Les étapes de la procédure d`assignation devant le Tribunal d

Transcription

Les étapes de la procédure d`assignation devant le Tribunal d
Les étapes de la procédure d’assignation
devant le Tribunal d’Instance
Retour de l’expérience contre l’Association nationale
pour la protection du ciel et de l’environnement
nocturne (ANPCEN)
Janvier 2015
Pour citer ce rapport : SORDELLO R. (2015). Les étapes de la procédure d’assignation devant le Tribunal
d’Instance. Retour de l’expérience contre l’Association nationale pour la protection du ciel et de
l’environnement nocturne (ANPCEN). 20 pages. Disponible sur : http://www.romain-sordello.fr
Merci à toutes les personnes collègues, amis, parents, professionnels qui m’ont fait part de leur soutien dans cette épreuve.
Et merci à tous ceux qui m’ont aidé à conserver malgré tout
cet intérêt si fort que je porte à la nuit.
« L'espoir est comme le ciel des nuits : il n'est pas coin si sombre
où l'œil qui s'obstine ne finisse par découvrir une étoile. », Octave Feuille
C
e rapport a pour objectif d’aider toute personne ou structure se retrouvant confrontée à un litige
qui l’amènerait à devoir s’engager dans une procédure d’assignation devant le Tribunal d’Instance.
Il relate en effet les étapes de ce type de procédure juridique, en livrant des conseils pour chacune
d’elles, depuis la discussion amiable avec la partie adverse jusqu’à sa condamnation.
Pour ce faire, ce travail se base sur l’assignation que j’ai moi-même du engager contre une association
devant le Tribunal d’Instance de Paris 16ème, dans le cadre d’une prestation en tant qu’auto-entrepreneur,
pour la conception et la réalisation d’un site internet.
La partie adverse dans ce litige est une association loi 1901, enregistrée en Préfecture de Paris sous le
nom « d’Association nationale pour la protection du ciel et de l’environnement nocturne » (domiciliation
3, rue Beethoven 75016 PARIS). Pour plus d’information sur cette structure, le lecteur peut contacter la
Préfecture de Paris 1 auprès de laquelle il est possible d’obtenir, comme pour toute association, un
ensemble de documents, dont la liste des dirigeants.
Devoir recourir à la Justice de la République pour faire valoir mes droits ayant été tout à fait inédit pour moi
et n’étant pas juriste de formation, mener cette assignation a constitué une réelle découverte. Les étapes
pour parvenir à ce que la procédure arrive à son terme sont diverses et, même si le Tribunal d’Instance est
un tribunal de proximité, les difficultés peuvent être nombreuses pour un profane. Cette étude résulte
ainsi de ma volonté de faire partager mon expérience pour qu’elle puisse éventuellement servir à qui se
retrouverait un jour dans la même situation.
Le but est bien ici de traiter des différentes étapes de la procédure. Pour cette raison, ce rapport
n’évoquera pas l’affaire sur le fond. Par ailleurs, ce travail relève bien uniquement de ma propre
expérience ; il ne peut donc pas remplacer le conseil d’un juriste.
1
SORDELLO. R. (2015). Quelques informations auxquelles toute personne peut avoir accès concernant une association
loi 1901. Exemples sur la base de l’Association nationale pour la protection du ciel et de l’environnement nocturne
(ANPCEN). 16 pages. Disponible sur : http://www.romain-sordello.fr
Romain Sordello. Étapes d’une procédure d’assignation. Expérience contre l’ANPCEN. Janvier 2015.
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Sommaire
I. Confiance, attente et relances amicales avant la procédure juridique .......................................................... 5
II. La mise en demeure de payer : première étape de votre procédure juridique ............................................ 5
III. Vers la procédure d’assignation ................................................................................................................... 6
IV. Saisir le Tribunal d’Instance.......................................................................................................................... 9
V. Préparation de l’audience ........................................................................................................................... 12
VI. L’audience .................................................................................................................................................. 14
VII. Connaître la décision du juge .................................................................................................................... 16
VIII. L’exécution de la partie condamnée ........................................................................................................ 17
IX. Coût de la procédure en temps et en argent ............................................................................................. 17
Les * dans le texte du document renvoient au lexique en fin de rapport.
Romain Sordello. Étapes d’une procédure d’assignation. Expérience contre l’ANPCEN. Janvier 2015.
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I. Confiance, attente et relances amicales avant la procédure juridique
Avant de vous engager dans la procédure juridique en tant que tel, je vous conseille fortement de
privilégier le dialogue et d’effectuer des relances amicales, par mail puis par courrier simple puis par
courrier RAR*.
Cette gradation est à la fois :
- légitime : spontanément faites crédit, à celui qui deviendra peut-être votre adversaire, du fait que
justement pour le moment il n’en est pas un et que pour le moment s’il ne s’exécute pas, ce n’est pas par
mauvaise foi mais par oubli ou négligence,
- importante pour l’éventuelle procédure judiciaire : le juge verra que vous avez respecté toutes les
étapes avant de le solliciter et la non réponse de votre destinataire, par exemple si celui-ci ne se déplace
même pas pour retirer un courrier recommandé, jouera nécessairement en votre faveur,
- économique : une procédure judiciaire, que le juge vous donne ou non raison à la fin est une
démarche couteuse sur tous les plans (financier, énergétique, ...), source de stress et qui demande une
certaine force intérieure, surtout si vous la menez seul. Essayez donc réellement ce qui est en votre pouvoir
pour dialoguer avec l’autre partie.
Dans vos correspondances, conservez un dialogue courtois et cordial. La règle à respecter en toute
circonstance est d’annoncer ce que vous allez faire et de faire ce que vous avez dit que vous feriez. De
cette façon, vos déclarations seront toujours des promesses et non des menaces.
II. La mise en demeure de payer : première étape de votre procédure juridique
Si votre adversaire n’a pas donné suite à vos relances, l’étape suivante est celle de la mise en demeure de
payer.
