Lettre N° 79

Transcription

Lettre N° 79
Légende, ou réalité ?
Prise de contact 79
Janvier 2009
Fleming, c’était un pauvre fermier dans le Ayrshire Un jour, alors qu’il tentait de gagner la vie de sa
famille, il entendit un appel au secours provenant d’un marécage proche.
Il laissa tomber ses outils, y courut et y trouva un jeune garçon enfoncé jusqu’à la taille dans ce
marécage, apeuré, criant et cherchant à se libérer Le fermier sauva le jeune homme de ce qui
aurait pu être une mort lente et cruelle.
Le lendemain, un attelage élégant se présenta à la ferme. Un noble élégamment vêtu, en sortit et
se présenta comme étant le père du garçon que le fermier avait aidé.
- Je veux vous récompenser, dit le noble. Vous avez sauvé la vie de mon fils !
- Je ne peux accepter de paiement pour ce que j’ai fait ! répondit le fermier écossais.
Au même moment, le fils du fermier, âgé d’environ 10 ans, vint à la porte de la cabane.
- C’est votre fils ? demanda le noble
- Oui, répondit fièrement le fermier.
- Alors je vous propose un marché. Permettez-moi d’offrir à votre fils la même éducation qu’à mon
fils. Si le fils ressemble au père, je suis sûr qu’il sera un homme duquel tous deux seront fiers.
Et le fermier accepta.
Le fils du fermier Fleming suivit les cours des meilleures écoles, et il fut diplômé de l’École de
l’Hôpital Sainte-Marie de Londres. Porteur d’une grande aspiration, il continua jusqu’à être connu
du monde entier.
En 1927, le fameux Docteur Alexander Fleming avait en effet découvert la pénicilline
Des années plus tard, le fils du même noble qui avait été sauvé du marécage était atteint d’une
pneumonie. Qui lui sauva la vie, cette fois ? … La pénicilline.
Comment s’appelait ce noble ? Sir Randolph Henry Spencer Churchill; et son fils : Sir Winston Churchill
Sir Winston Churchill et Sir Alexander Fleming restèrent amis toute leur vie. Sir Alexander Fleming
décéda en 1955 à l’âge de 74 ans à Londres, Sir Winston Churchill décéda en 1965 à l’âge de 91 ans à
Londres. Ils sont enterrés dans le même cimetière.
Cette histoire m’a semblé suffisamment belle pour que je prenne la peine de la recopier … Elle a
servi de thème pour la Semaine de l’amitié, en 2008 …
Mais voici que, essayant de trouver plus de détails, via Internet, j’ai lu ce qui suit, et qui a été pour
moi l’objet d’une cruelle désillusion :
Le fabuleux destin de Churchill et Fleming.
Une nouvelle chaîne de l’amitié se répand sur le Net avec comme support les destins
incroyablement liés de Winston Churchill, célèbre homme politique et premier Ministre
britannique, et de Alexander Fleming, découvreur illustre de la pénicilline.. Fabuleux hasards ou
simple canular ?
Le scénario de notre fabuleuse histoire semble sortir tout droit des meilleurs studios de
Hollywood. Tous les ingrédients du succès planétaire sont présents :
Héroïsme ! Un fermier sauve un jeune garçon de la noyade.
Compassion : En remerciement, le père du garçon financera les études du fils du pauvre fermier.
Suspens ! Le fermier s’appelle Fleming et son fils découvrira quelques années plus tard la
pénicilline.
Conclusion heureuse ! Le garçon sauvé des eaux évitera à nouveau la mort grâce à cette
pénicilline et bien plus tard il sauvera le Royaume Uni en guerre. Il s’appelle Winston Churchill.
La boucle est bouclée ! Selon l’adage, il n’y a jamais de fumée sans feu, comment mettre en doute
une si incroyable histoire. La vie n’est-elle pas faite d’une suite infinie de coïncidence ? Le lecteur
naïf (ou simplement émerveillé) n’hésitera donc pas une seconde : un clic et tous ses contacts
profiteront eux aussi de cette histoire merveilleuse … Et pourtant totalement fausse.
Etonnamment, les biographies respectives des deux hommes célèbres ne font aucune mention de
ces évènements. De tels croisements de destin feraient pourtant le bonheur des biographes.
Selon les sources mentionnées ci-dessous et vérifiées, le jeune Fleming a choisi de rejoindre la
recherche médicale très tardivement, poussé par son frère lui-même médecin. Quant à Churchill,
la pneumonie qui l’a effectivement assailli en 1943 n’a pas été traitée avec de la pénicilline, mais
avec un autre antibiotique.
Un autre adage ne dit-il pas : trop beau pour être vrai !
