Comment ne pas nous épuiser au travail
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Comment ne pas nous épuiser au travail
COMMENT NE PAS NOUS ÉPUISER AU TRAVAIL? Petit guide pour vivre un travail épanouissant Michel Giroux psychologue 444, boulevard René-Lévesque Ouest, bureau 350 Québec (Québec) G1S 1S3 418 529.5041 www.michelgiroux.net L’épuisement au travail découle d’un stress de longue durée provenant de facteurs personnels et organisationnels. Pour éviter de nous épuiser, nous devons nous maintenir dans une zone de bien-être global et tenir compte des indicateurs de fatigue. De saines habitudes dans sa gestion personnelle et la présence d’un gestionnaire avisé sont des éléments importants dans l’adaptation continue au stress ou pour éviter une dérive dans l’enfer de l’épuisement professionnel. 1. Se réaliser ou s’épuiser au travail : un défi quotidien Pour maintenir le cap sur une vie professionnelle épanouissante, nous devons conserver une vision globale de notre bien-être et ne pas nous surinvestir dans notre vie professionnelle ni nous désengager par rapport aux dimensions importantes de notre existence. Pour prévenir l’épuisement professionnel, nous devons en reconnaître les indicateurs, ne pas les minimiser et, surtout, réagir avant d’atteindre un point de nonretour. A. Équilibrer sa vie afin de maintenir un bien-être global L’épuisement professionnel nous prouve que la perte de la valeur globale de notre vie, au détriment d’un surinvestissement dans le travail, est excessivement néfaste. Pour continuer à suivre la route étroite du bonheur au travail, nous devons conserver un équilibre entre les multiples dimensions de notre vie. DIMENSIONS DU BIEN-ÊTRE1 Bien-être physique Avoir un organisme sain et avoir de l’énergie en prenant des décisions saines concernant l’exercice, l’alimentation, le sommeil et la lutte contre le stress. Bien-être émotionnel Tranquillité d’esprit, confiance et respect de soi qui proviennent du fait d’être au diapason avec 1. Peter STOYKO et Andrew GAUDES, Le juste équilibre, p. 10. Bien-être intellectuel Bien-être social Bien-être spirituel ses propres sentiments. Acuité mentale qui résulte du fait de rester actif, alerte, ouvert, curieux et créatif sur le plan cognitif. Esprit de camaraderie qui provient du fait de cultiver un riche réseau de relations avec les membres de la famille, les amis et les collègues. But, épanouissement et sens qui proviennent du fait de s’insérer dans un tout qui est plus grand que nous. Cette liste devient profitable si nous l’utilisons pour réaliser régulièrement un bilan de vie et nous fixer des objectifs pour garantir notre bien-être. Le bien-être d’un individu et d’une organisation repose sur un équilibre dynamique. La marche est un excellent exemple d’un équilibre dynamique, car elle requiert à la fois flexibilité et stabilité, et qu’elle place l’individu dans un mouvement qui lui demande de vaincre l’inertie. B. Reconnaître l’épuisement professionnel pour le prévenir La meilleure prévention contre l’épuisement au travail consiste à le reconnaître et à s'adapter aux stress ainsi qu’aux débordements. « Le burnout est… une réaction affective au stress permanent dont le noyau central est la diminution graduelle, avec le temps, des ressources énergétiques individuelles, qui comprennent l’expression de l’épuisement émotionnel, de la fatigue physique et de la lassitude cognitive. » Shirom INDICATEURS D’ÉPUISEMENT PROFESSIONNEL2 • Corporels • Cognitifs • Émotionnels • Relationnels • Comportementaux Indicateurs corporels 2. Inspiré de Catherine VASEY, Burn-out : le détecter et le prévenir, p. 116-117. Le corps est un indicateur important de notre bien-être. Dans le processus d’épuisement professionnel, les malaises physiques sont souvent négligés et minimisés. Les indicateurs somatiques les plus courants sont les suivants : une gêne respiratoire, des douleurs thoraciques, une boule dans la gorge, des douleurs musculaires, des troubles gastro-intestinaux, des nausées, des maux de tête, de l’insomnie ou une grande fatigue. Souvent, la personne ne reconnaît pas les liens existants entre les signaux d’alarme somatiques et son stress au travail. Indicateurs cognitifs La diminution des capacités cognitives nous révèle que nos ressources personnelles s’affaiblissent. La perte du sens des priorités, le manque de concentration, les trous de mémoire, l’impression d’une accumulation paralysante des problèmes et la perte de nos capacités d’analyse illustrent