommageable. »
Quant aux pays occidentaux, la fin des années soixante marque le début de la deuxième
18
vague du féminisme moderne. Les femmes luttent alors pour la reconnaissance de
leurs droits juridiques, contre la discrimination au travail et les obstacles à l’éducation.
12
Article 2§1: Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration,
sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou de toute autre opinion,
d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.
13
14
Trousse de formation Genre et developpement p14.
SelonWalt Whitman Rostow, le décollage correspond à la troisième étape du developpement. C’est une période pendant
laquelle les barrières au developpement sont surpassées et une croissance économique autonome peut être assurée.
15
PARPART. Theoretical perspectives on gender and development. p 108.
16
BISILLIAT, Jeanne, VERSCHUUR, Christine. Le genre : un outil nécessaire. p.13.
17
BISILLIAT, Jeanne, VERSCHUUR, Christine. Op. Cit. p.26.
18
12
La première vague correspond à la lutte pour le droit de vote, au début du XXe siècle.
BURSI Sandra_2007
Partie 1 : autonomie, femmes et developpement.
Plus particulièrement, les femmes qui travaillent dans le domaine du developpement
comprennent que, tel que défini par la théorie de la modernisation, il ne profite pas aux
femmes du sud.
« La fin de la décennie voit le début de la vague actuelle du mouvement des
femmes qui réclame un changement des rapports de pouvoir, à la racine de la
19
subordination des femmes. »
2. Les années soixante dix : l’approche anti-pauvreté.
Les années soixante-dix se caractérisent par une remise en cause des théories et des
pratiques du développement mises sur pied après la seconde guerre mondiale. En effet, les
populations visées par les programmes de développement n’en retirent pas de bénéfices.
Pire, la pauvreté augmente et touche plus fortement les femmes. A ce propos, Esther
Boserup publie en 1970 l’ouvrage Women’s role in economic development, véritable point
de départ des réflexions sur la place des femmes dans le développement. L’auteure
enquête sur l’effet des projets de développement sur les femmes. Elle conclut que la
plupart des projets mis en place les ignorent et réduisent leurs opportunités et leur
autonomie économique. Ces projets, ayant pour objectif une modernisation à l’occidentale,
ne s’adressent en effet qu’aux hommes. Ils leur proposent une formation à de nouvelles
technologies et améliorent ainsi leurs opportunités et leurs connaissances, cependant ils
réduisent l’accès des femmes à l’embauche et à la technologie. Dans cette étude, Esther
Boserup remet en cause l’argument défendu par les théoriciens de la modernisation qui
consiste à dire que même si les projets ne s’adressent qu’aux hommes, des conséquences
positives se feront sentir pour les femmes. Cette idée est le principe de base des « Trickle
down Theory », modèle sur lequel sont construits les projets de développement. Les
tenants de cette théorie pensent que les bénéfices de la croissance économique et de la
modernisation partent du haut vers le bas, et bénéficient indirectement à ceux qui ne sont
pas concernés par les politiques mises en place.
Face à ce constat, certaines femmes aux Etats-Unis, engagées dans les problèmes
de développement, firent pression sur les décideurs politiques, et plus particulièrement
20
sur l’USAID , en leur démontrant que les projets de développement n’entraînaient
pas automatiquement des retombées positives pour les femmes, notamment en termes
d’égalité. Grâce à leurs efforts, l’amendement Percy est adopté en 1973 rendant obligatoire
pour l’USAID l’intégration des femmes dans tous ces projets. Cet événement est un véritable
tournant pour le mouvement féministe américain. Il donne naissance à une nouvelle
21
approche : « Women in Development » (WID) , aussi appelée en français « Intégration des
femmes dans le developpement » (IFD), qui vise à intégrer les femmes au développement
sans pour autant remettre en cause le modèle de développement tel que défini par la théorie
de la modernisation.
Les années soixante-dix constituent donc un véritable tournant pour les femmes. Cette
période est aussi marquée par l’organisation des femmes en mouvement partout dans le
monde. Le développement commence à être envisagé sous un angle féminin.
L’année 1975 marque le début de la « décennie des Nations Unies pour les Femmes ».
Cette initiative eut pour but d’établir un bilan de la situation des femmes de par le monde.
19
THIBAULT. Op cit. p 15
20
21
The United States Agency for International Development
Pour une présentation plus détaillée, voir annexes 1.
BURSI Sandra_2007
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LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
Le constat, auquel arrivent les 18 études menées pour l’occasion, est très pessimiste. En
effet, malgré les efforts engagés en matière de développement, la situation des femmes
s’est dégradée. Une conclusion générale se dégage alors :
« L’orientation du développement vers la seule rentabilité économique doit être
abandonnée si l’on veut que les populations pauvres, et particulièrement les
femmes, accèdent à plus de bien être ; l’économique, le politique sont intimement
22
liés au social. »
La même année s’ouvre à Mexico une conférence sur le thème « égalité, développement et
paix ». Les féministes présentes, aussi bien du Sud et du Nord, insistèrent sur l’importance
de faire sortir les femmes de leur invisibilité et de rompre avec l’image de femme au foyer,
dans laquelle elles sont si souvent reléguées. A l’issue de cette conférence, un plan d’action
mondial est adopté. Il définit les priorités des gouvernements et des agences en matière de
développement en insistant tout particulièrement sur l’intégration des femmes à celui-ci.
La « décennie des Nations Unies pour les femmes » a permis de souligner l’inefficacité
des politiques de développement basées sur la modernisation et donne naissance à une
23
nouvelle approche : l’approche anti-pauvreté . On part ici du constat que la majorité des
pauvres sont des femmes. Selon cette approche, la pauvreté féminine trouve ses racines
dans le sous développement et non dans la subordination. En reconnaissant le rôle productif
24
de la femme, cette approche cherche à répondre aux besoins pratiques des femmes en
leur permettant d’accéder à un revenu.
La fin de la décennie 70 est, d’autre part, marquée par l’apparition du concept
d’autonomie. En effet, l’autonomie est utilisée pour la première fois en 1979 à l’occasion
d’un atelier organisé à Bangkok par le Pacific Center for Women and Development. Elle se
définit alors comme « le pouvoir de contrôler sa propre vie, c'est-à-dire une sorte de force et
de confiance intérieures permettant d’affronter la vie, le droit de faire des choix dans sa vie
25
et d’influencer le changement social. » L’autonomie ainsi définie reste une notion plutôt
théorique. Son utilisation se limite, alors, au domaine de la recherche.
En conclusion, la décennie aura permis d’institutionnaliser le courant WID, qui devient
le courant de référence de l’ONU. Cependant à cette même période émergent les
premières critiques qui donneront naissance à un nouveau courant : « Women And
26
Development » (WAD) .
3. Des années quatre-vingt à aujourd’hui : les approches efficacité et
empowerment.
Un certain nombre de théoriciens féministes et du développement restent insatisfaits
des approches WID et WAD, insuffisantes, selon eux, pour rendre compte des facteurs
qui structurent et maintiennent les inégalités de genre. S’ouvre alors, au début des
22
BISILLIAT, Jeanne, VERSCHUUR, Christine. Le genre : un outil nécessaire. P 20.
23
24
THIBAULT, C. Op Cit. p 78.
Les besoins pratiques sont liés aux conditions de vie. Ils portent sur les nécessités immédiates, (eau, logement, alimentation,
revenu et soins de santé) qui s’inscrivent dans un contexte donné. Ces besoins ont tendance à être immédiats, à court terme et
facilement identifiables par les femmes. Ils peuvent être satisfaits à travers l’apport d’équipements, de pompes manuelles, de cliniques,
la formation technique, un programme de crédit, etc. Idem. p 39.
25
26
14
BISILLIAT,J. Op Cit. p 87.
Voir annexes n°2.
BURSI Sandra_2007
Partie 1 : autonomie, femmes et developpement.
années 80, une période de réflexion et de remise en cause des différentes approches de
développement, fortement influencée par les crises économiques qui frappèrent les pays
27
en développement à cette époque.
En réponse à la crise de la dette, qui conduit plusieurs pays en développement à la
faillite, les institutions internationales telles que le FMI élaborèrent une nouvelle politique
économique basée sur l’ouverture des marchés, le développement des exportations, le
désengagement de l’Etat et l’application des plans d’ajustements structurels. Le mouvement
féministe du sud s’allie alors autour des problèmes sociaux et politiques en partie générés
par cette nouvelle politique économique. A l’échelle mondiale, les féministes s’engagent
28
dans une lutte pour plus de ressources , d’équité et d’égalité. Ainsi, compte tenu du
désengagement des Etats au niveau des services sociaux, certains théoriciens préconisent
29
« une approche axée sur l’efficacité » . Cette approche vise à améliorer la productivité
des femmes par l’accès au crédit, à la formation et à la technologie. Elle part du pré
supposé qu’une meilleure participation économique des femmes, permet une amélioration
automatique de leur statut et une acquisition progressive de l’égalité avec les hommes.
Les femmes sont ici considérées comme des ressources sous utilisées, qui doivent par
conséquent être intégrées au processus de développement. Cette approche sous estime
toutefois le rôle reproductif des femmes qui donne lieu à une charge de travail importante
et incompressible. D’autres préconisent « une approche axée sur l’équité », qui vise à
30
donner des chanceségales aux femmes dans tous les domaines , par le biais de politiques
interventionnistes qui donnent aux femmes une autonomie politique et économique.
31
En 1985 se tient la troisième Conférence internationale des femmes à Nairobi, suivie
de la quatrième Conférence à Beijing, en 1995. A cette occasion une plateforme d’action est
adoptée. Elle engage les 189 états signataires à appliquer à toutes leurs politiques, qu’elles
soient nationales, régionales ou internationales, une perspective sexospécifique c'est-à-dire
qui prennent en compte les besoins spécifiques aux femmes et aux hommes. Pour Gita Sen,
« Adopter une approche sexospécifique, c'est reconnaître que les femmes se
situent au point de jonction de la production et de la reproduction, de l'activité
économique et de la prise en charge d'êtres humains, et donc, de la croissance
économique et du développement humain. Puisqu'elles travaillent dans ces deux
sphères, c'est à elles qu'incombent les responsabilités les plus lourdes; ce sont
donc elles qui ont le plus à perdre, qui souffrent le plus de l'incompatibilité des
27
THIBAULT, C. Op Cit. p 16.
28
La stratégie économique appliquée aux pays en développement à cette époque se traduit par le désengagement des Etats
au niveau des politiques sociales. On compte sur les femmes et leur role de bien être pour palier aux manques de moyens des Etats
en matière sociale. Les populations et plus particulièrement les femmes voient leurs conditions de vie durement affectées. Les années
80 sont en effet caractérisées par un nouveau phénomène: la féminisation de la pauvreté.
29
30
31
BISILLIAT. J. Op Cit. p 27.
THIBAULT, C. Op Cit. p 17.
Entre ces deux conférences, en 1990, est publié le premier Rapport Mondial sur le développement humain. Ce document
est d’une grande importance car il définit le concept de développement humain et propose un indicateur permettant de le mesurer.
Le développement humain est donc défini comme un processus d’élargissement des possibilités de choix dans tous les domaines de
l’activité humaine. L’indicateur de développement humain englobe le taux de mortalité, l’espérance de vie, l’accès a l’enseignement
et le taux d’alphabétisation. Ce rapport souligne en fin de compte que le développement ne peut s’appréhender uniquement sous un
angle économique, le développement est avant tout humain et vise le bien être des populations.
BURSI Sandra_2007
15
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
contraintes et des objectifs inhérents à ces deux univers, et qui sont le plus
32
sensibilisées à la nécessité d'une meilleure intégration entre les deux »
Parallèlement à cette conférence, le Rapport Mondial sur le Développement Humain (1995)
est publié et porte spécialement sur les inégalités entre les genres. Il spécifie que « le
développement a pour objectif d'élargir, pour les êtres humains, le champ des possibles
dans leur ensemble, et pas seulement les revenus ». Le processus de développement,
tout comme la lutte contre la pauvreté, est multidimensionnel. Le rapport souligne aussi la
croissante féminisation de pauvreté et note que les causes de ce phénomène diffèrent entre
pays du Nord et du Sud. Enfin, il reconnait l’importance du travail non rémunéré des femmes
comme contribution féminine au développement économique.
Dans la lignée de la conférence de Beijing et des critiques des modèles WID et WAD
33
émerge un nouveau courant théorique, le courant « Gender and Development » (GAD) , qui
se préoccupe des relations entre les genres. Ce nouveau paradigme a été principalement
34
développé par le groupe « Development Alternatives with Women for a New Era » (DAWN)
et se base sur une nouvelle vision du développement.
« Le développement doit être un processus économique, social et culturel par
lequel lesbesoins humains sont satisfaits par le biais d’un accès plus large au
pouvoir économique et politique, ce processus doit permettre une sociétéoù les
êtres humains sont libres de toutedomination ; le développement de ces sociétés
ne peut se faire dans des conditions d’inégalité relative croissante entre hommes
et femmes, ni sans une plus grande équité et une plus grande participation pour
35
les femmes. » DAWN.
36
L’approche « Gender and development » cherche à déterminer et comprendre les facteurs
qui expliquent et participent à la reproduction de la subordination des femmes. De
façon concrète pour un projet de développement, il s’agit de définir les rôles et les
besoins de chaque sexe dans la population d’intervention. Les hommes et les femmes
participent différemment au programme car leurs besoins sont différents. Cette approche
dite sexospécifique ou de genre, vise, par un traitement différencié selon les sexes, une
égalité à long terme. En effet, en établissant clairement les rôles de chacun, il est plus
facile de concevoir un projet qui les remette en cause. Cette remise en cause est rendu
possible par l’empowerment, approche phare du courant GAD, qui peut se définir de la
façon suivante :
« L’objectif est de promouvoir la place des femmes en renforçant leur
légitimité, leur confiance en elles-mêmes et d’atteindre indirectement les
37
38
besoins stratégiques en terme de triple rôle , la mobilisation à la base autour
32
KABEER, Naila. Integration de la dimension genr à la lutte contre la pauvreté. p5.
33
34
Voir annexes n°2.
Groupe crée à l’occasion de la conférence internationale de Nairobi en 1985 qui clôtura la décennie des Nations Unies pour
les femmes. DAWN est un réseau de femmes chercheures et militantes du Sud engagées dans la recherche féministe notamment
sur des questions d’économie, de genre et de démocratie
35
THIBAULT. C. Op Cit. p 25.
36
Inégalités de genre, de race, de classe, de pouvoir, division du travail.
37
Les auteurs du rapport « Trousse de formation : Genre et developpement » proposent la définition suivante : Les
intérêts stratégiques des femmes naissent de leur position de subordination dans la société. Ce sont des intérêts à
16
BURSI Sandra_2007
Partie 1 : autonomie, femmes et developpement.
39
des besoins pratiques étant susceptible d’ouvrir des voies pertinentes de
40
confrontation avec la subordination. »
L’empowerment est un processus permettant le changement social en faveur de l’égalité
des sexes ainsi qu’un développement plus humain et équitable pour tous.
Pour Eva Rathgeber, spécialiste en « genre et developpement », un projet conçu selon
cette approche se présenterait ainsi :
« De tels projets seraient conçus de manière à donner le pouvoir aux femmes,
à leur donner une voix égale, en reconnaissant toute l’étendue de leurs
connaissances, de leurs expériences et de leurs activités, y compris à la fois
le travail de production et de reproduction. Ils remettraient en question les
conceptions traditionnelles des rôles et des responsabilités des deux sexes et
offriraient une définition plus équitable du concept de développement, de même
que des contributions faites par les femmes et les hommes dans la poursuite des
41
objectifs sociétaux. »
Parallèlement à l’approche « empowerment », revient sur le devant de la scène le concept
d’autonomie. Jadis, limité à la recherche, il investit à la fin des années quatre-vingt, une
dimension plus pratique en devenant l’objectif phare des programmes de développement
du gouvernement hollandais. En 1989, le gouvernement hollandais publie le livre blanc Un
42
monde de différences dans lequel est présenté l’approche « autonomie » . L’autonomie
y est définie comme le contrôle sur sa propre vie et sur son propre corps. Il constitue un
objectif stratégique car il est aussi bien un idéal pour toute société qu’un moyen permettant
le changement social. Ainsi « la coopération au développement fondée sur le principe
d’autonomie des femmes signifie que l’on adopte un schéma de partage des pouvoirs dans
43
toutes ses manifestations » . Le concept d’autonomie, ici défini, sert aussi d’outil d’analyse.