Comme il semble facile de s’émouvoir devant les belles histoires, surtout lorsqu’elles sont si bien
racontées ! … Et combien la déception est grande, lorsque l’on apprend la stricte vérité ! … Mais faut-il
vraiment s’en offusquer, au point de ne plus croire à rien ? Après tout, cela aurait pu se produire, car
toutes les histoires ont souvent une conclusion qui conduit à la réflexion, laquelle peut provoquer en
nous des élans de générosité … ou de repli sur soi, nous rendant parfaitement égoïstes !
Oui, faire d’une réalité une légende, dont le but est, parfois, de conduire à la réflexion, à l’exaltation …
ou au remord, en réalisant l’impossibilité de « rattraper », et encore moins de réparer une situation
que nous avons provoquée … Souvenons nous, par exemple, du premier fils d’Adam et Eve, qui se jeta
sur son frère Abel, et le tua, par jalousie … Victor Hugo, dans sa « légende des siècles », en fît une
poésie, véritable légende, qui nous prend « aux tripes » : vous en souvenez-vous ?
La conscience
Lorsque avec ses enfants vêtus de peaux de bêtes,
Echevelé, livide au milieu des tempêtes,
Caïn se fut enfui de devant Jéhovah,
Comme le soir tombait, l'homme sombre arriva
Au bas d'une montagne en une grande plaine ;
Sa femme fatiguée et ses fils hors d'haleine
Lui dirent : « Couchons-nous sur la terre, et dormons. »
Caïn, ne dormant pas, songeait au pied des monts.
Ayant levé la tête, au fond des cieux funèbres,
Il vit un œil, tout grand ouvert dans les ténèbres,
Et qui le regardait dans l'ombre fixement.
« Je suis trop près », dit-il avec un tremblement.
Il réveilla ses fils dormant, sa femme lasse,
Et se remit à fuir sinistre dans l'espace.
Il marcha trente jours, il marcha trente nuits.
Il allait, muet, pâle et frémissant aux bruits,
Furtif, sans regarder derrière lui, sans trêve,
Sans repos, sans sommeil; il atteignit la grève
Des mers dans le pays qui fut depuis Assur.
« Arrêtons-nous, dit-il, car cet asile est sûr.
Restons-y. Nous avons du monde atteint les bornes. »
Et, comme il s'asseyait, il vit dans les cieux mornes
L'œil à la même place au fond de l'horizon.
Alors il tressaillit en proie au noir frisson.
« Cachez-moi ! » cria-t-il; et, le doigt sur la bouche,
Tous ses fils regardaient trembler l'aïeul farouche.
Caïn dit à Jabel, père de ceux qui vont
Sous des tentes de poil dans le désert profond :
« Etends de ce côté la toile de la tente. »
Et l'on développa la muraille flottante ;
Et, quand on l'eut fixée avec des poids de plomb :
Vous ne voyez plus rien ? dit Tsilla, l'enfant blond,
La fille de ses Fils, douce comme l'aurore ;
Et Caïn répondit : « je vois cet œil encore ! »
Jubal, père de ceux qui passent dans les bourgs
Soufflant dans des clairons et frappant des tambours,
Cria : « je saurai bien construire une barrière. »
Il fit un mur de bronze et mit Caïn derrière.
Et Caïn dit « Cet œil me regarde toujours! »
Hénoch dit : « Il faut faire une enceinte de tours
Si terrible, que rien ne puisse approcher d'elle.
Bâtissons une ville avec sa citadelle,
Bâtissons une ville, et nous la fermerons. »
Alors Tubalcaïn, père des forgerons,
Construisit une ville énorme et surhumaine.
Pendant qu'il travaillait, ses frères, dans la plaine,
Chassaient les fils d'Enos et les enfants de Seth ;
Et l'on crevait les yeux à quiconque passait ;
Et, le soir, on lançait des flèches aux étoiles.
Le granit remplaça la tente aux murs de toiles,
On lia chaque bloc avec des nœuds de fer,
Et la ville semblait une ville d'enfer ;
L'ombre des tours faisait la nuit dans les campagnes ;
Ils donnèrent aux murs l'épaisseur des montagnes ;
Sur la porte on grava : Défense à Dieu d'entrer.
Quand ils eurent fini de clore et de murer,
On mit l'aïeul au centre en une tour de pierre ;
Et lui restait lugubre et hagard. « Ô mon père !
L'œil a-t-il disparu ? » dit en tremblant Tsilla.
Et Caïn répondit : " Non, il est toujours là. »
Alors il dit: « je veux habiter sous la terre
Comme dans son sépulcre un homme solitaire ;
Rien ne me verra plus, je ne verrai plus rien. »
On fit donc une fosse, et Caïn dit « C'est bien ! »
Puis il descendit seul sous cette voûte sombre.
Quand il se fut assis sur sa chaise dans l'ombre
Et qu'on eut sur son front fermé le souterrain,
L'œil était dans la tombe et regardait Caïn.
