I. La liberté de circulation sur le domaine public routier
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I. La liberté de circulation sur le domaine public routier
La Faculté de Droit Virtuelle est la plate-forme pédagogique de la Faculté de Droit de Lyon www.facdedroit-lyon3.com Fiche à jour au 18 décembre 2006 FIICCHHEE PEEDDAAG GO OG GIIQ QU UE E VIIR RTTU UE ELLLLE E Diplôme : Licence en droit, 5ème semestre Matière : Droit administratif des biens Web-tuteur : Augustine Mpessa SEEAANNCCEE NN°8 : LA CIRCULATION SUR LE DOMAINE PUBLIC ROUTIER SO OM MM MA AIIR RE E I. LA LIBERTE DE CIRCULATION SUR LE DOMAINE PUBLIC ROUTIER ........................................................................................3 A. UNE LIBERTE CONSTITUTIONNELLEMENT GARANTIE DANS LE CADRE DE LA LIBERTE D’ALLER ET DE VENIR. Conseil constitutionnel, Décision n°2005-532 DC, 19 janvier 2006 B. LE DELIT D’ENTRAVE A LA CIRCULATION. 3 3 4 L.7 du code de la route Erreur ! Sign C.E., 10 mai 1996, Sté des autoroutes Paris-Rhin-Rhône 5 II. UNE CIRCULATION GRATUITE SUR DOMAINE PUBLIC ROUTIER ........................................................................................6 Date de création du document : année universitaire 2006/07 Consultez les autres fiches sur le site de la FDV : www.facdedroit-lyon3.com 2 A. L’ADMINISTRATION NE PEUT EN AUCUN CAS SOUMETTRE A PEAGE L’USAGE NORMAL DES VOIES PUBLIQUES C.E., 22 février 1991, commune Bagnères-de-Luchon B. 6 6 L’APPLICATION DE LA GRATUITE DANS LA PARTICIPATION A UNE MANIFESTATION SUR UNE VOIE PUBLIQUE Réponse ministérielle n°35606, JOAN Q, nov. 1999, p. 6603 05/09/2007 - 11:43:2808_La_circulation_sur_le_domaine_public_routier.doc 2 6 6 2/7 3 L’usage du domaine public est en principe libre (I) et doit normalement être gratuit (II). I. La liberté de circulation sur le domaine public routier La liberté de circulation est constitutionnellement garantie (A). Ainsi toute entrave est constitutive d’un délit sanctionné légalement (B). A. Une liberté constitutionnellement garantie dans le cadre de la liberté d’aller et de venir La liberté de circulation est au nombre des principes garantis par le Conseil constitutionnel comme étant une composante de la liberté d’aller et de venir. Cette liberté a été notamment réaffirmée par le Conseil constitutionnel dans une décision du 19 janvier 2006. Conseil constitutionnel, Décision n°2005-532 DC, 19 janvier 2006 « ….14. Considérant que l'article 8 de la loi déférée donne une nouvelle rédaction à l'article 26 de la loi du 18 mars 2003 susvisée ; qu'il permet aux services de police, de gendarmerie ou des douanes de mettre en oeuvre " des dispositifs fixes ou mobiles de contrôle automatisé des données signalétiques des véhicules prenant la photographie de leurs occupants, en tous points appropriés du territoire..." ; qu'il prévoit que " l'emploi de tels dispositifs est également possible par les services de police et de gendarmerie nationales, à titre temporaire, pour la préservation de l'ordre public, à l'occasion d'événements particuliers ou de grands rassemblements de personnes, par décision de l'autorité administrative " ; qu'il précise que les données ainsi collectées peuvent faire l'objet de traitements automatisés ; qu'il détermine les conditions de leur exploitation et de leur conservation, en fonction du résultat du rapprochement effectué avec les traitements automatisés de données relatifs aux véhicules volés ou signalés ; 15. Considérant que, selon les requérants, ces dispositions, en organisant " un système généralisé de contrôle " qui s'étend aux personnes occupant les véhicules concernés, méconnaissent l'article 66 de la Constitution, la liberté d'aller et venir, ainsi que le respect de la vie privée ; qu'ils soutiennent également qu'elles sont entachées d'incompétence négative ; 16. Considérant, en premier lieu, que, par sa nature même, la procédure de recueil automatisé de données relatives aux véhicules instituée par l'article 8 de la loi déférée ne saurait porter atteinte ni à la règle, posée par l'article 66 de la Constitution, selon laquelle nul ne peut être arbitrairement détenu, ni à la liberté d'aller et venir protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789 ; 17. Considérant, en deuxième lieu, que le dispositif en cause peut être utilisé tant pour des opérations de police administrative que pour des opérations de 4 police judiciaire ; qu'il se trouve placé, à ce dernier titre, sous le contrôle de l'autorité judiciaire ; qu'ainsi, en assignant à ce dispositif la mission de faciliter la répression des infractions, l'article contesté, à la différence de l'article 6 précédemment examiné, ne porte pas atteinte au principe de la séparation des pouvoirs ; 18. Considérant, en troisième lieu, qu'il appartient au législateur d'assurer la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public, notamment à la sécurité des personnes et des biens, et la recherche d'auteurs d'infractions, toutes deux nécessaires à la sauvegarde de droits et de principes de valeur constitutionnelle, et, d'autre part, l'exercice des libertés constitutionnellement garanties, au nombre desquelles figure le respect de la vie privée ; 19. Considérant qu'en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu, d'une part, prévenir et réprimer le terrorisme et les infractions qui lui sont liées, d'autre part, faciliter la constatation des crimes, des infractions liées à la criminalité organisée, du vol et recel de véhicules et de certains délits douaniers ; qu'il leur a également assigné comme finalité la recherche des auteurs de ces infractions ; 20. Considérant que les enregistrements seront effacés au bout de huit jours si les caractéristiques permettant l'identification des véhicules, ainsi collectées, ne figurent ni dans le fichier national des véhicules volés ou signalés, ni dans la partie du système d'information Schengen relative aux véhicules ; que les critères de cette recherche seront les caractéristiques des véhicules et non les images des passagers ; que les données n'ayant pas fait l'objet d'un " rapprochement positif " ne pourront être consultées pendant ce délai, sous réserve des besoins résultant d'une procédure pénale ; que seules les données ayant fait l'objet de ce rapprochement seront conservées ; que la durée de cette conservation ne pourra alors excéder un mois, sauf pour les besoins d'une procédure pénale ou douanière ; que seuls auront accès au dispositif, dans les limites ci-dessus décrites, des agents des services de la police et de la gendarmerie nationales individuellement désignés et dûment habilités ; que les traitements automatisés des données recueillies seront soumis aux dispositions de la loi du 6 janvier 1978 susvisée … » B. Le délit d’entrave à la circulation Il découle de ce qui précède que le non respect de la liberté de circulation dans les conditions normales constitue un délit d’entrave à la circulation. 1. L’énoncé de la règle Le délit d’entrave à la circulation est une règle que l’on retrouve à l’article L412-1 du Code de la route. Article L412-1 du Code de la route « Le fait, en vue d'entraver ou de gêner la circulation, de placer ou de tenter de placer, sur une voie ouverte à la circulation publique, un objet faisant obstacle au passage des véhicules ou d'employer, ou de tenter d'employer un moyen quelconque pour y mettre obstacle, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 euros d'amende. » 5 2. L’application de la règle est cependant stricte En effet, le fait pour des manifestants d’installer des barrages filtrant aux péages en empêchant la perception des frais de péages ne constitue pas un délit d’entrave. C.E., 10 mai 1996, Sté des autoroutes Paris-RhinRhône « Considérant qu’aux termes de l’article 92 de la loi susvisée du 7 janvier 1983 : « L’état est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements armés ou non armé, soit contre les personnes, soit contre les biens » ; qu’aux termes de l’article L. 7 du Code de la route : « Quiconque aura, en vue d’entraver ou de gêner la circulation , placé ou tenté de placer , sur une voie ouverte à la circulation publique , un objet faisant obstacle au passage des véhicules ou qui aura employé ou tenté d’employer un moyen quelconque pour y mettre obstacle, sera puni d’un emprisonnement de trois mois à deux ans et d’une amende de 1000 à 30000 francs, ou de l’une de ces deux peines. » Considérant