Author`s personal copy - Centre Hospitalier Esquirol de Limoges
Transcription
Author`s personal copy - Centre Hospitalier Esquirol de Limoges
This article appeared in a journal published by Elsevier. The attached copy is furnished to the author for internal non-commercial research and education use, including for instruction at the authors institution and sharing with colleagues. Other uses, including reproduction and distribution, or selling or licensing copies, or posting to personal, institutional or third party websites are prohibited. In most cases authors are permitted to post their version of the article (e.g. in Word or Tex form) to their personal website or institutional repository. Authors requiring further information regarding Elsevier’s archiving and manuscript policies are encouraged to visit: http://www.elsevier.com/copyright Author's personal copy NPG Neurologie - Psychiatrie - Gériatrie (2011) 11, 198—204 PRATIQUE CLINIQUE Vulnérabilité et ressources des aidants informels d’adultes malades ou dépendants : suivi sur 20 mois夽 Vulnerability and skill for informal caregivers of sick or dependant adults: A twenty-months follow-up P. Thomas a,∗, C. Hazif-Thomas b, R. Billon c a Psychiatrie du sujet âgé, SHU Esquirol, rue du Dr-Marcland, 87025 Limoges, France Psychiatrie du sujet âgé, CHU de Brest, centre hospitalier de Bohars, route de Ploudalmézeau, 29820 Bohars, France c Gériatrie aiguë, centre hospitalier Saint-Louis, rue Marius-Lacroix, 17000 La Rochelle, France b Disponible sur Internet le 16 février 2011 MOTS CLÉS Aidant ; Personne âgée ; Cohorte ; Relation ; Fardeau KEYWORDS Caregiver; Elderly; Cohort; Relationship; Burden of care Résumé L’étude présente un suivi de cohorte sur 20 mois de personnes aidantes d’adultes présentant des pathologies chroniques acquises. Cinq cent soixante-quatre aidants ont accepté d’être évalués au cours d’entretiens téléphoniques réalisés à quatre reprises. Leur situation se détériore au plan professionnel et au plan de leur santé, au cours du temps. Cependant, le bilan relationnel est positif : le sens de l’engagement prime sur les difficultés endurées. La première proposition faite par les aidants pour l’avenir porte sur les personnes vulnérables sans famille. © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Summary The study concerns a 20-months follow-up of caregivers of adult persons with chronic and acquired pathologies. Five hundred and sixty-four caregivers agreed to have four times a phone assessment during the period of the survey. Their professional and health situation progressively worsens. Nevertheless, the relationship balance is positive. The meaning of their commitment compensates for what they have borne. Caregivers’ first proposal for future is turned to frail adults without a family. © 2011 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. 夽 Travail effectué sous l’égide de Novartis Fondation d’Entreprise. Groupe de travail : E. Périgois (Institut BVA), S. Renaut (CNAV, Paris), J. Ankri (hôpital Sainte-Périne, AP—HP, Paris), T. Calvat (Fondation Novartis), Gaël Sliman (Institut BVA). ∗ Auteur correspondant. Adresses e-mail : [email protected] (P. Thomas), [email protected] (C. Hazif-Thomas), [email protected] (R. Billon). 1627-4830/$ — see front matter © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.npg.2011.01.005 Author's personal copy Vulnérabilité et ressources des aidants informels Introduction Les aidants de personnes adultes vulnérables sont nombreux et fortement sollicités sur de nombreux plans, non seulement affectif, administratif, juridique, mais aussi financier, psychologique et fonctionnel en raison de leur engagement. L’étude présentée concerne un suivi de près de deux ans d’une cohorte d’aidants sur le territoire français métropolitain. Nous présentons leurs caractéristiques sociodémographiques et les traits des personnes aidées. L’occasion nous est donnée ici de préciser leurs difficultés sociales, professionnelles et