Le Pape et la Planète
Transcription
Le Pape et la Planète
Le Pape et la Planète Un mot d’introduction On trouvera ci-dessous le texte publié en août 2015 par Bill McKibben dans la très prestigieuse New York Review of Books sur l’Encyclique « Laudato Si’ » du Pape François. Ce texte, que j’ai longuement commenté dans mes cours de mai 2016 à l’IKW, montre bien la force de l’encyclique et sa portée en quelque sorte planétaire. Je tiens à remercier vivement Roger Simon (qui a assisté en mai à mes cours) de m’avoir spontanément proposé d’en faire bénévolement la traduction, qu’on pourra lire en parallèle avec l’original pour en constater toute la fiabilité. Il y a ajouté onze précieuses notes qui aident beaucoup à la compréhension, auxquelles je joins un paragraphe très approprié d’une lettre qu’il m’a adressée le 10 juin. Ce paragraphe constitue la note xii. Jacques VALLÉE 17 juillet 2016 The Pope and the Planet Le Pape et la Planète Bill McKibben (The New York Review of Books, AUGUST 13, 2015 ISSUE) On a sprawling, multicultural, fractious planet, no person can be heard by everyone. But Pope Francis comes closer than anyone else. He heads the world’s largest religious denomination and so has 1.2 billion people in his flock, but even (maybe especially) outside the precincts of Catholicism his talent for the telling gesture has earned him the respect and affection of huge numbers of people. From his seat in Rome he addresses the developed world, much of which descended from the Christendom he represents; but from his Argentine roots he speaks to the developing world, and with firsthand knowledge of the poverty that is the fate of most on our planet. So no one could have considered more usefully the first truly planetary question we’ve ever faced: the rapid heating of the earth from the consumption of fossil fuels. Scientists have done a remarkable job of getting the climate message out, reaching a workable consensus on the problem in relatively short order. But national political leaders, beholden to the fossil fuel industry, have been timid at best—Barack Obama, for instance, barely mentioned the question during the 2012 election campaign. Since 1. Sur une planète tentaculaire, multiculturelle, agressive, personne ne peut être entendu par tous. Mais le Pape François y parvient mieux que personne. Il est à la tête de la religion la plus répandue au monde, et a ainsi 1,2 milliards d’ouailles, mais même (et peut-être plus spécialement) en dehors de l’enceinte du catholicisme, son talent pour des gestes convaincants lui a valu le respect et l’affection d’un très grand nombre de personnes. Depuis son siège de Rome, il s’adresse au monde développé, dont une bonne partie descend de la chrétienté qu’il représente ; mais par ses racines en Argentine, il parle au monde en développement, et avec une connaissance de première main de la pauvreté qui est le sort de tant de gens sur notre planète. 2. Ainsi personne d’autre que lui ne pouvait examiner plus utilement la première question vraiment planétaire à laquelle nous ayons jamais eue à faire face : le réchauffement rapide de la terre dû à l’usage des combustibles fossiles. Les scientifiques ont fait un travail remarquable pour faire passer le message sur le climat, atteignant un consensus pratique sur le problème en un temps relativement court. Mais les leaders politiques nationaux, assujettis à l’industrie des combustibles fossiles, ont au mieux été timides – Barack Obama, par exemple, mentionna à peine la question durant la campagne présidentielle de 2012. Francis first announced plans for an encyclical on climate change, many have eagerly awaited his words. And on those narrow grounds, Laudato Si’ does not disappoint. It does indeed accomplish all the things that the extensive news coverage highlighted: insist that climate change is the fault of man; call for rapid conversion of our economies from coal, oil, and gas to renewable energy; and remind us that the first victims of the environmental crisis are the poor. (It also does Americans the service of putting climate-denier politicians—a fairly rare species in the rest of the world—in a difficult place. Jeb Bush, for example, was reduced to saying that in the case of climate the pope should butt out, leaving the issue to politicians. “I think religion ought to be about making us better as people,” he said, in words that may come back to haunt him.) The pope’s contribution to the climate debate builds on the words of his predecessors—in the first few pages he quotes from John XXIII, Paul VI, John Paul II, and Benedict XVI—but clearly for those prelates ecological questions were secondary. He also cites the pathbreaking work of Bartholomew, the Orthodox leader sometimes called the “green patriarch”; others, from the Dalai Lama to Anglican archbishop Desmond Tutu, have spoken eloquently on this issue as well. Still, Francis’s words fall as a rock in this pond, not a pebble; they help greatly to consolidate the current momentum toward some kind of agreement at the global climate conference in Paris in December. He has, in effect, said that all people of good conscience need to do as he has done and give the question the priority it requires. The power of celebrity is the power to set the agenda, and his timing has been impeccable. On those grounds alone, Laudato Si’ stands as one of the most influential documents of recent times. It is, therefore, remarkable to actually read the whole document and realize that it is far more important even than that. In fact, it is entirely different from what the media reports might lead one to believe. Instead of a narrow and focused contribution to the climate Depuis que François a annoncé son projet d’une encyclique sur le changement climatique, beaucoup ont attendu son message avec impatience. 3. Et sur ces motifs précis, Laudato Si’ ne déçoit pas. Ce document accomplit vraiment tout ce que la couverture médiatique massive soulignait : insister sur le fait que le changement climatique est la faute de l’homme ; appeler à une conversion rapide de nos économies du charbon, du pétrole et du gaz aux énergies renouvelables ; et nous rappeler que les premières victimes de la crise environnementale sont les pauvres. (Il rend également service aux Américains, en mettant en difficulté les politiciens qui nient l’existence des changements climatiques – une race plutôt rare dans le reste du monde. Jeb Bush, par exemple, en a été réduit à dire que le Pape ne devait pas se mêler du climat, et laisser le sujet aux politiciens. « Je pense que la religion devrait s’occuper de nous rendre meilleur en tant que personne,» a t’il déclaré, en des mots qui pourraient bien revenir le hanter.) 