44
Le gouvernement hollandais a, en effet, défini quatre critères d’analyse correspondant aux
résultats escomptés pour tout programme suivant l’approche « autonomie ». Ces critères
doivent s’envisager à la lumière des conditions propres à chaque pays. Ils se présentent
comme suit :
∙
La position économique de la femme sera renforcée du point de vue du contrôle sur
le revenu et les moyens de production sans augmentation de la charge de travail
long terme qui visent à améliorer la situation des femmes. Les intérêts stratégiques des femmes incluent notamment:
l’acquisition de droits juridiques, l’accès au processus démocratique participatif, l’accès à l’égalité dans l’éducation,
l’emploi, la réduction des écarts salariaux, la protection contre la violence, le renforcement de leur pouvoir décisionnel. Ils
peuvent être satisfaits à travers la conscientisation, l’amélioration de la confiance en soi, l’éducation, la consolidation des
organisations de femmes, la mobilisation politique, etc.
38
Les femmes remplissent trois rôles: un rôle reproductif, un rôle productif, et un rôle au niveau de la communauté.
39
Cf note 16.
40
THIBAULT, C. Op Cit. p 78.
41
DAGENAIS, H. Op Cit. p 91.
42
43
44
BISILLIAT, J. Le genre : un outil nécessaire. p 88-89.
Ibidem. § 3.
Idem. p 252-253.
BURSI Sandra_2007
17
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
∙
La position politique et organisationnelle de la femme sera renforcée en ce qui
concerne la participation ou le contrôle sur les aménagements organisationnels dans
les structures du projet. De même, pour l’organisation du district, de la zone ou du
village, ainsi qu’au niveau régional et national
∙
Dans la zone du projet, l’autonomie des femmes sera renforcée dans l’image qu’elles
ont d’elle-même, ou que les autres ont des femmes, comme seront combattus les
principaux préjugés à leur encontre.
∙
L’autonomie physique des femmes sera renforcée, c'est-à-dire que les femmes
gagneront en maîtrise de leur corps, contrôleront leur fécondité, leur sexualité et l’on
reconnaîtra ou prêtera attention à leurs problèmes de santé.
Ces quatre critères permettent d’évaluer le degré d’autonomie des femmes participant à un
projet. Ils servent aussi à l’évaluation des projets. Si au moins un des quatre critères a été
renforcé sans qu’un autre ait été touché, les objectifs de développement sont considérés
comme atteints.
En somme, l’approche « autonomie » et l’approche « empowerment » ont le même
objectif, celui de permettre aux femmes mais aussi aux hommes de gagner en pouvoir et en
contrôle sur leur propre vie. Elles s’envisagent toutes deux dans le cadre de la lutte contre
la pauvreté et les inégalités de sexes, de races ou de classe. Ces deux approches sont
fondamentales pour le développement humain défini comme processus d’élargissement
des possibilités de choix car elles le rendent possible.
Enfin, on ne saurait terminer cette partie sans traiter des objectifs du millénaire pour le
développement. En septembre 2000, lors du sommet du millénaire, les Etats membres de
45
l’ONU ont élaboré une liste de huit objectifs à atteindre avant 2015.
(1) éradiquer l'extrême pauvreté et la faim;
(2) assurer l'éducation primaire pour tous;
(3) promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes;
(4) réduire la mortalité infantile;
(5) améliorer la santé maternelle;
(6) combattre le VIH/sida, le paludisme et d'autres maladies;
(7) assurer un environnement durable ;
(8) mise en place d'un partenariat global pour le développement assorti d'objectifs en
matière d'aide, de relations commerciales et d'allégements de dettes.
De manière générale, ces objectifs visent tous à lutter contre les différentes dimensions
46
de la pauvreté , et ce, afin qu’un développement durable soit possible pour tous. L’objectif
3, qui nous concerne plus particulièrement, envisage la pauvreté selon une perspective de
genre, c'est-à-dire que la pauvreté a des effets différents pour les hommes et les femmes.
45
46
Liste consultable sur le site du l’ONU http://www.un.org/french/millenniumgoals/index.shtml
Dans le Rapport mondial du développement humain 1997, la pauvreté est définie en opposition au développement humain.
Ainsi, si le développement humain est un processus d’élargissement des possibilités de choix, la pauvreté est « la négation des
opportunités et des perspectives fondamentales sur lesquelles repose tout développement humain, telles que la chance de vivre
une vie longue, saine, constructive, et de jouir d'un niveau de vie décent, ainsi que la liberté, la dignité, le respect de soi-même et
d'autrui. » p 16
18
BURSI Sandra_2007
Partie 1 : autonomie, femmes et developpement.
47
L’exemple le plus flagrant est la surreprésentation des femmes parmi les pauvres . Les
inégalités liées au fait d’être d’une femme, auxquelles s’ajoutent les inégalités relatives à
l’appartenance ethnique, à la classe ou à la génération, les rendent plus vulnérables car
elles entravent leurs opportunités en matière d’éducation, de travail et même de santé.
Ainsi promouvoir l’égalité entre les sexes dans les domaines de l’éducation, du travail et de
la politique permettra aux femmes d’avoir accès à plus d’opportunités et de rompre avec
48
le cycle de la pauvreté. De plus, le renforcement de l’autonomisation , définie comme le
49
grade de liberté qu’une femme a pour pouvoir agir selon ses choix et non ceux des autres ,
permettra aux femmes de tirer profit de ces opportunités et renforcera ainsi leur participation
aux décisions qui les concernent. Atteindre cet objectif, c’est permettre aux femmes d’avoir
50
accès à plus d’opportunités ainsi qu’aux capacités nécessaire pour les saisir.
II/ Développement, politiques de lutte contre la pauvreté et genre : le
cas du Mexique.
1. Les premières politiques de lutte contre la pauvreté.
Au Mexique, la lutte contre la pauvreté comme politique de développement a été, depuis
les années cinquante, une priorité pour tous les gouvernements. Premièrement, parce qu’à
51
cette époque, 88,4% de la population mexicaine vivait sous le seuil de pauvreté. Mais aussi
parce qu’au niveau international, le développement, entendu alors comme modernisation,
est un objectif de plus en plus important. La pauvreté ne peut donc plus être tolérée.
Les politiques, alors, mises en place avaient pour objectif d’affronter les causes de cette
52
pauvreté excessive sans pour autant véritablement les identifier . Des années cinquante
à la fin des années soixante-dix, la pauvreté est donc combattue par la distribution de
53
subventions généralisées à la population . Cet ample réseau de distributions est rendu
possible par la forte croissance que connaît le Mexique à cette période. On voit aussi naître
à cette époque les premières institutions sociales du pays, tels que l’Instituto Mexicano
de Seguridad Social (IMSS), la Secretaria de Educacion Publica (SEP) et l’Instituto de
Seguridad y Servicios Sociales de los Trabajarores del Estado (ISSTE), ainsi que les
premières politiques sociales, de très grande ampleur, en matière d’éducation, de santé
et d’habitat. Cependant, compte tenu de la forte croissance démographique et du peu de
54
financement accordé, elles devinrent vite insuffisantes.
A partir du mandat de Luis Echeverria (1970-1976), les politiques sociales se sont plus
particulièrement intéressées au monde rural, d’une part, pour des raisons de budget et,
d’autre part, car « la pauvreté dans les pays en voie de développement est un problème
47
48
49
50
51
52
53
54
60 à 70% des personnes vivant avec moins d’un dollar par jour sont des femmes
Processus qui conduit à l’autonomie.
Objetivos de desarrollo del milenio: una mirada desde America Latina y el Caribe. P 113.
Ces capacités seront renforcées par l’accès à l’éducation mais aussi par l’acquisition de l’autonomie
HERNADEZ LICONSA, González, et al. Lo que dicen los pobres. p 8.
La pauvreté n’était mesurée que par rapport au revenu. Elle n’avait donc qu’une dimension économique.
Ibid.
RODRIGUEZ DORANTES, Cecilia. Las mujeres en el programa Progresa- Oportunidades: Una aproximación al estado de arte.
p 22.
BURSI Sandra_2007
19
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
55
principalement rural » . La plus fameuse de ces politiques, est le Programa de Inversiones
56
Publicas para el Desarrollo Rural
(PIDER). Il avait pour objectif la réduction des inégalités
et la redynamisation des zones rurales marginalisées grâce à la distribution de subventions
et au développement de l’investissement public en matière de santé et d’éducation. PIDER
est considéré comme le premier programme de lutte contre la pauvreté.
57
Sous le mandat de Jose Lopez Portillo (1976- 1982), les programmes se multiplient.
Le plus important était le programme COPLAMAR (Coordinacion del plan general de
zonas deprimidas y grupos marginados). Il comptait quatre millions de bénéficiaires et
comprenait quatre dimensions : un programme d’alimentation (CONASUO – COPLAMAR),
un programme pour le développement de l’eau potable (SAHOP- COPLAMAR), un
programme en matière de santé particulièrement destiné aux zones rurales (IMSSCOPLAMAR) et la création de pensionnats pour les enfants des zones reculées (SEPCOPLAMAR). COPLAMAR ne dura cependant que le temps d’un mandat car les ressources
financières de l’Etat devinrent insuffisantes. En effet, à partir du début des années quatrevingt, l’Etat mexicain doit faire face à une baisse du prix du pétrole, à l’époque premier
revenu de l’Etat. Le pays est donc fortement endetté et est obligé de réduire les dépenses
sociales.
58
Carlos Salinas de Gortari arrive au pouvoir en 1988 et met en place, pour répondre
aux restrictions budgétaires, ce qu’il appelle le libéralisme social. Il eut recours à la
privatisation d’entreprises publiques et, grâce aux fonds dégagés, put financer les dépenses
sociales. Les politiques de lutte contre la pauvreté mises en place à partir de cette période
disposent donc d’un budget plus limité. Pour cette raison, les politiques dites focalisées,
c'est-à-dire destinée uniquement aux personnes en condition de pauvreté de capacité,
sont encouragées. Le premier programme de ce type voit le jour en 1988. PRONASOL
(Programa Nacional de Solidaridad) avait pour objectif d’améliorer les conditions de vie
des paysans, des indigènes et des habitants des zones urbaines pauvres. Son action
s’est principalement articulée autour du rôle de la communauté dans la résolution des
problèmes et sur la consultation de ses membres pour l’organisation. PRONASOL a aussi
institué pour la première fois un système de coresponsabilité permettant l’engagement et la
responsabilisation des participants. Ce programme a permis la construction d’infrastructures
sociales et le développement des capacités productives des participants. Cependant, il a
été fortement critiqué pour ces logiques corporatives et clientélistes. En 1994, le Mexique
traverse une nouvelle crise économique qui met fin au PRONASOL.
Les programmes appliqués jusqu’en 1994 ne font pas mention d’un traitement
spécifique en faveur des femmes du fait de leur plus grande vulnérabilité à la pauvreté. Seule
la dimension économique de la pauvreté est combattue, mais sous le mandat d’Ernesto
Zedillo se crée un nouveau programme, PROGRESA, influencé par le rapport du PNUD de
1995 et par l’émergence du concept de « genre et développement ». La pauvreté est alors
envisagée comme un phénomène multidimensionnel et plus précisément sexospécifique.
2. PROGRESA : Intégration de la dimension genre à la lutte contre la
pauvreté.
55
56
57
58
20
RODRIGUEZ DORANTES, Cecilia. Op Cit. p 23.
CARDOZO BRUM, Myriam. Políticas de lucha contra la pobreza en México Principales resultados y limitaciones. p 20.
Ibid..
Idem. p 21.
BURSI Sandra_2007
Partie 1 : autonomie, femmes et developpement.
Le Programa de Educacion, Salud y Alimentación (PROGRESA) a été mis en marche en
1997 sous le mandat d’Ernesto Zedillo. PROGRESA est l’antécédent direct du programme
Oportunidades. En effet, ils ont les mêmes modalités d’action et les mêmes objectifs
généraux. Oportunidades diffère de PROGRESA car il s’étend aux populations urbaines en
condition d’extrême pauvreté en plus des populations rurales.
PROGRESA a été élaboré à partir d’un programme test, appelé Programa de Canasta
Basica Alimentaria para el Bienestar de las Familias, mis en place dans trois villes de l’Etat
de Campeche. Ce programme avait pour but de tester un nouveau mode de distribution des
aides alimentaires. Ces aides prenaient la forme d’aides monétaires transférées aux familles
par le biais d’une carte électronique, à utiliser dans les magasins d’alimentation affiliés
au programme. Cette aide était, de plus, versée à condition que les femmes enceintes,
allaitantes et les enfants de moins de 5 ans assistent à des contrôles dans un centre de
santé. Les évaluations de ce programme montrèrent que les bénéficiaires préféraient l’aide
monétaire à l’aide en nature. Les conditions posées aux bénéficiaires se révélèrent, aussi,
très bénéfiques.
Ce type de programme, appelé programme de transfert monétaire conditionné, servit
donc de point de départ à la conception de PROGRESA. Ce programme fournit une aide
alimentaire, conditionnée par des coresponsabilités en matière de santé mais aussi, et c’est
la nouveauté, par des coresponsabilités en matière d’éducation. L’alimentation, la santé
et l’éducation sont donc les trois axes principaux autour desquels s’articule PROGRESA
pour développer le capital social des participants et ainsi lutter contre l’extrême pauvreté.
En combinant les coresponsabilités de santé, d’éducation et les aides alimentaires,
PROGRESA entend lutter efficacement contre la vulnérabilité des plus pauvres et la
transmission intergénérationnelle de la pauvreté. L’autre nouveauté, en matière de lutte
contre la pauvreté, introduite par PROGRESA est la place centrale donnée à la femme et
plus particulièrement à la mère. Elle est considérée comme étant le lien entre le programme
et sa famille. C’est elle qui reçoit les aides et qui s’engage au respect des coresponsabilités.
Par cet aspect, PROGRESA entend lutter contre le caractère sexospécifique de la pauvreté,
et ce, en prenant en compte les besoins spécifiques des femmes. En plaçant la femme au
cœur de son dispositif, PROGRESA cherche aussi à renforcer son pouvoir, afin que les
opportunités qui lui étaient niées, deviennent accessibles. PROGRESA est donc le premier
programme mexicain de lutte contre la pauvreté qui considère les femmes comme des
actrices et non comme des réceptrices passives. En versant directement les aides aux
femmes, PROGRESA leurs permet d’acquérir plus de pouvoir et de contrôle et œuvre ainsi
pour le développement de leur autonomie.
***
Cette première partie a été l’occasion de mieux comprendre le contexte historique
qui a peu à peu permis aux femmes d’intégrer le développement. Les courants WID,
WAD et GAD ont, grâce à leurs recherches et leur engagement, permis la conception
de programmes de plus en plus égalitaires et participatifs, notamment en militant en
faveur de la reconnaissance des femmes comme actrices du développement. Amartya Sen
dans son livre Un nouveau modèle économique, souligne lui aussi l’importance de cette
reconnaissance :
« Les femmes ne sont plus les destinataires passives d’une réforme affectant
leur statut, mais les actrices du changement, les initiatrices dynamiques de la
BURSI Sandra_2007
21
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
transformation sociale, visant à modifier l’existence des hommes aussi bien que
59
la leur. »
Cette prise de conscience, au niveau international, de la mise à l’écart des femmes du
processus de développement ainsi que de leur plus grande vulnérabilité à la pauvreté, a peu
à peu conduit le gouvernement mexicain à suivre pour ses politiques sociales une dimension
« genre » prenant en compte la dimension sexospécifique de la pauvreté.
PROGRESA, ancêtre d’Oportunidades, est le premier programme de ce type. En
répondant aux besoins spécifiques des femmes, il espère renforcer leurs capacités et élargir
l’éventail de leurs opportunités, brisant ainsi le cycle de la pauvreté.
Dans la partie suivante, nous traiterons du concept d’autonomie.
Chpaitre 2. Autonomie : définitions et cadre d’analyse.
Le mot autonomie, emprunté du grec autonomia, dérivé de autonomos, apparaît dans la
langue française en 1596, date à laquelle son sens et son emploi sont attestés. Il fait, à son
origine, référence au droit que les Romains avaient laissé à certaines villes grecques, de
60
se gouverner par leurs propres lois . L’autonomie fait plus généralement référence, dans
la Grèce antique, à la possibilité pour une ville de faire ses propres lois sans être sous
61
l’emprise d’une tutelle étrangère. L’autonomie est donc à l’origine un concept politique.