La mise en demeure de payer est la première étape de votre procédure juridique. Ce courrier a
effectivement pour conséquences de :
- faire partir le compteur des intérêts de retard (également appelés intérêts moratoires) sur le
montant qui vous est du. Pour cela, vous devez préciser cette clause dans votre courrier en vous appuyant
sur l’article du Code civil qui la stipule (article 1153). C’est important car si vous ne le faites pas, vous ne
pourrez pas ensuite demander ces intérêts dans votre assignation plus tard,
- mettre sur le débiteur la responsabilité de la marchandise livrée. Celui-ci devient donc
responsable en cas de perte, vol ou dysfonctionnement qu’il tenterait de revendiquer ensuite pour justifier
l’impayé,
- lever toute obligation de votre part dans la réalisation de vos obligations. Cet effet vous exonère
par exemple de devoir remplir vos obligations contractuelles tant que la mise en demeure n’est pas levée
donc tant que le débiteur lui n’a pas respecté ses obligations,
- vous donner la possibilité de rompre le contrat sans attendre de jugement, en utilisant tout
simplement une clause résolutoire de ce dernier si celui-ci en prévoit.
Romain Sordello. Étapes d’une procédure d’assignation. Expérience contre l’ANPCEN. Janvier 2015.
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La mise en demeure de payer est donc un outil puissant. Par contre, pour être considérée comme valide
juridiquement, votre courrier doit impérativement respecter certains critères très précis :
- comporter quelque part la mention claire « Mise en demeure », dans le titre par exemple,
- énoncer clairement comment le litige peut être résorbé (en l’occurrence, s’agissant d’un refus de
payer, indiquer la somme précise à verser par le débiteur),
- indiquer le délai au-delà duquel le litige sera considéré comme non résolu si le débiteur ne s’est
pas exécuté. Même si vous attendez d’être payés depuis déjà plusieurs semaines et que votre débiteur ne
se manifeste plus, je vous conseille de continuer à prendre sur vous et d’indiquer des délais raisonnables.
Le délai usuel est de 6 ou 8 jours.
Pour vous ménager les preuves d’envoi de votre mise en demeure, acheminez-la en courrier RAR.
Dans mon cas :
J’ai mis l’ANPCEN en demeure de payer le 6 septembre 2013. A la suite de ce courrier, l’association s’est
exécuté en versant une partie du montant dû. Une deuxième mise en demeure de payer a ensuite été
transmise à l’ANPCEN le 10 octobre 2013. L’ANPCEN n’est pas allé retirer ce courrier à la poste, ce
courrier m’est donc revenu.
Important : Votre mise en demeure prend effet à la date de réception du courrier par votre destinataire, et
non pas à la date de votre envoi. Aussi, si comme dans mon cas votre adversaire ne réceptionne pas votre
courrier recommandé, sachez que d’un point de vue juridique, tout recommandé retourné par la poste au
bout des quinze jours est considéré comme remis. La mise en demeure prend donc bien effet, à la date de
ce retour.
III. Vers la procédure d’assignation
Votre mise en demeure est restée sans réponse (ou n’a pas été retirée par votre adversaire). Vous prenez
donc conscience à cette étape que vous allez devoir saisir la justice si vous souhaitez faire valoir vos droits.
C’est un moment douloureux car vous sentant victime, c’est pourtant bien à vous de vous manifester une
nouvelle fois. Le dispositif juridique français est effectivement ainsi fait que vous allez désormais vous
retrouver dans une situation de « demandeur » et votre adversaire sera le « défendeur ». C’est sans
doute la découverte la plus importante pour tout profane qui se confronte pour la première fois à un litige.
Cette situation peut vous faire ressentir un sentiment précisément d’injustice car en toute logique vous
êtes pourtant en train de vous défendre contre ce que vous considérez, vous, être une injustice.
Il va vous falloir ici :
- choisir le type de procédure juridique,
- définir le Tribunal compétent.
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III.1. Choisir le type de procédure
Pour un recouvrement de créance, vous avez le choix entre deux procédures :
- la demande d’injonction de payer,
- l’assignation.
L’injonction de payer est une procédure écrite c’est-à-dire qu’il n’y aura pas d’audience devant un juge.
Vous aurez à constituer un dossier en remplissant un formulaire CERFA puis à le transmettre au greffe* du
Tribunal d’Instance. La procédure est donc « simple » et relativement rapide (quelques semaines). En
revanche, elle n’est donc pas contradictoire*, c’est-à-dire que la partie adverse n’est pas entendue par le
juge avant qu’il rende son verdict. Le juge se prononce uniquement sur la base des documents transmis par
le demandeur. Pour ces raisons, si une injonction de payer est prononcée, l’adversaire condamné peut en
faire opposition. L’affaire devra alors finalement être « jugée au fond », c’est-à-dire par une assignation.
La procédure d’assignation quant à elle, comme nous le verrons plus loin est contradictoire, c’est-à-dire
que les deux parties sont invitées à s’exprimer devant le juge lors d’une audience. Elle offre également la
possibilité lors de cette audience d’une conciliation des parties avant que le juge ne tranche. Son cout par
contre est bien plus élevé et sa durée beaucoup plus longue (cf. partie VIII).
Il est très important à cette étape de bien réfléchir quelle procédure choisir, sur la base de critères objectifs
et notamment en pesant :
- la probabilité que le juge suive votre demande,
- la probabilité que l’adversaire demande une conciliation en cas de procédure contradictoire,
- la probabilité que l’adversaire fasse opposition en cas de condamnation par injonction.
Dans mon cas :
Malgré qu’elle constitue une procédure couteuse et plus lourde, j’ai opté pour l’assignation, notamment
parce que :
- j’ai souhaité plaider en face à face avec la partie adverse pour un débat transparent et dans une
démarche qui me semblait plus courageuse,
- j’ai pensé que l’ANPCEN pourrait consentir à une conciliation.
III.2. Définir le Tribunal compétent pour régler votre litige
C’est une autre décision tout à fait cruciale que vous aurez à prendre dans votre procédure car :
- si vous vous trompez de juridiction, le Tribunal que vous aurez saisi se déclarera incompétent et
vous aurez perdu du temps,
- chaque Tribunal juge sur la base de textes dont il est le « garant » (ex : Tribunal d’Instance =>
Code civil / Tribunal de commerce => Code de commerce). Votre choix a donc des conséquences directes
sur la probabilité du verdict futur du juge.