relationnelles, mais aussi leurs satisfactions et leurs attentes. Méthodes Une revue exhaustive des méthodes utilisées a été publiée préalablement [1—3]. L’étude, réalisée sous l’égide de Novartis Fondation d’Entreprise, a porté sur un échantillon national de 28 205 personnes de plus de 15 ans, globalement représentatif de la société française, recruté par téléphone (Institut BVA). Parmi ces personnes, ont été repérés 1986 aidants d’adultes présentant une pathologie acquise. Cinq cent soixante-quatre d’entre eux ont accepté de participer au suivi durant une période de 20 mois. Ils ont été ainsi contactés à quatre reprises (dénommées ici « vagues ») : novembre 2008, juillet 2009, novembre 2009 et juillet 2010. Nous rappelons la définition choisie, pour l’aidant informel consulté : • personne apportant régulièrement et bénévolement une aide à un proche malade ou dépendant ; • nécessité de voir le proche malade ou dépendant au moins tous les six mois ; • obligation de s’occuper du proche malade ou dépendant au moins quelques jours par mois ou plusieurs semaines d’affilée dans l’année ; • nécessité d’expliciter son lien de parenté avec le proche malade ou dépendant ; • nécessité que la personne assistée soit atteinte d’un problème de santé qui ne soit pas lié à un accident ou à un handicap de naissance. Les tests statistiques ont été réalisés avec le logiciel Systat 11. Résultats Caractéristiques sociales de l’aidant Le Tableau 1 présente les liens de parenté unissant l’aidant et le malade évalué lors de la vague 1. L’aidé est principalement un ascendant de l’aidant. Les parents par alliance représentent 10 % des aidés, autant que les grands-parents naturels. Ce chiffre est relativement important et témoigne donc d’une stabilité familiale, malgré les recompositions familiales actuelles. Les caractéristiques sociales et professionnelles de l’aidant sont présentées dans le Tableau 2. Elles ne diffèrent que peu des caractéristiques générales de la population française. Quarante-six pour cent des aidants exercent une 199 Tableau 1 Lien de parenté de l’aidant avec la personne aidée (vague 1). Votre père/Votre mère Une personne en dehors de votre famille directe Votre grand-père/Votre grand-mère Votre beau-père/Votre belle-mère Votre compagnon/Votre conjoint Un de vos enfants Votre frère/Votre sœur 39 % 18 % 10 % 10 % 7% 3% 3% activité professionnelle, et 51 % en ont eu une par le passé. Près d’un aidant sur quatre (22 %) vit au même domicile que son proche malade ou dépendant et 23 % des proches vivent déjà en institution lors de la vague 1. Les personnes aidées comportaient 394 femmes âgées de 78,8 ± 13,5 ans et de 160 hommes âgés de 69,6 ± 21,3 ans (différence significative : t = 5,67). La moitié des malades ou personnes dépendantes vit seule, alors que les autres vivent soit en couple (23 %), soit avec une autre personne (23 %). Le Tableau 3 présente les principales pathologies prises en charge. La vieillesse ne renvoie pas à une pathologie particulière, mais elle est la cause la plus fréquemment citée Tableau 2 Caractéristiques sociales et professionnelles de l’aidant (vague 1). Profession de l’aidant Agriculteur Cadre supérieur Profession intermédiaire Employé Ouvrier Inactif 3% 24 % 22 % 31 % 9% 11 % Statut de l’aidant Salarié du secteur public Salarié du secteur privé Chômeur À son compte Inactif 21 % 25 % 4% 3% 47 % Niveau de diplôme de l’aidant Diplôme inférieur au Bac Diplôme équivalent au Bac ou supérieur 41 % 59 % Revenus de l’aidant Moins de 1500 euros De 1500 à 2499 euros De 2500 à 3499 euros 3500 euros et plus 21 % 33 % 26 % 20 % Habitat de l’aidant Commune rurale Moins de 20 000 habitants De 20 000 à 100 000 habitants Plus de 100 000 habitants Agglomération parisienne 26 % 18 % 16 % 29 % 11 % Situation matrimoniale de l’aidant Vit seul Ne vit pas seul 31 % 69 % Author's personal copy 200 P. Thomas et al. Tableau 3 Problèmes de santé prises en charge (Vague 1). Total supérieur à 100 % car plusieurs réponses possibles. Problèmes