Ce terme est, par la suite, étendu à l’individu grâce aux penseurs religieux
tels que Thomas D’Aquin, puis Luther et Calvin, qui soulignaient l’importance de la
62
conscience individuelle. Plus tard, avec les écrits de Kant , l’autonomie devient un concept
63
philosophique. Kant parle d’autonomie de la volonté et désigne, par ce concept, le choix
qui n’est basé que sur la volonté propre de l’individu. La volonté de l’individu a cette capacité
de définir elle-même sa loi, d’être elle même sa législation. Pour Kant, cette législation
est universelle si les individus suivent ce principe : « Agis de telle sorte que la maxime
de ta volonté puisse toujours valoir en même temps comme principe d’une législation
64
universelle » . Autrement dit, lorsqu’un individu est face à un choix, il est dit autonome si
en pensant à sa conduite il agit volontairement et librement selon des principes qu’il juge
universels. L’individu agit ici par devoir, il n’est pas guidé par ses intérêts propres et évalue
ses actes en les portant sur un plan universel.
Aujourd’hui, l’autonomie s’applique à de nombreux domaines tels que les sciences
humaines et la médecine ainsi que le droit et la science politique. L’autonomie est donc un
terme polysémique, et ce compte tenu du nombre de disciplines qui l’emploie.
59
60
61
SEN, Amartya. Un nouveau modèle économique: développement, justice, liberté. p.193.
Définition tirée du dictionnaire Litré
LE COADIC, Ronan.
62
63
L’autonomie, illusion ou projet de société.
Notamment, Fondements de la méthaphysique des moeurs. 1792.
Kant oppose à l’autonomie le concept d’hétéronomie qui désigne les choix qui sont soumis à une influence extérieure tels
que l’intérêt, la contrainte, la nécessité, les conseils, etc.
64
22
Critique de la raison pure. p.30.
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Partie 1 : autonomie, femmes et developpement.
Définir l’autonomie n’est donc pas chose facile. Pour commencer, il est important de
revenir à l’étymologie du mot autonomie. Il est formé de deux mots grecs : auto, « soimême », et nomos, « loi » ou « règle ». Il se définit alors comme le droit de se gouverner
par ses propres lois. Selon le dictionnaire Trésor de la Langue française, cette définition
s’applique à un pays, une province, une nation ou encore un peuple. A propos d’une
personne, l’autonomie désigne la faculté de se déterminer par soi même, de choisir et d’agir
librement. Elle renvoie aussi à la liberté et l’indépendance morale ou intellectuelle. Le 9éme
édition du dictionnaire de l’Académie française ajoute que l’autonomie est la possibilité d'agir
sans intervention extérieure. Être autonome c’est être capable d'agir sans dépendre d'autrui,
de décider par soi-même, c’est jouir d'une certaine liberté d'action. On parle dans ce cas
d’autonomie personnelle ou individuelle. C’est ce type d’autonomie qui nous intéresse ici.
Dans ce chapitre, nous présenterons et discuterons différentes interprétations du
concept d’autonomie. Nous commencerons par la conception libérale de Kant, puis de
Feinberg. Enfin, nous examinerons les différentes critiques féministes faites à la définition
libérale de ce concept.
.
I/ La conception libérale de l’autonomie.
1. La conception kantienne de l’autonomie.
L’autonomie est devenue, depuis Kant, un des concepts fondamentaux du libéralisme.
65
Dans les écrits de cet auteur, on distingue deux sens différents donnés à l’autonomie
personnelle. D’une part, l’autonomie implique l’indépendance vis-à-vis des facteurs ou
influences externes à la volonté de la personne. D’autre part, elle correspond à la capacité
de choix exercée au travers de la raison. La raison, en effet, permet à un individu d’analyser
de façon critique les décisions auxquelles il est confronté tout en discernant les influences et
motivations externes à sa volonté. Plus généralement, pour Kant, l’autonomie personnelle
se définit comme la capacité de l’individu de se donner ses propres lois et de s’écarter en
conséquence de l’hétéronomie. Elle se réalise quand la rationalité et l’indépendance sont
des caractéristiques de l’individu. Enfin, pour Kant, l’autonomie est universelle car tout le
monde peut l’acquérir, il suffit pour cela que les conditions de rationalité et indépendance
sont réunies. L’autonomie kantienne est universelle, aussi, car elle ne dépend pas du
66
contexte dans lequel la rationalité et l’indépendance ont été acquises.
2. L’autonomie libérale post kantienne.
Cette conception kantienne de l’autonomie personnelle a été révisée par certains
philosophes libéraux, notamment Joël Feinberg, car elle était jugée d’une part incomplète
67
et d’autre part trop liée à une exigence de moralité . Les caractéristiques de rationalité
et d’indépendance ne suffisent pas, pour cet auteur, à définir l’autonomie. Il est important
de prendre en compte, contrairement à Kant, les conditions et le contexte dans lesquels
l’autonomie se développe et s’exerce.
65
66
67
ALVAREZ, S. La autonomia personal y la perspective comunitarista. p. 69.
idem. p. 73.
Comme nous l’avons vu en introduction de cette partie, être autonome pour Kant c’est, face à un choix, suivre les principes que
l’on juge universels et non ses intérêts.
BURSI Sandra_2007
23
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
68
J. Feinberg distingue quatre types d’autonomie personnelle : (1) l’autonomie comme
capacité, (2) comme condition réelle d’autogouvernement, (3) comme idéal et (4) comme
autorité souveraine.
1. L’autonomie comme capacitéFeinberg parle de « capacité » comme circonstances
internes à l’individu, « d’opportunité » comme circonstances externes et de « vertus »
comme des traits de caractère considérés comme positifs. est nécessaire pour
disposer de l’autonomie comme condition réelle d’autogouvernement. Elle se
détermine par la capacité de faire des choix rationaux. Cette capacité est, en droit,
ce qui permet d’attribuer la compétence juridique, ce qui permet de distinguer les
individus compétents, qui ont le droit de s’autogouverner, des non compétents.
Le concept d’autonomie comme capacité est donc un concept de tout ou rien que
Feinberg définit plus précisément comme étant la capacité minimum nécessaire pour
accomplir une tâche. Autrement dit, c’est la capacité minimum pour vivre sa vie selon
ses propres principes.
2. Avoir la capacité et donc le droit de s’autogouverner ne signifie pas pour autant
avoir l’opportunité de le faire. L’autonomie comme condition fait référence aux
circonstances qui doivent être présentes pour qu’un individu ait l’opportunité
d’exercer ses capacités et ses droits. La théorie de Feinberg diffère ici de la théorie
kantienne en ce qu’elle contextualise l’exercice de l’autonomie. Les conditions
réelles d’autogouvernement dépendent en premier lieu de ce que Feinberg appelle la
« chance »:
« Je ne suis pas capable de m’autogouverner si vous me contrôlez de force ou
que vous imposez votre volonté à la mienne, ou si la maladie me jette dans une
stupeur fébrile, un delirium, un coma ou si la pauvreté me réduit à la dépendance
69
abjecte envers l’assistance des autres. »
1. L’autonomie comme idéal est un idéal partiel car un individu autonome, bien que
possédant les vertus adéquates, peut agir de façon immorale. Les vertus doivent
donc s’exercer ni trop ni pas assez.
2. Enfin, l’autonomie comme droit fait référence à l’autonomie politique et au droit
souverain à l’autodétermination. Feinberg utilise la conception politique de
l’autonomie car il considère l’autonomie personnelle comme une métaphore politique.
Il parle de souveraineté personnelle avec, comme pour les Etats, l’idée d’un territoire
sur lequel l’individu est souverain. Ce territoire c’est le corps ainsi que « l’espace
vital » qui peut s’entendre comme le droit à l’intimité selon M. Alemany Garcia. Le
droit à l’autonomie ou à la souveraineté personnelle concerne son propre corps, son
espace vital mais aussi les décisions importantes de notre vie.
J. Feinberg innove par rapport à Kant car il donne à l’exercice de l’autonomie certaines
conditions. Être autonome pour Feinberg, en somme, c’est être libre de toute influence
externe sur le système de valeurs et sur le processus de décision. Les seules limites
envisagées à l’autonomie d’un individu sont son manque de chance et son caractère.
Les effets de la socialisation et des relations qu’un individu entretient avec d’autres
personnes n’ont qu’un rôle périphérique dans la notion d’autonomie. La conception libérale
68
69
Alemany Garcia, M. El concepto y la justificacion del paternalismo. p 181 à 185.
FEINBERG,J. The inner citadel: essays on individual autonomy. P 31. “I do not govern myself if you overpower me
by brute force and wrongfully impose your will on mine, or if illness throws me into a febrile stupor, delirium, coma, or if
poverty reduces me to abject dependence on the assistance of others.”
24
BURSI Sandra_2007
Partie 1 : autonomie, femmes et developpement.
de l’autonomie est donc une conception individualiste de l’autonomie. L’autonomie dépend
uniquement de l’individu et de sa rationalité.
II/ Critiques féministes de la conception libérale de l’autonomie.
Les féministes s’opposent à la définition libérale de l’autonomie qui présente l’individu
autonome comme rationnel et indépendant des influences extérieures dans la définition et la
réalisation de ses objectifs et choix. Pour les féministes, l’individu évolue dans un contexte
70
social . Il est, d’une part, construit par la socialisation et, d’autre part, il vit entouré d’autres
individus avec lesquels il interagit. L’individu ne peut donc pas être indépendant d’influences
extérieures. Les féministes définissent l’autonomie comme un processus d’autodéfinition
(définir ses propres valeurs et la personne que l’on souhaite être) et d’autodirection (définir
ses propres objectifs, ses propres projets de vie et les atteindre) qui se développe plus ou
71
moins en fonction du contexte . L’autonomie existe, donc, à différent degré.
1. L’autonomie pour les féministes libérales : Diana Meyers.
Les premières féministes à critiquer le concept d’autonomie défini par Feinberg, sont les
féministes libérales. Elles insistent sur le fait que le concept d’autonomie doit être défini
par l’observation de la vie des êtres humains et plus particulièrement des femmes. En
privilégiant une conception empirique de l’autonomie, les féministes libérales participent à la
remise en question de l’autonomie dite libérale. En effet, Joël Feinberg ne s’inquiète pas des
détails concrets de la vie humaine. Il ne s’intéresse pas à la capacité pratique des personnes
à atteindre ce qu’il considère être l’autonomie. Il est plus préoccupé par la description de
ce que l’autonomie devrait être.
1.1 L’autonomie partielle.
L’ouvrage de référence en la matière, écrit par Diana Meyers, s’intitule Personal autonmy
72
and the paradox of feminine socialization. Dans ce livre, D. Meyers prend pour sujet
d’étude la « femme traditionnelle », c'est-à-dire la femme fortement socialisée aux normes
féminines et dévouée en premier lieu au bien être et aux soins des enfants. D. Meyers
cherche dans ce livre à analyser et repérer les éléments qui semblent mettre en danger
l’autonomie de la femme traditionnelle, et il y en a beaucoup. Elle cite notamment la
73
socialisation , la construction de la féminité et de la masculinité et la subordination.
Ces éléments, présents dans la vie des femmes aussi bien que dans celles des autres
membres de la société, sont envisagés par Meyers comme étant restrictifs ou limitant pour
l’autonomie. Elle ne les considère pas comme supprimant l’autonomie contrairement aux
70
71
72
MEYERS, D. Feminist perspectives on the self.
Ibid.
Nous utiliserons la présentation faite de la théorie de D. Meyers dans l’article From autonomy to agency: feminist perspectives on
self-directionde Kathryn ABRAMS (partie B.1 Feminist revisions of liberal autonomy) pour rédiger cette partie.
73
Le processus de socialisation des filles est différent de celui des garçons, ce qui signifie que les filles et les garçons sont socialisés
pour avoir des attentes et des buts différents. Cette différence n’est pas ce qui intéresse D. Meyers, c’est plutôt le fait que les filles sont
socialisées pour donner moins de valeur à l’autonomie que les hommes. Les hommes sont, eux, socialement reconnus et récompensés
dans l’exercice de l’autonomie. En ce sens, la socialisation est une limite à l’autonomie des femmes.
BURSI Sandra_2007
25
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
74
libéraux . Elle développe cet argument en distinguant trois types d’autonomie partielle ou
75
limitée pour la femme traditionnelle :
« Narrowly programmatic autonomy » : dans ce type d’autonomie, il est possible pour
un individu d’agir de façon autonome dans des situations précises même si il n’exerce pas
de contrôle sur sa propre vie. Pour D. Meyers, la femme traditionnelle ne dispose pas de ce
qu’elle appelle « global programmatic autonomy » ou autonomie pleine, qui lui permettrait
de ne pas tenir compte des attentes sociales et de répondre de façon autonome à la grande
question « Comment devrais-je vivre ma vie ? ». La femme traditionnelle dispose, en fait,
d’une « narrowly programmatic autonomy » qui lui permet de décider de façon autonome
uniquement sur des sujets plus restreints.
« Episodic autonomy » : la personne est capable d’agir avec autonomie pour certains
choix ou décisions mais pas pour d’autres, notamment pour les choix de vie à long terme.
« Partial access autonomy » : Elle permet à la personne d’accéder et de libérer
l’expression de certaines parties de son « moi » alors que d’autres restent inaccessibles
étant donné sa socialisation. D. Meyers donne l’exemple d’une femme chrétienne
fondamentaliste mère et épouse, qui n’est pas capable de trouver en elle-même ce qui lui
permettrait de s’opposer à sa propre socialisation et à celle qu’elle transmet à ses enfants.
Par contre, elle est capable de puiser en elle-même la volonté nécessaire pour s’opposer
et montrer son mécontentement à un professeur d’école qui enseignerait à ses enfants la
théorie de l’évolution.
1.2 L’autonomie comme compétence.
D. Meyers conclut que ces notions d’autonomie limitée permettent d’envisager l’autonomie
76
comme une compétence c'est-à-dire comme un ensemble d’aptitudes
propres,
introspectives, imaginatives et raisonnées qui permettent d’agir de manière consciente et
selon sa propre orientation. Les individus peinent à atteindre la « global programmatic
autonomy » quand ils manquent d’aptitude pour une ou plusieurs compétences ou bien
quand ces compétences ne sont pas coordonnées. C’est le cas de la femme traditionnelle.
La socialisation féminine, en effet, réduit le développement de l’autonomie comme
compétence. L’exercice de ces compétences n’est pas valorisé et souvent découragé.
Ainsi, la femme traditionnelle n’est capable d’accomplir qu’une autonomie partielle et non,
pleinement développée.
En définissant l’autonomie comme pouvant être partielle et comme étant une
compétence, D. Meyers montre son attachement à la réalisation de ce concept, et ce,
surtout pour les groupes qui avaient été exclus par la définition libérale. Elle s’intéresse
ainsi à la femme traditionnelle, victime de cette exclusion. L’autonomie partielle n’est pas
considérée comme une autonomie déficiente ou incomplète mais comme illustrative de
l’arbitrage constant entre autonomie et hétéronomie. Ce concept est défini comme pouvant
évoluer et suggère un changement possible vers une autonomie plus « entière ».
En somme, l’autonomie pour Meyers est une compétence qui s’acquiert par un
processus de réflexion personnelle et par le développement de l’esprit critique. Bien qu’elle
74
Pour les libéraux, l’autonomie c’est être libre d’influences extérieures. La socialisation étant une influence extérieure, elle supprime
la véritable autonomie.
75
76
STOPLER. G. The Free Exercise of Discrimination: Religious Liberty, Civic Community and Women's Equality. p 518.
L’autonomie comme compétence de Meyers diffère des vertus de Feinberg, car elle souligne le rôle des sentiments dans
l’autonomie.
26
BURSI Sandra_2007
Partie 1 : autonomie, femmes et developpement.
souligne le fait que l’autonomie se développe dans un contexte social, elle ne considère pas
l’aspect relationnel de l’individu comme déterminant.
2. Critiques de la révision féministe libérale
77
.
2.1 La socialisation n’est pas l’unique facteur affectant l’exercice de
l’autonomie.
