Introduction à la logique et à la sémantique formelle

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Introduction à la logique et à la sémantique formelle
Introduction à la logique et à la sémantique formelle
D. Bonnay & M. Cozic
DEC, ENS Ulm
20/9/06
CogMaster 2006-2007
D. Bonnay & M. Cozic (DEC, ENS Ulm)
logique & sémantique
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logique et sciences cognitives
logique et raisonnement : psychologie du raisonnement,
intelligence artificielle
logique et modélisation : représentation des croyances, des
changements de croyance, de la coordination sur la base des
croyances
logique et langage : syntaxe formelle, sémantique formelle
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1. Qu’est-ce que la logique ?
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la notion d’argument
La logique s’intéresse aux arguments
Un argument est la donnée d’une conclusion et d’un ensemble de
prémisses censées la justifier :
Si Marie boit, Pierre trinque
Marie boit
Pierre trinque
Prémisses et conclusions sont des énoncés ; un énoncé est une
expression susceptible d’être vraie ou fausse.
La logique cherche à caractériser parmi les arguments ceux qui
sont valides
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quelques arguments
Valides ou non ?
Si Marie boit, Pierre trinque
Marie boit
Pierre trinque
Tous les philosophes sont beaux
Descartes est beau
Descartes est philosophe
Si Marie boit, Pierre trinque
Pierre trinque
Marie boit
Tous les logiciens sont malins
Proust est un logicien
Proust est malin
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la notion d’argument valide
Aristote sur la validité :
"...un syllogisme est un discours dans lequel, certaines
choses étant posées, quelque chose d’autre que ces
données en résulte nécessairement par le seul fait de
ces données." Premiers Analytiques, 24b18, trad. Tricot,
Vrin
Un argument valide est un argument dont la vérité des prémisses
entraîne celle de la conclusion.
Un argument sain (sound) est un argument valide dont les
prémisses sont vraies.
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substitutions, 1
Si Marie boit, Pierre trinque
Marie boit
Pierre trinque
Si Marie boit, Marc aboit
Marie boit
Marc aboit
Si Marie boit, Marc aboit
Marie boit
Pierre trinque
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Si Marie mord, Marc aboit
Marie mord
Marc aboit
Ou bien Marie boit, ou bien
Pierre trinque
Marie boit
Pierre trinque
Si φ, ψ
φ
ψ
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substitutions, 2
Tous les logiciens sont malins
Proust est un logicien
Proust est malin
Tous les logiciens sont tatoués
Proust est un logicien
Proust est tatoué
Tous les logiciens sont tatoués
Ludwig est un logicien
Ludwig est un tatoué
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Certains logiciens sont malins
Proust est un logicien
Proust est malin
Tous les P sont Q
a est P
a est Q
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les constantes logiques
2 classes de constantes logiques :
(i) les connecteurs propositionnels : "si..., alors...", "...et...", "...ou...", "il
est faux que..."
(ii) les quantificateurs : "tous...", "il existe...", "certains..."
2 logiques élémentaires :
(i) la logique propositionnelle (LP) qui traite exclusivement des
connecteurs propositionnels
(ii) la logique du premier ordre (LPO) qui traite des connecteurs
propositionnels et des quantificateurs
Dans chaque cas, on verra
(i) syntaxe : construction d’un langage formel
(ii) sémantique : assignation d’une signification aux expressions du
langage formel
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logique propositionnelle
2. logique propositionnelle
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logique propositionnelle
introduction
La LP traite des arguments dont la validité repose exclusivement
sur les connecteurs propositionnels
Dans ces arguments, seule importe la structure des énoncés
complexes, pas la structure des énoncés atomiques
La syntaxe de la LP considère donc les énoncés atomiques
comme primitifs et s’intéresse aux combinaisons que l’on peut en
faire avec les connecteurs
La syntaxe de la LP construit la notion de formule qui est la
contrepartie formelle de la notion d’énoncé (expression
susceptible d’être vraie ou fausse)
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logique propositionnelle
syntaxe de LP
syntaxe de LP
L’alphabet du langage contient des formules atomiques p, q, r ...
des symboles de connecteurs ∨, ∧, ¬, →, ↔ et des parenthèses
), (
Les formules sont définies ainsi:
(i) les formules atomiques sont des formules
(ii) si φ et ψ sont des formules, alors (φ ∨ ψ), (φ ∧ ψ), (φ → ψ), (φ ↔ ψ)
et ¬φ sont des formules
(iii) seules les expressions engendrées par un nombre fini d’application
de (i)-(ii) sont des formules
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logique propositionnelle
syntaxe de LP
arbre de formation
Une formule se décompose de manière unique jusqu’aux
formules atomiques qui la constituent. On peut le représenter via
l’arbre de formation d’une formule.