l’ampleur du problème dans lequel nous nous enfonçons inéluctablement. Le brouillard de la confusion se lève en nous alors que nous travaillons davantage pour compenser notre baisse d’efficacité. Indicateurs émotionnels Les indicateurs émotionnels se manifestent par la perte d’intérêt à l’égard de notre travail et la démotivation. D’autres indices peuvent être présents : l’irritabilité s’exprime pour un rien; une envie de pleurer souvent inexplicable surgit inopinément; le découragement et la perte d’estime ennuagent de plus en plus le ciel de notre quotidien. Indicateurs relationnels Les indicateurs relationnels s’expriment par le retrait des relations, la perte du sens de l’humour et le sentiment que les responsables ne peuvent rien pour nous, alors que souvent, nous n’avons pas exprimé clairement nos besoins. La perte de contact avec nos émotions nous protège de la déprime, effrite notre empathie et nous conduit à nous traiter comme une machine. Indicateurs comportementaux Les indicateurs comportementaux apparaissent : l’absentéisme s’accroît rapidement ou, par le présentéisme, nous nous terrons dans notre bureau, sans pouvoir ouvrir un dossier et usant d’Internet pour tromper un douloureux ennui. Certains augmentent sensiblement leurs heures de travail pour compenser l’efficacité perdue. Moins ils sont efficaces, plus ils travaillent! Le hamster accélère dans sa roue pour s’en sortir! Le désir de changer d’emploi devient urgent, mais sans que nous puissions envisager de modifier nos habitudes de travail. Les problèmes de consommation d’alcool, de médicaments, de tabac et autres dépendances s’aggravent. La saine frontière entre vie personnelle et vie professionnelle s’effrite, le travail gruge les loisirs, l’activité physique, la vie de couple et les relations familiales. Pour nous prémunir contre l’épuisement au travail, nous devons tenir compte des indicateurs de fatigue et ajuster nos habitudes aux conditions changeantes de notre quotidien. Au travail comme dans notre vie personnelle, il y a des stress stimulants et d’autres qui, à la longue, deviennent néfastes et toxiques. Il est primordial de les distinguer, autant qu’il est important de différencier un champignon comestible d’un toxique! 2. Je suis fatigué à la fin de ma journée Les facteurs personnels d’épuisement au travail Au terme d’une journée, nous ressentons habituellement de la fatigue. Souvent, nous comprenons ce qui draine notre énergie, parfois, non. Les facteurs présentés ci-dessous constituent des sources d’épuisement; nous devons les reconnaître afin d’adapter notre quotidien en conséquence et de ne pas nous épuiser outre mesure. Facteurs d’épuisement professionnel3 Demande Contrôle Récompense Effort DIANE : DEMANDE ET QUANTITÉ DE TRAVAIL Depuis six mois, Diane sent des contraintes de temps au travail, qui entraînent inquiétude, énervement et stress. Plusieurs nuits par semaine, elle fait de l’insomnie. Diane doit rédiger trois volumineux rapports cette semaine, chacun demandant habituellement une semaine de rédaction. Diane est submergée par la quantité de travail à effectuer. En général, elle a suffisamment de temps pour accomplir sa tâche, mais 3. Ce texte est une adaptation de la grille « Stress et satisfaction au travail » de Martin Shain, tirée de Peter STOYKO et Andrew GAUDES, Le juste équilibre, p. 47. elle est maintenant complètement épuisée et ne sait plus où donner de la tête. Pour sortir de ce débordement, Diane a pris quelques heures pour mettre de l’ordre dans ses priorités et rencontrer sa gestionnaire. Diane a négocié une diminution de sa charge de travail et un calendrier plus réaliste. Maintenant, Diane dort mieux, est moins tendue et moins surchargée. Morale de cette histoire : il ne faut jamais essayer de mettre une tasse d’eau dans un dé à coudre! RÉAL : RÉCOMPENSE ET RECONNAISSANCE Réal a perdu sa motivation au travail, les lundis matins deviennent lourds et les journées, interminables. Réal se demande à quoi sert son travail. Pour la troisième fois, sa gestionnaire lui demande de refaire un questionnaire, d’ajouter ce qu’elle a demandé d’enlever précédemment! Réal est démotivé et ne trouve plus aucune satisfaction. Il se dit souvent qu’il ne vaut rien. En général, il estime qu’on reconnaît convenablement son travail. Il sent que son travail est apprécié lorsque sa gestionnaire explique l’importance de la tâche, ce à quoi elle servira et les aspects valorisants de ce qu’il a accompli. Tabletter le travail d’une personne