Lymphomes folliculaires

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Lymphomes folliculaires
Vincent Ribrag DU hématologie 2015
Lymphomes folliculaires
Les lymphomes folliculaires (FL pour follicular lymphoma) représentent 20 à 25 % de l’ensemble des
lymphomes. Les FL sont composés de cellules centrofolliculaires du centre germinatif (mutations
hypersomatiques des gènes des IgH). L’origine exacte des cellules est encore un sujet de recherche
(pré germinatives ayant la capacité de migrer dans le centre germinatif et d’être alors amplifiée). Trois
grades selon l’OMS ont été identifiés en fonction du nombre de centroblastes présents, les lymphomes
folliculaires de grade 3b se comportant comme des lymphomes B à grandes cellules et sont
maintenant traités selon les mêmes schémas que les lymphomes B agressifs. Les cellules tumorales
expriment les antigènes associés aux cellules B (CD19, CD20 et CD22) ainsi que les
immunoglobulines de surface. Elles sont CD10+, CD5-, CD23- et CD43-. Une translocation t(14 ;18)
entraînant un réarrangement du gène bcl-2 est retrouvée chez 70 % à 80 % des patients et
s’accompagne d’une expression anormale de ce gène anti-apoptotique.
Une transformation histologique survient chez 60 % à 80 % des patients, à l’occasion d’une rechute ou
progression clinique, parfois dès le diagnostic de lymphome voire dans 100% dans certaines séries
autopsiques. Cette transformation résulte d’anomalies génétiques additionnelles et s’exprime sous la
forme d’un LNH diffus à grandes cellules B associées parfois à des zones lymphomateuses
folliculaires persistantes, des anomalies P53 sont particulièrement fréquentes à ce stade.
Le bilan préthérapeutique des LNH cherche à établir:
- l’extension ganglionnaire
- l'existence d'une atteinte viscérale, certains organes étant explorés systématiquement, d'autres selon
l’existence de points d'appels cliniques
- le retentissement de la maladie sur l'organisme
- certains facteurs de risque associés
Extension:
- examen clinique des aires ganglionnaires, de la rate et du foie
- Scanner thoracique (atteinte médiastinale, pariétale, pulmonaire ou péricardique), l’atteinte
médiastinale est rare dans les lymphomes folliculaires.
- Scanner abdomino-pelvien.
- examen ORL à la recherche d'une atteinte de l'anneau de Waldeyer
-TEP-FDG (encore exploratoire)
- examens systématiques:
.biopsie ostéomédullaire
.étude du LCR en principe réservée aux LNH de haut grade (notamment Burkitt ou lymphoblastique, et
localisations ORL.). Une localisation du SNC n’est retrouvée que dans moins de 3% de FL et doit faire
rechercher une transformation.
A l'issue de ce bilan, la maladie peut être classée en stades selon la classification d'Ann Arbor et selon
l’index pronostic international FLIPI.
Critères de traitement:
- indice d'activité générale (performance status ou PS) OMS
- signes cliniques généraux: fièvre, sueurs, amaigrissement de plus de 10%
- biologie à valeur pronostique liée au volume tumoral: LDH sériques, Beta2- microglobuline sérique
(peu employé en Europe)
- électrophorèse des protéines sériques, recherche d'une Ig monoclonale.
Le stade Ann Arbor : il est courant de distinguer les formes localisées (stades I et II) des formes
disséminées (stades III et IV). La recherche d’un envahissement médullaire, en cas de biopsie
médullaire normale peut être affinée par la recherche en biologie moléculaire d’un réarrangement IGHbcl2 quand le transcrit de fusion est accessible sur la tumeur primitive (congélation ganglionnaire).
La taille de la plus volumineuse masse tumorale (< ou > 7 cm).
Le nombre de localisations extraganglionnaires : la présence de plus d’une localisation
extraganglionnaire est associée à un pronostic plus défavorable.
Les taux sériques des LDH et plus accessoirement de la β-2 microglobuline.
