Le bénévolat sportif en Europe

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Le bénévolat sportif en Europe
RÉFLEXION sur LE SPORT, LE BÉNÉVOLAT et LA CITOYENNETÉ ACTIVE
Le bénévolat sportif en Europe : un phénomène majeur mais peu étudié
,TFOJKB'0/07*$t Vice directrice du SPES
Si nous nous penchons sur l’Europe
dans son ensemble dans une tentative
de saisir le phénomène du bénévolat
sportif en s’appuyant sur les données
disponibles – en passant sous silence
les différentes traditions observées
dans les pays majeurs tels que le
Royaume Uni, l’Italie ou l’Allemagne,
et déjà largement documentées et
analysées – nous pouvons avoir
l’impression que l’Europe des
citoyens existe et que le bénévolat
sportif est un immense mouvement
populaire florissant dans toutes les
communautés locales au sein de tous
les pays de l’Union.
Tenter d’identifier les caractéristiques du
bénévolat sportif sur la base des données
existantes revient à jouer au ballon sans
ballon. Les faits et les chiffres sur le
bénévolat ayant un potentiel scientifique
permettant une véritable comparaison
sont rares, non systématiques et pour
beaucoup de pays totalement inexistants.
Le sport, en tant que secteur d’activité du
bénévolat, est généralement classifié et
analysé conjointement avec la culture, les
loisirs et les activités récréatives, mais il
n’existe aucun consensus entre les pays
sur la façon dont les activités bénévoles
devraient être classifiées. Le lecteur est
donc invité à sortir les informations de la
mêlée et à coopérer avec les auteurs pour
tenter quelques lancers hasardeux à trois
points.
Malgré le manque indéniable de débats
globaux sur les infrastructures et le
développement du bénévolat, le sport est
bel et bien l’un des plus grands champs
d’expression du bénévolat, comparable
aux services sociaux, dans de nombreux
pays de l’Union européenne.
Les données ci-contre illustrent bien que le
sport compte comme un champ spécifique
même lorsqu’il est intégré dans un contexte
statistique plus large.
Par ailleurs, il faut également noter que le
sport est presque toujours inclus dans les
actes étatiques qui définissent et apportent
leur soutien dans le domaine de
Part des organisations à but non lucratif actives dans le bénévolat sportif par rapport au
nombre total d'organisations à but non lucratif dans des pays de culture différente
COUNTRY
Sweden
France
Denmark
Spain
Poland
Austria
Lithuania
Cyprus
Slovakia
Field 1
Field 2
Culture and recreation
22,8%
Culture and recreation
41,6%
Leisure: culture, sports, recreation, hobby 28,7%
Sport
Sport
Sports and gymnastics
22,9%
59,3%
22,91%
Culture
Sport
13%
Culture
Sport
21,02%
Sport
7,4%
l’engagement à but non lucratif, reconnaissant
ainsi de manière implicite le rôle du sport
dans la culture, le bien être des citoyens et la
cohésion sociale. Par exemple, « l’éducation
et le développement de l’activité physique »
sont considérés comme un service d’utilité
publique en Slovaquie ; en Lettonie, les
organisations de « promotion du sport »
bénéficient d’un « statut d’utilité publique » ;
le sport bénéficie d’un quart des fonds
alloués par le Funds Distribution Act en
Finlande ; au Danemark enfin, les organisations
sportives sont incluses dans les bénéficiaires
du Danish Act on Popular Education. Ceci
prouve à quel point le sport est intimement
lié aux concepts centraux de bien
commun et d’éducation.
Les valeurs fondamentales d’inclusion du
sport sont également à la base du processus
qui a largement influencé le développement
du secteur associatif, y compris dans les pays
qui semblent encore loin du contexte social
européen. Dans les pays slaves d’Europe
centrale et de l’est, comme la République
tchèque, le regain de vitalité observé au
tournant des 19e et 20e siècles a largement
reposé sur les organisations sportives ;
plusieurs de ces fédérations ont survécu à de
multiples et dramatiques changements
politiques et sont toujours actives
aujourd’hui. En Suède, la lutte pour les droits
des citoyens a généré un mouvement de
masse extrêmement puissant qui façonne
encore l’identité du secteur à but non
lucratif : le mouvement sportif s’est
développé sur ces bases et est encore
aujourd’hui la catégorie dominante du
bénévolat. De tels parallèles appellent à une
sérieuse analyse comparative et donnent à la
culture associative du sport un rôle
36,91%
18%
Culture and Arts
29,52%
Leisure, Arts and Culture
55,9%
central dans la démocratie participative
préconisée mais non encore totalement
reconnue pour le secteur bénévole.