Exemple : (p → (q ∧ r ))
(p → (q ∧ r ))
p
(q ∧ r )
q
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r
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logique propositionnelle
sémantique de LP
La sémantique est la partie de la logique qui s’occupe de
l’interprétation du langage formel
Dans le cas propositionnel, on assigne aux formules du langage
une valeur de vérité : le vrai (1) ou le faux (0)
La logique classique obéit au principe de bivalence : toute
formule a une et une seule valeur de vérité
La valeur de vérité des formules atomiques est arbitraire ; en
revanche, une fois ces valeurs fixées, la valeur de vérité des
formules complexes dépend de la façon dont elles sont
composées.
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logique propositionnelle
sémantique de LP
la négation
Supposons que V (p) = 1 ("il pleut" est vrai). Quelle est la valeur
de vérité de ¬p ("il est faux qu’il pleuve") ?
V (¬p) = 0
Inversement, si V (p) = 0, alors
V (¬p) = 1
De manière générale, la négation est un opérateur qui inverse la
valeur de vérité de la formule à laquelle elle s’applique
V (φ)
1
0
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V (¬φ)
0
1
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logique propositionnelle
sémantique de LP
la conjonction et la disjonction
Une conjonction (φ ∧ ψ) est vraie uniquement quand les deux
membres sont vrais
Une disjonction (φ ∨ ψ) est vraie dès que l’un des membres est
vrai (disjonction "inclusive")
V (φ)
1
1
0
0
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V (ψ)
1
0
1
0
V ((φ ∧ ψ))
1
0
0
0
logique & sémantique
V ((φ ∨ ψ))
1
1
1
0
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logique propositionnelle
sémantique de LP
le conditionnel
Le conditionnel reflète (plus ou moins) le "si..., alors..." de la
langue naturelle.
Un conditionnel (φ → ψ) n’est faux que lorsque l’antécédent est
vrai et le conséquent faux.
V (φ)
1
1
0
0
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V (ψ)
1
0
1
0
V ((φ → ψ))
1
0
1
1
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logique propositionnelle
sémantique de LP
valuation
Une valuation atomique est une fonction qui assigne à chaque
formule atomique une valeur de vérité.
Une valuation est une fonction qui assigne à chaque formule une
valeur de vérité conformément à l’interprétation des connecteurs.
Il existe une et une seule valuation qui étend une valuation
atomique donnée. Concrètement, si φ est une formule complexe
qui contient les formules atomiques p, q, r , alors une fois que la
valeur de vérité de p, q, r est fixée, celle de φ est déterminée.
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logique propositionnelle
sémantique de LP
exemple
Considérons la formule φ := ¬(p → ¬q) et supposons que
V (p) = V (q) = 1. Quelle est la valeur de vérité de φ ?
p
1
q
1
¬q
0
(p → ¬q)
0
¬(p → ¬q)
1
On peut représenter les valeurs de vérités de φ pour toute
combinaison possible de valeurs de vérité de ses propositions
atomiques en une table de vérité :
p
1
1
0
0
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q
1
0
1
0
¬q
0
1
0
1
(p → ¬q)
0
1
1
1
logique & sémantique
¬(p → ¬q)
1
0
0
0
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logique propositionnelle
sémantique de LP
tautologies & antilogies
Une formule est satisfiable s’il existe une valuation qui la rend
vraie.
Exemple : (p ∨ q)
Une formule est tautologique ou valide si toute valuation la rend
vraie.
Exemple : (p ∨ ¬p)
Une formule est antilogique ou contradictoire si aucune
valuation ne la rend vraie.
Exemple : (p ∧ ¬p)
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logique propositionnelle
sémantique de LP
exemples
Une tautologie : (p ∨ ¬p)
p ¬p (p ∨ ¬p)
1 0
1
0 1
1
Une antilogie : (p ∧ ¬p)
p ¬p (p ∧ ¬p)
1 0
0
0 1
0
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logique propositionnelle
sémantique de LP
conséquence logique
Retour à l’intuition de départ : un argument est valide si la vérité
des prémisses entraîne celle de la conclusion.
On dit qu’une valuation satisfait un ensemble de formules Γ si elle
satisfait toutes les formules de Γ.