Comme nous venons de le voir, Diana Meyers présente la socialisation féminine comme
étant la principale limite à l’autonomie des femmes. Kathryn Abrams, auteure de l’article
From autonomy to agency, reproche à D. Meyers d’avoir une conception de la socialisation
trop étroite. En effet, pour Meyers, les femmes sont socialisées depuis l’enfance pour faire
passer les intérêts des autres, notamment ceux des enfants, avant les leurs. Les hommes
sont encouragés à saisir toutes les opportunités que se présentent à eux. Hommes et
femmes évoluent donc dans deux sphères distinctes. Selon K. Abrams, cette explication
néglige les autres types de socialisations des hommes et des femmes et oublie de prendre
78
en compte d’autres éléments tels que l’androcentrisme ou la domination sexuelle, comme
limite de l’autonomie.
L’androcentrisme culturel ou institutionnel est un facteur supplémentaire affectant
79
l’autonomie. Pour certaines féministes , les inégalités dont souffrent les femmes se
perpétuent par la tendance à valoriser les normes et caractéristiques dites « masculines » et
à placer les hommes qui les exercent au centre de l’organisation sociale et institutionnelle.
Les femmes socialisées dans ce contexte acceptent la subordination de leurs intérêts à
ceux des autres, sans qu’il n’y ait un rapport avec le fait de s’occuper des enfants.
Un autre facteur important est la domination sexuelle. Les femmes battues, victimes
d’agressions sexuelles sont présentées comme étant responsables de leur sort et ces
crimes commis à leur encontre sont considérés comme des problèmes privés.
Ces deux facteurs limitent l’autonomie en restreignant l’éventail de choix des femmes.
Elles ont peurs de travailler, de se rendre à certains endroits et de donner leurs avis.
Ces femmes marginalisées se voient comme moins capables. Les différents types de
socialisation véhiculant la domination masculine, empêchent les femmes de formuler leurs
propres systèmes de valeurs. Elles intériorisent, bien souvent, les normes sociales qui
perpétuent leur subordination à tel point qu’il leurs devient impossible de distinguer si ces
normes sont d’origine interne ou externe.
2.2 L’autonomie pour les féministes structuralistes et poststructuralistes :
une dimension collective.
Les féministes structuralistes et poststructuralistes pensent que pour mieux comprendre
l’autonomie et définir les éléments qui la limitent, il faut, évidemment, prendre en compte les
différents modèles de socialisation, mais surtout étudier l’influence de la race, de la classe,
de l’orientation sexuelle et du contexte politique et sociale sur la formation de la femme
comme individu et donc sur sa capacité à être autonome.
77
78
Tirées de l’article From autonomy to agency: feminist perspectives in self-direction de Kathryn Abrams.
Point de vue masculin comme representation de l’humanité.
79
Notamment, Sandra Lipsitz Bem et son livre The lenses of gender: transforming the debate on sexual inequality,1993.
BURSI Sandra_2007
27
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
Ces féministes reprochent aussi à D. Meyers de ne pas prendre en compte le contexte
de pouvoir dans lequel la socialisation s’opère. En effet, elle ne se pose pas la question
de savoir à qui bénéficient cette socialisation et les inégalités qui en découlent. Les
structuralistes et poststructuralistes considèrent que la construction sociale est le fait de
groupes plus puissants qui socialisent des groupes moins puissants à différentes formes
de subordination. Le contexte politique prend ici une grande importance car il permet
d’envisager l’autonomie comme une forme de résistance collective contre la perte de
pouvoir. Le développement et l’exercice de l’autonomie ont donc une dimension collective.
3. De l’autonomie à l’ « agency».
K. Abrams développe dans son article From autonomy to agency, une nouvelle théorie
féministe de l’autonomie : la théorie de l’agency. L’agency tout comme l’autonomie
correspond à un processus d’autodéfintion et d’autodirection. Elle est, cependant différente,
car elle englobe dans la compréhension de ce processus toutes les critiques précédemment
citées. Autrement dit, elle prend en compte l’influence des différents types de socialisation,
l’influence du contexte de relations inégales de pouvoir et la dimension collective du
processus.
L’agency comme processus d’autodéfinition et d’autodirection passe par plusieurs
étapes. Premièrement, il s’agit, pour une femme, de prendre conscience de la façon dont
ses convictions, ses conceptions de la vie et d’elle-même sont socialement construites
et perpétuent sa domination. Ce processus de prise de conscience ne permet pas de
dépasser ces normes mais permet un début de remise en question, de résistance voire de
réinterprétation.
La deuxième idée de la théorie de l’agency est que ce processus de prise de conscience
a une dimension collective. Il se fait par le dialogue avec les autres. Les femmes, en
confrontant leurs sentiments, leurs expériences avec d’autres, comprennent que leur cas
n’est pas isolé mais qu’il est le résultat de visions et d’attentes socialement ancrées.
Les femmes s’identifient entre elles comme membres d’un même groupe. Grâce à
l’interaction au sein du groupe, elles parviennent alors à définir des objectifs de vie, qui
jusqu’alors étaient inconcevables pour elles. Pour K. Abrams, ces objectifs sont atteints
aussi grâce au groupe et à la force de l’action collective.
***
Récapitulons, pour Kant, l’autonomie c’est la capacité d’un individu de se donner ses
propres lois. Un individu est considéré autonome lorsque, face à un choix, il est rationnel et
indépendant de motivations externes. Pour J. Feinberg, l’autonomie se définit de la même
façon. Il enrichit, cependant, la conception Kantienne de l’autonomie en déterminant des
conditions à son exercice (la chance et les vertus). Les féministes, de façon générale,
considèrent l’autonomie comme un processus par lequel un individu s’auto définit et s’auto
dirige. Cet individu évolue dans un contexte social qui l’influence fortement et qui influence
aussi l’exercice de son autonomie. Diana Meyers, féministe libérale, élabore le concept
d’autonomie partielle pour rendre compte des limites que pose la socialisation à l’autonomie
de la femme dite traditionnelle. Pour les féministes structuralistes et poststructuralistes,
les individus sont influencés par des facteurs bien plus variés et complexes que la
socialisation présentée par Meyers. Elles citent notamment les relations inégales de pouvoir
qui participent à la transmission des normes et des valeurs socialement attribuées aux
femmes et qui restreignent l’exercice de leur autonomie. Enfin, la théorie de l’agency
donne à l’autonomie une dimension collective contrairement aux conceptions libérales et
28
BURSI Sandra_2007
Partie 1 : autonomie, femmes et developpement.
féministes libérales. L’interaction avec d’autres personnes, permet à un individu d’entamer
une prise de conscience nécessaire à l’autodéfinition et l’autodirection.
Le point commun à toutes ces conceptions est de définir l’autonomie comme le fait de se
donner ses propres principes et objectifs. Ces conceptions insistent, respectivement, sur la
rationalité, l’introspection et la prise de conscience au sein du groupe comme point de départ
et capacité individuelle nécessaire à l’autonomie. Elles restent, cependant, trop théoriques.
Il est nécessaire de faire correspondre aux caractéristiques de l’autonomie préalablement
définies, des indicateurs concrets, quantifiables permettant une mesure de ce phénomène.
« Concrétiser » la définition de l’autonomie ne fera que l’enrichir.
III/ A la recherche d’indicateurs concrets de l’autonomie.
1. Indicateurs de l’autonomie.
Afin de définir un cadre d’analyse de l’autonomie des femmes, nous ferons référence aux
travaux de deux auteures, Shireen Jejeebhoy, qui a traité de l’autonomie en relation avec
l’éducation et la reproduction, et Joke Schrijvers, anthropologue spécialisée en « genre et
développement ». Elles ont élaboré chacune un cadre d’analyse regroupant des indicateurs
permettant d’évaluer le degré d’autonomie des femmes. A partir de ces travaux, nous
présenterons les indicateurs définis. Puis, nous sélectionnerons ceux qui entreront dans
notre cadre d’analyse.
La recherche sociodémographique s’est attachée à définir des indicateurs directs de
l’autonomie des femmes. Bien que très nombreux, ils coïncident tous sur les dimensions
qu’ils essayent de mesurer c'est-à-dire les manifestations concrètes d’indépendance, de
80
contrôle de sa propre vie et d’action selon ses propres intérêts . Les indicateurs les plus
81
courants sont les suivants :
∙
La participation de la femme à la prise de décision au sein du foyer. Cet indicateur
82
englobe pour S. Jejeebhoy deux sous indicateurs : autorité en matière de décisions
économiques (participation aux décisions pour les dépenses du foyer) et autorité
en matière de décisions concernant les enfants (participation aux décisions qui
concernent l’éducation et la santé des enfants). On peut y ajouter la participation
à la prise de décisions concernant l’utilisation de contraceptifs et de méthodes de
planification familiale. Cet indicateur se rapproche du premier critère d’autonomie
83
définit par J. Schrijvers : « la maitrise par les femmes de leur propre sexualité et
fécondité ».
∙
La liberté de mouvement : liberté de sortir de chez soi et de son village sans avoir
à demander la permission. Cet indicateur a souvent été utilisé dans des études
concernant l’Asie car la réclusion féminine y est courante. Les travaux d’Irene
Casique à propos du Mexique montrent que cet indicateur reste pertinent pour ce
pays.
∙
Accès et contrôle des ressources économiques : avoir accès à un revenu et pouvoir
le dépenser. A cela s’ajoute, l’accès à un travail rémunéré. Plus généralement, cet
indicateur cherche à déterminer dans quelle mesure la femme participe aux dépenses
80
81
GARCIA, Brígida. Empoderamiento y autonomía de las mujeres en la investigación sociodemográfica actual. p 235.
Idem. p 235 -237.
BURSI Sandra_2007
29
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
∙
∙
∙
∙
de son foyer, et dans quelle mesure son revenu lui permet d’être financièrement
indépendante, ne serait-ce que de façon partielle.
Etre libre de violences domestiques : englobe la violence psychologique (menaces,
dévalorisation) et physique
Attitude en faveur de l’égalité des genres : perceptions qu’ont les femmes de
l’inégalité entre homme et femme et de ce qu’elles ont le droit de faire ou non. Cet
indicateur se rapproche du quatrième critère de J. Schrijvers : avoir « des conceptions
positives de leur sexe qui légitiment le sens de dignité et le respect de soi des
femmes et leur droit à l’autodétermination ».
Choix du conjoint : englobe le pouvoir ou non de choisir son conjoint, la différence
d’âge, l’existence d’un lien de parenté.
J. Schrijvers ajoute à tous ces indicateurs un critère que l’on pourrait dire
communautaire et qui correspond à l’existence de « modes de coopération et
d’organisation de femmes qui leur permettent de contrôler leurs propres affaires et les
aident dans ce sens ».
Ces indicateurs sont le plus souvent utilisés pour étudier l’influence de l’autonomie sur les
transformations démographiques. Dans ce mémoire, nous suivons une logique inverse.
Nous étudions dans quelle mesure la réalisation des coresponsabilités du programme
Oportunidades influencent les indicateurs de l’autonomie. Il est temps à présent de faire le
tri dans tous les indicateurs cités afin de ne retenir que les plus pertinents pour notre cadre
d’analyse.
2. Cadre d’analyse.
Comme nous l’avons vu précédemment, l’autonomie c’est définir ces propres valeurs et
ces propres objectifs. Dit autrement, l’autonomie c’est contrôler sa propre vie, c’est agir
selon les principes que l’on s’est fixé et de façon à atteindre les objectifs désirés, et ce,
sans être influencé ou contraint par une autre personne. L’autonomie ainsi définie s’exerce
84
à trois niveaux : au niveau de l’individu, de la famille et de la communauté . Ces trois
dimensions correspondent en quelque sorte aux trois étapes du développement théorique
de l’autonomie que nous avons présentée. L’autonomie est avant tout un processus
individuel pour les libéraux, puis, pour les féministes libérales elle est fortement influencée
par la socialisation et par le milieu familial, enfin pour les théoriciennes de l’agency
l’autonomie s’acquiert et se renforce aussi sur un plan communautaire. Ainsi, considérer
ces trois dimensions, permet d’établir une conception de l’autonomie plus complète. C’est
cette définition de l’autonomie que nous retiendrons pour ce travail.
84
30
Pour notre cadre d’analyse, ces trois dimensions seront aussi notre point de
départ. Pour chacune d’elle, une série d’indicateurs a été sélectionné. Ces indicateurs
correspondent à ce que l’autonomie signifie concrètement. Ainsi, en confrontant la
position de la femme à ces indicateurs, il est possible d’évaluer son degré d’autonomie.
Toutefois, il est important de signaler que ces trois niveaux d’autonomie ne sont pas à
prendre indépendamment, au contraire, ils s’influencent mutuellement. Par exemple, une
femme qui, au niveau individuel, connaît bien son corps et est favorable aux techniques
de contraception et de planification familiale, car elle y a été sensibilisée au niveau
communautaire, pourra mieux négocier avec son mari leurs utilisations. De même, au
niveau communautaire, le dialogue et l’entraide entre femmes renforcent leur sentiment de
confiance, ce qui améliore aussi, au niveau individuel, leur estime de soi, et leur permet
Ces trois niveaux d’analyse ont été élaboré par Shireen Jejeeboy
BURSI Sandra_2007
Partie 1 : autonomie, femmes et developpement.
d’avoir plus de courage pour imposer leurs décisions au sein de la famille. On voit donc
que les indicateurs définis ne se cantonnent pas à un seul niveau d’analyse, en réalité ils
sont transversaux.
Voici donc le cadre d’analyse qui nous permettra de déterminer si les coresponsabilités
renforcent l’autonomie des femmes participant au programme Oportunidades.
Au niveau individuel :
∙
connaissance de son corps, utilisation de la contraception et de la planification
familial ; parce que pouvoir choisir quand être enceinte, c’est contrôler sa vie et
pouvoir l’organiser en fonction des objectifs fixés.
∙
Une meilleure estime de soi : englobe une meilleure image de soi-même et le
sentiment d’être et de se sentir capable de faire les choses.
Au niveau familial :
∙
Participation à la prise de décisions :
∙
en matière économique : concerne l’assignation des revenus familiaux (de la femme
et de l’homme) aux différentes dépenses du foyer (aliments, médicaments, matériels
scolaires).
∙
concernant les enfants (éducation, santé)
∙
concernant la contraception et la planification familiale.
∙
Liberté de mouvement : sortir de chez soi et de son lieu de résidence (aller travailler,
emmener les enfants à l’école, aller au dispensaire, faire des courses, se rendre
chez des amis ou parents, participer aux activités de la communauté) sans avoir à
demander la permission au conjoint.
∙
Etre libre de menace : physique ou psychologique.
∙
Accès à un travail rémunéré et ce sans avoir à demander l’autorisation du conjoint.
Au niveau communautaire :
∙
Les femmes dialoguent et prennent conscience de leur condition. L’image qu’elles
ont d’elle-même et que les autres (les hommes) ont d’elles s’améliore, elles prennent
confiance en elle.
∙
Les femmes s’entraident. Elles s’organisent en associations pour défendre leurs
droits.
∙
Les femmes participent à la prise de décision concernant le programme : elles
donnent leur avis sur les points du programme qui les concernent et cet avis est pris
en compte.
BURSI Sandra_2007
31
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
Partie 2. Autonomie : Le cas des femmes
Oportunidades.
Chapitre 1 : Méthodologie.
N’ayant pas eu le temps ni les moyens d’enquêter moi-même, j’utiliserai, pour mener à bien
mon analyse, les résultats de deux enquêtes : la Encuesta de evaluacion de Oportunidades
en areas urbanas 2004 (ENCELURB 2004) et la Encuesta sobre violencia y toma de
decision (ENVIT 2004).
L’enquête ENCELURB 2004 est une enquête de suivie et d’évaluation du programme
Oportunidades en zones urbaines intégrées en 2002. Cette enquête nous donne accès à
deux types d’information : des informations, d’une part, sur des foyers, dits d’intervention,
intégrés au programme en 2002 et, d’autre part, sur des foyers dits de contrôle présentant
les mêmes caractéristiques économiques et sociales mais n’étant pas intégrés.
L’enquête ENVIT 2004 constitue l’outil principal du projet Encuesta sobre Violencia
y Toma de Decisiones del Programa de Coinversión Social auquel ont participé
financièrement l’Instituto Nacional de Salud Pública (INSP) et la Secretaría de Desarrollo
Social. Elle a été réalisée conjointement à l’enquête ENCELURB 2004 à laquelle elle a été
intégrée comme un module. Elle s’est appliquée à un sous échantillon aléatoire composé
de foyers intégrés en 2002 et de foyers ayant les mêmes caractéristiques économiques et
sociales mais n’étant pas intégrés, dans lesquels réside au moins une femme âgée de plus
de 18 ans, conjointe du chef de famille ou chef de famille elle-même.