4. La contribution du Pape au débat sur le climat s’appuie sur les messages de ses prédécesseurs – dans les premières pages, il cite Jean XXIII, Paul VI, Jean-Paul II et Benoit XVI – mais il est clair que pour eux les questions écologiques étaient secondaires. Il cite aussi le travail novateur de Bartholomée, le leader orthodoxe parfois appelé le « patriarche vert » ; d’autres, du Dalaï Lama à l’archevêque anglican Desmond Tutu, ont aussi éloquemment parlé sur ce sujet. Pourtant, les mots de François tombent comme un pavé dans la mare, et non comme un petit caillou ; ils aident grandement à consolider le mouvement actuel vers une sorte d’agrément pour la conférence sur le climat de Paris en décembre. Il a dit, en fait, que tous les hommes de bonne conscience doivent faire comme lui et donne à la question la priorité qu’elle requiert. Le pouvoir de la célébrité est le pouvoir de dicter l’agenda, et le moment choisi a été impeccable. Simplement pour ces raisons, Laudato Si’ se pose comme l’un des documents les plus influents de ces derniers temps. 5.Il est donc remarquable de lire en fait tout le document et réaliser qu’il est bien plus important que cela. En fait, il est entièrement différent de ce que les medias peuvent laisser penser. Au lieu d’une contribution étroite et limitée au débat sur le climat, il se trouve que ce n’est rien de moins qu’une large debate, it turns out to be nothing less than a sweeping, radical, and highly persuasive critique of how we inhabit this planet—an ecological critique, yes, but also a moral, social, economic, and spiritual commentary. In scope and tone it reminded me instantly of E.F. Schumacher’s Small Is Beautiful (1973), and of the essays of the great American writer Wendell 1 Berry. As with those writers, it’s no use trying to categorize the text as liberal or conservative; there’s some of each, but it goes far deeper than our political labels allow. It’s both caustic and tender, and it should unsettle every nonpoor reader who opens its pages. critique, radicale et hautement convaincante, de la façon dont nous vivons sur cette planète – une critique écologique, oui, mais aussi un commentaire moral, social, économique et spirituel. En termes de portée et de ton, il me rappela instantanément Small Is Beautiful (1973), de E.F. Schumacher, et les essais du grand écrivain américain Wendell Berryi. Comme pour ces écrivains, cela ne sert à rien d’essayer de catégoriser le texte comme libéral ou conservateur ; il y a un peu des deux, mais il va bien au-delà de nos étiquettes politiques. Il est à la fois caustique et tendre, et il devrait déranger tout lecteur attentif qui le feuillette. 6. Les problèmes écologiques qui nous font face ne sont pas, à l’origine, d’ordre technologique, dit The ecological problems we face are François. Non, « Il y a une manière de comprendre la not, in their origin, technological, says vie et l’activité humaine qui a dévié et qui contredit la Francis. Instead, “a certain way of réalité jusqu’à lui nuireii. » Il n’est pas ludditeiii understanding human life and activity (« Peut-on nier la beauté d’un avion, ou de certains has gone awry, to the serious detriment of the world around us.” He gratte-ciels (LS n°103) ?»), mais il affirme que nous is no Luddite (“who can deny the avons succombé à un « paradigme technocratique beauty of an aircraft or a skyscraper?”) (LS n°101) », qui nous conduit à croire « que tout but he insists that we have succumbed accroissement de puissance est en soi to a “technocratic paradigm,” which ‘progrès’…comme si la réalité, le bien et la vérité leads us to believe that “every increase in power means ‘an increase surgissaient spontanément du pouvoir technologique of “progress” itself’…as if reality, et économique lui-même (LS n°105). » Dans ce goodness and truth automatically flow paradigme, « une conception du sujet y est mise en from technological and economic power as such.” This paradigm “exalts relief qui, progressivement, dans le processus logique et rationnel, embrasse et ainsi possède l’objet qui se the concept of a subject who, using logical and rational procedures, trouve à l’extérieur (LS n°106). » Il écrit : progressively approaches and gains control over an external object.” Men and women, he writes, have from the start intervened in nature, but for a long time this meant being in tune with and respecting the possibilities offered by the things themselves. It was a matter of receiving what nature itself allowed, as if from its own hand. In our world, however, “human beings and material objects no longer extend a friendly hand to one another; the relationship has become confrontational.” With the great power that technology has afforded us, it’s become easy to accept the idea of infinite or unlimited growth, which proves so attractive to economists, financiers and experts in technology. It is based on the lie that there is an infinite supply of the earth’s goods, and this leads to the planet being squeezed dry beyond every limit. The deterioration of the environment, L’intervention humaine sur la nature s’est toujours vérifiée, mais longtemps elle a eu comme caractéristique d’accompagner, de se plier aux possibilités qu’offrent les choses elles-mêmes. Il s’agissait de recevoir ce que la réalité naturelle permet de soi, comme en tendant la main (LS n°106). Dans notre monde, cependant, « l’être humain et les choses ont cessé de se tendre amicalement la main pour entrer en opposition (LS n°106). » Avec la grande puissance que la technologie nous a donnée on en vient facilement à l’idée d’une croissance infinie ou illimitée, qui a enthousiasmé beaucoup d’économistes, de financiers et de technologues. Cela suppose le mensonge de la disponibilité infinie des biens de la planète, qui conduit à la “ presser ” jusqu’aux limites et même