que, par l’arrêt attaqué, la cour administrative d’appel de Nancy a rejeté les conclusions de la société requérante tendant à la mise en jeu, sur le fondement des dispositions précitées de l’article 92 de la loi du 7 janvier 1983, de la responsabilité de l’Etat à raison de la manifestation qui a, le 24 novembre 198, perturbé la perception normale des péages à la plate-forme de Dijon-Sud de l’autoroute A 31 ; que , pour rejeter lesdites conclusions, la cour s’est fondée, d’une part, sur ce que les agissements des manifestants ne pouvaient être regardés comme constitutifs du délit prévu par les dispositions précitées de l’article L. 7 du Code de la route, d’autre part, sur ce que l’argumentation de la société requérante tirée de ce que les manifestants auraient commis d’autres délits, n’était pas assortie de précisions suffisantes permettant d’en apprécier le bien-fondé ; Considérant en premier lieu, que pour juger que les manifestants n’avaient pas commis le délit d’entrave à la circulation prévu à l’article L.7 du CODe de la route, la cour a déclaré qu’il ressortait des pièces du dossier que « si les manifestants ont empêché la perception du péage dû par les automobilistes, la circulation n’en a pas été entravée ou gênée, dès lors que le passage des péages entraîne par lui-même un ralentissement, voire un arrêt des véhicule ; que les manifestants ont seulement mis à profit cette circonstance pour exposer leurs doléances ; que de tels agissements ne peuvent dès lors être qualifiés de délit d’entrave ou de gêne à la circulation au sens des dispositions de l’article L. 7 du code de la route. » 6 II. Une circulation gratuite sur domaine public routier L’usage gratuit du domaine public est une règle fondamentale et constitutionnellement garantie. Ainsi, l’administration ne peut en aucun cas y déroger en soumettant l’usage normal des voies publiques à un prix (A). De même, toute participation à une manifestation se déroulant sur la voie publique doit être exempt de tout frais (B). A. L’administration ne peut soumettre à péage l’usage normal des voies publiques Cette règle est valable tant en matière de stationnement sur la voie publique quand le prix pratiqué est manifestement exorbitant… C.E., 22 février 1991, commune Bagnères-de-Luchon «… Considérant qu’en vertu de l’article L.131-5 du code des communes, le maire de Bagnière-de-Luchon a légalement pu soumettre au paiement d’une redevance le stationnement des véhicules sur le territoire de sa commune à des emplacements spécialement réservés à cet effet à l’occasion de l’arrivée de l’étape Pau-Superbagnières du 73e tour de France ; que par contre, en subordonnant par son arrêté du 10 juin 1986 l’accès de la route départemental n°46, à partir du pont de Ravi, à une « autorisation spéciale » délivrée contre le paiement d’un droit de stationnement fixé à 100F pour les véhicules de tourisme et de 300 à 500F pour les cars selon leur nombre de places, le maire de Bagnière-de-Luchon a institué un véritable droit de péage sur le circulation des véhicules ; que cette décision est dépourvue de base légale. » B. L’application de la gratuité dans la participation à une manifestation sur une voie publique …De même, toute participation à une manifestation se déroulant sur la voie publique doit être exempt de tout frais. C’est du moins ce qu’a précisé le ministre de l’intérieur dans une réponse ministérielle suite à une question qui lui fût posée dans ce sens. Réponse ministérielle n°35606, JOAN Q, nov. 1999, p. 6603 « La liberté d’aller et de venir a la valeur d’un principe constitutionnel, comme l’a rappelé le Conseil Constitutionnel dans sa décision du 12 juillet 7 1979 relative à la loi relative à certains ouvrages reliant les voies nationales ou départementales. Le tribunal des conflits (préfet Alsace c/Colmar, 9 juin 1986) et le Conseil d’Etat ( ministre de l’intérieur et de la décentralisation c/M. Peltier , 8 avril 1987)ont qualifié la liberté d’aller et de venir de liberté fondamentale. La liberté d’aller et de venir se concrétise notamment par la liberté e circulation sur la voirie routière. La voirie communale appartient au domaine public artificiel de la commune, puisqu’elle est la