Ces deux enquêtes, les plus récentes à ma disposition, nous mettent face à un premier
biais. Elles interviennent en 2004, seulement deux ans après l’incorporation au programme
des foyers urbains. Cette période d’effet de deux ans peut, donc, pour certains aspects de
notre étude se révéler trop courte pour apprécier un changement. D’autre part, ces enquêtes
n’ayant pas été conçues pour répondre à mon questionnement, il n’a pas été possible de
clairement séparer les effets des coresponsabilités du programme en général. En effet, les
seules catégories de comparaison à ma disposition sont celles de « foyer d’intervention »
et de « foyer de contrôle ». Nous nous trouvons ici face à un deuxième biais, les différences
observées entre groupe d’intervention et groupe de contrôle ne s’expliquent pas forcement
par la réalisation des coresponsabilités mais peut être par d’autres aspects du programme,
par exemple la réception par les femmes de l’aide monétaire. Ces deux catégories de
comparaison seront toutefois retenues puisque nous partons du principe que les femmes
membres, c'est-à-dire qui reçoivent les aides financières, le sont car elles remplissent les
coresponsabilités.
I/ Hypothèses et variables d’étude.
Grâce au cadre d’analyse de l’autonomie défini en première partie, nous avons pu
élaborer trois hypothèses concernant l’effet des coresponsabilités sur l’autonomie des
32
BURSI Sandra_2007
Partie 2. Autonomie : Le cas des femmes Oportunidades.
femmes membres du programme Oportunidades. Dans cette partie, nous rappellerons ces
hypothèses et nous exposerons pour chacune d’entre elles les variables d’étude.
Hypothèse 1 : Se rendre au dispensaire pour réaliser le paquete esencial et participer
aux réunions éducatives, permet aux femmes Oportunidades d'acquérir une meilleure
connaissance de leur corps et des méthodes de planification familiale qu'elles utilisent de
plus en plus. Leur confiance en elle et leurs compétences s'en trouvent donc renforcées,
ainsi que leur participation à la prise de décision concernant la contraception, la santé et
les enfants.
Hypothèse 2 : Participer aux réunions éducatives, se rendre au dispensaire, amener
les enfants à l'école, sont autant d'activités qui conduisent les femmes Oportunidades à
sortir des plus en plus de leur foyer augmentant ainsi leur liberté de mouvement. Ces sorties
permettent le développement des contacts et du dialogue entre femmes. Des réseaux
d’entraides informels ainsi que des groupes de femmes défendant leur droit se créent. La
participation de ces femmes à la prise de décision au sein de leur foyer ainsi qu'au sein de
la communauté se renforce.
Hypothèse 3 : La participation aux coresponsabilités est contraignante. Elle représente
une charge horaire de travail trop importante pour les femmes Oportunidades et constitue
une entrave au travail rémunéré.
Pour chacune de ces trois hypothèses, la principale variable indépendante est le statut
d’incorporation au programme (intervention ou contrôle) et par extension la réalisation des
coresponsabilités. Les variables dépendantes propres à chaque hypothèse renvoient aux
indicateurs de l’autonomie définis dans le cadre d’analyse. Ces variables dépendantes
seront analysées dans leur relation avec la variable indépendante du statut d’incorporation
au programme.
Pour l’hypothèse 1, les variables dépendantes sont :
la connaissance de son corps : connaissance relative à la planification familiale, la
contraception et la santé.
La mise en pratique de ce savoir : utilisation des méthodes de contraception et de
protection contre le HIV, réalisation des différents dépistages.
Participation à la prise de décision concernant la contraception et la santé : qui décide
dans le foyer à ce sujet, la femme doit-elle demander la permission à son mari pour avoir
recours à la contraception, se faire soigner ?
Participation à la prise de décisions concernant les enfants : qui décide dans le foyer
au sujet de leur éducation, de leur santé.
Pour l’hypothèse 2 :
la liberté de mouvement.
création de réseaux d’entraide et d’associations.
pouvoir de décision au sein de la communauté : les femmes sont-elles consultées sur
l’organisation de la communauté ? Leur avis est il pris en compte?
∙
participation à la prise de décisions concernant le programme :les femmes donnentelles leur avis sur les points du programme qui les concernent ? Cet avis est-il pris en
compte ?
Pour l’hypothèse 3 :
BURSI Sandra_2007
33
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
Charge horaire que représentent le travail domestique et le travail rémunéré.
Charge horaire que représente l’assistance aux réunions éducatives (coresponsabilité
de santé).
II/ Méthodologie propre à chaque hypothèse.
Après avoir défini les variables d’études pour chaque hypothèse, nous avons sélectionné
des questions nous permettant de traiter ces variables.
Pour l’hypothèse 1, nous avons sélectionné un ensemble de questions. Puis en fonction
des réponses, nous avons attribué un score, le plus haut étant relatif à une situation
d’autonomie et la plus bas à une absence d’autonomie.
Pour la variable connaissance de son corps, nous avons sélectionné dans l’enquête
ENCELURB 2004, deux questions de connaissances générales : Avez-vous déjà entendu
parler des méthodes contraceptives ?, Une femme peut elle tomber enceinte lors du premier
rapport sexuel ? et deux questions de connaissance technique : Savez-vous à quoi sert le
85
test de Papanicolaou ?, Savez-vous pratiquez l’auto examen de la poitrine ? A chaque
réponse est assignée une valeur. Ainsi, la réponse « oui » = 1 et la réponse « non » = 0.
La variable connaissance de son corps est, alors, un score allant de 0 à 4, 4 étant le plus
haut niveau de connaissance.
Pour la variable Mise en pratique de ce savoir, nous avons sélectionné dans l’enquête
ENCELURB 2004 les questions suivantes : Avez-vous effectué ces derniers mois le test de
Papanicolaou ? Réponse « oui » =1, réponse « non » = 0.
La dernière fois que vous avez eu des relations sexuelles, qu’avez-vous fait pour ne
pas tomber enceinte ? Réponse « J’ai utilisé une méthode contraceptive » = 1, réponse « je
n’ai rien fait » = 0
Quelle méthode utilisez-vous pour éviter le sida ? Réponse «J’ai utilisé un préservatif »
=1, réponse « Je n’ai rien utilisé » = 0.
La variable mise en pratique est un score allant de 0 à 3, 3 étant le plus haut niveau
de mise en pratique.
La variable Participation à la prise de décision concernant la santé et la contraception
se divise en trois groupes de questions (issues de l’enquête ENVIT 2004):
Dans votre foyer, qui décide de l’utilisation de méthodes contraceptives ? Qui décide si
vous devez ou non aller chez le docteur ? Réponse « l’interviewée » = 2, « les deux » =1, « le
conjoint, fille, fils ou autres membres du foyer » = 0. On attribut à la réponse « l’interviewée »
la plus haute valeur, car prendre seule une décision relève d’une forte autonomie.
A quelle fréquence devez-vous demander la permission à votre conjoint pour utiliser
un contraceptif ? Pour aller chez le docteur ? Réponse « Jamais »= 3, « Peu de fois »=
2, « De nombreuses fois »= 1, « presque toujours »= 0. La plus haute valeur, 3, fait état
d’une indépendance dans la prise de décision vis-à-vis du conjoint, inversement la valeur
0 souligne une dépendance, une absence de liberté.
Dans votre foyer qui décide combien d’enfants avoir ? Réponse « les deux »= 2,
« l’interviewée » = 1, « conjoint ou autre personne du foyer »= 0. Ici, la plus haute valeur est
85
34
Le test de Papanicolaou sert à depister le cancer de l’utérus.
BURSI Sandra_2007
Partie 2. Autonomie : Le cas des femmes Oportunidades.
attribué à la réponse « les deux », car il me semble qu’avoir des enfants est une décision
de couple.
La variable « Participation à la prise de décision concernant la santé et la
contraception » est un score allant de 0 à 12. Un score de 0 à 3 indique une faible
participation à la prise de décisions, de 4 à 6 une participation moyenne, de 7 à 10 une
participation forte et enfin un score de 11 ou 12 signifie une participation très forte.
Pour la variable Participation à la prise de décision concernant les enfants, nous
avons sélectionné les questions suivantes (ENVIT 2004) : Dans votre foyer, qui décide de
l’éducation des garçons ? De l’éducation des filles ? De la discipline ? Quoi faire quand
les enfants sont malades ? Réponse « l’interviewée »=2, « les deux »= 1, « le conjoint ou
autre membres du foyer »=0. Cette variable est donc représentée par un score allant de 0
à 8. Un score de 0 à 3 indique une faible participation à la prise de décisions, de 4 à 6 une
participation moyenne et 7 ou 8, une participation forte.
1.
Pour l’hypothèse deux, nous avons utilisé la même méthodologie que pour l’hypothèse
Pour la variable liberté de mouvement, nous avons sélectionné les questions suivantes
(ENVIT 2004) : A quelle fréquence devez-vous demander la permission a votre conjoint
pour travailler ? Visiter des parents ou amis ? Aller chez le docteur ? Participer à une
organisation ? Réponse « Jamais »= 3, « Peu de fois »= 2, « De nombreuses fois »= 1,
« presque toujours »= 0. « Jamais » étant la réponse faisant état d’une très grande liberté
de mouvement. Cette variable est donc représentée par un score allant de 0 à 12, avec de
0 à 4 une liberté de mouvement faible, de 5 à 7 une liberté de mouvement moyenne, de 8
à 10 haute et pour 11 et 12, très haute.
Pour les variables suivantes, création de réseaux d’entraide et d’associations, pouvoir
de décision au sein de la communauté, participation à la prise de décisions concernant
le programme, les enquêtes ENCELURB et ENVIT ne contiennent pas de questions s’y
rapprochant. Nous traiterons donc cette partie de l’hypothèse 2 en ayant recours à la
littérature d’évaluation du programme.
Enfin, pour l’hypothèse 3, nous avons sélectionné les questions suivantes :
Combien d’heure par semaine travaillez-vous (travail rémunéré)?
La semaine dernière, combien d’heures avez-vous dédié au maintien de la maison
(repasser, nettoyer, laver le linge) ?
La semaine dernière, combien d’heures avez-vous dédié à vos enfants (aide au devoir,
les accompagner a l’école, les laver, les surveiller) ?
En ce qui concerne le poids des coresponsabilités, nous n’avons pu trouver que deux
questions faisant référence aux réunions éducatives.
De combien de temps avez-vous besoin pour vous rendre et assister aux réunions
éducatives ?
A combien de réunions éducatives vous êtes-vous rendues l’année dernière ?
Les réponses à ces questions nous permettrons d’effectuer une comparaison de la
charge horaire que représentent le travail domestique et le travail rémunéré entre les
femmes du groupe d’intervention et du groupe de contrôle. Puis nous évaluerons la charge
horaire additionnelle que représentent les coresponsabilités pour les femmes membres du
programme Oportunidades. Etant donné que cette enquête n’a pas été conçue pour mon
questionnement, les autres aspects des coresponsabilités tels que les rendez-vous aux
BURSI Sandra_2007
35
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
dispensaires (pour elle et les enfants) ne pourront être évalués car aucune question de
l’enquête n’y fait référence.
Chapitre 2 : Résultats.
Nous avons, pour réaliser cette étude, constitué deux échantillons à partir des enquêtes
Encelurb et Envit 2004. Pour ce faire, nous sommes partis de l’échantillon utilisé par
l’enquête ENVIT, composé de 2085 femmes membres du groupe d’intervention et de 869
femmes membres du groupe de contrôle, et avons sélectionné de manière aléatoire dans
l’enquête Encelurb un échantillon de même taille et de même proportion.
Tableau 1 : Echantillon
Groupes
Intervention
Contrôle
Nombre de femmes
2085
869
Pourcentage
70.6%
29.4%
Ensuite, nous avons réalisé une comparaison de certaines données démographiques
entre les femmes des deux échantillons, et ce, afin de voir si leurs caractéristiques sont
semblables.
Ainsi, on remarque que la moyenne d’âge des femmes des deux échantillons est
semblable (39,4 Ans pour l’échantillon Envit et 34.7 pour l’échantillon Encelurb). On constate
aussi que pour les deux échantillons, la majorité des femmes sont mariées (61.9% pour
Encelurb et 60.4% pour Envit). Quant au niveau d’études, la majorité des femmes ont fini
le primaire (54% pour Encelurb et 55.5% pour Envit).
I/ Hypothèse 1.
Après avoir suivie la méthodologie définie pour cette hypothèse, nous obtenons les résultats
suivants :
Tableau 2: résultats des calculs pour l’hypothèse 1.
36
BURSI Sandra_2007
Partie 2. Autonomie : Le cas des femmes Oportunidades.
∙
∙
∙
∙
Pour les deux groupes, une large majorité possède une forte connaissance de son
corps. On note toutefois une différence de 5 points entre le groupe d’intervention et
le groupe de contrôle, avec un pourcentage respectif de 80,7% et 75,6%. Si on entre
dans le détail des questions composant cette variable, on constate que les questions
de connaissance plus techniques (Graphiques 1 et 2) sont mieux maîtrisées par les
femmes membres du groupe d’intervention.
Graphique 1: Savez- vous à quoi sert le test de Papanicolaou ?
Graphique 2: Savez- vous pratiquer l’auto examen de la poitrine ?
En s’intéressant de plus près aux femmes du groupe d’intervention et à leur avis sur les
réunions éducatives (Graphique 3 et 4), on constate qu’elles en sont largement satisfaites.
62,8% d’entre elles affirment même qu’elles les ont beaucoup aidées à améliorer leur santé.
Graphique 3: Les réunions éducatives vous ont-elles aidées à améliorer votre santé ?
BURSI Sandra_2007
37
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
Graphique 4: Pensez- vous qu’il faut maintenir ou arrêter les réunions éducatives ?
∙
Quant à la mise en pratique de ce savoir, on note que dans chaque groupe, environ ¾
des femmes obtiennent un score moyen. Le pourcentage de femmes ayant un niveau
élevé de mise en pratique est plutôt faible, dans chaque groupe. Toutefois, le groupe
d’intervention obtient un meilleur pourcentage de 17,1% contre 14,5% pour le groupe
de contrôle. Là encore, on remarque que la mise en pratique des connaissances
techniques est plus élevée chez les femmes Oportunidades (Graphique 5). En effet,
elles sont 32,1% à affirmer avoir réalisé le test de Papanicolaou ces derniers mois
contre 25,8% pour le groupe de contrôle. Il faut toutefois souligner que dans chaque
groupe, une très large majorité des femmes disent ne pas avoir fait le test.
∙
Graphique 5: Ces derniers mois, avez-vous réalisé le test de Papanicolaou ?
∙
En matière de participation à la prise de décision concernant la santé, le pourcentage
de femmes obtenant un score très fort est plus élevé pour le groupe d’intervention
(27,7%). Par contre, le pourcentage de femmes ayant un score fort est plus élevé
pour le groupe de contrôle (62,1% contre 56,3). Dans le détail, à la question « qui
décide dans votre foyer au sujet de la contraception ? », on constate que dans
chaque groupe, 2/3 des femmes affirment prendre cette décision avec leur mari. Le
pourcentage de femmes prenant seules cette décision est plus élevé dans le groupe
d’intervention (26,7% contre 20,9% pour le groupe de contrôle). On remarque aussi
que le pourcentage de femmes pour lesquelles le mari décide de la contraception
est plus élevé dans le groupe de contrôle (14% contre 8,4%). A la question « qui
décide si vous devez aller chez le docteur ? », les femmes membres du programme
Oportunidades sont plus nombreuses à répondre qu’elles prennent cette décision
seule.(Graphique 6)
Graphique 6: Qui décide si vous devez aller chez le docteur ou non?
∙
Pour la variable « participation à la prise de décision concernant les enfants », on
constate que le pourcentage de femmes obtenant un score élevé est plus grand
pour le groupe d’intervention (11.9%). Cependant, la différence avec le groupe
de contrôle n’est seulement que de 2,8 points. Si on regarde plus en détail les
questions qui composent cette variable, on remarque que, pour les deux groupes,
entre 60 et 70% des femmes affirment prendre les décisions concernant les enfants
avec leur mari. On remarque aussi que pour les questions « Qui décide de la
discipline ? » (Graphique 7) et « Qui décide quoi faire quand les enfants sont
malades ? » (Graphique 8), le pourcentage des femmes décidant seules est plus
élevé pour le groupe d’intervention et que le pourcentage des femmes laissant le mari
décidé est plus élevé pour le groupe de contrôle.
∙
∙
Graphique 7: Qui décide de la discipline ?