au-delà des limites (LS n°106). La détérioration de l’environnement, dit-il, n’est que he says, is just one sign of this “reductionism which affects every aspect of human and social life.” And though “the idea of promoting a different cultural paradigm…is nowadays inconceivable,” the pope is determined to try exactly that, going beyond “urgent and partial responses to the immediate problems of pollution” to imagine a world where technology has been liberated to serve the poor, the rest of creation, and indeed the rest of us who pay our own price even amid our temporary prosperity. The present ecological crisis is “one small sign of the ethical, cultural and spiritual crisis of modernity,” he says, dangerous to the dignity of us all. l’un des signes de ce « réductionnisme qui affecte la vie humaine et la société dans toutes leurs dimensions (LS n°107). » Et bien qu’il ne soit « pas permis de penser qu’il est possible de défendre un autre paradigme culturel (LS n°108) », le Pape est bien déterminé à le faire, et d’aller au delà des « réponses urgentes et partielles aux problèmes qui sont en train d’apparaître par rapport (…) à la pollution (LS n°111) » pour imaginer un monde dans lequel la technologie a été libérée pour servir les pauvres, le reste de la création, et en fait le reste d’entre nous qui payons notre propre dette, même au milieu de notre prospérité provisoire. La crise écologique actuelle est « l’éclosion ou une manifestation extérieure de la crise éthique, culturelle et spirituelle de la modernité (LS n°119) », dit-il, dangereuse pour la dignité de nous tous. Thus girded, the pope intervenes in a variety of contemporary debates. Automation versus work, for instance. As he notes, “the orientation of the economy has favoured a kind of technological process in which the costs of production are reduced by laying off workers and replacing them with machines,” which is a sadness since “work is a necessity, part of the meaning of life on this earth, a path to growth.” The example he cites demonstrates the subtlety of his argument. Genetic modification of crops is a way, in a sense, to automate or rationalize farming. There’s no “conclusive proof” that GMOs may be harmful to our bodies; there’s extensive proof, however, that “following the introduction of these crops, productive land is concentrated in the hands of a few owners” who can afford the new technologies. 7. Avec ces arguments, le Pape intervient dans divers débats contemporains. L’automatisation par rapport au travail, par exemple. Comme il le note, « l’orientation de l’économie a favorisé une sorte d’avancée technologique pour réduire les coûts de production par la diminution des postes de travail qui sont remplacés par des machines (LS n°128) », ce qui est triste puisque « le travail est une nécessité, il fait partie du sens de la vie sur cette terre, chemin de maturation, de développement humain et de réalisation personnelle (LS n°128). » L’exemple qu’il cite démontre la subtilité de ses arguments. La modification génétique des cultures est une façon, dans un sens, d’automatiser ou de rationaliser l’agriculture. Il n’y a pas de « preuves irréfutables (LS n°134) » que les OGMs peuvent être dangereux pour nos organismes ; il y a par contre des preuves innombrables que « suite à l’introduction de ces cultures, on constate une concentration des terres productives entre les mains d’un petit nombre (LS n°134) » qui peut se permettre les nouvelles technologies. Given that half the world still works as peasant farmers, this accelerates the exodus off the farm and into hovels at the margins of overcrowded cities; there is a need instead to “promote an economy which favours productive diversity,” including “small-scale food production systems…be it in small agricultural parcels, in orchards and gardens, hunting and wild harvesting or local fishing.” (And lest anyone think this is a romantic prescription for 8. Etant donné que la moitié de la population mondiale travaille encore dans l’agriculture, ceci accélère l’exode des fermes vers les bidonvilles aux marges des cités surpeuplées ; il y a plutôt un besoin de « promouvoir une économie qui favorise la diversité productive … que ce soit sur de petites parcelles agricoles, vergers, ou grâce à la chasse, à la cueillette et la pêche artisanale (LS n°129). » (Et au cas où quelqu’un penserait que ceci est une recette romantique contre la famine, l’Organisation des starvation, the UN’s Food and Agriculture Organization has in the last few years published one study after another showing that small farms in fact produce more calories per acre. Not per dollar invested—if you want to grow rich, you need a spread. But if you want to feed the world, clever peasant farming will be effective.) It’s not just small versus large. The pope insists on giving priority to diverse culture over the “levelling effect on cultures” encouraged by a “consumerist vision,” which diminishes the “immense variety which is the heritage of all humanity.” In words that are somewhat remarkable coming from the head of an institution that first set out to universalize the world, the disappearance of a culture can be just as serious, or even more serious, than the disappearance of a species of plant or animal. The imposition of a dominant lifestyle…can be just as harmful as the altering of ecosystems. Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a publié ces dernières années études sur études montrant que les petites fermes produisent en fait plus de calories par acre. Mais pas par dollar investi – si vous voulez devenir riche, vous devez vous agrandir. Mais si vous voulez nourrir le monde, l’agriculture paysanne intelligente sera efficace.) 