Romain Sordello. Étapes d’une procédure d’assignation. Expérience contre l’ANPCEN. Janvier 2015.
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Les conditions qui définissent quel Tribunal est compétent peuvent être liées :
- à votre statut et à celui de votre futur défendeur,
- au contrat qui vous lie à votre adversaire si une clause prévoit précisément quel est le Tribunal
compétent en cas de procédure juridique,
- au montant qui fait l’objet du litige : en fonction de la somme due par votre débiteur vous pourrez
éviter l’assignation et faire une déclaration au greffe (procédure plus légère).
> Tribunal d’Instance / Tribunal de Commerce :
Le choix entre ces deux Tribunaux n’est pas simple. Le Tribunal d'Instance est une juridiction civile qui
concerne les affaires entre personnes privées, c'est-à-dire mettant aux prises des particuliers, des
associations ou des entreprises. Le Tribunal de commerce quant à lui est une juridiction spécialisée dans les
litiges entre commerçants ainsi que dans les conflits relatifs aux actes de commerce. Le choix de l’un ou
l’autre de ces deux Tribunaux peut donc s’avérer délicat, notamment dans le cas où votre adversaire est
une association mais que votre affaire concerne un impayé (donc un acte de commerce), d’autant plus si
cette association possède une activité commerciale et/ou revendique un statut de professionnel/expert.
Sachez néanmoins que dans le cas d’un recours au Tribunal de commerce, le défendeur peut contester ce
choix et demander à être jugé devant le Tribunal d’Instance, ce qui est donc susceptible de compliquer la
procédure.
> Montant minimum - Montant maximum dans le cas d’une procédure civile :
- En dessous de 4 000 euros, il vous est possible de passer par une déclaration au greffe (c’est-àdire que vous n’aurez qu’à adresser au Greffe du Tribunal une lettre expliquant votre litige et le Tribunal
lui-même se saisira du dossier sans que vous ayez à assigner votre adversaire)
- Entre 4 000 et 10 000 euros, il vous faudra passer par une assignation au Tribunal d’Instance,
- Au-dessus de 10 000 euros, il vous faudra saisir le Tribunal de Grande Instance.
Enfin, sachez que vous devrez assigner votre adversaire devant le Tribunal d’Instance où il réside lui et non
pas vous. A Paris, il existe un Tribunal d’Instance par arrondissement, dans chaque Mairie, et vous devrez
donc là aussi assigner votre adversaire devant le Tribunal de l’arrondissement où est situé son siège.
Dans mon cas :
Mon contrat signé avec l’ANPCEN ne comportait pas de clause précisant le Tribunal compétent en cas de
litige. Je me suis tourné vers le Tribunal d’Instance en me basant sur le statut associatif de l’ANPCEN. J’ai
sollicité le Tribunal d’Instance de Paris 16ème, arrondissement où est domiciliée l’ANPCEN.
III.3. Mode de représentation devant le Tribunal
Peu de gens le savent mais il n’est pas toujours obligatoire de recourir à un avocat lorsque l’on sollicite la
Justice. En l’occurrence, tout justiciable peut mener seul une procédure d’assignation devant le Tribunal
d’Instance ainsi que devant le Tribunal de commerce (ce n’est pas le cas par contre devant le Tribunal de
Grande Instance). C’est pourquoi il est dit que le Tribunal d’Instance est un Tribunal « de proximité ».
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En revanche, vous devrez obligatoirement recourir à un huissier.
Dans mon cas :
N’ayant pas les moyens de recourir à un avocat, j’ai décidé d’entreprendre cette assignation en me
représentant seul.
IV. Saisir le Tribunal d’Instance
Avant de recourir à l’huissier vous aurez plusieurs étapes importantes à mener.
IV.1. Préparer votre argumentaire
C’est le moment de bien analyser votre dossier, les points qui vont jouer en votre faveur et ceux que votre
adversaire utilisera sans doute pour vous contrer.
Par définition, l’huissier auquel vous devrez recourir pour rédiger l’assignation n’est pas avocat. Il ne
prendra donc pas le temps de comprendre en détails votre situation ni de vous bâtir un argumentaire. Plus
vous aurez vous-même travaillé en amont, plus l’assignation sera rédigée de façon claire et correspondra à
ce que vous voulez invoquer comme arguments.
Les personnes se représentant seules ont souvent tendance à bâtir leur argumentaire sur des faits que
d’aucuns jugeraient inadmissibles au regard de la morale et du bon sens. Or, il est crucial de comprendre
que dans une procédure juridique, le juge jugera en droit c’est-à-dire au regard des textes de lois, décrets,
codes, arrêtés, jurisprudence, etc.. La première des choses à faire est donc d’analyser votre situation au
regard des textes juridiques. Il faut par ailleurs éviter les éléments de l’ordre de la blessure ou des attitudes
de votre adversaire même si ceux-ci vous ont ulcérés.
A Paris, vous pourrez recourir à des consultations avec des avocats en Mairie. Ce service, gratuit et illimité,
est extrêmement précieux. Chaque consultation dure 10 à 15 minutes pendant lesquelles un avocat sera à
votre écoute pour vous aider. Vous devrez en revanche lui poser des questions précises car ces
consultations ne peuvent remplacer un avocat que vous auriez sollicité pour mener l’affaire. Cela signifie
que dans tous les cas, vous aurez du travail à faire vous-même pour décortiquer les textes de loi et les
arguments qui vous semblent pertinents afin de formuler ensuite des demandes de conseils aux avocats
des Mairies de Paris pour en recueillir l’avis. Ce service reste néanmoins d’une aide considérable, ne seraitce que parce qu’il vous permet de vous sentir écouté et aidé par des professionnels dans le cadre d’un
chemin où vous vous retrouvez seul et où il est donc possible de perdre rapidement pied.