Γ a pour conséquence logique φ si toute valuation qui satisfait Γ
satisfait φ
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logique propositionnelle
sémantique de LP
exemple
Γ = {p, (p → q)} et φ = q.
Si Marie boit, Pierre trinque
Marie boit
Pierre trinque
p
1
1
0
0
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q
1
0
1
0
(p → q)
1
0
1
1
logique & sémantique
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logique du premier ordre
3. logique du premier ordre
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logique du premier ordre
limites de la LP
Comment traiter l’argument suivant en LP ?
Tous les logiciens sont malins
Proust est un logicien
Proust est malin
Il faut associer à chaque énoncé une formule atomique - disons,
respectivement, p, q, r . Mais r n’est pas conséquence logique de
{p, q}.
Il faut une analyse plus fine de la structure des énoncés.
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logique du premier ordre
prédication & quantification
La prédication :
"Rudolf est logicien"
L(r )
"Rudolf est plus grand que Ludwig"
G(r , l)
⇒ deux classes de symboles :
- les symboles de constantes : a, b, c, ...
- les symboles de prédicat P (1) , Q (1) , R (1) , ..., P (n) , Q (n) , R (n) , ...
La quantification
"Il existe un logicien"
∃xL(x)
"Tout le monde est plus grand que Ludwig"
∀xG(x, l)
"Tout le monde aime quelqu’un"
∀x∃yA(x, y)
⇒ deux classes de symboles :
- symboles de variables x, y, z, ...
- quantificateurs : ∀, ∃
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logique du premier ordre
paraphrases, 1
Les propositions aristotéliciennes :
A
E
I
O
Tout S est P
Nul S n’est P
Quelque S est P
Quelque S n’est pas P
Universelle affirmative
Universelle négative
Particulière affirmative
Particulière négative
Paraphrases :
"Tous les philosophes viendront"
"Quelque philosophe viendra"
"Aucun philosophe ne viendra"
"Quelque philosophe ne viendra pas"
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logique & sémantique
∀x(Px
∃x(Px
∀x(Px
∃x(Px
→ Sx)
∧ Sx)
→ ¬Sx)
∧ ¬Sx)
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logique du premier ordre
paraphrases, 2
"Paul aime quelqu’un"
"Paul est aimé de quelqu’un"
"Tout le monde aime quelqu’un"
"Tous ceux qui aiment Paul aiment Marie"
"Paul n’aime personne"
"Paul aime quelqu’un qui aime Marie"
"Paul aime tous ceux qui aiment tout le monde"
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logique & sémantique
∃xApx
∃xAxp
∀x∃yAxy
∀x(Axp → Axm)
∀x¬Apx
∃x(Apx ∧ Axm)
∀x(∀yAxy → Apx
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logique du premier ordre
syntaxe de LPO
L’alphabet de LPO contient
(i)
(ii)
(iii)
(iv)
(v)
(vi)
des symboles de constantes a, b, c...
des symboles de prédicats P (1) , Q (1) , R (1) , ..., P (n) , Q (n) , R (n) , ...
de variables x , y , z, ...
les connecteurs propositionnels ∨, ∧, ¬, →, ↔
les quantificateurs ∀, ∃
des parenthèses
Un langage du premier ordre est une spécification de (i)-(ii).
(iii)-(vi) sont communs à tous les langages du premier ordre.
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logique du premier ordre
syntaxe de LPO, suite
Un terme est une variable ou un symbole de constante.
Les formules sont définies ainsi :
(i) Si P (n) est un symbole de prédicat n-aire et t1 , ..., tn sont des
termes, alors P(t1 , ..., tn ) est une formule
(ii) Si φ et ψ sont des formules, alors ¬φ, (φ ∨ ψ), etc. sont des
formules
(iii) Si φ est une formule, alors ∀x φ et ∃x φ sont des formules
(iv) Seules les expressions engendrées par un nombre fini
d’applications de (i)-(iii) sont des formules.
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logique du premier ordre
variables libres vs. liées
Différence importante entre les deux types de formules :
∀xB(x)
∀x∀yA(x, y)
B(x)
∀xA(x, y)
Les variables des formules de gauche sont toutes "sous la portée"
d’un quantificateur ou liées. Certaines occurences de variables
sont au contraire libres dans les formules de de droite.
On appelle énoncé (parfois formule close) une formule où toutes
les variables sont liées. Les énoncés en ce sens correspondent
aux énoncés au sens informel i.e. ils sont susceptibles d’être vrai
ou faux.