9. Ce n’est pas seulement le petit contre le grand. Le Pape insiste pour donner la priorité à une culture diversifiée plutôt qu’au « nivellement des cultures » encouragé par « une vision consumériste », qui diminue « l’immense variété qui est l’héritage de toute l’humanité (éléments de LS n°144). » Il dit, en des termes plutôt remarquables, venant du chef d’une institution qui entreprit à l’origine d’universaliser le monde : la disparition d’une culture peut être aussi grave ou plus grave que la disparition d’une espèce animale ou végétale. L’imposition d’un style de vie hégémonique…peut être autant nuisible que l’altération des écosystèmes (LS n°145). Even more striking, in this regard, is his steadfast defense of “indigenous communities and their cultural traditions. They are not merely one minority among others, but should be the principal dialogue partners, especially when large projects affecting their land are proposed,” because for them land “is a sacred space with which they need to interact if they are to maintain their identity and values.” Compare that attitude with, say, the oil companies now destroying aboriginal land in order to mine Canada’s tar sands. 10. Encore plus frappante, à ce propos, est sa ferme défense des « communautés aborigènes et à leurs traditions culturelles. Elles ne constituent pas une simple minorité parmi d’autres, mais elles doivent devenir les principaux interlocuteurs, surtout lorsqu’on développe les grands projets qui affectent leurs espaces, » parce que pour eux la terre « est un espace sacré avec lequel elles ont besoin d’interagir pour soutenir leur identité et leurs valeurs (LS n°146). » Comparez cette attitude avec, par exemple, les compagnies pétrolières qui détruisent aujourd’hui des terres aborigènes en vue d’exploiter les sables bitumineux du Canada. But the pope is just as radical, given current reality, when he insists on beauty over ugliness. When he demands the protection from development of “those common areas, visual landmarks and urban landscapes which increase our sense of belonging, of rootedness, of ‘feeling at home’ within a city which includes us and brings us together,” he is not just celebrating Frederick Law Olmsted—he’s wading into, for instance, the still-simmering Turkish revolt that began with plans to tear down Istanbul’s Gezi Park and replace it with a mall and luxury apartments. 11. Mais le Pape est tout aussi radical, compte tenu de la réalité actuelle, quand il insiste pour la beauté au lieu de la laideur. Quand il demande la protection contre le développement « des lieux publics, du cadre visuel et des signalisations urbaines qui accroissent notre sens d’appartenance, notre sensation d’enracinement, notre sentiment d’"être à la maison’’, dans la ville qui nous héberge et nous unit (LS n°151), » il ne célèbre pas simplement Frederick Law Olmstediv – il intervient, par exemple, dans la révolte turque toute récente qui commença avec les plans de détruire le parc Gezi d’Istanbul pour le remplacer par un centre commercial et de luxueux appartements. He also insists on giving “priority to public transportation” over private cars. This was the precise phrase used by Jaime Lerner, the visionary mayor of Curitiba, Brazil, when a generation ago he launched the world’s best transit system. His vision of Bus Rapid Transit is now spreading around the world, and it works best precisely where it most inconveniences autos, by insisting on dedicated bus lanes and the like. It makes getting around as easy for the poor as for the rich; every BRT lane is a concrete demonstration of what the Latin American liberation theologians, scorned and hounded by previous popes, once called “the preferential option for the poor.” 12. Il insiste aussi pour donner la priorité aux « transports publics (LS n°211) » sur les voitures privées. Ce fut la phrase exacte utilisée par Jaime Lerner, le maire visionnaire de la ville de Curitiba, au Brésil, quand il lança, il y a une génération, le meilleur réseau de transport en commun du monde. Sa vision du « Bus Rapid Transit » se répand maintenant dans le monde entier, et il fonctionne le mieux précisément là où il gêne le plus les voitures, en privilégiant des lignes de bus dédiées et autres aspects de ce genre. Cela permet de se déplacer aussi facilement pour le pauvre que pour le riche ; chaque ligne du BRT est une démonstration concrète de ce que les théologiens de la libération latino américains, rejetés et combattus par les papes précédents, appelèrent en leur temps « l’option préférentielle pour les pauvres. » The pope is at his most rigorous when he insists that we must prefer the common good to individual advancement, for of course the world we currently inhabit really began with Ronald Reagan’s and Margaret Thatcher’s insistence on the opposite. (It was Thatcher who said, memorably, that “there’s no such thing as society. There are individual men and women and there are families,” and that’s that.) In particular, the pope insists that “intergenerational solidarity is not optional, but rather a basic question of justice, since the world we have received also belongs to those who will follow us.” 13. Le Pape est le plus sévère quand il insiste pour que nous préférions le bien commun au progrès individuel, car évidemment le monde dans lequel nous habitons a réellement commencé avec l’insistance de Ronald Reagan et Margaret Thatcher pour le contraire (Thatcher a dit, de façon mémorable, qu’ « il n’y a pas de société. Il y a des hommes et des femmes individuelles et il y a des familles, » et c’est tout.) Le Pape insiste en particulier sur le fait que la solidarité intergénérationnelle n’est pas « une attitude optionnelle, mais ❲une❳ question fondamentale de justice, puisque la terre que nous recevons appartient aussi à ceux qui viendront (LS n°159). » Think of the limitations that really believing that would place on our current activities. And think too what it would mean if we kept not only “the poor of the future in mind, but also today’s poor, whose life on this earth is brief and who cannot keep on waiting.” We literally would have to stop doing much of what we’re currently doing; with poor people living on the margins firmly in mind, and weighing the interests of dozens of future generations, would someone like to write a brief favoring, say, this summer’s expansion by Shell (with permission from President Obama) of oil drilling into the newly melted waters of the Arctic? Again the only applicable word is “radical.” But as I say, we’ve seen this kind of neither-liberal-nor-conservative radicalism before—from critics like Schumacher or Berry or, in the 14. Réfléchissez aux limitations que croire réellement en cela mettrait sur nos activités actuelles. Et réfléchissez aussi sur ce que cela signifierait si nous ne penserions non seulement « aux pauvres de l’avenir », mais aussi aux « pauvres d’aujourd’hui, qui ont peu d’années de vie sur cette terre et ne peuvent pas continuer d’attendre (LS n°162). » Nous devrions littéralement arrêter de faire la plupart des choses que nous faisons actuellement ; avec les pauvres qui vivent en marge fermement à l’esprit, et en pesant les intérêts de dizaines de générations futures, quelqu’un aimerait-il écrire une lettre en faveur, par exemple, de l’expansion de cet été des forages pétroliers dans les nouvelles eaux libres de l’Arctique par Shell (avec la permission du Président Obama)? Encore une fois, le seul mot applicable est « radical ». 