Graphique 8: Qui décide quoi faire quand les enfants sont malades?
On constate donc qu’il existe pour chacune des quatre variables une différence entre
le groupe d’intervention et le groupe de contrôle. Pour déterminer si cette différence
38
BURSI Sandra_2007
Partie 2. Autonomie : Le cas des femmes Oportunidades.
86
87
est statistiquement significative, nous aurons recours à une ANOVA . L’ANOVA est un
test statistique qui compare la variabilité au sein des groupes (intragroupe) et entre les
groupes (intergroupe), dans notre cas le groupe d’intervention et le groupe de contrôle.
Par exemple, si la variabilité intragroupe est plus faible que la variabilité intergroupe alors
il est vraisemblable que le critère définissant les groupes soit une bonne explication de
l’hétérogénéité de la variable dépendante. Vous trouverez dans le tableau 2 pour chaque
variable la probabilité p associée à ce test. Si p<0,05, l’hypothèse d’une absence de
différence entre les deux groupes peut être rejetée. On peut alors conclure que la différence
entre les deux groupes est significative.
Tableau 3: Probabilités associées au test de l’ANOVA.
Au vu des résultats, il existe donc une différence significative entre le groupe
d’intervention et le groupe de contrôle pour les variables « Connaissance de son corps »,
« Mise en pratique » et « Prise de décision concernant la contraception ». La différence
observée entre le groupe d’intervention et le groupe de contrôle pour le variable « prise
de décisions concernant les enfants » n’est pas significative car p>0,1. L’étude de cette
variable s’arrête donc ici.
Le test de l’ANOVA nous permet aussi de conclure, pour une probabilité p<0,05, à
l’existence d’une relation entre la variable indépendante « type de foyer » et les variables
dépendantes 1,2 et 3. L’existence de cette relation est confirmée par le test du khi ²
88
. Ces deux tests soulignent uniquement l’existence d’une relation mais ne permettent
d’en déterminer la nature ni la force. Ainsi, grâce au calcul l’Eta carré (n²), il est possible
d’apprécier l’effet de la variable « type de foyer » sur la variabilité des variables 1, 2 et
3. Nous obtenons les résultats suivants : respectivement, n²= 0,077, n²= 0,021, n²=0,052.
89
Jacob Cohen , statisticien a défini des balises de l’eta au carré :
autour de 0,01, l’effet est de petite taille
autour de 0,06, l’effet est de moyenne taille.
Autour de 0,14 et plus, l’effet est de grande taille.
Ainsi, nous pouvons conclure que :
l’effet de la variable « type de foyer » sur la variable « connaissance de son corps »
est moyen.
l’effet de la variable « type de foyer » sur la variable « mise en pratique » est faible.
L’effet de la variable « type de foyer » sur la variable « prise de décisions concernant
la contraception et la santé» est moyen.
Nous pouvons ajouter qu’en croisant les variables, «connaissance de son corps » et
« mise en pratique », nous obtenons une probabilité p<0,05 pour le test du khi², ce qui
signifie qu’il existe une relation entre ces deux variables. De plus, nous obtenons un Eta
carré n²= 0,176. L’effet de la variable « connaissance de son corps » sur la variable « mise
en pratique » est très fort.
86
87
88
Pour le détail des resultats, voir annexes 2.
MARTIN, Olivier. L’analyse des données quantitives. P 93 à 98.
Le test KHI² permet de determiner l’existence d’une relation entre deux variables. Plus la probabilité associée au khi² est
faible (p<0,05), moins l’hypothèse d’indépendance entre les deux variables est crédible. Ainsi, quand p<0,05 l’hypothèse de l’existence
d’un lien entre ces deux variables est acceptable. Pour le détail des résultats voir annexe 3.
89
SPSS à l’UDES: http://pages.usherbrooke.ca/spss/pages/statistiques-inferentielles/test-t-dependant/interpretation.php
BURSI Sandra_2007
39
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
II/ Hypothèse 2.
Tableau 4: Résultats des calculs pour la variable liberté de mouvement
(hypothèse 2)
Liberté de mouvement
Faible
Moyenne
Haute
Très Haute
Groupe d’intervention
24.7%
20.4%
32.1%
22.8%
Groupe de contrôle
24.6%
21.6%
32.5%
21.3%
On constate peu de différence entre les scores du groupe d’intervention et du groupe de
contrôle. On peut tout de même noter que le pourcentage de femmes ayant une très grande
liberté de mouvement est plus important pour le groupe d’intervention. Si on s’intéresse
aux questions composant cette variable, on remarque que pour les questions « A quelle
fréquence devez-vous demander la permission à votre mari pour aller chez le docteur ? »
et « … pour participer à une organisation ? », la majorité des femmes dans les deux
groupes répond « jamais ». Aux questions « A quelle fréquence devez-vous demander la
permission à votre mari pour rendre visite a vos parents ou amis ? » (Graphique 9) et « …
pour travailler ? », environ 40% des femmes dans les deux groupes répondent « jamais ».
Toutefois, on remarque que pour la première de ces deux questions le pourcentage de
femmes ayant répondu « toujours » est plus élevé pour le groupe d’intervention, alors que le
pourcentage de femme ayant répondu « jamais » est plus élevé pour le groupe de contrôle.
Graphique 9: Permission pour rendre visite à des parents ou amis.
Nous avons ensuite, comme pour les variables de l’hypothèse 1, réaliser une ANOVA.
La probabilité obtenue est largement supérieure à 0,05, la différence existant entre les deux
groupes n’est donc pas significative. Ce test nous permet aussi de conclure qu’il n’existe pas
de relation entre la variable « type de foyer » et « liberté de mouvement ». Pour les autres
variables de l’hypothèse, les enquêtes ne nous fournissent pas d’éléments permettant de
les traiter. Nous aurons recours à certains documents d’évaluation traitant de ce sujet dans
la partie discussion.
III/ Hypothèse 3.
Tableau 5: moyenne du nombre d’heure accordée à chaque activité
(Hypothèse 3)
Intervention
Travail rémunéré/semaine 40h
Maison / semaine
13h10
Enfants/semaine
15h49
Contrôle
37h35
12h33
15h04
On constate donc que les femmes membres du groupe d’intervention consacrent en
moyenne plus temps au travail rémunéré que le groupe de contrôle. On remarque aussi
40
BURSI Sandra_2007
Partie 2. Autonomie : Le cas des femmes Oportunidades.
qu’elles passent plus de temps à s’occuper de la maison (différence de 37 min par semaine)
et des enfants (différence de 45 min par semaine).
Comparons maintenant le temps consacré aux enfants en fonction de l’âge des femmes
des deux groupes. On constate premièrement, pour les deux groupes, que le temps
consacré est plus important pour les femmes de 19 à 45 ans, et ce parce qu’elles ont des
enfants à charge. En moyenne, elles consacrent 19h par semaine aux enfants. On remarque
toutefois que les femmes du groupe d’intervention, âgées de 19 à 45, passent plus de
temps à s’occuper des enfants que les femmes du groupe de contrôle ayant le même âge
(Graphique 10). Pour la classe d’âge [19- 25], la différence est de 4h34 et pour la classe
[26- 35] de 3h12.
Graphique 10 : Moyenne du nombre d’heures consacrées par semaine aux enfants en
fonction de l’âge et du statut (Intervention ou contrôle) des femmes.
Comme pour les hypothèses précédentes, nous avons réalisé une ANOVA pour
déterminer si les différences constatées entre groupe d’intervention et groupe de contrôle
pour les trois activités sont significatives. Les probabilités associées à ce test sont, pour
chaque activité, inférieures à 0,001, nous pouvons donc conclure que les différences
constatées sont significatives. Nous avons ensuite calculé l’eta au carré (n²) qui nous permet
d’apprécier l’effet de la variable « type de foyer » sur la variabilité des variables 1, 2 et 3.
Nous obtenons pour l’activité travail rémunéré n²= 0.023, pour le travail domestique n²=
0.062 et pour le soin apporté aux enfants n²= 0.092.
Pour l’activité « travail rémunéré », nous pouvons donc conclure que l’effet de la variable
« type de foyer » est faible car n² est proche de 0.01. Le statut d’incorporation n’est pas
suffisant pour expliquer la différence qui existe entre groupe d’intervention et groupe de
BURSI Sandra_2007
41
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
contrôle. Appartenir ou non au programme n’explique pas le temps consacré au travail
rémunéré.
Pour les activités relatives à la maison et aux enfants, nous pouvons conclure que
l’effet de la variable « type de foyer » est moyen car n² est proche de 0.05. Les différences
constatées entre les deux groupes s’expliquent en partie par le statut d’incorporation au
programme. Il serait nécessaire d’entreprendre des calculs plus poussés pour déterminer
si la variable « type de foyer » est le premier des facteurs expliquant cette différence.
Cependant, étant donné la complexité de ce type de calcul, je m’arrêterais ici.
Nous avons donc calculé le temps que les femmes de chaque groupe consacrent à ces
activités et les différences qui existaient. Si on s’intéresse plus particulièrement au poids des
coresponsabilités et plus précisément des réunions éducatives, on constate qu’en moyenne
les femmes membres du programme y consacrent 1h 45. Il faut toutefois souligner qu’en
moyenne les femmes membres du programme se rendent à 4 réunions par an (même si
dans les textes, ces réunions sont mensuelles). Le poids des coresponsabilités semble donc
à relativiser.
Graphique 11: Nombre d’heures consacrées aux réunions éducatives.
Pour la deuxième partie de notre hypothèse « les coresponsabilités sont une entrave
au travail rémunéré », nous comparerons les réponses des femmes des deux groupes
à la question « A quelle activité vous êtes vous, principalement, consacré la semaine
dernière ? » (Tableau 5).
On remarque, pour les deux groupes, que les femmes appartenant aux classes d’âge
(de 19 à 45ans) qui consacrent le plus temps aux enfants et à la maison, ont, en majorité,
comme activité principale les tâches domestiques. Elles ne sont qu’un tiers à détenir un
travail rémunéré.
Pour les mêmes classes d’âge, les différences entre groupe d’intervention et groupe
de contrôle pour l’activité « travail rémunéré », ne semblent pas assez importantes pour
appuyer la deuxième partie de notre hypothèse. En effet, étant donné que les femmes de
19 à 45 ans, membres du groupe d’intervention, passent plus de temps à s’occuper de la
42
BURSI Sandra_2007
Partie 2. Autonomie : Le cas des femmes Oportunidades.
maison et des enfants, on pourrait penser qu’elles délaissent plus le travail rémunéré. Or,
le pourcentage des femmes du groupe d’intervention ayant un travail rémunéré diffère peu
de celui des femmes du groupe de contrôle. Il semblerait donc que le statut d’incorporation
au programme n’influe pas sur la poursuite d’un travail rémunéré.
Tableau 6 : Pourcentage de femmes ayant pour activité principale le travail rémunéré
ou les tâches domestiques selon l’âge et le statut.
Moins de 18 ans
19- 25 ans
26- 35 ans
36- 45 ans
46- 55 ans
55 ans et plus
Travail rémunéré
I
C
5.7%
4.9%
26.4%
25%
29.6%
29.6%
31.5%
31.4%
29.6%
35.4%
17.4%
16.6%
Tâches domestiques
I
C
9%
8.5%
60%
58.2%
64.7%
65.1%
63.2%
62.3%
63.1%
60%
64.9%
58.6%
Il faut tout de même noter que les femmes, qu’elles soient membres ou non du
programme, restent encore principalement rattachées à la sphère domestique comme nous
le montre le tableau 5.
En comparant le temps que les femmes et les hommes, des deux groupes, consacrent
aux activités détaillées dans le tableau 4, on remarque que, pour notre échantillon, la division
sexuelle des tâches reste encore une réalité. En effet, par semaine, les hommes consacrent
plus de temps au travail rémunéré. Par contre, pour les activités dites domestiques qui
englobent le temps consacré à la maison et aux enfants, les hommes, des deux groupes,
y consacrent moitié moins de temps, que les femmes.
Graphique 12 : Nombre d’heures par semaine consacrées à chaque activité selon le
sexe.
BURSI Sandra_2007
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LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
Il faut toutefois souligner que les hommes membres du groupe d’intervention y passent
plus de temps que les hommes du groupe de contrôle, avec en moyenne une différence de
1H26 pour la maison et 1H56 concernant les enfants. (Graphique 13)
Graphique 13: Moyenne du nombre d’heures consacrées par semaine aux activités
domestiques (hommes).
44
BURSI Sandra_2007
Partie 2. Autonomie : Le cas des femmes Oportunidades.
Chapitre 3 : Discussion.
L’objet de ce travail est d’évaluer si les coresponsabilités permettent le renforcement
de l’autonomie des femmes membres du programme Oportunidades. Grâce à l’analyse
des données des enquêtes ENCELURB et ENVIT 2004, nous avons pu traiter nos trois
hypothèses cependant de façon incomplète. Nous avons toutefois obtenu des résultats
que nous allons interpréter ici et compléter par certaines évaluations du programme
Oportunidades y faisant référence.
I/ Coresponsabilités et autonomie au niveau individuel et familial.
1. La variable « connaissance de son corps », indicateur de l’autonomie
individuelle, est renforcée.
Les résultats obtenus pour l’hypothèse 1 nous permettent de conclure que les
coresponsabilités en matière de santé sont liées au niveau élevé de connaissance constaté
chez les femmes du groupe d’intervention et donc qu’elles sont le facteur qui renforcent
cet aspect de l’autonomie. Les femmes membres montrent d’ailleurs une très grande
satisfaction à l’égard des réunions éducatives qui leur ont permis d’améliorer leur santé.
90
Cet aspect a été aussi souligné pour les zones rurales dans les évaluations de 2000 .
Plus particulièrement, l’étude intitulée El impacto de Progresa en la condicion de la mujer y
en las relaciones al interior del hogar souligne qu’en général les femmes membres disent en
90
ADATO, M. Evaluacion de resultados del programa de educacion, salud y alimentacion. p 88.
BURSI Sandra_2007
45
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
savoir plus et notamment dans des domaines nouveaux tels que l’alimentation, les maladies
et l’hygiène.
Enfin, il faut aussi souligner que le niveau de connaissance de son corps, même si il
est plus élevé chez les femmes Oportunidades, est très bon chez les femmes membres
du groupe de contrôle. On peut surement attribuer cela aux campagnes de sensibilisation
menées à la radio par la Secretaria de Salud, ainsi que par un accès plus simple en milieu
urbain aux différentes institutions de santé, notamment celles affiliés à la sécurité sociale
et al Seguro Popular
Les résultats statistiques révèlent ensuite une faible incidence des coresponsabilités
sur la mise en pratique. Les coresponsabilités de santé ne semblent donc pas renforcer
91
cet aspect. Les conclusions de l’évaluation 2004 concernant la santé vont dans ce sens.
En effet, elles font état de l’impact positif du programme sur la connaissance et l’utilisation
des méthodes de planification familiale en milieu rural alors qu’au niveau urbain, seule la
connaissance semble renforcée. On peut surement attribuer cet élément au fait que les
connaissances acquises ont besoins de temps pour être mise en pratique, surtout lorsqu’il
s’agit de pratiques relatives à des thèmes sensibles tels que la contraception, encore tabou
dans la société mexicaine et religieusement connotée. Les foyers urbains étant intégrés en
2002, les enquêtes de 2004 interviennent trop tôt pour pouvoir conclure à un renforcement.
Cependant, nous avons mis en évidence grâce à l’analyse statistique la forte incidence
d’un niveau élevé de connaissance de son corps sur la mise en pratique. Ainsi, au vu de ce
que nous savons, les femmes membres ayant un niveau plus élevé de connaissance, elles
sont donc plus aptes à mettre en pratique ce savoir. Ceci pourrait constituer une nouvelle
hypothèse de recherche à traiter avec des enquêtes plus récentes.
Pour ce qui est de la confiance en soi, élément que nous n’avons pas pu traiter
statistiquement, les évaluations n’y font pas référence comme pouvant être la conséquence
d’une meilleure connaissance de son corps mais plutôt comme le résultat de la place donnée
92
à la femme dans le programme . En effet, le programme a permis de souligner l’importance
des femmes au sein de la famille et leur reconnaît un grade de responsabilité plus élevé
que les hommes. Il en résulte pour les femmes membres une meilleure estime de soi et
une meilleure confiance en elle. Elles ne sont désormais plus vues uniquement comme des
femmes au foyer.