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logique du premier ordre
sémantique de LPO
En LP, on ne traite que de valeurs de vérité : la valeur de vérité
d’une formule est déterminée par celles des formules qui la
composent. La sémantique de la LPO doit être enrichie car les
parties d’une formule ne sont pas nécessairement des formules
elles-mêmes
⇒ il faut interpréter les symboles de constantes et les symboles
de prédicats
1ère idée fondamentale : on se donne un domaine de discours M
- les symboles de constantes dénotent des éléments du domaine
de de discours ;
- les symboles de prédicats n-aires dénotent des relations n-aires
sur M.
Intuitivement : une formule Pa est vraie si l’élément du domaine
dénoté par a appartient à l’ensemble d’éléments du domaines
dénoté par P
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logique du premier ordre
sémantique de LPO
L-structures
Soit L un langage du premier ordre. Une L-structure
M = (M, I M ) est une paire constituée
(i) d’un domaine (non vide) d’individus M
(ii) d’une fonction d’interprétation I M
• si c est un symbole de constante, alors I M (c) = c M ∈ M
• si P (n) est un symbole de prédicat, alors I M (P) = P M ⊆ M n
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logique du premier ordre
sémantique de LPO
exemple 1
Soit le langage L = (H, F , P, p, j, m, a).
M = ({Paul, Jacques, Marie, Anne}, I M ) où
I M (H) = {Paul, Jacques}
I M (F ) = {Marie, Anne}
I M (P) = {Jacques, Anne}
I M (p) = Paul, I N (j) = Jacques, I N (m) = Marie, I N (a) = Anne
Intuitivement,
M H(j), M 2 H(m)
M ∀x(H(x) ∨ F (x)), M 2 ∀xP(x)
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logique du premier ordre
sémantique de LPO
exemple 2
Soit le langage L = (O, E , c0 , c1 ). N = (N, I M ) où
I N (E) = {0, 2, 4, 6...}
I N (O) = {1, 3, 5, 7...}
I N (c0 ) = 0
I N (c1 ) = 1
Intuitivement,
N E (c0 ), N 2 E (c1 )
N ∀x(O(x) ∨ E (x)), N 2 ∀xE (x)
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logique du premier ordre
sémantique de LPO
assignations
Problème : si l’interprétation d’une formule est déterminée par
l’interprétation de ses parties, comment construire l’interprétation
d’une formule comme ∀xO(x) ?
De manière générale, le problème est d’interpréter les formules
comportant des variables libres.
2nde idée fondamentale : l’assignation : une assignation g(.)
associe à chaque variable x un élément du domaine d’invididus
g(x) ∈ M.
On définit ensuite la notion de satisfaction d’une formule par une
assignation. P(x) est par exemple satisfaite par toutes les
assignations qui assignent à x l’un des élements de P I .
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logique du premier ordre
sémantique de LPO
satisfaction
Soit L un langage du premier ordre, M une L-structure et g une
assignation. Pour une formule φ, on définit la satisfaction de φ
par l’assignation g :
(i) si φ := Rt1 ...tk pour un symbole de prédicat R d’arité k et des
termes t1 , ..., tk , alors M, g φ ssi (t1M,g , ..., tkM,g ) ∈ R M
(ii) si φ := ¬ψ, alors M, g φ ssi M, g 2 ψ
(iv) φ := (ψ ∧ χ), alors M, g φ ssi M, g ψ et M, g χ
(v) si φ := ∀xn ψ, alors M, g φ ssi pour tout a ∈ M, M, g[xn → a] ψ
(vi) si φ := ∃xn ψ, alors M, g φ ssi il existe a ∈ M tq. M, g[xn → a] ψ
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logique du premier ordre
sémantique de LPO
vérité et validité
Si toutes les assignations satisfont φ, on dit que φ est vraie dans
M ou que M est un modèle de φ. On le note
Mφ
φ est valide si elle est satisfaite par toute assignation dans toute
L-structure. On le note
φ
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logique & sémantique
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logique du premier ordre
sémantique de LPO
exemple
Soit le langage L = (H, F , P, p, j, m, a).