15. Mais comme je l’ai dit, nous avons vu dans le passé du radicalisme ni libéral ni conservateur – depuis les critiques comme celles de Schumacher ou formulation of New York Times columnist David Brooks, other “purveyors of “1970s-style doommongering about technological civilization.” Indeed any serious effort to alter or even critique the largest trends in our civilization is now scorned, often by the theoretical left as well as the right. Brooks is united with, for instance, n+1 editor Mark Greif, who in his recent The Age of the Crisis of Man (2015) heaps contempt on those who would do precisely what the pope undertakes: Anytime your inquiries lead you to say, “At this moment we must ask and decide who we fundamentally are…” just stop. You have begun asking the wrong analytic questions for your moment…. Answer, rather, the practical matters…and find the immediate actions necessary to achieve an aim. For some, this would mean don’t talk about individualism versus the common good; talk about some new scheme for carbon credits. In Brooks and Greif we hear the “real world” talking. By contrast, at least since the Buddha, a line of spiritual leaders has offered a reasonably coherent and remarkably similar critique of who we are and how we live. The greatest of those critics was perhaps Jesus, but the line continues through Francis’s great namesake, and through Thoreau, and Gandhi, and many others. Mostly, of course, we’ve paid them devoted lip service and gone on living largely as before. We’ve come close to change—opinion surveys at the end of the 1970s, for instance, showed that 30 percent of Americans were “pro-growth,” 31 percent “anti-growth,” and 39 percent “highly uncertain,” and President Carter held a White House reception for Schumacher. But Reagan’s election resolved that tension in the usual way, and the progress we’ve made, before and since, has been technological, not moral; people have been pulled from poverty by expansion, not by solidarity. The question is whether the present moment is actually any different, or whether the pope’s words will fall as seeds on rocky ground. Berry jusqu’aux autres « pourvoyeurs du catastrophisme ambiant style années 70 à propos de la civilisation technologique », pour reprendre la formulation du chroniqueur du New York Times David Brooks. Tout effort sérieux de changer ou même critiquer les plus grandes tendances de notre civilisation est bel et bien méprisé, souvent par la gauche théorique aussi bien que par la droite. Brooks est solidaire, par exemple, de l’éditeur n+1 Mark Greif, qui s’en prend à ceux qui voudraient justement faire ce que le Pape entreprend, dans son récent livre The Age of the Crisis of Man (2015) : Chaque fois que vos enquêtes vous amènent à dire, « En ce moment, nous devons nous demander et décider ce que nous sommes fondamentalement...», arrêtez vous simplement. Vous avez commencé à poser la mauvaise question analytique pour votre époque…Répondez plutôt aux questions pratiques…et trouvez les actions immédiates nécessaires pour atteindre un but. Pour certains, cela signifie de ne pas parler de l’individualisme par rapport au bien commun ; parlez de nouveaux schémas pour les crédits carbone. Avec Brooks et Greif, nous entendons le « monde réel » parler. Par contraste, au moins depuis le Bouddha, une série de leaders spirituels a offert une critique raisonnablement cohérente et remarquablement similaire sur ce que nous sommes et comment nous vivons. Le plus grand de ces critiques a peut-être été Jésus, mais la ligne continue avec le grand homonyme de François, et avec Thoreau, et Gandhi, et de nombreux autres. Nous n’avons évidemment accordé à la plupart d’entre eux qu’un intérêt de pure forme, et avons continué à vivre en grande partie comme avant. 16. Nous avons failli changer – des sondages à la fin des années 70, par exemple, montraient que 30% des Américains étaient pour la croissance, 31% contre, et 39% « très incertains, » et le Président Carter a tenu une réception à la Maison Blanche pour Schumacher. Mais l’élection de Reagan a résolu cette tension de la manière habituelle, et le progrès que nous avons fait, avant et depuis, a été technologique, pas moral ; les gens ont été sortis de la pauvreté par l’expansion, pas par la solidarité. La question est de savoir si les temps actuels sont vraiment différents, ou si les mots du Pape tomberont comme des graines If there’s a difference this time, it’s that we seem to have actually reached the edge of the precipice. Schumacher and the visionaries of the 1970s imagined that the limits to growth were a little further off, and offered us strong warnings, which we didn’t heed. sur le sol pierreux. S’il y a une différence cette fois-ci, c’est qu’il semble que nous avons réellement atteint le bord du précipice. Schumacher et les visionnaires des années 70 imaginaient que les limites de la croissance étaient un peu plus éloignées, et nous ont offerts de sérieux Take water, which the pope addresses avertissements, dont nous n’avons pas tenu compte. at length. We probably should not need his words to know that “access to safe drinkable water is a basic and universal human right, since it is essential to human survival.” We all know it should not be wasted, and yet we continue to waste it because doing so is beneficial to the rich and powerful: for instance, insurance companies have planted enormous almond groves across California in recent years even as water supplies have started to shrink, and agribusiness planters have drawn down the aquifers of the Midwest. In the same week that