En ce qui concerne la première partie de cette hypothèse, nous pouvons conclure
que les coresponsabilités de santé liées au programme Oportunidades, permettent le
renforcement d’un des indicateurs de l’autonomie individuelle : la connaissance de son
corps. Pour ce qui est de la mise en pratique de ce savoir, autre indicateur de cette
dimension de l’autonomie, nous ne pouvons pas conclure à un renforcement de la part
des coresponsabilités. Il serait nécessaire de conduire de nouveau une analyse avec des
enquêtes plus récentes. Enfin, la dernier indicateur est l’estime de soi, la aussi nous ne
pouvons pas conclure a un effet positif des coresponsabilités sur cet aspect. En se référant
à la littérature d’évaluation du programme, nous avons une première confirmation du
renforcement de l’estime de soi néanmoins celui-ci n’est pas attribué aux coresponsabilités.
Ceci pour constituer une nouvelle hypothèse de recherche.
91
92
46
HERNANDEZ,B. Evaluacion externa del impacto del Programe Oportunidades 2004: Salud. p 126.
ADATO, M. Evaluacion de resultados del programa de educacion, salud y alimentacion. p 84.
BURSI Sandra_2007
Partie 2. Autonomie : Le cas des femmes Oportunidades.
2. La variable « participation à la prise de décisions concernant la
contraception et la santé », indicateur de l’autonomie familiale, est
renforcée.
La participation à la prise de décision concernant la santé et la contraception, est, elle aussi,
affectée positivement par l’incorporation au programme et par extension par la réalisation
de coresponsabilités. En effet, on constate, d’une part, que les femmes membres du
programme sont plus nombreuses à obtenir un score très élevé. Cela peut sans doute
s’expliquer par une valorisation du savoir des femmes, par elle-même et par les hommes,
et par une plus grande légitimité à le faire valoir. Ceci ne constitue évidemment qu’une
supposition puisque les éléments à ma disposition ne permettent pas de le démontrer. Il
serait intéressant d’avoir recours à des entretiens pour déterminer quelle vision ont les
femmes et les hommes de ce savoir et comment cela influe-t-il sur la prise de décision en
matière de santé et de contraception.
D’autre part, on constate, dans le détail des questions, que les femmes Oportunidades
sont plus nombreuses à affirmer prendre ce genre de décision seule. Ceci tend à démontrer
que ces femmes ont un plus haut degré d’autonomie puisqu’elles décident seules à propos
des sujets qui concernent leur propre vie. Cependant, cet aspect est à nuancer. En effet,
les enquêtes utilisées ne nous permettent pas de conclure que décider seule c’est décider
sans contrainte ni que décider seule c’est obtenir le respect de la décision prise, notamment
par le conjoint.
Enfin, pour la participation à la prise de décision concernant les enfants, l’analyse
statistique ne nous permet pas de conclure à une différence significative. Cela peut être
simplement du à l’absence de lien avec les coresponsabilités ou bien à une période
d’évaluation trop courte comme pour le cas de la mise en pratique. Cependant, il est tout
de même intéressant d’analyser les réponses fournies aux questions composants cette
variable. On remarque que pour les questions concernant la discipline et que faire quand
les enfants sont malades, les femmes Oportunidades sont plus nombreuses à répondre
qu’elles décident seules. Ceci pourrait s’expliquer, premièrement, par une autorité plus
grande des femmes au sein du foyer, héritée de la position centrale qu’elles occupent dans
le programme. Et deuxièmement, par la reconnaissance de leur savoir en matière de santé,
ce qui en fait des personnes plus aptes à décider à ce sujet. La encore, tout ceci reste à
démontrer.
Toujours en ce qui concerne notre première hypothèse, nous pouvons conclure au
renforcement d’un des indicateurs de l’autonomie familiale : la participation à la prise de
décision concernant la contraception et la santé. Quant à la participation à la prise de
décisions concernant les enfants, rien ne nous permet de conclure à un renforcement, ni
même à un quelconque lien avec le statut d’incorporation du programme.
II/ Coresponsabilités et autonomie au niveau communautaire.
1. Les coresponsabilités ne renforcent pas la liberté de mouvement.
Concernant l’hypothèse 2, les données à notre disposition ne nous ont permis que de traiter
la variable « liberté de mouvement ». Nous pouvons dire à ce sujet que les résultats obtenus
ne nous permettent pas de conclure à une différence significative entre les deux groupes ni
même à lien entre cette variable et le type de foyer. Ainsi, compte tenu de nos résultats, nous
concluons que le statut d’incorporation au programme ne semble pas avoir d’incidence sur la
BURSI Sandra_2007
47
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
liberté de mouvement des femmes en zones urbaines. Les coresponsabilités ne renforcent
donc pas cet aspect de l’autonomie au niveau familiale.
Si l’on cherche du coté des évaluations du programme, la liberté de mouvement n’est
mentionnée que dans les évaluations en milieu rural de 1998 à 2000. Il y est dit que
93
les bénéficiaires et les promotoras font état de changement personnel tel qu’une plus
grande liberté de mouvement, confiance en elle et ouverture d’esprit. Ces changements
94
sont cependant bien plus fréquents chez les promotoras . Ces évaluations ajoutent aussi
que cette nouvelle liberté de mouvement est reconnue et qu’elle ne se fait pas au prix d’une
95
détérioration des relations au sein du foyer .
2. Les coresponsabilités participent au développement de nouvelles formes
de solidarité.
Concernant la deuxième partie de l’hypothèse 2 que nous n’avons pas pu traiter
(développement du dialogue entre les femmes, création de réseau d’entraide et
d’association), l’enquête qualitative de 2003 en zones urbaines conclut que les femmes
Oportunidades participent plus aux réseaux d’entraide et de coopération, qu’ils aient ou
non rapport avec le programme. Les réunions éducatives et les réunions et rendez-vous
au dispensaire permettent aux femmes de partager leurs problèmes et de s’entraider. Elles
sont aussi l’occasion pour les promotoras de parler du programme, de son fonctionnement
96
et de répondre aux questions des bénéficiaires. Dans certaines localités, des groupes
de femmes ont été crées comme moyen d’entraide, notamment dans les cas de violences
conjugales ou pour les femmes dont le mari a émigré. Le programme, par les biais des
coresponsabilités, semble donc permettre la création de nouvelles formes de solidarité entre
ces membres et particulièrement entre les femmes, même si l’enquête souligne que ses
relations peuvent être antérieures au programme. L’évaluation de 2003 ajoute aussi que
dans certaines localités des groupes de femmes ont été crées dans le but de défendre leurs
droits. Cet aspect, conclut l’évaluation, peut être attribué aux réunions éducatives. En effet,
certains fonctionnaires du programme ont mis en place des cours sur l’empoderamiento
dans lesquels les femmes se voient rappeler leur droit et les moyens à leur disposition pour
97
les défendre.
Les résultats de cette évaluation éclairent et confortent notre hypothèse. Cependant, il
serait nécessaire de trouver des éléments plus récents à ce sujet. Après avoir parcouru la
littérature d’évaluation, il semblerait que cette thématique n’ait plus été traitée après 2003.
Nous ne pouvons donc pas apporter de conclusions nouvelles. Toutefois, il est important
de souligner qu’à partir de 2002 et suite à certaines situations d’abus de pouvoir de la
part de promotoras, les dirigeants du programme ont crées des Comités de Promocion
Comunitaria (CPC), composés de différents membres en charge d’un thème particulier tel
que l’éducation, la santé, l’alimentation et la surveillance. Les femmes sont particulièrement
93
Les Promotoras sont des femmes élues par les membres d’une localité, réunis en assemblée communautaire. Elles sont
volontaires et ne reçoivent aucune rémunération pour ce travail. Leur rôle est d’être le lien entre les familles membres et le personnel
du programme notamment celui des services de santé et d’éducation. Elles informent aussi les femmes sur les coresponsabilités et
plus généralement sur le fonctionnement du programme.
94
95
96
97
48
RODRIGUEZ DORANTES, C. Las mujeres en el programa Progresa- Oportunidades. P 86.
Idem. P86;
Idem. P153.
ESCOBAR, A. Evaluacion cualitativa del programe de desarrollo humano Oportunidades. p 49.
BURSI Sandra_2007
Partie 2. Autonomie : Le cas des femmes Oportunidades.
98
encouragées à y participer. En 2006, on comptait 51 000 CPC dans 2 435 municipalités .
Cependant, des évaluations à ce sujet montrent que les CPC ont rencontré un faible succès
99
car ils ont été crée de façon unilatérale et sans consultation des principaux intéressés.
En somme, les résultats de l’évaluation de 2003 permettent de conclure que dans
certains cas, le programme Oportunidades et les coresponsabilités qui lui sont liées,
ont permis le renforcement de l’autonomie communautaire comme définie dans le cadre
d’analyse. Les observations de cette évaluation soulignent en effet les prémices d’un
processus de prise de conscience individuelle, rendu possible grâce à la dimension
collective que semble générer les coresponsabilités. Nous entendons par dimension
collective le fait que la réalisation de coresponsabilités ait permis la formation du groupe
des femmes Oportunidades. Le sentiment d’appartenance à ce groupe s’est, en effet,
fortement développé par le biais des coresponsabilités et s’est traduit dans la pratique par
la création de réseau d’entraide. Si on emprunte à la théorie marxiste, on peut dire que
les coresponsabilités semblent permettre le passage d’une classe « en soi », n’ayant pas
encore conscience d’elle-même, à une classe « pour soi », ayant pris conscience de son rôle
social. Ce processus, en fin de compte, se rapproche fortement de la théorie de l’agency,
développée par K. Abrams, que nous avons présenté plus tôt.
III/ Les coresponsabilités et l’utilisation du temps des femmes
membres.
1. Une charge horaire additionnelle à relativiser.
Pour notre troisième hypothèse, nous avons comparé le temps consacré, par les femmes
du groupe d’intervention et du groupe de contrôle, à trois types d’activités (travail rémunéré,
s’occuper de la maison et des enfants). Puis nous avons évalué la charge horaire que
représentent les coresponsabilités pour les femmes membre du programme.
Nous avons constaté que les femmes Oportunidades passaient plus de temps à
s’occuper des enfants (aide au devoir, les accompagner a l’école, les laver, les surveiller).
Cette différence de temps entre les deux groupes peut peut-être s’expliquer par la
coresponsabilité scolaire. En effet, les mères de familles doivent présenter la certification
d’assistance scolaire de leurs enfants si elles veulent recevoir l’aide. Elles sont donc en
charge de veiller à ce que les enfants aillent à l’école. Ainsi, dans la pratique, les femmes
préfèrent conduire leurs enfants afin de s’assurer que ceux-ci s’y rendent bien. Cette
explication corroborerait notre hypothèse selon laquelle les coresponsabilités représentent
une charge horaire trop lourde. Cependant, nous ne pouvons pas affirmer que cette
différence est due au fait d’amener les enfants à l’école et pas à autre chose. Il serait
nécessaire de poser plus précisément cette question aux femmes des deux groupes.
Nous avons aussi constaté que les femmes Oportunidades passaient plus de temps
à s’occuper de la maison. Cette différence me semble difficilement explicable par les
coresponsabilités. On peut tout de même supposer que ceci peut être du à la mise en
pratique des conseils d’hygiène dispensés lors de réunions éducatives.
Pour ce qui est de coresponsabilités à proprement parler, nous n’avons trouvé que
des questions faisant référence aux réunions éducatives. On remarque que le temps
98
99
ORNELAS HALL, Ramiro, et al. Fortalecimiento de los Comités de Promoción Comunitaria. p 3.
Idem. p 5.
BURSI Sandra_2007
49
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
consacré à ces réunions est plutôt conséquent, on serait donc tenter de dire qu’elles
constituent une charge horaire trop importante. Cependant, les femmes interrogées ne se
sont rendues en moyenne que quatre fois à ces réunions l’année précédent l’enquête.
On peut donc relativiser le poids horaire que représente cet aspect des coresponsabilités.
Il est toutefois fort possible que la relative faible assistance des femmes à ces réunions
soit due à leur récente intégration (2002) au programme. En effet, on peut supposer
qu’un temps d’adaptation, pour les femmes membres mais aussi pour les fonctionnaires
d’Oportunidades, est nécessaire à la mise en place définitive de toutes les modalités du
programme.
2. Coresponsabilités et division sexuelle des tâches.
En qui concerne le temps consacré au travail rémunéré, on remarque là aussi que les
femmes Oportunidades y passent plus de temps. Ceci semblerait donc être un premier
indice nous permettant de penser que les coresponsabilités ne sont pas une entrave au
100
travail rémunéré. Cependant, les évaluations de 2003 apportent de nombreux éléments
contredisant ce premier indice. Elles concluent à une incompatibilité croissante entre
travail féminin et masculin et la réalisation des coresponsabilités. Le temps d’attente aux
dispensaires, souvent saturés, est important et signifie la perte d’une journée de travail pour
les hommes et pour les femmes, ces dernières étant plus fréquemment concernées. En
effet, les rendez-vous et réunions auxquelles elles doivent assister, auxquelles s’ajoutent
les rendez-vous des enfants, constituent une « perte de temps significative, proportionnelle
101
au nombre d’enfant et inverse à l’âge. » Les plaintes des femmes mais aussi des hommes
existent à ce sujet. Il faut tout de même souligner que seule une minorité des femmes
présentent les coresponsabilités comme un problème. Certes, leur réalisation nécessite
du temps, mais il s’agit plutôt selon la majorité des femmes d’une question d’organisation
et surtout d’efforts nécessaires à fournir pour sortir de la pauvreté. Les coresponsabilités
de santé, même si elles représentent une charge horaire additionnelle contraignante, sont
très valorisées. Les évaluations font, tout de même, mention du cas d’une femme ayant
du abandonner son travail car elle ne pouvait pas le concilier avec les coresponsabilités et
ses tâches domestiques. Cette femme a préféré privilégier le programme et le revenu qu’il
fournit et travaille quelques heures par jour à vendre diverses choses dans la rue. Dans ce
cas précis, les coresponsabilités ont eu des conséquences négatives sur le travail rémunéré
stable et ont poussé cette femme vers un emploi plus flexible mais plus précaire. Cet
exemple reste cependant un exemple isolé mais illustre, pour les auteurs de ces évaluations,
102
parfaitement, la pression qu’imposent les coresponsabilités aux femmes.
En somme, les calculs que nous avons effectués ne nous permettent pas de conclure
que le programme Oportunidades constitue une entrave au travail rémunéré. Il est, tout de
même, important de souligner que la division sexuelle des tâches, qui rattache les femmes
à la sphère domestique, reste encore d’actualité. Malheureusement, les coresponsabilités
et la place donnée aux femmes dans la réalisation de celles-ci, semblent confirmer voire,
pour certaines évaluations, renforcer cette réalité. Cependant, notons tout de même que les
hommes membres du groupe d’intervention participent plus aux tâches domestiques que
100
ESCOBAR, A. Evaluacion cualitativa del programa de desarrollo humano Oportunidades et Resultados de la evaluacion externa
dee programa de desarrollo humano Oportunidades du CIESAS.
101
102
50
ESCOBAR, A. Evaluacion cualitativa del programa de desarrollo humano Oportunidades. p 49.
Resultados de la evaluacion externa del programa de desarrollo humano Oportunidades. p 28.
BURSI Sandra_2007
Partie 2. Autonomie : Le cas des femmes Oportunidades.
ceux du groupe de contrôle. Ceci constitue le premier indice d’une possible remise en cause
de la répartition traditionnelle des rôles sociaux par les coresponsabilités
BURSI Sandra_2007
51
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
Conclusion
Pour conclure ce travail, nous pouvons dire que les coresponsabilités du programme
Oportunidades, loin de renforcer tous les indicateurs de l’autonomie, permettent aux
femmes d’acquérir les bases individuelles et collectives nécessaires à son développement.
Grâce à la connaissance qu’elles acquièrent ainsi qu’aux liens de solidarité qu’elles tissent,
elles se sentent capable de décider par elles mêmes. Cependant, au vu des entretiens
réalisés pour les évaluations, il semblerait qu’elles aient acquis un début d’autonomie
sans pour autant se l’approprier. En effet, les coresponsabilités sont valorisées car elles
permettent d’améliorer la santé et l’avenir de la famille et des enfants, et c’est en ce sens
qu’elles sont réalisées et « supportées ». Les femmes ne le font pas pour elles même,
cependant elles soulignent tout de même les améliorations que le programme a apportées.