M = ({Paul, Jacques, Marie, Anne}, I M ) où
I M (H) = {Paul, Jacques}
I M (F ) = {Marie, Anne}
I M (P) = {Jacques, Anne}
I M (p) = Paul, I N (j) = Jacques, I N (m) = Marie, I N (a) = Anne
g1 (x) = Paul
M, g1 Fm, M, g1 2 Fj
M, g1 2 Fx
M, g1 2 (Fx ∨ Px)
M, g1 Hx
M, g1 ∃xFx
M, g1 ∀x(Fx ∨ Hx)
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g2 (x) = Anne
M, g2 Fm, M, g2 2 Fj
M, g2 Fx
M, g2 2 (Fx ∧ Px)
M, g2 2 Hx
M, g2 ∃xFx
M, g2 ∀x(Fx ∨ Hx)
logique & sémantique
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logique du premier ordre
sémantique de LPO
exemple
Soit le langage L1 = (P (1) , R (2) , c0 , c1 ). On peut l’interpréter dans la
L1 -structure N = (N, I N ) où
• I N (P) = {0, 2, 4, 6...}
• I N (R) => (l’ordre strict usuel sur les entiers)
• I N (c0 ) = 0
• I N (c1 ) = 1
g1 (x1 ) = 5, g1 (x2 ) = 2
N , g1 2 Rc1 x1
N , g1 Rx1 x2
N , g1 ∀x1 ∃x2 Rx2 x1
N , g1 2 ∃x1 (Rx1 c0 ∧ Rc1 x1 )
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g2 (x1 ) = 0, g2 (x2 ) = 3
N , g2 Rc1 x1
N , g2 2 Rx1 x2
N , g2 ∀x1 ∃x2 Rx2 x1
N , g2 2 ∃x1 (Rx1 c0 ∧ Rc1 x1 )
logique & sémantique
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logique du premier ordre
sémantique de LPO
exemple
Soit le langage L2 = (H (1) , F (1) , A(2) , p, j, m, a). On peut l’interpréter
dans la L2 -structure M = ({Paul, Jacques, Marie, Anne}, I M ) où
I M (H) = {Paul, Jacques}
I M (F ) = {Marie, Anne}
I M (A) =
{(Marie, Paul), (Paul, Anne), (Jacques, Jacques), (Anne, Marie)}
I M (p) = Paul, I M (j) = Jacques, I M (m) = Marie, I M (a) = Anne
g1 (x1 ) = Paul, g1 (x2 ) = Marie
M, g1 2 Apx1
M, g1 ∃x1 Ajx1
M, g1 2 ∀x1 Ax1 x2
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g2 (x1 ) = Anne, g2(x2 ) = Paul
M, g2 Apx1 ,
M, g2 ∃x1 Ajx1
M, g2 2 ∀x1 Ax1 x2
logique & sémantique
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logique et langue naturelle
4. logique et langue naturelle
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logique & sémantique
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logique et langue naturelle
Logique et langage
On vient de voir un langage formel
sa syntaxe
sa sémantique
Quel rapport avec le français ?
on peut traduire les énoncés du français dans la logique du
premier ordre.
le projet de la linguistique formelle: voir le français comme une
langue artificielle.
D. Bonnay & M. Cozic (DEC, ENS Ulm)
logique & sémantique
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logique et langue naturelle
La linguistique formelle
Richard Montague :
Il n’y a selon moi aucune différence théorique importante
entre les langues naturelles et les langages artificiels des
logiciens.
Objectifs de la linguistique formelle :
syntaxe formelle caractériser de manière systématique les énoncés
grammaticaux d’une langue donnée.
sémantique formelle sur la base de notre compréhension de la
syntaxe, rendre compte de manière compositionnelle de
la signification des phrases.
pragmatique formelle sur la base de notre compréhension de la
syntaxe et de la sémantique, expliquer comment sont
utilisés les énoncés.
D. Bonnay & M. Cozic (DEC, ENS Ulm)
logique & sémantique
20/9/06
44 / 61
logique et langue naturelle
Premier problème (1)
Parallèle syntaxe / sémantique
"Tous les philosophes viendront"
"Certains philosophes viendront"
∀x(Px → Sx)
∃x(Px ∧ Sx)
Des paraphrases différentes mais des constructions analogues :
P → GN GV
GN → Det N
GV → VI
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Premier problème (2)
on voudrait une analyse uniforme et compositionnelle
Même comportement syntaxique → même catégorie syntaxique.
Même catégorie syntaxique → même catégorie sémantique.
Composition des significations des unités syntaxiques
indépendantes.
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Deuxième problème
L’expressivité des langues naturelles
Trois philosophes viendront.
Ok:
∃x, y, z (x 6= y ∧ x 6= z ∧ y 6= z) ∧ (Px ∧ Py ∧ Pz) ∧ (Vx ∧ Vy ∧ Vz)
La plupart des philosophes viendront.