the pope’s encyclical emerged, a huge new study showed that those aquifers are now overdrawn in regions that provide food for two billion people—the data come from satellites measuring the earth’s gravitational field, which means that the water losses are so large they’re affecting the planet on that scale. In the American West alone, the drought has become so serious that last year those satellites showed the evaporation of 63 trillion gallons of groundwater, weighing nearly 240 billion tons, a loss of enough weight that the Sierra Nevada mountains became measurably higher. New data also show that California’s drillers must now go so deep to find groundwater that the supplies they tap have been in the ground for 20,000 years. Or take biodiversity, where the pope rightly notes that “caring for ecosystems demands far-sightedness, since no one looking for quick and easy profit is truly interested in their preservation.” But that alarm sounds somewhat louder when, in the same week as the encyclical, a new study in a prestigious journal found that extinctions were now happening at 17. Prenez l’exemple de l’eau, que le Pape traite longuement. Nous n’avons probablement pas besoin de ses mots pour savoir que « l’accès à l’eau potable et sûre est un droit humain primordial, fondamental et universel, parce qu’il détermine la survie des personnes (LS n°30). » Nous savons tous qu’elle ne doit pas être gaspillée, et portant nous continuons à la gaspiller parce que cela est bénéfique pour les riches et les puissants : par exemple, des compagnies d’assurance ont planté d’énormes bois d’amandiers à travers la Californie dans les années récentes, même si les réserves d’eau ont commencé à diminuer, et les planteurs agroalimentaires ont épuisé les nappes aquifères du Midwest. La même semaine que celle de la parution de l’encyclique du Pape, une étude nouvelle de grande envergure a montré que les nappes aquifères sont maintenant épuisées dans des régions qui produisent de la nourriture pour deux milliards de personnes – les données viennent de satellites qui mesurent le champ gravitationnel terrestre, ce qui signifie que les pertes en eau sont si grandes qu’elles affectent la planète à cette échelle. Rien que dans l’Ouest américain, la sécheresse est devenue si sérieuse que ces satellites ont montrés l’an dernier l’évaporation de 63 milliards de gallons d’eau souterraine, soit environ 240 milliards de tonnes, une perte de poids telle que les montagnes de la Sierra Nevada s’en sont trouvées surélevées de façon mesurable. De nouvelles données montrent aussi que les foreurs de Californie doivent maintenant creuser si profondément pour trouver des nappes phréatiques que les ressources qu’ils puisent gisent dans le sol depuis 20 000 ans. 18. Ou bien prenez la biodiversité, pour laquelle le Pape note avec raison que « la sauvegarde des écosystèmes suppose un regard qui aille au-delà de l’immédiat, car lorsqu’on cherche seulement un rendement économique rapide et facile, leur préservation n’intéresse réellement personne (LS 114 times the normal background rate, and that the planet’s “sixth mass extinction is already underway.” In view of such empirical data, we can understand the pope’s rare flicker of real anger when he refers to those “who turned the wonderworld of the seas into underwater cemeteries bereft of colour and life.” His profound sadness about the inequality among people, and the toll it exacts on the poor, is also undergirded by remarkable new data that separate it from earlier critiques. The data show right now that inequality is reaching almost absurd heights: for instance, the six heirs to the Walmart fortune have more assets than the bottom 42 percent of all Americans combined; the two Koch brothers (together the richest men on the planet) have plans to spend more than the Republicans or the Democrats on the next federal election. If you want to understand why the Occupy movement or the early surge toward Bernie Sanders caught the usual political analysts by surprise, consider those facts. (The pope suggests that “many professionals, opinion makers, communications media and centres and power, being located in affluent urban areas, are far removed from the poor with little direct contact with their problems.”) Above all, the empirical data about climate change make it clear that the moment is ripe for this encyclical. A long line of gurus, of whom Francis is the latest, is now converging with a large number of contemporary scientists; instead of scriptures, the physicists and chemists consult the latest printouts from their computer models, but the two ways of knowing seem to be making the same point. So far we’ve melted most of the sea ice in the summer Arctic, made the oceans 30 percent more acidic, and started the apparently irreversible slide of the West Antarctic Ice Sheet into the surrounding ocean. We are, to put it another way, systematically destroying the largest physical features on the planet, and we are doing it at a rapid pace. n°36). » Mais cette alarme sonne plus fort encore quand, la même semaine que l’encyclique, une nouvelle étude dans un journal prestigieux révéla que les extinctions se produisaient maintenant à un taux 114 fois supérieur au taux normal naturel, et que la « sixième extinction massive d’espèces de la planète est déjà en cours. » En vue de telles données empiriques, nous pouvons comprendre le rare éclat de vraie colère du Pape quand il fait état de ceux qui ont « transformé le merveilleux monde marin en cimetières sous-marins dépourvus de vie et de couleurs (LS n°41). » 19. Sa profonde tristesse à propos de l’inégalité entre les personnes, et le tribut que cela fait payer aux pauvres, s’appuie sur de nouvelles données remarquables, qui la différencient des critiques antérieures. Les données montrent dès à présent que l’inégalité atteint des proportions presque absurdes : par exemple, les six héritiers de la fortune Walmartv ont plus de biens que les 42% de tous les Américains les moins riches réunis ; les deux frères Kochvi (ensemble les hommes les plus riches de la planète) ont des projets de dépenser plus que les Républicains et les Démocrates pendant la prochaine élection fédérale. Si vous voulez comprendre pourquoi le mouvement