de santé Vieillesse Maladie d’Alzheimer Dégénérescence maculaire liée à l’âge Insuffisance cardiaque Séquelles d’accident vasculaire cérébral Hypertension artérielle et ses conséquences Cancer Diabète et problème métabolique Dépression Ostéoporose Asthme et insuffisance respiratoire Maladie de Parkinson Insuffisance rénale Pathologie musculaire ou articulaire Neuropsychiatrie, épilepsie difficultés pour se soigner lui-même. La proportion d’aidants devant déplacer un soin passe progressivement de 17 % en vague 1 à 22 % lors de la vague 4. Le bilan est négatif pour les finances, la forme physique et les loisirs. % 24 17 15 14 14 13 12 10 9 8 6 4 3 3 2 par les aidants pour expliquer la situation de leur malade pris en charge. La maladie d’Alzheimer et la dégénérescence maculaire liée à l’âge constituent les deux principales pathologies citées par les aidants. Le total des résultats excède 100 %, car à cette question, plusieurs réponses étaient possibles. Conséquences personnelles sur l’aidant La Fig. 1 présente la nature de l’aide apportée lors des vagues 1 et 4. Le nombre d’aides apportées est supérieur à quatre en moyenne. Les résultats des vagues intermédiaires ne sont pas présentés car les variations sont faibles et progressives. L’aide financière et l’aide pour les soins s’accentuent de façon significative au cours du temps. La Fig. 2 montre la nature des recours à un tiers au cours de cette même période. Vingt-deux pour cent des aidants n’ont eu aucune aide durant leur parcours de soins. La famille est soit un peu moins présente, soit un peu moins sollicitée en vague 4, mais de façon significative. Huit pour cent des aidants disent ne pas avoir eu de difficultés. Les difficultés récurrentes rencontrées par l’aidant lors de son parcours de soins, donc lors de la vague 4, sont présentées sur la Fig. 3. Le manque de temps est la première difficulté, suivie par le stress, la solitude ou l’absence de certains membres de la famille au chevet du malade, les insuffisances de formation et, enfin, le manque de répit. La Fig. 4 présente les conséquences positives ou négatives de l’aide sur la vie quotidienne de l’aidant évaluées lors de la vague 4. Près de 23 % des aidants signalent n’avoir eu aucune répercussion de leur aide. Une proportion supérieure (30 %) signale avoir eu au moins cinq répercussions négatives. En moyenne, les aidants citent trois répercussions négatives. La vie relationnelle est loin de s’aggraver au bout de ces 20 mois, voire sort grandie de cette épreuve. Ainsi, 68 % des personnes trouvent des conséquences relationnelles favorables à leur engagement. Le bilan est plus mitigé en ce qui concerne les conséquences sur la santé, le moral, la vie intime et sexuelle. L’aidant a de plus en plus de Conséquences sur la vie professionnelle L’aide génère des difficultés quant à la vie professionnelle. Nous avons vu que près d’un aidant sur deux est encore en activité professionnelle. Si l’on compare la situation des aidants professionnellement actifs aux inactifs, 63 % des actifs manquent de temps pour combiner travail, aide et famille (contre 32 % pour les inactifs), 60 % sont stressés (contre 34 %), 45 % se plaignent de solitude (contre 38 %), 44 % ont une mauvaise forme physique (contre 29 %). En revanche, seulement 9,5 % des actifs n’ont personne pour les aider, contre 16 % pour les inactifs. Pour ce qui est des revenus mensuels, 26 % des inactifs disent avoir moins de 150 D par personne contre 6 % pour les actifs. Tous ces résultats sont statistiquement significatifs. Évalués sur la durée, la vie professionnelle, l’accès aux loisirs et la situation financière de l’aidant se dégradent progressivement (Fig. 5). La Fig. 6 montre que les aidants doivent gérer leur temps de travail différemment du fait de leur engagement auprès d’un proche malade ou dépendant : aussi 32 % ont-ils dû sacrifier leur loisir. Vingt-six pour cent d’entre eux ont dû s’absenter au cours des 12 derniers mois en dehors des congés payés, du