Ces considérations fournissent le contexte
pour quelques faits bruts : dans de
nombreux pays de géographie et de
culture hétérogènes, parmi de nombreux
champs du bénévolat, les organisations
sportives impliquent un large nombre – si
ce n’est, et de loin, le plus important – de
bénévoles.
Part des bénévoles actifs dans le sport, la culture
et les loisirs sur l'ensemble des bénévoles
COUNTRY
Sweden
France
Denmark
Spain
The Netherlands
Austria
Czech Republic
Belgium
Slovakia
20% (with outdoor, culture and hobbies 52%)
50%
18%
22%
36,1%
31,3% (only sports 15.4%)
40%
69,7%
20%
Dans les pays d’adhésion récente, ayant
une tradition de la citoyenneté active plus
fragile et des recherches sur le bénévolat
peu fiables, les données sont plus obscures
mais les premiers indicateurs confirment la
tendance. En Slovaquie par exemple, une
étude sur la question a souligné que plus
de 20% des jeunes volontaires sont attirés
par le secteur sportif. Globalement les
données sont saisissantes mais ne peuvent
être prises pour argent comptant dans la
mesure où elles manquent non seulement
d’une base statistique commune pertinente
mais également d’une définition, partagée et
acceptée par l’Union européenne à un niveau
institutionnel, de l’activité bénévole.
www.sportetcitoyennete.org
RÉFLEXION sur LE SPORT, LE BÉNÉVOLAT et LA CITOYENNETÉ ACTIVE
D’autres données revendiquent une
analyse comparative tenant compte de
l’identité et du développement futur du
secteur bénévole. Dans différents pays, on
note qu’à un nombre élevé de volontaires
dans les organisations sportives correspond
un nombre comparativement faible
d’employés. Aux Pays-Bas par exemple,
alors que le ratio entre bénévoles et
employés est équilibré dans les services
sociaux, dans les domaines de la culture et
de la récréation, le nombre de bénévoles
est quatre fois supérieur. Au cœur du débat
en cours sur les risques et le potentiel de la
« professionnalisation » du bénévolat, il
serait intéressant de s’interroger sur les
spécificités des modèles organisationnels
des strucutures sportives.
Une autre spécificité qui émerge de cette
première tentative de comparaison, est le
fait que les organisations sportives et
culturelles ont comme source principale de
financement non le secteur public, mais
bien le secteur privé. Ceci est vrai pour des
pays aussi divers que l’Espagne, les
Pays-Bas, la Lettonie ou l’Autriche. Les
revenus de nature privés sont composés
essentiellement des frais d’adhésions, des
donations venant de la famille et
d’entreprises, du sponsoring et des entrées
liées aux services rendus. Ceci apporte aux
organisations bénévoles actives dans le
domaine sportif, indépendance économique
et stabilité, les plaçant dans une position
favorable pour porter haut la bannière de
l’autonomie des organisations bénévoles
dans les relations souvent difficiles etet
controversées avec les autorités publiques..
Il est indéniable que ces premières considérations
pourront être développées plus avant, si un
investissement sérieux dans la recherche sur
le bénévolat trouve sa place parmi les revendications
de l’Année Européenne du Volontariat 2011
et si les organisations actives dans le sport
développent une stratégie claire de networking
au niveau européen et s’unissent pour
demander une infrastructure soutenable et
adéquate pour le bénévolat. Parce que les
preuves montrent que le sport peut
représenter un atout majeur pour remporter
le soutien des institutionnels en terme de
bénévolat, comme l’illustre l’expérience
grecque pour les Jeux Olympiques de 2004.
Les données et les questions soulevées sont issues des
rapports nationaux de l’étude “Volunteering across Europe.
Organisations, promotion, participation” coordonnée par le
SPES (Centro di Servizio per il Volontariato del Lazio), centre
italien de soutien régional au bénévolat, membre du CEV.