Occupyvii ou la première vague en faveur de Bernie Sandersviii prirent par surprise les analystes politiques habituels, prenez en compte ces faits. (Le Pape suggère que « beaucoup de professionnels, de leaders d’opinion, de moyens de communication et de centres de pouvoir sont situés loin des pauvres, dans des zones urbaines isolées, sans contact direct avec les problèmes des exclus (LS n°49). » 20. Par-dessus tout, les données empiriques sur le changement climatique montrent clairement que le moment est mûr pour cette encyclique. Une longue lignée de gourous, dans laquelle François est le dernier, converge maintenant avec un grand nombre de scientifiques contemporains ; au lieu des écritures, les physiciens et les chimistes consultent les derniers enregistrements de leurs modèles informatiques, mais les deux manières de connaitre semblent souligner la même chose. Jusqu'à maintenant, nous avons fait fondre la plupart de la glace marine dans l’été Arctique, rendu les océans 30% plus acides, et provoqué le glissement apparemment irréversible de la calotte glaciaire de l’Antarctique ouest dans l’océan environnant. Autrement dit, nous sommes en train de Given that, who’s the realist? The pope, with his insistence that we need a rapid cultural transformation, or David Brooks, speaking for the complacent, with his insistence that “over the long haul both people and nature are better off with technological progress”? The point is, there no longer is any long haul. Those who speak, in the pope’s words, the language of “nonchalant resignation or blind confidence in technical solutions” no longer have a tenable case. What he calls the “magical conception of the market” has not, ultimately, done what Reagan promised; instead it has raised, for the first time, the very real specter of wholesale planetary destruction, of change that will be measured in geological time. It’s quite possible—probable, even— that the pope will lose this fight. He’s united science and spirit, but that league still must do battle with money. The week the encyclical was released, Congress approved, in bipartisan fashion, fast-track trade legislation, a huge victory for the forces of homogenization, technocracy, finance, and what the encyclical calls “rapidification.” It’s not that markets shouldn’t play a part in environmental solutions: everyone who’s studied the problem believes that the fossil fuel industry should pay a price for the damage carbon does in the atmosphere, and that that price, if set high enough, would speed up the transition to renewable energy. But the climate movement has largely united behind plans that would take that money from the Exxons of the world and return it to all citizens, which would have the effect of giving poor and middle-class people, who generally use less fossil fuel, a substantial net gain. The new fast-track agreements, by contrast, apparently explicitly forbid new climate agreements as a part of trade negotiations. Anyway, if the outcome of the realworld battle is uncertain, the pope carries the intellectual contest. Brooks, for instance, makes the centerpiece of détruire systématiquement les plus grands ensembles physiques de la planète, et nous le faisons à un rythme rapide. 21. Ceci étant, qui est réaliste ? Le Pape, disant avec insistance que nous avons besoin d’une transformation culturelle rapide, ou David Brooks, parlant pour la complaisance, disant avec insistance que « sur le long terme, les êtres humains et la nature sont mieux lotis avec le progrès technologique ? » Le fait est qu’il n’y a plus de long terme. Ceux qui parlent, en reprenant le Pape, le langage de « la résignation facile, ou la confiance aveugle dans les solutions techniques (LS n°14) », n’ont plus à présent un cas défendable. Ce que le Pape appelle la « conception magique du marché (LS n°190) » n’a pas réalisé, en fin de compte, ce que Reagan promettait ; au lieu de cela, elle a agité, pour la première fois, le spectre vraiment réel d’une destruction planétaire massive, d’un changement qui sera mesuré en temps géologique. Il est bien possible – probable, même – que le Pape perdra son combat. Il a uni la science et la spiritualité, mais cette alliance doit encore se battre avec de l’argent. Dans la semaine de la publication de l’encyclique, le Congrès a approuvé, de façon bipartite, une législation économique accélérée, une énorme victoire pour les forces d’homogénéisation, de la technocratie, de la finance, et le reflet de ce que l’encyclique nomme « rapidaciónix (LS n°18). » Ce n’est pas que les marchés ne devraient pas jouer un rôle dans les solutions environnementales : tout ceux qui ont étudié le problème pensent que l’industrie des combustibles fossiles devrait payer le prix pour les dommages occasionnés à l’atmosphère par le carbone, et que ce prix, s’il est suffisamment élevé, accélèrerait la transition vers les énergies renouvelables. Mais le mouvement climatique s’est largement uni derrière des plans qui prendraient l’argent des Exxons du monde et le redistribueraient à tous les citoyens, ce qui aurait pour effet de donner un gain net substantiel aux pauvres et aux gens de la classe moyenne, qui utilisent généralement moins de combustibles fossiles. Les nouveaux accords accélérés, au contraire, interdisent apparemment explicitement que de nouveaux accords climatiques fassent partie des négociations commerciales. De toute manière, si le résultat de la bataille du his attack on the encyclical the notion that the promising technocratic approach is, fortunately, expanding fracking, because burning natural gas produces less carbon than burning coal. This is scientifically obtuse (as I explained in these pages, an emerging body of evidence shows that fracking instead liberates vast quantities of methane, an even more potent greenhouse gas2), but in any event the extent of the damage we’ve already done to the climate means we no longer have room for slightly less damaging fossil fuels. We have to make the leap to renewable power. And the good news is that that’s entirely possible. Thanks to the engineers whose creativity the pope celebrates, we’ve watched the price of solar panels fall 75 percent in the last six years alone. They’re now cheap enough that a vast effort, rooted