2015_04_09_10_commentaire vf - Orchestre Philharmonique de
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2015_04_09_10_commentaire vf - Orchestre Philharmonique de
Jeudi 9 avril 2015 20h Vendredi 10 avril 2015 20h Strasbourg, PMC Salle Érasme Rossen Milanov direction Sébastien Koebel clarinette Ludwig van Beethoven (1770-1827) Coriolan, ouverture op. 6 Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) Concerto pour clarinette et orchestre en la majeur K. 622 Allegro Adagio Rondo Allegro 28’ 29’ ► Claude Debussy (1862-1918) Images pour orchestre Gigues Iberia Par les rues et par les chemins Les parfums de la nuit Le matin d’un jour de fête Rondes de printemps 38’ 1 Ludwig van Beethoven Coriolan, ouverture op. 62 Peu après avoir noué des liens d’amitié avec le dramaturge Heinrich Joseph von Collin (1772-1811), Beethoven eut l’idée, en 1807, de composer une ouverture en relation avec sa tragédie intitulée Coriolan. Deux ans auparavant, celle-ci avait disparu de l’affiche, car elle était concurrencée par celle de Shakespeare. Fin connaisseur de Plutarque et admirateur du poète anglais, Beethoven « connaissait la double dimension de Coriolan, à la fois homme illustre appartenant à l’histoire et héros tragique créé par Shakespeare à partir de la biographie de Plutarque ». Bien des aspects du caractère de Beethoven le rapprochent du général romain : l’énergie, le sens des valeurs morales sur lesquelles il est impossible de transiger, la grandeur d’âme, la probité et la tendresse. Si l’idée première était de composer un oratorio ou un opéra, c’est finalement celle d’une ouverture indépendante de la pièce qui s’impose et Beethoven l’imagine d’un seul tenant, sans reprise de l’exposition pour ne pas rompre l’élan dramatique, sans changement de tempo. Dans la veine beethovénienne d'ut mineur, l'ouverture dépeint le conflit entre l'orgueilleux défi du général romain, révolté contre sa propre nation, et les adjurations passionnées de sa mère Volumnia pour se terminer par la capitulation de Coriolan et sa mort. Wolfgang Amadeus Mozart Concerto pour clarinette et orchestre en la majeur K. 622 Si, au cours de la première moitié du XVIIIe siècle, la clarinette s’immisce dans l’orchestre de Vivaldi ou de Rameau, ce n’est que dans la deuxième période qu’elle va faire son entrée définitive. Grâce à l’évolution de la facture instrumentale, elle va acquérir ses lettres de noblesse et intéresser davantage les compositeurs, dont Mozart en particulier, qui aura la révélation de toutes ses possibilités sonores en l’entendant dans l’orchestre de Mannheim. À l’époque, cet orchestre est le plus bel ensemble musical européen. Par ailleurs, un interprète hors pair, Anton Stadler, frère de loge, incitera le compositeur à confier à l’instrument une partie soliste dans une œuvre de musique de chambre (Trio des Quilles K. 498, Quintette en la majeur K. 581) et dans un concerto. Par une lettre de Wolfgang à son épouse Constance datée du 7 octobre 1791, nous apprenons que Mozart achève l’orchestration du Rondo du Concerto pour clarinette en la majeur « tout en fumant une excellente pipe ». Deux ans plus tôt, il avait ébauché un Concerto en sol pour cor de basset dont il reprend le début. Cette ébauche est exactement contemporaine du Quintette pour clarinette et, une fois de plus, il nous faut signaler les multiples similitudes des deux œuvres : même destinataire, Anton Stadler, même tonalité, même instrument concertant, même chant de fraternité et mêmes allusions maçonniques. « La même fraternelle tendresse chante dans le Quintette et dans le Concerto ; mais elle se fait plus puissante, plus communicative dans le second, et en même temps elle s’y exprime de façon plus dramatique. » Ultime concerto, composé en même temps que le Requiem, l’œuvre sublime la forme concertante et la virtuosité du soliste – réelle – en symbiose et en fusion avec 2 l’orchestre se met au service de l’expression de la beauté intérieure et d’une pensée humaine intense et philosophique. Deux thèmes bien contrastés forment l’ossature de l’Allegro initial et la clarinette omniprésente se joint au tutti orchestral dès la première mesure. Tout au long du mouvement, « un conflit tragique s’affirme ; c’est cette même lutte entre la lumière et la nuit qui forme le fond de La Flûte enchantée » (Jean et Brigitte Massin). Citons à nouveau les deux auteurs qui estiment avec raison que « l’Adagio reprend et creuse le lit du Larghetto du Quintette ». On admire la simplicité si proche de l’Ave verum corpus que Mozart compose en juin 1791. Mais plus encore, c’est le chant déployé avec une infinie tendresse par la clarinette, puis par l’orchestre, qui émeut l’âme humaine. Le Rondo est à la recherche de la lumière et de la sérénité et il y parvient malgré quelques ombres passagères. Claude Debussy Images pour orchestre À l'exception du ballet Jeux, les Images pour orchestre sont la dernière composition symphonique que Debussy a pu mener à