??
Impossible de paraphraser “la plupart” à l’aide de ∃, ∀, = ...
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Qu’est-ce qu’un quantificateur ? (1)
M ∃x φ(x) σ
ssi
“il y a des objets du domaine qui satisfont φ(x)”
ssi
{a ∈ |M|/M φ(x) σ[x → a]} =
6 ∅
Première généralisation
Quantificateur comme prédicat de prédicat :
Q A, où A ⊆ M.
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Qu’est-ce qu’un quantificateur ? (2)
Cette analyse marche pour certains déterminants :
Certains philosophes viendront
ssi
L’ensemble des philosophes qui viendront est non vide.
Mais elle ne marche pas pour tous :
La plupart des philosophes viendront.
L’ensemble des philosophes qui viendront ? contient la
plupart des individus.
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Qu’est-ce qu’un quantificateur ? (3)
Deuxième généralisation
Quantificateur comme prédicat de relations :
Q A B, où A, B ⊆ M.
Exemples :
Tous les A B.
ssi A ⊆ B.
||Tous||M = {hA, Bi/A, B ⊆ M, A ⊆ B}
Certains A B.
ssi A ∩ B 6= ∅.
||Certains||M = {hA, Bi/A, B ⊆ M, A ∩ B 6= ∅}
La plupart des A B.
ssi card(A ∩ B) > card(A − B).
||La plupart||M = {hA, Bi/A, B ⊆ M, card(A ∩ B) > card(A − B)}
(notation : Qla plupart)
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La solution à nos problèmes (1)
Le problème de l’expressivité :
“la plupart” est un quantificateur relationnel à part entière, qui n’est
pas réductible à un quantificateur non relationnel.
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La solution à nos problèmes (2)
Le problème d’une analyse compositionnelle fidèle à la syntaxe :
La plupart des philosophes viendront.
Analysé syntaxiquement comme :
P
GN
GV
Det
N
La plupart
des philosophes
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Viendront
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La solution à nos problèmes (3)
Les valeurs sémantiques ...
||[Det La plupart]|| = QLP
||[N des philosophes]|| = {a/a est un philosophe}=Phi
||[GN [Det La plupart][N des philosophes]]||
= {B/QLP Phi B}
= QLP Phi
||[GV viendront]|| = {a/a viendra} = Vien
||[S [GN [Det La plupart][N des philosophes]][GV viendront]]||
= QLP Phi Vien
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La solution à nos problèmes (4)
Le calcul des valeurs sémantiques est parallèle à la dérivation
syntaxique ...
P
GN QLP Phi
Det QLP
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GV Vien
N Phi
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La solution à nos problèmes (4)
Le calcul des valeurs sémantiques est parallèle à la dérivation
syntaxique ...
P QLP Phi Vien
GN QLP Phi
Det QLP
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GV Vien
N Phi
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Et après ?
Etudier les propriétés sémantiques des déterminants :
Expliquer des phénomènes linguistiques particuliers.
Identifier des universaux linguistiques.
Isoler des classes de déterminants.
Etudier le pouvoir expressif des langues naturelles.
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La monotonicité (1)
Tous les philosophes viendront à l’heure.
Tous les philosophes viendront.
Certaines personnes sont bêtes et méchantes.
Certaines personnes sont bêtes.
Q est monotone croissant à droite ssi :
Q A B et B ⊆ C implique Q A C.
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La monotonicité (2)
Aucun soldat n’aime pleurer.
Aucune soldat n’aime pleurer sans raison.
Peu de gens aiment la langue de bœuf.
Peu de gens aiment la langue de bœuf et les rognons.
Q est monotone décroissant à droite ssi :
Q A B et C ⊆ B implique Q A C.
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Applications (1)
Expliquer des phénomènes linguistiques particuliers
Exemples : items à polarité négative.
Aucun policier n’a le moindre soupçon.
Aucun policier qui a le moindre soupçon ne le libèrerait.
? Tous les policiers ont le moindre soupçon.
? Certains policiers ont le moindre soupçon.
Les items à polarité négative sont permis dans les contextes
monotones décroissants.
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Applications (2)
Identifier des universaux linguistiques
Tous
Certains
Beaucoup
Cinq
Deux ou quatre
Un nombre pair de
Contrainte de monotonicité : les déterminants lexicalisés dans les
langues naturelles expriment des quantificateurs monotone ou des
conjonctions de quantificateurs monotones.
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A suivre ...
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