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En parallèle de votre démarche au civil :
Le Tribunal que vous allez solliciter ne se chargera pas de statuer sur ce que vous avez pu vivre
humainement parlant indépendamment du litige financier. Pour laisser également une trace sur ce point,
il vous est possible de déposer plainte auprès de la Direction Départementale de Protection des
Populations (DDPP). La liste des DDPP est disponible ici :
http://www.economie.gouv.fr/dgccrf/coordonnees-des-DDPP-et-DDCSPP
Dans mon cas, ma plainte déposée à la DDPP de Paris a retenue toute son attention. Mon dossier a été
transmis à la DIRECCTE (Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du
travail et de l'emploi) d’Île-de-France.
IV.2. Rassembler les pièces
C’est également à vous de constituer toutes les pièces que vous souhaitez joindre au dossier (mails,
courriers, livrables produits, factures, ...). L’huissier ne s’en chargera pas.
Il vous faut ici faire une sélection parmi toutes les pièces dont vous disposez, notamment les mails, pour ne
garder que ceux que vous pensez être les plus pertinents. Attention, toutes vos pièces doivent être sur
papier, vous ne pouvez pas joindre de CD-ROM ou autre support dématérialisé.
Il est conseillé de numéroter chaque pièce (PJ1, PJ2, PJ3, …) puis de rédiger un bordereau qui liste toutes
les pièces par numéro chronologiquement rangé.
L’assignation que rédigera l’huissier sera courte (1 page environ). Aussi, je vous conseille de rédiger vousmême une notice détaillée à l’attention du juge d’Instance, qui constituera une des pièces jointes à
l’assignation, pour lui permettre – s’il le souhaite - de disposer d’éléments détaillés sur le litige et son
historique. Dans ce cas, faites allusion sous forme rédigée aux autres pièces jointes du dossier dans cette
notice détaillée : par exemple « Une lettre de mise en demeure a été transmise à l’association XXXX le
XX/XX/XXXX (PJY) », la PJY renvoyant à la lettre de mise en demeure dans le bordereau.
Dans mon cas :
- J’ai constitué un dossier de 75 pièces,
- J’ai dressé un bordereau classant toutes les pièces rangées par ordre chronologique,
- J’ai rédigé une notice détaillée à l’attention du juge d’Instance, constituant la pièce jointe 1, qui résume
le litige et son historique.
IV.3. Recourir à l’huissier
Une fois votre dossier prêt, votre assignation doit être rédigée et signifiée*, c’est-à-dire transmise à
l’adversaire. Vous ne pouvez pas le faire vous-même, c’est obligatoirement un huissier qui doit l’effectuer.
Lorsque vous avez recours à un avocat, celui-ci rédige l’assignation, puis sa signification est assurée
ensuite par un huissier. Les huissiers ont cependant compétence eux-aussi pour rédiger l’assignation, en
plus de la signifier.
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Il vous faut par contre trouver un huissier qui « accepte » de le faire et, dans les faits, étonnement, je me
suis heurté à beaucoup de difficulté pour cette étape. La plupart des huissiers semblent souhaiter
uniquement être chargés de signifier l’acte.
Une fois que vous aurez pris contact avec un huissier qui pratique la rédaction de l’acte, vous devrez lui
fournir deux copies de toutes vos pièces : l’une sera à destination de votre adversaire et l’autre à
destination du Tribunal. Pensez-bien sûr à faire également une copie (ou à utiliser les originaux selon les
pièces) pour vous constituer un dossier complet pour vous aussi.
L’huissier doit absolument avoir toutes les pièces au moment de la rédaction de l’acte et il les signifiera à
votre adversaire en même tant que l’acte lui-même. Il faut en effet obligatoirement que votre adversaire
connaisse les pièces et arguments que vous avancerez au Tribunal. Par ailleurs, l’huissier tamponnera
chacune de vos pièces pour garantir qu’il n’y a aucune différence entre ce qu’aura eu votre adversaire et ce
qu’aura eu le Tribunal. Le respect de ce principe est fondamental, sans quoi votre procédure peut échouer
pour des raisons de forme. De la même façon, nous verrons que votre adversaire devra vous fournir avant
l’audience ses pièces et arguments qu’il invoquera en défense au Tribunal.
C’est l’huissier lui-même qui prendra contact avec le greffe du Tribunal d’Instance pour demander une date
d’audience car cette date doit bien entendu figurer dans l’assignation pour que votre adversaire en soit
informé. Ici, il faut savoir que les plannings des Tribunaux sont extrêmement chargés (et encore la
procédure d’assignation au Tribunal d’Instance est considérée comme l’une des plus « fluides ») et il est
fort probable que l’audience qui vous sera donnée soit plusieurs mois plus tard.
Ca y est, l’assignation est rédigée et votre dossier est tamponné, une bonne partie du travail est désormais
accomplie.
L’huissier signifiera l’assignation à votre adversaire puis vous retournera la copie que vous devrez aller
placer* vous-même au greffe du Tribunal d’Instance.
Les tarifs d’huissier sont règlementés mais cette étape de rédaction et de signification de l’assignation reste
très couteuse financièrement (Cf. partie sur les frais).
Dans mon cas :
- Après de nombreuses prospections, j’ai pu entrer en contact avec un huissier pratiquant la rédaction
d’assignation,
- Une rencontre a été programmée, l’huissier m’a écouté lui résumer l’affaire puis il a rédigé un premier
jet de l’assignation qu’il m’a ensuite soumis pour avis,
- Le Tribunal a délivré une date d’audience pour le 8 avril 2014 (soit 5 mois plus tard),
- L’huissier a signifié l’assignation à l’ANPCEN le 7 novembre 2013.
IV.4. Déposer la copie au Tribunal
C’est à réception de cette copie que le Tribunal d’Instance est déclaré officiellement saisi. Cette étape ne
doit donc pas être oubliée, sans quoi tout votre travail n’aurait servi à rien.
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Lorsque j’ai placé mon assignation au Tribunal, il était toujours demandé d’attacher à l’assignation 35 € de
timbre fiscal. Depuis le 1er janvier 2014, cette taxe n’existe plus pour l’introduction d’une Instance (décret
du 29 décembre 2013).