in pragmatic physics, could ensure before the decade was out that there would hardly be a hut or hovel that lacked access to energy, something that the fossil fuel status quo has failed to achieve in two hundred years. Such a change would be carried out by small-scale entrepreneurs of just the sort the pope has in mind when he describes the dignity of work. And it would mean a very different world. Instead of centralized power in the hands of a few oil and gas barons like the Koch brothers, the earth would draw its energy from a widely diffused and much more democratic grid. Building that system in time would require aid to the poorest nations to jumpstart the transition. It would require, for instance, a world much like the one the pope envisions, where concern for the poor counts as much as, in Brooks’s sad words, the “low motivations of people as they actually are.” Brooks, Reagan, and Thatcher summon the worst in us and assume that will eventually solve our problems—to repeat Brooks’s sad phrase, we should rely on the “low motivations of people as they actually are.” Pope Francis, in a moment of great crisis, speaks instead to who we could be individually and more monde réel est incertain, le Pape mène le débat intellectuel. Brooks, par exemple, utilise comme pièce maîtresse de son attaque contre l’encyclique la notion que l’approche technocratique prometteuse est, heureusement, l’expansion de la fracturation hydraulique (fracking)x, parce que brûler du gaz naturel produit moins de carbone que de brûler du charbon. Ceci est scientifiquement obtus (comme je l’explique dans ces pages, un ensemble de nouvelles preuves montre que la fracturation hydraulique libère plutôt de vastes quantités de méthane, un gaz à effet de serre encore plus puissantxi ), mais de toute façon l’étendue des dégâts que nous avons déjà faits au climat signifie que nous n’avons plus de marge pour accommoder des combustibles fossiles légèrement moins polluants. Nous devons faire le saut vers l’énergie renouvelable. 22. Et la bonne nouvelle est que c’est tout à fait faisable. Grâce aux ingénieurs dont le Pape célèbre la créativité, nous avons vu le prix des panneaux solaires baisser de 75% rien que dans les six dernières années. Ils sont maintenant suffisamment bon marché qu’un gros effort, basé sur de la physique pragmatique, pourrait garantir, avant la fin de la décade, qu’il n’y aurait plus de hutte ou de masure manquant d’accès à l’énergie, ce que les combustibles fossiles n’ont pas réussi à faire en deux cent ans. Un tel changement serait effectué par des entrepreneurs de petite taille, exactement ceux que le Pape a en tête quand il décrit la dignité du travail. Et cela signifierait un monde bien différent. À la place d’un pouvoir centralisé dans les mains de quelques barons du pétrole et du gaz comme les frères Koch, la Terre tirerait son énergie d’un réseau largement répandu et bien plus démocratique. Construire ce système à temps exigerait de l’aide aux nations les plus pauvres, pour démarrer la transition. Cela exigerait, par exemple, un monde ressemblant beaucoup à celui que le Pape envisage, dans lequel la préoccupation pour le pauvre compte autant que les « faibles motivations des gens telles qu’elles sont en réalité », pour reprendre les mots tristes de Brooks. 23. Brooks, Reagan, Thatcher en appellent au pire en nous et supposent que cela va finalement régler nos problèmes – pour répéter la triste phrase de Brooks, nous devrions compter sur les « faibles motivations des gens telles qu’elles sont en réalité. » Le Pape François, dans un moment de grande crise, s’adresse importantly as a species. As the data suggest, this may be the only option we have left. au contraire à ceux que nous pourrions être individuellement et, plus important encore, en tant qu’espèce. Comme le suggèrent les données, c’est peut-être bien la seule option qui nous reste. iVoir Prophet in Kentucky, The New York Review, June 14, 1990. iiLaudato Si’ (LS), n° 110 ; tous les passages extraits de Laudato Si’ correspondent au texte publié en français par le Vatican (http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/encyclicals/documents/papafrancesco_20150524_enciclica-laudato-si.html) (NdT). iiiDu mouvement clandestin, apparu en Angleterre au début du XIXeme siècle, appelé luddisme, qui était contre les machines ; par extension, terme utilisé pour designer les opposants aux nouvelles technologies (source : Wikipedia, Luddisme) (NdT). ivFrederick Law Olmsted (1822-1903) était un architecte-paysagiste américain, célèbre entre autres pour la construction de Central Park, à New York (source : Wikipedia) (NdT). vWalmart est une entreprise américaine multinationale spécialisée dans la grande distribution (source : Wikipedia) (NdT). viCharles G. Koch et David H. Koch possèdent Koch Industries, société privée américaine avec des filiales dans des domaines très variés : génie pétrolier, génie chimique, finance, courtage de matières premières, élevage (source : Wikipedia) (NdT). viiLe mouvement Occupy est un mouvement international de protestation sociale, principalement dirigé contre les inégalités économiques et sociales (source : Wikipedia) (NdT). viiiBernie Sanders est un homme politique américain, candidat aux primaires du Parti démocrate pour l'élection présidentielle américaine de 2016 (source : Wikipedia) (NdT). ixEn espagnol dans le texte original de Laudato Si’ (NdT). xLa fracturation hydraulique est une technique d’extraction du pétrole ou du gaz naturel (NdT). xiVoir “Why Not Frack?,” The New York Review, March 8, 2012. xiiNote du traducteur (tirée d’une lettre adressée le 10 juin 2016 par Roger Simon à Jacques VALLÉE) : « J’ai noté deux points pas tout à fait corrects dans cet article. Le premier, quand l’auteur affirme, à propos des papes précédents, que « pour eux les questions écologiques étaient secondaires » (voir n° 4). Il suffit de lire les textes cités par le Pape François pour voir qu’ils s’en sont sérieusement préoccupés, dans le contexte respectif qui était le leur. Le deuxième, plus « subversif », est à propos des théologiens de la libération (voir n° 12) « scorned and hounded by previous popes ». Cela peut donner l’impression que la théologie de la libération était parfaite ! »