fait de son rôle d’aidant (un tiers au delà de dix jours). Trois pour cent des aidants ont dû arrêter leur travail du fait de la dépendance du proche, et 5 % réduire leurs capacités d’activité professionnelle. Près d’un aidant sur deux a eu recours à un aménagement au cours de sa vie professionnelle. Cependant, après près de deux ans de soins, 90 % arrivent encore à concilier vie professionnelle et vie familiale, en prenant sur leur loisir. L’opinion des aidants sur l’aide aux aidants est ici contrastée. Globalement, une grande majorité des aidants a pu concilier vie professionnelle et vie familiale malgré l’aide apportée (Fig. 7). Attentes des aidants à l’aulne de leur expérience et de leurs pratiques L’étude s’est enquise de l’opinion des aidants sur les aides reçues lors de leur parcours. Les actions menées pour aider les aidants dans leur vie professionnelle par les associations sont bien perçues dans 59 % des cas ; quant aux actions des pouvoirs publics, leur perception est plutôt négative (64 %). Enfin, la Fig. 8 présente les attentes de l’aidant évaluées lors de la vague 4. Leurs attentes principales ne portent pas sur eux-mêmes mais sur les plus démunis : les patients qui n’ont pas d’entourage. Viennent ensuite des attentes importantes sur la santé de l’aidant, la formation, notamment dans le soin technique et relationnel, les relations entre les aidants et les professionnels de santé, la nécessité d’améliorer l’accueil des aidants dans les établissements de santé. Discussion À côté de la définition de l’aidant donnée de façon formelle dans la méthodologie utilisée dans cette étude, Author's personal copy Vulnérabilité et ressources des aidants informels Figure 1. Types d’aide apportée (vague 1 et vague 4). Total supérieur à 100 % car plusieurs réponses possibles. Figure 2. Nature des personnes aidantes (vague 1 et vague 4). Total supérieur à 100 % car plusieurs réponses possibles. Figure 3. Les difficultés récurrentes de l’aide sur l’aidant (bilan en vague 4). 201 Author's personal copy 202 P. Thomas et al. Figure 4. Conséquences sur la vie quotidienne de l’aidant, évaluées lors de la vague 4. Figure 5. Développement des conséquences négatives de l’aide sur la vie quotidienne de l’aidant lors des différentes vagues. Figure 6. Nécessité des aménagements de la vie professionnelle (bilan en vague 4). En vert : avantages. En orange : neutralité. En rouge : inconvénients. Total supérieur à 100 % car plusieurs réponses possibles. Author's personal copy Vulnérabilité et ressources des aidants informels Figure 7. Conciliation entre vie de famille et activité professionnelle (bilan en vague 4). il faut aussi positionner les aidants dans leur dimension humaine. L’aidant est un intervenant non professionnel qui accompagne une personne de son entourage qui, en raison d’une maladie et/ou d’une déficience physique, mentale ou psychologique, requiert une disponibilité permanente et souvent aussi une assistance personnalisée pour les actes de la vie quotidienne. « Si le système de santé était une plante, les aidants naturels en seraient les racines. Fragiles, vitales et invisibles », écrit ainsi Silver Donald Cameron [4]. L’aide de proximité, soins informels, mais aussi volontiers invisibles, implique pourtant directement entre 3,3 et 3,7 millions de personnes en France métropolitaine. Avec les proches, frères, sœurs, enfants et petits-enfants, elle concerne de près ou de loin environ dix millions de personnes. L’aide est avant tout apportée à un membre proche de la famille. Elle concerne principalement les ascendants. La maladie d’Alzheimer et les difficultés liées à l’âge constituent les principales problématiques justifiant 203 l’engagement de l’aide. Les aidants sont majoritairement féminins (60 %), même si la masculinisation est engagée, notamment auprès d’aidant âgés, et des aidants jeunes apparaissent [3,5,6]. Les aidants sont plus âgés que le reste de la population [3]. Le manque de temps, le stress, la solitude dans le