Logiquement, le délai minimal pour saisir le Tribunal (c’est-à-dire pour lui remettre la copie d’huissier) est
de 6 jours avant la date d’audience. Néanmoins, comme votre dossier est prêt, je vous conseille de le placer
immédiatement. Cela vous permettra de penser à autre chose pendant les mois qui suivent.
Une fois votre dossier déposé au greffe, le Tribunal est donc officiellement saisi. Vous pouvez désormais
souffler. Votre adversaire peut se manifester dès réception de l’assignation mais, dans les faits, il est peu
probable qu’il ne mette pas à profit les nombreux mois qui vous séparent de l’audience pour imaginer ses
propres arguments.
C’est donc le moment de ventiler votre cerveau et de continuer à vous solidifier intérieurement en vue de
l’audience qui demandera de nouveau d’importantes ressources.
Une alternative :
Si comme moi vous n’avez pas les moyens de solliciter l’attache d’un avocat, il vous est également
possible de solliciter le site http://www.rendrejustice.com. Le service proposé par ce site n’est pas de
vous représenter lors de l’audience mais de vous accompagner précisément pour les étapes préalables
(mises en demeure de payer, rédaction/signification de l’assignation) par des juristes avocats/huissiers à
distance. Cela peut représenter une solution extrêmement intéressante car facile et relativement
abordable. J’ai moi-même fait appel à ce service pour l’une des mises en demeure transmises à
l’ANPCEN. En revanche, j’ai ensuite préféré passer par un huissier « en direct » sur Paris pour la
rédaction/signification de l’assignation, afin de pouvoir mieux suivre cette étape.
V. Préparation de l’audience
V.1. Se replonger dans le dossier
Je vous conseille de vous replonger tranquillement dans votre dossier relativement en amont de l’audience
même si vous n’avez toujours pas eu de nouvelles du défendeur et que vous ne savez donc rien de ce qu’il
prévoit (représentation ou non par un avocat, demande ou non d’un renvoi (voir plus loin), proposition
d’une conciliation ou au contraire rejet total de vos demandes, ...).
Je vous conseille :
- de faire comme si l’audience allait avoir lieu à la date prévue (donc comme si votre adversaire
n’allait pas demander de renvoi),
- d’envisager le « possible » le plus négatif concernant la position de votre adversaire c’est-à-dire de
vous conditionner à ce qu’il se fasse représenter par un avocat (donc un professionnel du droit alors que
vous ne l’êtes pas), qu’il rejette l’ensemble de vos demandes et qu’il demande en plus au juge que vousmême soyez condamné au titre de l’article 700 (voir en fin de rapport la partie concernant les frais).
De cette façon, lorsque vous saurez ce que votre adversaire compte faire, si vous aviez vu juste, vous vous y
serez préparé et, dans le cas contraire, cela sera pour vous d’heureuses nouvelles.
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Le fonctionnement à ce stade de la procédure est assez comparable à un examen dans lequel vous devez
enchainer une étape d’écrit et une étape d’oral. L’audience sera totalement différente de l’étape de
rédaction de l’assignation. Vous aurez à résumer en deux minutes votre litige à un Tribunal, en présence de
votre adversaire sans doute représenté donc par un avocat, et tout cela a priori observé par un aéropage
de personnes dont c’est le métier (avocats présents à l’audience puisque celle-ci est publique) alors que
vous-même êtes profane.
Tout cela peut être déstabilisant et il vous faut donc vous y préparer.
Il est d’autant plus important de se préparer à l’audience que la procédure devant le Tribunal d'Instance est
avant tout une procédure orale. Cela signifie que le juge en théorie n'est pas tenu par vos écritures
(assignation et pièces fournies) et qu’il peut ne tenir compte que de ce que vous direz à l'audience (de
même pour votre adversaire). Ceci étant, d’après les témoignages recueillis et d’après ma propre
expérience, le juge s'attache quand même beaucoup aux écrits.
Pour préparer votre audience, au-delà de relire votre dossier, je vous conseille :
- de vous rendre au moins une fois à une audience du Tribunal afin de vous familiariser avec les
lieux et le déroulé. Cela vous permettra sans doute de lever une grande partie du stress le jour J. Les
audiences du Tribunal d’Instance sont en effet publiques. Vous pouvez donc aller assister à une séance en
vous installant silencieusement sur un côté de la salle. Profitez-en pour regarder les lieux, le fameux
tribunal (grand bureau surélevé où s’installe le juge, son greffier et l’huissier), les bancs où s’assoient les
avocats, la barre face au tribunal où vous-même vous irez plaider. Tout cela vous permettra de vous sentir
davantage en confiance lors de votre oral. L’objectif est aussi de visualiser comment l’audience se déroule
(appel des causes*, ...) et même éventuellement comment les parties se défendent pour vous inspirer
d’arguments dans des affaires similaires à la vôtre. Attention, dans mon cas, le Tribunal d’Instance était
fermé lors des vacances scolaires. Aussi, renseignez-vous auprès du greffe avant de vous déplacer, pour
être sûr qu’une séance est effectivement programmée, afin de ne pas utiliser par exemple un jour de congé
inutilement.
- de rédiger votre plaidoirie c’est-à-dire le petit exposé que vous présenterez au juge. Il faut
compter environ 2-3 minutes de paroles. Votre texte doit donc être court, percutant et aller à l’essentiel.
- préparer une série de questions/réponses dans le cas où le magistrat vous interrogerez (peu
probable dans les faits car l’audience va extrêmement vite) et également si vous avez besoin de rétablir
certaines vérités face aux arguments de votre adversaire.
- de vous entrainer à l’oral, chez vous ou en prenant des cours d’élocution si vous en avez la
possibilité. Là encore, cela vous permettra de vous sentir davantage à l’aise. Vous devez connaître votre
dossier par cœur, cela contribuera à montrer au juge que vous êtes sérieux dans votre demande.
Romain Sordello. Étapes d’une procédure d’assignation. Expérience contre l’ANPCEN. Janvier 2015.