Cet aspect est, a mon avis, du à la socialisation que reçoivent ces femmes. Elle place
la femme au second plan, derrière enfants et mari et inculque l’idée du sacrifice comme
étant la juste attitude à adopter par la femme. Pour certains auteurs, il semblerait que les
103
concepteurs du programme aient bien compris cela. Pour Shahra Razavi , le programme
Oportunidades s’intéressent aux femmes en leur qualité de mères. Il renforce donc la
répartition traditionnelle des rôles entre les sexes. En quelque sorte le programme utilise les
femmes comme un instrument au service de son objectif : le bien être des enfants. Pour S.
Razavi, le programme passe à coté de l’action transformatrice qui pourrait être la sienne car
il ne répond pas aux véritables besoins des femmes tels que la formation professionnelle,
les services de garde d’enfants bon marché et une plus grande sécurité financière. De cette
façon, Oportunidades réaffirme la maternité comme premier rôle social de la femme et rend
encore plus difficile l’accès des femmes a un travail rémunéré stable et donc à l’autonomie.
En somme pour cette auteure, le programme Oportunidades se rapproche fortement de
l’approche bien être mise ne place par les programmes de développement des années 50.
Les objectifs de participation et d’autonomie sont purement illusoires.
Nous nuancerons cette idée. Il est vrai que le programme s’est plus basé sur les
mères de famille que sur les femmes et compte évidemment sur ce rôle pour atteindre ces
objectifs en matière de santé, d’éducation et d’alimentation. Le programme instrumentalise,
en effet, les rôles féminins et ne profite pas de son influence pour encourager la participation
masculine aux tâches dits féminines.
Par contre, donner directement l’aide financière aux femmes a permis de relativiser le
rôle de gagne pain de l’homme et a développé la participation des femmes à la prise de
décision en matière économique.
Cependant, faire des femmes les seules responsables des coresponsabilités va
à l’encontre même de l’objectif de coresponsabilité. Il est nécessaire d’y inclure les
hommes pour que ceux-ci se responsabilisent. Ceci permettrait de soulager les femmes
de leur charge supplémentaire de travail et représenterait une première occasion de sortir
hommes et femmes de leurs rôles sociaux. On peut en effet supposer que si les hommes
s’impliquaient plus, les femmes pourraient accéder plus facilement au marché du travail, du
moins elles en auraient plus le temps. Il faudrait pour cela, comme le souligne S. Razavi, que
le programme permette aux femmes d’acquérir une formation professionnelle et avant tout,
103
52
RAZAVI, Shahra. Egalité des sexes: en quête de justice dans un monde d’inégalité. P 138-139.
BURSI Sandra_2007
Conclusion
dans bien des cas, un accès à l’éducation basique. Lire, écrire, et parler espagnol sont en
effet essentiels à l’autonomie. Cependant, un autre élément est à prendre en compte. Etant
donné les conditions d’extrême pauvreté dans lesquelles vivent ces familles, notamment en
zones rurales, les hommes partent pour la plupart en ville ou au Etats-Unis et laissent seules
les femmes. Le partage des tâches semble donc difficile à mettre en œuvre. On comprend
bien alors, Ô combien est important le développement de réseaux de solidarité entre
femmes afin d’organiser une répartition entre les tâches. Les concepteurs du programme
ont senti l’importance de la dimension collective en créant notamment les promotoras et le
Comites de Promocion Comunitaria. Cependant, ceux-ci ont été imaginés loin des réalités
et des besoins des membres d’Oportunidades. Il est donc urgent de renforcer la consultation
des populations et la coopération entre les membres et les équipes du programme afin que
cette dimension collective, si nécessaire aux femmes et à leur autonomie, voie le jour.
BURSI Sandra_2007
53
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
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BURSI Sandra_2007
57
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
Annexes
Annexes n°1 : Questionnaire ENVIT.
A consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institut
d'Etudes Politiques de Lyon
Annexes n°2 : Les approches théoriques concernant
les femmes et le développement.
L’approche « Women In Development » (WID).
L’approche « Women In Development » est issue de la théorie de la modernisation et du
féminisme libéral. Elle voit le jour en 1973 avec la signature de l’amendement Percy et
104
défend l’égalité des opportunités et la justice sociale pour les femmes.
Le courant WID a fortement été influencé par le mouvement féministe des Etats
Unis qui se battait pour des opportunités égales de travail pour les femmes. Ce courant
insiste, donc, tout particulièrement sur le rôle productif des femmes plutôt que sur leur rôle
reproductif et de bien être. En effet, les différences de statut et de pouvoir entre hommes
et femmes s’expliquent en termes d’accès aux ressources économiques. Autrement dit, la
subordination des femmes est liée à leur exclusion du marché, exclusion résultant de la
105
division sexuelle des tâches.
L’approche WID se base sur le postulat que les rapports de genre changeront d’euxmêmes à mesure que les femmes deviendront des partenaires économiques à part entière
106
dans le développement . Le travail et l’intégration dans l’économie sont donc considérés
comme le meilleur moyen pour les femmes du tiers monde d’améliorer leur statut. En se
concentrant sur cet aspect, le courant WID a pu réactualiser l’image des femmes (et de
leurs rôles) alors présente dans les projets de développement.
« Grâce à la perspective WID, on en vient à reconnaître que l’expérience des
femmes en ce qui concerne le développement et le changement social est
différente de celle des hommes et il devint légitime que la recherche porte
107
spécifiquement sur l’expérience et les perceptions des femmes. »
104
Conditions qui doivent être créée pour que les femmes aient les mêmes options que les hommes et les mêmes chances de vies.
105
106
107
58
RAZAVI, S, MILLER, C. From WID to GAD: conceptual shifts in the Women and Development discourse. p.4.
DAGENAIS, H, PICHE, D. Femmes, féminisme et développement. P 82.
Ibid. P 80.
BURSI Sandra_2007
Annexes
Les théoriciens WID se sont d’ailleurs engagés en faveur de la création de « statistiques
féminines » permettant l’étude de la position des femmes dans différents secteurs,
indépendamment de celle des hommes. En effet, à cette époque les femmes n’étaient pas
l’objectif premier des projets de développement, les statistiques concernant leur situation
en matière d’éducation, d’emploi, de santé n’existaient donc pas. Les membres du courant
WID se sont battus pour que des bases de données soient créées à ce sujet, permettant
ainsi aux femmes d’accéder à une certaine reconnaissance. Ces statistiques furent aussi
un outil précieux pour sensibiliser les technocrates aux besoins des femmes.
Dans la pratique, l’approche WID s’est traduite sur le terrain par de projets permettant
aux femmes d’accéder à l’éducation, à la propriété, au crédit et à un meilleur emploi.
L’intégration des femmes au développement devint un objectif de plus en plus important
pour les gouvernements et les agences de développement. Cette approche a tout
particulièrement été soutenue et institutionnalisée par les Nations Unies et par l’USAID.
Cependant, en 1975, lors de la conférence de Mexico apparaissent les premières
108
critiques . On reproche notamment au courant WID le fait de ne pas questionner la théorie
de la modernisation et le modèle de développement qui en découle. Les théoriciens WID
acceptent le développement tel qu’il est et insistent sur l’intégration des femmes à celui-ci.
Le courant WID essuie aussi d’autres critiques car il n’envisage que le rôle productif de la
femme et ignore l’importance du travail domestique et la charge de travail qu’il génère. Enfin,
il considère les femmes comme un groupe homogène et ne tient pas compte de l’impact des
inégalités liées à la classe ou à la race sur la situation des femmes. Pour Eva Rathgeber :
« […] l’approche WID était fondée sur l’acceptation des structures sociales
existantes. Au lieu d’examiner pourquoi les femmes avaient moins bénéficié
des stratégies de développement de la décennie précédente, l’approche WID
cherchait seulement à savoir comment les femmes pouvaient être intégrées
aux initiatives en cours. Cette approche, qui évitait la confrontation, évitait
aussi de remettre en question les sources et la nature de la subordination et de
l’oppression des femmes, mettant plutôt l’accent sur la participation égales des
109
deux sexes à l’éducation, à l’emploi et aux sphères de la société. »
A partir de 1975, la remise en cause du courant WID s’est traduite sur le terrain par
une réorganisation des ONG locales en plateformes nationales, et ce, afin de gagner en
indépendance vis-à-vis des politiques inspirées de ce courant. Leur objectif est de renforcer
la position des femmes en soutenant leurs intérêts, intérêts pouvant conduire à une remise
en cause des mécanismes de domination de la femme.
L’approche « Women And Development » (WAD).
L’approche « Women and development » est née au milieu des années soixante-dix en
réaction aux insuffisances de la théorie de la modernisation et du courant WID. WAD
110
est une approche féministe-marxiste fondée sur la théorie de la dépendance . Pour E.
108
109
110
THIBAULT,C. Op Cit. p 18 .
DAGENAIS, H. Op Cit. p 80.
La théorie de la dépendance se construit en réaction à la théorie de modernisation. Elle soutient que le sous développement des
pays de la Périphérie est du au développement du Centre. La division internationale du travail mis en place maintient les pays sous
développés dans un échange inégal. Les efforts d’industrialisation des pays du Tiers Monde augmentent alors leur dépendance car
leur économie est extravertie. http://www.er.uqam.ca/nobel/politis/IMG/pdf/POL4131-Cours2FEV06.pdf
BURSI Sandra_2007
59
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
111
Rathgeber , cette approche est fondée sur le postulat que les femmes ont toujours fait
partie du développement et qu’elles n’y sont pas soudainement apparues dans les années
soixante dix. Les femmes sont reconnues comme ayant un rôle économique très important
dans leur société et leur travail, à l’extérieur comme à l’intérieur du foyer, est considéré
comme nécessaire à la survie de ces sociétés. Selon cette approche, la subordination
des femmes est due aux structures internationales et aux inégalités entre les classes.
L’oppression ne pourra prendre fin qu’avec la remise en cause du capitalisme. La position
des femmes s’améliorera avec l’apparition de structures internationales plus équitables.
L’insuffisance principale de cette approche est de ne pas prendre en compte les
relations entre le patriarcat et la subordination des femmes. L’homme, tout comme la femme,
est considéré comme victime des structures d’oppression résultant des inégalités de classe
et de capital au niveau international. L’approche WAD rencontre donc des difficultés à
analyser seuls les problèmes des femmes. De plus, comme la perspective WID, elle tend
à considérer les femmes comme un tout sans prendre en compte les divisions de race ou
d’ethnie.
L’approche « Gender and Development » (GAD)
L’approche « Gender and development » apparaît dans les années 80 suite aux nombreuses
critiques faites par certaines féministes du Nord et du sud aux approches WID et WAD.
112
L’approche GAD s’inscrit dans la perspective du féminisme socialiste qui considère
la construction sociale de la production et de la reproduction comme le fondement de
l’oppression des femmes et porte une attention particulière aux rapports sociaux de genre ;
rapports qui se définissent et se reproduisent par des normes et de valeurs qui attribuent aux
femmes et aux hommes des rôles et de devoirs propres. Le féminisme socialiste cherche
à comprendre pourquoi les femmes ont toujours été dans une position de subordination et
questionne par la même la validité des rôles qui lui sont assignés.
L’approche GAD innove donc par rapport aux approches précédentes car elle s’inscrit
dans une perspective holistique en se proposant d’étudier « l’ensemble de l’organisation
sociale et de la vie économique et politique afin de comprendre la formation des aspects
113
particuliers d’une société. » En effet, elle ne porte pas uniquement son attention sur les
femmes mais plutôt sur la construction sociale des relations de genre et sur l’attribution
des rôles, des responsabilités et des attentes spécifiques aux hommes et aux femmes qui
en découlent. Les relations de genre, dans leurs interactions avec la classe, la race ou la
culture sont vues comme le déterminant clé de la position de la femme dans la société. Elles
sont un facteur de division du travail et d’allocation des ressources.
Cette approche innove aussi car elle « lie les rapports de production et de reproduction
114
et tient compte de tous les aspects de la vie d’une femme. » L’oppression de la femme est
ici expliquée par la division du travail qui conduit à la subordination de la sphère reproductive
à la sphère productive. L’inégalité entre les hommes et les femmes s’explique, entre autre,
par la non reconnaissance du travail reproductif des femmes, le travail salarié masculin
étant plus valorisé.
111
DAGENAIS, H. Op Cit. p 82.
112
113
114
60
Idem. p 84.
Ibidem..
BISILLIAT, J. Op. Cit.p.34.
BURSI Sandra_2007
Annexes
L’approche GAD vise la reconnaissance du travail reproductif et productif de la
femme ainsi que la transformation des rapports de genre dans un sens plus égalitaire en
favorisant l’empowerment des hommes et des femmes. Ainsi, l’approche GAD souligne tout
particulièrement le rôle d’acteur des femmes.
La perspective GAD reste pour l’instant au stade de la recherche, les projets relevant
de cette approche sont en effet peu nombreux et difficiles à mettre en pratique.
Annexes n°3 : Tests statistiques.
Test ANOVA
∙
Variable type de foyer et connaissance de son corps
ANOVA
Total
∙
Concuerpo
Sum
df
Mean
FSig.
Between
73.604
173.604
94.245
.000
Within
12240.459
15673
.781
ofSquare
Groups
Groups
Squares
12314.064
15674
Variables type de foyer et mise en pratique
ANOVA
Total
∙
Util Sum
df
Mean
FSig.
Between
6.163
23.082
4.314
.013
Within
13356.832
18696
.714
ofSquare
Groups
Groups
Squares
13362.995
18698
Variables type de foyer et prise de décision concernant la contraception et la santé.
ANOVA
Total
∙
prise
Sum
df
Mean
FSig.
Between
47.125
147.125
8.093
.004
Within
17190.371
2952
5.823
de ofSquare
Groups
Groups
decision
Squares
sante
contraception
17237.496
2953
Variables type de foyer et Prise de decision concernant les enfants.
ANOVA
Total
prise
Sum
df
Mean
FSig.
Between
5.101
15.101
1.739
.187
Within
8658.749
2952
2.933
de ofSquare
Groups
Groups
decision
Squares
enfants
8663.850
2953
BURSI Sandra_2007
61
LUTTE CONTRE LA PAUVRETE ET GENRE AU MEXIQUE : LES FEMMES DU PROGRAMME
OPORTUNIDADES EN ROUTE VERS L’AUTONOMIE.
Test du khi².
∙
Variables type de foyer et connaissance de son corps
Chi-Square Tests
Value
df Asymp.
Pearson
4 .000
a Likelihood
96.838
4 .000
97.460
Sig.
ChiRatio
(2- Square
sided)
N of Valid Cases
15675
a. 0 cells (.0%) have expected count less than 5. The
minimum expected count is 28.37.
∙
Variables type de foyer et mise en pratique
Chi-Square Tests
Value
df Asymp.
Pearson
6 .000
a Likelihood
29.351
6 .000
29.014
Sig.
ChiRatio
(2- Square
sided)
N of Valid Cases
18699
a. 0 cells (.0%) have expected count less than 5. The
minimum expected count is 49.74.
∙
Variables type de foyer et prise de décision santé et contraception.
Chi-Square Tests
Value
df Asymp.
Pearson
12 .000
a Likelihood
44.097
12 .000
43.558
Sig.
ChiRatio
(2- Square
sided)
N of Valid Cases
2954
a. 2 cells (7.7%) have expected count less than 5. The
minimum expected count is 2.94.
∙
Variable type de foyer et prise de décision enfants
Chi-Square Tests
Value
df Asymp.
Pearson
8 .089
a Likelihood
14.150
8 .078
13.719
Sig.
ChiRatio
(2- Square
sided)
N of Valid Cases
2954
a. 0 cells (.0%) have expected count less than 5. The
minimum expected count is 8.83.
62
BURSI Sandra_2007
Résumé
Résumé
Le programme Oportunidades, créé au Mexique en 2002, entend lutter contre la
transmission intergénérationnelle de la pauvreté en agissant sur trois aspects :
l’alimentation, la santé et l’éducation. Pour ce faire, Oportunidades base son action
sur les femmes et plus particulièrement sur les mères car celles ci sont, plus que les
hommes, concernées par le bien être de leur famille. Ainsi, le programme verse directement
l’aide monétaire aux femmes car elle sera mieux gérée. Par cette modalité, le programme
revendique sa perspective de genre et établit, d’ailleurs, certains objectifs concernant cette
thématique.
∙
∙
∙
Mots clés : Lutte contre la pauvreté, genre, Programme Oportunidades, autonomie,
femmes, Mexique, coresponsabilités.
BURSI Sandra_2007
63