équivaut souvent à faire de même avec son auteur. Il ne faut jamais oublier la personne qui se trouve derrière le travail mené à terme. ÉLISE : EFFORT Élise termine sa journée particulièrement épuisée sans trop savoir pourquoi. En général, Élise considère que la quantité d’effort exigée est raisonnable. En examinant rétrospectivement sa journée, elle s’aperçoit qu’au moment où elle a présenté un rapport important, le climat de l’équipe était désagréable et tendu. Le responsable n’a pas suffisamment précisé le but de la rencontre et une collègue a manifesté beaucoup d’hostilité. La réunion s’est terminée dans le chaos. Pour évaluer notre fatigue, nous devons distinguer le nombre d’heures travaillées de l’effort demandé. Au travail, certaines heures pèsent un pied cube de plumes, d’autres, un pied cube de plomb! Conduire par une journée ensoleillée et conduire dans une tempête n’entraînent pas le même type de fatigue. Au travail, c’est la même chose! CLAUDE : CONTRÔLE, AUTONOMIE ET PARTICIPATION AUX DÉCISIONS Claude ressent de la frustration depuis plusieurs mois et il manifeste de l’hostilité à l’égard de sa nouvelle gestionnaire. Par insécurité et perfectionnisme, celle-ci impose sans consulter sa méthode de gestion. Claude jouissait d’un bon niveau de contrôle et d’autonomie dans la gérance de ses dossiers. Devoir attendre constamment l’aval de sa gestionnaire ralentit sa production et étire inutilement les échéanciers. Claude est conscient de l’importance d’une méthode efficace. Aussi propose-t-il que son équipe se rassemble pendant une demi-journée pour discuter des méthodes de travail. La quantité d’énergie qu’une personne attachée sur une chaise peut dépenser pour se dégager est fascinante! Au travail, lorsque nous n’avons pas la marge de manœuvre légitime, nous sombrons dans la déprime ou dans une perte d’énergie inestimable. Le travail peut être stimulant, mais peut aussi devenir source d’épuisement. Il importe de distinguer les types des dépenses énergétiques, de repérer celles qui sont normales et de traquer celles qui n’ont pas leur place. 3. Une gestion avisée pour une équipe de travail heureuse Les facteurs organisationnels d’épuisement au travail Les facteurs individuels expliqueraient 40 % des causes de l’épuisement professionnel, tandis que les facteurs organisationnels en expliqueraient 60 %. Un responsable d’équipe avisé peut créer une équipe formidable et dynamique (plutôt qu’une équipe épuisée), mais à certaines conditions. « Pour aider les membres de leur personnel à trouver le juste équilibre entre les responsabilités professionnelles et personnelles, [les gestionnaires bien avisés] formulent des attentes réalistes face à la charge de travail que ceux-ci peuvent accomplir dans un délai donné, consacrent du temps à l’encadrement et au mentorat, planifient bien le travail qu’il faut faire, reconnaissent le travail bien fait et demandent aux employés leur avis avant de prendre des décisions4. » A. Définir la fonction de responsable d’équipe Le responsable d’une équipe de travail doit avoir une conception de son rôle suffisamment opérationnelle pour qu’elle puisse se concrétiser dans des engagements précis. Cette définition doit être reconnue par ses coéquipiers afin de constituer un contrat de travail clair, efficace, concret . 4 Peter STOYKO et Andrew GAUDES, Le juste équilibre, p. 14. et fonctionnel. Elle peut s’inspirer d’une conception administrative, de la philosophie organisationnelle et doit indéniablement refléter les couleurs de l’équipe et les compétences particulières du responsable. Cette fonction doit trouver l’équilibre entre l’efficacité au travail (performance) et l’efficacité relationnelle (facteur humain). Le responsable s’engage à prévenir activement l’épuisement professionnel et à réagir promptement par rapport aux conditions changeantes du travail. Il évite la dérive de la négligence (ne pas faire ce qui est légitime d’attendre de lui) ou celle de l’envahissement contrôlant (exercer une surveillance harcelante), ces deux extrêmes étant d’importants facteurs d’épuisement professionnel. B. Consacrer du temps à l’encadrement Le responsable prévoit et précise le temps qu’il veut consacrer à l’encadrement de ses équipiers. Il se réserve du temps « officiel et officieux » pour soutenir son personnel : temps officiel pour effectuer des rencontres individuelles afin de réaliser des bilans périodiques et à des moments stratégiques de l’année et temps « officieux » pour répondre dans