Elles concernent les 27 pays de l’Union : Espagne, France,
Royaume Uni, Pays-Bas, Pologne, République Tchèque et
Italie (Volume 1, publié en 2006), Belgique, Lituanie et
Slovaquie (Volume 2, publié en 2008), Hongrie, Autriche,
Grèce, Suède, Finlande, Danemark, Chypre, Bulgarie,
Allemagne, Estonie, Lettonie, Luxembourg, Malte, Portugal,
Roumanie, Slovénie et Irlande (Volumes 3 et 4, prévus pour
2009).
Volunteering in sports across Europe:
great numbers, no figures
If we try to look on Europe as a whole in an
attempt to understand what volunteering
in sports is by ordering the available
data - and disregard the strong, well
documented and analysed as markedly
different volunteering traditions of big
countries like United Kingdom, Italy and
Germany – we can get a feeling that
Europe of citizens exists, and that volunteering in sports is a massive thriving
grass roots movement in local communities
in all European countries.
© CAROLINE BOCQUET
Pouvons-nous simplement compter les
supporters et les sympathisants comme des
volontaires ? Quelle est la ligne de démarcation
entre le bénévolat et la citoyenneté active ?
Quelle est la gamme des activités des
bénévoles sportifs ? Quelle est la connexion
avec d’autres secteurs, notamment pour
des groupes cibles spécifiques tels que les
jeunes, les personnes âgées, les personnes
handicapées, les délinquants ?
Chaque question en amène une autre. Quel
est le potentiel du sport dans la cohésion
sociale et l’intégration des diversités ?
Quelles sont les valeurs fondamentales
inhérentes au sport qui nous rassemblent,
nous passionnent, nous enseignent la
coopération et le vivre ensemble selon des
règles communes ? Comment utiliser ce
potentiel pour rassembler un maximum de
citoyens européens et promouvoir la cause
de la citoyenneté active et de l’engagement
de chacun ?
Trying to pin point the characteristics of
sports volunteering on the basis of data is
like playing ball without a ball: facts and
figures on volunteering with potential of
scientifically serious comparison are
scarce, not systematic and for many
countries totally inexistent. Sports, as a
field of activity of the volunteering world,
is normally classified and analysed
together with culture and leisure and
recreation activities, but there is no
consensus among countries on how
voluntary activities are to be classified. The
readers are therefore invited to make the
ball out of rags and play along with the
author attempting a couple of long
launches.
In many EU countries, although greatly
missing from mainstream debates on
volunteering infrastructure and development, Sport is one of the largest fields of
volunteering, comparable to social
services.
Data below show that Sport counts as
specific field also when embedded in the
larger statistical context.
Proportion of not for profit organisations active in sport volunteering out of total
voluntary organisations in countries of different cultural backgrounds
.
COUNTRY
Sweden
France
Denmark
Spain
Poland
Austria
Lithuania
Cyprus
Slovakia
Field 1
Field 2
Culture and recreation
22,8%
Culture and recreation
41,6%
Leisure: culture, sports, recreation, hobby 28,7%
Sport
Sport
Sports and gymnastics
22,9%
59,3%
22,91%
Culture
Sport
13%
Culture
Sport
21,02%
Sport
7,4%
www.sportetcitoyennete.org
Culture and Arts
Leisure, Arts and Culture
36,91%
18%
29,52%
55,9%
RÉFLEXION sur LE SPORT, LE BÉNÉVOLAT et LA CITOYENNETÉ ACTIVE
The inclusive membership based values of
sport are also at the very basis of the processes
that strongly influenced the development
of the associative sector, also in countries at
seemingly far ends of the European social
context. In Slavic Central and East European
countries like the Czech Republic, the surge
of national rebirth at the turn of 19th – 20th
century was largely based on sports organisations; many of these federations survived
multiple dramatic political changes and are
still active today. In Sweden, the turn of the
century struggle for citizens’ rights generated
powerful mass movements that still shape
the identity of the not for profit sector: on
these bases the sports movement grew and
is still the dominating category in volunteering.
Such parallels call for a serious comparative
analysis and place the sports associative
culture at the heart of the role in the participative democracy advocated but still not
fully recognised for the volunteering
sector.
These considerations provide the context
for some hard facts: in many countries,
geographically and culturally heterogeneous,
among different fields of volunteering,
sports organisations involve large – if not by
far the greatest – numbers of volunteers.