Facteurs pronostics
Vincent Ribrag DU hématologie 2015
Le FLIPI, équivalent de l’IPI des lymphomes agressifs à été publié et est maintenant utilisé en
recherche clinique. Celui-ci repose sur :
Le nombre de sites ganglionnaires atteints
Le taux de LDH sérique (>normale)
L’âge (>60 ans)
Le stade Ann Arbor (>2)
Le taux d’hémoglobine (< 12 gd/dl)
Dans les anciennes études du GELF, d’autres critères sont utilisés dans les publications et sont pour
identifier les patients ayant un besoin immédiat de traitement:
. présence d'un des signes B (amaigrissement ≥ 10 %, fièvre ≥ 38° depuis plus de cinq jours, sueurs
nocturnes abondantes)
. ou mauvais état général (PS sur l’échelle ECOG > 1)
. valeur des LDH supérieure à la normale
. taux élevé de β2 microglobuline (≥ 3 mg/L)
. forte masse tumorale définie par l'un des paramètres suivants :
- masse tumorale ≥ 7 cm,
- présence de plus de trois ganglions de diamètre ≥ 3 cm dans 3 aires ganglionnaires distinctes
- épanchement séreux,
- syndrome compressif,
-splénomégalie symptomatique (diamètre cranio-caudal ≥ 20 cm)
Traitement des LNH folliculaires
Les facteurs pronostiques sont moins bien connus que pour les LNH agressifs, et pourtant ils se
justifient d'autant plus que la gamme thérapeutique va de l'observation simple à un traitement par
immuno-chimiothérapie. L'obtention de la réponse complète n'a en tous cas pas la même signification
que pour les lymphomes de haut grade: son influence sur la survie est discutée.
6.1.1. Maladie localisée : stade I et II
Ces formes sont rares (10-15%). Une irradiation seule à une dose de totale de 30 à 36 Gy reste le
traitement de référence des stades I et des stades II avec une faible masse tumorale (diamètre
maximum < 7 cm sans épanchement ni syndrome compressif). Les stades II de forte masse relèvent
d’une chimiothérapie, d’autant plus qu’il existe des signes d’évolutivité clinique (amaigrissement,
sueurs, fièvre) ou biologique (élévation des LDH).
Dans ce petit sous groupe de lymphomes folliculaires, la radiothérapie permet un contrôle à long terme
chez au moins 50% des patients.
6.1.2. Maladie disséminée : stade III et IV
Il s’agit du cas le plus fréquent. La survie médiane est supérieure à 10-15 ans mais les moyens
thérapeutiques actuels ne permettent pas d’obtenir de guérison. L’évolution est le plus souvent
indolente avec des rechutes itératives. La survenue d’une transformation en lymphome de haut grade
de malignité n’est pas rare (20% à 5 ans) et est de mauvais pronostic. L'observation simple est
justifiée dans les formes de faible masse tumorale, caractérisées par:
- l’absence de tuméfaction ganglionnaire >7 cm, de syndrome compressif ou d’épanchement
pleuro-péricardique et péritonéal.
- de moins de trois aires ganglionnaires envahies par des adénopathies > 3 cm.
- l’absence de signes d’évolutivité clinique ou biologique (Cf supra).
Cette stratégie permet de différer le traitement en médiane pour deux ans sans influence sur la
survie globale sur des études anciennes (80% à 5 ans). Elle s’appuie sur une surveillance trimestrielle
clinique, biologique et iconographique.
En cas de progression ou de forte masse tumorale d’emblée le traitement repose sur la
chimiothérapie. L’association chimiothérapie associée au rituximab est de toute façon maintenant le
standard de traitement au vu des différents essais randomisés montrant tous un bénéfice en terme de
réponse, de sa durée et peut-être sur la survie globale (préférence pour le R-CHOP en France).
L’association chimiothérapique associant une anthracycline est préférée par les groupes Européens.
Le rôle de la maintenance du rituximab (24 mois) est maintenant reconnue essentiellement en
améliorant la survie sans progression. Avec un suivi médian de 36 mois, la survie sans progression est
de 75% chez les patients avec une maintenance alors qu’elle n’est que de 58% sans maintenance
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(P<0,0001).
Compte tenu de leur efficacité dans le traitement des lymphomes agressifs les traitements intensifs
(chimiothérapie haute dose +/- irradiation corporelle totale) suivie d’autogreffe de progéniteurs
hématopoïétiques ont été évalués en première ligne dans les essais thérapeutiques mais n’ont pas
démontré clairement leur intérêt. En rechute, cette procédure doit être envisagée chez les patients <
65 ans, de préférence dès la deuxième phase perceptible au vu de l’étude CUP. En effet, chez les
malades multi-traités les échecs de collection de progéniteurs hématopoïétiques sont fréquents. La
survenue d’une transformation en lymphome de haut grade est une indication à un traitement intensif
pour les patients les plus jeunes avec un lymphome chimiosensible.
Le panel de traitement est donc important actuellement en première rechute et de nombreux
médicaments ont leur AMM dans ce contexte. La Bendamustine sera certainement une option de
traitement dans les années à venir en première ligne en particulier chez le sujet âgé, de même que
l’Ibrutinib devrait trouver sa place dans le traitement de ces lymphomes.