bien. Elles succèdent aux deux cahiers homonymes pour piano et furent esquissées pour deux pianos dès 1906. À l'origine, cette première esquisse comportait une Valse, qui fut remplacée par Rondes de printemps. Gigues que Debussy intitula tout d’abord Gigues tristes fut terminée le 10 octobre 1912. Iberia, qui constitue un triptyque à l'intérieur du triptyque, fut terminée le 25 décembre 1908 et Rondes de printemps, le 10 mai 1909. Si Iberia et Rondes de printemps furent créées respectivement le 20 février et le 2 mars 1910, le triptyque complet le fut sous la direction du compositeur le 26 janvier 1913. Il est indéniable que le langage de Debussy connaît une nouvelle étape dans son évolution et l'on peut comprendre que ces trois œuvres furent fraîchement accueillies par le public et par les critiques. Ici et là, on parla « de déclin, de stérilité, d'intellectualisme, d'exaspération de procédés ». En 1908, Debussy s'expliqua : « J'ai essayé de faire autre chose - en quelque sorte des réalités - ce que les imbéciles appellent impressionnisme, terme aussi mal employé que possible, surtout par les critiques qui n'hésitent pas à en affubler Turner, le plus beau créateur de mystère qui soit en art. » Dans sa pertinente analyse, le musicologue Harry Halbreich estime que, dans cette œuvre, Debussy franchit « une nouvelle étape vers des harmonies plus ouvertement dissonantes, un orchestre à l'éclat plus dur et plus dépouillé, une joie des timbres purs dans un souci croissant et très neuf de la fusion des paramètres sonores (avec notamment l'émancipation mélodique de la percussion, qui a définitivement dépassé son rôle de simple batterie), et enfin un nouveau pas essentiel vers la croissance organique du matériau et la biologie sonore déjà définies ». Debussy évoque trois pays différents. La France et l'Écosse pour Gigues, l'Espagne pour Iberia et de nouveau la France pour Rondes de printemps. C'est une Écosse mélancolique que dépeint Debussy dans Gigues ; une mélancolie renforcée par le hautbois d'amour chantant une authentique mélodie écossaise. André Caplet, ami du compositeur, à qui l'on doit la mise au net de cette page, parle d'une « âme endolorie exhalant sa plainte traînante et indolente, âme meurtrie dont la pudeur dissimule bien 3 vite les sanglots sous le masque et la gesticulation anguleuse d'une marionnette grotesque ». Iberia est divisée en trois parties (Par les rues et par les chemins, Les Parfums de la nuit, Le Matin d'un jour de fête). Debussy entraîne l'auditeur dans une Espagne rêvée au folklore imaginaire - au sens où l'entendait Bartok. Pour cette évocation, il recourt à des effets sonores caractéristiques (emploi des castagnettes, du tambour de basque, imitation du jeu de la guitare ou des orchestres populaires) et utilise des formules rythmiques (sévillane dans le premier mouvement, Par les rues et par les chemins ; habanera dans Les Parfums de la nuit ; marche dans Le Matin d'un jour de fête). Dans Rondes de printemps, Debussy reprend avec insistance la chanson française Nous n’irons plus au bois. Cependant, la partition porte en épigraphe une chanson florentine de la Renaissance : « Vive le mai, bienvenu soit le mai, avec son gonfalon sauvage. » Debussy précisa que « la musique de ce morceau a ceci de particulier qu'elle est immatérielle, et qu’on ne peut, par conséquent, la manier comme une robuste symphonie, qui marche sur ses quatre pieds (quelquefois trois, mais ça marche tout de même) ». On admirera le chatoiement et le raffinement de l’orchestre qui renonce aux cuivres, à l’exception de quatre cors. 4 Orientations bibliographiques Le lecteur pourra satisfaire sa curiosité en consultant les ouvrages suivants : Guide de la musique de Beethoven, Elisabeth Brisson, Fayard Mozart, Jean et Brigitte Massin, Fayard Dictionnaire Mozart, sous la direction de H.C. Robbins Landon, JC Lattès Debussy, Edward Lockspeiser, Harry Habreich, Fayard Orientations discographiques Ludwig VAN BEETHOVEN Coriolan, ouverture op. 62 • Orchestre philharmonique de Vienne, Claudio ABBADO direction [Deutsche Grammophon] • Orchestre philharmonique de Berlin, Herbert VON KARAJAN direction [Deutsche Grammophon] Wolfgang Amadeus MOZART Concerto pour clarinette et orchestre en la majeur K. 622 • Academy of St Martin in the Fields, Jack Brymer clarinette, Sir Neville MARRINER direction [Philips] • Royal Philharmonic Orchestra, Jack BRYMER clarinette, Sir Thomas BEECHAM direction [EMI] • Orchestre philharmonique de Berlin, Sabine Meyer clarinette, Claudio Abbado direction [EMI] • English Chamber Orchestra, Paul Meyer clarinette, David Zinman direction [Denon] Claude DEBUSSY Images pour orchestre • Orchestre symphonique de Boston, Charles MUNCH direction [RCA] • Orchestre de Cleveland, Pierre BOULEZ direction [Deutsche Grammophon] • Orchestre de l’Académie nationale Sainte Cécile de Rome, Leonard BERNSTEIN [Deutsche Grammophon] • Orchestre symphonique de Londres, Pierre MONTEUX direction [Philips] 5