quotidien et le manque de formation constituent les principales pierres d’achoppement du parcours de soin de l’aidant. Il est autant aidé par sa famille que par des professionnels de santé, mais on peut se demander si la famille ne vient pas ici au secours des aidants dans les zones géographiques où l’aide aux aidants n’est pas disponible [7]. Quelques aidants sont sans aucune aide. Le refus d’intrusion dans un domaine « sacralisé » et intime peut en être la cause. Après un parcours de près de deux ans, les conséquences sur le quotidien de l’aidé sont contrastées. Le bilan relationnel est favorable, mais les finances, la forme physique et les loisirs sont largement déficitaires. L’accès aux soins des aidants pour eux-mêmes devient plus difficile avec le temps [8]. La vie professionnelle va elle-même être concernée, nécessitant un réaménagement du temps pour concilier vie familiale et travail, aux dépens des loisirs [9]. Les attentes des aidants sont multiples dans tous les champs de leur quotidien. Elles sont aussi altruistes, la première préoccupation portant sur ceux qui ont besoin d’aide et qui n’ont pas de famille. Les aidants ont besoin de reconnaissance, même si cette attente n’est pas la première. Le mot « aidant » apparaît aujourd’hui comme un jargon de professionnels : en effet, les familles se reconnaissent peu dans ce terme et lui préfèrent parfois celui d’« accompagnant », qui restreint de façon exagérée leur engagement à la seule dimension de présence. Le soin, le soutien, l’aide au quotidien, l’aide financière s’ajoutent, voire prennent rapidement le pas sur cette seule dimension [10]. Le besoin de reconnaissance des aidants ne tient pas à des raisons « narcissiques » de se voir reconnus dans un rôle donné. Les représentations sociales véhiculées par les divers concepts les désignant rendent compte du peu d’intérêt Figure 8. Attentes des aidants pour l’avenir. Évaluation lors de la vague 4. En vert : attentes principales. En rouge : attentes considérées comme secondaires. Total supérieur à 100 % car plusieurs réponses possibles. Author's personal copy 204 qu’ils présentent aux yeux des décideurs politiques, même si une « journée des aidants », par exemple, a été organisée en 2010 par le gouvernement. L’aidant est plus un partenaire invisible du système de santé qu’un acteur reconnu socialement. Il est quelque peu sacrifié par l’homéostasie familiale. On s’occupe des parents, comme les parents se sont occupés de leurs parents, sans trop regarder la réalité et l’actualité de ces affirmations. La qualité de la relation dans la famille impose un modèle particulier de prise en charge, et des comportements ajustés à la personnalité d’autrui. « L’engagement du bénévole résulte d’un choix libre et s’exerce généralement auprès d’inconnus, alors que l’engagement du proche aidant résulte d’une situation dont il n’est pas responsable, assumée mais non choisie, et se situe dans la prolongation d’un lien affectif, d’ordre familial surtout, déjà existant » [11]. Cette invisibilité persistante tient aussi à une pudeur mal placée des familles quant à leur besoin d’être aidées dans leur aide. La mise en œuvre de l’aide aux aidants se heurte souvent à une opposition des aidants. Reconnaître les aidants familiaux impliquerait, en premier lieu, de considérer leur utilité sociale, leur valeur en tant qu’acteurs de santé impliqués dans la préservation du lien social. Toujours est-il que cet acteur de santé, malgré son poids économique et social, n’est pas d’emblée repérable au cœur de l’acte médical [12,13]. Le poids économique supporté par les familles est ici très élevé car on estime que moins de 40 % des frais sont pris en charge par les caisses d’assurance maladie [14—16]. Ajoutons à cela que la situation financière des plus de 65 ans se dégrade actuellement. Le journal Le Monde du 25 novembre 2010, par la voix de Jean-Claude Mailly, rappelait que les Français sont inégaux face à l’envolée des frais de santé, et que les personnes