Proportion of volunteers active in sport, culture
and recreationamong volunteers in general
COUNTRY
Sweden
France
Denmark
Spain
The Netherlands
Austria
Czech Republic
Belgium
Slovakia
20% (with outdoor, culture and hobbies 52%)
50%
18%
22%
36,1%
31,3% (only sports 15.4%)
40%
69,7%
20%
In countries of recent adhesion to EU, with
more frail tradition of active citizenship and
feeble research on volunteering, data are
more obscure but the first indicators confirm
the trend. In Slovakia, for example, a field
research reports a good 20% of young
volunteers mostly interested in the sports
sector. All in all, the data are striking, but can’t
be taken for granted, as they lack not only a
common statistically relevant basis, but also a
shared, on EU level institutionally accepted
definition of voluntary activity.
Can we simply count supporting members
and sympathisers as volunteers? What is the
demarcation line between volunteering and
active citizenship? What is the range of
activities of volunteering in sports? How
entangled is the connection with other
sectors, notably with specific target groups,
like youth, elderly, people with disabilities,
offenders?
employees and volunteers in 3 to 4. Within
the on going debate on the risks and the
potential of the so called “professionalisation” of the voluntary sector, it would be
worth enquiring about the specificities and
the organisational models of sports organisations.
Another specificity of sports organisations,
as mainly specular to the welfare sector,
emerging from this first comparative
attempt, is the fact that sports and culture
organisations have as main sources of
funding the private, and not the public
sector. This holds true for countries as
diverse as Spain and the Netherlands,
Latvia and Austria. The income of private
nature is composed mainly of membership
fees, donations from families and businesses,
sponsorships and revenues for services.
This
grants to voluntary organisations
active in the sports field economic
independence and solidity,
putting them in good position to
raise high the banner of
autonomy of the voluntary
organisations in the often
difficult
and
controversial
relationship with public authorities.
© CAROLINE BOCQUET
As another starting point it must be noted
that sport is almost generally included in
state acts which define and support the
realms of not for profit engagement, thus
recognising the role of sport for all culture
for the well being of citizens and for social
cohesion. Examples are “education and
development of physical culture” considered
a service of public benefit in Slovakia,
“public benefit status” for organisations for
the “promotion of sport” in Latvia, one
quarter of funds allocated to sports by the
Funds Distribution Act in Finland, sports
organisations included as beneficiaries of
the Danish Act on Popular Education. We
can observe here how strongly the sports
culture is linked to the core concepts of
common
good
and
education.
Questions breed questions, like passing the
ball warming up for the game. What is the
potential of sports for social cohesion and
integration of diversities? What the core
values of getting together on something we
are passionate about teaches us aboutooperation and playing by the same rules? How
can this potential for aggregation of large
numbers of citizens across Europe be used to
further the cause of active civic involvement
for all?
Other data claim comprehensive analyses as
regards the identity and future development
of the volunteering sector. In different
countries emerged that to large numbers of
volunteers in sports organisations corresponds
a comparatively low number of paid staff. In
the Netherlands for example, while in social
services the ratio between volunteers and
paid staff is balanced, in the culture and
recreation areas the number of volunteers is
four times greater. In Spain is double, in the
Czech Republic the ratio between
It is evident that these first
considerations can be developed
further if among claims for 2011
European Year of Volunteering a
serious investment into research
on volunteering finds its place
and if organisations active in
sports develop a clear strategy of
European networking and raise their voice
for a sustainable and adequate infrastructure for volunteering. Because evidence
shows that sports can represent a wild card
in winning the institutional support for
volunteering, as the Greek experience of
the Olympic Games has demonstrated.
Data and issues raised rely on country reports of the
research “Volunteering across Europe. Organisations,
promotion, participation” coordinated by SPES – Centro di
Servizio per il Volontariato del Lazio, Italian Regional
Voluntary Support Centre, CEV member: Spain, France,
United Kingdom, the Netherlands, Poland, Czech Republic,
Italy (Volume I, published 2006); Belgium, Lithuania,
Slovakia (Volume II, published 2008); Hungary, Austria,
Greece, Sweden, Finland, Denmark, Cyprus and others
(Volumes III and IV, in publication 2009); may be requested
to [email protected].
www.sportetcitoyennete.org
www.volontariato.lazio.it