Les années ont passé ; et pourtant, je ne peux oublier cette période où, au Lycée, notre professeur
de français nous demandait de l’apprendre par cœur, pour la réciter ensuite, et en tirer la
« morale », enfin ! Oui, les années ont passé, et je ne me souviens plus que de :
Lorsqu’avec ses enfants, vêtus de peaux de bêtes,
Echevelés, livides au milieu des tempêtes
Caïn se fût enfui de devant Jéhovah
….
L’œil était dans la tombe, et regardait Caïn.
Mais je ne peux m’empêcher de me dire : c’est vrai qu’il avait tout tenté pour échapper à la
malédiction !
Du reste, et toujours au lycée, Victor Hugo tenait une grande place dans nos pensées, tant il avait
cet art magistral de nous enthousiasmer par ses poésies, surtout. Il ne faut pas oublier que nous
étions, alors, sous l’occupation allemande, et rêvions de hauts faits de résistance. Aussi est-ce avec
ferveur que nous avions appris cet autre texte, qui avait pour titre : « Après la bataille », et pour
héros Léopold Hugo, son père, qui était Général dans l’armée française : Nous étions impressionnés
par un esprit si chevaleresque !
Après la bataille
Mon père, ce héros au regard si doux,
Suivi d’un seul housard qu’il aimait entre tous
Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille,
Parcourait à cheval, le soir d’une bataille.
Les champs couverts de morts sur qui tombait la nuit,
Il lui sembla dans l’ombre entendre un faible bruit,
C’était un espagnol de l’armée en déroute
Qui se traînait sanglant sur le bord de la route,
Râlant, brisé, livide et mort plus qu’à moitié,
Et qui disait : A boire par pitié !
Mon père ému, tendit à son housard fidèle
Une gourde de rhum qui pendait à sa selle,
Et dit : Tiens, donne à boire à ce pauvre blessé
Tout à coup, au moment où le housard baissé
Se penchait vers lui, l’homme, une espèce de Maure,
Saisit un pistolet qu’il étreignait encore,
Et vise au front mon père en criant : « Caramba » !
Le coup passa si près que le chapeau tomba
Et que le cheval fit un écart en arrière,
- Donne-lui quand même à boire, dit mon père.
Revenons à la Bible qui est là, pour nous rappeler que, par amour pour nous, ensuite, Dieu envoya
son fils unique afin que, comptant sur lui, et mettant en pratique les préceptes enseignés, nous
soyons à même de témoigner, en affirmant l’aide qu’il peut nous accorder, jour après jour, dans les
circonstances les plus diverses de notre vie. Il ne nous promet pas une vie exempte de difficultés,
mais il nous permet de pouvoir les supporter, et rester en paix. Il nous fait vivre comme « tout un
chacun », avec les mêmes dangers, les mêmes points d’interrogations, parfois : mais il ne nous
abandonne pas, il ne nous abandonne jamais !
Et puis, autre expérience pour moi, faite ces dernières semaines : Il arrive que des personnes
nouvelles, avec qui j’entre en contact, me posent la question : « Quel âge avez- vous ? » Je dis : « 81
ans » … Et je reçois souvent cette réponse : « Ce n’est pas possible, vous paraissez tellement plus
jeune, on ne vous donnerait pas plus de 70 ans ! » Alors, je me redresse un peu, et me voila tout
fier ! Et voici que, ces derniers jours, durant les fêtes de fin d’année, des « photos-souvenirs » ont été
prises et, à côté de visages jeunes et pleins de santé, j’en ai vu un autre, tout vieux, émacié … et je
me suis dit : « Mais c’est moi, cela, je suis désormais, et vraiment, un vieux » ! … Et je suis revenu de
la légende de « l’eternel jeune » à la vraie réalité …
Mais, une fois que j’ai dit cela, je ne me sens ni triste, ni déprimé, et je continue de « mordre la vie à
pleines dents » ! et puis, quel bonheur, quel privilège, d’être entouré par ce faisceau d’enfants, de
petits-enfants, d’arrière petits enfants, et de tous ces amis et connaissances … D’avoir, aussi, la
possibilité d’être en communion avec tous ceux qui m’entourent, continuant d’aider ceux qui sont
dans le besoin, d’aimer ceux qui sont privés d’amour, de réelle affection … De croire que, comme au
premier jour, j’ai la certitude que Dieu ne se désintéresse pas de moi, malgré mon handicap
physique et l’impossibilité dans laquelle je suis d’en faire « autant qu’avant » … Et le merveilleux, de
plus, est de constater que Simonne (58 ans de vie commune le 20 !) partage tout cela avec moi !
Aussi, en ce début d’année 2009, que je souhaite heureuse et sereine pour chacun de vous qui me
lisez, je peux vous quitter, en vous assurant de ma réelle affection : et cela, ce n’est pas une légende,
mais une réalité !
Khorèn