âgées sont actuellement de plus en plus sollicitées. Vingt-cinq pour cent des plus forts consommateurs de soins consacrent 18,25 % de leurs revenus pour leur santé à 65 ans, contre 10,9 % à 40 ans, et 7,2 % à 25 ans. Espérons que la mise en place du plan Alzheimer permettra effectivement le développement d’une aide aux aidants. Conclusion L’aidant, en France métropolitaine, connaît sur la durée de sa prise en charge des difficultés professionnelles, sociales et financières. Son parcours de soins est, en revanche, marqué d’une progression de la qualité relationnelle avec l’aidé, qui consolide le sens de son engagement. Quand cette progression n’est pas notée pour le personnel soignant ou pour la famille, peut être posée la question d’un risque de « mal traitance » (ou de maltraitance), aggravée par l’isolement, le manque de soutien et l’épuisement. La « bien traitance » ne passe pas seulement par les bonnes paroles et les propositions d’actions de formation, mais aussi par la mise en œuvre d’une politique coordonnée d’aide aux aidants, seul moyen de réduire les inégalités entre les situations rencontrées. P. Thomas et al. Conflit d’intérêt Soutien de cette étude par Novartis Pharma Fondation d’entreprise. Références [1] Sliman G. Les aidants face aux soignants : un partenariat à renforcer ? Reciproques 2009;2:29—40. [2] Sliman G. Qui sont les aidants ? Principaux enseignements de la phase de constitution du premier panel national des aidants familiaux. Reciproques 2009;1(1):27—35. [3] Thomas P, Billon R, Renaut S, et al. Les difficultés de gestion des aidants informels d’adultes handicapés vivant sur le territoire métropolitain en 2009. Reciproques 2009;2:41—54. [4] Olivin JJ. Développer l’accueil temporaire pour soutenir les aidants familiaux, 2008. www.silverlife-institute. com/./relayer-les-aidants-naturels-dunod 1203670310.pdf. [5] O’Rourke N, Kupferschmidt AL, Claxton A, et al. Psychological resilience predicts depressive symptoms among spouses of persons with Alzheimer disease over time. Aging Ment Health 2010;14(8):984—93. [6] Thomas P, Clement JP, Hazif-Thomas C, et al. Family Alzheimer’s disease and negative symptoms. Int J Geriatr Psychiatry 2001;16(2):192—202. [7] Innes A, Morgan D, Kostineuk J. Dementia care in rural and remote settings: a systematic review of informal/family caregiving. Maturitas 2011;68(1):34—46. [8] Thomas P, Ingrand P, Lalloue F, et al. Reasons of informal caregivers for institutionalizing dementia patients previously living at home: the Pixel study. Int J Geriatr Psychiatry 2004;19(2):127—35. [9] Eldh AC, Ekman I, Ehnfors M. A comparison of the concept of patient participation and patients’ descriptions as related to healthcare definitions. Int J Nurs Terminol Classif 2010;21(1):21—32. [10] Firth P. Patients and their families. Recent Results. Cancer Res 2006;168:61—71. [11] Ringuet JN. Protéger le proche aidant : une question d’éthique et de politique. Conférence présentée au Colloque de Palli-aide 2006; www.pages.infinit.net/jnr/Textes pers/Conference%20Palli-aide.pdf. [12] Wasow M. Support groups for family caregivers of patients with Alzheimer’s disease. Soc Work 1986;31(2):93—7. [13] Shua-Haim JR, Haim T, Shi Y, et al. Depression among Alzheimer’s caregivers: identifying risk factors. Am J Alzheimers Dis Other Demen 2001;16(6):353—9. [14] Harrow BS, Mahoney DF, Mendelsohn AB, et al. Variation in cost of informal caregiving and formal-service use for people with Alzheimer’s disease. Am J Alzheimers Dis Other Demen 2004;19(5):299—308. [15] Zhu CW, Leibman C, McLaughlin T, et al. Patient dependence and longitudinal changes in costs of care in Alzheimer’s disease. Dement Geriatr Cogn Disord 2008;26(5):416—23. [16] Meeuwsen EJ, German P, Melis RJ, et al. Cost-effectiveness of post-diagnosis treatment in dementia coordinated by Multidisciplinary Memory Clinics in comparison to treatment coordinated by general practitioners: an example of a pragmatic trial. J Nutr Health Aging 2009;13(3):242—8.