propriété de cette commune, affecté à l’usage du public et spécialement aménagée à l’effet de permettre la circulation du public. La soumission de la circulation sur la voie publique à un péage porte atteinte à la liberté d’aller et de venir et au principe de valeur législative de gratuité de l’utilisation collective du domaine public. Pour la voirie routière, ce principe a été énoncé par la loi du 30 juillet 1880 qui a prévu le rachat des péages existants et a interdit à l’avenir tout péage. …. La liberté de circulation peut cependant être limitée, comme le rappelle l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, la liberté consistant à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. Seule la loi peut déterminer les limites de l’exercice de cette liberté. La loi du 12 juillet 1979 relative à certains ouvrages reliant les voies nationales ou départementales justifie l’institution d’une redevance pour son usage. L’article 17 de la loi du 19 août 1986 portant dispositions diverses relatives aux collectivités locales a étendu la possibilité d’instituer un péage pour la circulation sur les ouvrages d’art du domaine public routier communal. L’ensemble de ces dispositions a été codifié aux articles L. 153-1 et suivant du Code de la voirie routière. En dehors de ce cas spécifique prévu par la loi, une autorité administrative ne peut pas, même sous le couvert des nécessités de l’ordre public, instituer de dérogations à la gratuité de la circulation sur les voies publiques. Ainsi, le Conseil d’Etat a annulé un arrêté municipal de la commune de Bagnière-de-Luchon qui avait institué un droit de péage pour l’accès à une route, lieu d’arrivée d’une étape du Tour de France (22 février, commune de Bagnière-de-Luchon c/Loquet). Aucune des dispositions du Code général des collectivités territoriales, y compris celles relatives à la police de la circulation en agglomération, ne permet de soumettre à un droit de péage la circulation sur la voie publique, en l’espèce dans les rues commerçantes et pittoresques du centre historique d’une ville. Le fait qu’une manifestation se tienne dans ces rues ne sauraient justifier l’existence d’un droit de péage pour pouvoir circuler sur les voies publiques concernées. En outre, dans la mesure où la tenue de ces manifestations pourrait s’analyser juridiquement comme une utilisation privative du domaine public communal au profit de leurs organisateurs, l’existence d’un droit de péage est d’autant plus illégale qu’elle se révèle incompatible avec la destination normale des voies publiques qui sont normalement affectées à la circulation. C’est ainsi que le Conseil d’Etat a jugé, dans un arrêt du 3 mai 1963, commune de SaintBrévin-les-Pins, qu’une autorisation d’occupation privative du domaine public ne peut être légalement accordée que si, compte tenu de l’intérêt général, elle se concilie avec les usages conformes à la destination du domaine que le public est normalement en droit d’y exercer. En revanche, une manifestation peut être subordonnée à un droit d’entrée si elle se déroule sur un emplacement délimité physiquement par des moyens adéquats permettant de contrôler uniquement l’accès des personnes qui souhaitent déambuler dans cet espace clos. En tout état de cause, quelle que soit l’organisation retenue, il est nécessaire que la liberté de circulation du public sur la voie publique soit préservée de manière à ce qu’il puisse accéder et sans entraves à l’ensemble des rues et des monuments. Cette création est mise à disposition sous un contrat Creative Commons. Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale 2.0 France Vous êtes libres : de reproduire, distribuer et communiquer cette création au public de modifier cette création Selon les conditions suivantes : Paternité. Vous devez citer le nom de l'auteur original de la manière indiquée par l'auteur de l'oeuvre ou le titulaire des droits qui vous confère cette autorisation (mais pas d'une manière qui suggérerait qu'ils vous soutiennent ou approuvent votre utilisation de l'oeuvre). Pas d'Utilisation Commerciale. Vous n'avez pas le droit d'utiliser cette création à des fins commerciales. 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