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Dans mon cas :
- j’ai commencé à me replonger dans mon dossier 1 mois environ avant l’audience,
- j’ai rédigé un argumentaire oral et préparé une liste de réponses à des questions que pourrait me poser
le juge ou pour répondre éventuellement aux arguments de l’adversaire,
- je me suis rendu à une audience du Tribunal pour m’imprégner des lieux et me familiariser avec le
déroulé,
- j’ai été consulté un avocat en Mairie de Paris pour poser quelques dernières questions au regard des
conclusions transmises par l’ANPCEN,
- j’ai suivi deux cours de prises de parole en public, spécifiquement dédiés à cette future audience afin
d’en simuler le déroulé.
V.2. Ce que peut et doit faire votre adversaire
Votre adversaire peut prévoir de demander un renvoi* c’est-à-dire que le jour de l’audience il demande au
juge de la reporter à une date ultérieure. D’après les témoignages que j’ai pu recueillir, un premier renvoi
est généralement systématiquement accepté par le juge, même sans argument. Cela repoussera donc votre
audience à une autre date, sûrement plusieurs semaines plus tard.
S’il ne demande pas de renvoi, votre adversaire doit vous transmettre ses arguments avant l’audience
comme vous-même vous l’avez fait avec votre assignation. Il ne semble pas exister de délai officiel pour
que votre adversaire vous remette ses pièces avant l’audience. Cela est donc fonction de son « fairplay »
puisque le temps que vous aurez ensuite pour analyser ses arguments, et y répondre, dépend de fait de
cette date de remise.
Enfin, votre adversaire peut bien entendu proposer une conciliation, c’est tout l’intérêt de la procédure
d’assignation. A l’inverse, il rejettera l’ensemble de vos demandes.
Dans mon cas :
- l’ANPCEN a donné signe de vie une quinzaine de jours avant l’audience par l’intermédiaire d’un avocat
qu’elle a choisi pour se faire représenter au Tribunal.
- dans ses conclusions, l’ANPCEN n’a proposé aucune conciliation et a demandé à ce que le Tribunal me
déboute* en totalité, assorti d’une condamnation au titre de l’article 700.
VI. L’audience
Votre audience est aujourd’hui. Comme vous avez pris le temps de vous familiariser avec son déroulé, vous
pouvez vous rendre plus sereinement au Tribunal, sachant que vous ressentirez sûrement dans tous les cas
un état de stress.
Cela va sans dire mais il est impératif de ne pas être en retard à votre audience.
En arrivant au Tribunal, dans la salle des pas perdus*, vous trouverez vraisemblablement une liste des
affaires qui seront appelées à l’audience. Vérifiez que votre affaire est bien inscrite, puis aller vous installer
tranquillement dans la salle d’audience.
Romain Sordello. Étapes d’une procédure d’assignation. Expérience contre l’ANPCEN. Janvier 2015.
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Cherchez dans la salle si vous voyez votre défendeur. C’est le moment de constater s’il est représenté
uniquement par un avocat ou si des personnes avec qui vous avez travaillez pendant de nombreux mois ont
fait l’effort de faire le déplacement.
A l’heure, le Tribunal, composé du juge, de son greffier et d’un huissier, entre dans la salle d’audience. A
cet instant une sonnette retentit. Levez-vous, comme a priori le fera le reste de l’assistance.
Le juge déclare la séance ouverte et invite la salle à s’asseoir.
Commence alors l’appel des causes, c’est-à-dire que toutes les affaires devant être traitées pendant
l’audience seront appelées pour que le juge constate si la ou les deux parties sont présentes.
L’appel est prononcé par l’huissier assis à droite du juge. Lorsque vous entendrez votre affaire, sans doute
sous la forme « J’appelle Monsieur X contre l’association Y », levez-vous et dites « Présent, en demande ».
Si votre adversaire est présent, c’est à ce moment là qu’il devra se manifester lui aussi au juge et dire
« Présent, en défense ».
Vous pouvez vous rasseoir. L’appel passe généralement une vingtaine de dossiers. C’est là que les parties
qui le souhaitent demandent au juge un renvoi.
Une fois tous les dossiers passés, ceux pour lesquels personne ne s’est manifesté sont rappelés dans le cas
où les représentants seraient arrivés en retard, puis ces dossiers sont définitivement écartés de l’ordre du
jour.
Lorsque l’appel des causes est clos, le Tribunal reprend du début les dossiers pour lesquels les parties sont
présentées, cette fois-ci pour juger les affaires.
Lorsque vous entendrez à nouveau votre affaire appelée, levez-vous à nouveau et cette fois-ci allez vous
placer à la barre du demandeur. Les demandeurs se placent généralement à droite (donc à gauche du juge)
et les défendeurs à gauche (donc à droite du juge).
Le défendeur (adversaire ou son avocat) remet ses écrits au juge. Bien entendu, ce qu’il donne au juge doit
être en tout point identique à ce que vous aurez reçu avant l’audience (pas d’annotation ou autre), toujours
pour respecter le principe du contradictoire. Dans le cas contraire il s’agit d’une faute grave. Vous-même a
priori n’aurez aucun écrit supplémentaire à donner, à moins que vous ayez produit d’autres pièces en
réponse à celles de votre adversaire (pièces que vous lui auriez alors transmis avant l’audience, là aussi
pour respecter le contradictoire).
Le juge réénonce que vous êtes en demande pour telle ou telle affaire et vous donnera donc la parole pour
votre plaidoirie. C’est le moment de l’exposer.
Le juge donnera ensuite la parole à la défense.
Sachez que le défendeur (votre adversaire) devra toujours parler en dernier. Si vous demandez à
reprendre la parole, le juge sera obligé de la lui redonner ensuite. A vous donc de juger si cela est
Romain Sordello. Étapes d’une procédure d’assignation. Expérience contre l’ANPCEN. Janvier 2015.
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nécessaire. Le juge vous sera reconnaissant de ne pas le faire si c’est simplement pour répondre à des
accusations de mauvaise foi de votre défendeur.
Quelques éléments importants quand vous vous exprimerez pendant cet oral :
- Ne coupez pas la parole au juge,
- N’employez pas « Votre honneur » mais Madame/Monsieur le/la Président(e) ou bien
Madame/Monsieur le/la juge,
- N’utilisez pas « objection » (système américain).