le feu de l’action aux besoins de ses coéquipiers. Les rencontres régulières constituent un excellent pare-feu contre l’épuisement : elles évitent la gestion de pompiers qui consiste à intervenir uniquement en situation de crise, alors qu’il est souvent trop tard pour rectifier une situation. C. Formuler des attentes réalistes à l’égard de la charge de travail Une attente réaliste se conçoit en précisant le produit fini anticipé, c’està-dire ce que nous tiendrons entre les mains au terme de la mise en œuvre. Une attente réaliste détermine le moment où le produit sera réalisé et les heures estimées que requiert son exécution. Que voulons obtenir à la fin? Quand le voulons-nous? Quand nous arrêterons-nous pour évaluer les progrès et nous ajuster aux défis de la mise en œuvre? Combien de temps devrons-nous y consacrer? Si nous répondons à ces questions avant d’entreprendre le voyage, nous connaîtrons de manière plus précise la destination, l’heure d’arrivée et la quantité d’essence dont nous avons besoin pour arriver à bon port! D. Reconnaître le travail bien fait Le responsable avisé souligne le travail bien fait par ses équipiers, et ce, pas uniquement au moment de leur retraite ni seulement à la fin de l’année. Il reconnaît au quotidien le travail de qualité, les bons coups, la ténacité, la disponibilité, les habiletés relationnelles, la créativité et le jugement éclairé. Dans cette optique, il entame les rencontres individuelles en misant sur les forces, les progrès réalisés, les difficultés résolues avant d’aborder les difficultés, les échecs et les problèmes. La perte de l’estime est au cœur du problème de l’épuisement professionnel. E. Demander l’avis de ses collègues avant de prendre des décisions Dans une gestion avisée, il importe de consulter ses collègues, en équipe et de façon individuelle, en ce qui a trait à la gestion, aux méthodes de travail, aux sources de débordement, à la qualité de vie, aux relations ainsi qu’aux stress physiques et psychologiques. Cette attitude de collégialité est une condition gagnante pour maintenir une équipe dynamique et s'adapter aux situations particulières. Dans une organisation, la présence active et soutenante d’un responsable avisé compte pour beaucoup dans la qualité de vie au sein d’une équipe et dans son niveau de productivité. Un responsable avisé est un excellent facteur pour diminuer les risques d’épuisement professionnel ainsi que les coûts humains et financiers qui en découlent. Comment ne pas nous épuiser au travail? Nous devons tenir compte des facteurs personnels et organisationnels qui risquent de causer un stress prolongé. Pour prévenir l’épuisement professionnel, il importe d’installer des balises appropriées et de prévoir les outils nécessaires à une prévention efficace. Pour nous maintenir sur le chemin parfois étroit de la qualité de vie au travail, nous devons établir des priorités qui tiennent compte des facteurs de risque. Une gestion de vie équilibrée, la prise de conscience des sources de fatigue et la présence déterminante d’un gestionnaire avisé mettent en place les conditions gagnantes pour prévenir l’épuisement excessif au travail. Bibliographie Livres audio GARNEAU, Jean. Le stress. Comment le gérer sainement, Montréal, Alexandre Stanké, 2004. (Collection Livre-audio; 1 CD). GARNEAU, Jean. L’épuisement professionnel, Montréal, Alexandre Stanké, 2004. (Collection Livre-audio; 1 CD). GARNEAU, Jean. Le burnout. Prévention et solutions, Montréal, Alexandre Stanké, 2004. (Collection Livre-audio; 1 CD). On peut les télécharger sur le site www.coffragants.com. Monographies GIROUX, Michel. Psychologie des gens heureux, Montréal, Quebecor, 2005, 186 p. (En réédition à l’hiver 2010). GIROUX, Michel. Les valeurs religieuses en psychothérapie, Montréal, Quebecor, 2008, 133 p. GRÜN, Anselm. Vie privée. Vie professionnelle. Comment les concilier, Paris, Desclée de Brouwer, 2006, 152 p. JAGGI, Ferdinand. Burnout : guide pratique, traduit par Ana Ricma, Suisse, Médecine et hygiène, 2008, 46 p. TRUCHOT, Didier. Épuisement professionnel et burnout : concepts, modèles, interventions, Paris, Dunod, 2004, 265 p. VASEY, Catherine. Burn-out : le détecter et le prévenir, Genève, Éditions Jouvence, 2007, 127 p. STOYKO, Peter, et Andrew GAUDES. Le juste équilibre. Guide à l’intention du gestionnaire sur le mieux-être en milieu de travail, Ottawa, Centre canadien de gestion, 2002, 49 p. En ligne à l’adresse suivante : www.michelgiroux.net section Bibliothèque virtuelle.