La greffe allogénique doit être envisagé chez les patients les plus jeunes en rechute ou réfractaires. En
effet, la toxicité de ce type de procédure a beaucoup diminuée grâce aux nouveaux
immunosuppresseurs et les conditionnements de greffe atténués. Par ailleurs de nombreuses
observations plaident pour un effet anti tumoral du greffon contre le lymphome qui laisse espérer
d’authentiques guérisons. Néanmoins ce type de traitement est réservé aux patients disposant d’un
frère ou d’une sœur HLA identique, jeunes et sans comorbidités.
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Leucémie lymphoïde chronique (LLC)
Première leucémie dans les pays occidentaux, la LLC est une prolifération monoclonale de petits
lymphocytes matures B (95%) des cas de phénotype CD5+, CD19+, CD23+, CD10- responsable d’une
infiltration sanguine, médullaire et ganglionnaire. Récemment de nouveaux critères pronostics liés à
l’oncogénèse de la maladie ont été identifiés (mutations somatiques des IgH, caryotype (17p-),
expression du CD38 de ZAP70) qui reste encore à valider (critères indépendants ou non)). De
nouvelles molécules particulièrement prometteuses pour le traitement des LLC émergent
actuellement.
Diagnostic et bilan
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Le diagnostic repose sur un hyperlymphocytose (lymphocytes > 4,5 10 /l) exprimant faiblement des IG
de membrane et de phénotype B, CD5+, CD19+, CD23+, CD10-. Le myélogramme de même que la
biopsie médullaire ne sont pas nécessaires au diagnostic (en dehors d’essais cliniques).
En dehors d’essais cliniques, le bilan peut rester succin et comporter :
Hémogramme, frottis sanguin
Immunophénotypage dans le sang, caryotype.
EPP, test de coombs, radio thorax +/- échographie abdominale
Le bilan a pour objectif d’évaluer les critères de traitement ainsi que les complications éventuelles de
la maladie.
Critères de traitement : la classification de Binet (très voisine de celle de RAI)
Stade A
Aires lymphoïdes
< 3 aires
Stade B
> 3 aires
Stade C
indifférent
NFS
Hb > 100 Gr/l,
plaquettes > 100 109/l
Hb > 100 Gr/l,
plaquettes > 100 109/l
Hb < 100 Gr/l et/ou
plaquettes < 100 109/l
Peut être aussi pris en compte pour le choix de traitement le temps de doublement des lymphocytes et
les anomalies cytogénétiques (17p et 11q) essentiellement pour le choix de traitement.
Complications de la maladie
Syndrome de Richter (transformation vers un lymphome agressif) : LDH, AEG, adénopathie
asymétrique. Le diagnostic repose sur la biopsie ganglionnaire. 20 à 30% des cas
Insuffisance médullaire : problème des complications immunologiques de la maladie (AHAI,
thrombopénie AI, érythroblastopénie).
Hypogammaglobulinémie (cocci gram+)
Deuxième cancer.
Diagnostic différentiel
Lymphome du manteau, leucémie à tricholeucocyte, Maladie de Waldenström et leucémie
prolymphocytaire. Lymphome de la zone marginale.
Traitement des LLC
Stade A : abstention thérapeutique (protocole en cours en fonction des nouveaux critères d’évolutivité :
mutations IgH, CD38, ZAP 70, caryotype).
Stade B : monothérapie par alkylant (chloraminophène, cyclophosphamide) peut être encore utilisé
chez les patients avec un âge avancé ou analogue des purines (fludarabine).
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Le traitement de référence actuel est le R-FC (6 cycles). La place de la Bendamustine par rapport à
l’association fludarabine-endoxan reste à clarifier.
Stade C : Le traitement de référence actuel est le R-FC (6 cycles). Doit se poser rapidement
l’introduction de Mab Campath en cas d’anomalie 17p, si la molécule reste disponible en clinique.
L’ibrutinib devrait vite trouver sa place dans cette pathologie.
Le mabcamptah (antiCD52) est utilisé en rechute et dans les maladies avec anomalie 17p mais est
très challengé par les nouvelles thérapies ciblées. Une immunosupression prolongée est associée à
ce traitement et des réactivations CMV doivent être surveillées.
La place des nouvelles molécules (GA-101, idélalisib, bcl2 inhibiteur, ibrutininb) est en cour
d’évaluation mais risque de transformer rapidement les standards de traitement et d’âtre proposé dès
la première ligne de traitement.
L’allogreffe en particulier avec conditionnement réduit est activement évaluée chez les sujets pouvant
en bénéficier avec des facteurs pronostics défavorables.

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