Si le défendeur a tout rejeté en bloc, de fait, le juge ne cherchera pas de conciliation et les choses s’en
termineront après que le défendeur ait parlé. Il est probable cependant que le juge ne tranche pas l’affaire
dans l’instant et la mette en délibéré à une date ultérieure, date qu’il vous annonce oralement.
Vous quitterez donc l’audience sans connaître le jugement. Il faut compter environ 1 mois et demi entre
l’audience et la date du délibéré.
Dans mon cas :
- l’ANPCEN s’est faite représenter en séance par un avocat, aucun des représentants de l’association avec
lesquels j’ai travaillé pendant 14 mois ne s’est déplacé au Tribunal,
- l’ANPCEN, ainsi que l’annonçaient ses conclusions écrites, a demandé le rejet de l’ensemble de mes
demandes,
- après audition une fois de chaque partie (défendeur en dernier), le juge a mis l’affaire en délibéré au 20
mai 2014.
VII. Connaître la décision du juge
A la date du délibéré, vous pouvez appeler le greffe du Tribunal pour connaître la décision du juge. C’est en
toute logique ce que fera aussi votre adversaire, surtout s’il est représenté par un avocat.
Le greffier du Tribunal vous lira la minute* c'est-à-dire l’original du jugement. Il vous lira simplement le
« verdict » du juge et non tout l’exposé du délibéré que vous recevrez ensuite par courrier.
Je vous conseille de prévoir papier et stylo pour noter ce que vous dira le greffier au téléphone car la
conversation ne dure que quelques secondes et il faut être très alerte pour tout retenir. De plus, le
jugement ne peut vous être lu qu’une seule fois par téléphone ; si vous souhaitez le réentendre avant
réception du courrier, il vous faudra vous déplacer carrément au greffe. D’après les témoignages que j’ai
recueillis, certains greffes refusent de donner les délibérés par téléphone même une seule fois et il faut
donc se déplacer ou attendre le courrier.
Quelques semaines après le délibéré, le Tribunal envoie aux deux parties le délibéré du juge par courrier,
c’est la notification, appelée la grosse*. Vous y trouverez le verdict que vous a énoncé le greffe par
téléphone ainsi qu’un exposé des motifs du Tribunal qui éclaire sa décision. Dans mon cas, le courrier a été
transmis par le greffe le 15 juillet 2014, soit environ 8 semaines après la date de délibération du juge.
Romain Sordello. Étapes d’une procédure d’assignation. Expérience contre l’ANPCEN. Janvier 2015.
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D’après les témoignages que j’ai pu recueillir, il est possible que le délibéré soit prorogé, c'est-à-dire que le
juge rende sa décision quelques jours après la date de délibéré fixée initialement. Le juge peut proroger
quand il n'a pas eu le temps de rendre toutes les décisions parce que ses dossiers sont trop nombreux.
VII. L’exécution de la partie condamnée
Dans le cas où la partie adverse a été condamnée, celle-ci doit s’exécuter à partir du moment où le
jugement devient exécutoire*.
Dans le cas « par défaut », le jugement devient exécutoire à partir du moment où le délai pour faire appel
de la décision du juge est échu et qu’aucune des parties n’a souhaité faire appel.
Par contre, si le juge a assorti sa décision d’une exécution provisoire, ce qu’il peut faire pour diverses
raisons, le condamné doit s’exécuter à partir de la date de délibéré (et non de la date de réception du
courrier du Tribunal, celle-ci n’est qu’une date d’information alors que la date de condamnation est celle de
la délibération). C’est à partir de cette date que courent les intérêts de retards à la charge du condamné.
Dans mon cas :
- le juge d’Instance a prononcé une condamnation contre l’ANPCEN,
- le juge d’Instance a assorti sa décision d’une exécution provisoire. L’ANPCEN doit donc régulariser sa
condamnation dès la délibération du juge et les intérêts de retards s’appliquent à elle à compter de cette
date (20 mai 2014),
- au 15 janvier 2015, soit environ 8 mois après le délibéré du juge, l’ANPCEN n’a pas régularisé sa
condamnation.
Le fait que l’ANPCEN ait été condamnée et qu’elle ne respecte pas la Justice de la République a été porté,
de manière officielle par courrier RAR, à la connaissance de :
- la Préfecture de Paris où est enregistrée l’ANPCEN,
- le Ministère de l’écologie dans la mesure où l’ANPCEN reçoit de sa part des financements
publics ainsi qu’un agrément national,
- le Ministère des finances dans la mesure où l’ANPCEN applique le statut d’intérêt général qui
permet une défiscalisation de ses dons et adhésions.
VIII. Coût de la procédure en temps et en argent
VIII.1. Récapitulatif me concernant
Frais engagés :
La question des frais (voir ci-après) est sans doute l’une des plus complexes parmi tout ce qu’il faut
découvrir quand on s’engage pour la première fois dans un procès, alors même qu’elle est tout à fait
centrale si comme moi vous avez très peu de moyens à y allouer. De plus, il est très difficile d’estimer à
l’avance précisément les sommes que vous aurez à débourser. Voici alors un bilan global de mon
expérience pour information.
Romain Sordello. Étapes d’une procédure d’assignation. Expérience contre l’ANPCEN. Janvier 2015.
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Frais de courriers (dont courriers en RAR) : 15 €
Sollicitation d’avocats en ligne (mise en demeure) : 30 €
Frais d’huissier pour la rédaction et la signification de l’acte : 480 €
Frais de photocopies pour la constitution du dossier (75 pièces * 3 exemplaires) : 100 €
Timbre fiscal : 35 € (supprimés depuis 1er janvier 2014)
Cours d’expression orale : 65 €
Total : 725 €
Temps nécessaire pour la conduite de la procédure :
Lorsque l’on s’engage dans une procédure juridique, il est difficile au départ d’imaginer le temps que cela
va prendre. Mener ce type de démarche seul est très chronophage. Pour information, sur la base de mon
expérience, voici un bilan approximatif, en jours, concernant les déplacements, démarches et rendez-vous
extérieurs qui ont été nécessaires :
* Constitution du dossier d’assignation :
- rendez-vous avec avocats en Mairie : 1 jour
- reprographie et confection du dossier : 1/2 jour
- déplacement au greffe pour placer l’assignation : 1/2 jour
- travail avec l’huissier : 1 jour
* Préparation de l’audience :
- séance publique au Tribunal : 1 jour
- cours de prise de parole : 1/2 jour
- rendez-vous avec avocat en Mairie : 1/2 jour
* Audience : 1/2 jour
Total # 5,5 jours
A ce bilan s’ajoute le travail à domicile qui est difficile à comptabiliser a posteriori mais qu’il faut estimer
à plusieurs dizaines d’heures (lecture de textes juridiques, recherches sur internet sur la procédure,
sélection des pièces, rédaction de la note à destination du juge, préparation de l’oral, ...).
VIII.2. La charge des dépens et l’article 700 du NCPC
Une partie des frais associés à une procédure juridique sont appelés les dépens et le juge désignera
obligatoirement qui en aura la charge à l’issue du procès. Cependant, tous les frais que vous aurez engagés
dans votre procédure ne sont pas des dépens, on parle alors de frais irrépétibles. L’ensemble des frais
(dépens + frais irrépétibles) constituent les « frais de justice ». Pour couvrir ces frais autres que les dépens,
l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile (NCPC) prévoit que chaque partie peut demander à ce
que la partie adverse soit condamnée à lui verser une certaine somme pour couvrir ces dépenses.
Dans les faits, il est extrêmement compliqué je trouve de savoir de manière certaine ce qui rentre et ce qui
ne rentre pas dans les dépens et ce qui est donc de l’ordre de l’article 700.
Selon mes recherches dans ce domaine qui reste très complexe pour un béotien, concernant une
assignation :
Romain Sordello. Étapes d’une procédure d’assignation. Expérience contre l’ANPCEN. Janvier 2015.
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- les frais d’huissier ne sont pas considérés comme des dépens, de même que bien sûr les frais que
vous aurez engagés pour votre dossier et votre oral (photocopies, cours d’expression, ...),
- le coût du timbre fiscal a priori entre dans les dépens (mais de toutes façons cette taxe est
supprimée depuis janvier 2014 pour certaines procédures dont l’introduction d’une Instance),
Dans d’autres procédures juridiques, certains frais sont clairement identifiés comme inclus dans les dépens
(indemnité des témoins, sollicitation d’experts par le Tribunal, ...).
C’est à vous (et donc à votre avocat ou huissier) de fixer la somme que vous allez demander au titre de
l’article 700. Si vous êtes demandeur, elle sera indiquée dans votre assignation, si vous êtes défendeur vous
le formulerez dans vos conclusions. Toute partie peut demander une somme au titre de l’article 700,
qu’elle soit représentée seule ou par un avocat, puisque dans tous les cas des frais dits « irrépétibles »
existent (incluant donc les frais d’huissier pour la rédaction et la signification de l’assignation puisqu’a priori
il ne s’agit pas de dépens).
Ensuite, c’est au juge que reviendra les décisions. En effet, lorsqu’il mettra fin à l’Instance, le juge devra
obligatoirement se prononcer aussi sur :
- à qui reviendra la charge des dépens,
- l’accord ou non des éventuelles demandes de chaque partie au titre de l’article 700 du NCPC.
Concernant les dépens, tout demandeur qui n’a pas été intégralement suivi dans sa demande conserve la
charge des dépens. Le juge peut toutefois en décider autrement en motivant sa décision mais selon les
témoignages recueillis c’est exceptionnel.
Concernant les demandes au titre de l’article 700 du NCPC, le juge peut accorder l’entièreté ou bien, le cas
le plus fréquent, une partie seulement (il est extrêmement rare que ce qu’accorde le juge couvre la totalité
des demandes). Il peut aussi décider qu’il n’y a pas lieu d’appliquer l’article 700 et donc ne rien accorder,
sans avoir à motiver sa décision.
Dans mon cas :
- les dépens ont été laissés à ma charge dans la mesure où je n’ai pas obtenu la totalité de ma demande,
- le juge a dit n’y avoir lieu à statuer sur l’article 700 du NCPC.
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Lexique :
Appel des causes : Appel effectué par huissier en début d’audience afin de lister toutes les affaires à l’ordre
du jour et de constater si la ou les deux parties sont présentes.
Contradictoire : Qualifie un jugement rendu après que les parties ont été entendues.
Débouter : Déclarer par jugement qu’une personne est déchue de la demande qu’elle a faite en justice.
Exécutoire : Se dit d’un jugement qui devient effectif.
Greffe : Bureau/accueil d’un Tribunal.
Grosse : Copie exécutoire de la décision (arrêt, jugement ou ordonnance), délivrée par le greffe du Tribunal
aux deux parties du procès. C’est la notification du délibéré.
Minute : Original d'une décision de justice (jugement ou arrêt) conservé au greffe de la juridiction.
Placer : Se dit d’une copie d’assignation que l’on va déposer au greffe d’un Tribunal pour le saisir
officiellement.
RAR : Recommandé - Accusé de Réception.
Renvoi : Action de renvoyer un procès à une date ultérieure ou devant un autre Tribunal que le Tribunal
saisi.
Salle des pas perdus : Vestibule situé à l’entrée d’une salle d’audience et représentant ainsi un espace de
transition entre le monde extérieur et l'espace judiciaire.
Signification : Notification d’un jugement ou d’un acte par voie d’huissier.
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LES ÉTAPES DE LA PROCÉDURE
D’ASSIGNATION DEVANT LE TRIBUNAL
D’INSTANCE
Retour de l’expérience contre l’Association
nationale pour la protection du ciel et de
l’environnement nocturne (ANPCEN)
Romain SORDELLO
Ingénieur expert biodiversité
Paris, FRANCE
Tel. : 06 62 06 85 19
Mail : contact [at] romain-sordello.fr
Site internet : http://www.romain-sordello.fr